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Georges Braque
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Le 31 août 1963, à 81 ans, à paris meurt Georges Braque,

né à Argenteuil Seine-et-Oise, actuellement Val-d'Oise il naît le 13 mai 1882, peintre, sculpteur et graveur français.il pratique le dessin, la céramique, l'eau-forte, et l'écriture, il reçoit une Formation au Cours du soir de l'École supérieure d'art du Havre, il appartient au mouvement artistique Fauvisme, cubisme, ses Œuvres les plus réputées sont , Maisons à l'Estaque, Le Grand Nu, Route près de l'Estaque, il combattant de la Grande Guerre ou il reçoit la Croix de Guerre, il aura des Obsèques nationales. Il obtient le prix de la Fondation Carnegie en 1937, le Grand prix de la Biennale de Venise en 1948. Il est fait Commandeur de la Légion d'honneur en 1951, le Prix Antonio Feltrinelli de l'Accademia di San Luca, Rome en 1959.

En bref

D'abord engagé dans le sillage des fauves, influencé par Henri Matisse, André Derain et Othon Friesz, il aboutit, à l'été 1906 aux paysages de l'Estaque avec des maisons en forme de cubes que Matisse qualifie de cubistes, particulièrement typées dans le tableau Maisons à l'Estaque. Cette simplification est censée être à l'origine du cubisme qui reste controversée selon Olivier Cena.
"Quand je commence, il me semble que mon tableau est de l'autre côté, seulement couvert de poussière blanche, la toile. Il me suffit d'épousseter. J'ai une petite brosse à dégager le bleu, une autre, le vert ou le jaune : mes pinceaux. Lorsque tout est nettoyé, le tableau est fini.
Ce propos du peintre recueilli par Jean Paulhan suffirait à définir la peinture de Braque comme une matériologie, faite d'une stratification de couches qui préexistent à l'œuvre et que l'artiste révèle."
La peinture de Braque est en effet une peinture lentement élaborée, dans laquelle la matière travaillée, mêlée, acquiert cet aspect profond et dense qui fait qu'il y a Peinture. Braque opposait la peinture tactile, celle qui est proche du spectateur, qui agit vers lui, à la peinture visuelle qui s'éloigne vers un infini illusionniste. Sans doute à cause de cette relation à la matière, à cause aussi de la nature placide, paysanne et consciencieuse de l'homme, de ses propos moralistes, du caractère méditatif de sa peinture et de son souci des thèmes simples, la critique n'a-t-elle pas toujours su discerner le rôle primordial de Braque dans la révolution cubiste ni l'originalité et la force de son œuvre de maturité !
La femme qui m'a le plus aimé, aurait dit Picasso en parlant de Braque. Cette formule galvaudée depuis ne doit pas être comprise comme une boutade un peu dérisoire. Elle est au contraire l'image qui restitue le plus exactement ce qui fut une aventure exemplaire, une expérience commune, celle du cubisme, initiée par deux artistes, coauteurs de la plus importante révolution plastique du XXe siècle, de laquelle aussi sont issues toutes les autres. De formation et de tempérament opposés, Braque et Picasso ont mené un dialogue sans égal dans l'histoire de l'art. C'est par ces deux expériences dialectiquement conjuguées de 1908 à 1914 que passe la connaissance de leur œuvre respectif.
C'est en étudiant méthodiquement dès 1906 les lignes de contour de Paul Cézanne, que Braque a abouti progressivement à des compositions qui utilisent de légères interruptions dans les lignes, comme dans Nature morte aux pichets. Puis avec une série de nus comme le Nu debout, et Le Grand Nu, il s'oriente, après 1908 vers une rupture avec la vision classique, à l'éclatement des volumes, une période communément appelée cubiste qui dure de 1911 jusqu'en 1914. Il utilise alors des formes géométriques principalement pour des natures mortes, introduit les lettres au pochoir dans ses tableaux, invente des papiers collés. En véritable penseur du cubisme, il élabore des lois de la perspective et de la couleur. Il invente aussi les sculptures en papier en 1912, toutes disparues, dont il ne subsiste qu'une photographie d'un contre-relief de 1914.
Mobilisé pour la Grande Guerre où il est grièvement blessé, le peintre abandonne les formes géométriques pour des natures mortes où les objets sont dans des plans recomposés. Pendant la période suivante qui va jusqu'aux années 1930, il produit des paysages, des figures humaines, et malgré la diversité des sujets, son œuvre est d'une remarquable cohérence. Braque à la fois précurseur et dépositaire de la tradition classique est le peintre français par excellence. Le Cahier de Georges Braque, 1917-1947 publié en 1948 résume sa position.
La Seconde Guerre mondiale lui a inspiré ses œuvres les plus graves : Le Chaudron et La Table de cuisine. La paix revenue et la fin de sa maladie lui ont inspiré les œuvres plus approfondies tels les Ateliers qu'il élabore souvent pendant plusieurs années, poursuivant six ébauches à la fois ainsi qu'en témoigne Jean Paulhan. Ses tableaux les plus connus sont aussi les plus poétiques : la série des oiseaux dont deux exemplaires ornent le plafond de la salle Henri II du musée du Louvre depuis 1953. Il a aussi créé des sculptures, des vitraux, des dessins de bijoux, mais à partir de 1959, atteint d'un cancer, il ralentit son rythme de travail. Son dernier grand tableau est La Sarcleuse.
Deux ans avant sa mort, en 1961, une rétrospective de ses œuvres intitulée L'Atelier de Braque a lieu au musée du Louvre, Braque devient ainsi le premier peintre à être exposé dans ce lieu de son vivant.
Homme discret, peu porté sur les relations publiques, Braque était un intellectuel féru de musique et de poésie, ami notamment d'Erik Satie, de René Char, de Alberto Giacometti. Il s' est éteint le 31 août 1963 à Paris. Des obsèques nationales ont été organisées en son honneur, au cours desquelles André Malraux a prononcé un discours.

Sa vie

Georges Braque grandit au sein d’une famille d’artisans. Il est le fils d'Augustine Johannet et de Charles Braque, entrepreneur de peintures en bâtiment à Argenteuil, également peintre du dimanche qui peint très souvent des paysages inspirés des impressionnistes. En 1890, la famille s'installe au Havre et en 1893, le garçon entre au lycée. Mais il n'a aucun goût pour l'étude, il est fasciné par la vie du port. Il s'inscrit tout de même dans la classe de Courchet à l’École supérieure d'art du Havre, dirigée par Charles Lhullier de 1897 à 1899 et il prend en même temps des leçons de flûte avec Gaston Dufy, le frère de Raoul Dufy.
En 1899, il quitte le lycée sans se présenter au baccalauréat et il entre comme apprenti chez son père, puis chez Roney, un de leurs amis qui est peintre décorateur. L'année suivante, il vient à Paris, pour continuer son apprentissage chez un peintre-décorateur, Laberthe. En même temps, il suit le cours municipal des Batignolles dans la classe de Eugène Quignolot. Il habite Montmartre, rue des Trois-Frères. En 1901, il fait son service militaire au 129e régiment d'infanterie du Havre. À son retour, avec le consentement de ses parents, il décide de se consacrer entièrement à la peinture. Il revient à Paris en 1902, s'installe à Montmartre rue Lepic en octobre, et entre à l'Académie Humbert, boulevard de Rochechouart. C'est là qu'il rencontre Marie Laurencin et Francis Picabia.
Marie devient sa confidente, son accompagnatrice à Montmartre, ils se dessinent mutuellement, sortent en ville, partagent leurs plaisanteries, leurs secrets et leurs jours de flemme. Mais Marie est une aguicheuse, pas facile à séduire. Le timide Braque n'a avec elle qu'une liaison chaste3. Il faudra toute la technique amoureuse de Paulette Philippenote 1 pour dégourdir le grand timide autour duquel tournent pourtant un grand nombre de femmes. Henri-Pierre Roché les rencontre ensemble au Bal des Quat'z'Arts alors que Braque est déguisé en romain. Cette vie de luxe et de volupté renforce le jeune homme dans sa décision de rompre les amarres. Il détruit toute sa production de l'été 1904 qu'il a passé à Honfleur, abandonne Humbert et prend contact avec Léon Bonnat en mai 1905 à l'école des Beaux-Arts de Paris où il rencontre Othon Friesz et Raoul Dufy. Cette même année, il étudie les impressionnistes au musée du Luxembourg dont la collection est essentiellement composée du legs de Gustave Caillebotte, il va aussi dans les galeries de Durand-Ruel et de Vollard. Il s'est installé dans un atelier qu'il loue rue d'Orsel, face au théâtre Montmartre où il assiste aux nombreux mélodrames d'époque6 et il se rallie au fauvisme. Sa décision est sans doute due à son amitié pour Othon Friesz, havrais comme lui, les deux jeunes artistes vont partir ensemble à Anvers en 1906 et l'année suivante dans le midi de la France.
Par la suite, Georges Braque introduit Marie Laurencin au Bateau-Lavoir et il l'encourage avec Matisse à poursuivre une carrière de peintre. Il croit en son talent.

