Ce texte tien lieu de réponse au défi du 24 janvier dernier :
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Il était une fois dans une contrée lointaine, mystérieuse, un royaume où les êtres vivaient en paix et en harmonie avec la nature. Si je devais la comparer avec une contrée existante, je vous dirais volontiers qu’elle serait l’Andalousie, territoire en apparence aride mais fleuri, parsemé, ici et là , de terres riches et de jardins merveilleux. Y régnait un monarque éclairé et lumineux, Claude II. Il aurait pu s’appeler Claude Ier mais il ne le fit point, tellement il était attaché à une éthique de discrétion qui émergeait dans tous ses actes et ses écrits.
Ce royaume s’appelait le royaume des tablettes de chocolat. Tout y était fait à la gloire du chocolat. La capitale de ce royaume était une cité perchée dans la montagne. On y arrivait par des gorges encaissées à la beauté prenante et surprenante qui vous saisit l’âme dans tous ses recoins. Et alors que vous croyiez que ce paysage violent allait se poursuivre, après un tournant, subitement, apparaissait la capitale de ce royaume, la cité du chocolat par excellence. Ses rues étroites vous offraient des boutiques, des hôtels, en chocolat, les unes aux reflets de bronze, les autres aux reflets d’argent et d’or. Quel bonheur mais quelle torture, ami lecteur, car le rédacteur de ce conte est un passionné et un amoureux du chocolat qui n’a rien trouver de mieux, pour calmer un peu son impatience, que de s’entourer d’une tablette de chocolat, bien sûr.
Au plus haut de la cité, se trouvait un manoir que l’on entr’apercevait seulement au sein d’une jolie clairière entourée d’une forêt magique. Chacune des essences d’arbres de cette forêt avait un talent, celle de pouvoir réciter des poèmes sur les qualités du monarque et des habitants de ce royaume. Les chênes vantaient la force de caractère. Les arbres aux cent écus récitaient la justesse et la droiture. Les érables Negundo chantaient la finesse d’esprit. Bien d’autres essences d’arbres et de fleurs y trônaient aux parfums subtils et riches. Gambadaient joyeusement au milieu de cette nature glorieuse, en toute liberté, des lapins, des cerfs, des biches, des faons, des chevreaux, des poules et des canards. Seul le renard rusé n’y avait pas sa place. Mais par respect pour toutes les espèces de la nature, d’autres espaces lui étaient réservés.
Le manoir, résidence du monarque et de sa famille, était lui-même en chocolat. Il était composé d’un corps de logis central en chocolat noir aux élans de bronze, flanqué de deux ailes en retour sur un jardin central à la française. Les fenêtres hautes de la façade, de style classique, étaient ornées de mascarons représentant les déesses et les muses, en chocolat praliné, ces dernières étant célébrées dans tout le royaume. Un dôme surplombait la partie centrale du manoir qui se terminait par une terrasse faîtière enchâssant une horloge astronomique. La puissance du temps présent inspirait les actions de ce royaume.
Tout semblait donc parfait dans ce royaume. Mais depuis quelques mois, une troupe de mécréants bombardaient les villes et les villages, dans la province la plus éloignée du royaume, de grains de praline et de cacao et s’évertuait à construire des ateliers géants de fabrication de chocolat industriel qui faisaient fondre, en raison de la chaleur dégagée, les trésors architecturaux en chocolat. Le monarque, craignant que ces malheurs ne s’abattent sur tout le pays, se décida à agir, mais il n’avait pas d’armée pour combattre ces mercenaires qui faisaient fondre les merveilles de son pays.
Mais qu’avait-on fait à tous ces gredins, se disait-il, pour qu’il nous crée ainsi un réchauffement climatique si fatidique ? Il se souvint alors que dans la forêt, au delà des gorges, vivait une fée entourée de cloches en chocolat qui sonnaient à chaque fois qu’un étranger s’approchait de sa demeure. Cette fée avait le pouvoir de répondre à toute question posée dès lors que l’humour s’installait dans la relation avec son interlocuteur. Il se décida donc de lui rendre une visite. En chemin, il rencontra bien des embuches. Il rencontra notamment les frères Grimm qui lui dirent de ne pas aller plus avant dans le conte et que la réalité était bien plus heureuse. Têtu ou plutôt tenace comme à son habitude, il poursuivit sa route, convaincu qu’il allait trouver sa réponse dans l’âme du conte et entra dans une forêt bien étrange. Après vingt minutes de marche, quel ne fut pas son étonnement d’apercevoir, au loin, dans une clairière une silhouette immobile qui l’appelait. - Claude, viens par ici, rejoins moi vite!
Après quoi les cloches se mirent à sonner à toutes volées. Tous les animaux de la forêt accoururent alors pour entourer la fée aux milles cloches auréolées d’or et de bronze.
