Je voudrais remercier Léo Touroult, Gautier Vuillaume, Nicolas Ballu et Samuel Escobedo pour leurs corrections efficaces.
Résumé :
Dominique Bollet hait les défenseurs de la nature en particulier les chevaliers de Gaïa. Suite à une série d’échecs personnels, il décide de faire assimiler les chevaliers comme une organisation dangereuse aux yeux de l’opinion. Arrivera t-il à faire croire que des protecteurs comme les chevaliers sont des terroristes ? Chapitre 1 : Centrale
Dans un monde proche du notre, environ dix ans après 2020, les écologistes Alphonse, Albert, et Théodore fondèrent une organisation baptisée, les chevaliers de Gaïa. Tous trois cambriolaient des maisons et d’autres lieux en France, afin de déterrer des secrets compromettants, dans le but d’obliger les pollueurs et les politiques corrompus à arrêter de nuire à la nature. Les trois écologistes avaient suivi une formation en piratage informatique, en cambriolage et, s’entraînaient régulièrement à la course à pied et à l’escalade. Il existait en France notamment en région parisienne, des écoles clandestines du crime. Chacun des trois écologistes possédaient des spécialités particulières. Ainsi Alphonse était très habile pour neutraliser un système de sécurité. Albert communiquait le mieux grâce à sa connaissance des langues, telles que l’anglais, l’espagnol, l’allemand et le français, et une capacité naturelle à charmer. Tandis que Théodore savait piloter avec dextérité les motos, les hélicoptères, les voitures et certains avions. Dans l’organisation des chevaliers de Gaïa, les trois écologistes fondateurs bénéficiaient d’un surnom, Alphonse s’appelait le modéré, Albert l’enthousiaste, et Théodore le prudent. Seuls les fondateurs se connaissaient, aucun de leurs subordonnés n’avait la moindre idée de leur identité, car les trois écologistes prenaient beaucoup de précautions pour dissimuler leurs traits et leur voix. Ces précautions s’avéraient nécessaires, les chevaliers respectaient le principe de ne tuer personne, toutefois ils collectionnaient un nombre impressionnant d’ennemis. De plus ils s’attaquaient à des personnes plus influentes que le président des Etats-Unis, ils se confrontaient aux cadres supérieurs des multinationales. En outre certains dirigeants d’entreprises privées allaient très loin pour défendre leurs intérêts. Des entrepreneurs n’avaient pas peur de s’adjoindre les services de mercenaires, de tueurs à gages, et d’autres criminels pour mener à bien des besognes répugnantes. Bien sûr il existait des hommes d’affaires honorables, cependant la mafia aimait beaucoup diversifier ses sources de revenu, elle ne vivait pas seulement d’activités illégales, elle disposait d’agents qui fondait des entreprises, tout en ayant une apparence très respectable. Un financier pouvait être un monstre qui ne visait qu’un seul but, la satisfaction de maîtres sans scrupules. L’organisation ennemie qui mettait le plus d’énergie à combattre Alphonse et ses compagnons était la multinationale Ovéa, célèbre pour ses centrales nucléaires.
