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De Montpellier
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Le 11 mai 1904 à Figueras Catalogne en Espagne naît Salvador Dali
Domingo Felipe Jacinto Dalà i Domènech, connu comme Salvador DalÃ, marquis de Dalà de Púbol, mort à 84 ans dans la même ville le 23 janvier 1989, peintre, sculpteur, graveur, scénariste et écrivain catalan du mouvement cubisme et surréalisme, de nationalité espagnole.Ses Å’uvres les plus réputées sont "La Persistance de la mémoire", "Christ de saint Jean de la Croix", "La Gare de Perpignan", "Le Torero hallucinogène" . Il est considéré comme l'un des principaux représentants du surréalisme et comme l'un des plus célèbres peintres du XXe siècle.
Influencé très jeune par l'impressionnisme, il quitta Figueras pour recevoir une éducation artistique académique à Madrid où il se lia d'amitié avec Federico GarcÃa Lorca et Luis Buñuel et chercha son style entre différents mouvements artistiques. Sur les conseils de Joan Miró, il rejoignit Paris à l'issue de ses études et intégra le groupe des surréalistes où il rencontra sa femme Gala. Il trouva son propre style à partir de 1929, année où il devint surréaliste à part entière et inventa la méthode paranoïaque-critique. Exclu de ce groupe quelques années après, il vécut la guerre d'Espagne en exil en Europe avant de quitter la France en guerre pour New York où il fit fortune et résida huit ans. À son retour en Catalogne en 1949, il opéra un virage vers le catholicisme, se rapprocha de la peinture de la Renaissance et s’inspira des évolutions scientifiques de son temps pour faire évoluer son style vers ce qu'il nomma mysticisme corpusculaire. Les thèmes qu'il aborda le plus fréquemment furent le rêve, la sexualité, le comestible, sa femme Gala et la religion. La Persistance de la mémoire est l'une de ses toiles surréalistes les plus célèbres, le Christ de saint Jean de la Croix est l'une de ses principales toiles à motif religieux. Artiste très imaginatif, il manifestait une tendance notable au narcissisme et à la mégalomanie qui lui permettaient de retenir l'attention publique mais irritaient une partie du monde de l'art qui voyait dans ce comportement une forme de publicité qui dépassait parfois son Å“uvre. Deux musées lui furent dédiés de son vivant, le Salvador Dali Museum et le théâtre-musée DalÃ. Dalà créa lui-même le second, comme une Å“uvre surréaliste à part entière. La sympathie de Dalà pour Francisco Franco, son excentricité et ses Å“uvres tardives font de l'analyse de son Å“uvre comme de sa personne des thèmes difficiles et sujets à controverses. Né en Catalogne, Salvador Dalà porte le même prénom que son père, notaire quelque peu possessif, et que son frère décédé quelques années auparavant : voilà pour le roman familial où Dalà voit la cause de certains de ses troubles psychiques, son complexe d'Å’dipe et ses obsessions morbides. Très jeune, il montre son talent de dessinateur ; Ramón Pitchot, peintre impressionniste ami de son père, frappé par son inventivité, l'encourage dans cette voie. Il suit bientôt des cours de dessin et est admis en 1921 à l'École des beaux-arts de Madrid. À la résidence des étudiants où il loge, il rencontre Luis Buñuel et Federico GarcÃa Lorca ; de cette amitié naîtront échanges littéraires et collaborations artistiques. Au cours de cette période, il assimile les apports successifs de l'art moderne avidement étudié dans les revues d'avant-garde L'Esprit nouveau ou Valori Plastici ; il alterne les manières impressionniste, divisionniste, cubiste ou encore puriste qui scandalisent ses professeurs, sans toutefois abandonner un mode de représentation plus réaliste et académique. Parallèlement à sa formation artistique, Dalà participe à l'agitation anarchiste d'alors et s'oppose à la dictature du général Miguel Primo de Rivera, activités qui lui valent d'être exclu temporairement de l'École des beaux-arts en 1923 et même emprisonné. En 1925, la galerie Dalmau de Barcelone organise sa première exposition personnelle ; l'accueil de la critique est favorable et la peinture de Dalà remarquée par ses deux compatriotes Joan Miró et Pablo Picasso. L'année suivante, Dalà rend visite à ce dernier à Paris, après un voyage aux Pays-Bas où il s'enthousiasme pour Vermeer : avant-garde et tradition, tels sont les deux pôles entre lesquels se situe désormais son Å“uvre. Important acteur de l'avant-garde littéraire et artistique catalane dans la seconde moitié des années 1920, il collabore à la revue L'Amic de les arts à partir de 1927 et signe le Manifeste anti-artistique catalan en 1928, charge violente contre la culture catalane contemporaine, jugée rétrograde et purement folklorique. Dès 1925, l'avant-garde espagnole est informée des Å“uvres et théories surréalistes par le biais de conférences, de revues et de traductions de textes ; Dalà s'y intéresse bientôt et son Å“uvre s'en ressent très nettement à partir de l'automne de 1927. Introduit par Miró dans les milieux artistiques parisiens, il s'y fait véritablement connaître en 1928 lors du tournage et de la projection du film Un chien andalou réalisé en collaboration avec Buñuel, chef-d'Å“uvre du cinéma surréaliste, décrit par Dalà comme le film de l'adolescence et de la mort, enchaînement de visions énigmatiques et violentes, traduction visuelle de fantasmes et de phobies. L'été de 1929 est décisif à plus d'un titre : Dalà peint Le Jeu lugubre collection particulière où s'affirme sa technique illusionniste et précise ; l'espace est inspiré des Å“uvres d'Yves Tanguy, mais cette influence – très nette dans des Å“uvres telles que Le miel est plus doux que le sang, 1927 localisation inconnue, ou Chair de poule inaugurale, 1928 Teatre-Museu Dalà – cède le pas aux visions personnelles de Dalà où les morphologies organiques de Joan Miró et de Jean Arp cohabitent avec des images scatologiques et sexuelles, fantasmes de pénétration et peur de la castration. Séjournant à Cadaquès, il est rejoint par Magritte, Camille Goemans, Eluard et sa femme Gala, dont il tombe amoureux. Elle le guérira de ses violentes crises nerveuses et deviendra pour le reste de sa vie son modèle et son inspiratrice. Alors s'amorce la période la plus féconde et la plus inventive de la carrière de Dalà qui se déroulera, sous les auspices du surréalisme, entre Paris, l'Espagne et les États-Unis. Dalà est sans conteste l'un des principaux animateurs et l'un des peintres les plus connus du mouvement surréaliste, figure emblématique de la peinture ultra-réaliste inspirée par les toiles de De Chirico et incarnée en outre par Tanguy et Magritte. Thuriféraire de la tradition académique européenne, admirateur inconditionnel de la « photographie conforme » d'un Vermeer ou d'un Meissonier, sa tendance au classicisme, une fois détachée de la représentation illusionniste de visions oniriques, fournira l'un des motifs de son exclusion du groupe surréaliste. Pour l'heure et jusqu'en 1929, Dalà expérimente les diverses techniques surréalistes de surgissement d'images automatisme, taches, incorporation de matériaux divers tels que le sable, mais évite de s'engager trop avant avec le groupe lui-même. Son adhésion officielle date de sa première exposition personnelle organisée à Paris par la galerie Goemans en 1929. André Breton rédige la Préface au catalogue, texte dans lequel s'affirme son admiration pour l'Å“uvre de Dalà : C'est peut-être avec DalÃ, la première fois que s'ouvrent toutes grandes les fenêtres mentales et qu'on va se sentir glisser vers la trappe du ciel fauve .... L'art de DalÃ, jusqu'à ce jour le plus hallucinatoire qu'on connaisse, constitue une véritable menace. Des êtres absolument nouveaux, visiblement mal intentionnés, viennent