Ma fille Saint Pétersbourg 9
Date 17-06-2012 09:46:56 | Catégorie : Nouvelles confirmées
| Ma fille (Saint Pétersbourg 9)
Le Péterhof
Je t'écris avec bonheur tant je me sentais empressée de te conter ma belle journée au palais du Péterhof et dans ses parcs enchanteurs. Je rentre une fois de plus épuisée, et une fois encore si heureuse et comblée. Ma chère Katia aujourd'hui, s'est occupée de moi, comme une maman qui envoie son enfant au centre aéré. Nous sommes parties tôt ce matin après qu'elle ait tout préparé et organisé, belle amie que ma katia, tout de même; Elle respecte avec gentillesse mes désirs d'aller seule, aussi souvent que possible et me donne volontiers ses bons conseils avant d'aller à son travail. Pour cette visite, elle me conseillait une journée complète, et je crois que cela n'est encore pas suffisant. Elle me prépara donc un petit pique-nique de gourmandes, puisque elle et moi, nous le sommes, elle rangea bien les petits sandwichs et la boisson qu'elle m'avait préparés dans un adorable petit sac en tissu, vichy à carreaux rouge et blancs. Je pris par ses deux anses le coquet petit panier de tissu et je le rangeais dans mon gros sac noir informe qui prenait toujours place sur mon épaule, puis mon appareil photo à la main, elle me conduisit en voiture jusqu'à l'embarcadère des bateaux conduisant à Pétrodvorets, petite ville à L'ouest de saint Pétersbourg, en bordure du Golfe. Arrivées, sur les quais de la Néva, face au palais de l'Ermitage, je vis de nombreux bateaux à quai. Ekatérina, acheta mon billet, et je dégustais avec plaisir, ce sentiment nouveau pour moi d'être ainsi maternée. Si tu savais combien ce changement de rôle me sembla plaisant et combien j'étais attentive à cette sensation rare pour moi d'être guidée comme une enfant. Le billet acheté, elle me le tendit, et devine ma chère fille, ce qu'elle me dit : " fais attention, à ne pas rater le bateau de retour, installe-toi maintenant avant que.. demande... si tu cherches..." je n'écoutais pas les recommandations suivantes, ne pas écouter les recommandations sont la norme pour une enfant, n'est-ce pas ? Mais, vois-tu je me sentais si heureuse de tous ses soins, que je savais déjà que le reste de la journée ne serait que des instants de bonheur. Je montais donc à bord du premier bateau, le traversais, pour arriver sur un deuxième que je traversais également pour m'installer enfin, dans le dernier qui est un aéroglisseur. Il me semble, que ces bateaux furent très utilisés en Russie dans les années 60 et qu'ils avaient éblouis tout le monde par leur technique innovante, puisqu'ils se déplacent sur le tapis d'air qu'ils génèrent eux-mêmes et ainsi nous épargnent les secousses de la houle et l'inconvénient du mal de mer. Bien que moi, tu le sais je ne suis jamais malade lorsque je voyage, hormis cette horreur, du décollage des avions, qui ne voudra jamais cesser. Le bateau était grand et encore peu occupé, je pus donc me placer sur la proue, dans la grande cabine du pont avant, fermée par de larges vitres circulaires,tout comme si je me trouvais dans un immense bocal à poisson. Les fauteuils profonds et confortables étaient rotatifs et pourvus d'une petite table. Bientôt dans ce salon vinrent s'installer des voyageurs mais aucun ne parlait une langue autre que le russe. Le départ du bateau se fit en silence et celui-ci commença à glisser sur la Néva, pendant que je regardais les bâtiments, quais, églises, boulevards et ponts que j'avais tant arpentés à pied s'éloigner. La rivière s'ouvrit, puis nous fûmes sur le Golfe, les vagues étaient formées et hautes, des bateaux de pêche rentraient vers la ville après leur nuit de pêche en mer. Le ciel et l'eau se confondaient et la lumière était partout, une lueur diffuse bleue gris étincelante qui faisait briller les eaux du golfe et les nuages. Je regardais de tous côtés et je pris de nombreuses photos durant la petite heure que durant le voyage. Nous arrivâmes bientôt sur un débarcadère où je vis de nombreuses personnes déambuler sur la grande plate forme de bois. Passer la passerelle du bateau, une fois à terre, alors que j'étais déjà en route pour le lieu de ma visite, alors que je m'éloignais assez vite, je me rappelais, enfin, les conseils de ma Katia, et donc, je revins soudain sur mes pas, pour m'assurer de l'heure de départ de mon bateau et de son numéro, puisque mon retour devait se faire sur celui-ci et celui-ci seulement. Ces détails, d'importance faisaient partie des recommandations de Katia, recommandations