Un goût d’ailleurs

Paul et Pierre tiennent un petit restaurant dans le centre ville de Saint Hubert, petite ville au cœur des Ardennes belges. L’établissement à l’enseigne « Un goût d’ailleurs », est modeste mais possède une clientèle fidèle. Un jour, un homme entre et se présente comme inspecteur. Il vient vérifier la qualité des mets servis et demande à ce qu’on lui serve un menu complet. Paul, le serveur, sent ses mains devenir moites et part en cuisine prévenir Pierre. Ce dernier le rassure et lui dit qu’il s’occupe de tout. Une dame est installée près de l’inspecteur et tente d’entamer la conversation.

« Je suis une habituée. Leur cuisine est un régal ! Heureusement qu’ils existent. Cela me rappelle mon enfance. Prenez la soupe de batafouilles, elle est délicieuse.
- Pardon …. La soupe de quoi ? »

À ce moment-là, Paul arrive avec le potage en annonçant :

« Crème d’aubergines.
- Madame me conseillait la soupe de ba …
- Nous n’en avons plus. Celle-ci est tout aussi bonne. Bon appétit ! »

L’homme commence par quelques cuillérées méfiantes pour finir par vider goulûment le contenu de son bol, que Paul vient reprendre.

« Monsieur a apprécié ?
- Oui, c’était incroyable. »

Le plat lui est ensuite servi.

« Carbonnades de sanglier au gratin de carottes.
- Vous avez du sanglier en cette saison ?
- Euh … oui. Notre fournisseur en a en stock. »

La voisine, curieuse, jette un œil à l’assiette et annonce :

« Mais c’est votre bistouffade de cramolle ! »

Le client jette un regard interrogateur au serveur qui rougit et chuchote.

« Ne faites pas attention. C’est un jeu entre nous. »
Amusé, l’inspecteur attaque son assiette et n’en laisse pas une miette. Entredeux, la dame paie son addition. Avant de partir, elle lance à l’inspecteur :
« Demandez leur tarte aux pravidas flambées. C’est incontournable. »

Le dessert est à la hauteur du reste du menu. Avant de partir, il demande à rencontrer le chef pour le féliciter de son talent. Paul lui demande de patienter quelques instants avant de le faire pénétrer dans la cuisine. Pierre, le tablier maculé de taches, est derrière son fourneau, finissant de le briquer. Après la présentation de félicitations, d’éloges retentissants, l’inspecteur paie et sort du restaurant, maintenant vide de clients.

Paul retourne près de son collègue. Il retire sa veste de costume et sa chemise blanche, libérant ses deux autres bras. Pierre, lui, s’avance sur ses quatre tentacules en annonçant :

« On a eu chaud !
- Oui et Madame Deuloin qui lui parlait de la soupe de batafouilles et de notre cramolle !
- Il n’y a vu que du feu. Heureusement que certains ingrédients extraterrestres ressemblent à la nourriture terrienne et que les épices modifient le goût sinon on était cuits !
- Le comble pour un cuisinier ! Il faudrait peut-être qu’on prévoie des plats terriens sur notre carte.
- Ce n’est pas nécessaire. On perdrait notre originalité.
- Tu as raison Blè ! Tant que personne ne se plaint ! On a reçu la dernière livraison de Frapalien 3147, une grande année.
- Fêtons cela Rô ! Santé ! »




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