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De Montpellier
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Le 15 Février 1950 sortie de Cendrillon, film d'animation
de 74 mn des Sociétés de production Walt Disney Pictures, réalisé par Clyde Geronimi, Wilfred Jackson, Hamilton Luskesous le titre de Cinderella, 16e long-métrage d'animation et le 12e Classique d'animation des studios Disney. Sorti en 1950, il s'inspire de la version du conte de Charles Perrault, Cendrillon ou la Petite Pantoufle de verre paru en 1697, ainsi que de celle des frères Grimm, Aschenputtel, publiée en 1812.
Ce film marque le retour très attendu du studio Disney dans la production de longs métrages d'animation originaux après huit années de films-compilations. Il fait aussi entrer l'entreprise Disney dans une nouvelle période faste, avec une diversification des productions, pour la plupart initiées ou ayant leurs racines à la fin des années 1940. Entre 1950 et 1955, le studio se lance dans la télévision, les longs métrages en prise de vue réelle et les parcs à thèmes. Un autre effet du film est un impact psychologique assez fort car il conforte un imaginaire spécifique de Disney, préétabli dans les productions précédentes, et qui sera prolongé dans les suivantes. En analysant ce film, de nombreux auteurs évoquent une formule, une recette, des conventions définissant une notion de classique Disney. Ces éléments ont été assimilés par les générations d'enfants puis d'adultes, et pour certains spécialistes les effets de cet imaginaire imposé ne sont pas sans conséquence. Cendrillon partage de nombreux éléments avec Blanche-Neige et les Sept Nains, le premier long métrage du studio Disney sorti en 1937 et sont presque similaires : au niveau scénaristique, au niveau graphique, la personnalité et l'aspect des héroïnes, l'atmosphère, l'époque des événements et les éléments qui en font des contes de fées. Les deux films sont aussi des entreprises risquées pour le studio : Blanche-Neige parce qu'il était le premier long métrage, et Cendrillon parce qu'il devait renflouer le studio, qui était alors dans une position financière difficile. Heureusement pour la suite, les deux films ont été des succès tant commerciaux qu'artistiques, même si en comparaison des productions du début des années 1940 Pinocchio, Bambi, Dumbo, Cendrillon est pour de nombreux critiques de qualité légèrement inférieure. On peut y voir à la fois les conséquences des années précédentes, difficiles pour le studio, mais aussi un certain désengagement de Walt Disney pour ce type de film.
Deux suites sont sorties directement sur le marché vidéo dans les années 2000 : Cendrillon 2 : Une vie de princesse en 2002 et Le Sortilège de Cendrillon en 2007.
Un livre de contes s'ouvre et narre l'histoire de Cendrillon. Après la mort de sa mère à sa naissance et de son père quelques années plus tard, une jeune fille est recueillie par sa belle-mère et ses deux belles-sœurs, Anastasie et Javotte. Mais la marâtre va faire une profonde différence entre ses filles et l'orpheline. Cette dernière est condamnée à s'habiller de haillons et doit accomplir toutes les tâches ménagères, notamment le nettoyage des cendres de l'âtre. Elle reçoit pour cette raison le surnom de Cendrillon. Cendrillon supporte sa condition car elle garde l'espoir que ses rêves se réalisent, des rêves d'amour. Un matin, réveillée par des oiseaux, Cendrillon débute sa journée en chantant entourée par les oiseaux et les souris de la maisonnée. Ces dernières l'aident à se laver et s'habiller, brossant et réparant même ses vêtements. Jac l'informe qu'une nouvelle souris a été prise au piège d'une souricière; Cendrillon décide de la sauver et de la vêtir. Elle nomme ce souriceau Gustave, abrégé Gus, et tandis qu'elle descend s'occuper des tâches ménagères, Jac avertit Gus de l'existence du chat Lucifer. Cendrillon obéit aux ordres et réveille Lucifer en premier pour lui donner du lait dans la cuisine. Elle y trouve le chien Pataud, rêvant qu'il court après le chat. Pour le bien du chien, Cendrillon lui demande de ne plus faire ce genre de rêve en cherchant des excuses au chat et rappelant la menace que représentent ses belles-sœurs. Le chat mange dans la cuisine, le chien dehors et Cendrillon nourrit les animaux. Les souris, pour manger dehors avec les poules, doivent passer l'obstacle de Lucifer. Jac imagine le stratagème d'une diversion et le sort le désigne comme appât. Une fois servi et revenu dans la cuisine, Gus se retrouve aux prises avec Lucifer en raison des trop nombreux grains de maïs qu'il porte. Il se réfugie sur l'un des plateaux de petits déjeuners pour la belle-mère et les belles-sœurs. Les clochettes et les cris des trois femmes retentissent tandis que Lucifer cherche à découvrir sous quelle tasse se cache la souris. Les trois femmes donnent à Cendrillon de nouvelles tâches. Gus étant caché sous la tasse de la belle-mère, comme punition la liste des tâches s'allonge et comprend le bain de Lucifer. Au château, le roi peste contre son fils le prince, mais souhaite qu'il trouve l'amour et fonde une famille afin d'avoir des petits-enfants. Pour le retour de voyage du prince le soir même, le roi organise un grand bal et, voulant forcer le destin, il invite les jeunes filles du royaume. Chez Cendrillon, les belles-sœurs ont un cours de musique, au désespoir de Lucifer qui rejoint Cendrillon lavant le sol du hall parmi les bulles de savon. Le chat utilise la poussière pour salir la pièce. C'est à ce moment qu'un messager du roi frappe à la porte. La lettre avertit la maisonnée du bal du soir et de l'invitation des jeunes filles à marier. Cendrillon demande à y aller. La belle-mère accepte à condition que tout son ouvrage soit fait et qu'elle ait une robe convenable. Cendrillon souhaite se confectionner une robe mais la maisonnée fait tout pour ne pas lui en laisser le temps. Les souris décident de lui faire une surprise et de la confectionner avec l'aide des oiseaux. Cendrillon doit préparer les robes de ses belles-sœurs tandis que sa belle-mère l'informe qu'elle a d'autres tâches à lui confier. Gus et Jac ont pour mission de récupérer des pièces pour confectionner la robe mais sont confrontés à Lucifer. Ils récupèrent un ruban et des boutons mais le collier de perles est plus difficile à obtenir. Jac enfile les perles sur la queue de Gus et rejoint les souris et oiseaux dans la chambre de Cendrillon où la robe prend forme. À vingt heures, le bal accueille de nombreuses personnes, le carrosse arrive chez la famille de Cendrillon. Cette dernière n'est pas prête et décide de rester, mais les animaux montrent leur cadeau, et elle se joint donc au reste de la famille. Ne voulant pas revenir sur sa parole, la belle-mère détaille la robe et ses filles découvrent que plusieurs pièces proviennent de leurs affaires. Après quelques secondes, la robe de Cendrillon se retrouve en lambeaux. Cendrillon se réfugie sous un saule du jardin et pleure sur un banc. C'est alors qu'apparaît sa marraine la bonne fée. Une fois sa baguette magique retrouvée, elle transforme une citrouille en un carrosse, les quatre souris Jac, Gus, Luke, Mert ou Bert en chevaux, le cheval de la maisonnée en cocher, le chien Pataud en valet de pied et les guenilles de Cendrillon en une robe blanche immaculée avec des pantoufles de verre. Elle peut se rendre au bal, la seule condition étant que le charme magique s'interrompra au douzième coup de minuit. Le carrosse traverse la