Baptême d'eau claire
Merci, Ru joli de mon enfance Dans mes racines je te revois, Ton eau froide et ta luisance Ma source chante ta fraicheur, Tu coules en moi ton ardeur, Ta vie liquide est mouvance. Ton eau se mêle à l'air L'azur et toi unis sans frontière, Tu es la transparence, Le goût de vérité foncière Céou rivière d'eau vive Arrogante et franche Agitée entre tes rives, Où la frondaison s'épanche Mon abri de résurgence dive M'apaise et ma soif s'étanche.
Je revois dans mon ruisseau fécond Mes pieds d'enfant Immobiles Dessinés d'infimes ridules, Frôlements de poissons qui filent. Je revois le flot où les gardons Confiants, en masse circulent. Je vois le fond d'eau limpide Où les pierres ondulent Sous le frémissant fluide. Dans ce bonheur translucide. Où éclair suspendu dans la clarté Fuit soudain sauvage et timide, La truite brillante de netteté Qui vivement d'un bond rapide Sous les nénuphars s'est cachée.
Mon Céou t'en souviens-tu ? Quand mon âme d'enfant, Fascinée par ton flot têtu Mais en quête de l'important Vacillait, cherchait sa voie. Mes choix encore en éveil. J'étais alors devenir, libre de loi, Et quand miroitait le soleil, Sur ta douce luminescence, J'ai reçu ce don de toi L'amour d'un univers pareil A ta pureté et ta clémence. Tu livres tes secrets, sans retenue, Certain te pensent faible, sans défense Pour ainsi te dévoiler sans émoi. Mon Céou, tu fus aussi mon conseil : Quand l'entrave d'un barrage De branches brisées en mille fétus Faisait à ton libre cours offense, Et obstacle à ton fil de soie. Je t'ai vu ferme mais sans rage De tes vaguelettes assidues User, pugnace en un assaut vermeil Et phagocyter les vieux bois Pour engloutir l'amas d'abondance Soumis à ton incessant limage. Tu sais reprendre sans sot raffut Ta liberté avec lente patience, Et te libérer de tous pillages. Et ton chant est merveille.
Céou de mon enfance, Loin de toi, j'ai vu D'autres eaux. J'ai vu les lacs sans fond. J'ai vu loin de toi, Des fleuves fous. Mais surtout, Je ne peux oublier la noirceur Des flots troubles des marais, Les surfaces opaques de peur Là où le regard se heurte à l'enfer. Quand sous le courant indécis Se dérobent des enroulements Que les miasmes affligeants Offrent amers et dépravés Des vies de mort enlacées Troublées des obscurs glissements. Annonce de mortels grabuges Et de corps déchiquetés Dans des abysses d'effroi, Où flotte l'aigreur biliaire Et des chairs pourries Là où deux yeux rouges embusqués En traître à l'affût S' apprêtent à l’ignoble trahison Pendant que l’appât leurré Par l'invisible infâme Avance sa vie perdue Et s'offre innocent aux ténèbres. Je revois ces eaux indignes Qui transportent en silence Le mortel danger grouillant Putride, et pestilentiel, D'invisibles hideux tueurs Qui s'immiscent sans courage Dissimulés, infects et cruels Pour lâchement happer Et corrompre les vies contraintes, Engagées dans cet univers Dans cet obscur et funèbre univers Terre et décompositions mêlées Parmi ces suspensions de chairs molles Là est le sinistre monde de l'horreur Qui trompe et abuse. En embuscade voilée.Â
J'ai vu loin de toi Le sort sombre, l'opacité. J'ai vu l’épouvante des abjects, Des trompeurs abominables Sournois, déloyaux et fourbes. Devant ces eaux malade de mort Alors que du faible traite perfide j’abhorre la forfaiture Des puants corrupteurs des vies.
Je pense à toi Céou de mon enfance, Tu fus mon eau de Baptême, L'autre naissance C'est pourquoi Je sais aujourd'hui qu'à l'heure des choix, Pour toujours je t'ai épousé, Je me suis tournée Vers ta fraîche, ta saine clarté.
Loriane Lydia Maleville.
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