Alphonse : Les gars, je propose de pénétrer dans une centrale nucléaire Ovéa. Mais on ne va pas s’aventurer au cœur de la centrale, plutôt dans les bureaux des cadres supérieurs. Albert : Alphonse je ne suis pas contre l’idée, mais j’aimerai savoir pourquoi on s’attaque à ce type de cible. Alphonse : Albert le nucléaire est une énergie nocive pour l’environnement. Cependant ce n’est pas un argument suffisant, pour pousser l’état français à investir massivement dans l’éolien ou le solaire. Albert : Tu ne m’apprends rien là , je sais que le nucléaire est polluant. Alphonse : On va démontrer que le nucléaire est un marché de dupes, qu’il n’apporte aucun avantage économique, quelque soit le cas de figure, étant donné que les entreprises privées qui gèrent le parc nucléaire français, sont des sociétés-sœurs. Théodore : Tu veux dire que le nucléaire c’est comme le pétrole ? Il y a plusieurs noms d’entreprise, mais une seule organisation qui gère le tout à l’échelle mondiale. Alphonse : En effet Théodore, je veux montrer qu’il n’y a aucune concurrence avec le nucléaire, seulement un monopole privé. Que le principal intérêt n’est pas le client, mais la satisfaction des gros actionnaires. Albert : Ton idée est intéressante, mais si on ne sait pas où chercher, on risque de subir un échec. Alphonse : En piratant des ordinateurs, j’ai déniché des indications qui aident à déterminer, où trouver les documents compromettants. Théodore : Cependant Alphonse, il faut aussi s’entraîner à lancer des grenades à gaz soporifique. Alphonse : Tu as raison, si dans les centrales Ovéa, les réacteurs sont mal protégés, en revanche les accès aux bureaux des cadres supérieurs sont très surveillés. Albert : C’est sûr, les chefs d’Ovéa essaient de faire un profit maximal sur de nombreuses choses, au détriment des gens et de la nature. Cependant ils font beaucoup d’efforts pour protéger leurs secrets illégaux. Alphonse : Je me suis procuré des uniformes de travail de chez Ovéa, et j’ai fabriqué de fausses cartes d’accès. Cependant il faudra faire vite, nous avons moins d’une semaine, avant qu’il ne change la configuration des systèmes de sécurité. Albert : Quelle centrale nucléaire veux-tu que nous visions ? Alphonse : Celle du Mans, c’est une structure de petite taille, mais le personnel de la centrale reçoit quand même des instructions de dirigeants hauts placés. Théodore : J’approuve Alphonse, il vaut mieux commencer à chercher dans une centrale nucléaire qui n’est pas un immense complexe. Comme cela on pourra en un seul passage récolter des preuves.
La centrale nucléaire du Mans passait pour sûre, selon les dires de nombreux experts. Toutefois il s’avérait très facile pour une multinationale comme Ovéa, de trouver des centaines d’individus prêts à jurer que telle structure était fiable. Quand une organisation possédait des milliers de milliards d’euros, cela constituait un jeu d’enfant de convaincre un nombre important de gens, de témoigner en sa faveur. Tchernobyl passait aussi pour une centrale sûre aux yeux de beaucoup d’experts, jusqu’au jour où elle explosa. Les spécialistes états-uniens et français critiquaient le coût des structures comme Tchernobyl, mais ils ne mettaient pas en garde sur les possibles dangers de la centrale jusqu’au jour de l’explosion. De plus il existait des milliers d’astuces légales pour tromper une personne honnête, on s’arrangeait pour lui fournir des milliers de pages à lire, en un temps très limité. On modifiait la présence du personnel les jours des visites des inspecteurs, pour donner l’illusion qu’un secteur sensible était étroitement surveillé. En outre la technologie pour les centrales nucléaires évoluait peut-être mais à une vitesse déplorable. Il fallait toujours de très grosses quantités d’eau et d’uranium pour faire fonctionner une centrale. En cas d’incident grave à la centrale du Mans, il faudra une évacuation de la population, dans un périmètre de dizaines de kilomètres pour limiter le nombre de morts par cancer, les victimes de mutations chez les bébés, comme par exemple la présence de deux têtes au lieu d’une, et aussi les naissances d’enfants avec des troubles psychiques importants. Bien sûr les experts d’Ovéa affirmaient que les chances étaient très faibles, pour ne pas dire inexistantes que la centrale du Mans explosa. Cependant que valait la parole de quelqu’un qui était payé pour agir comme un perroquet, qui était licencié s’il avait le malheur de critiquer les saints dogmes de son employeur ?