Du fauvisme au cubisme

À l'été 1905, de nouveau à Honfleur, puis au Havre en compagnie du sculpteur Manolo, du critique d'art Maurice Raynal, poussé par Raoul Dufy et Othon Friesz à utiliser des couleurs pures, Braque expose au Salon d'automne de 1905 aux côtés de Matisse, Derain, et de ses amis havrais qualifiés de fauves. Pendant près de deux ans Braque s'engage dans le système fauve en fonction de sa propre lecture des œuvres de Cézanne. L'exemple le plus caractéristique du fauvisme de Braque se trouve dans La Petite Baie de La Ciotat, 1907, huile sur toile 60,3 × 72,7 cm, Musée national d'art moderne que le peintre juge suffisamment importante pour la racheter en 1959.
À partir de 1907, Georges Braque séjourne dans le midi de la France en compagnie de Othon Friesz, et après avoir longuement médité sur l'usage de la ligne et des couleurs de Paul Cézanne, il produit un grand nombre de toiles relatives aux paysages de l'Estaque, presque toutes en plusieurs versions : Le Viaduc de l'Estaque 1907, Le Viaduc de l'Estaque 1908, Route de l'Estaque 1908 Terrasse à l'Estaque 1908, La Baie de l'Estaque 1908, Les Toits d'usine à l'Estaque 1908, Chemin à L'Estaque 1908, Paysage à l'Estaque 1908. Maisons à l'Estaque a été reproduit dans 34 publications et présenté dans 22 expositions1908 à 1981.
Le tableau ayant été refusé au Salon d'automne de 1908, le marchand d'art Daniel-Henry Kahnweiler, très choqué par cette réaction, propose à Georges Braque de lui ouvrir sa galerie pour présenter cette œuvre ainsi que l'ensemble des œuvres récentes du peintre. Kahnweiler vient d'ouvrir une petite galerie au no 28 de la rue Vignon à Paris, il confie la préface du catalogue à Guillaume Apollinaire qui se lance dans un dithyrambe : « Voici Georges Braque. Il mène une vie admirable. Il s'efforce avec passion vers la beauté et il l'atteint, on dirait, sans effort ….
Cette même année, Braque visite l'atelier de Pablo Picasso, il y découvre deux toiles : Les Demoiselles d'Avignon, ainsi que Trois femmes qui n'est pas encore achevé. Les rythmes constructifs de ces toiles sont repris de Cézanne, mais plus découpés et déformés. Ils provoquent d'abord l'étonnement de Braque qui a pourtant entamé la même démarche avec ses Nus. Mais ce ne sont pas de ces toiles qu'il va tirer son inspiration pour Le Grand nu commencé en 1907 et achevé en 1908.
Ce n'est rien enlever de leur force subversive aux Demoiselles d'Avignon ou au Grand nu à la draperie, ce n'est en rien sous-estimer la rupture qu'ils marquent dans l'histoire de la peinture que d'écrire qu'ils n'ont pas radicalement reconverti la recherche de Georges Braque.
L'audace de Picasso l'a tout de même étonné, et dans un premier temps, Braque se serait montré réticent, mais ici, le conditionnel s'impose18. Il existe au moins trois versions de la réaction de Braque rapportées soit par Kahnweiler, qui n'était pas là, soit par André Salmon, qui n'était pas là non plus, soit par Fernande Olivier, dont les déclarations sont sujettes à caution puisqu'elle a menacé Picasso de faire des révélations gênantes pour lui, dans ses Souvenirs intimes sur cette période-là. Grâce à l'intercession de Madame Braque, et le versement par Picasso d'un million de francs, Fernande a renoncé à son chantage19. En fait, Braque était déjà sur une autre voie, il avait commencé des variations sur les paysages de l'Estaque. Mais l'importance de ses œuvres mettra longtemps à se révéler : les plus importantes ont été gardées dans des collections privées pendant la plus grande partie du XXe siècle, ce qui n'a pas contribué à défendre la cause de Braque dans les débats sur l'antériorité.
Lorsqu'il réfléchit, après les avoir vus, ces tableaux confirment les orientations de la recherche qu'il a déjà menée avec Viaduc à l'Estaque ou Le Grand nu. C'est à partir de là que va commencer la cordée Braque-Picasso, avec deux artistes sans cesse en recherche et en confrontation. Savoir lire dans le motif, voilà ce que Braque apprend à Picasso dès leur première rencontre. Selon Pierre Daix : Ce que la rencontre entre Picasso et Braque fait surgir, c'est que le motif n'est plus la peinture. C'est la composition, par ses rythmes contrastés, qui révèle ce qu'il y avait de structural - à condition qu'on sache le lire - dans le motif.
En 1907, Braque avait déjà commencé sa propre révolution avec Nu debout que l'on confond parfois avec le Grand nu.Nu debout est peu connu, peu souvent exposé, il appartient à une collection privée. C'est une encre sur papier de petit format : 31 × 20 cm dans lequel le peintre a déjà expérimenté une construction du corps en formes géométriques qu'il a ensuite développée en plusieurs eaux-Fortes où le corps de femme nue, debout, a plusieurs positions bras le long du corps, dans le dos, tête droite, penchée. Dans Le Grand nu et Nu debout, ainsi que dans d'autres représentations du corps de femme : La Femme, 1907, dessin donné par Braque au critique d'art américain Gelett Burgess pour illustrer son article The Wild men in Paris le corps semble avoir été décomposé puis recomposé en trois points de vue. Une photographie de Braque et le dessin La Femme paraissent en page deux de l'article de Burgess dans The Architectural record de mai 1910.
Les formes sont modelées selon une structure et un rythme qui sont les deux notions fondamentales du cubisme. Son inspiration est instinctive et sa voie picturale suit les traces de Paul Cézanne. Braque s'imprègne aussi des figures des masques nègres dont il possède plusieurs exemplaires. « Les masques nègres m'ont ouvert de nouveaux horizons. Ils m'ont permis d'entrer en contact avec l'instinctif. À cette époque, la découverte de l'art nègre est revendiquée par une foule d'artistes parmi lesquels Maurice de Vlaminck, André Derain. Braque ne revendique aucune antériorité. Il a simplement acheté en 1904, à un marin, des masques Tsogo et il a continué à compléter sa collection avec des masques Fang
Le Grand nu a été la propriété de Louis Aragon puis de la collectionneuse Marie Cuttoli avant de rejoindre la collection d'Alex Maguy. En 2002, l'œuvre est entrée dans les collections publiques par Dation en paiement des droits de succession, elle est aujourd'hui conservée au Musée national d'art moderne.

