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Nouvelles : Renaissance, Chapitre 6
Publié par AntoneR le 26-06-2012 13:50:00 ( 1426 lectures ) Articles du même auteur



Les rayons de soleil s'amusaient à l'éblouir en se reflétant dans le cadre doré posé sur le manteau de la cheminée, à sa droite... Un magnifique miroir, quelque peu immense, mais les lieux lui rendaient justice. La pièce entière l'avait toujours impressionné. Même après y avoir passé presque toutes ses journées depuis deux ans, il ne pouvait entrer dans son bureau sans en ressentir une profonde fierté. N'était-ce pas le symbole de sa réussite ?
Certains étaient bien plus luxueux, bien entendu, mais après tout, quel plaisir d'avoir enfin réussi à s'imposer, au cœur du Palais.
Son bureau en noyer, plus particulièrement, l'avait ébahi la première fois qu'il l'avait vu. Il se tenait au fond de la pièce, ses pieds imposants, finement sculptés et son contour doré à l'or fin, en face de la fenêtre exposée à l'Ouest. La fenêtre elle-même était très large et encore plus haute. Les voilages argentés contrastaient délicieusement avec les dorures présentent un peu partout dans la pièce.
Quelle chance il avait ! D'autres étaient cantonnés dans de grandes pièces, où des dizaines de bureaux se faisaient face, plongés dans une ambiance très sombre. Il n'avait jamais connu le travail dans ces pièces, mais n'en avait jamais vraiment eu envie, même s'il fallait bien commencer quelque part, fut-ce en bas de l'échelle. C'était quelque part, tout de même.
La journée commençait à peine et déjà, les papiers s'entassaient sur son bureau. Il lui arrivait parfois de souhaiter que les coursiers n'arrivent jamais.
L’Hiver lui aussi s’installait lentement sur la région, mettant fin à des mois d’une chaleur étouffante. Dans ce coin du monde, la saison « froide » n’avait rien de comparable avec celle de l’hémisphère nord, mais n’en demeurait pas moins un soulagement. L’été, les températures pouvaient aisément atteindre les quarante degrés, au minimum.
Construit au cœur du continent australien, dans un désert sec et aride, le Palais était exposé à des chaleurs effrayantes, certains jours. Autrefois nommé désert de Gibson, cerné par d’autres déserts tout aussi hostiles, celui-ci avait la particularité d’être situé sur le tropique du Capricorne, et semblait être, à l’époque de la prise de pouvoir de l’Oméga, l’endroit le plus approprié pour établir sa « capitale ».
Non loin des forêts tropicales du nord, et assez proche des côtes, sans en être trop près, l’altitude était peu élevée, autorisant des extensions illimitées, autour du Palais d’origine.
Si les aborigènes présents des siècles auparavant avaient déserté les lieux au cours de la construction, la faune, peu farouche, restait intacte, autour des nouvelles structures sorties de terre. Des chats, des renards et autres lapins vaquaient ainsi librement sans être chassés ni dérangés, Son Excellence n’y voyant aucune menace.
Pour subvenir aux besoins incommensurables de son Palais, l’Oméga avait fait installer un réseau entier de Rails, chargé de faire cheminer les marchandises à travers son immense domaine. L’eau, tirée des lacs et autres sources, et les récoltes, produites sur place ou ailleurs dans la Nation étaient acheminées jusqu’à l’enceinte extérieure du Palais, conditionnées dans les usines de la couronne industrielle, installées autour de la seconde enceinte, protégeant directement les habitants de la capitale.
Les transferts se faisaient sous très haute surveillance, à l’instar des systèmes déployés sur le continent. Le Palais lui-même était protégé par une troisième enceinte, lourdement équipée en armement et autres systèmes de défense, prévenant toute intrusion. La technologie développée au cœur du Palais, depuis une centaine d’années, évoluait sans cesse, tout entière consacrée à la protection de l’Oméga et à l’équipement de sa Garde, à travers le monde.
Tout dans ce palais était destiné à supporter l’isolement et les températures extrêmes, imposées par le climat. Une organisation pointue et savamment huilée, dont Bartton n’était pas envieux.
N'était-il pas devenu lui-même Ministre grâce à cette caractéristique ?
Nombreux étaient les sous-fifres trop enclins à le mépriser, allant même jusqu'à laisser entendre qu'il avait payé cher son poste, mais la Sécurité de la Nation n'était pas une affaire d'argent. Même s'il était incompris et ne parvenait pas à faire valoir sa vraie valeur, il savait ce qu'il en était : il avait gagné ses galons a force de travail, suant sang et eau pour parvenir à exprimer ses idées, puis à les faire accepter.
Il l'admettait volontiers, ses élucubrations burlesques ne pouvaient pas plaire au plus grand nombre, et il avait parfois des idées étranges, mais après tout, cela ne l'empêchait pas de faire son travail mieux que quiconque.
