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De Montpellier
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Le 21 juin 1905 naît Jean-Paul Sartre
à Paris dans le 16e arrondissement, son nom de naissance est Jean-Paul-Charles-Aymard-Léon-Eugène Sartre, mort, à 74 ans le 15 avril 1980 dans le 14e arrondissement, est un écrivain et philosophe français, représentant du courant existentialiste, dont l'œuvre et la personnalité ont marqué la vie intellectuelle et politique de la France de 1945 à la fin des années 1970. Ses intérêts principaux sont : Métaphysique, ontologie, phénoménologie, théorie de la connaissance, politique, éthique. Ses idées remarquables :" L'existence précède l'essence " , Mauvaise foi, Néant Il es influencé par Descartes, Rousseau, Kant, Hegel, Fourier, Feuerbach, Kierkegaard, Marx, Husserl, Jaspers, Heidegger, Kojève, De Beauvoir, Merleau-Ponty. Philosophe et écrivain de l'école/tradition Existentialisme, phénoménologie, marxisme. Compagnon de Simone de Beauvoir, il refuse la distinction du prix Nobel de littérature 1964. Ses Œuvres principales sont La Nausée 1938, Le Mur 1939, Les Mouches 1943, L'Être et le Néant 1943, Huis clos 1944, L'existentialisme est un humanisme 1945, Les Mains sales 1948, Critique de la raison dialectique 1960, Les Mots 1964 Écrivain prolifique, fondateur et directeur de la revue Les Temps modernes, il est connu aussi bien pour son œuvre philosophique et littéraire qu'en raison de ses engagements politiquesn 1, d'abord en liaison avec le Parti communiste, puis avec des courants gauchistes dans les années 1970. Son œuvre comporte des essais et textes philosophiques majeurs, comme L'Être et le Néant 1943, le bref L'existentialisme est un humanisme 1946 ou la Critique de la raison dialectique 1960, mais aussi des textes littéraires : nouvelles Le Mur, romans (la Nausée, les Chemins de la liberté), pièces de théâtre Les Mouches, Huis clos, La Putain respectueuse, Le Diable et le Bon Dieu, Les Séquestrés d'Altona. Il a publié des études biographiques sur de nombreux artistes comme Le Tintoret, Mallarmé, Baudelaire, Faulkner ou Jean Genet, ainsi qu'une vaste étude sur Gustave Flaubert, L'Idiot de la famille 1971-1972. Un texte court, mais important est son étude autobiographique, Les Mots, qui évoque les onze premières années de sa vie. Intransigeant et fidèle à ses idées, il a toujours rejeté les honneurs ; il a notamment refusé le prix Nobel de littérature en 1964 ; exception notable, il a cependant accepté le titre de docteur honoris causa de l'Université de Jérusalem en 1976. Sa relation particulière avec Simone de Beauvoir est un autre élément de sa notoriété. Leurs philosophies, bien que très proches, ne sauraient être confondues, même si les deux auteurs se sont influencés mutuellement. D'autres intellectuels ont joué un rôle important à différentes étapes de sa vie : Paul Nizan et Raymond Aron, ses condisciples à l'École normale supérieure ; Maurice Merleau-Ponty et Albert Camus dans les années d'après-guerre.
En bref
En avril 1980, la mort de Jean-Paul Sartre fut l'occasion d'une grande ferveur collective. Ses funérailles, sans rappeler exactement celles de Victor Hugo un siècle plus tôt, rassemblèrent la communauté intellectuelle, le peuple de gauche, la jeunesse qui lisait Libération, ce journal populaire qu'il avait aidé à fonder. La gauche en France avait perdu son dernier grand écrivain et son dernier grand intellectuel, au moment même où les intellectuels, une fois révolu leur âge d'or, prenaient leurs distances avec la vie publique. Après la chute du Mur de Berlin, du socialisme soviétique, de la plupart des régimes communistes, le compagnon de route, qu'on louait dans les années 1950-1960 pour sa générosité, semble devenu un compagnon de déroute, le maître d'erreur et de fausseté pour une génération. Il reste certes une communauté internationale de sartriens qui travaille à la connaissance de ses écrits, mais elle ne déborde guère le champ de l'Université et de la recherche. Le grand public a paru donner crédit au livre désolant de Gilbert-Joseph, qui présente le Sartre des années 1940-1944 comme un triste opportuniste, alors qu'il suffit de consulter les Lettres françaises clandestines de 1942-1943 pour y trouver, sous sa plume, les écrits les plus nets et les plus courageux. L'heure est donc aux calomnies et aux anathèmes. Et pourtant, depuis 1980, Sartre n'a cessé d'étonner et de retenir ses lecteurs. Publiés en 1983, les Carnets de la drôle de guerre (qui se sont adjoint un Carnet I miraculeusement retrouvé ont révélé un autobiographe et un historiographe de 1939-1940 : qui aurait cru que le soldat Sartre pratiquait avec tant d'énergie un journal si peu intime et que sa métaphysique s'élaborait, avec la force de l'urgence, dans les cantonnements d'Alsace ? Avec les Lettres au Castor 1983 surgit un épistolier totalisateur qui écrit l'histoire de sa personne, de son couple, de son époque. Les Écrits de jeunesse 1990 fourmillent de textes saisissants comme Jésus la Chouette ou Une défaite. On comprend mieux pourquoi Sartre avait été fasciné par les écrits de jeunesse de Flaubert, et on y voit comment Sartre est devenu Sartre, non sans tâtonnements ni faux pas. On croyait perdu le livre entrepris sur l'Italie en 1951. Or on lit avec délectation, sous le titre étrange La Reine Albemarle, ou le Dernier Touriste 1991, un Sartre capricieux et vif, à l'exemple de Stendhal et de Morand. Les pages retrouvées sur Mallarmé (Mallarmé. La lucidité et sa face d'ombre, 1986 complètent la galerie biographique, entre Baudelaire et Genet : pour une fois, le portraitiste a trouvé un maître qu'il puisse admirer. Dans le domaine philosophique, les Cahiers pour une morale 1983, Vérité et existence 1989, le deuxième volume inachevé de la Critique de la raison dialectique (1985), la réunion en volume des entretiens avec Benny Levy 1991 ont montré qu'il y avait des trésors dans les chantiers que Sartre disait lui-même avoir abandonnés. On peut aussi entendre l'homme de radio, qui avait fait scandale en 1947 avec sa Tribune des Temps modernes. Ce mort, dont on dit qu'il s'éloigne, est plus vivant que jamais. Sartre a eu, successivement et simultanément, plusieurs vies, plusieurs œuvres : personne aujourd'hui ne peut, avec une compétence suffisante, envisager à la fois le philosophe, le romancier, le biographe, l'autobiographe, l'écrivain de cinéma, le parleur au magnétophone, le partisan et le militant, le directeur de revue, le fondateur de quotidien, entre autres. Il a paru nécessaire de distinguer dans ce qui suit philosophie et littérature, si on veut bien comprendre sous le second terme une polygraphie sans limites où Sartre est à la fois romancier, dramaturge, autobiographe et essayiste. Les deux activités sont restées parallèles et ne se sont rejointes que rarement, par exemple à l'occasion d'un livre-carrefour tel que Saint Genet. Sartre lui-même distinguait, un peu sommairement, l'écriture philosophique, sans travail du style, et l'écriture littéraire, stylistiquement élaborée en vue d'un effet à produire. La lecture attentive des textes ne remet pas en cause cette distinction : Sartre écrira sur Flaubert et sa littérature environ deux mille huit cents pages ; il le fera sur le mode philosophique et anthropologique, sans autres effets de style que ceux qui sont dus à une longue pratique de la rhétorique, et avec un constant désir de dévaloriser, à travers Flaubert, la littérature elle-même. Inversement, quand Sartre s'engage dans la résistance au nazisme, quand il prend parti pour la révolution communiste, pour l'indépendance de l'Algérie, pour la vengeance du Tiers Monde décolonisé, il le fait en mobilisant toutes les ressources d'un style polémique et destructeur, et reste dans le domaine de la littérature, qu'elle soit militante ou mystique.Jacques Lecarme
