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Nouvelles : Le parasite
Publié par christianr le 27-07-2012 15:01:57 ( 1454 lectures ) Articles du même auteur



PS. Voici une autre nouvelle que j'ai écrit un certain temps de cela, mais jamais posté ici. Il décrit bien comment je me sens en ce moment.

Et me voilà dans une salle d'attente d'un hôpital. Une salle typique à toutes les autres, lugubre, sinistre, remplie de véritables malades, d'éclopés, de handicapés. Je me sens comme un imposteur parmi tous ces gens. J'ai tous mes membres; aucune blessure visible. Je ne tousse pas, ne renifle pas.

Pourtant, j'ai un problème, tout un problème. Cela a pris en charge ma vie, contrôle mes décisions. Il faut que ça cesse, je n'en peux plus. Et dire qu'il n'y a pas si longtemps, tout allait bien. Je travaille comme concepteur de jeux vidéos. Ma grande créativité a bâti ma carrière. Ma joie de vivre et mon intelligence ont développé ma vie sociale. Maintenant, j'ai perdu tout cela en peu de temps.

D'ailleurs, le temps est très long ici. Je ne suis pas un cas urgent. Malgré tout, on finit par m'appeler. Je devrais être heureux d'en avoir fini avec l'attente, mais j'ai peur de la suite.

Je rentre donc à contrecoeur dans la salle du médecin. Il s'agit d'un vieil homme à la barbe blanche et au crâne dégarni. Les cernes sous ses yeux me démontrent bien que je suis qu'un autre patient dans son « shift ». Il est clair que je vais le déranger avec mes bêtises. Mais je ne peux plus reculer. Il m'invite à m'asseoir. Je vois dans son regard qu'il attend que j'explique mon problème. Mais par où commencer? Et si je n'expliquais pas bien suffisamment? Si j'oubliais des détails et qu'il ne peut pas poser le bon diagnostic? Et si son mauvais diagnostic me rendait encore plus malade que je le suis déjà?

Je crie : « Assez! » « Mais à qui parlez-vous? » demande le médecin.

-...À lui. À cette voix dans ma tête.
— Quelle voix?
— C'est compliqué. On dirait la mienne. Mais ce n'est pas moi. Elle me suggère des choses... qui me rendent confus, qui m'empêchent d'agir, qui me rendent malade.
— Dites-m'en plus, dites-moi comment cela a commencé.
— D'accord.

Et j'ai commencé à décrire le premier jour. Où j'ai du faire face à lui, le parasite.



C'était un jour comme les autres, je raffinais mon programme. J'écoutais du « Astral Projection » sur mon baladeur pour me stimuler. Je saluais les collègues qui passaient devant mon cubicule. Rien ne présageait que quelque chose tournerait mal. Et le téléphone sonna. C'était mon patron. Il me demandait à son bureau. J'arrêtais donc ce que je faisais. Je me rendis ensuite tranquillement vers lui. Je fermais la porte derrière moi et m'assis.

— Que puis-je faire pour vous, patron?
— Et bien, pour commencer, je dois encore vous féliciter pour votre excellent travail. Vos nouvelles trouvailles ne font qu'ajouter à la réputation de notre compagnie.
— Merci patron, j'adore mon travail, ce n'est pas difficile dans ces cas-là.
— Oui, ça se voit. Vous êtes probablement déjà au courant que la société a fait acquisition d'une nouvelle compagnie. Nous avons besoin de quelqu'un de votre trempe pour gérer une telle transition. Je crois que vous êtes réellement l'homme de la situation. Qu'en dites-vous?

À ce moment-là précis, quelque chose se passa dans mon esprit. Une pensée arriva d'elle-même. La pensée avait ma voix. Mais cela ne sembla pas venir de moi, ce n'était pas moi. La pensée me dit : « N'y va pas! » Le patron qui dut voir le désarroi dans mon regard me demanda : « Tout va bien? Vous m'avez l'air pâle tout d'un coup. » Une autre pensée arriva : « Il faut que tu quittes le bureau, ça va devenir pire! » Je balbutiai au patron : « Je ne sais pas ce qui se passe, je vous reviens plus tard. » Je courus au-dehors. J'essaie de respirer. Mais qu'est-ce qui s'est passé? Qu'était-ce ces pensées qui envahissaient mon esprit?