Théodore : Décidément le Mans se vide vraiment au niveau des rues au début du mois d’août. Albert : Tu as raison, c’est un peu triste mais cela nous avantage. Il y a moins de risques que nous rencontrions des témoins gênants. Alphonse : Tu es moins efficace, si tu parles en même temps que tu agis. Concentres-toi sur le crochetage du cadenas s’il te plaît Albert. Albert : Voilà j’ai fini. Alphonse : Excuse-moi d’être un peu rude, cependant quand on participe à une opération délicate, il vaut mieux disposer de l’ensemble de ses moyens. Théodore : Ton plan devrait être remis à jour Alphonse, de nouvelles caméras ont été installées dans la centrale. Alphonse : Ce n’est pas un problème, je vais les pirater, pour qu’elles ne nous détectent pas. Théodore : Il faudrait peut-être revenir un autre jour, les caméras récentes ne sont pas forcément les seuls éléments imprévus. Alphonse : Qu’en penses-tu Albert ? Albert : Reculer maintenant, pourrait nous valoir une mauvaise publicité auprès de nos partisans. Je suis d’avis de continuer. Théodore : Il n’y a qu’un nombre très restreint de partisans qui nous aide dans notre organisation. Pour l’instant nous les trois fondateurs, ne comptons que sur deux autres personnes. Albert : Raison de plus pour ne pas se dégonfler, si nous voulons recruter à grande échelle il est nécessaire d’avoir un palmarès impeccable. Théodore : On n’est pas dans un concours, on joue notre liberté, il vaut mieux être très prudent. Albert : Si on veut sauver la nature, il faut que l’on prenne des risques. Alphonse : Les arguments d’Albert m’ont convaincu, je suis d’avis de ne pas rebrousser chemin. Théodore : Très bien je m’incline devant l’avis de la majorité, même si je ne suis pas complètement rassuré. Attention des gardes approchent, cachons-nous.
Théodore le prudent avait le cœur qui battait très vite. Le prudent se demandait pourquoi il donna son aval à un plan, qui manifestement le conduirait probablement en prison voire pire. En effet les gardes qui venaient dangereusement près des écologistes, semblaient des sadiques prêts à de sacrées bassesses pour obtenir du plaisir. Théodore sentait la folie qui consumait les vigiles. Heureusement une alerte dans un autre secteur de la centrale contraignit les gardes à rebrousser chemin. Le demi-tour des vigiles leur sauva peut-être la vie, Albert l’enthousiaste quand il apprit l’objet de leur conversation, dut se faire violence pour ne pas les égorger. En effet les sentinelles appartenaient au cercle des adorateurs de Méthane, le dieu de la pollution. Elles se vantaient mutuellement d’actes odieux contre la nature, comme déverser volontairement des déchets toxiques dans des rivières, ou mettre le feu à des forêts. Le mouvement méthaniste comptait de nombreux adeptes en France. En partie à cause des rumeurs de miracles attribués à certains prêtres, notamment la guérison de malades victimes de substances chimiques. L’enthousiaste se retenait aussi à cause de la présence de son ami Alphonse le modéré, qui n’aurait jamais pardonné un meurtre, contrairement à Théodore. Le modéré se caractérisait par un sens de l’honneur développé. Il pardonnait très difficilement le bris de serment. Il détestait les menteurs, il s’arrangeait pour arriver de manière ponctuelle aux rendez-vous. Plus les chevaliers s’approchaient des bureaux des cadres supérieurs, plus ils subissaient de mauvaises surprises. Ainsi les sentinelles qui patrouillaient dans les environs, ne s’avéraient pas seulement du personnel mal payé de la multinationale Ovéa, il fallait aussi compter sur la présence de membres des forces de l’ordre.
Alphonse : Voilà qui est contrariant, en plus des gardes de la multinationale Ovéa, on doit se coltiner des patrouilles de policiers. Je me demande ce qui justifie ce surcroît de précautions ? Albert : En fait j’ai posté récemment sur internet un article où je fustigeais les centrales nucléaires, en tant que fondateur des chevaliers de Gaïa. Alphonse : Ce n’est pas très malin, comme les chevaliers sont un groupe qui contient seulement des sarthois ; les autorités avec ton article étaient tentées de protéger plus la centrale nucléaire du Mans, le chef-lieu du département de la Sarthe. Théodore : On fait quoi, on abandonne ? Des patrouilles renforcées, c’est un argument de poids pour reporter notre action. Albert : À notre prochain passage, la sécurité risque d’être encore plus accrue, je suis d’avis de continuer. Alphonse : Moi aussi, notre prestige n’en sera que plus grand, si en plus de tenir en échec des gardes, nous leurrons des policiers. Théodore : Vous avez tous les deux un amour du prestige qui pourrait signifier notre perte. Cependant il est vrai que des actions d’éclat aideront la nature. Je ne m’oppose pas à ce que nous continuons nos recherches.
