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De Montpellier
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Le 6 décembre 1478 à Casatico naît Baldassare Castiglione
dans le marquisat de Mantou, épelé aussi Baldassarre, Baldesar ou Baldassar, comte de Novellata, écrivain et diplomate italien de la Renaissance. Il reste connu pour avoir écrit Le Livre du courtisan, manuel de savoir-vivre qui connut un succès important à sa parution. Il meurt le 8 février 1529 à 50 ans à Tolède, en Espagne
En bref
Si détaché qu'il semble de la dure histoire italienne du temps où il fut écrit, Le Parfait Courtisan (Il Cortegiano) de Castiglione est le fruit d'une expérience à la fois guidée, compensée et transcendée par un idéal éthique foncièrement tributaire de la culture humaniste. Il a constitué, pendant un siècle et plus, en Europe occidentale, la source et souvent le modèle d'un art de cour équilibré entre le devoir politique et l'animation culturelle, ayant pour double objet de soutenir la gloire du souverain et la dignité du courtisan. De 1537 à 1690 ont paru six traductions françaises. Fils d'un homme de guerre et d'une parente des Gonzague, Baldassarre Castiglione naquit à Mantoue. C'est à Milan, quand s'y exerçait le mécénat de Ludovic le More, qu'il fit ses études. Entré en 1499 au service de François Gonzague, à Mantoue, il passe, en 1503, à la cour du beau-frère de François, Guidobaldo da Montefeltro, seigneur d'Urbino, et, abstraction faite de diverses campagnes et missions, y reste jusqu'en 1513, année où il part pour Rome en qualité d'ambassadeur du duché d'Urbino auprès du pape. Le duché passant, en 1516, aux mains d'un Médicis, Castiglione retourne au service des Gonzague, devient en 1520 leur ambassadeur à Rome, avant d'être nommé, en 1524, protonotaire apostolique par le pape Clément VII et envoyé, l'année suivante, en Espagne en qualité de nonce auprès de Charles Quint. Ce ne fut pas la mission la plus heureuse de sa vie. Le terrible sac de Rome de 1527, commis par des mercenaires à la solde de Charles Quint, advint au temps de sa nonciature : Clément VII lui reprocha violemment de n'avoir su ni le prévoir ni le prévenir. Castiglione présenta sa défense avec une dignité que se plaisent à souligner tous ses biographes. Apprenant, sur ces entrefaites, qu'un manuscrit du Cortegiano, confié à un de ses amis, commençait à être reproduit sans son assentiment, il prit le parti de le publier avant d'en avoir achevé la révision. Le livre fut imprimé à Venise en 1528. Cette première édition devança de peu la mort de Castiglione, survenue à Tolède.
Sa vie
Baldassare Castiglione est né à Casatico, province de Mantoue, en Italie, dans une ancienne famille lombarde ayant émigré à Mantoue à l'époque du marquis Ludovic Gonzague, un parent de Luigia Gonzague, la mère de Castiglione. À Casatico, son lieu natal, il y a encore la Corte Castiglioni, le palais de la famille Castiglione, symbole du marquisat de la famille sur ces territoires, et résidence où Baldassarre Castiglione est né et à vécu ses premières années. Il fait des études classiques à Venise et à Milan, où il est l'élève de Merula et de Calcondila. Il fait partie de la cour de Ludovic le More et à la mort de celui-ci, il rejoint la cour des Gonzague à Mantoue. En 1495, son père meurt et Baldassare lui succède dans ses fonctions de chef de famille, il accompagne ainsi le marquis lors de l'arrivée de Louis XII à Milan. Pour le service de Gonzague, il part à Rome rencontrer Guidobaldo Ier de Montefeltro, duc d'Urbino, dont il rejoint la cour en 1504. Urbino est alors la cour la plus brillante et la plus raffinée d'Italie, un carrefour culturel dirigé par la duchesse Elisabetta Gonzague et sa belle-sœur Maria Emilia Pia avec parmi les invités permanents Pietro Bembo ou Michel-Ange, ainsi que de nombreux hommes de lettres. Les invités ont pour habitude d'organiser à la cour des compétitions intellectuelles produisant ainsi une riche activité littéraire et culturelle. En 1506, Castiglione écrit et interprète avec Cosimo Gonzague, son églogue Tirsi dans lequel de façon voilée, il dépeint la vie de la cour d'Urbino. L'œuvre contient des résonances de poésie ancienne et contemporaine, avec des rappels à Virgile, Poliziano ou Sannazzaro. Il fut ambassadeur du duc d'Urbino auprès de Henri VIII d'Angleterre, roi d'Angleterre. François Marie Ier della Rovere succède à Guidobaldo à la mort de ce dernier, et Castiglione demeure à sa cour, et, avec lui, prend part à l'expédition contre Venise menée par le pape Jules II, ce qui lui vaut d'obtenir le comté de Novellata, près de Pesaro. Quand le pape Léon X est élu, Castiglione est envoyé à Rome comme ambassadeur d'Urbino. Il y devient l'ami d'artistes et d'écrivains, notamment de Raphaël, qui a peint son portrait, conservé aujourd'hui au musée du Louvre. En 1516, Castiglione retourne à Mantoue, où il se marie avec Ippolita Torelli, descendante d'une famille noble. Il lui avait écrit deux lettres passionnées, lui exprimant ses sentiments profonds, mais