Un moine bouddhiste en vadrouille dans la belle région bretonne se retrouva à Carnac, face aux célèbres menhirs. Intrigué par ces monuments de pierre, il s’approcha de l’un d’eux et lui murmura : – Dis-moi grosse pierre comment es-tu arrivée là ? – Comment oses-tu me traiter de la sorte ? Je ne suis pas grosse mais taillée en oblongue. Et si j’étais en diamant, l’on pourrait m’enchâsser dans un chaton ! – Désolé mais vous avez plus de la pierre tombale que de la pierre précieuse. Et au lieu de chaton l’aurait fallu envisager un lion entier ! Heureusement que vous n’êtes pas ronde ! – Puis-je en connaître la raison ? – Vous rouleriez ! – Et donc… – Ne connaissez-vous pas l’expression sur la pierre qui roule ? – Si bien sûr ! La mousse, trop peu pour moi ! Je préfère le vin. Que souhaites-tu savoir insolent petit homme orange ? – Orange ? Ma tenue est d’un bel ocre lumineux et non orangée. – Soit ! Pose ta question. – Je vous trouve bien sèche. Votre cœur est-il de pierre ? – Disons que mon tailleur n’était pas Cardin et que, issue de l’âge de pierre, je me fais vieille et un peu grincheuse. N’allez pas me jeter la pierre pour cela ! – Non, je vous respecte. Vous devez être malheureuse comme une pierre à devoir rester ainsi, debout, stoïque face aux années et aux intempéries. – Le pire est lorsqu’il gèle à pierre fendre ! – Je vous plains et ne reste pas de marbre à votre condition. Mais racontez-moi comment êtes-vous arrivé là ? – Sachez que vos ancêtres nous vénéraient. Nous, menhirs et dolmens, ancrés dans la terre et pointés vers le ciel étions considérés comme les médiateurs entre le monde terrestre et celui des esprits. Certains êtres possédaient les connaissances pour nous utiliser comme moyen de communication. Mais les savoirs se perdent au fil des années. Il ne reste alors que des vestiges, comme nous et les pyramides, laissant les nouvelles générations d’hommes avec de grandes interrogations. Nous sommes les pierres dans le jardin de leurs sciences. – Je vous remercie de m’avoir en partie révélé votre secret. Cette journée est à marquer d’une pierre blanche. Savez-vous où je peux rencontrer d’autres menhirs comme vous ? – Continuez vers l’ouest, à un jet de pierre, vous trouverez nos frères et sœurs. – Je ne vous oublierai jamais. – Notre rencontre sera désormais gravée dans la pierre pour moi aussi. Adieu homme chauve. Sème ta bonne parole comme des petits cailloux.
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