| A + A -
Connexion     
 + Créer un compte ?
Rejoignez notre cercle de poetes et d'auteurs anonymes. Lisez ou publiez en ligne
Afficher/Cacher la colonne
Accueil >> newbb >> Charles Baudelaire début 1 [Les Forums - Histoire de la Littérature]

Parcourir ce sujet :   1 Utilisateur(s) anonymes





Charles Baudelaire début 1
Administrateur
Inscrit:
14/12/2011 15:49
De Montpellier
Messages: 9505
Niveau : 63; EXP : 94
HP : 629 / 1573
MP : 3168 / 59523
Hors Ligne
Le 31 août 1867 à 46 ans, à Paris meurt.Charles-Pierre Baudelaire

poète français inclassable, né à Paris le 9 avril 1821. Il représente un mouvement de modernité poétique, Parnasse, Symbolisme, Romantisme, il écrit de la poésie, Poésie, des poème en prose, des essais, des critiques d'art. Dante d'une époque déchue selon le mot de Barbey d'Aurevilly, nourri de romantisme, tourné vers le classicisme, à la croisée entre le Parnasse et le symbolisme, chantre de la modernité, il occupe une place considérable parmi les poètes français pour un recueil certes bref au regard de l'œuvre de son contemporain Victor Hugo, Baudelaire s'ouvrit à son éditeur de sa crainte que son volume ne ressemblât trop à une plaquette…, mais qu'il aura façonné sa vie durant : Les Fleurs du mal.

ses Å’uvres principales sont Les Fleurs du mal en 1857, Les Paradis artificiels en 1860, Le Spleen de Paris, publication posthume 1846-1859
Au cœur des débats sur la fonction de la littérature de son époque, Baudelaire détache la poésie de la morale, la proclame tout entière destinée au Beau et non à la Vérité. Comme le suggère le titre de son recueil, il a tenté de tisser des liens entre le mal et la beauté, le bonheur fugitif et l'idéal inaccessible. À une passante, la violence et la volupté Une martyre, mais aussi entre le poète et son lecteur, Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère et même entre les artistes à travers les âges Les Phares. Outre des poèmes graves Semper Eadem ou scandaleux Delphine et Hippolyte, il a exprimé la mélancolie, Mœsta et errabunda, l'horreur, Une charogne et l'envie d'ailleurs L'Invitation au voyage à travers l'exotisme.

[size=SIZE]En Bref[/size]

Paul Valéry, dans une conférence de 1924 dont le texte, Situation de Baudelaire, fut publié dans le recueil Variété 1924-1944, a fait du poète des Fleurs du mal le pionnier de la modernité ; pour lui Rimbaud, Verlaine et Mallarmé constituent la triade majeure.
Telle que Baudelaire l'a conçue, la modernité doit beaucoup à son expérience de la peinture. Dès 1846, traitant de l'héroïsme de la vie moderne, il y voyait l'alliance de quelque chose d'éternel et de quelque chose de transitoire, d' absolu et de particulier. Une telle beauté, d'un type nouveau, pouvait faire échec à la décadence qu'il appréhendait. Approfondissant la notion, il insistait, dans le Salon de 1859, sur le gouvernement de l'Imagination. Quatre ans plus tard, Constantin Guys 1802-1892, en représentant des scènes parisiennes, lui apparaissait comme le peintre de la vie moderne. C'est dire que plusieurs composantes s'associent dans cette modernité, entre rêve et réalité.
Baudelaire prolonge le romantisme en le renouvelant. Il méprise le réalisme, ce canard que Champfleury a lancé, mais la beauté ne va pas pour lui sans un grain de réalité. Quant au symbolisme, il ne l'a pas fondé, contrairement à ce qu'on lit trop souvent dans les manuels littéraires. Rares même sont les textes, comme Correspondances , où des images préparent une théorie qu'il n'a jamais élaborée et qui d'ailleurs restera diffuse en France à la fin du siècle.
Au point de départ, il convient plutôt de placer une situation, dans l'acception sartrienne du terme. Et tel est le sens, en effet, de l'essai décisif que Jean-Paul Sartre a consacré à Baudelaire en 1947, mettant l'accent sur le choix de lui-même que le poète a fait. Tous ses efforts ont concouru à s'emparer de soi-même, dans son éternelle „différence“, à réaliser son Altérité, en s'identifiant au Monde tout entier.
Cela ne signifie pas que la création verbale doive être négligée, et Sartre, moins indifférent à la poésie qu'on ne l'a dit, le savait fort bien. Il attire aussi l'attention sur les signes, sur les symboles dans l'œuvre d'un poète qui a dit fortement que tout, pour moi, devient allégorie, Le Cygne, l'un des Tableaux parisiens , dans l'édition autorisée des Fleurs du mal, en 1861. Rimbaud, qui a reconnu en Baudelaire le premier voyant, roi des poètes, un vrai Dieu, se disait pourtant déçu en 1871 par une forme qu'il jugeait encore mesquine. Pourtant celui qui n'est ni un second romantique, ni un parnassien bien qu'il ait collaboré au Parnasse contemporain avec les Nouvelles Fleurs du mal en 1866, ni un symboliste avant la lettre a été un modèle tant pour ses admirateurs français qu'on pense à Pierre Jean Jouve, à Yves Bonnefoy que pour ses admirateurs étrangers qui l'ont souvent traduit et qui ont grâce à lui trouvé les voies d'une nouvelle poésie dans leur pays Swinburne en Angleterre, Stefan George en Allemagne, Biély en Russie, ou les fondateurs de la poésie moderne au Japon à l'ère Meiji.

