Je regarde partout.. le chemin est ouvert. Il n'y a plus la queue d'une armée en déroute. J'ai l'étrange impression, lorsque je prends la route, De traverser soudain la zone ayant souffert.
Les derniers quatre- roues surchargés de gamelles, De bidons, de kayaks et de chaises d'enfants, Aussi peu encombrants qu'un troupeau d'éléphants, Ont déserté nos rues, embarquant pêle-mêle.
Un étrange silence envahit nos campagnes. Seuls quelques papiers gras, soulevés par le vent, Nous rappellent qu'ici, deux jours auparavant, Un grand vent de folie balayait nos montagnes.
Les groupes d' allemands visitant les marchés Sans gâcher un sourire, en parlant lentement, D'une voix qui semblait dicter un testament, Ont bien tout nettoyé, là où ils ont marché.
Les belges, rigolards et venant, une fois, Là où ils sont venus aussi l'année dernière, Nous apprenaient gaiement et l'art et la manière D'encaisser leur humour...leurs canettes, parfois.
L'américain, béat, découvrant, effaré, Qu'on peut vivre autrement, se perdait dans la foule, Trouvant 'incredible', en voyant des gagoules Vendues sur le marché ! il était sidéré.
L'italien entretient une vieille dispute; On ne sait pas pourquoi, mais, lui, est obstiné Et il n'oublie jamais de nous enquiquiner : Chaque fois qu'il le peut, il râle et il discute.
Et jusqu'au dernier jour, juste avant de partir, Afin que son mari se sente bien à l'aise, Sans prendre de repos, la femme hollandaise Rangeait sa caravane, et venait de finir .
Le canadien, ravi, retrouvait ses racines, Même si ses aïeux venaient du Périgord. Il veut du folklorique et en demande encore. Quelle que soit sa contrée, la France est sa cousine.
Dommage de le dire : le français gâche tout. Il est râleur, gueulard, obstiné et moqueur, Il tient à être vu et il a très à coeur De laisser son empreinte où il passe, partout.
Mais lorsque Babylone , enfin, quitte la ville, Que tous les parasols ont déserté la plage, Que le vent de folie s'éloigne des villages, Le pays, de nouveau, reprend sa vie tranquille.
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