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Accueil >> newbb >> .J'ai raté mon train [Les Forums - Défis et concours]

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.J'ai raté mon train
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Posté le : 17/08/2013 11:40

Edité par Loriane sur 06-09-2013 09:32:24
Edité par Loriane sur 06-09-2013 12:34:28
Edité par Bacchus sur 01-10-2013 23:15:43
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Re: Challenges du 12 août 2013
Plume d'Or
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Posté le : 17/08/2013 12:15
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Re: Challenges du 12 août 2013
Plume d'Or
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J’ai raté mon train
Je reviens de Gap où j’ai participé à un salon du livre. C’est la première fois que je suis invitée à une telle manifestation, et je ne suis pas peu fière. Tout s’est bien passé, j’ai même dédicacé mon livre, et à plusieurs personnes en plus ! L’hôtel était sympa, avec vue imprenable sur les montagnes. Petit déjeuner et repas du soir avec les autres écrivains sur la terrasse plein sud. Je dis avec les autres écrivains, vous remarquez que je m’inclus dans le groupe, quelle prétention !
J’ai rencontré des gens vraiment intéressants, très différents les uns des autres. Il y avait les conteurs d’heroic fantasy, un peu barrés ; les inventeurs de polars, très sérieux ; ceux qui écrivent des romans à l’eau de rose, ils sont souvent aussi colorés que leurs livres ; enfin les romanciers, là il y a un peu toutes les personnalités : les introvertis, les extravertis, les obsédés… Toute une collection de personnages dont je pourrai peut-être m’inspirer plus tard.
Je suis dans le train, il est sale, des bouteilles d’eau vides, des canettes, et des papiers gras jonchent le sol. Beaucoup de gens rentrent de vacances, il y a des familles avec plein d’enfants qui s’interpellent à tout bout de champ. Des sandwiches et des paquets de biscuits passent au-dessus de ma tête. Ca va être compliqué pour lire, heureusement je change de train à Valence. Deux heures et demie pour aller jusqu’à Valence, puis encore deux heures et demie pour arriver jusqu’à Paris. Après, on verra, il y aura encore deux heures pour arriver jusqu’au Havre, je ne suis pas prête d’arriver chez moi !
Après une heure et demie d’un voyage bruyant, le train s’arrête en rase campagne. Le contrôleur annonce des problèmes techniques, le temps d’attente est indéterminé. J’espère que je n’aurai pas de problème pour attraper ma correspondance, neuf heures de voyage, c’est déjà beaucoup, je n’ai pas envie d’en rajouter.
Mes voisines assises sur les banquettes arrière ne semblent pas émues, elles continuent leur conversation :
« Envoie ton mari chez le docteur, j’ai pris rendez-vous pour le mien ».
« Tu as raison Anne, il faut les coacher, ils ne savent pas s’occuper d’eux-mêmes. ».
« J’ai inscris le mien à un cours de squash, pour qu’il rencontre d’autres personnes, ça lui change les idées ».
« Pierre prend des cours de gym à domicile, je lui ai trouvé un prof qui vient à la maison ».
« Bonne idée Charlotte ! Il le fait sortir aussi pour faire du jogging ? »
« Oui et la nourriture est importante aussi, je soigne surtout son petit déjeuner, j’achète des céréales spéciales régime. Il a besoin de croquer pour avoir de belles dents, je surveille ses cheveux aussi, si ils sont brillants, ça veut dire qu’il est en bonne santé ».

J’essaie de ne pas écouter ce que disent mes voisines, mais elles parlent tellement fort que c’est difficile de faire autrement. Voilà des femmes attentives à la bonne santé de leurs époux, j’imagine qu’ils ont dû être soulagés de les voir partir en vacances, ils sont sûrement en train de nettoyer les restes des méga teufs qu’ils ont faites pendant l’absence des ces deux gourdes. Pourvu que le train redémarre, je commence à m’inquiéter. Trente minutes passent, à écouter Anne et Charlotte parler de leurs compagnons et de leurs petits, c’est insupportable !
Le train repart, j’espère que je vais pouvoir prendre mon train pour Paris.

