De larmes et de sang, de rires déments et de cauchemars transcendants ; ce lieu sombre et désespéré qui hante mes nuits les plus infamantes. C'est en ce lieu et en cette heure annihilante que je me souviens de ces êtres décadents ; de ces créatures sans âme et sans avenir qui m'ont enchaîné à leurs malédictions invalidantes. C'est ici que j'ai aperçu ce que personne n'est capable de contempler sans craindre la colère d'un Dieu terrifiant. C'est ici que j'ai discerné l'ombre de ces Démons engendrés par le Néant ; que j'ai distingué leurs formes monstrueuses, leurs ailes filiformes, leurs bras et leurs jambes écorchés vifs et sanguinolents,leurs mains aux ongles griffus et longilignes. C'est encore ici que j'ai longuement parcouru les salles obscures, les cryptes séculaires abandonnées à leurs nombreux tourments ; que j'ai deviné les drames qui se sont joué en leur présence : incendies, meurtres, sabbats abominables, tortures et humiliations. Chaque mur, chaque meuble, chaque couloir, chaque escalier, chaque étage - de ses caves poussiéreuses et à éventrées à son grenier constellé de cadavres décharnés et figés - est imprégné de leur présence, de leurs souvenirs, de leurs visages grimaçants, de leurs regards incendiaires et suffisants. Je ne peux leur échapper ; ils s'accrochent à moi avec insistance ; leurs doigts froids comme de la glace aspirent toute ma force vitale, me vident de toute substance. Leurs silhouettes fantomatiques, leur présence balbutiante, m'anéantit. Je suis dans l'impossibilité de les fuir ou de les combattre ; juste à tenter de les repousser vainement chaque fois que la Nuit m'enveloppe de sa douce nonchalance. ; juste à tenter de m'en écarter quelques instants lorsque le Soleil parait et écarte momentanément de ses reflets cuivrés leurs ébats débridés ; leurs caresses syncopées à mon encontre que je n'ai pas l'audace ni la possibilité de refuser...
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