Sa vie
"Je n’essaie pas de protéger ma vie après coup par ma philosophie, ce qui est batard, ni de conformer ma vie à ma philosophie, ce qui est pédantesque, mais vraiment, vie et philo ne font plus qu’un. " Carnets de la drôle de guerre Jean-Paul Sartre laisse derrière lui une œuvre considérable, sous forme de romans, d'essais, de pièces de théâtre, d'écrits philosophiques ou de biographies. Sa philosophie a marqué l'après-guerre, et il reste, avec Albert Camus, un symbole de l'intellectuel engagé. De son engagement dans la résistance en 1941 engagement mis en doute en raison de son attitude trouble durant l'Occupation, jusqu'à sa mort, en 1980, Sartre n'a cessé de défrayer la chronique. Il fut en effet de tous les combats, pleinement et totalement engagé dans son époque, embrassant avec ferveur toutes les causes qui lui ont semblé justes. Sorte de Voltaire du XXe siècle, Sartre aura milité inlassablement, jusqu'au bout de sa vie. Selon de nombreux commentateurs et pour Sartre lui-même, sa vie est séparée en deux par la Seconde Guerre mondiale. On distingue alors deux grandes périodes dans l'œuvre sartrienne : une approche philosophique théorique axée sur l'ontologie de L'être et le néant 1943 ; puis une période plus pratique, où l'auteur cherche à appliquer sa méthode exposée dans la Critique de la raison dialectique 1960. Cette seconde période de son œuvre a fortement influencé les sociologues qualitativistes comme Erving Goffman.
Jeunesse et engagement Enfance
Jean-Paul-Charles-Aymard Sartre naît le 21 juin 1905, à Paris. Fils unique, il provient d’une famille bourgeoise : son oncle est polytechnicien ?, son père Jean Baptiste Sartre 1874-1906, X 1895, est un militaire, enseigne de vaisseau, et sa mère descend d’une famille d’intellectuels et de professeurs alsaciens, les Schweitzer – sa mère est la cousine d'Albert Schweitzer. Le petit Sartre ne connaîtra pas son père, qui meurt de la fièvre jaune quinze mois après sa naissance. L’image du père est pourtant là : c’est son grand-père, Charles Schweitzer, homme à la personnalité imposante, qui l’éduque avant qu’il n'entre à l’école publique à dix ans. De 1907 à 1917, le petit Poulou, comme on l’appelle, va donc vivre avec sa mère chez les parents de celle-ci. Il y passe dix années heureuses. Le petit Poulou va être adoré, choyé, félicité tous les jours, ce qui va sans doute construire chez lui un certain narcissisme. Dans la grande bibliothèque de la maison Schweitzer il découvre très tôt la littérature, et préfère lire plutôt que de fréquenter les autres enfants enfance évoquée dans son autobiographie Les Mots. Cette période se termine en 1917 : sa mère se remarie avec Joseph Mancy, ingénieur de la marine, que Sartre, alors âgé de 12 ans, ne finira jamais de haïr. Ils déménagent alors à La Rochelle, où il restera jusqu'à l'âge de 15 ans, trois années qui seront pour lui des années de calvaire : Sartre passe en effet du climat familial heureux à la réalité des lycéens qui lui paraissent violents et cruels. Vers l’été 1920, malade, Jean-Paul Sartre est ramené d’urgence à Paris. Soucieuse de son éducation qui pourrait être perverti par les mauvais garçons du lycée de La Rochelle sa mère décide que son fils restera à Paris.
Années d'études
À 16 ans, Sartre intègre le lycée Henri-IV où il avait été élève en sixième et cinquième. Il y retrouve Paul Nizan, lui aussi apprenti écrivain, avec qui il nouera une forte amitié jusqu’à sa mort en 1940. Épaulé par cette amitié, Sartre commence à se construire une personnalité. Pour l’ensemble de la classe d’élite – option latin et grec – dans laquelle il étudie, Sartre devient le SO, c'est-à -dire le satyre officiel : il excelle en effet dans la facétie, la blague. Sartre, toujours accompagné de Paul Nizan, prépare le concours d'entrée à l'École normale supérieure au lycée Louis-le-Grand. Il y fait ses premières armes littéraires, en écrivant notamment deux petits contes, deux sinistres histoires de professeurs de province, dans lesquelles éclatent son ironie et son dégoût pour les vies conventionnelles. Dans le même temps Sartre reprend son rôle d’amuseur public avec Nizan, jouant blagues et petites scènes entre les cours. Deux ans après leur entrée à Louis-le-Grand, Sartre et Nizan sont tous deux reçus au concours de l'École normale supérieure de Paris. Sartre se fait tout de suite remarquer dans ce que Nizan appelle l’école prétendue normale et dite supérieure. Sartre reste en effet le redoutable instigateur de toutes les plaisanteries, de tous les chahuts, allant jusqu’à provoquer un scandale en jouant avec ses amis un sketch antimilitariste dans la revue de l’ENS de 1927, après lequel Gustave Lanson, directeur de l'école, démissionnera. La même année, il signe avec ses condisciples, et à la suite de Alain, Lucien Descaves, Louis Guilloux, Henry Poulaille, Jules Romains, Séverine…, la pétition parue le 15 avril dans la revue Europe, contre la loi sur l’organisation générale de la nation pour le temps de guerre qui abroge toute indépendance intellectuelle et toute liberté d'opinion. Sartre a ainsi déjà un goût pour la provocation et le combat contre l’autorité. Il acquiert aussi une grande notoriété parmi ses professeurs et se fait ovationner dans chacune de ses arrivées au réfectoire. Si Sartre est volontiers un boute-en-train, c’est aussi un grand travailleur, dévorant plus de 300 livres par an, écrivant chansons, poèmes, nouvelles, romans à tour de bras. Sartre se lie d'amitié avec d'aucuns qui deviendront par la suite célèbres, comme Raymond Aron ou Maurice Merleau-Ponty. Pourtant, au cours de ces quatre années à l'École normale supérieure, Sartre ne paraît pas s’intéresser à la politique. Spontanément anarchisant, il ne va à aucune manifestation, ne s’enflamme pour aucune cause. À la surprise de ses admirateurs, qui s'interrogent sur une possible erreur du jury, Sartre échoue en 1928 au concours d'agrégation de philosophie auquel Raymond Aron est classé premier Sartre dira lui-même avoir fait preuve de trop d’originalité. Préparant d'arrache-pied le concours pour la seconde fois, il rencontre dans son groupe de travail Simone de Beauvoir, présentée par un ami commun, René Maheu6, qui la surnommait castor, par référence à l'anglais beaver qui signifie castor : d'une part, cet animal symbolise le travail et l’énergie, ou l'esprit constructeur de cet animal ; de l'autre la sonorité du mot beaver est proche de celle du nom Beauvoir. Ce surnom sera adopté par Sartre et elle deviendra sa compagne jusqu'à la fin de sa vie. Elle sera son amour nécessaire en opposition aux amours contingentes qu’ils seront amenés à connaître tous deux. Sartre est reçu premier au concours d'agrégation à la deuxième tentative, Simone de Beauvoir remportant la seconde place. Après son service militaire, le jeune professeur il a alors 26 ans demande à être nommé au Japon, pays qui l’a toujours intéressé. Rêve brisé, puisqu'il est envoyé au lycée du Havre, aujourd'hui lycée François-Ier, à compter de mars 1931. C’est une épreuve pour Sartre, lui qui a tellement craint les vies rangées et qui a tellement critiqué dans ses écrits la vie ennuyeuse de professeur de province.