La période cubiste

Il existe plusieurs versions sur l'origine du mot cubiste et sur les « pères » du mouvement. Beaucoup de critiques d'art désignent en particulier Braque et Picasso comme les fondateurs du cubisme. D'autres y associent Fernand Léger et Juan Gris, tout en créditant Louis Vauxcelles critique d'art au journal Gil Blas de l'invention du mot, lorsqu'il qualifie les Maisons à l'Estaque de Braque de petits cubes. Ce tableau est alors considéré comme l'acte de naissance du cubisme. D'autres encore apportent une version différente. Selon Bernard Zurcher, c'est Henri Matisse qui a qualifié de cubistes les Maisons de l'Estaque tout en refusant ces sites et schémas géométriques au Salon d'automne de 1908.
Cette simplification terrible qui a porté le cubisme sur les fonts baptismaux est responsable en grande partie d'un véritable mouvement dont ni Braque ni Picasso ne voulaient assumer la responsabilité. Un mouvement dont les théoriciens Albert Gleizes et Jean Metzinger ne dépasseront guère les bizarreries cubiques stigmatisées par Vauxcelles.
En réalité, ces cubes ne représentent pour Braque et Picasso qu'une réponse provisoire au problème posé par la construction d'un espace pictural qui doit s'écarter de notion de perspective établie depuis la Renaissance. La cordée Braque Picasso est un atelier de recherches des deux artistes, avec des œuvres menées simultanément par des hommes passionnés auxquels se joignent Derain, Dufy. C'est une aventure exaltante qui a jeté les bases de l'art moderne.
Pourtant, par la suite, le peintre espagnol a revendiqué pour lui-même, devant Kahnweiler, les inventions de papier collés qu'il dit avoir faites à Céret et finalement il s'est attribué l'invention du cubisme, accusant Braque de l'avoir imité pendant leur période cubiste ce qui a créé un énorme malentendu sur l'importance de l'œuvre de Braque. Selon Olivier Cena : Quarante ans plus tard, Picasso ne veut rien laisser à Braque, ni le cubisme analytique, ni le cubisme synthétique… .
Les erreurs d'interprétation ont été ensuite alimentées par diverses personnalités, notamment Gertrude Stein, dont Eugène Jolas réfute les affirmations en citant Matisse : Dans mon souvenir, c'est Braque qui a fait la première peinture cubiste. Il avait rapporté du Sud, un paysage méditerranéen … C'est vraiment la première peinture qui constitue l'origine du Cubisme et nous la considérions comme quelque chose de radicalement nouveau ....
William Rubin considère, lui, que le cubisme de Braque est antérieur aux Maisons à l'Estaque. Il désigne la Nature morte aux pichets avec pipe33, dont on ignore la localisation et les dimensions34, comme la première œuvre cubiste du peintre. qui a choisi des objets dont l'enveloppe est courbe, la composition étant réglée en diagonale et centrée par la rencontre de deux axes obliques.

Le cubisme analytique

À partir de 1909, de ses séjours à La Roche-Guyon et à Carrières-sur-Seine, Braque ramène plusieurs paysages qui sont des déclinaisons cubistes d'inspiration cézannienne : Le Château de La Roche-Guyon 73 × 60 cm Lille Métropole, Le Vieux château de la Roche-Guyon 65 × 54 cm, musée des beaux-arts Pouchkine, Moscou, Paysage des carrières Saint-Denis 41 33cm musée national d'art moderne, Paris.
Braque entre ensuite dans la période du cubisme analytique . Les paysages qui prédominaient dans l'œuvre du peintre vont peu à peu céder la place aux natures mortes. Ces paysages n'étaient que la phase préparatoire à une période plus féconde qui voit naître en particulier Broc et violon, 1909-1910, huile sur toile, 117 × 75 cm Kunstmuseum Bâle, Violon et palette 92 × 43 cm et Piano et Mandore 92 × 43 cm, Musée Solomon R. Guggenheim38. Le peintre ne cherche plus à copier la nature. Par une succession d'articulations dynamiques, en multipliant les points de vue, sa peinture s'enrichit de combinaisons imprévues, avec une multiplication des facettes. Les formes sont alors géométrisées et simplifiées.
Si l'on considère que la bataille du cubisme s'est jouée en définitive sur le thème de la nature morte, Braque y était le mieux préparé ou plutôt il a été à même, en consolidant chacune des étapes de son évolution, d'aller plus sûrement à ce signe qui suffit tel que l'a nommé Matisse.
En 1911, le peintre rencontre Marcelle Lapré qui deviendra sa femme en 1926. Et il part à Céret où il reste avec Picasso toute l'année.

Les inventions de Braque

À partir de là, Braque invente un nouveau vocabulaire, introduisant des lettres au pochoir dans ses tableaux, des caractères d'imprimerie : Le Portugais 117 × 81 cm, Kunstmuseum Bâle, Nature morte aux banderilles 65,4 × 54,9 cm Metropolitan Museum of Art. Dans un entretien avec la critique d'art Dora Vallier, il explique ... c'était des formes où il n'y avait rien à déformer parce que, étant des aplats, les lettres étaient hors l'espace et leur présence dans le tableau, par conséquent, permettait de distinguer les objets qui étaient dans l'espace, de ceux qui étaient hors de l'espace, Braque se lance aussi dans des inscriptions tracées à main levée, disposées en parallèle pour rappeler les caractères d'affiche. Dans Le Portugais, on déchiffre le mot BAL en haut à droite, un mot qui revient l'année suivante dans Nature morte au violon BAL, Kunsmuseum de Bâle.
À Céret, il n'abandonne pas les paysages. Il réalise Les Toits de Céret 82 × 59 cmcollection privée et la Fenêtre de Céret, toiles stylisées selon la méthode du cubisme analytique, et sans aucun rapport avec les paysages des années précédentes
L'année suivante à Sorgues, il rejoint Picasso et il loue la villa de Bel-Air. Les papiers collés de Braque font alors leur apparition : Compotier et verre, 50 × 65 ccollection privée. C'est une très grande découverte qui sera reproduite par de nombreux peintres : Juan Gris, Henri Laurens, Fernand Léger, Albert Gleizes. Les papiers sont des compositions, à ne pas confondre avec les collages que Braque réalise plus tard.
C'est également à Sorgues que Braque peaufine sa technique des sculptures en papier, inventée à Céret en 1911, selon l'article de Christian Zervos paru dans les Cahiers d'art. On trouve trace de ces sculptures dans un courrier envoyé à Kahnweiler au mois d'août 1912 où l'artiste dit profiter de son séjour à la campagne pour y faire ce que l'on ne peut faire à Paris, entre autres choses des sculptures en papier qui lui donnent beaucoup de satisfaction. Malheureusement il ne subsiste rien de ces constructions éphémères excepté une photographie d'un contre-reliefnote 6 de 1914 découverte dans les archives Laurens auquel les sculptures papier de 1912 ne ressemblaient sans doute pas. Selon Bernard Zurcher, elle se rapprocheraient plutôt des natures mortes de la même année 1912 qui suivaient le principe d'inversion du relief propre au masque Wobé.

Ceux qui vont de l'avant tournent le dos aux suiveurs. C'est tout ce que les suiveurs méritent