Sa vie

Charles Baudelaire naît le 9 avril 1821 au 13 rue Hautefeuille à Paris. Sa mère, Caroline Dufaÿs, a vingt-sept ans. Son père, Joseph-François Baudelaire, né en 1759 à La Neuville-au-Pont6, en Champagne, est alors sexagénaire. Quand il meurt en 1827, Charles n'a que six ans. Cet homme lettré, épris des idéaux des Lumières et amateur de peinture, peintre lui-même, laisse à Charles un héritage dont il n'aura jamais le total usufruit. Il avait épousé en premières noces, le 7 mai 1797, Jeanne Justine Rosalie Janin, avec laquelle il avait eu un fils, Claude Alphonse Baudelaire, demi-frère de Charles.
Un an plus tard, sa mère se remarie avec le chef de bataillon Jacques Aupick. Le futur poète ne sera plus jamais en contact avec sa mère. Peu fait pour comprendre la vive sensibilité de l'enfant, l'officier Aupick - devenu plus tard ambassadeur - incarne à ses yeux les entraves à tout ce qu'il aime : sa mère, la poésie, le rêve et, plus généralement, la vie sans contingences. S'il va haïr le général Aupick, c'est sans doute que celui-ci s'opposera à sa vocation. C'est surtout parce que son beau-père lui prenait une partie de l'affection de sa mère. ... Une seule personne a réellement compté dans la vie de Charles Baudelaire : sa mère
En 1831, le lieutenant-colonel Aupick ayant reçu une affectation à Lyon, le jeune Baudelaire est inscrit à la pension Delorme et suit les cours de sixième au Collège royal de Lyon. En cinquième, il devient interne. En janvier 1836, la famille revient à Paris, où Aupick sera promu colonel en avril. Alors âgé de quatorze ans, Charles est inscrit comme pensionnaire au Collège Louis-le-Grand, mais il doit redoubler sa troisième. En seconde, il obtient le deuxième prix de vers latins au concours général.
Renvoyé du lycée Louis-le-Grand en avril 1839 pour une vétille, Baudelaire mène une vie en opposition aux valeurs bourgeoises incarnées par sa mère et son beau-père. Il passe son Baccalauréat au lycée Saint-Louis en fin d'année et est reçu in extremis. Jugeant la vie de l'adolescent scandaleuse, son beau-père décide de l'envoyer en voyage vers les Indes, périple qui prend fin prématurément, en 1841, aux îles Mascareignes (Maurice et La Réunion.

De retour à Paris, Charles s'éprend de Jeanne Duval, une jeune mulâtresse avec laquelle il connaîtra les charmes et les amertumes de la passion. Dandy endetté, il est placé sous tutelle judiciaire et mène dès 1842 une vie dissolue. Il commence alors à composer plusieurs poèmes des Fleurs du mal. Critique d'art et journaliste, il défend Delacroix comme représentant du romantisme en peinture, mais aussi Balzac lorsque l'auteur de La Comédie humaine est attaqué et caricaturé pour sa passion des chiffres ou sa perversité présumée. En 1843, il découvre les paradis artificiels dans le grenier de l'appartement familial de son ami Louis Ménard, où il goûte à la confiture verte. Même s'il contracte une colique à cette occasion, cette expérience semble décupler sa créativité il dessine son autoportrait en pied, très démesuré. Il renouvellera cette expérience occasionnellement, et sous contrôle médical, en participant aux réunions du "club des Haschischins". En revanche, sa pratique de l'opium est plus longue : il fait d'abord, dès 1847, un usage thérapeutique du laudanum, prescrit pour combattre des maux de tête et des douleurs intestinales consécutives à une syphilis, probablement contractée vers 1840 durant sa relation avec la prostituée Sarah la Louchette. Comme De Quincey avant lui, l’accoutumance lui fait augmenter progressivement les doses. Croyant y trouver un adjuvant créatif, il en décrira les enchantements et les tortures.

En 1848, il participe aux barricades. La Révolution de février instituant la liberté de la presse, Baudelaire fonde l'éphémère gazette Le Salut Public d'obédience résolument républicaine, qui ne va pas au-delà du deuxième numéro. Le 15 juillet 1848 paraît, dans La Liberté de penser, un texte d'Edgar Allan Poe traduit par Baudelaire : Révélation magnétique.
À partir de cette période, Baudelaire n'aura de cesse de proclamer son admiration pour l'écrivain américain, dont il deviendra le traducteur attitré. La connaissance des œuvres de Poe et de Joseph de Maistre atténue définitivement sa fièvre révolutionnaire. Plus tard, il partagera la haine de Gustave Flaubert et de Victor Hugo pour Napoléon III, mais sans s'engager outre mesure d'un point de vue littéraire, L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre / Ne fera pas lever mon front de mon pupitre - Paysage dans Tableaux parisiens du recueil Les Fleurs du mal.

