Le cannibale chapitre 15
Date 24-05-2017 09:19:16 | Catégorie : Nouvelles confirmées
| Laure Morel, la mère de Marco, s’était marié avec Mathieu Morel, et avait accepté de porter le nom de son mari. A la connaissance du cannibale le couple filait le parfait amour, tous deux avaient de temps en temps comme dans tous les couples des dissensions. Mais ils arrivaient toujours à des compromis qui les satisfaisaient tous les deux. Le bonheur de Laure se lisait souvent sur son visage, pourtant quand il vit sa mère, Marco y lit une angoisse intense. Elle était venu à pied à l’improviste, Marco n’habitait pas loin de chez sa génitrice, son domicile principal se situait à moins d’un kilomètre de chez elle. En outre il venait lui rendre visite en général deux fois par mois, il ne s’attendait pas à sa venue, car il était venu la voir il y a un jour seulement. Elle appela sur l’interphone alors que le mangeur d’homme était en train de passer l’aspirateur dans sa chambre. L’appartement du cannibale faisait cent mètres carrés, il était composé de cinq pièces et d’un couloir. Le plafond et les murs étaient décorés par une tapisserie de couleur jaune, il y avait du carrelage partout, y compris dans la chambre.
Marco avait fait ce choix par souci pratique, les taches sur ce type de surface s’avéraient beaucoup plus faciles à nettoyer. Marco avait plus de cinq cents livres dans son logement dont des éditions rares et anciennes. Le livre dont il était le plus fier, s’avérait une édition de l’Avare imprimé durant le vivant de son auteur Molière, au dix-septième siècle. Le mangeur d’homme collectionnait beaucoup de romans, mais il aimait aussi les bandes dessinées. Ses préférées étaient les albums Tintin d’Hergé et les Astérix de Goscinny et d’Uderzo. Sa pièce de collection la plus précieuse parmi ses bandes dessinées, s’avérait un album de la première édition de Tintin chez les Soviets. En outre le cannibale avait un faible pour les bibelots, comme par exemple des statuettes de Laki le dieu cannibale, qui avait dévoré ses propres enfants, non poussé par la faim, mais par la curiosité de connaître le goût que ses descendants avaient. Laki était une divinité africaine adorée par une tribu d’animistes, les Bobalons qui furent exterminés par des musulmans fanatiques. La pièce la plus grande de l’appartement était l’atelier qui faisait cinquante mètres carrés. Il contenait des dizaines de statues, certaines œuvres d’art faisaient moins de cinq centimètres, mais il y avait en quelques-unes mesurant plus d’un mètre cinquante.
Bien qu’il en ait les moyens de manger tous les jours de la volaille ou du porc, le réfrigérateur de Marco contient peu de viande. Le cannibale pensait que manger ce type d’aliment plus d’une fois par semaine était mauvais pour la santé. Cette croyance lui venait de sa grand-mère paternelle Huguette, avec qui il s’entendait très bien. Cette femme débordait d’énergie, à l’âge de quatre vingt ans, elle faisait quotidiennement un parcours de cinq kilomètres à vélo, contenant trois côtes raides. Ses voisins la surnommaient la dame en noir, car depuis la mort de son mari en 1994, elle portait constamment des vêtements noirs, en signe de deuil. Une bonne partie des bibelots que possédait Marco était un héritage de sa défunte grand-mère. Le bibelot préféré du cannibale était un vase où figuraient des éléphants dessinés. Marco malgré des souhaits répétés n’avait pas pu assister aux derniers jours d’Huguette qui mourut en 1997. Le père du mangeur d’homme avait interdit à sa femme et Marco, de rendre visite à la mourante. Ce fut le seul acte de tyrannie qu’il commit à l’égard de sa famille, mais Marco et Laure mirent des mois avant de lui pardonner son geste.
Le cannibale était assez coquet, il possédait de nombreuses chaussures, ainsi il avait une vingtaine de paires, en plus il avait beaucoup de tenues à sa disposition. Il fallait dire que c’était un homme qui allait souvent à des soirées et des fêtes. Alors pour paraître à son avantage, il faisait des efforts, et ne lésinait pas sur la dépense, il n’avait pas peur de se maquiller pour paraître plus beau. La visite de sa mère bien qu’elle soit une heureuse surprise, causa du souci à Marco, car elle avait un air crispé et se retenait de pleurer. La mère du cannibale restait belle malgré le fait qu’elle ait plus de soixante ans, et que les soucis aient favorisé l’apparition de rides sur son visage. Elle arborait un tailleur vert chic et portait des escarpins à hauts talons, ses chaussures étaient noires à l’extérieur, et blanches à l’intérieur. Elle posa sur un porte-manteau son manteau rouge. Lorsqu’elle se mit à parler se fut avec une voix tremblante.