celle-ci devait mourir quatre ans plus tard, alors que son époux se trouvait à Rome, en qualité d'ambassadeur du duc de Mantoue. En 1521, le pape Léon X lui accorda la tonsure et Castiglione commença une carrière ecclésiastique. C'est à cette époque qu'il met en relation le peintre et architecte Giulio Romano avec le duc de Mantoue, celui-ci cherchant embellir sa ville et à se faire construire un palais. En 1524, le pape Clément VII l'envoie à Madrid en qualité de nonce apostolique ambassadeur du Saint-Siège, il suit l'empereur Charles V à Tolède, Séville et Grenade. En mai 1527 les impériaux envahissent et mettent Rome à sac ; le pape reprochera à Castiglione de ne pas l'avoir prévenu des intentions de Charles Quint. Castiglione enverra une lettre au pape, datée du 10 décembre 1527, soulignant que le saccage était motivé par l'ambiguïté et les contradictions de la politique du pape. Contre toute attente, il reçut des excuses du pape, et les honneurs de l'empereur. De nos jours, Baldassare Castiglione n'est plus perçu comme responsable du sac de Rome, car il semble qu'il ait joué honnêtement son rôle en Espagne. Ainsi, le bruit que Castiglione soit décédé suite aux remords qu'il aurait pu éprouver est infondée, il est mort des suites d'une épidémie de peste. En 1528, l'année précédant sa mort, son livre le plus célèbre, Le Livre du courtisan, est publié à Venise. Il décrit la cour d'Urbino, au temps du duc Guidobaldo Ier de Montefeltro, et son courtisan idéal, au travers de dialogues philosophiques et culturels qui lui ont été rapportés alors qu'il se trouvait en Angleterre. Son livre est traduit en français dès 1537, puis en espagnol, en anglais, en allemand et en latin. Ce livre deviendra vite un manuel de savoir-vivre dans les cours européennes. Cette œuvre prône la courtoisie et les valeurs sociales que l'homme civilisé se doit d'avoir. Il s'inspire alors du célèbre proverbe de Platon : « Omnia vincit politus » qui renvoyait initialement à l'utilité de l'éducation.
Le miroir d'une époque
Bien que les entretiens qui forment l'essentiel du livre soient fictivement situés entre septembre 1506 et février 1507, il semble que Castiglione n'ait pas entrepris de composer son ouvrage avant 1513, au terme de son séjour à la cour d'Urbino, où il s'était lié d'amitié avec Pietro Bembo, avec le futur cardinal Bibbiena, favori de l'exilé Jean de Médicis qui allait bientôt devenir le pape Léon X, et avec bien d'autres qui se retrouvent dans les rôles du Cortegiano. Des invasions, des batailles, des renversements d'alliances qui se succèdent en Italie, de 1494 à 1529, et qui furent loin d'être sans effet sur la vie et la carrière du diplomate Castiglione, on ne perçoit dans le Cortegiano que de brefs et lointains échos. Bien qu'il y soit souvent question de la formation et des devoirs des princes, l'ouvrage peut passer pour apolitique, si l'attention politique véritable est celle qu'un auteur, témoin ou juge, donne aux mouvements et aux crises de la société où il vit. À la différence de son contemporain Machiavel, Castiglione ne s'interroge pas sur les chances qu'ont les dynasties ou les États de second ordre de subsister ou de s'agrandir. Son propos n'a pas trait à leur débilité relative en face des grands royaumes dévorants, mais au style de vie prestigieux que tout État peut tendre à édifier au niveau de la cour, comme si la fin du pouvoir régnant était non la puissance mais une civilité supérieure. Plus qu'un centre d'où s'exerce la force politique, la cour est dans le Cortegiano le lieu où aboutit et s'affine la culture, où l'apparat se rend inséparable du savoir, l'agrément de la dignité, où s'élabore, en un mot, un art de vivre exemplaire, de portée universelle. On ne peut rêver assemblage plus révélateur d'une vision « d'époque », de l'importance des qualités et des grades. Au centre, deux animatrices représentant la dynastie régnante : l'épouse du souverain, Elisabeth, et la « dame de palais », Emilia Pio, apparentée au souverain par alliance. Près d'elles, des hommes réputés et hautement protégés auxquels sourit un bel avenir : trois futurs cardinaux, Bembo, Bibbiena, Federico Fregoso ; le fils de Laurent le Magnifique, Julien de Médicis, qui sera duc de Nemours ; Ottaviano Fregoso, qui sera doge de Gênes ; le comte Ludovic de Canossa, qui sera ambassadeur de Léon X en Angleterre et en France. À ceux-ci s'ajoutent des gentilshommes qui donnent de grands espoirs, mais disparaîtront prématurément. Moins chargés de dignités ou de promesses, d'autres personnages sont plus strictement fonctionnels. Ils font songer aux experts qui composent de nos jours l'escorte des diplomates. « Spécialistes » à l'autorité restreinte et subordonnée, ils sont là pour garantir l'information de leurs supérieurs et répondre, le cas échéant, aux questions que ceux-ci leur posent. La distribution obéit donc à une hiérarchie des rôles où les simples commis de cour restent à bonne distance des dignitaires, de ceux qui sont destinés à le devenir, et des seigneurs.
