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Nouvelles confirmées : M. A.
Publié par couscous le 05-03-2014 06:40:00 ( 1851 lectures ) Articles du même auteur



M. A.

« Bonjour, mesdames, bienvenues aux M. A., les Marâtres Anonymes. Nous sommes ici pour nous soutenir, échanger. Nous souhaitons toutes ne plus être affublées de ce nom qui nous colle à la peau et donne une mauvaise image de nous. Commençons. Vous, là … avec le chat sur les genoux. »

L’animal émet un feulement menaçant en fixant l’auditrice avec un regard sombre. Il est sur les genoux d’une femme aux cheveux grisonnants, montés en chignon volumineux. Elle a de petits yeux et sa bouche n’est qu’un fin trait sous un nez droit.

« Chut, Lucifer. Reste calme. Bonjour à toutes. Je m’appelle Lady Trémaire et je suis gentille depuis un mois. »

L’assistance se met à applaudir avec un enthousiasme mou.

« Merci. Ce ne fut pas facile. À mon second mariage, j’ai hérité d’une belle-fille désormais célèbre, Cendrillon. Déjà, je ne sais pas où son père et sa défunte mère ont dégoté cet affreux prénom. Pas sûre qu’ils l’aimaient tant que cela la petite. Bref, j’avais déjà deux magnifiques filles, dévouées et gentilles. Nous nous sommes donc installées dans la demeure de mon nouvel époux. Mais ce dernier n’a pas survécu longtemps, fatigué par les caprices incessants de sa chère enfant : (en prenant une voix nasillarde) Je veux un nouveau pigeon messager car le mien n’est pas assez rapide, je veux un carrosse 4 chevaux, je veux faire une grande fête avec mes copines Aurore, Ariel, Blanche-Neige et ses 7 potes. Il lui cédait tout ! Après son enterrement, j’ai dû reprendre les rênes de l’éducation de cette jeune fille, pour son bien. Tout d’abord, j’ai voulu lui apprendre à vivre dans des conditions précaires, comme une étudiante universitaire dans un kot de cinq mètres carrés. Ensuite, j’ai revu son emploi du temps. Pour se préparer à devenir une bonne épouse, je lui ai délégué les tâches ménagères que j’aimais tant effectuer moi-même. Mon sacrifice a été perçu comme de la maltraitance et de la cruauté. Je ne l’ai pourtant pas empêchée d’aller au bal du Roi. Mais de là à voler les affaires de ses sœurs. Quel culot ! Lorsque le prince est tombé amoureux d’elle et qu’il a trouvé sa godasse, je l’ai enfermée dans sa chambre afin de lui éviter la honte d’avoir à reconnaître qu’elle avait les pieds de la taille d’un enfant de six ans et possédait de si horribles escarpins. Et cela a aussi été mal interprété, juste parce que je porte l’étiquette « Belle-mère ».

- Bien. Merci pour votre témoignage. Qui veut prendre la parole ? »

Une femme affreusement défigurée lève la main.

« Bonjour, je m’appelle Irène. Je voudrais aussi remettre l’église au milieu du village. Vous me connaissez plutôt sous le nom de « Reine-sorcière », belle-mère de Blanche-Neige. »

Toutes, en cœur : « Bienvenue Irène.

- Merci de m’accueillir parmi vous. Cette petite était si pâle car elle restait tout le temps enfermée dans sa chambre, occupée à fignoler son profil sur jesuisuneprincesse.com. Il fallait qu’elle prenne un peu l’air alors je l’ai envoyée avec le chasseur comme garde du corps. Jamais je n’ai demandé à ce qu’il la tue ! Cet homme fume des champignons hallucinogènes lorsqu’il part en forêt et il s’invente des missions. Pourquoi lui aurais-je réclamé le cœur de cette godiche … euh pardon, cette adorable jeune fille. Lorsque j’ai appris qu’elle avait été recueillie par ces sept bonshommes. je me suis demandée ce qu’ils lui faisaient subir et je suis partie à sa recherche. Entretemps, j’avais subi une opération de chirurgie esthétique qui avait totalement raté et les gens m’ont surnommée « la sorcière ». Je suis toujours en procès contre ce chirurgien de pacotille ! Mais c’est une autre histoire.

- Mais vous lui avez donné une pomme empoisonnée tout de même.