de se mettre en marche. C'est une joie sombre de voir comme rien n'a plus lieu sur leur passage qu'eux-mêmes et de reconnaître, à leur façon de se multiplier et de fondre, que ce sont des êtres de proie. Si l'enthousiasme de Breton est à n'en pas douter sincère, Dalà n'en arrive pas moins à point nommé dans l'histoire déjà mouvementée du surréalisme pour en regonfler les rangs clairsemés. Le groupe en effet traverse sa première crise grave, l'exclusion de Georges Bataille, Robert Desnos, Michel Leiris, Raymond Queneau entre autres, événement déclencheur de la rédaction du Second Manifeste du Surréalisme, publié en 1930 et de la fondation de la revue sécessionniste Documents. L'arrivée de Dalà dans la sphère du surréalisme, son désir de conquête de l'irrationnel apparaissent dès lors comme un nouveau souffle des plus inespérés. La démarche de DalÃ, quant à elle, n'est pas non plus dépourvue d'arrière-pensées : le Journal d'un génie le montre occupé à étudier consciencieusement, en les décortiquant jusqu'au plus petit osselet, les mots d'ordre et les thèmes surréalistes, décidé à devenir le surréaliste intégral et éventuellement à prendre ensuite la tête du mouvement ; outre cette ambition, son entrée dans le groupe lui permet de s'affirmer rapidement sur la scène parisienne. Cette part d'intérêts bien compris ne saurait masquer les réelles convergences et l'apport profond de Dalà à l'art surréaliste ; à partir de 1929, il prend part aux différentes activités du groupe, publie dans ses revues successives Le Surréalisme au service de la révolution et Minotaure et illustre des ouvrages de ses principaux écrivains et poètes en particulier des recueils d'André Breton et de Paul Eluard, ainsi que Les Chants de Maldoror de Lautréamont. Dalà est sans conteste l'un des principaux animateurs et l'un des peintres les plus connus du mouvement surréaliste, figure emblématique de la peinture ultra-réaliste inspirée par les toiles de De Chirico et incarnée en outre par Tanguy et Magritte. Thuriféraire de la tradition académique européenne, admirateur inconditionnel de la photographie conforme d'un Vermeer ou d'un Meissonier, sa tendance au classicisme, une fois détachée de la représentation illusionniste de visions oniriques, fournira l'un des motifs de son exclusion du groupe surréaliste. Pour l'heure et jusqu'en 1929, Dalà expérimente les diverses techniques surréalistes de surgissement d'images automatisme, taches, incorporation de matériaux divers tels que le sable, mais évite de s'engager trop avant avec le groupe lui-même. Son adhésion officielle date de sa première exposition personnelle organisée à Paris par la galerie Goemans en 1929. André Breton rédige la Préface au catalogue, texte dans lequel s'affirme son admiration pour l'Å“uvre de Dalà : C'est peut-être avec DalÃ, la première fois que s'ouvrent toutes grandes les fenêtres mentales et qu'on va se sentir glisser vers la trappe du ciel fauve .... L'art de DalÃ, jusqu'à ce jour le plus hallucinatoire qu'on connaisse, constitue une véritable menace. Des êtres absolument nouveaux, visiblement mal intentionnés, viennent de se mettre en marche. C'est une joie sombre de voir comme rien n'a plus lieu sur leur passage qu'eux-mêmes et de reconnaître, à leur façon de se multiplier et de fondre, que ce sont des êtres de proie. Si l'enthousiasme de Breton est à n'en pas douter sincère, Dalà n'en arrive pas moins à point nommé dans l'histoire déjà mouvementée du surréalisme pour en regonfler les rangs clairsemés. Le groupe en effet traverse sa première crise grave, l'exclusion de Georges Bataille, Robert Desnos, Michel Leiris, Raymond Queneau entre autres, événement déclencheur de la rédaction du Second Manifeste du Surréalisme publié en 1930 et de la fondation de la revue sécessionniste Documents. L'arrivée de Dalà dans la sphère du surréalisme, son désir de conquête de l'irrationnel apparaissent dès lors comme un nouveau souffle des plus inespérés. La démarche de DalÃ, quant à elle, n'est pas non plus dépourvue d'arrière-pensées : le Journal d'un génie le montre occupé à étudier consciencieusement, en les décortiquant jusqu'au plus petit osselet, les mots d'ordre et les thèmes surréalistes, décidé à devenir le surréaliste intégral et éventuellement à prendre ensuite la tête du mouvement ; outre cette ambition, son entrée dans le groupe lui permet de s'affirmer rapidement sur la scène parisienne. Cette part d'intérêts bien compris ne saurait masquer les réelles convergences et l'apport profond de Dalà à l'art surréaliste ; à partir de 1929, il prend part aux différentes activités du groupe, publie dans ses revues successives Le Surréalisme au service de la révolution et Minotaure et illustre des ouvrages de ses principaux écrivains et poètes en particulier des recueils d'André Breton et de Paul Eluard, ainsi que Les Chants de Maldoror de Lautréamont.
Sa vie - Enfance
Salvador Dalà naquit au 20 rue Monturiol à Figueras le 11 mai 1904. Cette région, l'Empordà , avec le port de Cadaqués servit de toile de fond, de portant et de rideau de scène à son œuvre. Son père, Salvador Dalà y Cusi 1872 – 1952 était notaire. Sa mère se nommait Felipa Domènech Ferrés y Born 1874 – 1921. Il naquit 9 mois après le décès de son frère, également nommé Salvador 1901 – 1903, décès survenu à la suite d'une gastro-entérite infectieuse. Alors qu'il avait cinq ans, ses parents l’emmenèrent sur la tombe de son frère et lui dirent – selon ce qu'il rapporta – qu'il en était la réincarnation. Cette scène aurait fait naître en lui le désir de prouver son unicité dans le monde, le sentiment d'être la copie de son frère, ainsi qu'une crainte du tombeau de son frère. "Je naquis double. Mon frère, premier essai de moi-même, génie extrême et donc non viable, avait tout de même vécu sept ans avant que les circuits accélérés de son cerveau ne prennent feu " Son père est décrit comme autoritaire ou plutôt libéral selon les sources. Quoi qu'il en soit, il accepta sans trop de mal que son fils embrassât la carrière des arts, encouragé par le renouveau artistique de la Catalogne du début de siècle. Sa mère compensait un peu ce caractère autoritaire, appuyait l'intérêt artistique de son fils, tolérait ses colères, son énurésie, ses rêves et ses mensonges.
"À l'âge de six ans, je voulais devenir cuisinière. À sept ans, je voulais devenir Napoléon. Depuis mon ambition n'a cessé de grandir".
Dalà eut également une sœur, Ana Maria, de quatre ans plus jeune que lui. En 1949 elle publia un livre sur son frère, Dalà vu par sa sœur. Durant son enfance, Dalà se lia d'amitié avec de futurs joueurs du F.C. Barcelone, comme Emilio Sagi-Barba ou Josep Samitier. Pendant les vacances, le trio jouait au football à Cadaqués. En 1916, il découvrit la peinture contemporaine lors d'une visite de famille à Cadaqués où il connut la famille du peintre impressionniste Ramón Pichot, un artiste local qui voyageait régulièrement à Paris, capitale de l'art de l'époque. Sur les conseils de Pichot, son père l'envoya prendre des cours de peinture auprès de Juan Núñez à l'école municipale de gravure. L'année suivante son père organisa une exposition de ses dessins au crayon à la maison de famille. À quatorze ans 1919, Dalà participa à une exposition collective d'artistes locaux au théâtre municipal de Figueras où plusieurs de ses toiles furent remarquées par deux critiques célèbres : Carlos Costa et Puig Pujades. Il prit également part à une seconde exposition collective à Barcelone parrainée par l'Université et où il reçut le prix du Recteur. L'influence impressionniste se note clairement dans les toiles de Dalà jusqu'en 1919. Il les réalisa pour la plupart à Cadaqués en s'inspirant du village et de ses scènes de la vie quotidienne.