Nous arrivons à Valence. Je descends sur le quai. Anne s’est mise en tête de faire la bagagiste, et de porter les valises de tout le monde. Elle attrape mon sac, et le pose sur le quai, je la remercie si elle veut m’éviter cette corvée, pourquoi pas. Je cherche à quel endroit je dois aller pour prendre le train suivant.
La plupart des voyageurs se dirigent vers la sortie. Il y a un souterrain qui va m’emmener sur la voie prévue pour la direction Paris. Le chemin est sordide, ça sent l’urine, il y a des tags obscènes sur les murs, je ne suis pas très rassurée. Au bout du tunnel, la gare a l’air un peu vieillotte. Je suis la flèche qui me dit de marcher vers la gauche, j’arrive sur le quai. Sur un mur, les horaires des trains sont écrits sur un tableau noir avec des lettres magnétiques. Décidément, pas de tableau lumineux, ils ont vraiment besoin de la rénover cette gare ! Mon train est annoncé à 11 heures 12, et il est … 11h25. Zut ! Je l’ai raté d’un cheveu ! Je me précipite à l’intérieur du bâtiment. Un homme en uniforme avec un képi sort d’un bureau, je l’interpelle :
« Savez-vous à quelle heure est le prochain TGV pour Paris s’il vous plaît ? »
Il me dévisage, et me regarde de haut en bas. Ma valise à roulettes bleu canard l’intrigue particulièrement. Il n’a pas l’air de comprendre ce que je raconte.
« Vous voulez aller à Paris c’est bien ça ? »
«Oui c’est ça. » Pas trop futé le type…
« Le prochain train part à 14 heures 18 mademoiselle ».
« Merci, savez-vous où je peux boire un café ? »
Il a l’air toujours aussi surpris par mon attitude :
« Vous sortez et le buffet de la gare est sur votre droite ».
« Merci beaucoup Monsieur. »
Je sors mon portable,
« Excusez-moi encore, il n’y a pas de réseau ici ? »
« Je vous demande pardon ? »
« Mon portable ne passe pas, je voulais prévenir chez moi que j’arriverai en retard. »
J’ai un peu l’impression d’être une extra-terrestre, le gars est médusé :
« Pardon mais je ne comprends pas. »
Il est un peu simple décidément, ils n’ont jamais vu de nanas dans ce patelin, pourtant Valence est une grande ville. Je suis tombée sur le neuneu du coin.
« Je voulais téléphoner à ma famille. »
« Il y a des cabines là-bas si vous voulez. »
Des cabines…Bien sûr… Il faut vraiment qu’ils pensent à la rénovation. Je m’approche des cabines en question, on se croirait dans un film des années 50. De gros téléphones noirs sont accrochés au mur, ils sont séparés par des panneaux en bois. Je n’en ai pas vu des comme ça depuis mon enfance. Je sors ma carte bleue, zut ce sont des cabines à pièces ! La fente où on doit mettre la pièce est surmontée d’une étiquette où il est inscrit : 1 franc. Bon, laisse tomber, elles sont inutilisables.
Je sors du bâtiment, et là, surprise, je me retrouve dans un décor de film, il y a des DS, des R8 et des Dauphines partout ! Qu’est-ce qui se passe ? Ils tournent un film ? Elles sont superbes, elles brillent, les restaurations sont parfaites. Je reste quelques temps à les regarder, j’adore les voitures.
Je rentre dans le buffet de la gare. Ambiance années 60 là encore, des tables en bois, métal et formica. De superbes chaises de bistrot. Même les gens sont habillés comme dans Mad Men, c’est vraiment drôle, ce sont sûrement les figurants du film. Je dénote avec ma jupe courte et mes plateforme shoes, d’ailleurs tout le monde se retourne sur mon passage, en plus je fais un bruit d’enfer avec ma valise à roulettes sur le carrelage.
Je commande un café à un serveur habillé en pantalon et gilet noir, chemise blanche, torchon sur l’épaule.
« Je vous sers quoi ma petite dame ? »
Il a un petit air amusé, et je vois ses collègues qui l’observent du coin de l’œil.
« Un café s’il vous plaît. On tourne un film ici ? »
« Un film ? Non pourquoi ? »
« Je ne sais pas, vous êtes tous habillés comme dans les années 60, il y a des Dauphines garées dehors. »
Il se retient de rire,
« C’est sûr, c’est sûr, je vous apporte votre café ».
Il a une drôle de réaction, il me parle comme à une demeurée.
Le journal traîne sur la table d’à côté, je regarde la date : 13 Août 1963. C’est marrant c’est le jour de ma naissance ! Ils ont vraiment le souci du détail ! Je me demande si ça n’est pas la caméra cachée, je me sens observée.
Lentement mais sûrement, les enquêteurs poursuivent leur enquête sur le train Glasgow-Londres…
Incidents assez graves à Brazzaville dans la capitale de l’ex Congo Français…
Conseil des ministres, Monsieur Peyrefitte, ministre de l’information a répondu à nos questions : « en raison d’un hiver rigoureux, nous avons dû reconstituer des réserves de charbon plus importantes, pour faire face à la consommation de la saison prochaine… »
C’est rigolo de savoir ce qui s’est passé le jour où je suis née. Il me reste deux heures à tuer avant mon départ. Je commande un jambon beurre, le pain est excellent, tout a un goût authentique. C’est même trop beau pour être vrai, dans un film on n’irait pas jusqu’à servir un sandwich à la saveur des années 60. Je vais sortir, le lieu du film doit être limité.
Dehors, il fait beau, là encore les gens sont habillés à la mode Kennedy. Je ne passe pas inaperçue. Quelques rues plus loin, le décor est toujours le même, pas de caméras en vue, et surprise : dans les librairies les journaux et magazines sont tous datés d’Août 1963. Je prends peur, et si j’avais fait un bond dans le passé ? Ca semble fou, mais c’est aussi un peu flippant.