Années au Havre : traversée du désert
Sartre tombe alors de plain-pied dans la vie réelle, le travail et la vie quotidienne. S’il choque quelque peu les parents et les professeurs par ses manières arriver en classe sans cravate, il séduira cinq générations d’élèves, pour lesquels il est un excellent professeur, chaleureux et respectueux, et souvent un ami. De là naît sa complicité avec l’adolescence, un contact qu’il aimera toujours avoir tout au long de sa vie. Entre temps, il prend la succession de Raymond Aron à l’Institut français de Berlin en 1933 et 1934, où il complète son initiation à la phénoménologie de Husserl. La gloire qu'il pensait obtenir depuis l'enfance, ces années au Havre la remettent en cause, puisque ses écrits sont refusés par les éditeurs. La notoriété arrivera avec son premier livre publié en 1938 chez Gallimard, La Nausée, roman philosophique phénoménologique et quelque peu autobiographique, racontant les tourments existentiels d'Antoine Roquentin, célibataire de 35 ans et historien à ses heures. Il est entre temps muté à l'école normale d'instituteurs de Laon, en Picardie. Deuxième bonne nouvelle : il est muté en octobre 1937 au lycée Pasteur de Neuilly, où il fait la connaissance de Robert Merle. Commence alors pour lui une brève phase de notoriété, avec La Nausée qui manquera de peu le prix Goncourt et la publication d'un recueil de nouvelles, Le Mur. Cette phase va être brusquement stoppée par la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle il est mobilisé à Nancy.
Guerre et Occupation
Avant la guerre, Sartre n’a pas de conscience politique. Pacifiste, mais sans militer pour la paix, l’antimilitariste Sartre assume pourtant la guerre sans hésiter. L’expérience de la guerre et de la vie en communauté va le transformer du tout au tout. Pendant la drôle de guerre, il est engagé comme soldat météorologiste. Sa fonction lui laisse beaucoup de temps libre, qu'il utilise pour écrire énormément en moyenne douze heures par jour pendant neuf mois, soit 2 000 pages, dont une petite partie sera publiée sous le titre de Carnets de la drôle de guerre. Il écrit d’abord pour éviter le contact avec ses compagnons de route car il supporte en effet assez mal les relations sérieuses et hiérarchiques que sont celles de l’arméen . La drôle de guerre prend fin en mai 1940, et le faux conflit devient bien réel. Le 21 juin, Sartre est fait prisonnier à Padoux, dans les Vosges, et est transféré dans un camp de détention en Allemagne de 25 000 détenus. Son expérience de prisonnier le marque profondément : elle lui enseigne la solidarité avec les hommes ; loin de se sentir brimé, il participe avec enjouement à la vie communautaire : il raconte histoires et blagues à ses copains de chambrée, participe à des matchs de boxe, écrit et met en scène une pièce pour la veillée de Noël, Bariona, ou le Fils du tonnerre. Cette vie dans le camp de prisonniers est importante, car elle est le tournant de sa vie : dorénavant, il n’est plus l’individualiste des années 1930, mais se fixe un devoir dans la communauté. En mars 1941, Sartre aurait été libéré grâce à un faux certificat médical, mais d'après les auteurs Gilles et Jean-Robert Ragache, il doit sa libération à l'intervention de Drieu La Rochelle : À l’automne 40, Drieu avait noté dans son carnet une liste d’écrivains prisonniers — où figurait Sartre — suivie de la mention : Demander la libération des auteurs — contrepartie de mon action N.R.F. Sa nouvelle volonté d'engagement l'amène, dès son retour à Paris, à agir en fondant un mouvement résistant avec certains de ses amis, dont Simone de Beauvoir : le mouvement « Socialisme et liberté. Il comptera une cinquantaine de membres en juin 1941. Sartre sera un résistant modeste, mais sincère. Il faut noter qu'aucune recherche n'a pu mettre en évidence une quelconque activité de résistance de ce mouvement, et en particulier de Sartre. Vladimir Jankélévitch lui reprochera d'ailleurs de s'être occupé davantage de l'avancement de sa carrière que de dénoncer ou contrarier l'occupant. L'impression et la distribution de tracts ne sont cependant pas anodines : Sartre et ses amis manquent plusieurs fois de se faire arrêter. En été 1941, il traverse la province à vélo pour tenter en vain d’étendre le mouvement hors de la capitale et de rallier d’autres intellectuels comme Gide ou Malraux. Après l’arrestation de deux camarades, le groupe Socialisme et liberté se dissout vers la fin 1941. En octobre 1941, Sartre est affecté au lycée Condorcet sur le poste de professeur de khâgne en remplacement de Ferdinand Alquié. Ce poste était initialement occupé par le professeur Henri Dreyfus-Le Foyer jusqu'en 1940 évincé en raison de sa qualité de juif. Ce fait révélé en octobre 1997 par Jean Daniel dans un éditorial du Nouvel Observateur sera reproché à Sartre. Ingrid Galster se pose la question de la qualité de l'engagement de Sartre et remarque qu'il l'ait voulu ou non voulu : objectivement, il profitait des lois raciales de Vichy. Il publie à cette époque plusieurs articles pour la revue collaborationniste Comœdia, fondée le 21 juin 1941 par René Delange, et contrôlée par la Propaganda-Staffel. Malgré la dissolution du groupe Socialisme et liberté, Sartre ne renonce pas pour autant à la résistance qu'il continue par la plume. Il fait jouer, en 1943, une pièce qu’il a composée, Les Mouches, reprenant le mythe d’Électre et qui est un appel symbolique à résister à l'oppresseur. C'est lors de la Première qu'il fait la connaissance de Camus. En cette période d'occupation, la pièce n'a pas le retentissement escompté : salles vides, représentations interrompues plus tôt que prévu. Pour Jean Amadou, cette représentation est plus ambiguë : En 1943, dans l'année la plus noire de l'Occupation, il fit jouer à Paris Les Mouches. C'est-à -dire qu'il fit très exactement ce que fit Sacha Guitry, donner ses pièces en représentation devant un parterre d'officiers allemands, à cette différence qu'à la Libération Guitry fut arrêté alors que Sartre fit partie du Comité d'épuration, qui décidait quel écrivain avait encore le droit de publier et quel autre devait être banni. André Malraux qui, lui, avait risqué sa vie dans la Résistance, ne se crut pas autorisé pour autant à faire partie de ce tribunal autoproclamé. La même année, il publie L'Être et le Néant influencé par Heidegger, où il fait le point et approfondit les bases théoriques de son système de pensée. Du 17 janvier au 10 avril 1944, il livre douze émissions pour Radio-Vichy. Il écrit ensuite une pièce de théâtre, Les Autres, qui deviendra Huis clos, joué en mai 1944 et qui, elle, rencontre un franc succès, notamment auprès des officiers allemands invités à la première représentation. Peu avant la libération, Sartre est recruté par Camus pour le réseau résistant Combat, il devient reporter dans le journal du même nom, et décrit dans les premières pages, la libération de Paris. Là commence sa renommée mondiale. Il est envoyé en janvier 1945 aux États-Unis pour écrire une série d'articles pour Le Figaro, et y est accueilli comme un héros de la Résistance. La guerre a donc doublement coupé sa vie en deux : auparavant et jusqu'à l'Être et le Néant, philosophe de la conscience individuelle, peu concerné par les affaires du monde, Sartre se transforme en intellectuel engagé politiquement. Professeur parisien connu dans le monde intellectuel, il devient après la guerre une sommité internationale.