À la fin de la Première Guerre mondiale, il rejoignit un groupe d'anarchistes et misa sur le développement de la révolution marxiste. L'année suivante, en 1919, alors qu'il était en terminale à l'institut Ramón Muntaner, il édita avec plusieurs de ses amis une revue mensuelle Studium qui présentait des illustrations, des textes poétiques et une série d'articles sur des peintres comme Goya, Velázquez et Léonard de Vinci. En 1921, il fonda avec des amis le groupe socialiste Renovació social. En février 1921 sa mère mourut d'un cancer de l'utérus. Dalà avait alors 16 ans. Il affirma plus tard que ce fut le coup le plus dur que je reçus dans ma vie. Je l'adorais. Je ne pouvais pas me résigner à la perte d'un être avec qui je comptais faire invisibles les inévitables tâches de mon âme. Après sa mort, le père de Dalà se remaria avec la sœur de la défunte, ce que Dalà n'accepta jamais. Il obtint son baccalauréat en 1920 Jeunesse à Madrid
En 1922 Dalà s'installa dans la célèbre résidence d'étudiants de Madrid pour commencer ses études à l'Académie royale des beaux-arts de San Fernando8. Il attira immédiatement l'attention à cause de son caractère excentrique de dandy. Il portait une longue chevelure à favoris, une gabardine, de hautes chaussettes épaisses de style victorien. Cependant, ce furent ses peintures, que Dalà teintait de cubisme, qui attirèrent le plus l'attention de ses camarades de résidence, notamment ceux qui devinrent des figures de l'art espagnol : Federico GarcÃa Lorca, PepÃn Bello, Pedro Garfias, Eugenio Montes, Luis Buñuel, Rafael Barradas et plus généralement la génération de 27. À cette époque, cependant, il est possible que Dalà n'eût pas compris complètement les principes cubistes. En effet, ses uniques sources étaient des articles publiés par la presse – L'Esprit Nouveau – et un catalogue que lui avait donné Pichot puisqu'il n'y avait pas de peintres cubistes à Madrid à cette époque. Si ses professeurs étaient ouverts à la nouveauté, ils se trouvaient en retard sur l'élève : ils adaptaient l'impressionnisme français aux thèmes hispaniques, approche que Dalà avait dépassé l'année précédente. Dalà se consacra avec Lorca et Buñuel à l'étude des textes psychanalytiques de Sigmund Freud. Il considérait la psychanalyse comme l'une des découvertes les plus importantes de sa vie. Accusé à tort de diriger un mouvement d'agitation en Catalogne, il fut expulsé en 1923 de l’académie et emprisonné du 21 mai au 11 juin. La raison de son arrestation semble être liée à la plainte pour fraude électorale déposée par le père de Dalà à la suite du coup d'état de Primo de Rivera. Dalà retourna à l'académie l'année suivante. Dans leurs blancs studios, les peintres modernes coupent les fleurs aseptiques de la racine carrée... Federico Garcia Lorca, Ode à S. DalÃ
En 1924, toujours inconnu, Salvador Dalà illustra un livre pour la première fois. C'était une publication du poème en catalan Les Bruixes de Llers Les sorcières de Llers d'un de ses amis de la résidence, le poète Carles Fages de Climent. Dalà se familiarisa rapidement avec le dadaïsme, influence qui le marqua pour le reste de sa vie. Dans la résidence, il refusa les avances amoureuses du jeune Lorca qui lui dédia plusieurs poèmes :
Salvador Dalà : " Il était homosexuel, ça, tout le monde le sait, et il était fou amoureux de moi. Il essaya de s'approcher de moi quelques fois… et moi, j'étais très gêné, parce que je n'étais pas homosexuel, et que je n'étais pas disposé à céder. …"
Alain Bosquet
Les deux artistes devinrent amis. Il est probable que chacun des jeunes hommes trouva en l'autre une passion de découverte esthétique correspondant à ses propres désirs. Les demandes de l'écrivain se firent à un tournant de l'Å“uvre de Dalà qui les ressentit comme un écho à ses recherches sur l'inconscient. Compte tenu des affabulations de DalÃ, on ne saura sans doute jamais quelles furent leurs relations alors que les deux artistes faisaient amoureusement le portrait l'un de l'autre. Les toiles de cette époque sont marquées par l'onanisme du peintre qui affirma être resté vierge avant sa rencontre avec Gala. Dalà reçut la visite de Federico Garcia Lorca en novembre 1925 à Cadaqués, puis, cette même année, Dalà réalisa sa première exposition personnelle à Barcelone à la Galerie Dalmau où il présenta Portrait du père de l'artiste et Jeune fille debout à la fenêtre. La même galerie exposa fin 1926 d'autres Å“uvres de DalÃ, et notamment La Corbeille de pain peinte durant l'année. Ce fut la première toile de l'artiste présentée hors d'Espagne, en 1928, lors de l'exposition Carnegie de Pittsburgh. Sa maîtrise des moyens picturaux se reflète impeccablement dans cette Å“uvre réaliste. Les premières critiques barcelonaises furent chaleureuses. Pour l'une d'elles, si cet enfant de Figueras tourna son visage vers la France C'est parce qu'il peut le faire, parce que ses dons de peintre que Dieu lui a donné doivent fermenter. Qu'importe si Dalà pour aviver le feu se sert du crayon à mine de plomb d'Ingres ou du gros bois des Å“uvres cubistes de Picasso Propos rapportés par Robert Descharnes et Gilles Néret Dalà fut par la suite expulsé de l'Académie en octobre 1926, peu avant ses examens finaux, pour avoir affirmé que personne n'était en condition de l'examiner.
