La vague
Date 01-01-1970 17:40:00 | Catégorie : Poèmes
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Décrire une vague au bord de la plage, une seule, petite, malingre, ridicule, insignifiante, coincée entre deux autres tout aussi chétives. Non pas la suite incessante des vagues qui s'échouent épuisées sur cette plage sans relief. NON ! Cette vague (ou cette autre, peu importe) mais une seule. Dire que je l'ai choisie serait exagéré. Ce serait plutôt elle qui se serait désignée par je ne sais quel signe ou quelle absence de signe. Désignée par son insignifiance un peu plus marquée que la moyenne, sa façon anonyme de s'approcher de la grève comme poussée par les suivantes, indifférente à son propre sort.
D'où vient-elle ? Pourquoi devait-elle aujourd'hui, à cette minute prendre forme, prendre rang, naître pour mourir aussitôt ? Je dis prendre forme parce qu'elle diffère trop des vagues du large. Amples, larges, calmes. Elle ne s'apparente en rien à cette houle.Pourtant entre elles aucune rupture visible. Là bas les vagues larges et ici les vagues étroites, rapprochées, épuisées. Ma vague serait-elle l'écho d'une vague plus forte ? La part amoindrie d'une houle puissante ? Un lambeau de tempête ? Peut-être les plages calmes accueillent-elles sans cesse de tels restes dérisoires.
Ma vague s'approche. Hier menaçante, aujourd'hui caressante, soumise, alanguie. Elle s'approche et s'élance à l'assaut du dernier obstacle. Celui quelle ne franchira pas. Les galets, le sable de la plage, par d'autres vagues usés avant elle et d'autres après, toujours.
Mais pour elle cette plage est la première et la dernière. Alors elle s'élance de tout son long, en vain. Elle ne changera rien à rien. Elle s'élance et se perd, disparaît dans les galets. Des milliers de galets à la fois l'absorbent à peine bercés par son élan.
Le bruit est doux. Liquide et solide à la fois, sans heurt. Doux comme le bruit d'une vague unique sur la plage
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