que tout à mon rôle de petite fille, je n'avais écouté que d'une oreille trop distraite ! je constatais, une fois encore, que c'est toujours un exercice compliqué de se faire comprendre de personnes dont nous ne parlons pas la langue et qui ne comprennent la nôtre, et de surcroît ne parlent pas un seul mot d'anglais. Mais bon, avec des gestes,des mimiques la communication se fait en définitive, il faut juste un peu plus de temps. Je suis donc repartie et après le chemin du débarcadère je me retrouvais sur une route de terre, suivie par les touristes présents. Je ressentis une forte sensation de bonheur à voir cette nature, ce parc, cette forêt d'automne, ses arbres merveilleux, jaunes et or, quelques uns encore verts, mais peu, et ce tapis de feuilles dorées! L'odeur de la terre et des arbres me faisait respirer par grandes inspirations goulues. C'est là que je vis pour la première fois l'appétit que les russes ont pour la nature. sous les arbres, femmes, hommes et enfants se tressent des couronnes, des chapeaux de feuilles, avec une habilité et une rapidité qui sous entend une certaine pratique de ces jeux de la nature en automne. D'autres étaient couchés, disons vautrés dans l'épaisseur des feuilles et s'amusaient à s'en recouvrir comme des enfants jouent avec le sable. Tout était propre et harmonieux, je pense que les fées doivent se réfugier dans ce lieux la nuit. Puis en suivant le chemin, je découvris au fond d'une perspective tracée par le canal que je suivais, canal traversé de ponts et de nombreux jets d'eau, là bas, au fond, je vis un immense palais couleur crème et or, apparemment sur une petite hauteur. Ce palais de Péterhof, qui fut tout d'abord, et cela dès 1705, la résidence d'apparat de l'empereur Pierre le grand est une construction absolument merveilleuse. A l'époque ce palais d'une grande magnificence était une des résidences les plus somptueuses des monarques européens. La construction immense, que je découvrais de plus en plus immense, alors que je m'en approchais, donne malgré sa taille, sa longueur, sa superficie, une impression de légèreté et d'harmonie. Les fenêtres très nombreuses ajoutent encore à la clarté de l'ensemble, le balcon central sur la façade reste fin, léger et ne fait qu'affiner plus encore l'aspect général de cette si grande bâtisse. Rien en elle, d'écrasant ou de trop imposant, je n'y ai vu que de la grâce, et de l'équilibre.
Et surtout au pied de la demeure elle même, est installée, un très grand jeu de jets d'eau merveilleux qui se terminent en cascade dans un immense bassin. Le canal et les jets vus à l'arrivée n'étaient que le prélude à cette déferlante pacifique d'eau jaillissante au ciel en longue flèches d'eau claire sur le ciel bleu, dans une vasque immense, où trône au centre une très haute statue d'or représentant Samson, qui ouvre et déchire la gueule du lion. L'histoire veut que ce soit là , le symbole de la Russie victorieuse sur le lion suédois. Le lion suédois, bien sur, ma fille, ce n'est vraiment pas la vision que nous, Français, avons de cette population nordique souvent regardée aujourd'hui comme le symbole de la démocratie paisible, mais chaque peuple à ses propres ennemis et cela donne à penser sur la réalité de nos haines et rancoeurs et sur leurs justifications. Le lion vaincu occupe avec son vainqueur le centre exact de cette perspective très large. ce grand ensemble du bassin, des jets d'eau et des statues est entouré de chaque côté, de deux grands escaliers qui montent, l'un par la droite, l'autre par la gauche, jusqu'au palais, avec pour escorte sur les marches des statues couvertes d'or. L'ensemble est éblouissant et force le regard. Je me suis arrêtée un long moment subjuguée par le lieu. Je montais lentement, très lentement, en mitraillant de mon appareil photos, tout ce que mes yeux voyaient. Je fis lentement le tour et gagnais le grand parc à l'arrière. Sans oublier d'observer les toits qui, ici, sont toujours décorés avec une fantaisie débordante, une exubérance que nous ne connaissons pas sur nos trésors architecturaux. Je photographiais les girouettes extraordinaires, les bulbes peints de blancs et d'or, les immenses croix orthodoxes et les symboles nombreux, croissants, coqs, lions... qui ornent les toitures et nous surplombent. En fait, les demeures sous ces climats sont comme les habitants, fort bien chapeautées, alors que chez nous nos bâtisses les plus luxueuses ont tendance à être plus simplement couvertes, ou même à aller "nue-tête".