ville et rejoint le château. Le prince accueille une à une les princesses et autres demoiselles des environs. Cendrillon traverse le hall tandis que ses belles-sœurs sont présentées au prince. Le prince se dirige vers Cendrillon, alors une inconnue, le roi demande une valse et le bal débute. Le roi va se coucher mais demande au Grand-Duc de surveiller le prince subjugué par Cendrillon, et de les laisser seuls jusqu'à ce qu'il demande la jeune fille en mariage. Le couple se rend dans les jardins et le temps passe. Minuit arrivant, Cendrillon est contrainte de s'en aller. Elle court, suivie par le prince, mais perd une pantoufle dans l'escalier du hall. Le prince est bloqué par des jeunes filles et c'est le Grand-Duc qui poursuit Cendrillon, appelant même la garde. La magie prenant fin, les soldats ne parviennent pas à trouver la jeune fille. Cendrillon pense que le jeune homme surpasse même le prince de ses rêves et qu'elle a tout gâché en perdant la notion du temps. Elle remercie sa marraine et peut conserver en souvenir, une pantoufle de verre. De son côté, le Grand-Duc doit réveiller le roi et l'informer que tout n'est pas désespéré car il a trouvé une pantoufle de verre appartenant à la jeune fille inconnue. Le prince ayant juré d'épouser la propriétaire de la pantoufle de verre, le roi lui commande de la chercher. Par édit du roi, la jeune fille qui parviendra à chausser la pantoufle sera reconnue comme la fiancée du prince, toutes les filles du royaume devant essayer. Dans la maisonnée de Cendrillon, la nouvelle provoque un branle-bas de combat et Cendrillon est bouleversée par cette nouvelle. La belle-mère, s'apercevant de son état, enferme Cendrillon dans sa chambre. Les souris vont tenter de récupérer la clé. Les deux sœurs affirment être les propriétaires et sont testées par le Grand-Duc mais leurs pieds sont trop grands. Fatigué par sa nuit, le Grand-Duc s'endort un instant. Ce délai permet aux souris de récupérer la clé et d'escalader l'escalier tandis que Javotte s'évertue à entrer son pied dans la pantoufle. Arrivé en haut, Gus, qui a la clé, est emprisonné par Lucifer. Les souris se rebellent contre le chat, aidées par les oiseaux. Cendrillon appelle l'aide de Pataud mais le Grand-Duc est déjà sur le départ. Libérée, Cendrillon se présente en haut de l'escalier et demande à essayer la pantoufle. Le Grand-Duc accepte mais la belle-mère fait en sorte que le valet casse la pantoufle avant le test. Le Grand-Duc est désespéré jusqu'au moment où Cendrillon sort la seconde pantoufle. Le mariage du Prince et de Cendrillon a lieu et l'histoire s'achève sur et ils vécurent heureux.
Fiche technique
Titre original : Cinderella Titre français : Cendrillon Réalisation : Clyde Geronimi, Wilfred Jackson et Hamilton Luske Scénario : William Peed, Erdman Penner, Ted Sears, Winston Hibler, Homer Brightman, Harry Reeves, Kenneth Anderson et Joe Rinaldi d'après Charles Perrault et les frères Grimm Conception graphique : Couleur et stylisme : Mary Blair, John Hench, Claude Coats et Don Da Gradi Cadrage Layout : Mac Stewart, A. Kendall O'Connor, Tom Codrick, Hugh Hennesy, Lance Nolley, Charles Philippi, Don Griffith, Thor Putnam Décors : Brice Mack, Art Riley, Ralph Hulett, Ray Huffine, Dick Anthony, Merle Cox et Thelma Witmer Animation : Supervision : Eric Larson, Marc Davis, Milt Kahl, Frank Thomas, Ward Kimball, Wolfgang Reitherman, Ollie Johnston, John Lounsbery, Les Clark et Norm Ferguson Animation des personnages : Don Lusk, Phil Duncan, Hugh Fraser, Hal King, Fred Moore, Harvey Toombs, Judge Whitaker, Cliff Nordberg, Marvin Woodward, Ken O'Brien, George Nicholas et Hal Ambro Effets spéciaux : George Rowley, Josh Meador et Jack Boyd Procédé technique : Ub Iwerks Son : C. O. Slyfield supervision, Harold J. Steck et Robert O. Cook enregistrement Montage : Donald Halliday ilm, Al Teeter musique
Musique :
Compositeurs : Paul J. Smith et Oliver Wallace Chansons : Mack David, Al Hoffman et Jerry Livingston Orchestrations : Joseph Dubin Producteur délégué : Ben Sharpsteen Production : Walt Disney Production Distribution : RKO Radio Pictures Budget : 2,21,2 à 2,93 millions de USD Format : Couleurs - 1,37:1 - Mono RCA Sound System Durée : 74 minutes Dates de sortie : États-Unis : 15 février 19505 ; France : 1er décembre 1950 Sauf mention contraire, les informations proviennent des sources concordantes suivantes : Leonard Maltin, Pierre Lambert, John Grant et Jerry Beck
Distribution Voix originales
Ilene Woods : Cinderella Cendrillon Eleanor Audley : Lady Tremaine la marâtre Rhoda Williams : Drizella Javotte Lucille Bliss : Anastasia Anastasie Verna Felton : Fairy Godmother la marraine-fée James MacDonald : Jaq / Gus / Bruno Pataud William Phipps : Prince Charming le prince charmant, voix parlée Mike Douglas : Prince Charming le prince charmant, voix chantée Luis Van Rooten : King le roi / Grand Duke le grand-duc Don Barclay : Doorman le cocher June Foray : Lucifer Lucille Williams : Perla Suzy Clint McCauley : Mice souris Betty Lou Gerson : Narrator la narratrice Claire Du Brey : Additional voices voix additionnelles Marion Darlington : Birds oiseaux
Voix françaises 1er doublage 1950
Paule Marsay : Cendrillon voix parlée Paulette Rollin : Cendrillon voix chantée Héléna Manson : la marâtre Lita Recio : la marraine-fée Jacques Bodoin : Jac et Gus Dominique Tirmont : le prince Camille Guérini : le roi non crédité André Bervil : le grand-duc Mony Dalmès : la narratrice Georges Hubert Casti et Lanci Doublage réalisé par RKO Films Léon et Max Kikoïne, adaptation française : Louis Sauvat, direction artistique : Daniel Gilbert texte, Georges Tzipine chansons, supervision : Victor Szwarc. Sources : Cartons du générique et Objectif Cinéma
2e doublage 1991
Dominique Poulain : Cendrillon Jacqueline Porel : la Marâtre Dominique Chauby : Javotte Barbara Tissier : Anastasie Claude Chantal : la Marraine-fée Jacques Frantz : Gus Emmanuel Jacomy : Jack et le Prince Michel Chevalier : le Prince chant Jacques Deschamps : le Roi Jean-Luc Kayser : le Grand-duc Raymond Baillet : le Messager / le Valet de pied Bernard Musson : l'Aboyeur de la cour Maurice Decoster : Luke Claude Lombard : Suzy Brigitte Virtudes : la narratrice Source : Objectif Cinéma
Chansons du film
Cendrillon Cinderella- Soliste et chœur Tendre Rêve ou Le Rêve de ma vie A Dream Is a Wish Your Heart Makes - Cendrillon Doux Rossignol (Oh, Sing Sweet Nightingale - Javotte et Cendrillon Les Harpies The Work Song - Jac et les autres souris Tendre Rêve ou Le Rêve de ma vie reprise - Les Souris Bibbidi-Bobbidi-Boo - La Marraine C'est ça, l'amour So This Is Love- Cendrillon et le Prince Cendrillon au travail non utilisé Danser sur un nuage non utilisé
Distinctions Nominations
1950 : Sélection officielle en compétition au Lion d'or de la Mostra de Venise 1951 : Nominations aux Oscar de la Meilleure musique, de la Meilleure chanson Bibbidi-Bobbidi-Boo et du Meilleur mixage. 1951 : Nomination à l'Hugo du Best Dramatic Presentation 1960 : Nomination à l'Ours d'or au Festival de Berlin 2005 : Nomination à l’Outstanding Youth DVD aux Satellite Awards
Récompenses
1950 : Prix spécial de la Mostra de Venise 1951 : Prix de l’Audience Poll : Grand Bronze Plate au Festival de Berlin 1951 : Ours d'or pour le Best Musical au Festival de Berlin 1999 : Young Artist Awards à Lucille Bliss pour son interprétation d'Anastasie
Sorties cinéma
Sauf mention contraire, les informations suivantes sont issues de l'Internet Movie Database.