Plus encore que de son esprit, il était fier d'avoir imposé une politique moins sévère au sujet des prétendus insurgés. Il comprenait les craintes de Son Excellence, mais était-il réellement nécessaire de torturer de pauvres bougres qui n'avaient, dans une grande majorité des cas, pas fait le moindre mal à quiconque ? Encore eut-il fallu avoir des preuves tangibles de leur existence, ce qui était loin d'être gagné.
Les agissements de la Garde étaient impardonnables, s'ils n'étaient pas justifiés et le Ministre entendait bien qu'on ne salisse pas son poste et ses responsabilités par des pratiques douteuses, particulièrement quand elles n'étaient pas de rigueur.
La Garde s'était alors vue limitée dans le nombre d'interpellations, et devait fournir des preuves irréfutables avant d'interroger un détenu.
Le contexte n’était pas favorable à de telles restrictions, mais après tout, Bartton n’avait-il pas une mission au sein de ce Palais ?
Par ce biais-là, il espérait contrôler leur agressivité et obtenir d’eux un comportement plus fiable, sinon moins barbare. Le Ministre protégeait directement ses intérêts, désireux de voir son poste moins vilipendé, mais aussi ceux de son supérieur, qui lui avait confié une mission cruciale.
Une affaire de bon sens, au demeurant. L’Oméga souffrait d’une réputation peu flatteuse et même s’il n’en était pas directement responsable, Bartton avait parfaitement connaissance du problème. La suspicion d’une éventuelle menace rebelle poussait Son Excellence à une prudence disproportionnée, fort inutile, si longtemps après l’unification du monde.
Les populations étaient désormais habituées au nouveau régime sous lequel il vivait, et la Garde n’avait plus aucune légitimité réelle. Lors de sa nomination à ce poste, Bartton avait défini un axe politique clair : brider le champ d’action de cette milice trop vite devenue ingérable.
Quelqu'un frappa à la porte, tirant le Ministre de sa réflexion.
— Entrez, dit-il en saisissant son stylo-plume.
La porte s'ouvrit et un messager de la tour des radios entra.
— Bien le bonjour, Ministre Bartton, nous avons un message pour vous en provenance de Vita, annonça le jeune Maxym.
— Bonjour, donnez-moi la note, je vous prie. Je l'étudierai plus tard. Comme vous le voyez, j'ai déjà un paquet de travail, affirma Bartton, en souriant au jeune messager.
— C'est bien là le problème, Ministre Bartton ! objecta Maxym. Il s’agit d’un code Rouge, insista-t-il, en tendant le morceau de papier qu'il tenait.
— Intéressant, marmonna le Ministre, en saisissant la note. Et pourquoi un classement Rouge ? Il me semble que Vita est l'une des cités les plus calmes de la Nation...
— Il y a eu du grabuge dans le centre de la cité, Monsieur, répondit le messager. Un homme et une femme ont été vus sur la Place du Pape en train de se battre contre... et bien... C'est sur ce point que les officiers ne sont pas très précis... Il s'agirait d'un monstre gigantesque selon eux, expliqua-t-il, l'air sérieusement gêné.
— Ont-ils donné la moindre précision qui puisse nous être utile, jeune homme ? s'enquit le Ministre.
— À vrai dire, Monsieur, tout est dans la note que je viens de vous remettre, attesta le messager.
— Très bien, dans ce cas, je vais l'étudier tout de suite, je vous remercie. Vous pouvez disposer Maxym.
— A vos ordres, Monsieur le Ministre. Passez une bonne journée.
— Oui... oui, merci, murmura Bartton, le jeune homme étant déjà sorti.
Il n'avait pas le temps d'écouter, déjà fasciné par ce que disait la note :

« Aujourd'hui, dans le milieu de l'après-midi, sur la Place du Pape, une explosion a semé la panique, poussant les piétons à fuir les lieux, semant chaos et désordre.
Seuls un homme et une femme sont restés sur place, la femme faisant une démonstration particulièrement étrange.
L'explosion était apparemment due à un monstre gigantesque de couleur orangée.
La femme s'est avancée vers celui-ci et l'a réduit en miettes à l'aide d'une boule de lumière blanche après avoir vraisemblablement dialogué avec lui, le langage utilisé n'étant pas connu de nos services.
Puis les deux civiles ont quitté les lieux, nous laissant le soin de nettoyer ce qu'il restait. »

Bartton avait à peine fini de lire la note qu'il appuya instantanément sur le bouton lui permettant d'appeler un messager.
Ces évènements l'intéressaient au plus haut point, mais il avait besoin d'en savoir plus... La description des faits lui semblait vague, et il se devait d'en apprendre plus sur ces deux individus. Ils n'avaient apparemment aucune mauvaise intention, mais il valait mieux se prémunir du danger plutôt que de le combattre s'il se montrait plus virulent.
Le messager attendu frappa à la porte. Le Ministre avait toujours admiré leur rapidité d'exécution et leur habileté à la transmission, tant au niveau de leur efficacité que de leur précision. Celui qui venait de frapper ne faisait donc pas exception à la règle.