Baudelaire se voit reprocher son style d'écriture et le choix de ses sujets. Il n'est compris que par certains de ses pairs tels Armand Baschet, Édouard Thierry, Champfleury, Jules Barbey d’Aurevilly, Frédéric Dulamon ou André Thomas… Cet engouement confidentiel contraste avec l'accueil hostile que lui réserve la presse. Dès la parution des Fleurs du Mal en 1857, Gustave Bourdin réagit avec virulence dans les colonnes du Figaro du 5 juillet 1857 : Il y a des moments où l'on doute de l'état mental de M. Baudelaire, il y en a où l'on n'en doute plus ; - c'est, la plupart du temps, la répétition monotone et préméditée des mêmes choses, des mêmes pensées. L'odieux y côtoie l'ignoble ; le repoussant s'y allie à l'infect…. Cette appréciation totalement négative deviendra le jugement dominant de l'époque.

Moins de deux mois après leur parution, Les Fleurs du mal sont poursuivies pour offense à la morale religieuse et outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs. Seul ce dernier chef d'inculpation sera retenu. Baudelaire est condamné à une forte amende de trois cents francs, réduite à cinquante par suite d'une intervention de l'impératrice Eugénie. L'éditeur Auguste Poulet-Malassis s'acquitte, pour sa part, d'une amende de cent francs et doit retrancher six poèmes dont le procureur général Ernest Pinard a demandé l'interdiction Les Bijoux ; Le Léthé ; À celle qui est trop gaie ; Lesbos ; Femmes damnées Delphine et Hippolyte ; Les métamorphoses du Vampire. Malgré la relative clémence des jurés eu égard au réquisitoire plus sévère qui vise onze poèmes, ce jugement touche profondément Baudelaire. Contraint et forcé, il fera publier une nouvelle édition en 1861, enrichie de trente-deux poèmes. En 1862, Baudelaire est candidat au fauteuil d'Eugène Scribe à l'Académie Française. Il est parrainé par Sainte-Beuve et Vigny. Mais le 6 février 1862, il n'obtient aucune voix et se désiste. Par la suite, il renoncera à se présenter au fauteuil d'Henri Lacordaire20. En 1866, il réussit à faire publier à Bruxelles c'est-à-dire hors de la juridiction française, sous le titre Les Épaves, les six pièces condamnées accompagnées de seize nouveaux poèmes.

Le 24 avril 1864, très endetté, il part pour la Belgique afin d'y entreprendre une tournée de conférences. Hélas, ses talents de critique d'art éclairé ne font plus venir grand monde… Il se fixe à Bruxelles où il rend plusieurs visites à Victor Hugo, exilé politique volontaire. Il prépare un pamphlet contre son éphémère pays d'accueil qui représente, à ses yeux, une caricature de la France bourgeoise. Le féroce Pauvre Belgique! restera inachevé. Souhaitant la mort d'un royaume que, lucide et prémonitoire, il juge artificiel, il en résume l'épitaphe en un mot : Enfin !.
C'est en Belgique que Baudelaire rencontre Félicien Rops, qui illustre Les Fleurs du mal en 1866. Lors d'une visite à l'église Saint-Loup de Namur, Baudelaire perd connaissance. Cet effondrement est suivi de troubles cérébraux, en particulier d'aphasie. À partir de mars 1866, il souffre d'hémiplégie. Il meurt à Paris, de la syphilis, le 31 août 1867. Il n'a pu réaliser son souhait d'une édition définitive des Fleurs du Mal, travail de toute une vie. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse 6e division, dans la même tombe que sa mère et son beau-père détesté, le général Aupick.
Le Spleen de Paris autrement appelé Petits poèmes en prose est édité à titre posthume en 1869, dans une nouvelle édition remaniée par Charles Asselineau et Théodore de Banville. À sa mort, son héritage littéraire est mis aux enchères. L'éditeur Michel Lévy l'acquiert pour 1 750 francs. Une troisième édition des Fleurs du Mal, accompagnée des onze pièces intercalaires, a disparu avec lui.

Révision de la condamnation de 1857

C'est par la loi du 25 septembre 194622 que fut créée une procédure de révision des condamnations pour outrage aux bonnes mœurs commis par la voie du livre, exerçable par le Garde des Sceaux à la demande de la Société des gens de lettres. Celle-ci décida aussitôt, à l'unanimité moins une voix, de demander une révision pour Les Fleurs du Mal, accordée le 31 mai 1949 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.
Dans ses attendus, la Cour énonce que : les poèmes faisant l’objet de la prévention ne renferment aucun terme obscène ou même grossier et ne dépassent pas, en leur forme expressive, les libertés permises à l’artiste ; que si certaines peintures ont pu, par leur originalité, alarmer quelques esprits à l’époque de la première publication des Fleurs du Mal et apparaître aux premiers juges comme offensant les bonnes mœurs, une telle appréciation ne s’attachant qu’à l’interprétation réaliste de ces poèmes et négligeant leur sens symbolique, s’est révélée de caractère arbitraire ; qu’elle n’a été ratifiée ni par l’opinion publique, ni par le jugement des lettrés.

