Dans la nuit avancée et ses brumes épaisses Qui couvrent l'abbaye de leur ombre ignorante, Il brille faiblement une flamme mourante Qui subsiste toujours tandis qu'on la délaisse.
Elle est seule ici-bas, dans le cloître désert, À briller faiblement encor quelques instants Car la flamme agitée par les vents insistants Ne peut encor céder aux ombres qui l'enserrent.
Et les clercs sont partis, lorsque le premier feu, Celui qui rayonnait dans l'azur éternel Depuis les temps d'avant, les temps originels, Pâlit sous les assauts des dards fuligineux.
Plus les coups redoublaient, et plus il en pâti : Il ne pouvait tenir sans l'aide du Seigneur, Du Père des humains, de ce grand Créateur. Mais Dieu l'avait quitté, après avoir bâti.
Et la nuit s'avançait d'un pas inexorable ; Elle avalait déjà les astres, ses servants Dont les pâles lueurs, depuis la nuit des temps, Avaient chauffé les cœurs des hommes ébranlables.
Et la nuit étouffait de son voile pesant Les sons qui s'échappaient des êtres engourdis ; Et le silence avait succédé à la vie : Voilà qu'étaient partis les moines tout tremblants.
Dans le cloître érigé par les hommes fervents, Tous les chœurs s'étaient tus : la pierre était glacé. Les cantiques sacrés cessaient de résonner Sous la voûte boisée : seul gémissait le vent.
La soirée s'avançait sous le huis toujours clôt Et la cire chutait sur le sol de l'abbé. La flamme tomberait ainsi qu'étaient tombés Tous ces biens merveilleux : parmi tant de sanglots.
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