Les papiers collés de Braque, pour Jean Paulhan, qui a passé la moitié de sa vie à essayer d'expliquer la nature de l'œuvre de Braque sont des Machines à voir . D'après lui, le cubisme consiste à substituer l'espace brut à l'espace concerté des classiques. Cette substitution se fait par le biais d'un engin analogue à la machine à perspective de Filippo Brunelleschi, et à la vitre quadrillée de Albrecht Dürer. La vitre quadrillée de Dürer, encore appelée mise au carreau, est un moyen pour le dessinateur d'agrandir ou diminuer un dessin sans que la perspective intervienne. Braque utilise souvent cette mise au carreau. On en trouve un exemple dans la photo d'atelier où il travaille à L'Oiseau et son nid en 1955, prise par Mariette Lachaud. Dans la partie supérieure du tableau, les traces de la mise au carreau sont encore visibles, détachées du sujet principal.
Braque reste à Sorgue jusqu'en novembre 1912, tandis que Picasso, retourne à Paris où il commence à exécuter ses propres papiers collés. Il écrit à Braque : Mon cher ami Braque je emploie tes derniers procédés paperistiques et pusiereux. Je suis en train de imaginer une guitare et je emploie un peu le pusière contre notre orrible toile. Je suis bien content que tu sois heureux dans ta villa de Bel Air, et que tu sois content de ton travail. Moi, comme tu vois, je commence à travailler un peu. Cependant Braque avance dans sa recherche de papier collé, dérivant sur des papiers ayant l'aspect du faux-bois, il imite aussi le marbre. Les inversions de relief se multiplient et des signes optiques apparaissent vers la fin de l'année 1913, jouant sur la répétition d'une figure géométrique ou d'un motif décoratif. Braque ajoute des signes objectifs nouveaux l'année suivante : cordes de guitare, de violon, cartes à jouer, morceau de journal transformé en carte à jouer. Vers la fin de la période papier, apparaît le carton ondulé. Le peintre introduit dans sa composition la notion de relief qui connaîtra un vif succès à partir de 1917, tant dans ses collages que dans ceux de son meilleur ami, le sculpteur Henri Laurens. Parmi les œuvres importantes de la période des papiers collés 1913-1914, se trouvent Le Petit éclaireur, 92 × 63 cm fusain, papier journal, papier faux-bois et papier noir collé sur toile, Musée de Lille métropole, Nature morte sur table Gillette, 48 × 62 cm où est reproduite l'enveloppe d'une lame de rasoir Gillette, Centre Pompidou Paris, Violon et pipe LE QUOTIDIEN 74 × 100 cm, fusain, papier faux bois, galon de papier peint, papier noir, papier journal collés sur papier, contrecollé sur carton, Centre Pompidou, Paris.
Cette période est aussi celle des instruments de musique. Violon 72 × 31 cm, fusain, papier collé uni, faux bois, mural et journal sur papier, Cleveland Museum of Art, Violon, 35 × 37 cm, huile, fusain, crayon et papier collé sur toile, Philadelphia Museum of Art, Violon et journal FÊTE, 90 60cm, Philadelphia museum.
Braque n'en finit pas d'inventer. Dès 1912, installé avec Marcelle Lapré au 5 impasse Guelma, il mêle à sa peinture de la sciure de bois et du sable pour donner du relief aux toiles. En 1913, il déménage son atelier rue Caulaincourt tandis que ses œuvres sont présentées à New York à l'Armory Show. Cependant, cette année-là, les relations entre les deux peintres se dégradent, ils n'éprouvent plus le besoin de se retrouver60. L'écart s'est creusé, la cordée se délite. Deux expositions particulières présentent Braque en Allemagne au printemps 1914, à Berlin, galerie Feldmann, puis à Dresde, galerie Emile Richter61. Au moment de l'assassinat du duc d'Autriche, Braque passe l'été à Sorgues62 avec sa femme. Il est mobilisé et prend le train avec Derain le 2 août 1914 à Avignon où les accompagne le compagnon de cordée qui va multiplier les mots d'auteur rapportés de diverses manières selon les biographes.

La guerre de 1914 et ses conséquence

La mobilisation de Braque sur le front en 1914 interrompt brutalement la carrière du peintre. Il est affecté au 224e régiment d'Infanterie comme sergent et envoyé dans la Somme à Maricourt41 secteur où le régiment de Braque devenu lieutenant Braque restera trois mois avant d'être déplacé en Artois, au nord d'Arras, pour préparer une offensive à grande échelle contre les villages qui protègent la crête de Vimy.
Grièvement blessé le 11 mai 1915 à Neuville-Saint-Vaast, Braque est laissé pour mort sur le champ de bataille. Il est relevé par les brancardiers, qui ont trébuché sur son corps le lendemain, dans ce charnier où 17 000 hommes ont été broyés. Trépané, le peintre ne reprend connaissance qu'après deux jours de coma. Il ne se remet pas avant 1917. Deux fois cité, il reçoit la Croix de guerre. Après un banquet organisé pour fêter sa guérison à Paris, il part en convalescence à Sorgues.
Avec le poète Pierre Reverdy, Georges Braque écrit ses Pensées et Réflexions sur la peinture qui sont publiées dans la revue Nord-Sud. Il est alors proche de Juan Gris qui lui communique son goût pour les textures recherchées et les plans réduits à des formes géométriques. C'est avec Gris qu'il recommence à peindre en peintre aveugle-né - cet aveugle renaissant selon le mot de Jean Paulhan, avec notamment Guitare et verre 60,1 × 91,5 cm, Musée Kröller-Müller Otterlo. En cette période, Braque n'était pas loin de penser que Picasso était en train de trahir le cubisme et leur jeunesse. Mais le peintre discret reprend ses recherches. Il se fait vérificateur. Il peaufine ses trouvailles, et met au point un nouveau vocabulaire de sa peinture. Ce sera le cubisme synthétique » dont les premières créations commencées en 1913 avec Compotier et cartes 81 × 60 cm, huile rehaussée au crayon et au fusain sur toile, Centre Pompidou, Paris, reprennent en 1917 avec La Joueuse de mandoline , 92 × 65 cm, huile sur toile, Musée de Lille Métropole, La Musicienne, huile sur toile, 221,4 112.8cm, Kunstmuseum Bâle.
Vers 1919, alors que le cubisme triomphe, alors que Gleizes, Metzinger, Maurice Raynal lui découvrent des raisons, des lois, des limites, Georges Braque déclare : Il y a longtemps que j'avais foutu le camp. Ce n'est pas moi qui ferais du Braque sur mesure.
Quelques années plus tard, dans son livre Braque le patron, Jean Paulhan fait le parallèle entre l'art des cubistes et l'art du camouflage de guerre. Le camouflage de guerre a été l'œuvre des cubistes : si l'on veut, c'était aussi leur revanche. Les tableaux à qui l'opinion publique eût obstinément reproché de ne ressembler à rien se trouvaient être au moment du danger, les seuls qui pussent ressembler à tout … Ils se reconnaissaient dans les natures mortes de Braque, et l'aviateur qui doutait de la forêt des Ardennes ou de la Beauce n'hésitait plus devant un canon retouché par Braque. Paulhan rappelle aussi que le peintre officiel chargé du camouflage des canons en 1915, Lucien-Victor Guirand de Scevola, disait, au chapitre Souvenirs de camouflage, qu'il avait employé pour déformer totalement d'aspect de l'objet, les moyens que les cubistes utilisaient, ce qui lui avait permis par la suite, d'engager dans sa section quelques peintres aptes, par leur vision très spéciale, à dénaturer n'importe quelle forme.
Mais désormais, les nouvelles toiles de Braque offrent une palette plus vive et sensuelle, comme dans la Femme à la mandoline, 1922-1923, huile sur carton 41 × 33 cm Centre Pompidou, Paris. Au début des années 1920, le peintre varie encore sa production à la demande de Serge de Diaghilev, en composant les décors et costumes pour les Ballets russes. Entre 1922 et 1926, il fait les décors et costumes de Les Fâcheux adaptation de la comédie-ballet de Molière, de Salade, de Zéphire et Flore et aussi les décors des Sylphides ballet de Michel Fokine. Diaghilev trouve que le peintre a un caractère peu commode et que par ailleurs, il n'a pas le sens des affaires, ce qui est exact selon Jean Paulhan.
Le rideau du ballet Salade a été légué au Musée d'art moderne de la ville de Paris en 1955 par le comte Étienne de Beaumont. Enfermé depuis cette date dans les réserves du Palais de Tokyo, il vient d'en être sorti et sera restauré

L'entre deux-guerres, le cubisme synthétique et les natures mortes

Gris est alors le seul peintre cubiste dont Braque reconnaissait la valeur en dehors de Picasso. il disait des autres : Ils ont cubisté les tableaux, ils ont publié des livres sur le cubisme, et tout cela naturellement m'éloignait de plus en plus d'eux. Le seul qui ait poussé les recherches cubistes avec conscience à mon sens, c'est Gris.
À cette époque, ce sont les sculpteurs Jacques Lipchitz et Henri Laurens qui ont joué un rôle plus considérable que les peintres dans l'évolution de Braque. Le peintre développe des aplats de couleurs. Braque ne déforme plus, il forme, c'est ce qu'il confirme dans son cahier. Ainsi se produit la métamorphose qui se caractérise par l'utilisation du fond noir dont il dit à Daniel-Henry Kahnweiler, réfugié en Suisse, que le noir... c'est une couleur dont l'impressionnisme nous a privés si longtemps et qui est si belle... .
"Tout compte fait, je préfère ceux qui m'exploitent à ceux qui me suivent. Ceux-là ont quelque chose à m'apprendre"