Domiciles du poète

Baudelaire habita principalement à Paris où, constamment endetté et pressé de fuir ses créanciers, il occupa une quarantaine de domiciles :

13, rue Hautefeuille, où il naît le 9 avril 1821. La maison fut détruite lors du percement du boulevard Saint-Germain, mais on peut encore voir le no 15 ;
50, rue Saint-André-des-Arts, à partir de la mort de son père 1827 ;
11, rue du Débarcadère située à l’époque à Neuilly-sur-Seine 1827-1828 ;
17, rue du Bac, à partir du second mariage de sa mère 1828, et jusqu’à la promotion de son mari le colonel Aupick 1832 ;
Lyon 1832-1836. Baudelaire est logé d’abord à la pension Delorme, puis à l’internat du collège Royal ; Pendant cette période, il réside également au 4-6, rue d'Auvergne. Une plaque marquée d'un C et d'un B au balcon du deuxième étage y a été apposée.
32, rue de l'Université, de retour à Paris 1836 ;
123, rue Saint-Jacques, à l'internat du lycée Louis-le-Grand mars 1836-avril 1839 ;
rue Culture-Sainte-Catherine, dans le Marais, domicile de ses parents après son renvoi du collège printemps 1839. Baudelaire reprend ses cours comme externe au Lycée Saint-Louis ;
22, rue du Vieux-Colombier, chez son répétiteur M. Lassègue, jusqu'à passage du baccalauréat août 1839 ;
rue de l’Estrapade, pension L'Évêque et Bailly ;
rue du Pot-de-Fer-St.-Sulpice, chez Mlle Théot ;
73, rue de Lille ;
50, rue de Sévigné ;
Bordeaux, Île Maurice et Île Bourbon actuelle Île de la Réunion, lors de son voyage dans les mers du Sud 9 juin 1841 - début février 1842 ;
10 devenu 22 quai de Béthune, sur l’île Saint-Louis29, au rez-de-chaussée à gauche de la porte d’entrée, avec fenêtre sur rue mai-décembre 1842. Il y reçoit les visites de sa nouvelle maîtresse Jeanne Duval, qu’il avait rencontrée au théâtre du Panthéon sis au cloître Saint-Benoît bâtiment détruit depuis, à la place de l'actuelle Sorbonne ;
rue Vaneau, au rez-de-chaussée premier semestre de 1843 ;
15, quai d’Anjou, sur l'île Saint-Louis juin à septembre 1843 ;
17 quai d’Anjou, à l'hôtel Pimodan originellement hôtel de Lauzun, puis redevenu tel plus tard, sur l'île Saint-Louis. Baudelaire occupe trois pièces au dernier étage sous les combles, côté cour octobre 1843 - 1846. Lors de son aménagement, il loge Jeanne Duval et la mère de Jeanne au 6, rue de la Femme-sans-Tête devenue rue Le Regrattier, également sur l’île Saint-Louis ;
une succession d’hôtels et de chambres garnies, souvent très brièvement, à partir de 1846. Au cours de 1846-1847, il réside successivement à l’hôtel Corneille rue Corneille ; au 33, rue Coquenard (devenue rue Lamartine ; à l’hôtel de Dunkerque 32, rue Lafitte ; au 68 ou 36 ?, rue de Babylone ; à l’hôtel Folkestone rue Lafitte ; 24 rue de Provence ; 7 rue de Tournon ; et encore dans de petits garnis « borgnes et introuvables »31 ;
18, avenue de la République (devenue avenue de Neuilly à Neuilly-sur-Seine août 1848 ;
Dijon bref séjour;
95, avenue de la République devenue avenue de Neuilly à Neuilly-sur-Seine mai 1850 - juillet 1851 ;
25, rue des Marais-du-Temple devenue rue Yves-Toudic ;
11, boulevard de Bonne-Nouvelle mai - juillet 1852;
60, rue Pigalle, dans un hôtel situé non loin de Mme Sabatier, qui habitait au 4 ou 16, rue Frochot octobre 1852 - mai 1854. La mère de Baudelaire et son mari, le général Aupick, habitent à cette époque au 91, rue du Cherche-Midi ;
61, rue Sainte-Anne, à l'hôtel d’York actuellement hôtel Baudelaire Opéra février 1854 ;
57, rue de Seine, à l'hôtel du Maroc mai 1854 - février 1855 ;
« balloté d’hôtel en hôtel en mars 1855, où il déménage à six reprises. Au début de juin, il loge dans des gîtes de rencontre ;
13, rue Neuve-des-Bons-Enfants, à l'hôtel de Normandie juin 1855 ;
27, rue de Seine juillet - août 1855 ;
18, rue d’Angoulême-du-Temple devenue rue Jean-Pierre-Timbaud janvier - juin 1856. C’est là qu’il emménage de nouveau avec Jeanne Duval, mais les choses ne s’arrangent pas disputes parfois violentes et il la quitte ;
19, quai Voltaire, à l'hôtel Voltaire, actuellement hôtel du quai Voltaire, juin 1856 - novembre 1858. Baudelaire y achève les Fleurs du Mal. L’hôtel se trouve à deux pas de l’imprimerie du Moniteur universel, qui va publier en feuilleton un roman de Poe dans la traduction de Baudelaire - ce dernier dort souvent à l’imprimerie après avoir travaillé toute la journée ;
Allers-retours entre le domicile de sa mère à Honfleur, et le domicile de Jeanne à Paris, 22, rue Beautreillis ; avec quelques séjours à Alençon pour rendre visite à son éditeur Poulet-Malassis novembre 1858 - juin 1859 ;
22, rue d’Amsterdam, à l'hôtel de Dieppe cet hôtel existe toujours 1859-1864. Mme Sabatier habite non loin à partir de 1860, au 10 rue de la Faisanderie. À cette époque, Baudelaire loge Jeanne Duval à Neuilly-sur-Seine, au 4 rue Louis-Philippe, où il cohabite avec elle brièvement de décembre 1860 à janvier 1861 ;
28, rue de la Montagne à Bruxelles, lors d'un séjour en Belgique 1864-1866. Baudelaire loge principalement à l’hôtel du Grand Miroir, Lors de ses rares retours à Paris, il loge à l’hôtel du Chemin de fer du Nord, place du Nord. Jeanne Duval habite à cette époque au 17, rue Sauffroy, dans le quartier des Batignolles. C’est en Belgique que Baudelaire est atteint d’une congestion cérébrale et rapatrié vivant, mais aphasique ;
1, rue du Dôme, dans le quartier de Chaillot, à la clinique du docteur Duval. Baudelaire y entre en juillet 1866 et y meurt le 31 août 1867.