Théodore le prudent se sentait idiot, il savait où menait souvent l’amour du prestige. L’histoire regorgeait d’exemples tragiques de personnes aventureuses qui voulaient se faire un nom. Des criminels qui manquaient de puissance économique et politique, devaient prendre beaucoup de précautions pour conserver leur liberté. Or le prudent et ses compagnons adoptaient un comportement franchement risqué. Si les gardes d’Ovéa ne montraient pas un haut niveau de compétence, les policiers qui patrouillaient se caractérisaient par leur esprit consciencieux et leur vigilance. Théodore crut à plusieurs reprises qu’il allait faire une crise cardiaque, à cause de membres des forces de l’ordre. En effet si les vigiles d’Ovéa constituaient un danger mineur, par contre les policiers étaient d’une autre trempe. Non seulement ils bougeaient de manière aléatoire, mais ils surveillaient avec efficacité, ils scrutaient avec attention les environs, ils évitaient de bavarder pendant leur ronde, ils prenaient à cœur leur mission de surveillance. Bref ils compliquaient terriblement la tâche de Théodore et ses camarades. Le temps nécessaire pour arriver près du but, fut triplé à cause du sérieux des policiers. Alphonse le modéré arriva devant la porte de l’étage des cadres supérieurs, mais l’accès s’avérait protégé par un système de sécurité. Si le modéré se trompait une seule fois dans le code d’entrée, il déclencherait une alarme tonitruante. Pour arranger les choses, il tremblait et le papier contenant le code à douze chiffres n’était pas très lisible, certains chiffres prêtaient à confusion, même quand on les examinait avec attention. Alphonse avait un trou de mémoire dès le deuxième chiffre à entrer, en prime il n’arrivait pas distinguer s’il fallait taper sur un ou deux en regardant son papier. Il pensa un moment s’en remettre à la chance pour obtenir gain de cause, mais il repoussa ce qu’il qualifiait d’une idée folle. Aussi il se força à se concentrer et à respirer pour être dans un état d’esprit plus optimal, pouvoir chercher avec davantage d’efficacité dans sa mémoire. Il commençait à sentir des signes d’impatience chez ses deux camarades mais il s’en fichait, il était trop important d’entrer comme il fallait la bonne combinaison de chiffres. Et puis ce n’était pas de sa faute, mais de celle d’Albert qui avait une écriture peu lisible si la procédure d’ouverture de la porte traînait un peu. D’ailleurs Alphonse pensa pendant un moment en faire la remarque à son camarade l’enthousiaste, histoire de le rappeler à l’ordre. Puis il se retint par amitié, il ne voulait pas accabler plus son proche. Déjà qu’Albert devait se sentir mal à cause du précédent reproche. Mais le modéré pensa ensuite au fait que si personne ne prévenait l’enthousiaste de sa manie de faire des chiffres qui prêtaient à confusion, cela pourrait compromettre la réussite de certaines missions. Alors Alphonse se sentit désolé mais il considérait comme important de dévoiler la raison de sa lenteur.
Alphonse : Je suis un peu lent, mais les chiffres que tu griffonnes sont écrits de telle façon qu’ils peuvent induire en erreur, alors je suis forcé d’être prudent. Albert : Ah bon ? C’est à ce point là ? Théodore : Je suis d’accord. Albert : Zut je suis un boulet en ce moment. Alphonse : Sans tes capacités de crochetage, cela aurait été plus difficile de pénétrer dans la centrale. Albert : Merci mais assez perdu de temps, il faut entrer dans les bureaux le plus vite possible.
Alphonse se remit rapidement au travail et parvint au bout de dix secondes à entrer le bon code. Il ne déclencha pas d’alarme au grand soulagement général. Pour échanger des informations oralement dans un endroit cambriolé, les trois amis ne s’appelaient pas par leur prénom mais leur surnom dans leur organisation.
