L'orage ( La Barre à Anglet ) tiré de " Ces petits moments de bonheur "
Au fond, sur l'horizon, une barrière grise descend du ciel en cachant le soleil. Une brise légère parcourt la plage presque immédiatement, comme un frisson. L'océan devient vert foncé et marron, en alternance : les nuages plombés jouant avec les ombres. La ligne sombre monte vers la côte et obscurcit les terres. La mer grossit et jette sur les rochers sa mousse immaculée que les vagues transportent. La plage se vide lentement de ses baigneurs, l'orage monte.
Le vent forcit pendant que les mouettes criardes entament un ballet au-dessus des flots. L'océan est triste et les premiers embruns caressent mon visage. Un cargo se présente à l'embouchure de "l'Adour" : sa coque rouge et noire tangue dans les rouleaux à la pointe de la "Barre d'Anglet". Poupe au vent, l'entrée dans le fleuve est délicate s'il ne veut pas être drossé sur les blocs de granit protégeant le sémaphore. De l'autre côté de l'estuaire, sur la commune de "Tarnos", les anciennes grues métalliques semblent surveiller la manœuvre avec bienveillance. L'écume recouvre le haut de la jetée et le ressac des vagues résonne d'un bruit sourd en écho. Les nuages ont perdu leurs dentelles superbes et assombrissent l'azur. Le sable a changé de couleur et le contraste avec le ciel s'est accentué. Les pins parasol frémissent dans le vent qui gonfle. J'aime les orages que parfois l'océan nous donne : ce temps changeant qui fait le charme de l'atlantique à nul autre pareil. En remontant la dune par le chemin dallé de planches en escalier, les tamaris clairsemés dans les haies de thuyas bruissent en cadence dans le ronronnement des vagues. Quelques gouttes tombent enfin, et picotent les jambes, avant que ne s'abatte l'averse océane.
La journée se termine, et l'orage maintenant enveloppe "Bayonne" : encore quelques instants et les flèches de la cathédrale crèveront de leurs pointes les nuages opalins. "L'Adour" charrie ses eaux brunes qui ondulent sous la houle qui monte dans un rythme syncopé. L'orage violent a remonté "la Nive" pour mourir dans les contreforts de la montagne. La nuit est tombée. Le ciel, lavé, laisse apparaître les premières étoiles comme autant de diamants.
Cuga
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