Baudelaire fréquentait beaucoup les cafés. Selon un ami de jeunesse, il composait dans les cafés et dans la rue. Dans sa jeunesse, il retrouvait ses amis Chez Duval, un marchand de vin installé place de l’Odéon. Il affectionnait aussi La Rotonde, un café du quartier Latin. Il prenait souvent ses repas à la Tour d’Argent sur le quai de la Tournelle, un restaurant qui existe toujours sous le même nom mais dont l’intérieur n’a plus rien en commun avec son apparence à l’époque de Baudelaire. Plus tard, ce sera le café Momus de la rue des Prêtres-Saint-Germain-l’Auxerrois, le Mabille, le Prado, la Chaumière et la Closerie des Lilas.

La bride sur le cou

Si Jean-Paul Sartre commence son essai en rappelant une « maxime consolante, il n'a pas eu la vie qu'il méritait, Yves Bonnefoy a pu considérer l'existence de Baudelaire comme une « vie exemplaire . Une telle opinion tranche sur le jugement qui a été porté sur lui par ses proches et par certains de ses contemporains qui lui ont reproché : soit son perpétuel endettement, soit sa vie dissipée, soit ses liaisons avec des filles ou avec Jeanne Duval, fréquentée depuis 1842, la seule femme que j'ai aimée, écrira-t-il en 1845, et vers laquelle il ne cessera de revenir. Pour celui qui a cherché en Baudelaire non seulement la vérité de parole, le sens de la mort mais encore la vérité de vie, le poète des Fleurs du mal, s'étant trouvé séparé, par l'incompréhension de son temps, des occasions vulgaires, des fins médiocres, a été finalement, selon Bonnefoy, réduit au meilleur – au plus obscur de lui-même, sculpté en forme d'esprit. Contraint d'être essentiel au profit bientôt de chacun.
Il n'est pas interdit de chercher l'origine de ce mal dans le roman familial, au sens freudien de l'expression. Charles avait six ans quand son père mourut, plus que sexagénaire. Moins de deux ans après, Mme Baudelaire, née Caroline Dufäys, se remariait avec le lieutenant-colonel Aupick, qui devait finir ses jours en 1857 couvert d'honneurs, puisqu'il avait été élevé au grade de général et qu'il était devenu sénateur. Ce reproche est toujours latent, quelquefois exprimé dans les lettres de Baudelaire à sa mère : Quand on a un fils tel que moi, on ne se remarie pas, lui écrit-il. Quant à son attitude à l'égard du beau-père, elle est changeante et complexe : aux élans d'affection dans les premières lettres succède une agressivité qui ira croissant jusqu'à ce paroxysme, la révolution de 1848. Baudelaire y a été peu mêlé, mais il ne peut s'empêcher d'exprimer sa révolte personnelle et sa rancune exigeante : Il faut fusiller le général Aupick !
L'un des griefs les plus vifs contre lui était le voyage forcé de 1841. Sous l'inspiration d'Aupick, alors commandant de l'École d'application d'état-major, et d'Alphonse, le demi-frère de Charles, fils d'un premier mariage de François Baudelaire, le conseil de famille avait en effet décidé d'éloigner de Paris le jeune homme. Il avait dû s'embarquer à Bordeaux sur le Paquebot-des-Mers-du-Sud, en partance pour Calcutta. Baudelaire n'était pas allé plus loin que l'île Maurice et l'île Bourbon la Réunion et il était revenu seul, en prétendant avoir désormais la sagesse en poche. C'était sans doute trop dire. Du moins tout n'était-il pas négatif : il avait respiré dans l'océan Indien le parfum exotique qui embaume l'un de ses premiers poèmes ; il en consacre deux autres, l'un À une Malabaraise, un autre À une dame créole, Mme Autard de Bragard, chez qui il avait été reçu. Il l'invite, il est vrai, à quitter le pays parfumé que le soleil caresse » pour aller sur les bords de la Seine et de la Loire. Elle y vint, en effet, mais mourut pendant le voyage de retour, en 1857, au cours de cette année décisive pour Baudelaire, puisqu'à deux disparitions, la dame créole, le général Aupick s'ajoute la première publication des Fleurs du mal, confiée aux éditeurs Poulet-Malassis et De Broise, suivie du procès et de la condamnation de l'ouvrage pour délit d'offense à la morale publique, entraînant le retranchement de six poèmes du recueil. L'année 1857 est aussi celle de la mise en vente des Nouvelles Histoires extraordinaires d'Edgar Poe. La première série, Histoires extraordinaires, avait paru l'année précédente.

