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Nouvelles confirmées : Le parfum
Publié par couscous le 17-05-2014 18:30:00 ( 1255 lectures ) Articles du même auteur



Monsieur Leblanc entre dans l’unique parfumerie de sa petite ville natale. La vendeuse adresse un sourire très commercial à son premier client de la journée.

« Bonjour, Michel. Comment puis-je t’aider ?
- Bonjour Line, je voudrais un parfum assez corsé pour ma femme.
- Marie en a marre de son éternel Anaïs Anaïs ?
- Oui. Que me conseilles-tu ? »

La spécialiste des fragrances enfermées dans des bouteilles multicolores se plante devant sa vitrine bien achalandée et réfléchit longuement. Elle revient avec une dizaine de flacons aux formes toutes les plus originales les unes que les autres. Les languettes vaporisées sont présentées au vieil homme puis passent une à une sous son nez d’où dépassent de longs poils gris. Après une longue hésitation, il opte pour un parfum très puissant, presque entêtant, et qui porte le nom évocateur de « Ne m’oublie jamais ». La boîte à dominante rouge et or est emballée avec soin et remise à Monsieur Leblanc, qui laisse galamment le surplus de monnaie à titre de pourboire pour le temps que Line lui a consacré.

De retour chez lui, il crie joyeusement :

« Chérie, je suis rentré ! »

Il pose sa veste sur la patère de l’entrée et se dirige vers le salon. À la télévision passe un jeu qui met en scène des couples soumis à des batteries de questions. C’est l’émission préférée de Marie. Michel caresse les longs cheveux gris de son épouse qui pendent sur le dessus du canapé en cuir acheté à l’occasion de leur cinquantième anniversaire de mariage. Qu’est-ce qu’ils avaient dansé jusque tard dans la nuit dans cette petite guinguette en face de l’hôtel de ville. Les yeux dans les yeux, ils en avaient oublié toutes les épreuves que la vie leur avait fait traverser : l’incendie qui avait failli coûter la vie de Michel et lui avait ravagé la peau du dos, le bébé qu’ils avaient perdu quelques heures après avoir pu le bercer, le cancer qui s’était installé subrepticement dans le cerveau de Marie et qu’elle avait vaillamment combattu pendant de longs mois.

Michel retire la boîte aux couleurs chatoyantes du sachet en plastique.

« Je pense que celui-ci devrait te plaire. Joyeux anniversaire ma chérie. Quatre-vingt-cinq ans. Qui aurait cru qu’on les fêterait un jour ? Ces médecins ne savent pas ce qu’ils disent parfois. Condamnée ! J’entends encore le professeur Lecrabe m’annoncer qu’il fallait se résoudre car la récidive était virulente. Et tu es là, toujours à mes côtés. »

Michel adresse un regard amoureux à sa chérie assise dans le canapé. Il ouvre l’emballage et sort la petite bouteille à la forme oblongue. Il se met à vaporiser abondamment Marie. Les gouttelettes de parfum se déposent sur ses mains blanchâtres marbrées de brun, sur son visage dont la lèvre inférieure pend jusqu’au menton et la peau des joues commence à s’affaisser de manière à laisser apparaître le dessous de ses orbites. Un petit ver blanc sort alors de son nez, donnant un semblant de vie à ce corps devenu inerte depuis de nombreux jours au cours d’une émission politique. Marie s’endormait souvent au son des joutes verbales des candidats aux élections. Elle se plaisait alors à dire en se réveillant : « C’est d’un ennui mortel ces programmes mais je les regarde rien que pour te faire plaisir mon amour. »

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Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.
Auteur Commentaire en débat
EXEM
Posté le: 18-05-2014 03:00  Mis à jour: 18-05-2014 03:00
Plume d'Or
Inscrit le: 23-10-2013
De:
Contributions: 1480
 Re: Le parfum
Quand je vois le nom de Couscous sur la liste, j'ai tout de suite faim de ses textes. Celui-ci comme les autres ne déçoit pas. Comme parfum fort, c'est un fort parfum, je vous le dis. Je dois avouer que j'ai un peu deviner la fin. Mais avec Couscous la fin n'est que le début car le reste est magistrale. Son style puissant nous tient en haleine et, persnnellement, j'admire toujours son style "NOIR". Enfin, comme toujours un bon moment de passé. Merci.
couscous
Posté le: 18-05-2014 06:25  Mis à jour: 18-05-2014 06:25
Modérateur
Inscrit le: 21-03-2013
De: Belgique
Contributions: 3218
 Re: Le parfum
Mon style noir naît grâce à l'encre de Chine qui trône sur mon bureau.
Oui, le parfum a tout intérêt à être fort dans ce cas de figure. Tu as donc deviné où je voulais vous emmener. Heureuse que mon récit t'ait donné faim.

Merci Exem

Amitiés

Couscous
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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