Premières nationales
États-Unis : 15 février 1950 Argentine : 5 juillet 1950 Italie : août 1950 Première à la Mostra de Venise, 8 décembre 1950 sortie nationale Australie : 13 octobre 1950 Danemark : 18 novembre 1950 France : 1er décembre 1950 Pays-Bas : 7 décembre 1950 Finlande : 15 décembre 1950 Suède : 18 décembre 1950 Norvège : 26 décembre 1950 Mexique : 17 janvier 1951 Hong Kong : 4 octobre 1951 Allemagne de l'Ouest : 21 décembre 1951, juin 1960 Festival de Berlin Japon : 7 mars 1952 Autriche : 5 décembre 1952 Espagne : 19 décembre 1952
Ressorties principales
États-Unis : 14 février 1957, 9 juin 1965, 23 mars 1973, 18 décembre 1981, 20 novembre 1987 Italie : 19 décembre 1958, 22 décembre 1967, 19 décembre 1975, 17 décembre 1982 Japon : 18 mars 1961, 23 mars 1974, 7 août 1982, 18 juillet 1987 Finlande : 15 décembre 1967 Danemark : 26 décembre 1967 Allemagne de l'ouest : 18 juillet 1980, 16 juillet 1987 Suède : 30 mars 1985, 9 août 1991 Australie : 11 avril 1991 Argentine : 9 janvier 1992 France : 20 juillet 2005
Sorties vidéo
octobre 1988 : VHS Québec et États-Unis avec 1er doublage 27 novembre 1992 : VHS avec 2e doublage octobre 1995 : VHS Québec et États-Unis avec 2e doublage 1998 : VHS avec image restaurée et 2e doublage 1998 : Laserdisc avec image restaurée et 2e doublage 4 octobre 2005 : DVD Édition Platine Québec et États-Unis avec restauration numérique et 2e doublage 26 octobre 2005 : Double DVD collector avec restauration numérique et 2e doublage 26 octobre 2005 : DVD simple avec 2e doublage 26 octobre 2005 : VHS avec restauration numérique et 2e doublage 26 septembre 2012 : Blu-ray 26 septembre 2012 : DVD
Origines et production
À la fin des années 1930, après le succès de Blanche-Neige et les Sept Nains sorti en 1937, le studio Disney finalise plusieurs projets importants tels que Pinocchio, Fantasia et Bambi et se lance sur de nombreux autres projets. Les trois principales productions entamées à cette époque sont Cendrillon, Alice au pays des merveilles et Peter Pan. En raison de nombreux éléments dont les conséquences de la Seconde Guerre mondiale, le studio est forcé de repousser ces projets et de modifier ses productions durant la décennie 1940. Plusieurs projets sont lancés pour retrouver une certaine rentabilité avec des productions à faibles coûts. Le studio réalise alors plusieurs longs métrages d'animation qui ne sont en réalité que des compilations de moyens voire de courts métrages.
La préproduction
Le conte Cendrillon ou la Petite Pantoufle de verre de Charles Perrault a souvent servi de base pour des œuvres théâtrales, comme le ballet de Prokofiev ou cinématographiques. Jerry Beck dénombre entre 1898 et 2005 pas moins de 38 adaptations cinématographiques par différents studios du conte de Cendrillon. Jeff Kurtti évoque quant à lui l'internationalité et l'intemporalité du conte dont l'une des plus anciennes variantes attestées remonte au IXe siècle en Chine, mais aussi une version nigériane avec une jeune fille, une grenouille et le fils du chef. Walt Disney s'était déjà essayé à l'adaptation du conte au sein de son studio Laugh-O-Gram à Kansas City avec le court métrage Cinderella 1922. Cette version était toutefois très librement adaptée et, d'après John Grant, distordue. Pour lui, la principale différence concerne les deux belles-sœurs, l'une est grosse et affalée dans un hamac lisant un livre intitulé Comment manger et grandir élancée, ce qu'elle n'arrive pas à atteindre, l'autre étant maigre et lisant attentivement un livre intitulé Les Secrets de la beauté. En 1933, le studio Disney tente d'adapter le conte comme un court métrage de la série des Silly Symphonies, mais ce projet est annulé. Burt Gillett était le réalisateur assigné à ce court métrage et Frank Churchill le compositeur. Un scénario daté de décembre 1933 circule alors au sein du studio et mentionne une souris blanche amicale, des oiseaux chantant et jouant avec Cendrillon ainsi que de nombreuses idées de gags. Pour une raison inconnue, mais peut-être à relier à la sortie en août 1934 de Poor Cinderella avec Betty Boop produit par les Fleischer Studios, ce court métrage n'a pas été produit.