L'autre grief, qui se retourne tout aussi bien contre l'ex-Mme Baudelaire, est la tutelle à laquelle il est soumis. En septembre 1844, sa famille, inquiète de le voir dissiper l'héritage paternel, l'a doté d'un conseil judiciaire en la personne de maître Ancelle, notaire à Neuilly. C'est pour lui une humiliation affreuse contre laquelle il ne cessera de protester et dont il souffrira toute sa vie. Il a même tenté de se suicider, en juin 1845. Rien n'est plus révélateur de sa détresse que les lettres qu'il écrit à sa mère en 1853, où il annonce s'être séparé de Jeanne, mais demande de l'argent pour elle. Il prétend que le manque de nourriture et l'abus d'eau-de-vie lui ont gâté l'estomac et ruiné la santé, le contraignant à absorber du laudanum pour apaiser ses souffrances. Chez lui, rue Pigalle, il souffre du froid, et, se sentant espionné, il cherche refuge dans des hôtels borgnes. L'état de marasme dans lequel il se trouve est tel qu'il n'a pas la force de décacheter les lettres qu'il reçoit, et que l'écriture même de celle qui l'a fait naître lui cause la même terreur que l'écriture de ses ennemis.
Cette même année 1853, il cherche le soutien de Mme Sabatier, la Présidente, l' Ange plein de bonheur, de joie et de lumières à qui il adresse entre autres le poème intitulé « Réversibilité ». Fut-elle aussi angélique ? Il y a lieu d'en douter. Mais comme la dame créole avait donné une manière de coup d'envoi aux futures Fleurs du mal, Apollonie Sabatier inspire les poèmes d'un cycle lumineux qui contraste, dans le recueil, avec les évocations de la femme à la peau d'ambre, la femme impure avec laquelle il a engagé un impitoyable Duellum .
Il est à la fois excessif et réducteur de mettre un visage précis derrière chacune des figures féminines évoquées dans la poésie de Baudelaire. Aux côtés de Jeanne Duval et de Mme Sabatier, il faut faire place à Marie Daubrun, l'actrice aux yeux verts qui lui préféra Théodore de Banville, à la belle Juive, à Sisina, à Françoise, la Franciscae meae laudes pour laquelle il écrit un poème en latin, à Berthe, à l'énigmatique J.G.F. à laquelle est dédié un poème des Fleurs du mal, L'Héautontimorouménos, et Les Paradis artificiels. Opium et Haschisch, en 1860. Cette dernière se cache-t-elle sous le sobriquet de Jeanne Gentille Femme, comme l'a astucieusement suggéré Jean Pommier ? Est-elle une autre ? Peu importe. Une identification trop rigoureuse tuerait la poésie.
Car si la biographie est nécessaire, le report de la vie sur l'œuvre reste insuffisant et parfois trompeur. L'autre danger est de faire subir à Baudelaire ce qu'Antonin Artaud stigmatisait, à propos de Gérard de Nerval, dans sa lettre à Georges Le Breton du 7 mars 1946. Sous prétexte d'éclairer les vers d'un grand poète du point de vue de la sémantique, de l'histoire, de l'archéologie ou de la mythologie, le commentateur ne ferait qu'en enténébrer la vie, que manquer la nécessité vivante de sa création. Or c'est le processus même de cette création qu'il faut tenter de reconstituer

Regards sur l'Å“uvre Horreur et extase Spleen baudelairien.
.
Tout enfant, j'ai senti dans mon cœur deux sentiments contradictoires : l'horreur de la vie et l'extase de la vie.Mon cœur mis à nu.
Toutes les grandes œuvres romantiques témoignent de ce passage de l'horreur à l'extase et de l'extase à l'horreur. Ces impressions naissent chez Baudelaire du sentiment profond de la malédiction qui pèse sur la créature depuis la chute originelle. En ce sens, les Fleurs du Mal appartiennent au Génie du christianisme.
L'œuvre entière offre un aspect étrange et puissant, conception neuve dans sa riche et sombre diversité, marquée du sceau énergique d'une longue méditation.... Les Fleurs du mal appartiennent au Génie du Christianisme..