Alphonse : Parfait nous sommes maintenant dans les bureaux des cadres supérieurs de la centrale nucléaire du Mans. Je m’occupe des ordinateurs, pendant que vous deux vous collectez les papiers. Albert : Entendu, alors voyons oh, oh, un message qui incite à faire monter les prix de l’électricité, c’est une bonne trouvaille. Théodore : Ce message est codé, comment arrives-tu à le lire ? Albert : J’ai une certaine expérience du cryptage, et celui qui a conçu ce message, a recouru à un grand classique du codage. Théodore : Tu avances de ton côté, le modéré ? Alphonse : Les ordinateurs sont protégés par un protocole de sécurité chinois, je vais mettre plus de temps que prévu pour collecter des informations. Théodore : Les chinois mettent en place des protocoles de sécurité informatique, plus performants que les autres ? Alphonse : En effet, les états-uniens sont dépassés depuis plusieurs années, en matière de technologie par les chinois, spécialement pour l’informatique. Ce n’est pas pour rien que Macrosift et Pomme d’or sont devenus la propriété de chinois. Théodore : Je ne savais pas cela, à entendre les journaux télévisés, les informaticiens états-uniens restaient les numéros un. Alphonse : La Chine qui dépasse les Etats-Unis le champion des occidentaux, cela dérange beaucoup de politiques européens. Théodore : Donc de nombreux médias se contentent de montrer les abus des politiques chinois, et font l’impasse sur leurs réussites. Alphonse : Tu as parfaitement compris, montrer que le modèle chinois est plus performant économiquement que le modèle occidental, constituerait un aveu de faiblesse. Théodore : Beaucoup de politiques occidentaux ne sont pas prêts à admettre que leur façon de voir, est moins efficace du point de vue de la productivité et de la puissance économique. Alphonse : Bon notre débat est intéressant, mais nous avons des tâches importantes à accomplir, on discutera plus tard. Oh là un logiciel de surveillance m’a repéré, il faut que je le neutralise, sinon dans une minute une alarme se déclenchera.
Pour désactiver le logiciel de surveillance, Alphonse le modéré décida d’utiliser le virus Knock. Mais il n’était pas sûr à cent pour cent de son efficacité. En effet Knock datait de plus de trois mois, par conséquent des parades contre lui purent être mises en place. Dans le secteur de l’informatique les programmes de sécurité et les virus devenaient très rapidement obsolètes. Si le modéré avait voulu être très consciencieux, il aurait acheté un virus créé depuis moins d’une semaine pour l’assaut de la centrale. Cependant il y avait un problème majeur à affronter, le prix, il aurait fallu dépenser plus de cent mille euros. Or Alphonse doutait de pouvoir convaincre ses compagnons d’investir dans un virus une somme colossale, qui permettait d’acheter plus de dix voitures. Le modéré avait déjà du mal à inciter ses camarades, à accepter dix mille euros d’investissement mensuel dans l’informatique. En outre les finances des chevaliers commençaient à s’amenuiser. Alphonse et ses amis avaient largement pioché dans les ressources financières apportées par un ticket gagnant, d’une valeur de trois millions d’euros. Il ne restait plus que quarante secondes et le modéré ne fit qu’un cinquième du boulot. Il se maudit de ne pas se concentrer à fond sur sa tâche, de se laisser distraire par des pensées parasites. Il pouvait encore renverser la tendance, il triompha de pièges informatiques plus compliqués. Mais il devait commencer à se dépêcher sérieusement, sinon lui et ses compagnons connaîtront d’ici peu un long emprisonnement. Pénétrer dans une centrale nucléaire pouvait engendrer une accusation de terrorisme, et par conséquent une peine de prison vraiment très longue, comme par exemple dix à vingt ans d’enfermement. Théodore distinguait la tension chez Alphonse, et le fait qu’il n’avait pas fini de neutraliser les systèmes de surveillance. Néanmoins le prudent ne voulait pas passer pour un lâche, même si sa nature précautionneuse l’invitait à détaler. Puis finalement il ne put résister à l’envie de poser une question en rapport avec un repli stratégique.
Théodore : Il faut peut-être s’enfuir sans demander notre reste ? Alphonse : Pianote frénétiquement. Non je peux battre les ordinateurs de cette centrale, je suis capable de triompher des protocoles chinois. Même si la Chine est le pays de plusieurs champions de la sécurité informatique.
