Toutes les soixante lignes, environ, elle me lâche. Plus ou moins soixante lignes, selon l’agencement des phrases sur la page, la jointure des chapitres. Elle me quitte, me reprend, toutes les deux pages. Deux pages qui font des durées différentes, selon qu’elle ralentit ou ravive le cours de sa lecture, qu’elle relit un passage, ou que ses yeux quittent la frise de mots noirs, pour, fendant le feuillage du châtaigner et les nues prises au vent, rejoindre un écran sidéral où les lignes du livre vont faire leur cinéma. Toutes les soixante lignes environ elle me lâche, me reprend juste après le bruissement d’un rabat de papier. Parfois, pour accrocher le coin de la page, elle mouille le bout de son doigt et quand elle me reprend, une trace de salive s’évanouit à mon sexe.
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