Années de gloire Folie existentialiste et premiers engagements du philosophe
En 1945, Jean-Paul Sartre s'installe au 42 Rue Bonaparte, il y vécut jusqu'en 1962. Après la Libération, Sartre connaît un succès et une notoriété importante ; il va, pendant plus d'une dizaine d’années, régner sur les lettres françaises. La diffusion de ses idées existentialistes se fera notamment au travers de la revue qu’il a fondée en 1945, Les Temps modernes. Sartre y partage sa plume, avec entre autres, Simone de Beauvoir, Merleau-Ponty et Raymond Aron. Dans le long éditorial du premier numéro, il pose le principe d'une responsabilité de l'intellectuel dans son temps et d'une littérature engagée. Pour lui, l'écrivain est dans le coup quoi qu'il fasse, marqué, compromis jusque dans sa plus lointaine retraite … L'écrivain est en situation dans son époque. Cette position sartrienne dominera tous les débats intellectuels de la deuxième moitié du XXe siècle. La revue est toujours considérée comme l'une des plus prestigieuses revues françaises au niveau international. Ainsi, Sartre met fin à la tradition philosophique de la neutralité de l'écrivain, telle qu'elle s'était manifestée en France et en Allemagne pendant le pétainisme et le nazisme. Lorsqu'en octobre 1945 Sartre fait une conférence dans une petite salle, c'est un évènement: une foule nombreuse tente d'entrer, les gens se bousculent, des coups partent, des femmes s'évanouissent ou tombent en syncope. Sartre y présente un condensé de sa philosophie, qui sera retranscrit dans L'existentialisme est un humanisme. Sa publication, par l'éditeur Nagel, est faite à l'insu de Sartre qui juge la transcription ex abrupto, nécessairement simplificatrice, peu compatible avec l'écriture et le travail du sens que celle-ci implique. Sartre veut à l'époque se rapprocher des marxistes, qui rejettent une philosophie de la liberté radicale, susceptible d'affaiblir les certitudes indispensables au militant : dans le texte de la conférence Sartre expose le leitmotiv de l'existentialisme, l'homme ne peut pas refuser sa liberté, la liberté tend au futur, tout acte de liberté est projet, la réalisation d'un projet individuel modifie la réalisation d'autres projets individuels, chaque individu est responsable vis-à -vis de son projet individuel et du projet des autres, la liberté est le fondement de toutes les valeurs humaines, l'engagement dans les choix des sociétés rend l'homme un homme à part entière. Tout le beau monde se veut maintenant être existentialiste, vivre existentialiste. Saint-Germain-des-Prés, lieu où habite Sartre, devient le quartier de l'existentialisme, en même temps qu'un haut lieu de vie culturelle et nocturne : on y fait la fête dans des caves enfumées, en écoutant du jazz, ou encore en allant au café-théâtre. Phénomène rare dans l'histoire de la pensée française, une pensée philosophique technique et austère trouve, dans un très large public, un écho inhabituel. On peut expliquer cela par deux facteurs : tout d'abord l’œuvre de Sartre est multiforme et permet à chacun de trouver son niveau de lecture, ensuite l'existentialisme, qui clame la liberté totale, ainsi que la responsabilité totale des actes de l'homme devant les autres et devant soi-même, se prête parfaitement à ce climat étrange d'après-guerre où se mêlent fête et mémoire des atrocités. L'existentialisme devient donc un véritable phénomène de mode, plus ou moins fidèle aux idées sartriennes, et par l'ampleur de laquelle l'auteur semble un peu dépassé. Ces années ne doivent pas laisser croire à une "vie de paillettes". Le philosophe met sa plume au service des minorités délaissées, en particulier les Juifs français et les Noirs. En effet, il publie en 1945 plusieurs articles sur la condition des Noirs aux États-Unis, sur le racisme et les discriminations dont ils sont victimes. Ces articles sont consultables dans la nouvelle édition de Situations II. En 1946, il publie ses Réflexions sur la question juive dont le "Portrait de l'antisémite" avait été publié dès 1944 dans sa revue des Temps Modernes. Il s'attaque alors à l'antisémitisme en France à une période où les Juifs qui rentrent des camps sont rapidement délaissés. En 1948, il écrit une introduction pour l'Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache, de Léopold Sedar Senghor, publié aux PUF, repris dans Situations III. Orphée Noir est une critique du colonialisme et du racisme à l'aune de la philosophie qu'il avait développée en 1943 dans L'être et le néant.
Rassemblement démocratique révolutionnaire
Pendant ce temps, Sartre va affirmer son engagement politique en éclairant sa position, au travers de ses articles dans Les Temps modernes : Sartre épouse, comme beaucoup d'intellectuels de son époque, la cause de la révolution marxiste, mais sans pour autant donner ses faveurs au Parti communiste, aux ordres d'une URSS qui ne peut satisfaire l'exigence de liberté. Simone de Beauvoir, Sartre et ses amis continuent donc à chercher une troisième voie, celle du double refus du capitalisme et du stalinisme. Il soutient Richard Wright, un écrivain noir américain ancien membre du Parti communiste américain exilé en France dès 1947. Dans sa revue Les temps modernes, il prend position contre la guerre d'Indochine, s'attaque au gaullisme et critique l'impérialisme américain. Il ira jusqu'à affirmer, dans cette même revue, que tout anti-communiste est un chien. C'est alors que Sartre décide de traduire sa pensée en expression politique : en participant à la fondation d'un nouveau parti politique, le Rassemblement démocratique révolutionnaire RDR. Mais malgré le succès de quelques manifestations, le RDR n’atteindra jamais un effectif suffisant pour devenir un véritable parti. Sartre donne sa démission en octobre 1949.