Alors que Théodore connaissait une angoisse vive, Alphonse le modéré souriait largement, il était certain de triompher. Il se heurtait à des protocoles plus difficiles à pirater que d’habitude, mais il avait confiance dans son talent. Théodore se demandait s’il ne devait pas pratiquer une extraction de force, s’il ne faudrait pas assommer Alphonse et se barrer à toute vitesse. Encore dix secondes d’attente et il passera à l’action, déjà il levait le poing pour frapper. Albert quant à lui jugeait qu’une manœuvre plus offensive pour neutraliser Alphonse s’avérait nécessaire. Aussi il sortit sa matraque électrique avec l’intention de s’en servir. Il régla le voltage au minimum afin que son ami ne soit assommé que quelques minutes, mais il comptait quand même l’assommer avec une arme. Pendant une seconde une voix intérieure lui murmura de tuer Alphonse avec de l’électricité, en choisissant d’opter pour une décharge à puissance maximale. Ainsi il prendrait le contrôle des chevaliers, et se débarrassera par la même occasion d’une corvée particulièrement désobligeante, la mort d’un gentil naïf avec des idées beaucoup trop mignonnes en matière d’écologie. Mais il frémit d’horreur à cause de ses pensées sanglantes, ce qui stoppa net son geste. Il rangea finalement sa matraque et choisit d’assister Théodore avec son poing plutôt qu’avec une arme. Mais ce déploiement de violence entre camarades écologistes s’annonçait inutile vu qu’Alphonse leva bien haut les bras et fit le signe de la victoire, deux doigts pour former un v. Cette bonne nouvelle rassurait Théodore et Albert, même si tous deux estimaient la situation préoccupante, ils jugeaient comme une tâche particulièrement déplaisante le fait de lever la main sur un ami. Alphonse ne se rendit pas du tout compte des menaces passées qui pesaient sur lui. Le modéré s’imaginait que ses deux compagnons étaient angoissés, mais Alphonse ne découvrit pas que ses camarades projetèrent durant un court moment de l’assommer.
Alphonse : Voilà j’ai réussi. Théodore : J’ai l’impression d’avoir vieilli de vingt ans, tu m’as infligé une frousse bleue Alphonse. Alphonse : Désolé de t’avoir fait peur, mais le pire est derrière nous, j’ai mis la main sur des fichiers très intéressants, et vous deux ? Théodore : J’ai quelques rapports confidentiels, mais rien de terriblement transcendant. Albert : J’ai mis la main sur des documents qui vont embarrasser le gouvernement, l’obliger à désavouer le nucléaire, sous peine de déclencher un scandale monumental. Alphonse : Parfait nous avons accompli quelque chose de majeur dans la protection de la nature française. Théodore : Avant de crier victoire il faut sortir d’ici, voir la manière dont le public perçoit nos informations, et riposter efficacement contre la contre-attaque des partisans du nucléaire. Albert : Tu es un rabat-joie Théodore, nous avons remporté une victoire, et tu nous assènes un coup au moral. Alphonse : Malheureusement Théodore a raison, nous avons fait progresser la cause de la nature. Mais il nous reste beaucoup à faire avant de pouvoir crier victoire.
Pendant que les chevaliers de Gaïa diffusaient des informations, le premier ministre Jérôme Chameau s’entretenait avec son allié Dominique Bollet, le président de la multinationale Ovéa, pour défendre le nucléaire en France. En effet la cause du nucléaire battait de l’aile, malgré les tentatives de détourner l’attention. Pourtant Bollet et Chameau firent de gros efforts, pour essayer d’étouffer le malaise suscité par les révélations des chevaliers. Ils chargèrent leurs journalistes, de trouver des sujets polémiques qui inciteraient les gens à considérer secondaire, le monopole privé du nucléaire et, les autres polémiques du genre la pollution des combustibles des centrales. Par exemple plusieurs journalistes d’Ovéa firent le maximum pour donner une dimension spectaculaire à l’arrestation de français islamistes. De plus Chameau exigea que les reporters des chaînes publiques fassent l’impasse sur le nucléaire, sauf pour présenter de manière très négative les chevaliers. Malheureusement le président et le premier ministre ne contrôlaient pas internet, des centaines de sites se mirent à critiquer le coût du nucléaire, et d’autres abus. Notamment le fait que la recherche sur les énergies renouvelables, était sacrifiée en France pour faire plaisir aux partisans du nucléaire. L’état français investissait des milliards dans le nucléaire, pour seulement quelques dizaines de millions dans le solaire et l’éolien. Bollet n’appréciait pas du tout la situation, si les français soutenaient avec force les énergies renouvelables, l’innovation et le dynamisme risquaient de devenir des valeurs importantes du secteur économique de l’énergie. Cela marquera la fin de plusieurs années de tranquillité, la donne sera bouleversée. Les petites entreprises qui refusent de devenir des organisations vassales d’Ovéa, pourront survivre voire même prospérer. Cela constituait un véritable cauchemar pour le président, la situation d’immobilisme qu’il mit patiemment en place, menaçait de voler en éclats, tout cela à cause d’une poignée d’écologistes. Puis Bollet se reprit, il n’avait pas abattu toutes ses cartes.
