Je n'aurai jamais imaginé à quel point le poids des épreuves quotidiennes est un fardeau que je ne parviens pas à surmonter. Moi qui suis un Enfant maintes fois condamné à la Mort, au Désespoir et à la Solitude, je ne suis pas capable d'affronter ces agents d'une vie simple et ordinaire ; ils usent l'ensemble des ressources de ma fragile humanité. Car il est vrai que je n'ai connu vilénies, moqueries et interdits qui m'ont profondément marquées. Et dont les cicatrices pourtant lointaines ne se sont, de mon Esprit, jamais effacées. Ces traces indélébiles couvrent un corps qui n'a pas oublié les outrages dont il a été le jouet. Comme il n'a, aussi, nullement oublié de quelle manière il a été violenté, au point que mon Ame s'en est trouvée définitivement déchirée. Ultime humiliation qui m'a accompagnée, avant de me conduire aux portes d'une folie dont chaque geste de la vie quotidienne dessine les traits. Je suis fatigué, usé, de devoir tous les jours me battre contre les terreurs d'une enfance martyrisée. Je n'ai aucun moyen de la réparer ; personne n'est capable de la visualiser ; et je mets au défi quiconque de vouloir la porter, puisqu'elle m'a montré ce qu'est l'Enfer incarné. Je visualise encore aujourd'hui ces nuits ou hurlements et convulsions qui se sont, sur moi, acharnées. Je sens encore les regards de ceux qui m'ont volontiers abandonné, pensant que je n'étais rien d'autre qu'un monstre avec lequel on avait le droit de s'amuser à volonté. J'entends toujours ces rires qui ont, à mes oreilles, mille fois résonné. Toutes ces fois où l'on m'a fait comprendre que je n'avais pas le droit d'être aimé. Toutes ces jeunes femmes qui m'ont repoussé parce que je n'étais pas aussi banal que ceux qu'elles fréquentaient. Quel autre refuge aurais-je pu trouver que ces mondes imaginaires que j'ai créé ; tous ces univers fantasmagoriques que j'ai inventé ; toutes ces cités dorées, enfouies sous les sables de lointaines contrées ? Il n'y a jamais eu de place pour moi au sein de cette Réalité. Y en aura t'il un jour, je ne le sais. Ce que je sais en revanche, c'est que chaque personne qu'ici bas j'ai croisé, rencontré, plus ou moins souvent côtoyé, je les ai aimé, apprécié ou adoré. Chaque femme qui a fait battre mon cœur, je l'ai désirée de toutes mes forces, et j'ai toujours tout fait pour lui montrer à quel point elle m'envoutait. Même si bien peu ont réalisé combien leur bonheur, leur joie de vivre, leur beauté, leur charme et leur prestance comptaient, elles m'ont permis de rêver. Oui, de rêver d'avoir le privilège, peut-être rien qu'une fois au cours de ma vie, de les sublimer. De rêver de partager leur couche pour un corps à corps enfiévré me permettant de laisser derrière moi les horreurs dont j'ai été le jouet. Et de croire en des lendemains enchantés où les mots qui j'écris actuellement ne sont pas inutiles et désespérés... Dominique
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