Petite promenade en Corse, hors saison.
Je suis bien d'accord avec vous. Je préfère commencer en m'attirant vos bonnes grâces. Je suis bien d'accord avec vous, vous qui avez circulé, cet été, sur les routes Corses: le réseau routier est particulièrement bien réparti et en très bon état. Ce que vous ne savez pas, c'est que chaque habitant de l’île a l'impression d'y avoir apporté sa contribution. A l'usure. Ayant un rendez-vous à Ajaccio, il y a quelques jours, j'avais calculé, très largement, que je pouvais prévoir une heure de temps pour faire les trente kilomètres m'en séparant. Compte tenu du fait qu'il n'y a pratiquement personne sur une route nationale en bon état et avec de longues portions de lignes droites, je m'imaginais arriver bien en avance et bénéficier, pourquoi pas,d' une réception rapide à mon rendez-vous. Il y avait encore moins de monde que je ne l'avais pensé, sur la route. J'ai mis deux heures et quart pour faire les trente kilomètres de parcours. A seule fin de ne pas perturber les flots de vacanciers durant l'été, tous les travaux d'aménagement de route se font dès le printemps. C"est ainsi que j'ai vu fleurir, sur mon chemin, une bonne douzaine de chantiers mobiles , avec leurs feux rouges alternés. Des feux rouges sur lesquels on est tenté d'aller taper pour s'assurer qu'ils ne sont pas bloqués sur le rouge. Mais dès qu'il passe au vert, et que bêtement on se dépêche de démarrer sur les chapeaux de roues, sachant pourtant que le rouge prendra également son temps, de l'autre côté, nous sommes comme qui dirait accueillis par l'ensemble des ouvriers présent, dont la seule occupation semble être de devoir nous informer, avec de grands gestes de bras, que nous pouvons y aller, la route est libre ! Toutefois, au hasard des chantiers mobiles, il peut arriver de voir ce spectacle surprenant : Huit à dix hommes, bien repérables en plein solei,l grâce à leurs vêtements orange fluo, réunis en cercle autour d'une tranchée dans laquelle un laborieux transpire en jouant de la pioche.
Moi, je m'en fiche, je sais où je vais...mais il m'arrive parfois, en dépassant des panneaux routiers, d'avoir une pensée émue pour le malheureux touriste qui cherche son chemin en lisant les panneaux routiers. Remarquez bien qu'il est possible de voir le côté ludique de la chose en essayant d'imaginer quelle lettre se trouvait là avant qu'un trou de balle ne prenne sa place. Là encore, il faut considérer la sagesse ancestrale des chasseurs. Serait-il vraiment raisonnable de commencer à tirer sur des cibles mobiles sans avoir, au préalable, ajusté son tir sur une cible immobile et bien visible qui, en outre, est remplacée régulièrement avant qu'un nouvel ajustement soit nécessaire ?
Quoi qu'on dise, le respect des limitations de vitesses, sur les routes Corses, sont observés avec beaucoup de vigilance. Beaucoup considèrent même que les vitesses tolérées sont bien trop élevées et chacun apporte son amendement personnel, selon sa sensibilité. En effet : Qui peut assurer qu'à soixante à l'heure, à la sortie d'un virage, il disposera du temps nécessaire lui permettant de freiner pour épargner une vache, un troupeau de brebis, des chevaux en fugue, de simples cochons en guinguette ou même, et là le touriste est content et sort vite son appareil photo, une harde de sangliers qui en a marre des coups de fusil ? Mais supposons que le parcours se soit effectué sans encombre. On aborde l'entrée d'un village. Doooucement. Tout doucement, toujours, pour être sur d'en voir la sortie, du village. Les visiteurs de fraîche date risquent d'avoir des suées, durant la traversée du village: j'en ai vu, tétanisés, n'osant pas bouger la tête durant le chemin. Il ne comprennent pas pourquoi tous les gens, sur leur passage, se penche pour les dévisager longuement, certains allant jusqu'à passer la tête par la portière pour mieux les voir. La raison est pourtant fort louable: il paraîtrait impensable, ici, de croiser quelqu'un, qu'on pourrait un tant soit peu connaître, sans le saluer.. Et comment le saluer si on ne l'a pas reconnu ? Les chiens. Les fameux chiens corses dont il est fait mention dans ' l’enquête Corse '. Zébrés comme des hyènes , souvent laids à faire peur, ce sont de braves clébards qui encombrent les rues en ayant leur utilité : Ils régularisent le trafic. Affectionnant particulièrement les milieux de chaussées pour leurs longues siestes, allez savoir pourquoi, il y a belle lurette que personne ne cherche plus à les déloger. Ce qui fait que lorsque vous avez la prétention de passer quand même, vous n'avez que la possibilité d'attendre leur bon vouloir, et je suis persuadé qu'ils en sont conscients, ou bien de tenter de les contourner, en faisant quelques manœuvres. Ne klaxonnez surtout pas, malheureux ! les chiens n'ont pas le monopole de la sieste, mais ont plus de tolérance au bruits que leurs maîtres...
Supposons que vous êtes parvenus à rejoindre Ajaccio, veuillez, s'il vous plait, vous adapter aux coutumes de l'endroit. Sinon, vous risquez d'éclater... Exemple : Dans les premiers temps de mon arrivée à Ajaccio, je cherchais un emplacement pour garer ma voiture. J'aperçus un bord de trottoir où un emplacement vide permettait à deux véhicules de se garer. Alors que j'étais en train de manœuvrer en marche arrière pour prendre une place, une voiture arriva, derrière moi, et se plaça, en double file ! devant les deux emplacements. Le conducteur descendit tranquillement de son véhicule, et je l’interpellast, très civilement : - " Je ne comprend pas..Pourquoi n'avez-vous pas pris une des deux places disponibles ?" Et il me répondit, en soulevant les épaules tellement c'était évident : - " Et alora ! si je le fais, il va y avoir un abruti qui va se garer en double file à côté de moi. Et comment je repartirais, moi ?" Qu'est-ce vous voulez répondre à cela....
Une fois garé, si vous avez l'intention d'aller voir les yachts, sur le nouveau port, étudiez bien votre itinéraire. Je pense qu'il est plus facile de voir les bateaux en cartes postales, vers le milieu de la journée. La course aux emplacements de tables, entre restaurateurs, n'a pas de limites. C'est pourquoi il vous faudra, si vous avez la prétention de longer le quai d'un bout à l'autre, choisir entre deux solutions : Faire, de temps en temps, des détours à la nage, ou bien affirmer vos droits et passer en sautant de table en table. C"était comme cela il y a quelques jours, et pourtant, ce n'était pas les vacances.Mais comme on m'avait invité, je voyais cela de ma table. On voit beaucoup mieux.
Vous voilà bien informés sur un , peut-être, futur voyage que je vous souhaite agréable. Profitez vite avant que le folklore disparaisse,d' ici, lui aussi .
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