L'exposition de ses œuvres récentes, en mars 1919, chez Léonce Rosenberg à la Galerie de L'Effort Moderne reçoit un accueil enthousiaste. À cette occasion une première monographie de Braque est publiée par Roger Bissière qui y souligne l'aspect méticuleux du travail du peintre : Braque a entrevu peut-être le premier entre les modernes la poésie qui se dégage du beau métier, d'une œuvre faite avec amour et patience. C'est la deuxième exposition personnelle du peintre qui renouvelle son contrat avec Léonce Rosenberg en mai 1920, année où il réalise sa première sculpture :La Femme debout en six exemplaires. Cette période qui va jusqu'au début des années 1930 est aussi celle des Canéphores : Canéphores, 1922, 180,5 × 73,5 cm, huile sur toile, Centre Pompidou Paris, mais aussi des nus, des figures féminines, Trois Baigneuses, huile sur bois, 18 × 75 cm collection privée.
Mais en 1921, les choses se gâtent entre Rosenberg et Braque. La liquidation du stock de Kahnweiler, confisqué pendant la guerre, a lieu à l'hôtel Drouot. L'expert est précisément Léonce Rosenberg qui a réussi à se faire nommer là, et qui profite de sa position dominante pour sous-évaluer des œuvres qu'il rachètera à bas prix. Le premier jour de la vente à Drouot, Braque s'emploie à le boxer en même temps que le pauvre Amédée Ozenfant qui tentait de s'interposer. L'affaire se termine au commissariat de police, et les belligérants sont finalement relâchés. Léonce Rosenberg revend les tableaux qu'il a achetés avec un énorme bénéfice. Son frère Paul en fait autant. Un des grands perdants dans tout cela est l'État français qui a laissé filer des œuvres comme L'Homme à la guitare 1913-1914en 1921 pour 2 820 francs, tableau qu'il rachètera pour le musée national d'art moderne soixante ans plus tard neuf millions de francs.
Kunsthalle de Bâle où a lieu en 1933 la première rétrospective des œuvres de Braque
Le style et les recherches du peintre évoluent 1919 et 1939. De son passé cubiste, il conserve la simultanéité des points de vue, le développement des objets sur le même plan, et l'inversion de l'espace. Il utilise toujours le noir en fond pour suggérer la profondeur, et il opère une partition des objets et des plans qui les éloignent de tout réalisme. En cela Guitare et nature morte sur la cheminée , 1925, huile et sable sur toile, 130,5 × 74,6 cm, Metropolitan Museum of Art88 et Fruits sur une nappe et compotier, huile sur toile, 130,5 × 75 cm, Centre Pompidou89, sont caractéristiques de cette évolution. Les objets semblent des accessoires à la composition, tout son effort porte sur la couleur, ainsi que le remarque Georges Charensol lors de l'exposition Braque chez Paul Rosenberg, en 1926, où se trouvait Fruits sur une nappe et compotier. Braque pousse l'usage du contraste encore beaucoup plus loin dans Nature morte à la clarinette, huile sur toile, 1927, 55,9 × 75 cm, The Phillips Collection avec des formes qualifiées de naturalistes par Christian Zervos.
Rue Georges-Braque anciennement rue du Douanier où le peintre avait son atelier à partir de 1925
Depuis 1925, Braque est installé à Montparnasse, rue du Douanier, dans une maison-atelier construite sur les plans d'Auguste Perret68. Il a épousé en 1926, Marcelle Lapré, avec laquelle il vit depuis 1912. Il a pour voisins Louis Latapie et Roger Bissière dans cette rue qui porte aujourd'hui son nom : rue Georges-Braque
Les formes naturalistes et abstraites prennent une nouvelle ampleur avec les variations sur Le Guéridon à partir de 1928, année où le couple Braque achète une maison à Varengeville en Haute-Normandie. Sur les falaises du Pays de Caux l'architecte américain Paul Nelson construit une maison et un atelier pour le peintre. Avec Le Guéridon, 1928, huile sur toile, 197 × 73 cm, Museum of Modern Art, New York et Le Grand guéridon, huile sur toile 147 × 114 cm, que le peintre continue à travailler jusqu'en 1936-1939, Braque opère un long mûrissement des formes. Il retravaille même en 1945 le Guéridon rouge 180 × 73 cm, commencé en 1939 en réduisant le motif ornemental. Le thème du guéridon revient souvent dans l'œuvre de 1911 à 1952. Il assure la continuité d'un développement dont les Ateliers réalisent le plein épanouissement.
Les années 1930 voient apparaître les nappes : Nappe rose 1933 et la Nappe Jaune 1935 114,3 × 144,8 cm, collection privée, qui reçoit en 1937 le premier prix de la Fondation Carnegie de Pittsburgh. Le peintre expérimente aussi les plâtres gravés Heraklès , 1931, 187 × 105,8 cm, Fondation Maeght, les eaux fortes Théogonie d'Hésiode, 1932, ensemble de huit eaux fortes 53 × 38 cm Musées de Belfort98 commandées par Ambroise Vollard pour illustrer le livre homonyme et qui ne sera jamais publié car Vollard meurt en 1939.
La première rétrospective de Braque à la Kunsthalle de Bâle en 1933 en Suisse, marque le début de la reconnaissance internationale du peintre elle sera suivie en 1934 par Braque récent paintings à la Valentine gallery de New York, ouverte en 1937 par le galeriste allemand Curt Valentinn. Selon Frank Elgar : C'est pendant les années 1930 que Braque peint ses natures mortes les plus concentrées et les plus savoureuses. Ses falaises, ses barques échouées, ses figures double face ... témoignent de sa période la plus heureuse. Mais le péril le guettait à partir de 1940.

Pendant la deuxième guerre mondiale

De 1939 à 1940, le couple Braque est à Varengeville pendant la drôle de guerre avec Joan Miró qui a loué une maison près de celle des Braque en août 1939 et qui restera en France jusqu'en 1940. Les deux peintres entretiennent une relation d'amitié et de confiance, ... sans que le voisinage d'alors et l'amitié de toujours n'ait pas fait dévier d'un millimètre le chemin de l'un et de l'autre. Braque a simplement invité son ami catalan à utiliser le procédé du papier à report, une technique d'impression pour la lithographie. À Varengeville, à la même date, se trouvent aussi Georges Duthuit, Alexander Calder103, ainsi que le poète Raymond Queneau et l'architecte Paul Nelson.
Pendant cette période, Braque se consacre quasi exclusivement à la sculpture, il réalise notamment Hymen, Hesperis et Le Petit Cheval. Les sculptures humaines sont des têtes toujours de profil comme dans les reliefs de l'ancienne Égypte. Ce style est issu des tableaux comme Le Duo, huile sur toile, 129.8 x 160 cm qui offre deux profils de femmes assises sur leur chaise. En 1939-1940, Braque est l'objet d'une grande rétrospective à Chicago à The Arts Club of Chicago, également à Washington, The Phillips Collection à San Francisco San Francisco Museum of Modern Art. Il a aussi une exposition personnelle à New York en 1941, puis à Baltimore, puis de nouveau à New York chez Paul Rosenberg en avril 1942. En 1943, la galerie de France lui consacre une exposition Douze peintures de Georges Braque tandis que le Salon d'automne à Paris présente 26 peintures et 9 sculptures. Jean Bazaine lui consacre un article dans Comœdia. Jean Paulhan publie Braque le patron la même année.
Entre 1940 et 1945, les Braque ont résidé d'abord dans le Limousin, puis se sont réfugiés dans les Pyrénées, puis ils sont revenus à Paris. Ils ne retournent à Varengeville qu'en 1945, En 1941, un grand nombre des peintures de Braque, déposées à Libourne sont confisquées par les autorités allemandes.
Braque ne participe pas au voyage à Berlin organisé en 1941 par Arno Breker et Otto Abetz dont André Derain, Othon Friesz, Maurice de Vlaminck, Kees van Dongen, André Dunoyer de Segonzac font partie. Mais il ne souhaite pas désavouer son ami Derain et le commentaire de lui rapporté par Fernand Mourlot : Heureusement, ma peinture ne plaît pas, je n'ai pas été invité ; sans quoi, à cause des libérations de prisonniers promises, j'y serais peut-être allé. reste selon Alex Dantchev et Fernand Mourlot, une forme d'exonération de toute accusation de collaboration envers l'ami Derain. Certes, le lien avec Derain est rompu, tout comme celui avec les autres artistes qui ont fait le même voyage. Mais Braque prendra par la suite ses distances vis-à-vis de l'épuration.