Paris, mariage avec Gala
En 1927, probablement en début d'année, Dalà visita Paris pour la première fois, muni de deux lettres de recommandation destinées à Max Jacob et à André Breton. D'après lui, ce voyage fut marqué par trois visites importantes, Versailles, le musée Grévin et Picasso que le jeune Dalà admirait profondément. Picasso avait déjà reçu des commentaires élogieux sur Dalà de la part de Joan Miró :
" ...Picasso est espagnol, moi aussi. Picasso est un génie, moi aussi. Picasso est communiste, moi non plus"
Pablo Picasso avait 23 ans de plus que lui. Dalà raconta que lors de cette rencontre, il lui montra une de ses petites toiles, La Fille de Figueras que Picasso contempla pendant un quart d'heure, puis Picasso en fit autant avec quantité des siennes, sans un mot. Il ajouta qu'au moment de se quitter, sur le pas de la porte, nous échangeâmes un regard qui disait : Compris ? — Compris ! . Picasso resta une référence constante pour DalÃ, admiré et rival. Dans son Analyse dalinienne des valeurs comparées des grands peintres, il lui attribua 20/20 à la catégorie génie, à égalité avec Léonard de Vinci, Vélasquez, Raphaël et Vermeer alors qu'il ne s'attribua que 19/2037. À la fin de sa vie, il se permit d'être plus critique sur la peinture de Picasso : Picasso refuse la légitimité ; il ne prend pas la peine de corriger, et ses tableaux ont de plus en plus de jambes, tous ses hâtifs repentirs sortent avec le temps ; il s'est fié au hasard ; le hasard se venge. Ils restèrent en contact durant toute leur vie. Avec le temps, Dalà développa un style propre et se transforma à son tour en une référence et en un facteur influent de la peinture de ces peintres. Certaines caractéristiques de la peinture de Dalà de cette époque se convertirent en marques distinctives de son Å“uvre. Il absorbait les influences de divers courants artistiques, depuis l'académisme et le classicisme, jusqu'aux avant-gardes. Ses influences classiques passaient par Raphaël, Bronzino, Zurbarán, Vermeer et évidemment Velázquez dont il adopta la moustache en croc et qui devint emblématique. Il alternait les techniques traditionnelles et les méthodes contemporaines, parfois dans la même Å“uvre. Les expositions de cette époque attirèrent une grande attention, suscitèrent des débats et divisèrent les critiques. Sa jeune sÅ“ur Anna-Maria lui servit souvent de modèle à cette époque, posant souvent de dos, devant une fenêtre. En 1927, DalÃ, âgé de 23 ans, atteignit sa maturité artistique. Cette évidence transparaît dans ses Å“uvres Le Miel est plus doux que le sang et Chair de poule inaugurale, la première inspirée par sa relation avec Lorca et la seconde par sa première rencontre intime avec Gala. Quelques mois plus tard, Luis Buñuel se rendit à Figueras où les deux amis écrivirent le scénario du film surréaliste Un chien andalou avant que Dalà ne retournât à Paris en 1928 accompagné d'un autre catalan, Joan Miró. Pour Robert Descharnes et Gilles Néret, le film lança Dalà et Buñuel comme une fusée. C'était pour le peintre, un poignard en plein cÅ“ur du Paris spirituel, élégant et cultivé, ajoutant que le film avait été ovationné par un public abruti qui applaudit tout ce qui lui semble nouveau et bizarre . À la suite de la visite à l'été 1929 de René Magritte et Paul Éluard à Cadaqués, et sur les conseils de Joan Miró, Dalà allait adhérer au surréalisme. De retour à Paris il commença donc à fréquenter le groupe des surréalistes constitué de Hans Arp, André Breton, Max Ernst, Yves Tanguy, René Magritte, Man Ray, Tristan Tzara et de Paul Éluard et son épouse Helena surnommée par tous Gala. Née sous le nom d'Elena Ivanovna Diakonova, c'était une migrante russe dont Dalà tomba amoureux et qui fut séduite par cet homme de dix ans plus jeune qu'elle. Bien que Dalà eût allégué être complètement impuissant et vierge, son Å“uvre reflète son obsession sexuelle. Il représenta notamment le désir sous la forme de têtes de lions. Gala était sa muse. Elle lui tenait lieu de famille, organisait ses expositions et vendait ses toiles. En décembre, en raison de sa liaison avec Gala — femme mariée —, Salvador Dalà se brouilla profondément avec son père et sa sÅ“ur Anna-Maria. La légende d'une gravure mal interprétée complète le tableau d'un fils en rupture avec sa famille. Le critique d'art Eugenio d'Ors aurait rapporté dans un journal barcelonais, que Dalà aurait montré au groupe des surréalistes une chromo représentant le Sacré-CÅ“ur sur lequel était écrit parfois, je crache par plaisir sur le portrait de ma mère, provoquant l'ire de son père et obligeant Dalà à partir. Gala et lui passèrent les années 1930 à 1932 à Paris. Les premiers mois furent pourtant difficiles, ses toiles se vendaient mal et le couple vivait de peu. Mais le peintre se fit connaître à Paris où il fréquentait autant les dîners mondains que les cercles surréalistes. En 1930, ne pouvant s'installer à Cadaqués en raison de l'hostilité paternelle, Dalà et Gala achetèrent une minuscule maison de pêcheur à quelques centaines de mètres de Cadaqués, au bord de la mer, dans la petite crique de Portlligat. Au fil des ans, la fortune aidant, il transforma sa propriété en une fastueuse villa aujourd'hui convertie en musée. Le paysage sur la petite crique devint une référence picturale permanente dans l'Å“uvre du peintre qui affirma : Je ne suis chez moi qu'ici, partout ailleurs, je ne suis que de passage. Gala et Dalà se marièrent civilement en 1934 avant de se marier religieusement en 1958. En 1931 Dalà peignit l'une de ses toiles les plus célèbres, La Persistance de la mémoire, également connue sous le nom des montres molles, qui selon certaines théories illustre son refus du temps comme entité rigide ou déterministe. DalÃ, dans un pathétique désir d'éternité fait du temps de la montre, c'est-à -dire du temps mécanique de la civilisation, une matière molle, ductile qui peut aussi être mangée à la manière d'un camembert coulant. Cette idée est développée par d'autres figures de l'Å“uvre comme l'ample paysage ou certaines montres à gousset dévorées par des insectes. D'autre part, les insectes feraient partie de l'imaginaire dalinien comme entité destructrice naturelle et, comme le peintre l'explique dans ses mémoires, seraient des réminiscences de son enfance.
Dalà et le groupe des surréalistes
Dalà continuait d'exposer régulièrement et rejoignit officiellement le groupe des surréalistes dans le quartier parisien de Montparnasse. Durant les deux années suivantes, son travail influença fortement le cercle des surréalistes, qui l'acclama en tant que créateur de la méthode paranoïaque-critique, qui, selon ce qui s'en disait, permettait d'accéder au subconscient, libérant les énergies artistiques créatrices. C'est, d'après le peintre, une méthode spontanée de connaissance irrationnelle basée sur l’objectivation critique et systématique des associations et interprétations délirantes. Breton rendit hommage à cette découverte qui venait de doter ...le Surréalisme d'un instrument de tout premier ordre en l'espèce la méthode paranoïaque critique qu'il s'est montré d'emblée capable d'appliquer à la peinture, à la poésie, au cinéma, à la construction d'objets surréalistes typiques, à la mode, à la sculpture, à l'histoire de l'art et même le cas échéant, à toute espèce d'exégèse
— André Breton
À cette époque, Dalà délaissa temporairement ses travaux autour des images à double sens telles que l'Homme invisible tandis que les figures de Guillaume Tell, Lénine, les paysages et figures anthropomorphes, l'Angélus de Millet, Vermeer et Hitler apparurent systématiquement dans ses toiles. Une activité marquante de cette époque fut la réalisation avec le sculpteur Giacometti d'objets surréalistes. Selon DalÃ, ils sont dotés d'un minimum de fonctionnement mécanique, et sont basés sur les fantasmes et les représentations susceptibles d'être provoqués par la réalisation d'actes inconscients. Il restait hermétique aux problèmes des surréalistes avec la politique, une anecdote de l'histoire selon lui. Il agaçait le groupe en étudiant systématiquement Hitler et la croix gammée vieille comme le soleil chinois, qui réclame l'honneur de l'objet.Si les divergences politiques éloignaient peu à peu André Breton et Louis Aragon, celles provoquées par Dalà furent sans commune mesure. Pour André Thirion, Dalà n'était pas marxiste et s'en foutait, mais entre les rêveries érotiques de Dalà envers des fillettes de 12 ans qui firent réagir jusqu'au comité central du parti communiste, et son obsession pour la figure d'Hitler durant deux années, le peintre fut convoqué en janvier 1934 chez Breton où il se présenta vêtu en malade, avec un chandail et un thermomètre dans la bouche. Une fois l'accusation de Breton terminée, il lut sa plaidoirie en faisant un strip-tease, affirmant en langage fleuri, qu'il ne faisait que retranscrire ses rêves — particuliers — et que, en conséquence de ses rêves, Breton et lui feraient bientôt l'objet d'une représentation homosexuelle. Il fut exclu à l'issue de cette réunion. Dalà continua cependant à travailler avec le groupe, qui en avait besoin, notamment en tant qu'agent publicitaire, à Londres en 1936 en tenue de scaphandrier, à Paris en février 1938 où il montrait son Taxi pluvieux où deux mannequins recevaient la pluie entre salades et escargots de Bourgogne. Fin 1933, leur marchand d'art Julien Levy exposa 25 Å“uvres de Dalà à New York. Dalà mourait d'envie d'aller voir les États-Unis. Les Å“uvres de Picasso y étaient déjà exposées contrairement aux musées français. Il se laissa facilement convaincre par une riche Américaine, Caresse Crosby d'entreprendre le voyage. Dalà et Gala se rendirent pour la première fois à New York en 1934 ; Picasso avança l'argent pour leurs billets. Les Américains furent subjugués par l'excentricité du personnage et les audaces d'un surréalisme qu'ils ne connaissaient alors presque pas. Au grand désespoir de Breton, Dalà était considéré comme le seul surréaliste authentique, ce que le peintre triomphant et ivre de mégalomanie, s'empressa de confirmer le 14 novembre à New York les critiques distinguent déjà le Surréalisme avant ou après DalÃ. L'exposition à la Galerie Julien Levy eut un franc succès et Dalà comprit que sa réussite passait par les États-Unis. Sa peinture commençait à être appréciée. Edward James — filleul du roi Édouard VII — devint son mécène et lui racheta toute sa production de 1935 à 1936. La Métamorphose de Narcisse et Cannibalisme de l'automne font partie des plus célèbres toiles de cette période.
