« Béziers, juillet 1209 »
Ce jour, le ciel a laissé s’accrocher à lui Des nuages si noirs, qu’il ressemble à la nuit. Sous lui, la terre n’est qu’enchevêtrements, D’armes tordues et de corps brisés et sanglants.
Un silence pesant, percé de temps en temps, Par les cris des corneilles mangeuses de chair, Règne en maitre absolu sur ce chaos, sur ce néant, Qui ne laisse s’établir dans l’air qu’une froideur amère.
Une vapeur, chargée d’acres odeurs cadavériques, Arase et infiltre perfidement les habitations pillées En s’engouffrant dans les trous des briques défoncées Par les béliers des assassins qui se disaient croisés.
Des chiens errants rodent à la recherche de carnée pitance Que les senteurs de sang engagent à se dévorer entre eux. En ce mortel endroit ou même le soleil est en absence, L homme qui pourrait être là , serait abandonné même d’un Dieu.
Pourtant, à l’abri précaire d’un monticule d’humaines entrailles, Pousse, dans ce carnage, sans se décourager, une petite tige frêle. Elle porte déjà un bouton, qui demain deviendra, quoi qui vaille, Une fleur de liberté, que nul ne peut tuer, puisqu’elle est éternelle !
Il en était hier ainsi ! Il en est encore ainsi aujourd’hui ! Les hommes n’ont vraiment rien appris !
Johan (JR.).
Image : Dessin de Rudy Van Giffen.
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