- Tiens, tu te souviens de moi ! - Je ne t’ai jamais vraiment oublié, très chère fée, tu es dans mon cœur. - Que me veux-tu ? - Je désire ton aide pour que cessent les actions de dégradation de nos belles bâtisses en chocolat. - Mais d’abord, j’aimerais bien comprendre ta passion du chocolat. Mais attention je ne suis pas chocolat et n’ai nul envie non plus de le devenir ! - Tu veux connaître notre philosophie chocolat. Alors commence par dire plusieurs fois le mot chocolat : chocolat, chocolat, chocolat, chocolat, chocolat,… A chaque fois que tu le dis, aies une pensée chocolat….Tu sens alors les bouquets du chocolat monter dans tes narines après avoir déchiré l’emballage de la tablette de chocolat, avec désir, et écouter la musique du bruissement du papier… Ensuite imagine l’explosion du goût voluptueux du chocolat noir dans ta bouche puis y sentir fondre ses carrés. Par effet de la rétro olfaction, sens-tu à nouveau ses bouquets venus du plus profond de ton être ! - Eh ! Je ne te demande pas de me stimuler les papilles mais de m’expliquer la raison d’être de ta passion. - Que puis-je te dire d’autres ? Nous avons choisi de nous placer sous les hospices du chocolat parce que cela est bon pour la santé et parce que cela rend de bonne humeur. Et puis, si je crois m’en souvenir, le chocolat améliorerait la mémoire ! - Voyons, je te connais mieux que tu ne le crois. Tes motivations sont tout autre et puis « la bonne santé est un état précaire qui ne présage rien de bon ». - En fait, nous avons succombé à la passion du chocolat avant qu’elle ne s’éloigne. Nous ne voulions pas laisser s’échapper ces bonheurs pour le palais. Et puis pourquoi résister à une telle tentation si bénéfique ? Pour nous, Il est devenu une femme que nous désirons honorer. Et nous en éprouvons du plaisir à chaque fois. - C’est érotique, en somme ! - Pas seulement, pas seulement ! Le matin, le chocolat est appétant, le midi, il est délicieux, le soir il est somptueux. Manger du chocolat est un rite. - Un rite, un rite, n’exagérons rien ! De là en faire une religion, on n’en est pas loin ! - Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire. Et puis, si tu dis me connaître, les religions ne sont pas ma tasse de thé. C’est peut-être pour cela que je préfère le chocolat. Ne nous querellons pas ! Et puis, dans notre royaume, nous pensons même que les querelles commencent par le chocolat et finissent dans le chocolat ! Et nous désirons vraiment que notre querelle avec les mécréants finira dans le chocolat. - Tu m’as convaincu non sans humour. Je vais donc t’offrir une solution. Je connais un Roi, Chaban II, qui a mis au point un canon de chocolat chaud qui peut neutraliser les pralines, afin de les faire fondre et de les enrober de tous ses bouquets.
Le Roi Claude II rendit visite à Chaban II qui était un monarque loufoque. Tout en apparence les séparait mais dans la réalité de l’âme et du cœur, ils partageaient des valeurs communes. Ils étaient attachés l’un et l’autre aux valeurs humanistes et à l’humour rebelle qui était, chez eux, une raison d’être. Chaban II était un passionné des armes de guerre sans danger et originales. Ses fameux canons étaient décorés, sur leurs faces supérieures, de figurines qui représentaient tous les dieux de l’olympe et tous les écrivains qu’il aimait tout particulièrement. Il était si attaché à la vie humaine que ses canons avaient seulement la faculté d’annihiler la puissance de ses ennemis sans les tuer. Ils crachaient du chocolat chaud avec une telle puissance qu’aucun nutriment ne leur résistait. Les deux monarques s’allièrent et se préparèrent à combattre. La tradition populaire des deux royaumes chante encore la bataille étrange qui opposa les deux royaumes aux mécréants. Sans que l’on sache bien pourquoi et comment, pendant la bataille, le chocolat chaud n’agissait seulement que sur les nutriments mais pas sur les êtres humains. Dès lors qu’il entrait en contact avec les corps des combattants, il refroidissait immédiatement. A quelque chose malheur est bon raconte la tradition, c’est ainsi que furent créés les chocolats au praliné qui sont parmi les préférés de l’écrivain de ce petit conte sans prétention. Les mécréants cessèrent d’être des mécréants ; ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants qui adorèrent naturellement ces chocolats. Quant au Roi Claude II, les historiens ont de la peine à reconstituer la fin de sa vie, tellement il vécut dans la discrétion. Pour le savoir, il vous faudra aller écouter les pierres des gorges encaissées. Quelques-unes vous diront qu’il vécut heureux, entouré de ses proches et de ses ami(e)s et qu’il mourut avec honneur, dignité, en cultivant jusqu’à la dernière minute les valeurs humanistes auxquelles il était tant attaché.
Amis lecteurs, il me faut vous avouer qu’une seule tablette de chocolat ne m’a pas suffi tout au long de ce écrit. Une seconde tablette de chocolat praliné a été nécessaire. Chut ! Ne le répétez pas ! Je négocie actuellement avec mes paramètres biologiques. Je les afflige mais ils transigent ! Et que Couscous soit rassurée, mes chocolats au praliné préférés sont des chocolats belges.
Lorsque l’auteur de ce texte, de cette terre, s’en ira, C’est dans l’écoute de quelques airs de musique qu’il partira, Avec, dans sa besace, des carrés de chocolat.
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