Guerre d'Espagne
Déclaration d'indépendance de l'imagination des droits de l'homme à sa propre folie Quand, dans l'histoire de la culture humaine, un peuple éprouve la nécessité de détruire les liens intellectuels qui l'unissaient aux systèmes logiques du passé afin de créer pour son propre usage une mythologie originale, mythologie qui, correspondant parfaitement à l'essence et à la pression totale de sa réalité biologique, est reconnue par les esprits d'élite des autres peuples, alors l'opinion publique de la société pragmatique exige par égard pour elle que soient exposés les motifs de la rupture avec les formules traditionnelles éculées De retour en Catalogne, Dalà et Gala quittèrent Portlligat en 1936 pour fuir la guerre civile espagnole et voyagèrent en Europe. Ils vécurent un temps en Italie fasciste où il s'inspira des Å“uvres romaines et florentines de la Renaissance, notamment pour réaliser des images doubles telles que Espagne61. Ses toiles Construction molle aux haricots bouillis également connue sous le nom de Prémonition de la guerre civile et la Girafe en feu furent les plus représentatives de cette période qui vit l'invention de ces monstres. Ceux-ci reflètent sa vision de la guerre mais non son attitude politique. Il représenta la guerre civile comme un phénomène d'histoire naturelle, une catastrophe naturelle et non un évènement politique comme Picasso avait pu le faire avec Guernica. Ce fut à Londres qu'il apprit le meurtre de son ami Federico GarcÃa Lorca le 19 août 1936 à Grenade par un franquiste, le faisant tomber dans une profonde dépression. Durant son second voyage aux États-Unis, la presse et le public firent un accueil triomphal à Mr Surrealism. Le portrait de Dalà par le photographe Man Ray fit la Une en décembre 1936 du magazine Time. En février 1937, Dalà rencontra à Hollywood les Marx Brothers et fit un portrait de Harpo Marx, agrémenté de cuillères, harpes et fils de fer barbelés. Le film qu'ils projetaient ne vit pas le jour. En 1938, par l'intermédiaire de Edward James ainsi que celle de son ami Stefan Zweig, Dalà rencontra à Londres Sigmund Freud qu'il admirait depuis longtemps et dont les travaux avaient inspiré ses propres recherches picturales sur les rêves et l'inconscient D'après le récit qu'en fit Conroy Maddox, Freud âgé confia à Zweig en cette occasion à propos de Dalà :
" Je n'ai jamais vu un spécimen d'espagnol plus parfait ; quel fanatique ! " — Conroy Maddox Dalà publia en 1939 une Déclaration d'indépendance de l'imagination et des droits de l'homme à sa propre folie66. Ses pérégrinations européennes l'emmenèrent en exil pendant 5 mois à partir de septembre 1938 dans la villa de Coco Chanel, La Pausanote 8,61 où il prépara l'exposition de New York à la galerie Julien Levy. Il détruisit à cette occasion en 1939 une œuvre qu'il avait créée et qui avait été modifiée sans son accord dans un magasin de la cinquième Avenue
New York
Lors de l'entrée en guerre de la France en 1939, Dalà et Gala étaient à Paris qu'ils quittèrent pour Arcachon. Peu avant l'invasion allemande, ils partirent en Espagne puis au Portugal. Dalà qui avait fait un détour par Figueras pour voir sa famille, rejoignit Gala à Lisbonne d'où ils embarquèrent pour New York. Ils y résidèrent durant huit ans. Dalà s'intégra parfaitement à la haute société new yorkaise, peignit de nombreux portraits de riches Américains – Helena Rubinstein – participa activement à la vie théâtrale avec de grandes peintures murales, réalisa ses premiers bijoux, et s'intéressa au cinéma, en particulier aux Marx Brothers, à Walt Disney, à Alfred Hitchcock. Après ce déménagement, il chercha également la foi catholique et à rapprocher sa peinture du classicisme ce qu'il ne fit effectivement qu'à partir de 1945.
En 1941 Dalà envoya un script de cinéma à Jean Gabin Moontide La Péniche de l'amour. À la fin de cette année, la première rétrospective de Dalà fut exposée par le Museum of Modern Art. Ces soixante Å“uvres – 43 huiles et 17 dessins – parcoururent les États-Unis durant les deux années suivantes. Les huit plus grandes villes accueillirent l'exposition, assurant la notoriété du peintre et bientôt, les propositions commerciales se multiplièrent. S'il n'en accepta que certaines, elles lui permirent d'amasser une fortune certaine qui inspira à Breton l'anagramme féroce Salvador Dalà – Avida Dollars. Robert et Nicolas Descharnes expliquent que durant cette période Dalà n'arrêta jamais d'écrire. En 1942, il publia son autobiographie La Vie secrète de Salvador DalÃ. Il écrivit régulièrement pour les catalogues de ses expositions comme celle organisée par Knoedler Gallery en 1943. Il y exposait que le surréalisme aura servi au moins pour donner des preuves expérimentales de la totale stérilité des essais pour automatise sont allés trop loin et ont généré un système totalitaire ... La paresse contemporaine et le manque de technique ont atteint leurs paroxysmes dans la signification psychologique de l'utilisation actuelle de l'institution universitaire. Il écrivit également un roman publié en 1944, sur un salon de mode pour automobiles, qui inspira une caricature d'Erdwin Cox pour The Miami Herald, où Dalà porte une automobile comme costume de fête. Durant ces années, Dalà réalisa des illustrations pour des éditions anglophones de classiques tels que Don Quichotte, l'autobiographie de Benvenuto Cellini et les essais de Michel de Montaigne. Il fit également les décors pour le film Spellbound de Alfred Hitchcock, et entreprit avec Walt Disney la réalisation du dessin animé Destin, inachevé et qui fut monté en 2003 longtemps après la mort de ses auteurs. Ce fut une époque des plus prolifiques de sa vie, mais qui est discutée par certains critiques pour qui Dalà troublait la frontière entre art et biens de consommation, en délaissant la peinture pour se consacrer au design et aux articles commerciaux. Les peintures de cette période furent inspirées par les souvenirs de la Catalogne par leurs couleurs et leurs espaces, dans lesquels le peintre représenta des sujets d'Amérique. À ce titre, la toile Poésie d'Amérique, fut visionnaire. Elle réunit en une Å“uvre la ségrégation noire, la passion américaine pour le rugby, et l'irruption d'une marque dans une Å“uvre d'art : Coca-Cola. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, il ne revint pas immédiatement en Europe. Il effectua son virage vers le classicisme en 1945 sans se couper du reste du monde. Les bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki lui inspirèrent Idylle atomique et uranique mélancolique et Trois sphinx en Bikini. L'abandon du Dalà de la psychanalyse pour le Dalà de la physique nucléaire ne lui permit pas d'effectuer immédiatement son rapprochement vers le catholicisme. La peinture de cette époque empruntait aux classiques les rapports géométriques – le nombre d'or ou divine proportion. Ce fut notamment le cas avec Leda atomica.
