Réponse au défi de la semaine :
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Deux amis d’enfance se croisent dans les couloirs de leur maison de retraite. Ils ont fréquenté la même école mais ne se sont plus revus au cours de leur vie en raison de leurs destins bien différents. Ils ont en commun leur prénom : Pierre. Le premier, habillé d’un ensemble sur mesure invite son ami dans sa chambre. Il réside dans l’aile VIP de la maison de retraite. Sa chambre est luxueuse, il a une infirmière personnelle et bénéficie de repas préparés spécialement pour lui, rien à voir avec la bouillie à la mode cantine qu’ingèrent les autres. Les murs sont tapissés de velours mais exempts de photos. Seul un modeste cadre trône sur la table de nuit. Là , il raconte qu’il a investi dans l’immobilier et placé des fonds en bourse. Il a amassé ainsi une petite fortune dont il n’est pas peu fier. Pierre, l’autre, lui demande :
– Où est ton album photo ? – Je n’en ai pas. – Tu n’as pas de photos de ta famille ? Ou avec tes amis ? – Mes parents sont morts depuis longtemps et j’ai peu d’amis. Mais j’ai cette photo avec mon épouse (en désignant le cadre).
Pierre s’approche de la photo qui montre son copain qui enlace une très jolie femme devant une villa que l’on devine flanquée d’une piscine.
– Elle est décédée ? – Bien sûr que non ! Elle est juste à côté. On fait chambre à part, c’est courant dans notre milieu. – Vous avez eu des enfants ? – Non, moi je n’en voulais pas car cela coûte cher et ma femme n’en voulais pas, de peur de grossir et de mettre à mal ses opérations de chirurgie esthétique. – Et des voyages ? Tu as dû en faire de magnifiques ! – Moi non, je bossais. Mais mon épouse en a fait de superbes. Et toi ? Raconte…
Pierre l’emmène dans sa chambre. Celle-ci est minuscule mais les murs sont recouverts de masques africains, de photos avec des paysages magnifiques et une odeur d’encens règne dans la pièce.
– Voici mon paradis. Il est en partie payé par le CPAS mais je m’y sens bien. Je vais te montrer mon album photo.
Il sort d’une armoire un gros livre qui déborde de documents, photos, coupures de presse, notes, dédicaces. Il peine à le poser sur la petite table. Il entame ainsi le récit de sa vie. Ethnologue, il a parcouru le monde. Il est allé en Amazonie rencontrer des indiens Jivaro où il a même failli voir sa tête réduite pour les avoir filmés sans leur accord. Fin négociateur, il a obtenu la main de la fille du chef du village. Il l’a honorée pendant la nuit de noces avant de prendre la fuite la nuit suivante. Il s’est ensuite rendu en Afrique auprès des Maasaï pendant plusieurs années. Accepté par la tribu, il s’est uni à une femme avec qui il a eu deux enfants, Coumba et Sekou. Il a parcouru ce continent et a pu contempler les chutes Victoria, le Kilimandjaro, les pyramides de Gyzeh et traverser le désert à dos de chameau avec des Bedouins. Plus tard, il est parti à la découverte de l’Australie et des aborigènes. Il s’est ainsi fait un ami avec qui il est devenu très proche. Celui-ci lui a fait découvrir les merveilles de son pays. À l’approche de la soixantaine, il a voulu découvrir la Russie. Et là , comme dans la chanson de Bécaud, il a rencontré Nathalie sur la fameuse Place Rouge. Et c’est avec elle qu’il est rentré au pays et a eu son dernier enfant, Igor. Nathalie a trouvé un nouvel amour en Belgique et a quitté Pierre.
L’octogénaire referme son album photo alors qu’on frappe à la porte. Entrent un homme et une femme tous deux basanés et de grande taille, accompagnés d’un jeune garçon blond au port altier.
– Voici mes enfants !
Il se tourne alors vers son ami retrouvé et chuchote :
– Je me suis toujours demandé si j’avais un enfant amérindien… En tout cas, si Pierre qui roule n’amasse pas mousse, Pierre qui roule sa bosse, ramasse des gosses !
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