Tentation communiste
La guerre de Corée, puis la répression musclée d'une manifestation antimilitariste du PCF pousse Sartre à choisir son camp : Sartre voit alors dans le communisme une solution aux problèmes du prolétariat. Ce qui lui fait dire : Si la classe ouvrière veut se détacher du Parti PCF, elle ne dispose que d'un moyen : tomber en poussière. Sartre devient un compagnon de route du Parti communiste entre les années 1952 et 1956. Dès lors, il participe à sa mouvance : il prend la présidence de l'Association France-URSS. En 1954, il déclare Le citoyen soviétique possède, à mon avis, une entière liberté de critique. Il devient membre du Conseil mondial de la paix. Ce ralliement idéel de Sartre au communisme sépare de même Sartre et Camus, très proches auparavant. Pour Camus, l'idéologie marxiste ne doit pas prévaloir sur les crimes staliniens, alors que pour Sartre on ne doit pas utiliser ces faits comme prétexte à l'abandon de l’engagement révolutionnaire. Cette fidélité au PCF va tenir jusqu'en automne 1956, date à laquelle les chars soviétiques écrasent l'insurrection de Budapest. Après avoir signé une pétition d'intellectuels de gauche et de communistes contestataires, il donne le 9 novembre une longue interview au journal l'Express journal mendésiste, pour se démarquer de manière radicale du parti.
Structuralisme, Flaubert et prix Nobel
Après cela l'existentialisme semble en perte de vitesse : dans les années 1960, l'influence de Sartre sur les lettres françaises et l'idéologie intellectuelle diminue peu à peu, notamment face aux structuralistes comme l'ethnologue Lévi-Strauss, le philosophe Foucault ou le psychanalyste Lacan. Le structuralisme est en quelque sorte l'ennemi de l'existentialisme : il n'y a en effet dans le structuralisme que peu de place pour la liberté humaine, chaque homme étant imbriqué dans des structures qui le dépassent. En fait Sartre, défenseur de la primauté de la conscience sur l'inconscient et de la liberté sur la nécessité des structures sociales, ne prend pas la peine de discuter de ce nouveau courant qui est le structuralisme : il préfère se dédier à l'analyse du XIXe siècle, de la création littéraire, et surtout à l'étude d'un auteur qui l'avait toujours fasciné, Flaubert. De plus dans les années 1960 sa santé se détériore rapidement. Sartre est prématurément usé par sa constante suractivité littéraire et politique, mais aussi par le tabac et l'alcool qu'il consomme en grandes quantités. Le 10 décembre 1964, fait qui aura un très grand retentissement dans le monde, il refuse le prix Nobel de littérature car, selon lui, aucun homme ne mérite d’être consacré de son vivant. Il avait de même refusé la Légion d'honneur, en 1945, ou encore une chaire au Collège de France. Ces honneurs auraient, selon lui, aliéné sa liberté, en faisant de l'écrivain une espèce d'institution. Cette action restera célèbre car elle illustre bien l’état d’esprit de l'intellectuel qui se veut indépendant du pouvoir politique. En 1964, il a adopté Arlette Elkaïm.
Années d'engagement
Si Sartre a pris ses distances avec le parti communiste, il continue à s'engager pour de nombreuses causes. Il a été une des cibles du Congrès pour la liberté de la culture, association culturelle anticommuniste fondée en 1950.
Guerre d'Indochine
En 1950 éclate l'affaire Henri Martin, un marin et militant du Parti communiste français est arrêté pour avoir distribué des tracts contre la guerre d'Indochine dans une enceinte militaire, l'arsenal de Toulon. L'accusation porte également sur un acte de sabotage en faveur du Viêt Minh, accusation dont il est lavé par le tribunal de Toulon, pourtant exclusivement composé d'officiers. Jean-Paul Sartre s'engage, publiant notamment un ouvrage, L'affaire Henri Martin, qui résume les arguments de la défense. Preuve de la grande portée de cette affaire, d'autres intellectuels de gauche renommés participent au même ouvrage : Michel Leiris, Hervé Bazin, Prévert, Vercors… Jusqu'à la fin de la guerre, Sartre restera très vigilant, coordonnant notamment un numéro spécial des Temps Modernes Viet Nam, octobre 1953.
Guerre d'Algérie
Dès 1956, Sartre et la revue Les Temps modernes prennent parti contre l'idée d'une Algérie française et soutiennent le désir d'indépendance du peuple algérien. Sartre s'élève contre la torture, revendique la liberté pour les peuples de décider de leur sort, analyse la violence comme une gangrène, produit du colonialisme. En 1960, lors du procès des réseaux de soutien au FLN, il se déclare porteur de valise du FLN. Cette prise de position n'est pas sans danger, son appartement sera plastiqué deux fois par l'OAS, et Les Temps modernes saisis cinq fois.
Cuba
Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre rencontrent Ernesto Che Guevara, à Cuba en 1960. Sartre soutient activement la révolution cubaine dès 1960, comme un grand nombre d'intellectuels tiers-mondistes. En juin 1960, il écrit dans France-Soir 16 articles intitulés Ouragan sur le sucre. Mais il rompra avec le lÃder máximo en 1971 à cause de l’affaire Padilla, lorsque le poète cubain Heberto Padilla est emprisonné pour avoir critiqué le régime castriste. Il dira de Fidel Castro : Il m’a plu, c’est assez rare, il m’a beaucoup plu. Toutefois, face à la répression des homosexuels, Sartre déclarera que les homosexuels sont les juifs de Cuba.
Mai 68
Sartre qui avait déjà publié en 1960 le tome I de la "Critique de la raison dialectique" et avait en préparation le tome II, paru inachevé et posthume, participera activement aux événements de mai 1968. Déjà en 1967, il était revenu sur le devant de la scène en présidant avec Bertrand Russell le tribunal Russell, un tribunal autoproclamé, une assemblée internationale d'intellectuels, de militants et de témoins chargés de juger les guerres et de les condamner, en particulier la guerre des Américains au Vietnam. S'il n'a pas été l'inspirateur des événements de mai 1968, il se fera l'écho de la révolte dans la rue, sur les estrades, dans les journaux, et aux portes des usines en grève. Il interviewe le leader Daniel Cohn-Bendit dans Le Nouvel Observateur, lui donnant l'occasion de s'expliquer dans un grand hebdomadaire. À maintenant 63 ans, il se rend à la Sorbonne investie par les étudiants, afin de discuter avec eux. Il dénonce ensuite les élections pièges à cons de de Gaulle. Sur le plan international, il condamne fermement l'intervention soviétique contre le printemps de Prague en Tchécoslovaquie.