Je retourne précipitamment à la gare. Je croise le contrôleur en uniforme, il me regarde toujours aussi bizarrement. Je reprends le souterrain en sens inverse. L’odeur d’urine et les tags sont presque rassurants. Au bout du tunnel, du rap qui s’échappe des écouteurs d’un jeune à casquette m’accueille. J’ai envie de l’embrasser. Mon portable se met à sonner et à vibrer. Une voix annonce « Le TGV en provenance de Marseille et à destination du Havre va entrer en gare, deux minutes d’arrêt ».
Je m’engouffre dans le train, tout a l’air à nouveau normal, les gens sont habillés à la même mode que moi. Personne ne me regarde bizarrement. Je lis mes messages, mon portable fonctionne normalement. Que s’est-il passé ? Est-ce que j’ai rêvé ? Je suis fatiguée après ce salon du livre, j’ai rencontré des gens avec beaucoup d’imagination, ça a dû m’influencer.
Je me détends sur mon siège. Mon voisin d’en face me regarde curieusement (encore !),
« Excusez-moi Madame, je suis historien, puis-je jeter un coup d’œil à votre journal ? »
De mon sac, dépasse le journal de ma naissance que j’ai emporté par inadvertance.




Posté le : 17/08/2013 12:18
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Re: Challenges du 12 août 2013
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J'ai raté mon train

