
SIRIUS (Episode 4 et fin)
Date 18-11-2013 14:01:37 | Catégorie : Nouvelles
| SIRIUS (Episode 4 et fin)
Le retour, Dans la chambre du rez-de-chaussée, de l'autre côté de l'entrée qui donnait sur la cuisine, le cerceuil où reposait André était veillé par madame CALUS et sa soeur : vieilles filles toutes les deux, grenouilles de bénitier notoires, préposées à l'accompagnement des défuns du village et de quelques communes voisines. Elles étaient habillées en noir de circonstance. Le curé avait quatre églises à servir, aussi, leur confiait-il le goupillon et la branche de buis : chaque visiteur pouvait ainsi "arroser" le trépassé à sa guise. Pauvre André lui qui n'aimait pas l'eau ..... Elles étaient là depuis la veille, étaient reparties à regret le soir et revenues aujourd'hui pour le reste de la journée avant la levée du corps par les pompes funèbres. Nous étions en fin d'après-midi et, alors que l'épicière repartait vers CHADRAC, le corbillard entra justement dans la cour de la ferme. Léontine et Alphonse se serrèrent très fort dans les bras l'un de l'autre et se regardèrent longuement, puis s'étreignirent de nouveau. - Alphonse je suis heureuse que tu sois venu .... Tu as l'air bien fatigué .... c'est une longue route n'es-ce pas ? Viens te mettre au frais dans la maison... - Quelle chaleur ma petite Léontine ... quelle chaleur ! Le corbillard manoeuvra et recula devant la porte. Le chien se dérangea cette fois-ci en jappant plusieurs fois pour montrer sa désapprobation. Léontine pris la valise de son frère. Appuyé sur sa canne il traversa les quelques mètres le séparant de la maison. Les deux employés rouge de sueur ôtèrent leur casquette quand Léontine franchit la porte. Elle les laissa refermer le cerceuil, sans entrer dans la chambre. Elle avait servi un grand verre d'eau fraîche à Alphonse que celui-ci s'empressa d'avaler à grandes rasades. Les deux soeurs CALUS apparurent dans l'embrasure de la porte : - Fernand vient nous chercher. Nous allons vous laissez Léontine .... avez-vous besoin de quelque chose ? - Non merci mesdames ... merci pour tout. Elles disparurent comme deux fantômes dans l'entrée pour attendre leur chauffeur. - Alphonse tu voulais peut-être voir André avant que l'on referme le cerceuil ? s'excusa Léontine. Il ne répondit pas, assis, affalé dans le fauteuil funeste. Il finissait son verre par petites gorgées. - Je suis fatigué Léontine. Fatigué par autant de chaleur, et ce voyage trop fatiguant pour moi et mes vieux os .... Alphonse était installé dans le fauteuil du "malheur", mais Léontine n'osa pas le déranger " un fauteuil est un fauteuil - pensa-t-elle " Elle accompagna les bonnes paroisiennes à l'extérieur, leur frère Fernand venait d'arriver, puis regarda le corbillard soulever la poussière de la cour et s'éloigner en direction du village. Elle entra dans la cuisine en épongeant son front. - André va rester à l'église cette nuit ... nous l'enterrerons demain à onze heures .... allez je vais te chercher quelques bons oeufs bien frais pour le dîner .... il faut manger tout de même ! - Oh ! je n'ai pas très faim tu sais .... j'ai surtout besoin d'une bonne nuit de sommeil ... - Teu, teu, teu .... je vais à la grange soulever quelques poules, je vais te faire une grosse omelette ..... tu sais avec du fromage comme celle que nous faisait maman ... allez reposes toi, je ne serai pas longue. Dans la grange la brouette renversée avec les deux bottes de paille était toujours là . Tout était figé comme une photographie. Elle récupéra dans son tablier les oeufs promis à son frère et ne s'attarda pas. Devant la porte, le chien d'habitude assez impassible était agité. - Alors çà va mieux ....tu récupère un peu de ton voyage ? Voilà de beaux gros oeufs bien ..... Elle ouvrit la main qui maintenait la poche formée dans son sarrau, sans terminer sa phrase, le son de sa voix resta en suspend et les oeufs s'écrasèrent sur le carrelage, comme dans un ralenti. Elle regarda Alphonse sans vraiment comprendre, ou plutôt oui, elle comprit, horrifiée. Cette fois-ci ses yeux ne restèrent pas secs. Elle s'agenouilla à côté du fauteuil, lui prit la main, la serra très fort, l'embrassa,........... puis cria, de toutes ses forces. FIN Cuga
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