Homme de gauche
De plus en plus fatigué et usé, Sartre continuera la lutte gauchiste en soutenant le mouvement Mao face à la répression. Le journal révolutionnaire La Cause du Peuple étant menacé de disparaître sous la pression des autorités pompidoliennes, il décide en 1971 de devenir le directeur du journal afin de le protéger, et descend dans la rue, avec d'autres célébrités dont Simone de Beauvoir, pour le vendre. Il fera de même avec deux autres journaux maoïstes, Tout et J'accuse. En 1973, Sartre va lancer, avec Serge July, Philippe Gavi, Bernard Lallement et Jean-Claude Vernier, un quotidien populaire, Libération, qui paraît au printemps. Jean-Paul Sartre et Jean-Claude Vernier sont les premiers directeurs de publication du journal. Ils le restent jusqu’à leur démission le 24 mai 1974 pour désaccord avec Serge July, qui leur succède. Pendant toute cette période il se lie avec divers autres mouvements gauchistes et féministes, prêtant volontiers son nom afin de les aider.
Problème israélo-palestinien
Sartre va s'occuper, alors qu'il arrive à la fin de sa vie, du conflit israélo-palestinien. Tout en reconnaissant la légitimité de l'État d'Israël, il dénonce les conditions de vie déplorables des Palestiniens qui expliqueraient le recours au terrorisme. En 1976, il accepte le seul titre honorifique de sa carrière, celui de docteur honoris causa de l'université de Jérusalem qui lui sera remis à l'ambassade d'Israël à Paris par le philosophe Emmanuel Levinas. Il acceptera ce titre pour des raisons politiques afin de créer une liaison entre le peuple palestinien que je soutiens et Israël dont je suis l'ami.
Engagement jusqu'au bout
Alors qu'il va sur ses 66 ans il les aura le 21 juin 1971, Sartre est victime d'une attaque le 18 mai 1971. Tous les détails concernant la santé de Sartre sont relatés dans le livre de Simone de Beauvoir La cérémonie des adieux. Cette attaque le laisse très affaibli. Le 5 mars 1973, une seconde attaque lui laisse la vie sauve, mais lui enlève presque totalement la vue. Sartre entre dans ses années d'ombre. Déjà diminué, il est alors contraint de décider librement que son œuvre est achevée, et ne finira donc jamais le tome IV de son Flaubert. Cela ne l'empêchera néanmoins pas de continuer à penser et à produire : il engage comme secrétaire un jeune normalien, Benny Lévy, qu'il avait connu lorsque ce dernier dirigeait le groupe maoïste La Gauche prolétarienne, qui est chargé de lui faire la lecture, et débat, parfois violemment, avec ce jeune maoïste. Un an plus tard sort l'ouvrage On a raison de se révolter, livre d'entretiens avec le jeune homme et Philippe Gavi, où Sartre évoque entre autres les problèmes liés à l'engagement contestataire. Sa cécité ne l'empêchera pas non plus de poursuivre son devoir d'engagement moral qu'il aura tenu jusqu'au bout : quelques interventions politiques, telles que la visite à Andreas Baader, le révolutionnaire allemand emprisonné près de Stuttgart, et un voyage de soutien à la révolution des œillets, au Portugal, font renaître dans les milieux de l'extrême gauche européenne des élans de sympathie pour le vieil homme. Il signe aussi différents appels pour la libération de dissidents soviétiques, et, lors de la rencontre entre Brejnev et Valéry Giscard d'Estaing à Paris en 1977, Sartre organise au même moment une rencontre avec des dissidents soviétiques. Ce soir-là , pour Sartre entouré de Michel Foucault, Gilles Deleuze, André Glucksmann, Simone Signoret et bien sûr Simone de Beauvoir, il y eut 105 radios et télévisions venues du monde entier, soit plus qu'à l'Élysée pour Brejnev. La même année, il signe avec d'autres figures de l'époque comme Louis Aragon, Simone de Beauvoir, Jack Lang ou Bernard Kouchner la lettre ouverte parue dans Le Monde à la veille du procès de Bernard Dejager, Jean-Claude Gallien et Jean Burckardt, tous accusés d’avoir eu des relations sexuelles avec des filles et des garçons de 13 et 14 ans. Jean Paul Sartre a condamné l'intervention américaine au Vietnam, au Laos et au Cambodge dans les années 1960 et 70 et a accordé, comme la majeure partie de la gauche mondiale, son soutien aux mouvements communistes indochinois, y compris aux Khmers Rouges, jusqu'à leur victoire en 1975. Dernier coup médiatique pour Sartre en 1979, qui va émouvoir le grand public : accompagné de son meilleur ennemi, Raymond Aron, et du jeune philosophe André Glucksmann, un Sartre très atteint dans sa santé se rend à l'Élysée pour demander à Valéry Giscard d'Estaing d'accueillir des réfugiés d'Indochine, qui se noyaient par centaines en tentant de quitter le Viêt Nam c’est l'affaire des boat people. Indépendamment des différences d'opinions politiques auxquelles il attache désormais moins d'importance, Sartre affirme au crépuscule de sa vie l'exigence de sauver des vies partout où elles sont menacées. Sartre a également adhéré, avec Simone de Beauvoir, au comité de soutien à l'ayatollah Khomeyni, lorsque celui-ci était reçu en exil à Neauphle-le-Château, opposant principal au régime impérial du Shah.
Le scandale de l'Espoir maintenant
Parallèlement, entre 1978 et 1980, Benny Lévy fait découvrir à Sartre l’œuvre de Levinas. Des entretiens de Sartre et de Benny Lévy sur Levinas, et sur le judaïsme, résulte un dialogue intitulé L’Espoir maintenant, publié dans Le Nouvel Observateur, sur trois numéros, le 10, le 17 et le 24 mars 1980. L’Espoir maintenant provoque un scandale. Benny Levy est accusé par l'entourage de Sartre d'avoir abusé de son état de faiblesse pour lui imposer sa pensée. Olivier Todd parle d'un détournement de vieillard, tant semble différente la parole de Sartre dans ces entretiens. Simone de Beauvoir reproche à Benny Lévy d’avoir contraint Sartre à des déclarations démentes. Jean Guitton tient de telles déclarations pour un reniement de l'athéisme de Sartre et y voit l'influence de son nouveau et dernier secrétaire. John Gerrasi, l’un des biographes de Sartre, dénonce la manipulation diabolique de Benny Lévy, un petit chef de guerre fanatique, un juif égyptien, devenu rabbin et talmudiste. L'avocate Gisèle Halimi, qui a été une amie très proche du philosophe depuis 1957, est revenue, en 2005, sur ces propos en affirmant : Cet interview est incontestablement un faux …. Ce n'est pas du Sartre libre jouissant de toutes ses facultés. Toutefois, Jean Daniel, le directeur du Nouvel Observateur, témoigne que Sartre est parfaitement conscient de ce qu'il fait en publiant L’Espoir maintenant. Il a fallu que Sartre appelle Jean Daniel pour que ce dernier décide de le publier. Daniel lui a demandé : Vous avez le texte près de vous ? – Je l'ai en tête, a répondu Sartre. Et, en effet, il le connaissait par cœur, assure Daniel. C'est le dernier scandale que Sartre a provoqué.