Une vision aristocratique et humaniste
Cette hiérarchie est assurément le signe d'une vision aristocratique. Mais Castiglione, qui fut à Milan l'élève des humanistes, en vient à équilibrer sa considération entre un Bibbiena, plébéien de cour savant et disert, et le noble lettré vénitien Pietro Bembo. Plus qu'à leur naissance, il mesure le prix des hommes à leur culture, au rôle qu'ils tiennent auprès des grands, au succès qu'on peut leur prédire. Par là est annoncé le courtisan bourgeois, apte autant que le noble à devenir l'animateur et le sage du milieu privilégié auquel l'attachent ses dons et ses mérites. Sous son triple visage de « féal », de juge en toute matière et d'instructeur, le bon courtisan a pour premier devoir d'informer loyalement son prince, d'abattre les écrans de l'adulation ou des fausses prévenances qui dissimulent à ses regards le monde qui lui appartient, sans mettre jamais en cause son pouvoir absolu. Aucun participant du Cortegiano ne conteste la maxime énoncée par Ottaviano Fregoso : le prince n'est responsable que devant Dieu ; tout ce que les hommes peuvent faire est de tâcher à le rendre meilleur. Pour informer son prince, l'homme de cour devra se mettre au fait de tout ce que requièrent l'intérêt politique de la dynastie et son prestige, dont une large part tient à l'éclat de sa cour. C'est sous cette rubrique, qui commande tout un programme de culture, que s'inscrit ce que le Cortegiano offre de plus riche et de plus neuf. Si la dignité des armes n'est pas réfutée, il en est fait peu de cas, lorsqu'elle prétend tenir lieu de tout. Dès le premier livre de l'ouvrage, l'axe de la balance tend à se déplacer des aptitudes guerrières vers les qualités de l'esprit. Le deuxième livre s'ouvre bien par des considérations sur les batailles, les tournois, les exercices corporels, mais on passe bientôt à la musique, aux entretiens de société, à la modestie, avant que ne commence un long propos sur l'art de divertir par de bons mots ou de bons tours. Après une discussion animée entre féministes et antiféministes, le troisième livre s'offre comme un exemple de conversation brillante et raffinée sur l'amour. Le dernier livre, enfin, traite surtout de l'utilité du courtisan pour le prince dans l'espèce de préceptorat qu'il se sera rendu digne d'exercer par son savoir et de faire accepter par son charme. Dans ces pages, Bembo disserte longuement, en termes platoniciens, de la beauté corporelle et spirituelle avant de célébrer, dans une ample péroraison, la divinité de l'amour. Un absolutisme princier tempéré par la sagesse éclairée de l'homme de cour : la « pédagogie » du Cortegiano aboutit au ministre d'État, confident respecté du souverain, non moins qu'au courtisan. Ce ministre ne saurait se trouver pour Castiglione que dans l'« homme complet » de l'idéal humaniste. À l'homme qui a su se composer harmonieusement lui-même, confiance peut être faite en politique, non moins qu'en culture, s'il se dit prêt au service du souverain et de l'État. Tel est le sens dominant d'un ouvrage où une inquiète revendication d'intellectuel se marie à un tranquille esprit de caste au fil d'une prose d'art à la fois substantielle et détendue, noblement appropriée à sa matière. Paul Renucci
Ses œuvres mineures sont moins connues mais intéressantes. Les sonnets d'amour et les quatre Amorose canzoni content son amour platonique pour Elisabetta Gonzaga dans un style qui rappelle Pétrarque. Les pré-romantiques puiseront leur inspiration dans son sonnet Superbi colli e voi, sacre ruine. Ses poésies latines sont remarquables, comme l'élégie De morte Raphællis pictoris à la mort de Raphaël, et une autre, où il imagine sa propre mort. Son intéressante correspondance dépeint non seulement l'homme et sa personnalité, mais aussi les gens célèbres qu'il a rencontrés et fréquentés, lors de son activité diplomatique.
Baldassare Castiglione meurt à Tolède en 1529.
Posté le : 05/12/2015 15:05
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