Braque et Picasso

Braque progresse désormais dans ce que l'on nomme le précubisme ou cubisme cézannien durant toute l'année 1909. À propos de Port en Normandie The Art Institute, Chicago, Vauxcelles parle cette fois de bizarreries cubiques . Dans cette toile comme dans les différentes versions du Château de la Roche-Guyon Moderna Museet, Stockholm, Braque prend conscience de ce que l'espace entre les objets, les intervalles ont autant de valeur picturale, de force plastique, que les formes elles-mêmes. Aussi densifie-t-il les vides, pour unifier formes et fonds, en liant, comme il le dit, l'espace à son contenu .
Avec Picasso, qu'il fréquente de plus en plus, il constate qu'à travers leurs deux recherches parallèles se définit un même projet ; ils décident alors de mettre en commun leurs expériences.
En 1910, Braque s'installe rue Caulain-court et passe l'été à l'Estaque. Ses liens avec Picasso se resserrent. En 1911, ils séjournent tous les deux à Céret Le Portugais, Kunstmuseum, Bâle, l'Homme au violon coll. E. G. Bührle, Zurich. En 1912, ils passent l'été à Sorgues ; Braque y prolonge, par l'invention du papier collé (Composition et verre, coll. part. et tout aussi radicalement, le collage découvert en avril par Picasso Nature morte à la chaise cannée. Il apporte ainsi au cubisme la dimension qui lui manquait, celle de la couleur. Si le papier collé entérine l'abandon du ton local et marque la première dissociation de la forme et de la couleur, il a surtout pour effet de renouer avec la couleur. Ainsi, tandis que Picasso s'intéresse à l'espace et à la forme, Braque réaffirme ses préoccupations de coloriste.
De cette communauté, il faut retenir ce que la contribution de Braque a d'essentiel. Le premier, il introduit la lettre d'imprimerie dans la peinture, d'abord en trompe l'œil Le Pyrogène, 1910, coll. part., puis, par l'intervention concrète du pochoir, Le Portugais. Le premier, encore, il a recours au peigne à peindre le faux bois et à la technique du faux marbre dans la peinture, comme il ajoutera du sable, de la sciure ou de la limaille de fer à la matière picturale Compotier, bouteille et verre, 1912, coll. part.. Ces inventions sont considérables en ce qu'elles désacralisent le faire de l'artiste et renversent fondamentalement le rapport à la réalité comme modèle, en mettant un terme au primat du rendu illusionniste.
Braque, comme Picasso, s'isole alors d'une école cubiste naissante. Il participe en Allemagne aux expositions de la Sonderbund et du Blaue Reiter en 1912, à l'Armory Show en 1913.
Le papier collé marque aussi la première réaction aux dangers d'une analyse excessive, conduisant à un hermétisme proche de l'abstraction. En 1913 et en 1914, Braque rétablit synthétiquement le volume par une restructuration des éléments de l'analyse en une composition cette fois concentrée et quasi volumétrique Homme à la guitare, 1914, coll. part., Paris.
C'est à Sorgues, où il travaille non loin de Picasso, que la guerre le surprend et le contraint à interrompre cette reconstruction de l'objet. Deux expositions cette même année lui avaient cependant permis de se faire connaître en Allemagne, à Dresde et à Berlin.

Natures mortes et séries


Blessé en 1915 sur le front d'Artois, Braque est trépané ; il reste à hôpital jusqu'en 1916. Le dialogue avec Picasso, alors en Italie, est interrompu ; son marchand Kahnweiler a quitté la France. Braque, après une longue convalescence à Sorgues, reprend difficilement la peinture ; il est alors influencé par Gris et Laurens avec qui débute une profonde amitié. La Grande Musicienne Kunstmuseum, Bâle marque la fin du cubisme synthétique. Braque commence en 1918 la rédaction de ses propos que publie Reverdy dans les Cahiers du Sud. Mais 1918 marque surtout le retour au thème des natures mortes au guéridon. Désormais, Braque aère ses compositions et les situe davantage dans un espace ouvert et en profondeur. Le cubisme perd de sa structure au profit d'une écriture plus picturale. Dans Café-Bar, 1919 Kunstmuseum, Bâle, l'espace acquiert aussi une complexité nouvelle, les tons se superposent et jouent entre eux, formes et couleurs se correspondent de nouveau.
La série les Guéridons de 1918-1919 marque une amplification du thème et son développement dans un espace en profondeur où s'inscrit une composition à dominante verticale. Ici, le dessin n'intervient plus comme support de l'analyse intellectuelle, mais comme structure d'un ensemble. Un nouveau processus pictural s'élabore peu à peu dans lequel la peinture, qui ne sert plus à souligner la puissance expressive des objets, acquiert une autonomie plastique propre ; elle tend à ce que Braque appelle le fait pictural.
Outre les compositions au guéridon apparaissent deux nouveaux thèmes caractéristiques de cette période : les cheminées et les canéphores. La tactilité de ces toiles ne tient plus à l'impression d'une proximité quasi manuelle des objets mais à la matérialité d'une peinture faite de pâte épaisse aux tons sévères, gris, verts, bruns, soutenus par une préparation mate, noire ou grise.
Les cinq Cheminées, peintes entre 1920 et 1927, sont de vastes projets monumentaux dans lesquels les formes ont gardé la puissance dynamique du cubisme. Construites verticalement, parfois en perspective désaxée, elles révèlent un espace tridimensionnel comportant deux zones : partie haute et partie basse, plus ou moins dense La Cheminée, coll. Florence Marx, Schoenborn. Le faux marbre est rendu ici par grandes touches directes, vigoureuses, qui concernent aussi bien les objets eux-mêmes que l'espace qui les baigne.
L'autre série de toiles de cette époque – les figures allégoriques dites Canéphores (1922-1926), influencées par les Baigneuses de Renoir – sont significatives de la brève approche naturaliste de Braque. Le dessin y a perdu la sécheresse linéaire du cubisme au profit d'une arabesque ample, inscrite sur la couleur plutôt qu'à son contour. Cette ligne plus spontanée donne davantage de contrastes aux formes du corps dont elles soulignent la volupté. Elle marque surtout l'élimination définitive de la rigidité mentale du cubisme et le parti pris d'un espace d'une complexité accrue, et de sa représentation strictement picturale, Art Museum, Dial. Coll., Worcester ; coll. Claude Laurens, Paris.
En 1928, Braque entreprend une nouvelle série de Guéridons dans laquelle il renoue avec l'espace environnant, faisant jouer les structures du meuble avec celles des lambris d'angle de la pièce (Grand Guéridon, 1929, The Philipps coll., Washington). Cette identification de l'espace est assortie d'un allégement de la matière picturale. Les couleurs sont diluées ; elles jouent avec la texture du sable ou de la sciure avec lesquels elles se mélangent, rappelant ainsi la fresque.
Ces quatre Grands Guéridons concluent cette période où triomphe la couleur claire, mais qui consacrent la maturité de Braque. C'est le moment où, pendant l'été, il abandonne le Midi pour Varengeville en 1929. Mais c'est surtout le début d'une série d'expositions : Berlin en 1930, chez Flechtheim, New York en 1931, Bâle en 1933, première grande rétrospective, Londres en 1934, Bruxelles en 1936. En 1937, il reçoit le prix Carnegie après Matisse et Picasso.