Premiers scripts et suspension de la production
Selon Michael Barrier, le projet de faire un long métrage ayant pour thème Cendrillon date de 1938. Une nouvelle adaptation de Cendrillon par le studio Disney est attestée au début des années 1940 par un script écrit par Dana Cofy et Bianca Majolie en 1940. Les deux auteurs ajoutent quelques personnages en leur donnant à chacun un nom amusant : Florimel de la Poche la marâtre, Wanda et Javotte les belles-sœurs, Dusty la souris domestique, Clarissa une tortue domestique, Bon Bon le chat, Spink l'aide de camp du prince et M. Carnewal le professeur de danse. Dans cette version, Cendrillon est enfermée après le bal et c'est la souris qui chipe le soulier et l'emporte dans le cachot suivi par l'aide de camp du prince. Selon Bob Thomas, Walt Disney voyait en Cendrillon les mêmes qualités que Blanche-Neige et n'arrivait pas à rendre les personnages d'Alice et Peter Pan assez chaleureux. Il se concentre alors sur cette production. À partir du scénario de Cofy et Majolie, de nombreux changements sont effectués par plusieurs auteurs. Ainsi, la robe de Cendrillon est confectionnée par les souris pour les rendre plus présentes. La confection des deux robes de bal du conte original est regroupée pour étoffer l'action. Le 27 juin 1941, en raison de la grève des studios Disney, Walt Disney suspend la production des longs métrages Cendrillon, Peter Pan et Alice aux pays des merveilles. Après le décès de Frank Churchill en 1942, Walt Disney confie la musique aux compositeurs Oliver Wallace et Paul J. Smith. Il confie aussi la mission d'écrire les paroles des chansons du film aux paroliers Mack David, Al Hoffman et Jerry Livingston, tous trois de Tin Pan Alley. En septembre 1943, Walt Disney lance un plan de travail pour la production du film, nommant Dick Huemer et Joe Grant comme superviseurs et allouant un budget d'un million de dollars. En raison d'un conflit personnel entre les scénaristes Maurice Rapf et Dalton Reymond lors de l'écriture de Mélodie du Sud 1946, Disney décide à la fin de l'été 1944 de transférer Rapf sur le scénario du film Cendrillon31. Rapf conçoit une variante où Cendrillon est encore plus active. En effet Cendrillon est, au contraire de Blanche-Neige, une jeune femme qui souhaite et agit pour changer sa condition28. Ainsi chez Rapf, Cendrillon doit se rebeller contre sa belle-famille pour atteindre son but, et va jusqu'à jeter des objets sur sa belle-mère et ses belles-sœurs avant de les enfermer dans le hall de leur maison. Malgré le projet de 1943, la production ne dépasse pas l'étape des story-boards. Entre mars et avril 1946, seulement trois réunions se tiennent en présence de Walt pour évoquer le projet. Walt annonce toutefois officiellement au public la production de Cendrillon, public qui s'en enthousiasme. Durant l'année 1946, Larry Morey et Charles Wolcott écrivent six chansons pour Cendrillon, qui ne seront finalement pas utilisées : Sing a Little, Dream Little pour la scène du ménage, The Mouse Song pour la séquence de la robe, The Dress My Mother Wore pour une scène où Cendrillon rêve de la beauté de sa mère disparue, Dancing on a Cloud chantée lors d'une danse avec le prince durant le bal et originellement prévue pour Blanche-Neige, I Lost my Heart at the Ball chantée par Cendrillon après le bal et son pendant chanté par le prince The Face that I see in the Night. L'année 1947 est marquée par une importante réduction du nombre de productions en cours. Au début de l'année 1947, alors que la production du film Danny, le petit mouton noir est stoppée pour sept semaines, l'animation de Coquin de printemps 1947 s'achève et deux autres compilations sont en préparation, Mélodie Cocktail et Two Fabulous Characters, renommée par la suite Le Crapaud et le Maître d'école. Les autres longs métrages sont plus ou moins à l'arrêt.
Reprise de la production
Le 24 mars 1947, un pré-scénario écrit par Ted Sears, Homer Brightman et Harry Reeves est choisi pour aller plus avant dans la production de Cendrillon et un story-board définitif est confirmé peu de temps après par un compte-rendu publié courant mai. Neal Gabler situe ces événements au printemps 1946. En septembre 1947, peu avant la sortie de Coquin de printemps, la société Disney publie ses résultats financiers annuels. Ils indiquent que sa dette vis-à -vis des banques est passée de 4,2 millions à 3 millions d'USD, valeur pour l'époque moins effrayante et plus gérable, et offrant de meilleures perspectives. La situation n'est pourtant pas radieuse et le studio se doit de finir un film avec le budget le plus faible possible, film qui doit être assurément profitable. Afin de conserver une possibilité de bénéfices, le studio emploie les méthodes de réduction de coûts apprises durant les années précédentes, dont le découpage et l'évaluation de chaque scène avant toute animation ou l'utilisation des contours de personnages humains pour l'animation. En novembre 1947, Sharpsteen informe Walt de l'avancement du projet : Bill Peet travaille sur la scène des souris aidant Cendrillon à s'habiller, Olliver Wallace a enregistré la chanson So This Is love, Hamilton Luske et Wilfred Jackson poursuivent les tournages avec les acteurs et les scénaristes Winston Hibler et Ted Sears ont rejoint la production du film Le Crapaud et le Maître d'école 1949. Au début de l'année 1948, la production de Cendrillon est de nouveau attestée. Elle est assez avancée pour envisager sa sortie avant l'autre grosse production du studio, Alice au pays des merveilles. Une retranscription d'une réunion datée du 15 janvier 1948 indique que Walt Disney reprend et développe les idées et points cruciaux du scénario de Cendrillon présentés sur des story-boards. D'après une lettre de Dick Huemer, Walt décida un beau jour de relancer la production du film en stoppant le développement des séquences non essentielles. En recoupant les informations de Barrier et de Jack Kinney, il semble qu'au début de l'année 1948, alors que Kinney présentait avec son équipe de vingt personnes l'avancement du projet Peter Pan lors qu'une réunion qui dura deux heures et demie, Walt annonça à la fin de la réunion, après un long silence, qu'il pensait à Cendrillon comme prochain long métrage du studio. Afin de réduire les coûts, une scène conçue par Huemer et Norman Ferguson presque prête pour être animée, présentant une leçon de musique pour les deux belles-sœurs étudiant auprès d'un maître français la harpe et la flûte située juste avant l'arrivée du message pour le bal, a été réduite à une sœur à la flûte et l'autre chantant. Un autre exemple de réduction de coûts concerne la musique. Plusieurs des chansons écrites par les paroliers David, Hoffman et Livingston n'ont pas été retenues, dont une intitulée Cinderella Work Song sur laquelle Cendrillon se dupliquait pour achever toutes ses tâches, dont la confection de sa robe, avant d'aller au bal. Cette scène a été remplacée pour des raisons économiques par une confection de la robe par les souris. L'approche de la sortie fin 1949 de la compilation Le Crapaud et le Maître d'école conforte Walt Disney dans l'idée que techniquement, son studio peut à nouveau produire des longs métrages d'animation d'un seul tenant. Les critiques de l'époque évoquent pour la plupart leur impatience pour ce long métrage au détriment d'une analyse de cette compilation. Mais après la sortie de Danny, le petit mouton noir en 1948, Walt Disney commence à s'intéresser à d'autres sujets que l'animation, tels que les trains miniatures avec son Carolwood Pacific Railroad ou les parcs à thèmes, le projet du film Cendrillon étant devenu selon Michael Barrier moins satisfaisant. D'après Ollie Johnston, Walt Disney ne se rendait, durant la production de Cendrillon, dans le bureau du réalisateur Wilfred Jackson qu'une fois toutes les trois ou quatre semaines au lieu des deux à trois fois par semaine. Jackson ajoute que Walt était une personnalité qui générait beaucoup plus d'inspiration quand on était en contact direct avec lui tous les deux ou trois jours que quand il vous laissait plus de latitude et venait vous voir de manière moins fréquente.
