Cinq tours de remontoir, cinq tours et un peu plus. Un peu, pour ne pas endommager le mécanisme. Alors la valse triste! Cinq tours et un peu plus, alors vingt et une mesures. Languissantes. Vingt et une mesures et trois notes. Lui, stoïque, le regard raidie devant, hors d’elle. Le costume dur, les bras durs, il lui enserre le buste. Ils vont dans la musique. Sur place ils tournent ils détournent. Lui raide, stoïque, les bras et l’âme durs. Elle, les jambes ballantes tuées par un chagrin, ne touchent plus le sol. Elle, les jambes ballantes dans le giron sans voix, lui adresse un étrange sourire. Chaque tour veut lui tirer la tête en arrière. Elle ne résiste pas bien, elle est trop fatiguée. Mais à chaque fois son regard rattrape l’homme dur. Etrange regard, triste à tout jamais. Un étrange sourire dans les yeux, composé de tristesse et de pardon. Le corps est presque vide, seul résiste le sourire étrange. A chaque volte la pointe de ses chaussons revient frotter le disque métallique de la piste. A chacune des voltes résiste la tête. Et le sourire étrange ne part pas dans le giron, il lui reste dans les yeux. Il va sans maudire au visage impassible de l’homme. Les notes s’espacent et quand meure la musique, un couvercle écrase la ballerine dans sa boîte. Vingt et une mesures et trois notes. Pourquoi plus?
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