Jérôme : Monsieur Bollet, il faut faire quelque chose, le scandale sur le nucléaire soulevé par les chevaliers a obligé le ministre de l’énergie et du développement durable à démissionner. Dominique : Ne vous en faites pas monsieur Chameau, je contrôle la situation. Jérôme : Excusez ma franchise, mais je n’en ai pas l’impression. L’action d’Ovéa a subi plusieurs baisses depuis une semaine, et l’opposition réclame avec de plus en plus d’insistance ma démission. Dominique : J’ai un bon plan pour neutraliser les chevaliers. Jérôme : Il serait temps de le concrétiser, chaque jour qui passe ma cote d’opinion s’affaiblit. Dominique : D’ici deux jours les chevaliers seront discrédités. Jérôme : Quels sont les détails de votre plan ? Dominique : Le directeur de la centrale nucléaire du Mans va bientôt se suicider, en laissant derrière lui de fausses preuves faisant croire qu’il appartient aux chevaliers de Gaïa. Ainsi les chevaliers passeront pour des menteurs dans le scandale lié au nucléaire. Jérôme : C’est un bon plan si le principal accusé dans le scandale nucléaire, est considéré comme un membre des chevaliers ; cela ôtera beaucoup de crédibilité aux chevaliers, et fera passer pour de grossiers mensonges leurs attaques. Dominique : Rassurez-vous, votre popularité sera bientôt plus haute que jamais. Jérôme : Oui mais comment pouvez-vous garantir que le directeur va se suicider, et que les chevaliers ne vont pas vous contrer efficacement ? Dominique : Le directeur tient plus que tout à son fils, or je contrôle la vie et la mort de sa progéniture. Jérôme : Il reste néanmoins le problème de la réaction des chevaliers face à votre manigance. Dominique : Les chevaliers forment une organisation illégale, ils ne peuvent pas se défendre au grand jour. Ce qui réduit terriblement leur capacité à rétablir la vérité quand on accuse injustement une personne d’être un chevalier. Jérôme : Vous pouvez compter sur ma coopération pour vous épauler. Dominique : Ce n’est pas la peine, je dispose de tout ce qu’il faut pour nuire aux chevaliers. Mais merci quand même.
Dominique Bollet le président n’en était pas à son premier coup d’essai, en matière de chantage. Au contraire il bâtit sa carrière grâce à sa capacité à manier la pression psychologique. Au début les résultats n’étaient pas toujours encourageants, toutefois avec le temps Dominique s’améliora beaucoup. Par exemple au moyen d’une vidéo montrant un chef d’état allemand en train d’être infidèle à son épouse il récolta plus de cinquante millions d’euros. Il poussa des centaines de personnes à abandonner des projets, ou à lui verser de l’argent. Le président prenait par ailleurs un pied monstre, éprouvait des jouissances merveilleuses, chaque fois qu’il faisait une nouvelle victime par l’intermédiaire du chantage. Même les plats les plus succulents, ou la caresse de l’amante la plus douée, ne donnaient pas autant de plaisir à Bollet, que la perspective de régir la vie de quelqu’un au moyen d’un scandale, ou d’un élément primordial pour sa victime. Pourtant Dominique adorait la bonne cuisine, et le sexe avec des femmes séduisantes. L’ennui avec le président venait du fait qu’il ne tenait que très rarement ses promesses. Résultat, Dominique cessait rarement de harceler sa proie. Heureusement pour lui, Bollet savait très bien camoufler sa piste, il recourait à des sbires sans lien apparent avec lui pour ses transactions. Il acquit le surnom du maître-chanteur à la bombe. En effet il s’arrangeait pour payer grassement ses sbires, mais il les équipait aussi d’une bombe à retardement munie d’un micro et d’une caméra afin d’éviter les mauvaises surprises.
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