Adaptation du conte
Le studio a largement calqué la base de son scénario sur la version de Charles Perrault. Ainsi, le père de Cendrillon meurt au début de l'histoire et le sortilège prend fin au douzième coup de minuit. À partir du bal, l'histoire est plus proche de la version des frères Grimm, principalement en ce qui concerne les comportements de Cendrillon et du prince. Parmi les éléments confirmant l'utilisation de la version de Perrault et non celle des Grimm, Allan cite l'absence de la fée-marraine, l'absence de la citrouille et la pantoufle de verre au lieu de celle en or49. Mais Disney a repris les oiseaux aidant Cendrillon et l'insistance du sadisme de la marâtre présents seulement chez Grimm. Le principal défi pour le studio, semblable à celui pour la production de Blanche-Neige, a été d'ajouter assez de personnages secondaires et d'événements supplémentaires pour étoffer et rendre l'histoire, simple et familière du conte, assez longue et divertissante pour un long métrage. L'histoire développée en long métrage reprend des éléments dont les gags conçus pour la Silly Symphony avortée de 1933-1934. Barrier rappelle que le conte de Cendrillon est probablement bien plus ancien que celui de Blanche-Neige, mais il affirme que leurs points de similitude auraient conduit les équipes de production à tenter quelques réutilisations. Quelques éléments viennent confirmer son affirmation. Dans le scénario de mars 1947, le Prince charmant possède les mêmes caractéristiques que celui de Blanche-Neige, tandis que la version de mai propose une approche différente du conte original avec une ambiance fermière de la vie de Cendrillon, reprenant plus ou moins la vie dans la chaumière des nains de Blanche-Neige. Le 17 mars 1948, Walt Disney demande à ses animateurs de supprimer ou minimiser ces ressemblances pour ne pas refaire un Blanche-Neige. Mais la version de Disney diffère, comme pour Blanche-Neige, de la version originale par des ajouts. Un élément ajouté par Disney est le conflit entre le chat Lucifer et les souris. Cet élément n'est qu'une suggestion lors d'une réunion le 25 mars 1947 et devient un élément important dans une réunion du 15 janvier 1948. C'est après cette réunion que Walt nomme Bill Peet alias William Peed, auteur des gags de Mélodie du Sud 1946, scénariste sur les scènes chat-souris. La scène de poursuite entre Lucifer et les souris pour les morceaux de la robe de Cendrillon n'a été conçue que plus tard, et son animation réalisée par John Lounsbery n'a été visionnée que le 28 février 1949. Cette scène était conçue pour satisfaire l'intérêt du public pour les animaux.
Aspect artistique
Ollie Johnston et Frank Thomas écrivent que Cendrillon est le film Disney le plus minutieusement planifié, avec un scénario écrit dans les moindres détails, des personnages développés avec attention, le tout basé sur une structure musicale. Un des principaux problèmes artistiques du film est qu'il a toujours semblé plus facile de reproduire une histoire d'amour entre humains avec des acteurs en chair et en os qu'avec des dessins, la solution résidant dans la force des personnages animés pour s'y identifier, leur aspect convaincant. Afin de respecter au mieux les mouvements du carrosse, rendus difficiles par les roues en spirales, A. Kendall O'Connor a créé une maquette miniature puis l'a filmée. Ce procédé de création à l'aide de maquette avait été inauguré par Joe Grant et les marionnettes de Pinocchio. Afin de donner un mouvement plus important au carrosse, la scène a été dessinée selon un plan circulaire. En raison des nombreuses scènes vues sous l'angle des souris, Allan associe ce type de prises de vue subjectives, au genre du film noir. Allan, repris par Bruno Girveau, voit aussi un parallèle dans le traitement de la relation Cendrillon/Belle-Mère et celle de Mrs. Danvers/Mrs. de Winter dans le film Rebecca 1940 d'Alfred Hitchcock, renforcé par la ressemblance des voix des actrices. Le film comporte quelques nouveaux effets spéciaux. Un effet spécial permet dans la scène de la chanson Doux Rossignol de voir l'image de Cendrillon se refléter dans les bulles de savon, qui a nécessité la résolution de nombreux problèmes techniques en plus de ceux intrinsèques à l'animation des bulles. La scène de l'apparition de la fée marraine comporte plusieurs effets, le premier pour l'apparition étincelante61 et un autre pour les particules lumineuses l'entourant, dont le nombre a été augmenté selon le souhait de Walt, et baptisé par la suite Poussière Disney.
Les décors
En raison du départ des studios de Gustaf Tenggren, Albert Hurter et Tyrus Wong durant la Seconde Guerre mondiale, Walt Disney confie la direction artistique principalement à Mary Blair, jeune artiste qui a fait ses armes, à la suite de sa participation au voyage en Amérique du Sud en 1941, sur les compilations des années 1940 telles que Saludos Amigos 1942 et Les Trois Caballeros 1944. Blair et Marc Davis ont réalisé de très nombreuses esquisses pour trouver les formes et les couleurs des costumes des personnages en en particulier pour les invités du bal. Le film contient une influence française pour l'atmosphère expressionniste et germanique en raison de sa parenté avec le genre du film noir Allan évoque les paysages bucoliques de Fragonard. Mais alors que certaines des précédentes productions, dont Dumbo et Bambi, incluent une forme de dichotomie de style, Cendrillon possède une uniformité visuelle tout au long du film. Les couleurs sombres et froides prévalent, bleu, bordeaux et mauve, mais sont compensées par des lumières claires et douces, accentuant la magie et le mystère du fantastique. Tenggren et Hurter ce dernier est mort en 1941 et son influence est regrettée avaient œuvré sur Blanche-Neige et les Sept Nains 1937 et Pinocchio 1940, et Wong sur Bambi 1942. On peut aussi noter la présence de John Hench à la supervision de la couleur. Parmi les réalisations supervisées par Blair, on peut noter la scène de bal avec la danse du Prince et de Cendrillon qui possède une atmosphère romantique évoquée par un usage créatif des couleurs et de la lumière noire. Une autre réalisation est l'aspect romancé au lointain du château dans un décor maussade, très gris, permettant de mieux communiquer au public la tristesse de Cendrillon qui ne peut se rendre au bal. Robin Allan considère les scènes des souris assistant Cendrillon comme des réminiscences des œuvres de Beatrix Potter. Ainsi à l'instar de The Tale of Samuel Whiskers, le spectateur découvre l'autre côté du mur en passant par le trou de souris, de même le chat Lucifer emprisonne une souris sous une tasse à thé comme dans Le Tailleur de Gloucester The Tailor of Gloucester, artiste adepte de l'anthropomorphisme. Bruno Girveau relie l'ensemble des châteaux présents dans les longs métrages d'animation Disney au résultat d'un même processus d'élaboration basé sur de longues recherches iconographiques et motivé par le développement et l'enrichissement de l'imaginaire souhaité par Walt Disney, la magie Disney. L'architecture commune est dominée par la nostalgie de l'Europe romantique et plus particulièrement des contreforts germaniques des Alpes. Allan apparente certains plans du château et de ses soldats au film Le Triomphe de la volonté 1935 de Leni Riefenstahl, principalement avec la présence des longs escaliers, des colonnades, des banderoles et surtout les alignements de soldats. Il assimile aussi la montée puis la descente des marches aux comédies musicales hollywoodiennes de Busby Berkeley.