Le réveil sonna, ce lundi matin-là, à 06h30, comme chaque jour.
J'ouvris un oeil lourd et douloureux qui ne supporta pas le mince rayon de jour filtrant entre les tentures de la fenêtre. Je me dépêchais de le refermer.
Bon dieu, qu'est-ce qui m'avait pris de sortir hier soir et d'avoir accepté de prendre un verre avec la joyeuse équipe de vieux copains de pension ! Je les avais rencontrés alors que j'étais sur le point de rentrer chez moi, ayant pris la sage décision de me coucher tôt afin d'être en pleine forme pour attaquer la semaine, le lendemain matin.
Un verre. Tu parles...Chacun avait mis un point d'honneur à être celui qui paierait le dernier verre, et on était tous remplis d'honneur, hier au soir. Je crois bien que ce fut ' Furdo' qui a remporté le championnat d'honneur en confectionnant lui-même, après être passé derrière le bar, son dangereux et redoutable 'lancaster' dont nous espèrions tous qu'il en avait oublié la recette. D'après lui, il l'avait améliorée.
Voilà pourquoi, ce lundi matin, je décidais de refermer mon oeil héroïque en me disant que je ne me lèverai qu'à la troisième sonnerie de mon réveil.Il me vint à l'esprit que, compte tenu du fait que je ne l'avais jamais entendu de ma vie, cette troisième sonnerie, ce serait marrant que ce soit un cocorico.
A la troisième sonnerie, j'eus le réflexe de sortir une jambe du lit, puis ce fut de nouveau le néant......
Ce doit être mon ange gardien qui m'a éveillé brusquement, en sursaut, une seconde après.C'est du moins le temps qu'il m'avait semblé avoir passé entre les deux opérations. Je jetais un coup d'oeil angoissé à mon réveil : 06h55 ! Ventrebleu, m'écriais-je , innovant en la circonstance. Et je sautais du lit, affolé et fébrile .
Voyons...Je prenais chaque jour le train Le Havre -Rouen à la gare d'Yvetot où il s'arrêtait et repartait à 07h22 très prècises pour arriver en gare de Rouen à 07h58, après quoi, j'avais tout mon temps pour me rendre à mon bureau à pied, en flânant.
Tout en calculant le temps dont je disposais, je me hâtais pour m'habiller, faisant fi de tous les petits rites habituels que j'avais coutume d'observer chaque jour.
Un coup de peigne, un passage de gant de toilette sur le museau, j'attrapais ma sacoche et sortis en courant en claquant la porte derrière moi.
En parcourant les quelques centaines de mètres me séparant de la gare, je me reprochais de ne pas m'être encore décidé à passer ce fameux permis de conduire qui, j'en étais bien conscient en cet instant, me simplifierait beaucoup mes lendemains de 'Lancaster'.
Quand je parvins devant la gare, son horloge affichait 07h22:Je vis la grande aiguille se déplacer pour l'indiquer.
A l'instant même où je déboulais sur le quai, j' aperçus l'arrière du dernier wagon de mon train qui s'éloignait.
Atterré, je m'affalais sur un banc, en bord de quai pour reprendre mon souffle et m'apitoyer sur mon sort, j'en avais maintenant tout le temps.
Les émotions doivent avoir sur moi un effet soporifique je m'endormis aussitôt....