C'est là que je me rappelais qu'il était temps d'ouvrir le joli petit panier "du petit chaperon rouge" que m'avait confectionné ma maman d'un jour. Je trouvais un banc avec vue sur le parc, les jets d'eau, le palais et ses toits fabuleux. Voici le bon endroit, me suis-je dis, je choisi mon angle de vue le plus agréable, je m'assis un instant, et j'ai mangé de bon appétit. Je pris, tout en me restaurant, un peu de temps pour regarder les gens, et je réalisais, alors que les chapeaux de feuilles étaient portés par beaucoup de têtes de tous âges, mais je remarquais aussi que la coquetterie des femmes russes ne cesserait jamais de m'étonner. Car,celles-ci marchaient presque toutes dans la terre, sous les arbres, dans les gravillons de l'allée, dans les tas de feuilles, sur des sols mal commodes, dans des conditions en fait périlleuses, et malgré tout, toutes étaient perchées sur des talons aiguilles d'une hauteur insensée. Mon Dieu! mon dieu! me disais-je, mais elles sont équilibristes, ou bien elles vont se casser les chevilles, mais pourquoi ces risques et cette torture ? Mais pour plaire évidement ! et oui pour être aimée encore et toujours ! Je crois, vois-tu ma fille que c'est selon moi trop cher payer, pour une simple illusion. Mais cela fait certainement la fortune des orthopédistes kinésithérapeutes russes, de tous poils. Assise sur mon banc, les jambes au repos, je levais droit mes deux pieds; les jambes tendues devant moi, et je regardais songeuse mes deux confortables bottes noires, de style cavalière, à haute tige, mais talons plats et satisfaite de mon aisance, je me remis debout. Il faut garder, bon pied, bon oeil pour se réjouir encore des merveilles cachées là derrière les bosquets; Il y avait qui m'attendait, et pour mon grand bonheur, le labyrinthe de vigne vierge, l'exposition avec des photos géantes des jardins du monde. Merveilleux et curieux jardins photographiés avec art par un Français dont j'ai oublié le nom, les statues en quantité, encore de nouveaux jets d'eau, les cascades de la montagne d'or, et celle de la montagne de l'échiquier, les fontaines Adam et Eve, la fontaine du soleil, la fontaine de la pyramide, les longues allées de statues, plus loin encore le pavillon de Marly, et le pavillon de l'Ermitage... des petits kiosques... de verdure, de chalets de bois, et surtout les arbres, tous ces arbres brillants de lumières. Je voulais tous les photographier, tous !
J'ai marché, marché des heures, je me suis enfoncée dans les bosquets sous les frondaisons, je me suis éloignée tant, si loin, que je suis allée suivre le rivage, où les eaux grises du golfe rejoignent une longue grève de sable et de cailloux gris blancs, dans ce lieu de bout du monde où jouent les mouettes et les canards de toutes sortes.
Puis sans préambule, mon alerte intérieure se mit en route, le temps s'écoulait, la lumière descendait; sortie de ma rêverie bucolique, je me suis dis que le bateau allait repartir et que tout à mes découvertes je ne savais même plus à quelle distance je me trouvais de l'embarcadère, si j'en étais très éloignée ou non. Soudain, donc j'accélérais le pas, et au loin je vis d'autres personnes faire de même, en parfait mouton de Panurge je me sentis rassérénée à la vue de mes semblables en marche et je m'employais rapidement à les rejoindre. J'arrivais malgré tout la dernière et je vis que le bateau était à quai, entouré d'une brume grise de plus en plus épaisse, le ciel noirci était sans lune et les oiseaux étaient nichés depuis un moment, les planches de bois du quai et de la passerelle maintenant déserts résonnaient et craquaient sous mes pieds.
Je sentis que mes jambes renâclaient une fois de plus, depuis six Heures du matin elles me portaient sans que je les ménage et elles me disaient stop! Ma fille, je n'ai pas du passer loin de la catastrophe, et pas loin de rester seule à quai, je me suis encore trop attardée, car à peine montée à bord, et avant même que je ne me sois assise, le bateau était déjà au large ! Je ne crois pas que je serais rentrée à la nage; n'est-ce pas ? Le retour était calme, le bateau portait sa cargaison de promeneurs fatigués, sans paroles, je suis restée le nez prés de la vitre à tenter de deviner le paysage liquide qui m'entourait, percé ça et là d'un falot tressautant au mat d'un bateau solitaire et ballote dans l'écume du crépuscule. Je restais immobile, rêveuse, heureuse et blottie sur moi-même comme un chat qui ronronne son bonheur Ma fille Chérie, je sais que je vais maintenant dormir profondément et je veux garder toutes ses belles images pour te les offrir.
Lydia Maleville
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