La musique et l'ambiance sonore
Durant la production, les réalisateurs ont travaillé de manière rapprochée avec les compositeurs, comme Wilfred Jackson avec Oliver Wallace, qui selon Barrier a été le plus impliqué des trois réalisateurs48. Mais Jackson regrette que la musique des longs métrages d'animation dès Blanche-Neige et les Sept Nains, n'est plus aussi soigneusement synchronisée avec l'action que celle des courts métrages, s'éloignant de ce qui a été surnommé le mickeymousing. Barrier explique que la musique du film a été composée comme à l'accoutumée avant la mise en animation afin d'avoir un support rythmique. Mais pour certaines séquences, Olliver Wallace a dû composer des musiques ou des intermèdes pour compléter la bande sonore devenue muette par des animations plus longues. Maltin indique que sans la présence de la musique, la scène dans laquelle les souris et les oiseaux confectionnent la robe de Cendrillon ne fonctionnerait pas car elle donne une direction et un tempo. De même, la chanson Bibbidi-Bobbidi-Boo permet de donner à la Marraine un air jovial.
Les scénaristes et animateurs ont développé un rythme, basé sur le carillon de l'horloge du palais et découpant la fuite de Cendrillon en étapes clairement définies :
1er coup : Cendrillon prend congé du prince ; 2e coup : Cendrillon s'enfuit en courant ; 3e coup : Cendrillon prend congé du Grand-Duc ; 4e coup : Cendrillon perd sa pantoufle ; 5e coup : le Grand-Duc trouve la pantoufle ; 6e coup : le carrosse part au galop ; 7e coup : les portes du palais sont fermées ; 8e coup : le Grand-Duc lance les gardes à la poursuite du carrosse ; 9e coup : le carrosse est pris en chasse par les gardes ; 10e coup : le carrosse et les gardes traversent un pont ; 11e coup : le carrosse redevient une citrouille ; 12e coup : le sortilège prend fin.
Les personnages
Comme évoqué, lors des différentes phases d'écriture du scénario et jusqu'au dernier moment de la production, l'équipe de Disney a ajouté de nombreux personnages aux contes de Perrault et des Grimm. Ces ajouts se rangent dans deux catégories, les humains et les animaux. Parmi les humains, on voit apparaître le Roi et le Grand-Duc, ce dernier est le conseiller du Roi et l'aide à arranger un bal pour trouver une épouse pour le prince. Les scénaristes Disney ont ajouté beaucoup plus d'animaux que d'humains, dont les souris Jac et Gus, le chat Lucifer et aussi le chien Pataud Bruno. Deux intrigues basées autour des souris ont permis d'égayer le scénario, l'une les confrontant à Lucifer, l'autre aux humains. Tout au long du film, les personnages animaliers prennent part de manière importante aux actions, en commençant par la première scène où Cendrillon est réveillée par des oiseaux qui l'aident ensuite à se vêtir. De plus, les actions des animaux et des hommes s'intègrent parfaitement les unes aux autres permettant des transitions dans un flux continu d'actions.
Les humains
À l'instar de Blanche-Neige et les Sept Nains et pour baisser les coûts de production, les animateurs ont utilisé un film de préproduction en noir et blanc tourné spécialement pour servir de base aux personnages humains. Marc Davis estime à 90 % la part des scènes qui sont filmées avec des acteurs avant d'être animées. Barrier ne donne pas de chiffre, mais pour lui, presque l'intégralité des scènes du film ont été tournées ainsi42. Les animateurs se sont ensuite inspirés des mouvements des acteurs et les ont parfois même décalqués, technique nommée rotoscopie et permettant d'obtenir des photostats. Thomas et Johnston indiquent a contrario que, même si le dessin de l'animateur et le photostat sont parfois très proches, ces derniers ne sont que des guides pour les aider car rien ne peut être réellement décalqué. Frank Thomas indique que Cendrillon et ses proches étaient tous de vraies personnes et qu'il voulait ne pas en faire des personnages mi-humains, mi-cartoon. Christopher Finch distingue deux types d'êtres humains : ceux traités de manière naturaliste Cendrillon, le Prince et la Belle-mère et ceux plus proches de la caricature, Belles-sœurs, Roi et Grand-Duc. Neal Gabler affirme que Mary Blair a retravaillé les dessins des personnages à la demande de Walt afin de gommer les ressemblances avec ceux de Blanche-Neige. La technique de rotoscopie a été utilisée régulièrement dans les productions de Disney pour les personnages féminins. Une conséquence de cette volonté, semble-t-il partagée par les membres de la production, est que Cendrillon, ou sa belle-mère, partagent rarement l'écran avec un personnage clairement cartoon afin de ne pas ôter leurs origines d'acteurs réels. Barrier ajoute que c'est de cela que découle l'ajout du conflit parallèle entre le chat Lucifer et les souris.
Cendrillon.