- Non, je craignais qu’elle ne soit pas nourrie et je lui apportais des pommes. Elle était en effet affamée et s’est jetée sur la première venue en croquant un énorme morceau qui est allé se coincer dans sa gorge. Facile après de m’accuser d’empoissonnement. C’est moi la victime dans cette affaire car les nains m’ont poursuivie et ont failli me tuer. Regardez dans quel état je me trouve maintenant pendant que Mademoiselle coule des jours heureux avec son Prince qu’elle trouvé grâce à moi ! Il ne l’aurait jamais embrassée si elle avait continué à se terrer dans la maisonnette des nains !
- Merci Irène. Votre témoignage est édifiant. Nous sommes qualifiées de méchantes, des femmes à moitié folles, qui s’acharnent contre un être considéré comme innocent. Alors qu’il n’en est rien ! Arrêtons de croire que les enfants, dès qu’ils sont orphelins, sont gentils. Ils nous considèrent toujours comme des intruses, des voleuses de pères, celles qui ne peuvent aimer que leur propre progéniture. »

Une dame brune au visage fermé et dur lève la main et la parole lui est donnée.

« Bonjour, je m’appelle Paule. Ce sont mes propres enfants qui m’ont promue, enfin si je puis m’exprimer ainsi, au rang de marâtre, ce qui me vaut la joie d’être parmi vous aujourd’hui. Ils n’ont pas trouvé mieux que de me donner un surnom très évocateur, celui de « Folcoche », une contraction des mots « folle » et « cochonne », cela vous donne une bonne idée de la considération qu’ils me portent. Qu’ai-je fait pour mériter une telle humiliation ? J’ai mis en place la meilleure éducation, celle qui ne récompense que l’enfant qui le mérite par son comportement exemplaire. Il ne sert à rien de les gâter, on ne crée que des chiffes molles et des bons à rien. Ils n’ont pourtant manqué de rien, même s’ils vous diront le contraire. Les enfants ne se rendent jamais compte des sacrifices que leurs parents font pour eux. C’est injuste de devoir se justifier. Quelle ingratitude ! »

La dame cache son visage dans ses mains ridées et sanglote amèrement.

« Mes amies, je vous propose de se revoir dans un mois. L’objectif que je vous fixe, et qui vous permettra d’effacer peu à peu cette mauvaise image de vous, c’est de sourire. Regardez les héroïnes, les fées, princesses diverses et variées, mères auréolées d’amour … elles sourient toutes à en perdre les dents. Même si le soir, vos joues sont douloureuses et semblent figées dans cette expression qui vous est inhabituelle, tenez bon. Vous verrez que vous finirez un jour par obtenir une nouvelle étiquette, celle de « belle-maman » dans le bon sens du terme, celle qui est belle et bonne, la maman aimante et non la mère qu’on impose et qui est subie. Vive les M. A. ! Qu’un jour, notre association n’ait plus la nécessité d’exister ! »

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Auteur Commentaire en débat
Loriane
Posté le: 07-03-2014 22:47  Mis à jour: 08-03-2014 09:05
Administrateur
Inscrit le: 14-12-2011
De: Montpellier
Contributions: 9505
 Re: M. A.
Et encore un commentaire disparu : marre de ne pas faire assez attention et de voir mes commentaires disparaître !

Je disais que la haine des femmes persiste, y compris dans l'univers enfantin, car c'est là que l'atteinte est la plus efficace.
Cette imagerie populaire malsaine est une arme redoutable qui pousse ses racines partout dans les esprits, dès le plus jeune âge, dans tous les domaines qu'explore un humain durant sa vie : littérature, enseignement, légendes, vie quotidienne, vie sociale, familiale, travail, humour, art ... Ce poison détruit les femmes avant même de les laisser grandir, les transformant depuis 4 millénaires en des créatures, des archétypes réducteurs qui n'ont que peu à voir avec leur vraie personne. Sapant si bien leur estime d'elles-mêmes et leur jugement qu'elles transmettent en personne ces médisances injustifiées, participant à leur propre destruction mentale.
Cette haine est infâme pour toute notre société et pour la paix entre hommes et femmes, car ces représentations influencent les comportements, les personnalités et produisent des femmes qui ont une mauvaise opinion de leur sexe et développent des complexes inconscients ou une dévalorisation agressive.
Passons à autre chose ce sera plus sain.
Merci
couscous
Posté le: 08-03-2014 06:39  Mis à jour: 08-03-2014 06:39
Modérateur
Inscrit le: 21-03-2013
De: Belgique
Contributions: 3218
 Re: M. A.
Oui, Loriane ! Faisons l'amour, pas la guerre des sexes.

Merci

Couscous
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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