Laure : Marco j’ai un grand, un immense service à te demander. En fait je voudrais que, euh. Marco : Vas y maman, tu sais bien que je ne peux rien te refuser. Laure : Je voudrais que tu tues Mathieu. Marco : Quel Mathieu ? Tu ne parles tout de même pas de ton compagnon Mathieu Morel ? Laure : Si c’est bien lui que je veux que tu élimines. En entendant ces mots, Marco se demanda s’il rêvait, la légère douleur ressentie par son pincement, lui prouvait le contraire. Une foule de questions assaillit l’esprit du cannibale, il pensait que Laure sa mère était très amoureuse de Mathieu. Quel acte affreux avait commis Mathieu pour que sa bien-aimée cherche à le tuer ? Marco : Est-ce que Mathieu t’a trompé avec une autre femme ou un homme ? Laure : Mathieu est d’une fidélité exemplaire, il n’a pas hésité à repousser les avances d’Irma Savon, une femme extrêmement séduisante, par amour pour moi. Marco : Mathieu a-t-il levé la main sur toi ? Laure : Pas du tout, il se comporte comme un gentleman à mon égard, mais il a fait une découverte qui met en péril notre existence. Mathieu a lu mon journal intime, et découvert que toi et moi étions des cannibales. Marco : Je croyais que ton journal intime était à l’abri dans un coffret qui se fermait à clé. Mathieu l’a-t-il crocheté ? Laure : Je ne crois pas, Mathieu à ma connaissance ne possède aucune compétence en serrurerie, je pense plutôt que j’ai laissé par négligence le coffret ouvert. Lorsque Mathieu m’a trouvé, j’ai dit que le contenu de mon journal était une histoire inventée, mais il ne m’a pas cru à cause de mon tic. Marco : C’est bizarre, je pensais que grâce à de la volonté et de l’entraînement, tu avais perdu ton tic qui consistait à souffler par le nez quand tu mentais. Laure : C’est exact, mais sans m’en apercevoir j’ai développé un nouveau tic. Lorsque je mens le pouce de ma main droite se met à bouger. Voyant que je ne pourrais pas entourlouper par la parole Mathieu, je l’ai assommé, et je lui ais fait avalé du Jimax, un somnifère liquide. Il devrait encore être dans les vapes pendant trois à quatre heures. J’ai eu beau réfléchir, je ne vois que deux issues possibles à la situation dans laquelle je me trouve, soit je laisse vivant Mathieu, et celui-ci nous dénoncera à la première occasion, soit il meurt ce qui préserve notre liberté à toi et moi. Marco : Il y a une troisième option qui s’offre à nous tenter de faire oublier à Mathieu, ce qu’il a vu et entendu ces dernières vingt quatre heures. Laure : Comment comptes-tu réaliser ce genre de chose ? En l’hypnotisant ? Marco : Je n’ai aucune compétence en hypnotisme, en outre il existe des personnes qui sont extrêmement résistantes aux effets de l’hypnose. Et puis l’hypnose possède une efficacité limitée en ce qui concerne l’oubli forcé. Non je pense plutôt utiliser du GHI pour lui faire perdre la mémoire. Laure : Tu es sûr de l’efficacité de ce produit ? Marco : Dans 99,99% des cas, celui qui prend du GHI, perd tout souvenir de ce qui s’est passé pendant les vingt quatre à quarante huit heures précédant l’ingestion. La perte des souvenirs est irréversible, impossible de se rappeler quoi que ce soit.
Marco fit prendre du GHI à Mathieu. La mère du cannibale Laure prétendit que pendant une promenade avec Mathieu, il avait été assommé par un voleur. Son amnésie sur les événements des dernières vingt quatre heures s’avérait le résultat du choc qu’il avait reçu sur la tête. Mathieu goba sans broncher cette histoire, il porta plainte contre un homme imaginaire, roux, haut de deux mètres, avec une balafre au visage. Le mangeur d'homme recommanda à Laure de lui donner son sac à main pour valider la thèse du vol.
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