Le Père Roquet (fable)
Date 29-10-2014 20:00:00 | Catégorie : Poèmes confirmés
| Durant les tristes jours de la Grande Famine, Qui frappa les forêts jusqu'au moindre comté, Du Lion jusqu'au Rat et jusqu'à la vermine, Les animaux souffraient de la calamité. On s'aperçut alors, qu'au dessus du désastre, Tous les êtres ailés planant parmi les astres, N'étaient pas affectés par l'absence de blé.
Le Lion, aussitôt, par ce fait est troublé. Devant tous ses sujets, il accuse, d'emblée, Les oiseaux convoqués devant son assemblée. Comme c'était son droit, il les condamne à mort, Et on lui obéit, à travers et à tort. Mais le père Roquet, qui avait la berlue, Se croyant de Noé, la descendance élue, Évitant tous les traits, finissait son Parcours, En ardentes prières qu'il faisait tous les jours.
Par respect pour son âge et l'or de son plumage, Le roi daigna parler à ce vieux personnage : « Tu auras la vie sauve, en passant aux aveux. - Quel défaut, Ô ! Seigneur ! ai-je, à vos justes yeux ? - Celui d'appartenir à la race qui vole ! - Depuis bien des années je ne vis que d'obole. Sire, je n'ai point vu le ciel que d'ici-bas, Dédaignant de voler, je ne fais que des pas. J'ai renié les nues, préférant ma caverne, Où je puis m'adonner, auprès de ma lanterne, À la contemplation du Livre du Très Haut ! Cet acte pourrait-il me coûter l'échafaud ? - Que fais-tu de tes plumes ? - Je m'en sers pour écrire. - Ces serres acérées ? - Las ! que pourrais-je dire ? -Ma foi … Tu as des ailes. - Bah ! Je m'en éventaille. - Tu possèdes un bec. - Je l'ouvre quand je bâille. Je ne m'en sers que peu. » Le lion apaisé Par la déposition que lui fait l'accusé, Et la sincérité qu'il mit à se défendre, Est prêt, à ce dernier, la liberté, lui rendre. Hélas ! Dans le ciel bleu, fuyant vers le lointain, Un corbeau trop bavard, qui apparut soudain, Et qui, par ses paroles, ne croyait que bien faire, Lance au vieillard sauvé : « Sauvez-vous, vite, frère ! » Cela en fut assez, en ce climat de guerre, Pour faire condamner notre bon père Roquet À mourir sur le champ, en tant que perroquet.
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