Quelque chose m'éveilla brusquement.Je ne saurais dire; une sensation bizarre, une vibration particulière de l'air, un je-ne-sais-quoi d'indéfinissable qui me secoua comme une main sur mon épaule.
J'ouvris brusquement les yeux. Un train achevait de marquer l'arrêt, devant moi. en fait, en dehors des horaires de mon train d'aller et celui du retour, j'ignorais totalement quels pouvaient être les horaires des autres trains.
Celui-ci m'intriguait et réveillait en moi des souvenirs plutôt plaisants. C'était un bon vieux train des années soixante, un de ceux qui avaient des wagons à compartiments desservis par un couloir latéral.
Le train, maintenant à l'arrêt, laissait chuinter quelques panaches de vapeur aux jonctions des tuyauteries reliant les wagons .
Mes yeux se portèrent sur le panneau accroché sur le flanc du wagon, face à moi : " Le Havre- Yvetot- Rouen- Machinville " . Le premier souci de mon cerveau fut de chercher à localiser Machinville. Machinville...Un terminal de trajet, en plus...Puis je réalisais que ce train s'arrêtait à Rouen, et la chose me parut suffisamment importante pour que j'en oublie toute l'étrangeté de la situation. Je ne me fis même pas la remarque que personne ne semblait s'intéresser à ce train, pas même le chef de gare qui lui tournait le dos en scrutant le ciel.
Pour moi, l'occasion était miraculeuse. Alors même que le train, sans sommation ni information de départ, commençait à démarrer, très lentement dans un bruit lointain d'échappement de vapeur, je me levais d'un bond et sautais sur le marchepied qui se présentait en face de moi. En soufflant de soulagement, je claquais la portière derrière moi et me retrouvais dans le couloir vide du wagon. Par réflexe, je donnais un coup d'oeil à ma montre. Elle était arrêtée à 07h22, exactement. L'heure de mon départ habituel. Je fis quelques pas dans le couloir.
Aussitôt, une vague d'odeurs,et de souvenirs m'assaillirent . Ces bons vieux trains de naguère... à l'époque où nous passions parfois dix à douze heures debouts, serrés comme des sardines, quand l'air sentait les départs ou les retours de vacances, le saucisson et les remugles de toilettes, toujours squattées par les plus débrouillards !
J'entrai dans le premier compartiment qui se présentait à moi, et là, je restais un moment interloqué. J'étais en présence d'une très grosse femme, au visage rouge couvert de transpiration, vêtue d'une tenue de squaw, coiffure à plumes incluse, d'un vieux monsieur très sec qui semblait sur le point de se casser en morceaux à tout moment, vêtu, en toute simplicité d'un pagne en peau de léopard et d'une énorme massue dont il tenait le manche, le reste reposant sur le plancher, d'une bonne soeur habillée en bonne soeur, avec col blanc et grande coiffe à cornettes, et une petite fille de 8-10 ans, adorable petite blondinette vêtue d'une belle robe longue de mariée.
j'ai vite compris ! Quelle merveilleuse idée que cet happening, dans un train !
Avec un grand sourire, je pris une des places disponibles en m'écriant :
-" Salut les rigolos ! "Merci de me changer un peu mes idées qui étaient un peu moroses, ce matin ! "
Le regard qu'ils me lancèrent tous était chargé de mauvaise humeur et d'incompréhension. Je devais sûrement surgir durant un de leurs moments de pose. Je comprenais : on ne peux pas être disponible en permanence, même pour la rigolade.
Devant le peu d'enthousiasme qu'avait soulevé mon entrée, je préférais rejoindre le couloir , où je me mis devant une vitre afin de regarder le paysage.
La petite mariée sortit du compartiment et, mine de rien, se plaça près de moi, en jouant av...Je faillis m'étrangler de stupéfaction ! Elle tenait une tête de poulet par le cou, qui était coupé à une dizaine de centimètres de la tête, et faisait ouvrir et fermer le bec du poulet et tirant sur un nerf blanchâtre que pendait, comme une tirette. Et elle commença une petite discussion avec le poulet ! Décidément, en matière d'Happening, j'avais beaucoup à apprendre.
Je fis celui qui trouvait cela très naturel :
- " Il s'appelle comment, ton copain ? Il y a longtemps que tu l'as ? "
La petite me regarda avec beaucoup de mépris.
- " Elle est bête, ta question. Je prends le train tous les jours !"
-" Et alors ? " lui dis-je, sans comprendre.
- " Alors , des têtes de wizzes, je peux en changer tous les jours ! "
- " Mais bien sûr, que je suis bête..."
-" C'est sûr, que t'es bête. Tu dis des drôles de trucs "
Bon, laissons tomber, c'est pas ma fille. Et je tournais la tête pour regarder le paysage.
Le paysage ! Mais où je suis, là, bon dieu ! J'avais l'impression que nous étions en train de traverser l'Amazonie, pour autant que je puisse m'imaginer ce à quoi elle peut ressembler ! Bon sang de bois ! cela faisait des années que je faisais ce trajet chaque jour, et j'étais suis bien certain de ne jamais être passé par un tel paysage !