— Mais qu'est-ce qui m'arrive? dis-je tout haut.
— Rien. J'ai juste empêché un désastre. Que j'entends dans ma tête.
— Quel désastre?
— Celui qui se serait causé si tu avais décidé de prendre la position.
— Mais qui es-tu?
— Je suis un parasite. Mais un bon parasite.
— Un parasite? Mais comment es-tu arrivé en moi?
— Ah! Je ne suis pas arrivé, je suis né là. Ça fait un bout que je suis là. Ça fait un bout que je te surveille.
— Tu me surveilles, mais pourquoi?
— Je te surveille des dangers qui pourraient t'arriver. Après tout, ta sécurité est aussi la mienne. Tu vois comme je suis bon pour toi!
— Mais quels dangers? Je ne vois aucun danger!
— Voilà où j'interviens. Là où tu ne vois aucun danger, moi j'en vois un. J'anticipe. C'est ma force. Grâce à moi, tout danger qui pourrait t'arriver n'arrivera jamais. Parce que je vais t'en empêcher.
— Comment vas-tu m'en empêcher?
— Simple, j'ai le contrôle de tes émotions. Dès que je vois un danger à l'horizon. J'active la peur. Tu seras surpris du pouvoir qu'elle aura sur toi. D'ailleurs, regarde.

Une nervosité s'active tout à coup dans mon corps. Elle atteint d'abord mes mains, ensuite, mes bras pour finir dans ma poitrine. Une boule d'énergie négative irradie dans mon ventre. Des sueurs froides perlent sur mon front, mon cœur bat à toute allure. J'ai une grande envie de m'enfuir, mais pour aller où? Donc je fais la seule chose qui me semble sensée à ce moment précis. Je crie, à grand poumon.

— ARRÊÊÊÊÊÊTE!
— Voilà c'est fait. C'est passé. Il suffit que tu m'écoutes et ça passe.
— Et si moi j'ai envie d'accepter le poste?
— Alors je recommence, jusqu'à ce que tu comprennes. C'est pour ton bien après tout.
— Je refuse de me laisser dominer par toi!

J'avance d'un pas décidé vers le bureau de mon patron. Mais ça n'a pas tardé à se gâcher.

— Ne le fais pas. Tu vas échouer, et tu perdras ton emploi. Ensuite, tu ne pourras en retrouver un autre, et tu perdras tout.

Et le manège se répète. Je fige de peur et je décide d'arrêter, craignant que le parasite aille trop loin. J'ai donc décidé de refuser le poste. Ça valait mieux que de me rendre malade.

Je croyais que le parasite m'aurait laissé tranquille. Hélas non.

On était la fin de semaine. Une grande amie pour qui j'ai beaucoup d'affection m'appelle. Elle m'invite chez elle. Avant que j'ouvre la bouche, il s'y remet de plus belle.

— N'y va pas! Tu vas te ridiculiser et elle ne voudra plus te voir.
— Ah non, pas encore! Je n'ai pas envie de vivre toutes ces souffrances encore une fois.
— Tu sais quoi faire!

J'ai donc refusé. Il n'était pas question que je revive ce qu'il pouvait me faire. C'est trop insupportable.


— Et me voilà, maintenant, prisonnier de ma propre vie. Docteur, il m'a été même difficile de venir ici, vers vous. Faites quelque chose!

Le médecin qui m'a écouté sans broncher jusque-là, se recule un peu sur sa chaise et semble réfléchir. Le silence qui semble durer une éternité se termine enfin dès qu'il ouvre la bouche.

— Mon cher ami, c'est évident, vous avez ce qu'on appelle la pensée-parasite. C'est très courant chez des gens comme vous, les créatifs.
— Y a-t-il un remède, docteur?
— Oui, mais elle a un prix. Vous voyez la pensée-parasite a besoin de deux choses pour subsister : l'imagination et les émotions. Avec une certaine opération au cerveau, nous pouvons vous couper de ces deux facultés. N'ayant plus accès à celle-ci, le parasite mourra de lui-même.

Le temps s'arrêta subitement. L'instant d'un moment toute ma vie se déroula devant mes yeux. Je pouvais la voir en double, en parallèle. Une version telle que je l'ai toujours connue, et l'autre sans ce que je devais me séparer. Il me semblait que c'était aussi intolérable que ce que le parasite me faisait vivre.

— Est-ce que... puis-je y réfléchir?
— Bien sûr, à vous de choisir. Je vous remplis les formulaires et si vous décidez de faire le pas, appelez ce numéro et prenez rendez-vous.

Il dut me donner le papier, car à la sortie je l'avais dans les poches. Pour être honnête à ce moment-là, j'avais perdu contact avec la réalité.

