Petites pièces burlesques II
Date 03-06-2015 14:00:00 | Catégorie : Nouvelles confirmées
| 2ème pièce
(Terrasse de café. Chaise et petite table ronde. Urbus, le serveur est debout dans un coin, presque invisible. Entre Nomados.) Nomados (regardant le public) – Ah ! Que de monde ! Toujours bondé ce café ! Pas une table de vacante. (Fait mine de chercher) les gens passent leur temps dans les cafés ; on dirait qu’ils n’ont que ça à faire! (Temps) non, mais, quel monde ! (Temps) Tiens ! Une chaise ! (S’y précipite et s’attable) Urbus (à part) – Ah ! Enfin un client ! (va à côté de la table, à Nomados) monsieur ! Nomados – Bonjour monsieur. (Ne passe aucune commande) Urbus (Attend patiemment) Nomados - Vous désirez ? Urbus – Ah ça c’est vert ! Le monde à lent fort ! (dignement) que puis –je vous servir ? Nomados – Un café. Urbus – Tout de suite. Nomados – Attendez s’il vous plaît ! Urbus – oui ? Nomados – En fait, c’est un mazagran que je voudrais ! Urbus - Plaît-il ? Nomados - Un mazagran. Dans le sens vieilli. Urbus – Le boss n’aimerait pas cela ! Nomados – Ah bon ? Pourtant, c’est bon, un café dans un verre et dilué avec de l’alcool ou de l’eau ! Urbus (ne pipe mot) Nomados – Moi, je m’astreins à l’eau, vous comprenez, ma religion prohibe le vin ! Urbus – Nous ne servons pas pareilles saloperies ! Le proprio l’a interdit. Nomados – Comme c’est dommage ! C’est que, voyez-vous, le docteur m’a prescrit un traitement à base de mazagran ; un le matin et un autre en début d’après-midi ; à siroter en lieu public ! Bon pour le cafard, attendu que j’ai le mal du pays… Urbus – Je ne vous ai pas demandé de me narrer votre vie. Nomados (sans paraître froissé) – Alors pour pas que vous ayez des problèmes avec votre patron, apportez-moi un café et un ballon de rouge. (À part) le verre servira à des fins que je suis seul à connaître ! Urbus (revient avec la commande) – Voilà monsieur ! Votre ballon de rouge ! Et (contourne la table) votre café. (Va se mettre respectueusement en face de Nomados) Vous ne voulez pas (avec emphase) un verre d’eau ? Nomados – Monsieur, que voulez-vous que je fasse avec un verre d’eau ? Urbus – à votre guise. (S’éloigne) (Nomados passe un petit moment à observer le verre, puis, après hésitation, il tend la main et en caresse tendrement le bord avec l’index. Son mouvement devient alors sûr ; à plein-main, il masse sensuellement le ballon du haut vers le bas et du bas vers le haut. Urbus s’approche et regarde faire le client d’un air incrédule. Nomados cesse son mouvement. Urbus retourne au fond de la terrasse.) Nomados – Ô seigneur ! Vous qui savez tout ! Aussi bien les secrets des cieux où vous trônez que ceux des profondeurs de la terre ! Pas un événement ne pourrait échapper à votre savoir ! Pas un balbutiement, pas une palpitation ni un battement dans cet univers démesuré ne sauraient se faire à votre insu ! Aucune pensée, noble ou vile ; aucun acte, spontané ou intentionnel, ne puissent s’élaborer sans que vous en saisissiez l’essence ! Que votre infinie bienveillance tienne non pour égarement, mais pour corvée à laquelle m’oblige cette cure, le verre que je vais ingurgiter ! (boit son verre d’un trait. Grimace) Palsambleu ! Urbus – Tout de suite, monsieur ! (apporte un autre verre) voilà , jeune homme. Nomados – Merci monsieur. (Regarde le serveur puis le verre plusieurs fois. Pensif) On ne peut pas nier qu’il a de la suite dans les idées. Urbus – c’est une marque de primauté (temps. A Nomados, avec insistance) Vous êtes sûr que vous ne voulez pas de verre d’eau ? Nomados (outré) – C’est une idée fixe, ce verre d’eau, ou quoi ? Urbus – Comme vous voulez. (S’éloigne) Nomados (caresse le verre) – honoré ensuite honni ; pourquoi ? (Arrête ses câlins. Temps) Dieu, vous savez que c’est pour ma guérison ! (attrape le verre et l’avale) Le premier est fort le deuxième semble plus doux au palais ! Urbus – vieux château ! (Nomados se lève et va doucement au milieu de la scène puis s’immobilise face au public, une petite lumière blafarde enveloppe le lieu. Le client lève les bras dans l’attitude d’un crucifié. Le cafetier vient vers lui.) Urbus – Veuillez regagner votre table ! Nomados (comme sortant d’un songe) – Excusez-moi ; le vin. (Va s’asseoir d’une allure indolente. Temps) Siuoplé ! Urbus – Oui ? (s’approche) Nomados – Est-ce qu’il y a une église dans les environs ? Urbus – C’est pour un attentat ? Nomados – Toujours le mot pour rire ? Urbus – On n’a pas gardé les cochons ensemble ! Nomados – Je viens pourtant ici tous les jours. (Temps) j’ai péché et j’ai comme un urgent besoin de me confesser ! Urbus – Je m’en fous ! (Temps) Nomados – Combien je vous dois ? Urbus – Rien. C’est la maison qui régale ! Nomados – Ah ! (temps) eh bien au revoir et merci. (Sort en claudiquant) Urbus – votre café ! Nomados (s’arrête et se retourne) – Gardez la monnaie ! (sort) Urbus (hausse les épaules et se met à débarrasser) – Tiens ! C’est vrai que son café a refroidi ! (Rideau)
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