Aussitôt, mon cerveau se mit à chercher des explications rationnelles et en déduisit que ce train, que je n'avais jamais pris auparavent, avait un itinéraire passant par une des forêts Normandes. Par un processus sécuritaire, mon cerveau omettait de me signaler que des forêts de ce type, dans cette région, étaient peu probables. D'autant moins qu'il me semblait bien avoir aperçu un envol de proquets multicolores sur la canopé. Je me passais la main sur le front, en fermant les yeux . Hou ..ces Lancasters à effets prolongés..
Lorsque j'ouvris de nouveau les yeux, ma première pensée fut :
- " Alors c'est ça, le delirium tremens ! "
Sous mes yeux, dans un grand pré d'herbe bleue, des vaches... à trompe d'éléphant broutaient paisiblement . Leurs petites ailes atrophiées vrombrissaient autour d'elles, en chassant des oiseaux multicolores qui tentaient de se poser sur leur dos.
Cette fois-ci, je me mis à bafouiller en tremblant:
-" Mais...mais..mais...""
-" Pourquoi tu fais la chèvre, monsieur ? "
- " Mais...de l'herbe bleue !"
-" Ben oui, c'est la vilabre ! on est en début crazembre, non?" J'étais prêt à tout admettre.
- " Oui, d'accord, mais les vaches à trompe ??" La petite fonça vers notre compartiment en criant :
- " Maman ! maman ! y'a le monsieur qui me demande pourquoi les meurblicks elles ont une trompe et il ne sait pas qu'en crazembre, à la vilabre, l'herbe rouge, elle devient bleue ! "
Je titubais devant cette situation que je ne maitrisais pas .
La cornette de la bonne soeur apparut à la porte du compartiment :
- " Allons, ma chérie, calme-toi. Le monsieur est en train de plaisanter. Excusez-là, monsieur, elle est encore jeune et n'est pas capable de comprendre l'humour, même au premier degré.
Bon dieu de bon dieu ! A quel degré ils pratiquaient le leur, d'humour !
La petite fille revint vers moi, en prenant un peu de distance et en me regardant avec suspicion. Je pris l'air du monsieur qui plaisante, bien sûr, pour lui dire
- " Bon, alors, mademoiselle je sais tout, qu'est-ce qu'elles font là ces....bestioles ? hein? hein ? "
La gamine fonça de nouveau vers le compartiment :
- " Maman ! maman ! le monsieur, il sait pas que les meurbicks, elles font du wapp !" La tête de la bonne soeur réapparut.
- " Allons, Belzebutha, laisse le monsieur tranquille. "
La fillette revint vers moi, mais avec une zone de sécurité plus marquée. Je me sentais complètement sonné.
- " Tu ne comprends vraiment pas les blagues, toi ! bien sûr que je sais ce que les..elles font ! mais toi, je suis sûr que tu ne sais pas pourquoi ."
Tant de bêtise de la part d'un adulte semblait incroyable à l'adorable Belzebutha.
- " Monsieur, tout le monde sait parfaitement que les meurbicks, quand vient la vilabre, en crazembre, mangent l'herbe devenue bleue pour faire du wapp, aussi jaune quela neige, qui servira à fabriquer du poltrich pour toute l'année. Vous me prenez pour un bébé ? "
Le temps d'avaler de travers et la petite était retournée, courroucée, dans le compartiment. Le paysage me mettant mal à l'aise, je décidais d'aller m'asseoir un peu.
Je marquai un brusque arrêt, à la porte du compartiment . Qu'est-ce que c'était que cette nouvelle trouvaille ! Tous mes compagnons de voyage étaient fort occupés à plumer des poulets ! j'en bafouillais de nouveau :
- " Mais..mais..qu'est-ce que vous êtes en train de faire ,
La grosse indienne me toisa avec mépris et me dit d'un ton sec et agressif :
- " Comme PRESQUE tout le monde ! on paye notre place ." Et, en grommelant à voix basse, pleine de sous-entendu que je n'entendais pas, justement !
-" On n'est pas comme certains qui peuvent payer en dents de canards, nous ."
Assommé par tout ce qui se déroulait depuis que j'étais monté dans ce train, je me suis assis et je les ai regardé plumer leurs poulets. C'est alors qu'apparut un drôle de personnage, en slip de bain, portant masque, tuba et palmes et poussant un chariot à demi empli de poulets plus ou moins bien plumés.
- " Contrôle ! Vous avez vos wizzes ? " Puis, s'avisant de ma présence :
- " Ah bonjour, monsieur Ballus ! j'ai déjà débité vos dents de canard. Vous n'aurez pas à pédaler, comme les deux, sans wizzes, que j'ai attrapés tout à l'heure " me dit-il en riant.
L'indienne me jeta un regard assassin et l'homme de cromagnon gloussa en traînant sa massue sur dix centimètres.
Je me levais de nouveau et fonçais dans le couloir. Tient ! le paysage avait changé. Je voyais maintenant défiler des petits hameaux de maisons gauloises, avec de la fumée s'échappant par un trou, au haut du toit d'éteule. Bof...pourquoi pas.je me laissais maintenant dériver vers une sereine indifférence. Par moment, pour le principe, je me plaisais à me répéter que je ne boirai plus jamais de lancaster, mais sans conviction, à défaut de plus explicite.
Plongé dans ma perplexité, mon oeil n'en fut pas moins attiré par une particularité dans le paysage. Je monopolisais mon attention sur tout ce qui défilait sous mes yeux.
Je ne me trompais pas il me semblait bien reconnaître un endroit que je voyais chaque jour. Mais oui ! ce clocher d'église, là-bas, la nationale qui longe la voie de chemin de fer ! des voitures de mon époque !