Retour en Catalogne ...L'unique différence entre un fou et moi, c'est que moi, je ne suis pas fou...
À partir de 1949, les Dalà revinrent vivre en Catalogne sous la dictature franquiste et passaient leurs hivers à Paris dans une suite de l'hôtel Meurice. Il décupla sa virtuosité technique, intensifia son intérêt pour les effets optiques mais surtout réalisa son retour à la foi catholique. Il fut reçu en audience privée le 23 novembre 1949 par le pape Pie XII. Ses recherches sur les proportions classiques le menèrent à sublimer toutes les expériences révolutionnaires de son adolescence dans la grande tradition mystique et réaliste de l'Espagne. Cette conversion prit notamment la forme de deux toiles La Madone de Port Lligat 1949 et le Christ de saint Jean de la Croix 1951 qui furent complétées d'illustrations pour La Divine Comédie 1952, aquarelles. Il avait alors déjà publié son manifeste mystique où il expliquait les tenants et aboutissants de son mysticisme nucléaire, et signé ses premières toiles corpusculaires dont la toile Galatée aux sphères est une représentante. Il lia catholicisme et physique des particules en expliquant les Élévations — de la Vierge, de Jésus — par la force des anges, dont les protons et neutrons seraient des vecteurs, des éléments angéliques. Il lia la corne de rhinocéros à la chasteté, à la Vierge Marie et à La Dentellière de Vermeer dans un raisonnement mêlant la géométrie divine de la spirale logarithmique, la corne l'animal et la construction corpusculaire de la plus violente rigueur de la toile du maître hollandais. Il peignit de nombreux sujets composés de cet appendice. Le 17 décembre 1955, il exposa ces idées à la Sorbonne lors de sa conférence Aspects phénoménologiques de la méthode paranoïaque-critique. Il se rendit à l'université dans une Rolls-Royce jaune et noire, remplie de choux-fleurs qu'il distribua en guise d'autographes. Opposant dans sa présentation la France et l'Espagne, le premier étant selon lui le pays le plus rationnel au monde et le second le plus irrationnel, il démontra au cours de cette conférence l'unicité de l'arrière-train du pachyderme avec un tournesol, l'ensemble étant lié à la célèbre dentellière et aux corpuscules de la physique atomique. En 1959, André Breton organisa une exposition nommée Hommage au surréalisme pour célébrer le quarantième anniversaire de ce mouvement. Cette exposition rassembla des Å“uvres de DalÃ, Joan Miró, Enrique Tábara et Eugenio Granell. Breton s'opposa fermement à l'inclusion de la Madone Sixtine de Dalà à l'exposition surréaliste internationale de New York l'année suivante. Selon Robert Descharnes, le comportement de Dalà à cette époque fut une réaction à sa célébrité pour protéger sa créativité. Si Picasso, pour les mêmes raisons s'était réfugié dans le château de Vauvenargues, DalÃ, incapable de se taire, commentait les phénomènes, découvertes et événements de son époque et le mélange résultant n'était pas toujours du meilleur goût. Semant la confusion chez les critiques, il laissait aux médias grand public le soin d'analyser ses moustaches et de se concentrer sur quelques-unes de ses toiles telles le Christ de Saint Jean de la Croix. Cette attitude fit dire à l'expert du surréalisme de Sotheby's Andrew Strauss
Dalà a travaillé à la construction de sa popularité à l'échelle mondiale. Il a précédé Andy Warhol dans cette stratégie du culte de l'artiste star. Dalà s'intéressa aux nouvelles découvertes scientifiques de son époque. Il se fascina pour l'ADN et le tesseract, un hypercube en quatre dimensions. Son tableau Corpus hypercubus 1954 représente Jésus-Christ crucifié sur le patron d'une telle hyperfigure où il chercha à créer une synthèse de l'iconographie chrétienne et d'images de désintégrations inspirées par la physique nucléaire. Artiste expérimenté, Dalà ne se confinait pas à la peinture. Il resta très attentif à toutes les évolutions de la peinture post-surréaliste, y compris les formes qui en étaient totalement détachées. Il expérimenta de nombreux médias et procédés nouveaux ou innovants, telles que les peintures par projection ou l'holographie, technique dont il fut l'un des pionniers. Nombre de ses Å“uvres incorporaient des illusions d'optiques, des calembours visuels, des trompe-l'Å“il. Il expérimenta aussi le pointillisme, le halftoning réseau de points semblables à ceux utilisés dans l'impression et les images stéréoscopiques. Il fut un des premiers à utiliser l'holographie dans l'art. De jeunes artistes comme Andy Warhol proclamèrent que Dalà avait une influence importante sur le pop art. Découverte en gare de Perpignan Perpinyà , Dalà se passionna à la fin de sa carrière à peindre des images doubles à l'effet stéréoscopique qui sont difficilement accessibles à la reproduction. Nombre d'entre elles sont exposées au musée Dalà de Figueras Athènes brûle !. Dalà avait un sol en verre dans une pièce près de son atelier. Il s'en servit beaucoup pour étudier le raccourci, vu d'en bas comme d'en haut, pour incorporer des personnages et des objets très expressifs dans ses peintures. Il aimait aussi s'en servir pour amuser ses amis et ses invités. Les revenus de Dalà et de Gala leur permettaient de mener une vie de luxe. Dès 1960, ils embauchèrent le gestionnaire John Peter Moore. Son successeur, Enrique Sabater expliquait Dalà gagnait plus que le président des États-Unis. À cette époque, Salvador Dalà et Gala commencèrent à se séparer. En 1965 Dalà fit la connaissance d'Amanda Lear qui fut alors présentée comme un transsexuel. Amanda Lear prit des cours de peinture auprès de DalÃ, lui servit de modèle et devint son égérie. En 1969, Gala Dalà acquit le vieux château à Púbol, près de Figueras, qu'elle restaura et qui abrite la Fondation Gala-Salvador DalÃ.
Œuvres historiques et stéréoscopiques
Les peintures de petit format des années précédentes firent place à partir de 1958 à des œuvres de monumentales sur des sujets historiques comme la bataille de Tétouan 1962, 308 × 406 cm. Le tableau représente la conquête espagnole de Tétouan au Maroc en 1860. Dalà peignit une peinture de grand format chaque anné telle que La Découverte des Amériques par Christophe Colomb 1959. Les derniers chefs-d'œuvre de cette période furent La Gare de Perpignan 1965, Le Torero hallucinogène 1968-1970 et la Pêche au thon 1966/67. De 1966 à 1973 Dalà travailla sur une commande pour une édition de luxe d'Alice au pays des merveilles. Il s'intéressa à améliorer la représentation de la troisième dimension au-delà de la perspective classique. Selon le peintre, le 17 novembre 1964 eut lieu le moment le plus rassurant de toute l'histoire de la peinture, lorsque le peintre découvrit au centre de la gare de Perpignan, la possibilité de peindre à l'huile la véritable troisième dimension en faisant appel à la stéréoscopie. La découverte de l'holographie lui permit d'aborder la quatrième dimension le temps, technique qu'il utilisa à partir des années 1970, afin d'obtenir l'immortalité des images enregistrées holographiquement grâce à la lumière du provisoire laser. En 1969 il peignit ses premiers plafonds et il se concentra à partir de l'année suivante sur des images stéréoscopiques. Ses toiles holographiques les plus connues datent de 1972. Les premiers hologrammes furent présentés à la galerie Knoedler à New York en avril 1972.
