La vie est un manège (chapitre 1)
Date 19-04-2013 08:30:00 | Catégorie : Nouvelles
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Chapitre 1 : Accident
28 Août 2010, dans l'après-midi.
Aujourd'hui je m'occupe de faire fonctionner le Crasy Horse. Un manège très beau. Il est composé d'une trentaine de chevaux colorés basculant d'avant en arrière. Pour y accéder, il faut passer un portillon et monter quelques marches. Dans ma cabine, le ventilateur est allumé. Je profite du courant d'air et en même temps je jette des petits coups d'œil sur le manège pour vérifier que tout le monde se tienne correctement. Je m'assois sur mon tabouret. Je lutte pour ne pas m'endormir. La chaleur suffocante et surtout la fatigue n'arrangent pas les choses.
Le manège stoppe sa course. Je me lève et me dirige vers la sortie. J'ouvre la porte et je laisse filer les clients. Comme d'habitude, les enfants courent. J'en rattrape quelques-uns au vol pour éviter des égratignures aux genoux ou aux coudes. Les parents quant à eux sont épuisés. Ils prennent tout leur temps pour descendre du cheval, faire le tour du manège et enfin sortir. Tout le monde dehors, je vais ouvrir aux fauves qui attendent. Ils se précipitent. Je suis obligée de les bloquer afin de vérifier leurs tailles et de demander des accompagnateurs. Ceci fait, je referme. Je fais le tour du manège pour vérifier si tout va bien, puis me réinstalle sur mon siège et mets en route le manège. Ouf ! Un peu de répit. Trois minutes et demie plus tard, l'attraction s'arrête et rebelote.
Je sors de la cabine, je descends une marche puis sans savoir pourquoi, sans savoir comment, je me retrouve au sol. Je regarde autour de moi, j'aperçois des regards inquiets de la part des clients. J'essaie de me relever mais une douleur lancinante m'en empêche. La seule chose que je peux faire c'est de m’asseoir, le dos en appui contre les marches brûlantes. La radio que j'avais dans la main, se trouve à quelques mètres de moi. J'essaie de l'attraper mais je laisse rapidement tomber quand la douleur atteint son paroxysme. Rapidement, les larmes commencent à déferler sur mes joues. Une femme arrive vers moi. Je vois juste qu'elle est blonde. Elle me demande si ça va. Je lui réponds négativement.
- Il faut appeler quelqu'un ? Me demande-t-elle.
- Avec la radio, lui dis-je.
- Marc, viens vite, la demoiselle a besoin d'aide, crie-t-elle à l'adresse d'un homme. C'est mon mari, il est policier et sait comment fonctionne ce bidule, m'explique-t-elle.
L'homme arrive me regarde rapidement prend la radio et dit :
- bonjour, je suis avec une de vos employées. Elle a trébuché et je crois qu'elle s'est cassée quelque chose.
La voix de Gary se fait entendre mais je ne distingue pas ses paroles.
L'homme regarde les alentours, cherchant le nom de l'attraction. Il me regarde, alors je lui souffle :
- Crasy Horse.
Il répète le nom puis cette fois je perçois la réponse du secouriste : « j'arrive ».
L'homme pose la radio à mes côtés puis m'examine. Il me retire ma basket, puis ma chaussette. Mes poings se ferment. Ma cheville me fait atrocement mal... Petit à petit, mon cerveau occulte complètement les personnes qui m'entourent. Dés que l'on me parle, je vois des lèvres bouger mais, j'entends seulement des bourdonnements. Malgré tout je fais des signes de tête montrant que j'ai compris. Je m'aperçois à peine que l'on me transporte. La seule véritable chose qui est présente, comme une ombre au tableau, un défaut que l'on remarque dés la première seconde, c'est bien entendu ma blessure mais, surtout une douleur obsédante, qui m'emporte dans un autre monde. Un monde d'inconscience.
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Sans perdre de temps, j'attrape le sac de premier secours et je cours au lieu indiqué. Je descends puis je monte les marches à pas de course. Je passe devant une foule qui observe le spectacle se déroulant devant elle, puis je rentre précipitamment dans l'enceinte de l'attraction. En apercevant l'opératrice qui est blessée mon cœur rate soudainement un battement. Je me reprends rapidement puis me glisse auprès d'elle.
J'examine sa cheville qui a doublé de volume, puis je lui pose une batterie de questions. Ses seules réponses sont des oui et des non de la tête. Je me mords la lèvre inférieure pour ne pas montrer mon désarroi, mon impuissance face à cette situation. Je dois garder la tête froide pour l'aider au maximum. Avec l'aide de François, on la dépose sur une chaise puis on la transporte vers le véhicule de secours en s'aidant des accoudoirs. Avec délicatesse, je l'assois dans la voiture, j'en profite pour lui essuyer des larmes du bout des doigts. François démarre très lentement, tandis que Charles tient la jambe d'Alisée. Je prends une grande expiration puis remercie rapidement les personnes pour leur aide et cours de nouveau vers le poste de secours. Au loin j'aperçois la voiture. J'ouvre la porte et je prépare ce dont j'ai besoin pour la soulager au mieux, c'est-à -dire, des compresses froides.
Dès que le véhicule arrive, on la bascule sur une autre chaise un peu plus confortable et on la rentre dans la douceur et la fraîcheur de la pièce. Je demande à tout le monde de sortir afin de lui enlever un poids supplémentaire. Je m'assois en face d'elle et je pose sa jambe sur la mienne. Sans attendre davantage, je lui appose la compresse. Son corps se raidit. Je lève mes yeux vers son visage, elle est méconnaissable. Ce qui me peine énormément. Ses yeux sont bouffis, rouges et des perles continuent leurs descentes. Les compresses ne font aucun effet sur la douleur. Je m'en aperçois quand je jette un œil sur ses petites mains qui serrent les accoudoirs. Je sens un picotement dans le coin de mes yeux. J'avoue que je retiens mes larmes. Subitement, son regard se perd dans le mien. Je me sens mal à l'aise car elle vient tout juste de comprendre le désordre qu'elle réalise en moi. Je baisse les yeux et me concentre sur sa cheville devenue rouge écarlate à cause du froid.
Quelques minutes plus tard, une ambulance stoppe devant le poste de secours. Mes collègues de la caserne où je travaille me saluent et je leur explique rapidement ce qui se passe. Je me mets du côté droit de la chaise d'Alisée afin de la rassurer au maximum. Pendant ce temps mes compagnons s'activent autour d'elle : tension, pouls, immobilité de la cheville...
Tout en l'apaisant de nouveau et en lui tenant la main, je l'accompagne jusqu'au véhicule rouge. Ils la montent prestement en évitant les gestes brusques et la sanglent pour lui épargner de se retrouver au sol pendant le voyage. Avant que le véhicule démarre, je demande à mes confrères de prendre bien soin d'elle puis les regarde s'éloigner lentement.
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