Et, petit à petit, le train fit son entrée dans la banlieue Rouennaise, dans Rouen même . Rien ne différait de l'ordinaire .
Quand le train entra en gare et s'arrêta, sans un bruit ni grincement ni secousse, je ne cherchais pas à comprendre ce qui venait de m'arriver et sautais précipitamment sur le quai. Plusieurs voyageurs étaient là, mais nul ne fit cas de ce train qui venait d'entrer en gare , nul ne monta dedans .
Sans bruit, le train, qui ne semblait n'avoir attendu que le moment où j'en descendrais, démarra en douceur..
Sidéré, comme hypnotisé, je l'ai regardé s'éloigner. J'aperçus la petite mariée qui me saluait avec sa main, puis tout s'effaça.

Je marchais comme un somnambule sur le quai, en direction de la sortie, et tombait nez à nez avec le chef de gare. On se connaissait depuis longtemps.

-" Ah, bonjour, monsieur Ballus ! Toujours ponctuel ! toujours fidèle aux habitudes ! " Il me souria amicalement et s'éloigna.
Mes yeux accrochèrent la grosse pendule dominant la sortie :
La grosse aiguille fit un bond et marqua l'heure .Il était 07h 58, très exactement. Incrédule, je jetais un coup d'oeil à ma montre. C'était bien la première fois qu'elle ne retardait pas .

















Posté le : 17/08/2013 12:39
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Re: Défi théme d'écriture: "J' ai râté le train ".du 12 août 2013
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Information à l'attention des curieuses, au sujet de la composition des boissons hyper-fortes, la composition du 'Lancaster' :


Tout d'abord, le nom. Hormis celui de la ville même, le Lancaster est le nom d'un bombardier Britannique, celui-là même qui a rasé le port du Havre et ses alentours, généreusement..
J'ai eu l'occasion de travailler sur Lancaster dès mon arrivée à la 55 S à Agadir, fin 60 . En février 61, la base a été dissoute et la 55 S a été scindée en deux. Les Lancaster ont été envoyés à Karouba, près de Bizerte, en Tunisie, et les Beechcraft, à Aspretto-Ajaccio, en Corse.
La nostalgie des lancaster pour les marins ayant travaillé sur ces appareils a fait qu'un soir, au bar du foyer, nous avons célébré son souvenir en inventant un cocktail portant son nom: le " Lancaster " !
Sa composition dépendait des alcool dont nous disposions à volonté, la voici : ( chaque ingrédient à dose égale, pas de fioriture sophistiquée ) Vodka 1/3, Wisky 1:3, Cognac 1/3, Rhum 1/3, Téquila (selon livraison) 1/3, Marsala ( pour sa délicatesse ) 1/3 largement, Pastis 1/3. Malgré l'insistance du quartier-maître Rémy, nous avons refusé d'y inclure la bière qui aurait pû fausser le goût de ce mélange. Rémy, Breton et têtu, se versait sa propre bière dans sa ration.
Mais pour vos palais délicats et plus exigeants, mesdames, je vous conseillerais plutôt un petit 'lait de tigre' tel que nous le confectionnions quand des dames nous honoraient de leur présence à l'occasion des pots exceptionnels que nous organisions chaque semaine. Ce nectar, quoi que violemment alcoolisé, possède un petit je-ne-sais-quoi qui faisait que nos invitées en raffolaient.

Pour les besoins de ma petite histoire, j'ai attribué à Furdo, qui a vraiment existé ( Furdo pour 'faux dur' ), la paternité du Lancaster. Usurpateur !

Posté le : 17/08/2013 13:58
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Re: Challenges du 12 août 2013
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Alors la ! je veux prendre ce train! Quelle imagination, je me suis bien amusée. J'aimerais essayer aussi le Lancaster, les expériences qu'il procure sont vraiment spéciales.

Posté le : 17/08/2013 15:32
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Re: Défi théme d'écriture: "J' ai râté le train ".du 12 août 2013
Plume d'Argent
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Voici mon texte.

