Si l'usage des mots peut tromper, je confesse
Qu'il m'arrive parfois de caresser des yeux
Quelques mots défendus, des mots insidieux,
Mais je suis vigilant; jamais je ne transgresse.

Quand de troublants propos sont là, et qu'ils m'habitent,
Je sais les dominer, ne montrant pas ma peur.
Je les chasse d'un trait de mon crayon rageur,
Attendant qu'un bon mot, de lui-même, s'invite.

Une rime mauvaise ? alors, l'autre rouspète !
Et comme j'ai horreur de casser les tempo,
J'attends, en les laissant un moment au repos,
Le bon mot finissant par me venir en tête.

Il peut jaillir alors, fuser comme une balle,
Après le noir profond de mon trou de mémoire.
Il me plait, je l'affûte et le porte au grimoire,
Le gardant en l'état avant qu'il ne s'emballe.

Et là, dans le fauteuil où tous deux nous nichons,
Mon vieux carnet et moi, comme une paire de potes,
Nous semblons être tels deux larrons qui complotent,
Mais nous sommes bien loin, et nous nous en fichons.

Plus rien, autour de moi, ne pourra m'ébranler.
Je ne sens pas l'envie de boire ni me nourrir,
Et si, au point final, il me vient un sourire,
C'est que ma muse, encor, aura su m'épauler.

Si je suis satisfait, mon bonheur, alors, dure
Et quelque chose en moi me souffle -" ah....c'est bien ".
Mais je ne saurais dire, maintenant, O combien
Parmi tous mes écrits, seraient ceux qui perdurent.