Lors du rituel matinal dans la salle de bain, les yeux encore embués de sommeil, je l’ai vu. Là , au milieu de ma longue tignasse brune. Il me nargue, se dressant comme un fanion. Je ne vois que lui. Mais que fait-il là ? Pourquoi moi ? Je suis trop jeune. Mon mari passe encore, il a quatre ou cinq ans de plus que moi. Que dois-je faire ? Je reste quelques secondes, le bras en l’air avec la brosse en main. J’opte pour la méthode radicale. Avec deux doigts, je parviens à attraper l’objet de mon étonnement et l’arrache violemment de mon cuir chevelu. Il est enfin à ma merci. « On fait moins le malin ! Maintenant, tu ne pourras plus crier au monde mon inexorable avancée vers l’âge de la retraite. Je sais que d’autres de tes congénères vont bientôt arriver mais je me tiendrai prête. Lorsque la pince à épiler deviendra impuissante, il me restera toujours les teintures. » C’est ainsi que j’ai scellé le destin de mon premier cheveu blanc en refermant le couvercle de ma poubelle. »
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