[left] Moshe
Je gravis péniblement ces marches qui nous ont vus naître,grandir avec malice. Je suis âgé aujourd'hui de cent vies, plus orgueilleuses les unes que les autres.
Mon existence est nôtre, mon petit ami de sept ans . Te souviens tu de nos escapades ,nos vêtements en lambeaux l'innocence de nos souffles d'enfants? Cela fait si longtemps maintenant .Encore le perron à traverser et te voilà vivant. Murs décrépis, boiseries hirsutes, mes yeux perlent à chacun de mes pas hésitants d’éphémère. Les caves étaient obscures et profondes ,nos filouteries passaient aussi par la peur , je ne voulais pas te lâcher la main ,mon corps frêle s'en remettait à ton audace . Nous étions inséparable.
Entends tu Mame nous crier du haut de Varsovie les paroles d'une mère inquiète et assoiffée d'amour? Juste quelques pas et je serais de retour chez nous. Les rêves s' entremêlent , se confondent . Où sont mes jambes d'antan? Nous imaginions des cités d'Opale où les hommes étaient lumineux, si bons que l’Éden nous importait.
_»Moshe,je ne voulais pas y aller..Je t'ai laissé poursuivre»
Ces chiens hargneux m'effrayaient , nous n'avions que de si petites peaux. Mes os n'etaient que friandises pour ces colosses, je tremblais,je pleurais, laissant la poussiere t'emporter. J'ignorais qu'a ce moment je recoltais ta vie au creux de ma paume de six ans.
_»Pardonnes moi Moshe de nous être désunis....
Le silence assourdi , le chaos est parti avec les dernières salves, je pousse cette porte millénaire, toujours cette poussière âcre qui vous mord l'existence et me poursuit sans cesse du sommet des chéneaux.
Entrez en moi toutes mes familles , les vivants de mes jeunes années et que du tréfonds de ma gorge vous ressuscitiez chacun dans d'affreuses quintes. Je suis revenu Moshe et je te sens prés de mes lèvres, filet de sang qui s'echappe . Mon pouls balbutie, me suis allongé sur ce sol de notre havre. L'hiver n'a jamais existé, Auschwitz est un prénom de fleur ,le plafond explose d'images mirobolantes, vous me couvrez les paupières ,nuits eternelles, Moshe ….
»Je viens.....»
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