Analysant ce qu'il appelait le vague des passions dans la préface de 1805 à cet ouvrage, Chateaubriand écrivait : Le chrétien se regarde toujours comme un voyageur qui passe ici-bas dans une vallée de larmes, et qui ne se repose qu'au tombeau. Pour Baudelaire, il ne s'agit ni de littérature, ni de notions plus ou moins abstraites, mais du spectacle vivant de sa triste misère . Comme la nature, l'homme est souillé par le péché originel et, à l'instar de René ou de Werther Goethe, Baudelaire n'éprouve le plus souvent que le dégoût pour la multitude vile Recueillement. Ce qui le frappe surtout, c'est l'égoïsme et la méchanceté des créatures humaines, leur paralysie spirituelle, et l'absence en elles du sens du beau comme du bien. Le poème en prose La Corde, s'inspirant d'un fait vrai, raconte comment une mère, indifférente à l'égard de son enfant qui vient de se pendre, s'empare de la corde fatale pour en faire un fructueux commerce.

Baudelaire devait en souffrir plus que tout autre35 : L'Albatros dénonce le plaisir que prend le vulgaire à faire le mal, et, singulièrement, à torturer le poète.
Dans L'Art romantique, Baudelaire remarque : C'est un des privilèges prodigieux de l'Art que l'horrible, artistement exprimé, devienne beauté et que la douleur rythmée et cadencée remplisse l'esprit d'une joie calme. Des poèmes, comme Le Mauvais Moine, L'Ennemi, Le Guignon montrent cette aspiration à transformer la douleur en beauté. Peu avant Baudelaire, Vigny et Musset avaient également chanté la douleur.
Comment Baudelaire aurait-il pu croire à la perfectibilité des civilisations ? Il n'a éprouvé que mépris pour le socialisme d'une part, le réalisme et le naturalisme d'autre part38. Avec une exception pour le réaliste Honoré de Balzac, chez qui il voyait bien davantage qu'un naturaliste, Si Balzac a fait de ce genre roturier [le roman de mœurs une chose admirable, toujours curieuse et souvent sublime, c'est parce qu'il y a jeté tout son être. J'ai maintes fois été étonné que la grande gloire de Balzac fût de passer pour un observateur ; il m'avait toujours semblé que son principal mérite était d'être visionnaire, et visionnaire passionné.
Les sarcasmes à l'égard des théories socialistes, après 1848, réalistes ou naturalistes se multiplient dans son œuvre. Comme Poe dont il traduit les écrits, il considère le Progrès, la grande idée moderne, comme une extase de gobe-mouches. Pour en finir avec ce qu'il appelle les hérésies modernes, Baudelaire dénonce encore l'hérésie de l'enseignement : La poésie, pour peu qu'on veuille descendre en soi-même, interroger son âme, rappeler ses souvenirs d'enthousiasme, n'a pas d'autre but qu'elle-même. … Je dis que si le poète a poursuivi un but moral, il a diminué sa force poétique ; et il n'est pas imprudent de parier que son œuvre sera mauvaise.
Le poète ne s'en révolte pas moins contre la condition humaine. Il dit son admiration pour les grandes créations sataniques du romantisme comme Melmoth roman noir - gothique - de Charles Robert Maturin. Négation de la misère humaine, la poésiene peut être pour lui que révolte. Dans les Petits poèmes en prose, celle-ci prend une forme plus moderne et se fait même humour noir.