Théâtre musée
En 1960, Dalà commença à travailler sur son théâtre-musée, dans sa ville de Figueras. C'était son plus grand projet. Il y consacra la plus grande partie de son énergie jusqu'en 1974. Il continua à le développer jusqu'au milieu des années 1980. Avec l'accord du maire Ramon Guardiola, il choisit les ruines du théâtre de Figueras incendié lors de la guerre civile espagnole, où il avait réalisé sa première exposition en 1914. Les fonds pour la rénovation furent avancés par l'état espagnol en 1970. Le dôme de verre de forme byzantine fut conçu par l'architecte Emilio Pérez Piñero à la demande de Dalà qui rêvait d'un dôme vitré dans le style de l'architecte américain Buckminster Fuller. Dalà conçut lui-même une grande partie du musée, depuis les œufs monumentaux qui ornent les murs jusqu'à la hauteur des toilettes. L'architecte Joaquim Ros de Ramis travailla à la rénovation toujours en accord avec les directives du maître. La construction commença le 13 octobre 1970 et un an plus tard le peintre commença à travailler aux peintures des plafonds du Théâtre-Musée.
Dernières années
En 1979, le Centre Georges Pompidou réalisa une grande rétrospective Dalà exposant 169 peintures et 219 dessins, gravures et objets de l'artiste. Une des particularités de l'exposition était en sous-sol. Une Citroën était suspendue au plafond avec une botifarra saucisse catalane, une cuillère de 32 m de long et de l'eau coulait dans le radiateur de la voiture. L'année suivante, la santé de Dalà se dégrada fortement. À 76 ans, Dalà présentait les symptômes de la maladie de Parkinson et perdit définitivement ses capacités artistiques. Il reçut en 1982, le titre de Marqués de Dalà de Púbol marquis de Dalà de Púbol. Gala mourut le 10 juin 1982, à 87 ans. Dalà déménagea de Figueras pour le château de Púbol où en 1984, un incendie éclata dans sa chambre à coucher, dont la cause ne fut jamais éclaircie. Dalà fut sauvé et retourna vivre à Figueras dans son théâtre-musée. En novembre 1988, Dalà entra à l'hôpital après un malaise cardiaque. Il reçut une ultime visite du roi d'Espagne le 5 décembre 1988. Le peintre mourut le 23 janvier 1989 à Figueras, à l'âge de 84 ans. Il fut inhumé dans la crypte de son théâtre-musée. Sa fortune fut pillée à sa mort.
Å’uvre
Le personnage turbulent a parfois fait oublier l'investissement artistique du peintre. Dalà fut pourtant un peintre méticuleux et acharné, concevant longuement ses toiles et les réalisant avec un soin qu'il voulait proche de ses maîtres classiques, Raphaël ou Vermeer. Michel Déon considère que son génie, Dalà en a, jusqu'au vertige, la conscience. C'est, semble-t-il, un sentiment intime très réconfortant. Les premières peintures conservées montrent un réel talent précoce, dès l'âge de 6 ans. Ses premiers portraits de sa famille à Cadaqués avaient déjà une force picturale étonnante, notamment impressionniste. Jouant sur la matière, il mélangea un temps des graviers à la peinture Vieillard crépusculaire, 1918. Il regretta le manque de formation théorique dispensée à l'Académie des beaux-arts de Madrid. À l'issue de ces années madrilènes commença une période d'influences diverses. Le jeune Dalà s'imbibait de diverses techniques allant du pointillisme Nu dans un paysage, 1922 au cubisme Autoportrait cubiste, 1923 ; Mannequin barcelonais, 1927 et à Picasso Vénus et un marin, 1925.
Å’uvre picturale Influences
Dalà affirma à l'âge de dix ans ne pas vouloir de professeur de dessin car il était un peintre impressionniste. Si cette affirmation péremptoire souleva les rires, le peintre subit effectivement très jeune l'influence impressionniste par la proximité de la famille Pichot et notamment de Ramón Pichot. Ce dernier fut l'un des premiers impressionnistes catalans, à avoir fait partie de l'entourage de Picasso en 1900 et son style rappelait Toulouse-Lautrec. Dalà admirait Renoir et Meissonier un véritable rossignol du pinceau , dont il moquait le manque de génie mais dont la technique incroyablement méticuleuse l'impressionnait. À ces influences, s'ajouta vers 1918, un intérêt pour les peintres pompiers tels que Marià Fortuny101 dont il s'inspira pour réaliser La Bataille de Tétouan 1962. Picasso fut une sorte de grand frère qui lui fit bon accueil quand il arriva à Paris. Dalà chercha toute sa vie à se confronter à lui, seul artiste contemporain auquel il reconnaissait un génie au moins égal au sien. Plus que toute autre, la Renaissance italienne fut pour Dalà une référence permanente et indispensable. S'il se considérait comme le meilleur dessinateur de son époque, il reconnaissait que ses dessins ne valent à peu près rien face aux grands maîtres de la Renaissance. Admirateur de Léonard de Vinci chez qui il trouve les racines de sa méthode paranoïacritique, il porta longtemps Raphaël au pinacle, proclamant qu'il était le seul contemporain capable de le comprendre. Vers la fin de sa vie, les personnages de Michel-Ange prirent une part considérable dans sa production picturale. Il voua aussi toute sa vie une admiration sans borne à Diego Vélasquez et Vermeer fut un autre phare, dont il chercha longuement à imiter la technique ; y parvenant parfois. Dalà revendiquait une technique très classique, voire hyperréaliste pour certaines périodes, et chercha tout au long de sa carrière à faire de plus en plus preuve d'une réelle virtuosité, restant fidèle à la peinture à l'huile pour la quasi-totalité de son œuvre peinte. Le travail est presque toujours très minutieux, ce qui lui donne l'aspect rassurant de l'académisme avec des dessins préparatoires très soignés et une exécution méticuleuse, souvent à la loupe. Certaines œuvres minuscules témoignent d'un véritable talent de miniaturiste Premier portrait de Gala, Portrait de Gala avec deux côtelettes d'agneau en équilibre sur l'épaule. Il affirma que l'ultra-académisme était selon lui, une formation que tout peintre devait avoir, ce n'est qu'à partir de cette virtuosité que quelque chose d'autre, c'est-à -dire l'art, est possible. Il détestait Cézanne qui était selon lui le plus mauvais peintre français. Il s'opposa aux peintres modernes dans leur ensemble ; à la rationalisation, au scepticisme et à l'abstraction. Matisse était un des derniers peintres modernes qui représentait les dernières conséquences de la Révolution, et le triomphe de la bourgeoisie. Par opposition à sa conversion au catholicisme, il assurait que les jeunes peintres modernes ne croyaient en rien, et qu'il était par conséquent
Tout à fait normal que quand on ne croit à rien, on finisse par peindre à peu près rien, ce qui est le cas de toute la peinture moderne ...
— Salvador Dalà Images multiples et effets optiques
Avant sa rencontre avec le surréalisme, alors qu'il était encore à Cadaqués, Dalà commença à réaliser avec une aisance diabolique dans toutes les techniques, des photographies en trompe-l'Å“il comme lui-même les nomma, anticipant de plus de 25 ans les hyperréalistes américains. Il représentait vers la fin des années 1920 ses rêves. Sa première image double fut l'Homme invisible 1929 et il conserva cette approche durant l'essentiel de sa carrière. La notion de double fut centrale chez DalÃ, tant dans sa peinture que dans sa vie. Elle trouva ses origines dans la mort son frère aîné, Salvador, se poursuivit avec Veermer et la spirale logarithmique, continua avec son alter ego Gala, se mua en une opposition entre Dentelière et Rhinocéros, chez un personnage simultanément agnostique et catholique romain. Il affina et diversifia sa technique d'images dans l'image et de réseaux La Madone Sixtine.
