Qui peut la retarder Elle n’est toujours pas là Ferait bien de se dépêcher Ah ! Enfin, la voilà Se rapproche de moi Me sourit un petit peu Arrange de ses doigts Une mèche de cheveux
Je lui donne mon livre Je vais lui tendre mon cœur Mais les autres arrivent Il est déjà sept heures
Je le range dans le tiroir Referme la sacoche Et je me dis plein d’espoir « Ça va, c’est dans la poche ! »
« Ben, dis-donc ! Il est chouette ! » Me dit-elle tendrement « Super-bat, extra-chouette » Tout plein de compliments Parcourt à faible voix Le dos de la couverture Puis son regard me boit D’un trait et sans bavure
Elle le serre sur le sein Qui protège son cœur Ouvre le sac à main Le range avec douceur
Elle le lira ce soir Avant de s’endormir Il est sept heures un quart J’ai le cœur noyé de rires
La demi-matinée Vient à peine d’éclore Quand je la vois se radiner Toutes dents au-dehors Me dis : « Dans ta poésie Paraît que tu te permets De critiquer ma vie Je ne la lirai jamais ! »
Je sens ma peau pâlir Comme un bonhomme de neige Tout l’air que je respire Me donne le teint beige
Quand sur ma silhouette Elle pose des yeux froids Et puis tourne la tête Il est midi déjÃ
Toute l’après-midi Je traîne mes godasses Et mes pensées aussi Dans une rue dégueulasse Salie par des petits bouts Des petits bouts de papier Elle a jeté partout Mon nom et mes idées
Elle a détruit mon livre De la pire des façons A maquillé de givre Les yeux de l’horizon
C’est con un vingt-huit juin C’est bête comme une erreur Proscrit comme un bouquin Paru à compte d’auteur
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