Le personnage principal est Cendrillon. Elle sert souvent de passerelle entre les deux mondes humains et animaux interagissant avec les souris ou les oiseaux, ce qui la rend selon Maltin très agréable. Grâce aux chansons, il est possible de connaître ses sentiments, son côté tendre et affectueux. L'animation de l'héroïne a été confiée à Eric Larson et Marc Davis. Les deux animateurs n'avaient pas la même perception du personnage, Davis accentuant le raffinement et Larson optant pour la simplicité. L'actrice Helene Stanley a servi de modèle vivant pour Cendrillon mais aussi par la suite pour Aurore, princesse de La Belle au bois dormant 1959 et pour Anita des 101 Dalmatiens 1961. Pour David Whitley, ces trois personnages féminins ne sont que des déclinaisons de Blanche-Neige. Selon Whitley, Blanche-Neige est l'archétype de la princesse qui se fait une place dans le monde, devant s'appuyer sur les forces de la nature et ses représentants, les animaux. Salomon pointe le fait qu'un élément constitutif de ces héroïnes est la faculté de parler avec les animaux. Whitley poursuit en expliquant, Cendrillon et Aurore ne sont que des variations de cet archétype et il faut ajouter à cette liste Ariel la princesse de La Petite Sirène 1989, une déclinaison sous-marine. Brode note que Cendrillon est la première héroïne Disney ayant une chevelure blonde. Pour Grant, l'actrice Helene Stanley, une brune et non une blonde comme Cendrillon, devait à la vue de ses performances de danseuse être plus belle que le personnage modelé sur elle. Toutefois, lors d'une réunion du 13 décembre 1948 et après avoir vu l'animation de Cendrillon au début du film, Walt Disney demande aux animateurs qu'il considère comme bons de prendre plus de liberté et de ne pas donner l'impression de recopier les photostats, obtenus par rotoscopie. Davis indique qu'à l'époque les caractéristiques du personnage de Cendrillon n'avaient pas été définies lors d'une étape préliminaire de conception-modélisation des personnages, comme c'est le cas dans les autres productions. Dans le cas de Cendrillon, plusieurs dizaines de mètres d'animation avaient été réalisés avant cette définition. Davis compare dans une interview de 1982 Cendrillon avec une autre de ses créations, Cruella d'Enfer des 101 Dalmatiens 1961 : Cendrillon est plus difficile à animer car elle porte l'histoire... Elle doit être crédible, réelle et vous devez pouvoir ressentir de la sympathie pour elle. Cruella au contraire est un personnage plus gratifiant à faire parce que... il provoque le rire.Pour Grant, Cendrillon diffère de nombreux personnages centraux des longs métrages de Disney car, pour participer au bal, elle y met toutes ses forces. Le but de cette présentation était de montrer Cendrillon comme une jeune femme agréable mais pas coquette. Sur près de 400 postulantes, c'est Ilene Woods qui fut choisie pour interpréter la voix de Cendrillon. Cependant, elle ne savait même pas qu'elle auditionnait pour le rôle jusqu'à ce que Walt Disney ne la contacte : elle avait enregistré sa voix pour des amis, les paroliers Mack David et Jerry Livingston, qui l'avaient envoyée aux studios Disney sans l'avertir.
La Belle-mère, Javotte et Anastasie
La famille de Cendrillon est constituée de sa belle-mère et de ses deux belles-sœurs. La belle-mère ne porte pas de nom précis dans le conte de Charles Perrault, principe repris dans la version française, mais a été nommée dans la version anglophone Lady Tremaine. Les belles-sœurs de Cendrillon se nomment Javotte et Anastasie comme dans l'histoire originale mais respectivement Drizella et Anastasia, en anglais. Ce sont des belles-sœurs car elles n'ont ni le même père ni la même mère, leur mère ayant épousé le père de Cendrillon après leur naissance. Lors du bal, elles sont présentées dans le film par l'intendant comme Javotte et Anastasie de Trémaine. D'après le Littré, la trémaine est un des noms vulgaires du trèfle des prés, utilisé par exemple dans le chapitre I de L'Ensorcelée de Jules Barbey d'Aurevilly.
Lady Trémaine.
La marâtre a été animée par Frank Thomas de manière conventionnelle pour la rendre terrifiante bien qu'il soit plus habitué à des personnages sympathiques tels Pinocchio ou Bambi. Thomas a été assisté par Harvey Toombs. Elle ne possède aucun pouvoir magique mais est le pendant de la Reine-sorcière de Blanche-Neige et les Sept Nains. Elle possède aussi un animal de compagnie, un chat au lieu du corbeau. Nelson la décrit comme un méchant substantiel, avec des yeux mi-clos et un sourire moqueur qui, dessinés avec un réalisme plus important que la reine-sorcière ou Stromboli de Pinocchio 1940, lui donnent une présence glaciale. Pour Griffin, la Belle-mère, à l'instar de la Reine de Blanche-Neige ou de Maléfique dans La Belle au bois dormant 1959, est représentée par de grands mouvements de sa cape tombant sur le sol et des poses de divas. Au contraire et en respectant un schéma courant chez les méchants de Disney, les mouvements de son visage sont lents mais précis afin d'appréhender l'évolution des idées qui germent dans son esprit à l'instar du Prince Jean et du Capitaine Crochet. Sa méchanceté est motivée uniquement par le fait de privilégier ses filles avant tout, quitte à faire de sa belle-fille une esclave, et d'apprécier cette forme de pouvoir. Elle parvient, ce qui la rend encore plus horrible, à ne pas prendre part directement aux humiliations infligées à Cendrillon. Cendrillon s'était apprêtée pour le bal espérant que sa belle-mère tienne sa promesse de la laisser s'y rendre à condition d'être correctement vêtue mais sans l'ordonner clairement, la marâtre pousse ses filles à dépouiller leur belle-sœur et s'en réjouit. Elle est aussi la seule méchante de Disney à vivre au jour le jour avec sa victime. Maltin note qu'elle est toujours représentée dans l'ombre, ce qui renforce son regard de fouine. Eleanor Audley, qui a prêté sa voix à la belle-mère de Cendrillon, a aussi doublé Maléfique dans la version originale de La Belle au bois dormant 1959. Pour Allan, Lady Trémaine est le précurseur de Maléfique. Son interprétation a permis d'approfondir le personnage et de donner une force à la méchanceté de la belle-mère. L'animation des belles-sœurs de Cendrillon, Javotte et Anastasie, a été confiée à Ollie Johnston qui les considère comme les plus grossiers personnages qu'il ait créés jusqu'alors et assure qu'il a souvent exagéré leur laideur, assisté par Judge Whitaker. Pour Grant, elles sont l'incarnation des enfants gâtés, les pires, ceux qui restent aussi mauvais à l'âge adulte. Les deux filles ont été conçues pour déplaire avec une voix rauque et dure, un chant funeste, des visages aux courbes ingrates, une façon de danser terrifiante. Leur rôle est avant tout de montrer par contraste les qualités de Cendrillon. Malgré cela, le développement des personnages par l'équipe Disney en fait des filles seulement au caractère repoussant pouvant trouver leur propre prince charmant car elles ne sont pas trop physiquement laides. Elles servent le comique du film par une forme de bouffonnerie. Les deux sœurs sont peu différentiables, Javotte étant celle aux cheveux bruns, Anastasie étant rousse. Thomas et Johnston indiquent que dans la plupart des adaptations du conte, les personnages des belles-sœurs ont été difficilement créés en raison du manque d'éléments comiques à leur sujet dans l'histoire originale.
Autres humains
L'animation du prince a été confiée à Milt Kahl, ainsi que celle du grand-duc, du roi et de la marraine. Kahl utilisa la technique nommée rotoscopie, utilisant donc le film de préproduction avec acteurs. Grant considère ce personnage comme plus présent que son équivalent dans Blanche-Neige mais restant malgré cela aussi anonyme. Non seulement le nom du prince n'est jamais mentionné, mais il n'est jamais appelé non plus Prince charmant. Ajoutons que Mike Douglas, l'acteur américain lui ayant prêté sa voix, n'est pas crédité au générique. Le Roi et le Grand-Duc, tous deux interprétés en version originale par Luis Van Rooten, sont avant tout des personnages comiques. Les deux personnages s'opposent, l'un est irascible, l'autre ironique mais ils se rejoignent dans un comique de caractère. Le Grand-Duc adopte les traits du majordome Disney, élancé et dévoué, caractéristiques que l'on retrouve chez Grimsby, majordome du Prince Éric dans La Petite Sirène 1989. Dans la version originale du film, lorsque le Grand-Duc interpelle Cendrillon dans sa fuite, il crie d'abord Young lady ! puis Mademoiselle ! et enfin Señorita !. La version française supprima néanmoins le côté polyglotte pour ne retenir que Mademoiselle !. La Fée marraine est un personnage reprenant le principe même de son nom, une fée munie d'une baguette qui met ses pouvoirs surnaturels au profit exclusif de son ou sa filleule, auprès de qui elle joue un rôle de protecteur ou mentor. Le personnage dans la version Disney de Cendrillon est une image de la grand-mère préférée avec ses cheveux blancs, son visage joufflu avec des fossettes à laquelle a été ajouté un caractère étourdi, oubliant toujours sa baguette magique. La voix originale, qui accentue le côté grand-mère adorée, a été fournie par Verna Felton qui avait donné sa voix à une éléphante de Dumbo, la matriarche.
