Arrivée trop discrète
Tu es venu trop tôt, Des licornes dans tes danses élégantes
Tu es venu trop vrai, Des cigales dans le givre de ton souffle
Tu es venu trop vite, Des météores aimantés Dans ton sourire
Tu es venu trop fragile, Des soupirs d’églantine Dans ta langue rapide Parcourant des sillages de jade
Tu es venu trop en avance, Les étoiles se sont émues De ta formule, Pictogramme de vent Larguée au hasard des époques rudes, Trop rudes
Tu es venu trop silencieux, Ton ambassade est si frêle Que les senteurs synthétiques Envahissent les corolles de tes parterres foulés Par les spectres et les symboles oranges D’un soleil sournois
Tu es venu trop solitaire, Tes compagnons te laissèrent En des lieux peu prospères , uU aiguillon de lune pour seul repère
Tu es venu décalé Comme un mystère pyramidal Accroché aux évidences d’une dune en dérive
Tu es venu trop mystérieux, Sans coque, Sans étendard, Sans refrain dans ton hymne, Sans marge dans ton discours, Sans fioriture dans ton carnaval , Sans regard dans ton dos
Tu es venu Comme un aiglon éperdu, Trop incertain
Tu es venu peut-être trop intelligent, Car en toi des mémoires instables Décidaient de la transparence de l’éternité
Tu es venu trop vieux, Trop hagard,
Trop herbe: Ta flexibilité vue comme une occasion de fenaison précoce, Tes intuitions pélagiques Furent engrangées dans les replis d’une saison pluvieuse, Alors que tes germinations demandaient des horizons bleus
Trop ciel : Ton azur fut peint au plafond commun Des hôtels particuliers Comme ton irisation appelait le zéphyr
Trop oiseau: Ton élan fut abattu un matin de mai , En cette année renégate Où les armées cendreuses se faufilaient Entre les lames d’un rayon dérivant Au large des terres femelles
Trop fin pour devenir un rideau de pollen, Tu erras longtemps parmi les rocailles rousses Et le vent se fit miniature , Replié dans la poche du crépuscule
Trop arbre : Ton houppier se fit racine magnétique D’un monde inversé, L’échiquier de tes feuilles Se décline aujourd’hui en tremblements mécaniques, Elles qui sont les héritières des algues océaniques, Larmes amères, Epitaphes d’un mouvement trop discret
Tu es venu trop jeune, Trop seul, Trop majuscule dans un épigramme aux relents de mépris, celui de la barbarie des séries Pourchassant ta singularité Jusque dans les jungles ouatées Des paysages d’outre-monde
Tu es venu trop nuage : Ta vapeur ambrée fut prétexte à des caricatures de porcelaine Accrochées aux linteaux de manoirs sombres
Tu es venu magnétique, Trop en vue pour les boussoles incandescentes, Feux follets moirés d’une impatience parfois sordide Te réduisant en paillettes de désert
Tu es venu trop naïf Tandis que que tu étais graine, Germe spiralé en volutes d’espoir, Grimé en virgule amène Dans la version originale d’un sourire
Tu es venu de l’océan, Du minéral Orbitant depuis toujours autour d’un nombre d’or, Tu es venu du lagon, D’une écaille géométrique Que portaient de magnifiques dragons Profilant les orbes de ta conscience Sur le tableau bavard d’un premier mot
4 et 6 Mai 2020
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