Je décide de marcher sans but dans la ville par la suite. Pour une fois, je décide de parler au parasite en premier.

— Tu vois où tout ça nous mène!
— Je ne voulais que nous protéger.
— Nous protéger de quoi? Tu ne nous laisses même pas la chance de prendre le risque.
— Le monde est tellement rempli de danger. Je ne veux pas mourir.
— Et en échange, on ne peut plus vivre. Qu'est-ce qu'on y gagne?
— J'ai peur.
— Laisse-moi prendre le risque. Si un vrai danger survient, on agira.
— J'ai peur tout de même.
— Si je te prouve qu'on peut vivre avec la peur, qu'on peut vivre avec le risque. Veux-tu essayer de me laisser faire?
— J'imagine, je n'ai plus le choix, je crois.

Et c'est depuis ce jour que j'ai appris à vivre avec le parasite.

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Auteur Commentaire en débat
Loriane
Posté le: 27-07-2012 20:13  Mis à jour: 27-07-2012 20:13
Administrateur
Inscrit le: 14-12-2011
De: Montpellier
Contributions: 9505
 Re: Le parasite
Ce que tu décris ressemble à un syndrome dissociatif, une forme de schizophrénie provoquée par une surcharge d'anxiété soudaine.
Un de mes fils souffre de cette psychose et a longtemps nié que ces pensées intruses étaient irréelles.
Cela a été un cauchemar pour moi, car il a mal réagis. Je crois qu'il se stabilise et il y a de l'espoir. Tu parais plus stable, et surtout moins touché que mon fils et si tu acceptes ta maladie et ton traitement l'amélioration, puis la guérison sont envisageables. Mais je crois que ces maladies ne durent pas elles ont une durée limitée.
Bon courage et vive la médecine !
Merci pour le partage.
christianr
Posté le: 27-07-2012 20:18  Mis à jour: 27-07-2012 20:18
Plume d'Or
Inscrit le: 17-03-2012
De: Boisbriand, Québec
Contributions: 125
 Re: Le parasite
Oui dans mon cas, je le sais très bien que ça vient de moi. J'ai fait dans le surréalisme pour faire comprendre un peu mieux le mal que je vis. Mais c'est vrai que des fois j'ai l'impression que ça ne vient pas de moi. Que je suis en combat avec moi-même.

Sur une note plus agréable, je vais beaucoup mieux aujourd'hui, je n'ai pas eu aucune crise de panique. C'est signe que mon épisode anxieux tire vers sa fin.

J'espère que ton fils va mieux.
emma
Posté le: 29-07-2012 09:22  Mis à jour: 29-07-2012 09:22
Modérateur
Inscrit le: 02-02-2012
De: Paris
Contributions: 1494
 Re: Le parasite
Bonjour,
J’ai trouvé ton texte très intéressant, même si je trouve que la ponctuation ne met pas assez en évidence les dialogues, cela donne un peu l’impression d’une écriture à la va-vite. On sent que le fond t’importe plus que la forme.

Pour parler du fond, je crois que nous avons tous en nous des mécanismes de défense très puissants et qu’avoir peur est une chose assez normale. Dans nos sociétés de l’hyper production, on demande à l’individu d’être constamment performant et de nier ses faiblesses, d’où le sentiment parfois que cela ne vient pas de soi, que ces choses nous sont extérieures… l’acceptation est certainement un premier pas vers un retour à l’équilibre.

Enfin, ce n’est qu’un avis.
christianr
Posté le: 30-07-2012 02:27  Mis à jour: 30-07-2012 02:27
Plume d'Or
Inscrit le: 17-03-2012
De: Boisbriand, Québec
Contributions: 125
 Re: Le parasite
Merci pour tes commentaires constructifs...

Citation :
Bonjour, J’ai trouvé ton texte très intéressant, même si je trouve que la ponctuation ne met pas assez en évidence les dialogues, cela donne un peu l’impression d’une écriture à la va-vite. On sent que le fond t’importe plus que la forme.


Pour expliquer un peu, j'écris depuis janvier seulement, et ce texte est le deuxième écrit que j'ai fait depuis le début. Je suis encore très amateur, mais j'étais très inexpérimenté à ce moment-là. Il faudrait bien que je le retravaille. J'ai trop de projets.

Citation :
l’acceptation est certainement un premier pas vers un retour à l’équilibre.


Tu as très bien compris le message que je voulais lancer. Preuve que je n'ai pas échoué totalement ;)
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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