(Mélanie)
Il pleuvait des cordes désormais, le vent était violent, la mer agitée montait de plus en plus. On en avait profité pour le semer, Gabrielle ayant une parfaite connaissance du secteur, on s’était réfugiée à petite crique. J’étais trempée jusqu’aux os et c’était ce temps qui allait nous tuer si ça continuait. On était essoufflée, paniquée et on avait qu’une envie, c’était de s’échapper de là . J’entendis Gabrielle hurler malgré la tempête. Oh non ! Aran avait son arme pointée sur elle.
- Si tu brailles je te butte ! Brailla-t-il d’une voix grave de fumeur. C’est ça que tu veux ? Hein, salope ? Tu vas payer pour ce que t’as fait à ma bagnole !
Ne se laissant pas abattre, elle lui foutu un coup dans l’estomac.
* (Gabrielle)
Tiens prend ça connard tu me débectes, pensai-je de toutes mes forces.
Il ne se laissa pas décontenancer par mon coup et me mis une grosse gifle dans la figure. Il m’empoigna par les cheveux et me mettant l’arme près du visage.
- Jamais tu ne m’auras sale con ! Hurlai-je en me débattant. T’es qu’un pourri qui mérite de crever !
- De toute façon tu vas crever espèce de connasse alors qu’est-ce que j’en ai à faire ! Ricana-t-il en arborant son rictus de vieux vicelard.
Ma vie était finie, je fermai les yeux, acceptant cette fatalité. Vas-y tire. SBAM ! D’un seul coup, je vis Aran s’effondrer en avant sur le sable. C’était Mélanie qui l’avait assommé avec un gros caillou de la plage. - Merde Mél’ t’es complètement fêlée en vrai… murmurai-je abasourdie.
* (Mélanie)
Moi-même, je ne me croyais pas capable de cogner quelqu’un un jour. Mais il ne m’avait pas laissé le choix cet idiot. Il n’avait même pas fait attention à moi. Cette erreur lui a été fatale visiblement. Il saignait de la tempe droite, inconscient et par terre parmi les crabes et insectes rampants.
La voilà ta vraie place pauvre tâche…
Gabrielle lui prit son pistolet. Tant bien que mal, on tira son corps à la mer. Afin que son mauvais souvenir disparaisse sous l’eau, pour qu’il ne puisse polluer la terre. Dans le pire des cas, les gens croiraient à une noyade. L’air était chaud, le vent avait cessé de souffler, le calme était revenu, il ne restait plus que cette pluie torrentielle. Comme une douche purificatrice, elle lavait de notre passé, notre amertume, de cette violence destructrice dans l’âme. On avait le droit à une renaissance. Une nouvelle vie et une seconde chance.
- Comment on va faire avec ses hommes de main ? Lui demandai-je.
- Je m’en chargerai, t’en fais pas, me rassura-t-elle. Ils ne te toucheront pas, t’en as assez fait pour moi. Je refuse de fuir toute ma vie j’en ai marre !
Malgré l’obscurité naissante, je pouvais déceler dans ses yeux sombres de la détermination. Ils brillaient d’une lueur nouvelle que je ne leur avais jamais connue.
- Comment il s’appelle l’homme que tu t’es tapé à dix-sept ans ? Demandai-je tout à coup.
- … Jean pourquoi… ? Répondit-elle désarçonnée par ma question sans rapport… oh non… ne me dis pas que lui aussi… tu veux…
- Dis-moi où il habite. Continuai-je. Je vais lui régler son compte !
- Mais t’es une folle ! S’exclama-t-elle en rigolant.
- T’es mon amie et personne ne touche aux gens à qui je tiens sans le regretter, répondis-je entêtée.
- Je te reconnais bien là ma grosse ! Dit-elle en passant son bras autour de mon épaule. Mais maintenant c’est à moi de te protéger, t’en as assez fait pour ce soir !
- Ne m’appelle pas la grosse ! Rétorquai-je.
- Oh pardon… la grosse !
Et on continua à s’esclaffer de bon cœur. On remonta la crique. On était trempée de la tête aux pieds, on marchait sous la pluie battante sans but précis, ne sachant pas comment on allait s’en sortir à l’avenir mais on se soutenait quoi qu’il arrive dorénavant. Et personne ne nous enlèverait ça.
(Fin de la dernière partie)
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