La mort
Atteint d'urémie, Jean-Paul Sartre s'éteint le 15 avril 1980 à près de 75 ans à l’hôpital Broussais de Paris, à la suite d'un œdème pulmonaire. Tombe de Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir au cimetière du Montparnasse de Paris. Dans le monde entier, l'annonce de sa mort provoque une émotion considérable. Pour son enterrement, le 19 avril 1980, cinquante mille personnes descendent dans les rues de Paris, accompagnant son cortège pour lui rendre un ultime hommage. Une foule énorme, sans service d'ordre, pour celui qui aura su captiver trois générations de Français. Parmi eux, les anciens élèves des années du Havre ou de Paris, les camarades de la libération et les communistes des années 1950, les anciens militants de la paix en Algérie, enfin les jeunes maos. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse à Paris 14e, dans la 20e division — juste à droite de l’entrée principale boulevard Edgar-Quinet. Simone de Beauvoir, décédée le 14 avril 1986, a été inhumée à ses côtés. Sur la tombe, une plaque porte cette simple inscription : Jean-Paul Sartre, 1905-1980.
Philosophie Existentialisme.
Sartre est considéré comme le père de l'existentialisme français et sa conférence de 1945, L'existentialisme est un humanisme, est considéré comme le manifeste de ce mouvement philosophique. Toutefois, la philosophie de Sartre, en 20 ans, a évolué entre existentialisme et marxisme. Ses œuvres philosophiques majeures sont L'être et le Néant 1943 et la Critique de la raison dialectique 1960. Être en-soi et être pour-soi Dans L'Être et le Néant, Sartre s'interroge sur les modalités de l'être. Il en distingue trois : l'être en-soi, l'être pour-soi et l'être pour autrui. – l'être en-soi, c'est la manière d'être de ce qui est ce qu'il est, par exemple l'objet inanimé est par nature de manière absolue, sans nuance, un ; – l'être pour-soi est l'être par lequel le néant vient au monde de l'en soi. C'est l'être de la conscience, toujours ailleurs que là où on l'attend : c'est précisément cet ailleurs, ce qu'il n'est pas qui constitue son être, qui n'est d'ailleurs rien d'autre que ce non être ; – l'être pour-autrui est lié au regard d'autrui qui, pour le dire vite, transforme le pour soi en en soi, me chosifie. L'homme, se distingue de l'objet, en ce qu'il a conscience d'être, conscience de sa propre existence. Cette conscience crée une distance entre l'homme qui est et l'homme qui prend conscience d'être. Or toute conscience est conscience de quelque chose idée d'intentionnalité reprise de Brentano. L'Homme est donc fondamentalement ouvert sur le monde, incomplet, tourné vers, existant projeté hors de soi : il y a en lui un néant, un trou dans l'être susceptible de recevoir les objets du monde. « Le pour soi est ce qu'il n'est pas et n'est pas ce qu'il est » — Sartre, L'Être et le Néant « Il n'y a pour une conscience qu'une façon d'exister, c'est d'avoir conscience qu'elle existe » — Sartre « En fait, nous sommes une liberté qui choisit, mais nous ne choisissons pas d'être libres : nous sommes condamnés à la liberté. — Sartre « Les objets sont ce qu'ils sont, l'homme n'est pas ce qu'il est, il est ce qu'il n'est pas. — Sartre L'existence précède l'essence Dans la conférence intitulée L'existentialisme est un humanisme, du 29 octobre 1945, Sartre développe l'idée que l'homme n'ayant pas de nature définie a priori, il est libre de se définir lui-même par son projet. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. Sartre rattache la liberté de l'homme au fait que Dieu n'existe pas, reprenant en un sens positif la phrase de Dostoïevski, Si Dieu n'existe pas, tout est permis. Il prend cette formule au sérieux : il n'y a pas de nature humaine, puisqu'il n'y a pas de Dieu pour la concevoir. L'homme n'est pas de toute éternité, dans l'esprit d'un Dieu créateur, comme l'idée d'un objet technique tel un coupe-papier dans l'esprit de l'artisan. Par conséquent, aucune norme transcendante n'indique à l'homme ce qu'il doit faire. L'homme est libre, il est liberté, et n'est rien d'autre que ce qu'il se fait. Sartre explique que cette liberté implique une responsabilité : en se choisissant lui-même, l'homme établit un modèle de ce qui vaut pour l'homme en général. « Ainsi, notre responsabilité est beaucoup plus grande que nous ne pourrions le supposer, car elle engage l'humanité entière. En faisant de chacun un législateur qui choisit pour l'humanité entière », Sartre retrouve aussitôt l'universel, dont il semblait s'écarter en confrontant l'individu à la liberté absolue de son choix, sur fond d'angoisse et de délaissement, deux concepts inspirés, de la lecture de Kierkegaard et de Heidegger. On ne peut échapper ni à la liberté du choix de son existence et de ses actions, ni à leur caractère exemplaire pour tout homme : l'invocation de motifs pour ne pas exercer sa liberté est assimilée à de la mauvaise foi. Certaines formules de L'existentialisme est un humanisme sont restées célèbres, comme Nous sommes seuls, sans excuses, ou bien L'homme est condamné à être libre.
Liberté et aliénation
Selon Sartre, l'homme est ainsi libre de choisir son essence. Pour lui, contrairement à Hegel, il n'y a pas d'essence déterminée, l'essence est librement choisie par l'existant. L'Homme est absolument libre, il n'est rien d'autre que ce qu'il fait de sa vie, il est un projet. Sartre nomme ce dépassement d'une situation présente par un projet à venir, la transcendance. L'existentialisme de Sartre s'oppose ainsi au déterminisme qui stipule que l'homme est le jouet de circonstances dont il n'est pas maître. Sartre estime que l'homme choisit parmi les événements de sa vie, les circonstances qu'il décidera déterminantes. Autrement dit, il a le pouvoir de 'néantiser', c'est-à -dire de combattre les déterminismes qui s'opposent à lui. Au nom de la liberté de la conscience, Sartre refuse le concept freudien d'inconscient remplacé par la notion de mauvaise foi de la conscience. L'Homme ne serait pas le jouet de son inconscient mais choisirait librement de se laisser nouer par tel ou tel traumatisme. Ainsi, l'inconscient ne saurait amoindrir l'absolue liberté de l'Homme. Selon Sartre, l'homme est condamné à être libre. L'engagement n'est pas une manière de se rendre indispensable mais responsable. Ne pas s'engager est encore une forme d'engagement. L'existentialisme de Sartre est athée, c'est-à -dire que, pour lui, Dieu n'existe pas ou en tout cas s'Il existait cela ne changerait rien, donc l'homme est seul source de valeur et de moralité ; il est condamné à inventer sa propre morale et libre de la définir. Le critère de la morale ne se trouve pas au niveau des maximes Kant mais des actes. La mauvaise foi, sur un plan pratique, consiste à dire : c'est l'intention qui compte. Selon Sartre, la seule aliénation à cette liberté de l'homme est la volonté d'autrui. Ainsi fait-il dire à Garcin dans Huis clos L'Enfer c'est les Autres.
