Quand la nuit fait sommeil, quand mon esprit s’endort Je revois ma jeunesse, je là rêve en couleur Mon enfance passée sur la place aux tilleuls Sous le regard accort de mes tendres aïeuls
Les parties de ballon, aux capricieux rebonds Sous le regard méfiant de voisins furibonds Dont les fenêtres ouvertes étaient souvent la cible D’un pari surnommé : le tir de l’impossible
La messe dominicale, en habit du dimanche Cravate au nœud soigné sur la chemise blanche Le Missel dans la main, un cadeau de grand mère A laquelle on dédiait nos vertueuses prières
La famille réunie ensemble à déjeuner Conclu par cette tarte que maman cuisinait Quand la maison paisible, et toujours endormie Encore était bercée des bruits sourds de la nuit
Je revois la rivière aux galets plats et blonds Que l’on jetait dans l’eau pour dessiner des ronds Les noires écrevisses péchées dans la balance Dont le soir au diner, Papa faisait bombance
Du jardin de grand père j’expire les odeurs Du thym, du laurier sauce, et des nombreuses fleurs J’entends le bruit des verres aux heures avancées Sonnant rassemblement aux jardins ouvriers
Je devine un regard de Mamy qui reprend Un frère ou une sœur malheureux impudent Qui en fin de repas laisse un quignon de pain Dont bon nombre de pauvres en ferait grand festin
Je nous vois de l’école, revenir fort pressés Blouse grise tachée par l’encre éclaboussée Pour prendre le quatre-heure, et finir les devoirs Réapprendre par cœur le tracé de la Loire
J’entends toujours la voix, des ainés qui le soir Sur les bancs de la place paraphrasaient l’histoire Ils parlaient d’Algérie, ce pays ou mon frère Était, pour disons t-on, défendre la bannière
J’ai déserté l’endroit, ma vie s’est faite ailleurs Seul mon père aujourd’hui y tient toujours demeure Quand mon pas me ramène vers tous ces souvenirs Au loin de mes copains, je devine les rires
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