Les animaux
Le film comprend plusieurs personnages animaliers dont des souris. Ils servent principalement à mettre en valeur Cendrillon et montrer ses vrais sentiments. Les deux principales souris sont Jac et Gus. Les autres sont nommées d'après Grant et Kurtti : Suzy, Perla, Blossom, Luke le plus petit, Mert et Bert les jumeaux. Les souris ont été dessinées sous la supervision de Wolfgang Reitherman et Ward Kimball. Le duo Jac et Gus rejoint les nombreux duos de personnages masculins créés par le studio, tous deux interprétés par James MacDonald. Griffin s'interroge sur cette prolifération et y voit une possible apologie sous-jacente du mouvement homosexuel dans son ouvrage sur ce sujet chez Disney. Graphiquement les souris se rapprochent de celles créées dans Cousin de campagne 1936. Jac a été conçu comme un clown blanc tandis que Gus est l'auguste, les deux générant des gags16. Gus a été conçu de façon à être le personnage attendrissant, à l'instar de Simplet dans Blanche-Neige et les Sept Nains 1937. Son vrai nom est Octavius mais il est surnommé Gus pour plus de commodité. Gus est un peu potelé et pas très intelligent mais possède un bon fond et une énorme admiration pour Cendrillon. Jac est lui plutôt maigre et effilé, plus civilisé et moins faible d'esprit. Son phrasé a été conçu par Winston Hibler. La scène de l'escalier géant, pour des souris, a été animée principalement par Wolfgang Reitherman. Elle est pour Grant un chef-d'œuvre, car elle comprend un large spectre d'émotions peu courant même pour des acteurs réels passant par la panique, la difficulté, la frustration, la reprise de soi. À plusieurs moments du film, des séquences filmées en diagonale ont permis d'accentuer la différence entre les souris et les autres personnages.
Lucifer.
Le chat Lucifer a été créé par Ward Kimball d'après son propre animal de compagnie, un chat écaille de tortue nommé Feetsy, sur les recommandations de Walt Disney qui avait rencontré l'animal chez Kimball. Le principal défi de Kimball était de donner un caractère méchant au chat, une forme de corruption source de comédie. Kimball a conçu un gros chat qui saisit toutes les chances pour accommoder le monde qui l'entoure à sa sauce. Il possède des yeux aux très petites pupilles avec des iris colorés mais leurs formes peuvent changer pour accentuer l'expression par exemple de chasseur ou de surprise. Il est plutôt indolent et léthargique mais peut être rapide et fort quand ses antagonistes pointent leurs museaux. Beck crédite Kimball de l'intégralité de l'animation de la scène de poursuite entre Lucifer et les deux souris. La revue Newsweek décrit le chat comme l'un des points importants du film, un gros chat incomparablement fier de lui-même conçu comme extraordinaire vilain opposé aux souris de la maisonnée. Grant ajoute que le Lucifer prend un caractère régulier des méchants chez Disney, du moins pour les acolytes du méchant, un certain embonpoint. Toutefois pour Thomas Nelson, dans un article de 1978, Lucifer est à la fois un équivalent animal de la cruauté de la Belle-mère mais aussi, en raison de sa nature animale, un contrepoids qui permet d'adoucir l'impact de cette méchanceté avec un aspect de méchant de comics. Selon Nelson, la corruption du chat serait plus due à la vanité de sa maîtresse qu'à un caractère propre. Grant détaille deux autres animaux, le chien Pataud Bruno et le cheval Major. Ce sont eux aussi des animaux proches de Cendrillon. Bruno, interprété lui aussi par James MacDonald, est fainéant mais serviable pour Cendrillon et aide les souris dans leur lutte contre Lucifer. Lors de la scène de transformation de la citrouille en carrosse, Bruno devient le valet de pied, Gus et Jac les chevaux tandis que dans une forme d'ironie du sort, c'est Major qui devient le cocher. Les oiseaux ont eux nécessité de nombreuses heures d'études minutieuses afin de simplifier au maximum leurs traits tout en restant réalistes. Pour Beck, les animaux sont de vrais personnages de dessins animés, loin d'être naturels, et seraient monstrueux dans la réalité. Par son sens du rythme et son côté maniaque dans l'animation, Kimball parvient à donner plus de vie aux souris et au chat qu'aux êtres humains.
Différences et incohérences
Certains éléments de la version du conte de Charles Perrault ne furent pas repris dans le film : Cendrillon conseille sa belle-mère et ses belles-sœurs sur les tenues qu'elles devraient porter pour aller au bal, et s'offre même à coiffer ces deux dernières, dans le film elle y est obligée ; en plus de transformer une citrouille en carrosse, la marraine-fée de Cendrillon transforme un rat en cocher et six lézards en laquais, dans le film, ce sont respectivement un cheval et un chien. Le nombre de souris transformées en chevaux passe de six dans la version de Charles Perrault, à quatre dans le film ; après que Cendrillon a réussi à chausser la pantoufle de verre, elle chausse la seconde pantoufle de verre qu'elle avait gardée avec elle ; sa marraine-fée apparaît alors et lui restitue ses habits de bal. Après un moment de stupeur, les belles-sœurs se jettent aux pieds de Cendrillon et lui demandent pardon pour tout le mal qu'elles lui ont fait. Cendrillon leur pardonne et, quand elle épouse le prince, elle fait loger ses belles-sœurs et sa belle-mère au château puis marie ses belles-sœurs à deux grands seigneurs de la cour. David Koenig note quelques incohérences dans le film : après avoir été frappée par la souris Jac, la gamelle de lait de Lucifer disparaît au profit d'une simple flaque ; Anastasie récupère sa flûte en main après l'avoir déposée de l'autre côté de la pièce pour arracher l'invitation des mains de Cendrillon ; alors que Cendrillon sort la robe de sa mère du coffre et virevolte, on aperçoit que le dos de la robe est d'un seul tenant mais, quand les oiseaux la posent sur le mannequin, le dos est partiellement dénudé et le haut attaché par un cordon ; lors de la poursuite entre Jac et Lucifer, Jac enfile trois perles sur la queue de Gus mais après un bref changement de caméra sur le chat, Jac enfile seulement une seconde perle ; le chiffre 11 devient un XII lorsque l'horloge sonne le 8e coup de minuit.
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Posté le : 14/02/2015 14:02
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