Marxisme
Jean-Paul Sartre présente le marxisme comme « horizon philosophique indépassable de notre temps42 ». Après avoir observé et analysé l'existence et la liberté de l'homme en tant qu'individu, Sartre s'est interrogé sur l'existence d'une conscience collective et son rapport avec la liberté individuelle. Dans sa Critique de la raison dialectique 1960, Sartre affirme que la liberté de l'homme est aliénée par les sociétés féodales ou capitalistes. Il analyse comment, dans les sociétés aliénées, les libertés individuelles peuvent conduire à un effet opposé à l'intention générale et à l'aliénation de la liberté collective. Il suggère alors d'inverser le processus : le groupe doit pouvoir décider de regrouper les libertés individuelles pour permettre le développement de l'intention générale. Sartre pense que cette sorte d'aliénation de la liberté individuelle doit être librement choisie et s'oppose ainsi à toute forme de totalitarisme.
L'espoir
La question du respect d’autrui traverse toute l’œuvre de Sartre, mais avec une acuité particulière quand il revient sur la question juive. Dans L’Espoir maintenant, Sartre met toujours en jeu «le lien étroit de la morale à l’existence d’autrui, pour Yvan Salzmann. Toute conscience me paraît actuellement, à la fois comme se constituant elle-même et dans le même temps comme conscience de l’autre et comme conscience pour l’autre, ayant un rapport avec l’autre que j’appelle conscience morale , écrit Sartre dans L’Espoir maintenant. La publication de ce texte fit scandale parce que ses détracteurs ont cru que Sartre se convertissait au judaïsme. En réalité, ce qui l’intéresse dans judaïsme, c’est toujours la question du respect d’autrui et son lien avec la question de l’éthique et celle de l’histoire. On a parlé d’aliénation et même de sénilité, remarque Bernard-Henri Lévy, parce qu’évidemment l’auteur de L’Être et le Néant, de La Critique de la raison dialectique, venant dire : le peuple métaphysique par excellence, c’est le peuple juif ;… un Sartre qui dit que c’est l’existence du peuple juif, sa survie à travers les âges qui lui fait comprendre que le culte de l’Histoire est une infamie et que Hegel s’est finalement trompé, un Sartre qui dit qu’il retrouve le sens de la réciprocité qui n’a rien à voir avec le groupe en fusion ou la chaleur de la meute, et un Sartre qui trouve ce goût de la réciprocité dans les rapports très curieux qui unissent le Dieu juif et son peuple. Tout cela, évidemment, surprend. Mais il ne s’agit nullement d’une conversion religieuse, pour Bernard-Henri Lévy. Au contraire, Sartre va jusqu’au bout de la logique athée, en contestant la vision hégélienne de l’histoire dans ce texte. Sartre retient l’espoir, mais l’espoir va bien au-delà de la religion, pour Sartre.
Une philosophie de la liberté
La philosophie de Jean-Paul Sartre est une philosophie de la subjectivité ou de la conscience. Contre cet attachement à la subjectivité s'édifièrent les structuralismes ; désormais, il ne s'agirait plus de donner à voir l'être-au-monde d'un sujet, mais de systématiser les constantes différenciées autour desquelles se forme le groupe humain : habitus et champs pour le sociologue, chaînes signifiantes pour le psychanalyste, lois du langage pour le linguiste, structures de la parenté pour l'ethnologue. Une fois accompli ce renversement, une fois Sartre dépossédé de la longue hégémonie qu'il avait exercée sur la scène culturelle, cette subjectivité fut déformée, diabolisée : cartésianisme attardé, monadisme suranné, anarchisme individualiste. Et l'accès à l'existentialisme fut bouché par les brumes épaisses d'une doxa antisartrienne.
L'intentionnalité
C'est de cette doxa qu'il faut se défaire, pour tenter de restituer à la fraîcheur de son invention la pensée de Sartre. De quelle « subjectivité » s'agit-il de faire la philosophie ? La première « obédience » de Sartre fut husserlienne, mais se révéla d'emblée contestataire et déviante. De la phénoménologie, Sartre a retenu, avec un émerveillement jamais démenti, la notion d'intentionnalité : enfin, on pouvait penser une subjectivité qui ne soit plus, comme dans les idéalismes, une substance autosuffisante, une transparence autarcique ; qui ne soit pas davantage, comme c'est le cas du point de vue d'un objectivisme scientiste, un fatras d'illusions imaginatives ; ni les nœuds complexes d'une intériorité qu'il s'agirait d'élucider par introspection psychologique. Désormais, la conscience, ouverte à tous les vents, est jetée sur la grand-route, parmi les choses. Ce qui est à penser, ce ne sont plus les « arrière-mondes », mais ce qui se donne à fleur de peau, ou l'apparaître de ce qui apparaît. Le vieux partage s'effondre, qui opposait l'apparence illusoire au ciel des idées, seul siège de la vérité. Et c'est cette révolution, pas moins, qui s'exprime dans le concept d'intentionnalité. « À l'axiome de Descartes selon lequel « il n'est de réalité donnée que pour la conscience », le génie de Husserl avait ajouté : « Toute conscience est conscience de quelque chose ». » Reste que, dès sa première œuvre philosophique, La Transcendance de l'ego (1936), Sartre marque les limites de la phénoménologie husserlienne autant qu'il en exalte l'originalité. Il y déplore en effet que Husserl, qui, dans les Recherches logiques, avait fait tomber sous le coup de l' épochê – suspension des savoirs constitués touchant l'existence du monde, et donc de tout jugement concernant celle-ci – le « moi » psycho-physique, n'ait pas compris que le « je » devait lui aussi être soumis à une telle tréduction ; il soutient qu'il est superflu de donner à la conscience ranscendantale la figure personnelle du je, et que les Ideen, parce qu'elles vont dans cette direction – notamment dans leur rapprochement avec la notion kantienne d'« idée » –, constituent une régression vers une manière classique de philosopher. Si le je doit être évacué, c'est qu'il n'est que le produit de la réflexion, elle-même toujours seconde ou dérivée. C'est réflexivement que je me peuple de ces « habitants » qui sont la texture de mon je, par exemple mes « états » (si j'ai une répulsion pour untel, c'est que je le déteste – ma haine pour lui est un état), ou mes « qualités » (si je hais untel, c'est que je suis misanthrope – la misanthropie qualifie ma personne). Vidée de tous ses habitants, la conscience devient un champ transcendantal impersonnel et irréfléchi, unifié seulement par les objets eux-mêmes. Sartre ne démordra jamais de cette découverte, que, plus tard, dans Saint Genet comédien et martyr (1952), il condensera dans une formule scintillante : Il n'est permis à personne de dire ces simples mots : je suis moi. Les meilleurs, les plus libres peuvent dire : j'existe. C'est déjà trop.
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Posté le : 19/06/2015 16:31
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