Les Ateliers

La peinture de Braque va connaître désormais et jusqu'à la fin de sa vie une évolution stylistique homogène. Seuls les thèmes changent pour atteindre une dimension d'une rare ambition. Dès 1938 s'amorce la série des Ateliers, interrompue par la guerre.
Braque demeure à Paris jusqu'à la Libération. L'austérité ramène provisoirement ses préoccupations au quotidien. Il entreprend des natures mortes avec verre, couteau, quignon de pain, poissons, peint plusieurs Broc sur une table de toilette, des vanités où tête de mort et palette cohabitent. C'est le retour aux thèmes ancestraux, aux racines profondes de l'homme envisagées dans une méditation quasi religieuse, qui suscite alors une peinture dépouillée de ses carnations mais lentement et économiquement construite. Cette période de l'art de Braque est marquée par les événements et ce sont de telles œuvres qui ont sans doute contribué à donner du peintre l'image superficielle d'un homme tourné vers le passé. C'est en 1943, enfin, qu'il débute une série de sculptures. Après la Libération, Braque regagne son atelier de Varengeville et entreprend immédiatement de grandes toiles. Le Salon et les trois versions du Billard, 1944-1952 Musée national d'art moderne, Paris, coll. Jacques Gelman, Mexico. En 1948, Braque reçoit le grand prix international de la Biennale de Venise.
La maladie n'interrompt cependant pas la série des huit Ateliers, ensemble de grandes toiles exécutées entre 1949 et 1956, qui marquent l'aboutissement extrême des possibilités de cette « poétique picturale » que Braque s'était employé à mettre en œuvre. De ces ateliers, balayés d'ombres et de lumière alternées, il nous montre les objets familiers, les divers espaces captés par les miroirs successifs de la toile, ainsi que la présence du modèle, lui aussi répété, confronté avec le peintre lui-même. Braque rejoint ici le grand propos de Courbet, de Corot, de Matisse et de Picasso.
Dans l'Atelier III, 1949, coll. Dr P. Hanssi, Vaduz, la présence de l'oiseau, qui survole la composition, annonce la place unique que celui-ci prendra comme signe et symbole au plafond de la salle Étrusque du Louvre, exécuté en 1952-1953.
Durant les dix dernières années de sa vie, la santé de Braque alla déclinant, son travail de peintre se limita à de petites toiles. Mais l'artiste entreprit alors une grande œuvre de lithographie. Après sa mort, le 31 août 1963, sa veuve fit don aux musées nationaux français d'un important ensemble de tableaux et de sculptures.
Braque exécuta aussi des vitraux, chapelle Saint-Dominique, Varengeville ; chapelle Saint-Bernard, fondation Maeght ; il réalisa plusieurs décors de ballet pour Diaghilev, Les Fâcheux, 1923, Salade, 1924 ; Zéphir et Flore, 1925. Enfin, son œuvre de peintre illustrateur est importante : Les Ardoises du toit de P. Reverdy, 1918 ; Le Piège de Méduse de Satie, 1921 ; La Théogonie d'Hésiode, 1932 ; Lettera amorosa de René Char, 1963.

"La liberté n'est pas accessible à tout le monde. Pour beaucoup, elle se place entre la défense et la permission "

De même, il se tient très à l'écart du régime de Vichy pendant toute la guerre. Pourtant, les avances de l'occupant ne manquent pas, ses tableaux déchaînent l'enthousiasme de Pierre Drieu la Rochelle lors de l'exposition de vingt de ses toiles au Salon d'automne 1943. Les officiers allemands qui visitent son atelier, le jugeant trop froid, proposent de lui livrer du charbon, ce que Braque refuse avec finesse. Il refuse également de créer un emblème pour le gouvernement de Vichy, alors que Gertrude Stein s'est proposée pour traduire les discours de Pétain. Braque a le défaut inverse : il ne se laisse pas acheter. Sa position est claire : pas de compromis, pas de compromission. Ce qui ne l'empêche pas de recevoir Ernst Jünger dans son atelier le 4 octobre 1943. Écrivain et poète en uniforme d'occupant cette année-là, Jünger, qui recevra le prix Goethe en 1982 et qui entre dans la Pleiade en 2008, apprécie les peintures dégénérées de Edvard Munch, de James Ensor, du Douanier Rousseau, de Picasso auquel il a rendu visite cette même année et aussi de Braque dont il a vu les peintures au Salon d'automne 1943, et qu'il trouve réconfortantes, parce qu'elles représentent l'instant où nous sortons du nihilisme. Leur force, tant dans les formes que dans les tons représentent pour lui le moment où se rassemblent en nous la matière de la création nouvelle.
Cloîtré dans son atelier pendant toute la durée de la guerre, Braque se consacre au thème des Intérieurs avec un retour en force du noir qui donne une impression de dépouillement et de sévérité. La guerre est pour Georges Braque synonyme d'austérité et d'accablement. À ce moment-là, Il n'y a guère de place pour l'émulation dans la vie de Braque : ni concours, ni discussion, ni travail en commun. C'est dans le secret qu'il entreprend.Une femme assise devant un jeu de carte, vue de profil, titrée La Patience, huile sur toile, 146 × 114 cm illustre son état d'esprit.
Pendant cette période, Braque poursuit son sujet fétiche : les instruments de musique qui n'ont cessé d'apparaître dans ses tableaux depuis 1908, parce que : l'instrument de musique, en tant qu'objet, a cette particularité qu'on peut l'animer en le touchant, voilà pourquoi j'ai toujours été attiré par les instruments de musique. 1942 est une année particulièrement féconde pour le peintre qui commence plusieurs toiles sur le thème de la musique, qu'il terminera plus tard comme L'Homme à la guitare 1942, 1942-1961, 130 × 97 cm, huile sur toile, collection particulière
Il réalise encore quelques dessins de femme dont les attitudes rappellent sa période fauve Femme à la toilette 1942, mais très vite la nature morte reprend le pas : Deux poissons dans un plat avec une cruche, 1949-1941 huile sur papier marouflé sur toile, collection particulière, inaugure une série de poissons sur fond noir Les Poissons noirs, 1942, huile sur toile 33 × 55 cm, Centre Pompidou Paris plusieurs Vanités, Le Poêle 1942, Le Cabinet de toilette, 1942, The Phillips Collection. Tous ces intérieurs rappellent que l'artiste s'est cloîtré chez lui notamment Grand intérieur à la palette, 1942, × 195,6 cm, Menil Collection, Houston. Ses toiles les plus significatives ont pour sujets des objets de la vie quotidienne, objets dérisoire, utiles à la survie, ou à la nourriture rationnée : Table de cuisine, huile sur toile, 163 × 78 cm, collection privée.
Il produit quelques silhouettes masculines sur fond sombre avant de commencer la série des Billards qu'il poursuit jusqu'en 1949. Un des plus beaux, Le Billard 1947 1947-1949, 145 × 195 cm se trouve au Musée d'art contemporain de Caracas, Venezuela. Il a été exposé au Grand Palais Paris lors de la rétrospective Georges Braque 2013, avec la mention des années où il a été achevé : 1947-1948

