Distique de Laeziza…
Deux mésanges, sur une branche, chantonnaient la suave distique du printemps. Laeziza s’affairait, pour ne pas arriver en retard au lieu du rendez-vous.
Une famille de Rif Eltahti ( le rif d’en bas ) l’avait invitée à une fête. Une fête pas comme celle de Mawazine ou celle en France de 2018. Qui sentait l’odeur d’un complot joué à l’insu de l’Homme. D’un univers à l’envers, l’odeur de l’homme « augmenté » par la technologie, par la matérialité et par l’égoïsme. C’était une frairie entre modestes gens savourant la vie au rythme pacifique des quatre saisons… Une fois assise autour d’une table à pieds bas. - "Pourquoi à pied bas se dit-elle, parce qu’on va me juger d’après mes habits de dame à pensées rétrogrades ou bien intégristes". Elle se rappela une petite anecdote de sidi Abderrahmane El Majdoub : "Une fois, son voisin un nantis de son temps, organisa un festin et y invita toute l’élite, tous les pharaons de son temps. Abd Errahmane, se présenta devant le portail de la villa. Il ne fut pas autorisé à entrer vu l’état pitoyable de ses habits. Il savait qu’il n’était là ni pour le prestige « ni pour la rime ou la frime » selon le poète mais seulement pour partager le bien –être, la « science » des émotions avec le voisin, pour échanger le savoir. Il s’était donné la peine à s’habiller convenablement, enfin tel que le dictait la festivité c'est-à -dire un élégant burnous, un seroual* et un couvre chef rouge. Abderrahmane commença à dialoguer avec sa propre manche, la manche de son raffiné uniforme. - Mange, mange ma manche…dit-il ironiquement sous le regard interrogateur des invités richissimes." Revenons à Laeziza qui d’un geste de tête voila la petite scène dans les recoins de son cerveau. « Qu’importe, tant que je suis augmentée par ma foi en Dieu… » Elle grignotait les troncons de pain trompés dans de la sauce jaune préparée à base non pas du curcuma, mais d’un colorant industriel, jauni par on ne sait quelle matière ! Elle attendait, comme les autres femmes, la volontaire équitable, juste, dotée d’une certaine sagesse à distribuer les portions de viande et à les déposer soigneusement devant les conviées. Entre temps, Laeziza s’abstint de manger sa part de viande et une idée fit petit à petit chemin dans l'esprit de la vieille : pourquoi ne pas garder le quartier de pain afin de le donner, une fois chez elle, à " hadak kheina" " celui-là : notre frérot" son petit fils ? Quand la partie de danse battait son plein, elle se leva en compagnie des autres danseuses, la tranche de pain au dessous du bras et se mit à taper des mains. Les avants bras collées à son thorax… On ne sait ce qui s’est passé au juste entre les deux dames…Mais ce qui était sur c'est que Laeziza n'aimait pas qu'on découvre son "secret". Lorsque une jeune femme lui lança à brûle pourpoint : - C’est pas ainsi qu’on tape des mains, on fait comme ça Laeziza lui fit-elle remarquer en tendant les bras presque au dessus du visage… Laeziza qui avait la verve facile lui répliqua alors en chantonnant : - « Kolha jkuf ki bra « Chacun tape comme il veut, chacun fait à sa guise".
Laeziza te sera-t-il permis présentement et dans les temps à venir de taper comme tu veux ?
*Pantalon arabe
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