— Entrez, dit encore le Ministre, avec plus d'enthousiasme que précédemment
Cette affaire était violente et étrange, certes, mais d'une nouveauté rafraîchissante. Le Ministre sentait déjà monter en lui l'excitation de régler un cas hors du commun susceptible de marquer sa carrière pour longtemps.
— Monsieur le Ministre, vous désirez ? demanda Maxym.
Bartton ne fut pas surpris de le voir. Il était sorti quelques minutes auparavant. Le bouton qu'il avait pressé avait appelé le messager le plus proche.
— En savez-vous plus au sujet de l'affaire de Vita, jeune homme ?
— Monsieur, sauf votre respect, je viens de sortir et...
— Oui, oui, bien entendu, où avais-je la tête ? Pardonnez-moi, cette note m'a profondément troublé. Je vais en rédiger une tout de suite, pour le Bureau de l'Unité ainsi qu'une deuxième pour le Central de la Garde et je vous serai reconnaissant de les y porter le plus rapidement possible.
— Ce sera fait, Monsieur le Ministre ! Dois-je attendre dehors ?
— Bien sûr que non, ne soyez pas bête, mon cher Maxym ! Prenez un fauteuil, vos jambes méritent largement un peu de repos... assura le ministre, tout en saisissant deux feuilles de papier pour rédiger ses missives.
— Merci beaucoup, Monsieur, répondit le jeune messager, en s'asseyant.
— Ce n'est rien, vous savez combien je vous respecte, vous et vos collègues. Allons, ne vous en faites pas. Considérez que c'est un ordre, si cela vous permet de ne pas culpabiliser, plaisanta Bartton pour détendre le jeune homme.
Il se concentra sur sa note, le jeune Maxym rougissant sous ses yeux. Il fallait absolument qu'il soit clair dans ses ordres, afin qu'aucun impair ne soit commis.
Les membres de la Garde, tout le monde le savait, avaient une fâcheuse tendance à se laisser emporter, plus encore dans ce genre de situation assez exceptionnelle, pour ne pas dire extraordinaire. La précision était donc de mise, même s'il fallait pour cela en écrire plus que d'habitude.
Il ne voulait pas que ces deux personnes, même si elles avaient l'air étrange, paraissent suspectes à la lecture de sa note. L'important était de les interroger sur les faits et de tenter de comprendre le plus parfaitement possible ce qui s'était passé. Bartton avait son idée sur la chose, bien sûr, mais la Garde, elle, avait besoin de réponse.
Leur manque d’intellect n’était plus à prouver.
Au-delà de leur brutalité, les membres de la Garde n'étaient pas connus pour leurs capacités cérébrales, loin s'en fallait. Leur faire comprendre qu'aucune torture ne serait tolérée allait de soi. Ces gens n'avaient pas commis le moindre délit, pour ce que Bartton en savait. Tant que rien n'était avéré, ni dans un sens ni dans l'autre, rien ne devait entacher cette enquête, pour peu que la Garde ait été capable de la mener.
Il devait évidemment se prémunir. Certaines conditions devaient permettre aux gardes de sévir, mais Bartton doutait qu'ils ne doivent en arriver à des méthodes plus agressives que le simple dialogue — encore une fois, sous réserve que c'eut été dans leurs compétences actuelles.
Cela fit penser au Ministre qu'il devait absolument modifier les modalités de recrutement de ce service. Un peu moins de muscles et un peu plus de réflexion n'avaient jamais nui à personne, c'était évident.
Quand il eut décidé de la teneur de ses notes, il les rédigea aussi rapidement que possible pour faire parvenir ses ordres au centre de la Garde de Vita sans délai.
Il tendit ensuite les deux missives au messager, qui n'avait pas bougé d'un iota depuis qu'il s'était assis, craignant certainement d'abîmer le fauteuil sur lequel il se tenait. Le sens du devoir et de la bienséance de ces hommes était décidément stupéfiant.
— Faites vite, désormais, jeune homme et merci de votre patience, lui dit le Ministre, Maxym ayant en main les deux messages les plus importants depuis des mois.
— C'est moi qui vous remercie, Ministre Bartton. Au revoir.
— Au revoir, Maxym, dit-il.
Il ne tenait déjà plus d'impatience. Cette affaire allait se révéler passionnante, il le savait !

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Auteur Commentaire en débat
Loriane
Posté le: 29-06-2012 22:42  Mis à jour: 29-06-2012 22:42
Administrateur
Inscrit le: 14-12-2011
De: Montpellier
Contributions: 9505
 Re: Renaissance, Chapitre 6
Décidément dans tous les univers il en est de même, il semble que les gros bras soient aussi des gros couillons
je me répète mais tu es servi par une excellente écriture.
Le récit s'étoffe et on suit facilement.
Pourquoi tu ne viens pas faire un chapitre de "notre livre" dans l'atelier "concours" ?
Nous apprécierons que tu nous fasses bénéficier de ton imagination, nous délirons déjà pas mal .
Viens nous rejoindre.
Merci
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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