Ses recherches sur les troisième et quatrième dimensions le menèrent à travailler successivement sur la stéréographie puis sur holographie. En 1973, il déclara réaliser des photographies en couleur à la main d'images superfines extra-picturales de l'irrationalité concrète. Il s'attacha jusqu'à la fin à jouer avec l'œil du spectateur, notamment dans ses dernières œuvres Cinquante images abstraites qui vues à 2 yards se changent en trois Lénine masqués en chinois et qui vues à 6 yards apparaissent en tête de tigre royal, Le Torero hallucinogène, Gala regardant la mer Méditerranée qui à vingt mètres se transforme en portrait d'Abraham Lincoln – Hommage à Rothko.
Surréalisme
Alors qu'il étudiait encore à la résidence d'étudiants de Madrid, Dalà travailla avec Lorca et Buñuel à l'étude des textes psychanalytiques de Sigmund Freud qui inspira ses recherches picturales sur les rêves et l'inconscient. Les deux hommes se rencontrèrent à Londres en 1938. Cependant, la conversion du peintre au surréalisme date de 1929. Pour Robert Descharnes et Gilles Néret, ce fut l'année où on s'entend à reconnaître que Dalà est devenu surréaliste à part entière. La rencontre déterminante avec le mouvement surréaliste parisien libéra son extraordinaire puissance créative.
Son œuvre fut désormais remplie d'allusions personnelles, souvent cryptées et oniriques, qu'il réutilisa à son gré comme la figure obsédante du Grand Masturbateur qu'il utilisa de nombreuses fois en 1929 Portrait de Paul Éluard, 1929 ; Le Grand masturbateur, 1929. Il reconnut que la peinture de Miró était faite du même sang que le sien et subit l'influence de René Magritte mais acquit vite un premier style propre avec ses toiles Le miel est plus doux que le sang, 1927 et Cenicitas, 1928 puis avec l'invention de la méthode paranoïaque-critique. Patrice Schmitt, à propos d'une rencontre entre Dalà et Lacan, nota que la paranoïa selon Dalà est aux antipodes de l'hallucination par son caractère actif. Elle est à la fois méthodique et critique. Elle a un sens précis et une dimension phénoménologique et s'oppose à l'automatique, dont l'exemple le plus connu est le cadavre exquis. Faisant le parallèle avec les théories de Lacan, il conclut que le phénomène paranoïaque est de type pseudo-hallucinatoire. Or, les techniques d'images doubles sur lesquelles Dalà travaillait depuis Cadaqués l'Homme invisible, 1929 étaient particulièrement propres à révéler le fait paranoïaque ; conjonction qui fait dire à Robert Descharnes et Gilles Néret que Dalà fut le seul véritable peintre totalement surréaliste, de la même manière qu'on peut dire que Monet est le seul véritable peintre totalement impressionniste, du début de son œuvre jusqu'aux Nymphéas à la fin
Mysticisme corpusculaire
Les explosions des bombes atomiques à Hiroshima et Nagasaki ébranlèrent sismiquement le peintre et impulsèrent une nouvelle source d'inspiration : la physique nucléaire. Il déclara alors être un ex-surréaliste, bien que selon Robert Decharnes et Gilles Néret, il le restât plus que jamais. La théorie atomique suppose une discontinuité fondamentale de la matière : la physique nucléaire dit en simplifiant les choses que des particules élémentaires séparées par du vide se maintiennent en équilibre, tout en formant à échelle macroscopique un ensemble cohérent. Trouvant en Heisenberg son nouveau père et avec une logique toujours irréfutable, il affirma que ce que les physiciens produisent, les peintres, qui sont déjà spécialistes des anges, peuvent le peindre. Durant cette période, les corps et objets représentés par Dalà se trouvèrent en état de lévitation, une nouvelle approche qui était liée tant au nombre d'or qu'aux spéculations de la physique moderne. Ils traduisirent l'évolution spirituelle du peintre, dans un souci constant d'appartenance double, agnostique et catholique apostolique romain. Lors de ce virage opéré en 1946 il retourna puiser son inspiration dans la peinture de la renaissance, ce qui permit au peintre de réaliser la synthèse de trois approches improbables : corpusculaire, catholique romaine, et de la Renaissance.
Thèmes picturaux Nature
La crique de Portlligat mais aussi le port de pêche ou l'avant de la maison du peintre apparaissent dans nombre de ses tableaux à partir de l'installation du couple en 1930 dans ce port. Les parages du cap de Creus représentaient pour Dalà le paysage le plus concret du monde. Ses rochers aux angles acérés et aux formes étranges sont bien connus des promeneurs de Cadaqués. Dalà les utilisa souvent dans ses toiles exemples : Le Grand Masturbateur, 1929 ; Le Nez de napoléon transformé en femme enceinte promenant son ombre parmi les ruines originales, 1945. L'image composite et d'allure énigmatique du Grand masturbateur apparut en 1929 dans le Portrait de Paul Éluard. Il est composé de plusieurs éléments parfois variables : paupière, cils, le tout reposant sur un nez de profil. Une sauterelle est souvent représentée la tête en bas, proche de la place de la bouche. Cet élément fut très présent de 1929 à 1931 Le Grand masturbateur 1929, Jeu lugubre 1929, la Persistance de la mémoire 1931. Outre la symbolique propre à l'auteur, l'allure générale est celle d'un important rocher visible près du cap de Creus que Dalà connaissait bien.
Plusieurs animaux prennent pour lui un caractère morbide. C'est par exemple le cas des fourmis, très présentes depuis le Portrait de Paul Éluard 1929. D'après ses dires, elles seraient en relation avec une scène d'enfance où, après avoir recueilli une petite chauve-souris blessée, le jeune Salvador avait retrouvé le lendemain matin l'animal agonisant : la chauve-souris, couverte de fourmis frénétiques, râle, la gueule ouverte, découvrant des dents de petite vieille. L'Âne pourri fait également partie de ces représentations. Il fut présent dans le film Un chien andalou 1929 et dans plusieurs toiles de cette même époque – Le miel est plus doux que le sang 1927, Cenicitas 1928, L'Âne pourri 1928 – de même que plusieurs cadavres d'animaux en putréfaction. Selon le peintre, ces images lui rappelaient la scène traumatisante du cadavre de son hérisson apprivoisé, envahi par une armée de vers : son dos hérissé de piquants se soulevait sur un grouillement inouï de vers frénétiques. Les sauterelles renvoient également à des scènes d'enfant et à sa terreur des sauterelles, que ses condisciples lui envoyaient parfois en plein cours. Les sauterelles furent très présentes dans ses œuvres des années 1920-1930 et furent souvent associées au grand masturbateur. Le Rhinocéros – et surtout sa corne – fut en revanche un instrument divin en relation avec son mysticisme nucléaire ainsi qu'un appendice phallique évident Jeune Vierge autosodomisée par les cornes de sa propre chasteté. Dalà l'utilisa dès 1951 Tête Raphaélesque éclatée puis surtout vers 1955 Étude paranoïacritique de la Dentellière de Vermeer. Il expliqua que la Dentellière de Vermeer atteint un maximum de dynamisme biologique grâce aux courbes logarithmiques des cornes de rhinocéros. Les mouches seraient au contraire liées à un sentiment positif. Dalà racontait adorer ces insectes, et qu'à Portlligat il s'en laissait couvrir le corps. Il les aurait considérées comme les fées de la Méditerranée. Michel Déon raconte qu'il se faisait un délice de la lecture de l'Éloge de la mouche par Lucien de Samosat. Comme son père, qui se cachait pour les déguster, Dalà adorait manger les oursins qu'on lui ramenait de la mer toute proche. Il les utilisa dans son œuvre picturale La Madone de Port Lligat 1950, en photographie, et même comme artiste en enfilant une paille dans leur bouche et dont les mouvements venaient dessiner des formes sur un écran. Il s'agit sans doute de la première utilisation d'un échinoderme comme artiste pictural
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Posté le : 10/05/2014 00:09
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