L'Après-guerre

Braque se tient à l'écart de l'épurationnote 15 et rejoint Varengeville. Il n'adhère pas non plus au Parti communiste français malgré les démarches répétées de Picasso et de Simone Signoret. Il se tient aussi à l'écart de Picasso dont il apprécie de moins en moins l'attitude et que Maïa Plissetskaïa qualifiera plus tard de hooligan. Il décline l'invitation à séjourner à La Californie de Cannes, choisissant plutôt d'habiter chez son nouveau marchand parisien Aimé Maeght à Saint-Paul-de-Vence. Il n'empêche que chacun des deux peintres essaie d'avoir des nouvelles de l'autre. Notamment lorsque Braque subit une opération pour un double ulcère à l'estomac, en 1945, Picasso vient le voir chaque jour, et il continue à chercher son approbation malgré son attitude distante. À partir de 1951, une sorte de réconciliation va s'amorcer. Françoise Gilot rend visite très souvent à Braque, même après sa séparation, elle lui présente son fils Claude Picasso, alors adolescent, qui ressemble tant à son père que Braque fond en larmes : le garçon est le portrait vivant de son compagnon de cordée de l'époque. La véritable nature du lien entre les deux peintres reste difficile à cerner. Selon Braque, ce n'était pas une coopération artistique mais une union dans l'indépendance.
Après une convalescence de deux ans, Braque reprend sa vigueur, et il expose au Stedelijk Museum d'Amsterdam, puis à Bruxelles au Palais des beaux-arts. En 1947, il est à la Tate Gallery de Londres. La même année, Aimé Maeght devient son nouveau marchand parisien, et publie la première édition des Cahiers G. Braque. En 1948, à la Biennale de Venise, où il a présenté la série des Billards, il reçoit le Grand Prix pour l'ensemble de son œuvre. Suit une série d'expositions en particulier au MoMA de New York, qui parachève la reconnaissance internationale de son œuvre. Paul Rosenberg lui consacre encore une nouvelle exposition dans sa galerie de New York en 1948.
" Quand quelqu'un se fait des idées, c'est qu'il s'éloigne de la vérité. S'il n'en a qu'une, c'est l'idée fixe. On l'enferme"
À partir de 1949, le peintre commence sa série des Ateliers, une suite de huit toiles sur le même thème, en état d'inachèvement perpétue. Ces toiles éternellement retouchées sont un véritable casse-tête pour la rédaction des catalogues, notamment pour le critique d'art anglais John Richardson qui a bien du mal à les dater dans son article The ateliers of Braque. Car Braque modifie sans cesse le contenu et la numérotation des toiles de cette série. Si on compare la photographie que Robert Doisneau a faite à Varengeville de l'Atelier VII 1952-1956, on s'aperçoit qu'il a été modifié, que le peintre de déplacé les objets et qu'il est devenu Atelier IX132. Le dernier état de ce tableau est présenté au Grand palais en 2013, huile sur toile 146 × 146 cm Centre Georges Pompidou.
L'oiseau dont la présence apporte une dimension nouvelle à six des huit Ateliers a fait son apparition dans Atelier IV huile sur toile, 1949 130 × 195 cm collection particulière, toutes ailes déployées il occupe un tiers de l'espace. Un des plus souvent reproduits est Atelier I, huile sur toile, 1949, 92 × 73 cm, collection particulière. Il présente un tableau dans le tableau et une grand cruche blanche en trou de serrure. Atelier VIII, est le plus frontal et plus haut en couleurs de la série, 132,1 × 196,9 cm, Fundación Masaveu, Oviedo.
L'ordre de datation des Ateliers finalement conservé pour la dernière rétrospective 2013 est celui établi par Nicole Worms de Romilly dans son Catalogue raisonné de l'œuvre de Braque, éditions Maeght, en sept volumes parus de 1959 à 1982. Les Ateliers sont présents dès janvier 1949 à la rétrospective organisée au Museum of Modern Art de New York et au Cleveland Museum of Art exposition dont Jean Cassou a rédigé le catalogue.
En 1955, le peintre et critique anglais Patrick Heron envoie à Braque, son livre The Changing Forms of Art qui décrit en particulier les Ateliers et les Billards, comme des jeux de surfaces planes desquelles naissent l'espace, combinées de lignes droites, diagonales, partiellement enfouies, jouant de la géométrie cubiste. Braque lui répond :Je me suis fait traduire quelques passages de votre livre sur la peinture que j'ai lu avec intérêt. Vous ouvrez les yeux à ceux que la critique ordinaire égare.
Paulhan note que Braque est un des très rares peintres à n'avoir pas fait son autoportrait, et il s'étonne que l'on en sache si peu sur l'homme qui a reçu à l'unanimité la légion d'honneur en tant qu'officier puis commandeur en 1951. Il accepte la gloire avec calme ... C'est maigre, je le vois bien, toutes ces anecdotes. Oui, mais c'est aussi qu'en Braque, l'homme anecdotique est assez mince. L'homme est ailleurs.
Braque était bel homme, il a été photographié par Robert Doisneau à Varengeville, dans diverses situations : à la campagne, dans son atelier aussi. Le peintre a également été portraituré par Man Ray qui l'a photographié souvent de 1922 à 1925, et dessiné par son ami Giacomett ainsi que par Henri Laurens alors qu'il avait encore la tête bandée en 1915. Il a également inspiré les photographes Mariette Lachaud, dont une exposition de quarante photographies s'est tenue à Varengeville en août 2013, et Denise Colomb, Brassaï. Braque était aussi un athlète, féru de sport et de boxe anglaise. En 1912, il appréciait sa réputation de boxeur et en 1997, le critique d'art anglais John Russell dans The New York Times rappelle sa maîtrise de la boxe anglaise
Mais le peintre était plus préoccupé par sa peinture que par son image. Je serais embarrassé de décider si Braque est l'artiste le plus inventif ou le plus divers de notre temps. Mais si le grand peintre est celui qui donne de la peinture l'idée la plus aiguë à la fois et la plus nourricière, alors, c'est Braque sans hésiter que je prends pour patron.

Les dernières années

Georges Salles, directeur des musées de France, passe commande en 1952 à Georges Braque d'une décoration pour le plafond de la salle Henry II du musée du Louvre qui date de 1938 et qui va être rénové. Le sujet choisi par le peintre : Les Oiseaux convient bien à la salle et même ceux qui étaient réticents pour mélanger art moderne et art ancien sont finalement séduits. En 1953, la décoration du plafond est inaugurée. L'artiste a réussi à transposer sur le plan monumental un thème intimiste qui lui était cher. Il a résolu le problème posé par le vaste support en utilisant de larges aplats de couleur qui donnent à l'ensemble force et simplicité. Dépité de n'avoir pas été choisi pour ce projet, Picasso prétend que Braque a copié ses colombes.
Braque produit beaucoup, mais de sa retraite de Varengeville-sur-mer, il sort très peu. Il a renoncé à la Provence. Ce sont les jeunes peintres qui viennent lui rendre visite, notamment Jean Bazaine. Mais surtout Nicolas de Staël qu'il encourage avec vigueur et dont le suicide en 1955 va beaucoup l'affecter. Nicolas de Staël avait pour Braque une admiration telle qu'il avait écrit au critique d'art et collectionneur américain David Cooper : Je vous serai toujours infiniment reconnaissant d'avoir su créer ce climat où la rhétorique de Braque reçoit la lumière d'autant mieux qu'il en refusa le grand lat, où ses tableaux en un instant d'éclair font tout naturellement le chemin de Sophocle au ton confidentiel de Baudelaire, sans insiter, et en gardant la grande voix. C'est unique. Outre cette amitié qui les lient, Staël et Braque ont quelque chose en commun dans leur démarche de peintre à cette époque là. Duncan Phillips, qui s'est entiché de Braque possède aussi dans The Phillips Collection, beaucoup d'œuvres de Staël. Le retour inattendu au paysage à tendance figurative, que Braque a opéré entre les Ateliers et les Oiseaux, est d'une certaine manière redevable à l'échange avec Staël. Ces paysages des dernières années 1957-1963 qui fascinent son ami le plus proche Alberto Giacometti, sont en majorité de petits formats de forme allongée : Marine, 1956, 26 × 65 cm, collection privée, Le Champ de colza 1956, 30 × 65 cm avec une référence évidente à Vincent van Gogh qu'il admirait. Staël a également créé des tableaux en référence à van Gogh : l'envol des Mouettes est aussi un hommage au Champ de blé aux corbeaux de Vincent van Gogh, auquel à son tour Braque rend hommage vers 1957 avec Oiseaux dans les blés, huile sur toile, 24 × 41 cm160, dans un style qui se rapproche de celui de Saël. Paysage, 1959, 21 × 73 cm, mais avec aussi de plus grands formats comme La Charrue, 1960, 84 × 195 cm et La Sarcleuse 1961 à laquelle le peintre travaillait chaque été depuis 1930 est la dernière toile de Braque. Elle est aujourd'hui au Musée d'Art Moderne de Paris au Centre Pompidou. Elle était encore posée sur le chevalet de son atelier à Varengeville le 31 août 1963 à sa mort. La campagne qu'elle présente est celle du pays de Caux entre le Havre et Dieppe, qui est austère et se termine en falaises abruptes sur la mer. La toile paraît comme un écho à la dernière toile de Vincent van Gogh, Champ de blé aux corbeaux 1890. La sérénité échappait à van Gogh, désespérément. Braque s'est efforcé de l'atteindre et il y est parvenu en effet.

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Posté le : 31/08/2014 00:08
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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