Mon amie, j'ai désormais les doigts, les mains et les bras qui frémissent d'appréhension. Mon le cœur bat la chamade ; de gouttes de sueur perlent de mon front suant d'anxiété ; des rides d'inquiétude apparaissent au sommet de mon crane, tandis que mes yeux se mettent à scruter l'horizon nébuleux. Tout autour de moi, les rafales de vent et de pluie sont de plus en plus violentes. Les éclairs jaillissent de toutes parts ; les crevasses boueuses nées du fracas de ces derniers apparaissent fréquemment sur le sol que je foule. Des fissures parsemées de moisissures multicolores, et au cœur desquels s'accrochent des buissons d'épineux empoisonnés, surgissent de nulle part et les illuminent un instant. Je discerne alors cette Citadelle couleur de Nuit vers laquelle je me dirige, comme si les Astres d'Ikhtar embrasaient l'horizon. Et tandis que l'obscurité reprend ses droits et que j'entends le tonnerre gronder, je tourne mon regard en direction de la brume environnante ; et j'ai le temps de percevoir les ombres mouvantes des Créatures cornues et monstrueuses qui rodent alentours. A moins d'une dizaine de mètres de moi, je remarque les mêmes traces humaines que j'ai observées tout à l'heure. Des gouttes de sang frais les accompagnent désormais. Non loin de l'une d'elles apparait un anneau - certainement Magique, car serti de minuscules hiéroglyphes entrelacés les uns aux autres - gisant à terre. Mais je ne le toucherai pas. Je ne sais pas de quelle sorte de maléfice il est doté. Et je ne souhaite pas être la proie d'un mur de flammes ou de fantômes hurleurs prêts à me dévore ;, puisqu'il s'agit des protections les plus souvent utilisées par les Mages les plus puissants de Mesylath afin de contrer les voleurs de Reliques éventuels. D'un autre coté, je suis moi même assez pourvu d'ustensiles Magiques, pour ne pas avoir besoin de récupérer ceux d'inconscients qui ont eu le malheur de s'aventurer aux fins fonds des Territoires Extérieurs. Je ne sais pas de quelle sorte d'hommes est composé le groupe qui est passé par là . Ou peut-être était-ce plusieurs Elfes d'Hybaloth ? Car une rumeur plutôt persistante prétend que certains d'entre eux partent à la recherche du Secret des Origines de leur Race ; et tentent de le découvrir au-delà des confins du Monde, au-delà de la Frontière et des Monts du Levant. Mais je crains qu'ils aient croisé la route des démons cornus que j’entraperçois au loin, et qui n'attendent qu'une chose, dévorer le cœur encore chaud des êtres vivants osant s'approcher d'un peu trop près cette Citadelle couleur de Nuit vers laquelle je progresse. Je suis certain que, toi aussi, tu as été confrontée à ces Démons, ces Gardiens Obscurs qui ont pour mission d’empêcher les importuns de s'aventurer à proximité des Portes Noires. Tout ce que j'espère, c'est qu'ils n'aient pas réussi à te capturer. Car, dans ce cas, tout est perdu pour leur victime. Je le sais, car lors de mon précédent voyage en ces lieux, un compagnon de route rencontré une vingtaine de kilomètres avant d'arriver en ces lieux, a fini déchiré par eux. Il s'est sacrifié en me permettant de m'enfuir jusqu'aux murailles entourant la Citadelle. Car j'ai couru jusqu’à celles-ci, alors que ces Créatures cornues se jetaient sur lui avec des hurlements de fureur et de rage. Elles l'ont écartelé sous mes yeux, pendant que je les dépassais et que je quittais leur antre. De leurs griffes acérées, elles l'ont dépecé, et se sont repu de ses entrailles encore chaudes. Et la dernière chose que j'ai vu avant qu'elles ne disparaissent définitivement de mon champ de vision, c'est l'un de ces Gardiens en train de fouiller la poitrine de mon ami, en retirer son organe vital englué de sang, fixer ce dernier avec envie, et le dévorer avec avidité. Par les mille Dieux du Panthéon Mesyliens, j'espère que tu a pu trouver refuge au sein de cette Sombre Forteresse, avant qu'elles aient pu t'atteindre. Et j'espère aussi qu'en leur échappant, tu n'es pas tombé dans un cauchemar encore plus effroyable...
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