J'ai raté le dernier train

Je suis avachie sur ma table, regardant le professeur faire des vas et viens dans la salle, expliquant, je ne sais trop quoi. J'ai perdu le fil bien une heure après le commencement du TD. Sans oublier que sur le mur en face de moi, une horloge a été suspendue juste en face de mes yeux. Je vois tourner les aiguilles au ralenti.

Il est bientôt dix-neuf heures. Je commence à ranger mes affaires distraitement pour ne pas avoir de réflexions de l'homme chauve qui se prend pour un enseignant.

Dix-neuf heures, certains étudiants se lèvent, mais ils se rassoient aussi vite, s'apercevant du regard noir du petit homme.

Dix-neuf heures cinq, il nous sort des feuilles qu'il nous distribue en nous expliquant ce que l'on doit faire. Ses pas sont lents. J'ai même l'impression qu'il marche au ralenti.

Dix-neuf heures dix, il nous lâche enfin.

J'ai dix minutes pour monter à la gare. Sans attendre davantage, j'attrape mon sac et sors précipitamment de la salle. Je descends les escaliers en courant en évitant tant bien que mal de me fendre le crâne. Dans le hall, je salue rapidement le vigile et sors dans rue. Il fait déjà nuit. Des ombres apparaissent ici et là dans les recoins des rues. Des clochards traînent sur les trottoirs tendant la main. Je ne leur jette même pas un coup d'œil. Tout ce que je veux, c'est arriver à la gare pour ne pas rater mon train.

J'arrive enfin en bas des marches de la gare. En voyant les centaines de marches, je prends une bonne inspiration et j'essaie de les monter deux par deux. Mais pas facile quand on a de petites jambes. Au milieu, je m'arrête un instant pour reprendre mon souffle, puis je repars de plus belle. Mon rythme ralentit, mes jambes commencent à me faire mal et mes poumons fonctionnent presque plus.

Enfin, je dépasse la dernière marche. Malgré le fait que je crache mes poumons, je ne peux pas m'arrêter, mon train part dans moins de trois minutes. Avec ma chance, il partira en avance. Je regarde le panneau d'affichage. Une grimace de dégoût apparaît sur mon visage quand je m'aperçois, que mon train est sur la dernière voie de la gare.

Je cours comme une dératée dans l'immense gare en évitant les nombreux passagers sur les quais. J'aperçois mon train, mais je ne ralentis pas. Je dépasse un contrôle, il m'arrête subitement, me demandant mon ticket. Par chance, j'avais sorti mon abonnement. Je le lui tends puis me laisse passer. J'attends le sifflement de départ. Je me place devant une porte afin de monter, mais cette dernière se referme devant mon nez. Sans que je puisse rien faire, le train commence son voyage.

Je laisse tomber mon sac à terre. La moitié de mes affaires s'éparpille sur le sol. Mon train est parti sans moi. Et c'était le dernier de la journée. Le seul point positif dans cette histoire, c'est que je peux afin reprendre mon souffle.

Posté le : 17/08/2013 15:56
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Re: Défi théme d'écriture: "J' ai râté le train ".du 12 août 2013
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Merci les amis.
J'y vais de mon petit commentaire.

Pour Arielle, j'ai adoré ce "retour vers le passé", surtout celui du jour de ta naissance. Je peux faire de même ?

Pour Bacchus, une imagination fertile, des mots à la Harry Potter. Je te reconnais bien là. C'est chouette d'être le seul mâle parmi toutes ces filles ?

Pour Alisée, je suis toute essouflée d'avoir lu ta nouvelle. Comme on dit : "Elle tient en haleine" jusqu'à la perdre. Merci de t'être prise au jeu.

Peut-être aurons-nous d'autres amateurs la semaine prochaine ....

Posté le : 17/08/2013 17:09
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Re: Défi théme d'écriture: "J' ai râté le train ".du 12 août 2013
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Ben ? et ton tien ? J'ai toujours crû que c'était celui qui dit qui y est !

Posté le : 18/08/2013 18:51
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Re: Défi théme d'écriture: "J' ai râté le train ".du 12 août 2013
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Je veux bien participé!

Si cela tient toujours... Etant nouvelle, je ne connais pas encore tous les rouages de ce site...
J'espère pouvoir y donner le meilleur de moi même.

Posté le : 18/08/2013 19:19
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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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