Ce n'est pas très souvent que je parle à ma muse,
Me contentant plutôt de tout ce qui m'amuse
En oubliant parfois, devoir impérieux,
De bien compter mes pieds et d'être sérieux.

Sérieux, moi ? jamais ! Je me ferais offense,
Et le seul argument valant, pour ma défense,
Est que ceux qui le sont portent sur leur visage
Leurs soucis, leurs défauts, leur orgueil et leur âge.

Je sais aussi goûter la saveur d'un beau texte,
La nature, toujours, peut m'en donner prétexte,
Le sourire d'un enfant, je peux le raconter,
Parler d'un soir tombant, dans toute sa beauté,

Je peux, si cela plait, conter mes infortunes,
Des années bien venues, comme des importunes,
Vous décrire des gens, parfois hors du commun,
De lointains souvenirs de quand j'étais gamin.

Pour ce qui est sacré, je reste plus modeste.
Je sais jusqu'où aller, où je suis, et j'y reste.
On ne devient pas grand en forçant sa nature
Ni égaler Manet en aimant la peinture.

Le tout, en écrivant, est de bien se connaître,
Savoir ce que l'on couve et ce qui va en naître,
de ne pas s'égarer en grandes envolées
Pour ne pas s' écraser avant de décoller.

Je tente d'amuser, tout en faisant des vers.
le puriste voit là tout un monde à l'envers.
Le monde renversé serait pourtant, je crois,
La meilleure des façons de le mettre à l'endroit !

Alors, je continue, puisque c'est ma manière,
brandissant fièrement, en guise de bannière,
La feuille immaculée s'apprêtant à subir
Tous les assauts grinçants d'un étrange sabir.

A l'instar de Brassens, je les sors dare-dare,
Ma muse les rentrant vite dans sa cithare.
Si, de toutes façons, ils ne vous ont pas plu,
Rien ne dit, croyez-le, que je n'en ferai plus.