Genèse et évolution des Fleurs du mal

À la date de 1853 ont déjà éclos quelques-unes des fleurs du mal, en tout cas des poèmes, parfois précoces, qui seront insérés dans le recueil de 1857. À une dame créole, sans doute le poème le plus ancien, a paru dès le 25 mai 1845 dans le journal L'Artiste ; il deviendra la pièce LIV des Fleurs du mal dans la première édition. Don Juan aux enfers paraît le 8 septembre 1846 dans le même journal, sous le titre L'Impénitent. Il deviendra la pièce XV dans chacune des éditions des Fleurs du mal. Au total, le recueil de 1857 ne contient que 57 pièces nouvelles sur les cent qui le constituent. Il est composé de cinq sections Spleen et idéal, Fleurs du mal », Révolte, Le Vin et La Mort.
Plusieurs titres, correspondant à divers états du projet, ont précédé le titre définitif, qui fut suggéré, dit-on, par Hippolyte Babou : Les Lesbiennes, dont il reste au moins trois morceaux, Les Limbes, onze sonnets, en 1851, dans Le Messager de l'Assemblée, qui rappellent le début de l'Inferno de Dante. Il est plus important d'assister à ce véritable acte de naissance que constitue la publication le 1er juin 1855, dans la Revue des Deux Mondes à laquelle Alfred de Musset avait tant donné, de dix-huit poèmes déjà regroupés sous le titre Les Fleurs du mal. Par la suite, Baudelaire persiste et signe : pour la première édition de 1857, pour l'édition autorisée de 1861 126 poèmes, pour les Nouvelles Fleurs du mal, seize poèmes publiés en 1866 dans Le Parnasse contemporain, pour la troisième édition à laquelle la maladie et la mort l'empêcheront de donner sa forme définitive, ce sera l'édition posthume publiée chez Michel Lévy, qui contient 151 poèmes. Ces Fleurs du mal sont des fleurs maladives, selon l'interprétation qu'il suggère lui-même dans la dédicace à Théophile Gautier. Mais plus encore elles naissent du gouffre, de l'enfer, de ce qui peut être le plus hideux et le plus repoussant. D'où la section intitulée seulement Fleurs du mal, placée en abyme dès l'édition de 1857, puis repoussée en quatrième position en 1861, tandis qu'une nouvelle section Tableaux parisiens vient succéder à Spleen et idéal. Elle amplifie la modernité du recueil en mettant l'accent sur l'imaginaire de la ville.
Baudelaire n'a cessé d'ajouter, et en particulier les pièces admirables qu'il a conçues à Honfleur en 1859, lors de brefs et rares séjours dans la maison qu'y avait fait aménager feu le général Aupick, la Maison-Joujou : La Chevelure, en particulier, et Le Voyage, le poème le plus long, celui par lequel s'achèvera l'édition autorisée de 1861, ouvrant sur la mort et sur l'inconnu dont elle réserve peut-être la découverte. Il n'a cessé non plus de retrancher : non seulement les pièces condamnées par la censure impériale et appelées à devenir Les Épaves, dans une plaquette composite publiée à Bruxelles en 1866, mais les poèmes qu'il a choisis lui-même d'éliminer au fur et à mesure, en raison de sa très grande exigence d'artiste. Il lui arrive même d'avoir peur de ce qui naît de sa plume, comme si c'était monstrueux. Comme la mère, dans Bénédiction, est épouvantée à la naissance de son enfant, cette dérision,ce monstre rabougri, cet arbre misérable qui a poussé en elle comme un arbre maudit, il recule devant ce qui sort de son imagination et de sa plume. Rien n'est plus révélateur, rien n'est plus étonnant à cet égard que la lettre qu'il adresse à sa mère le 9 juillet 1857, où il lui annonce la publication de ses poésies, Les Fleurs du mal, et où il présente le livre comme « revêtu d'une beauté sinistre et froide. Il l'a conçu, écrit-il, avec fureur et patience. Mais quand, chez l'imprimeur, il l'a vu dans son premier état, il a pris peur : épouvanté moi-même de l'horreur que j'allais inspirer, raconte-t-il, j'en ai retranché un tiers aux épreuves.

Art poétique

Rejetant le réalisme et le positivisme contemporains, Baudelaire sublime la sensibilité et cherche à atteindre la vérité essentielle, la vérité humaine de l'Univers, ce qui le rapproche du platonisme. Il écrit ainsi, en introduction à trois de ses poèmes dans le Salon de 1846 : La première affaire d'un artiste est de substituer l'homme à la nature et de protester contre elle. Cette protestation ne se fait pas de parti pris, froidement, comme un code ou une rhétorique, elle est emportée et naïve, comme le vice, comme la passion, comme l'appétit. » Et il ajoute, dans le Salon de 1859 :
" L'artiste, le vrai artiste, le vrai poète, ne doit peindre que selon ce qu'il voit et ce qu'il sent. Il doit être réellement fidèle à sa propre nature".
Baudelaire énonce ainsi les principes de la sensibilité moderne :
" Le beau est toujours bizarre. Je ne veux pas dire qu'il soit volontairement, froidement bizarre, car dans ce cas il serait un monstre sorti des rails de la vie. Je dis qu'il contient toujours un peu de bizarrerie, de bizarrerie non voulue, inconsciente, et que c'est cette bizarrerie qui le fait être particulièrement le Beau."
C'est pourquoi l'imagination est pour lui la reine des facultés. En fait, elle substitue une traduction légendaire de la vie extérieure ; à l'action, le rêve.
Cette conception de la poésie annonce celle de presque tous les poètes qui vont suivre. Cependant, Baudelaire n'a pas vécu son œuvre. Pour lui, vie et poésie restent dans une certaine mesure séparées ce qu'il exprime en disant: La poésie est ce qu'il y a de plus réel, ce qui n'est complètement vrai que dans un autre monde. Là où Baudelaire et Stéphane Mallarmé ne pensent qu'à créer une œuvre d'art, les surréalistes voudront, après Arthur Rimbaud, réaliser une œuvre de vie et essaieront de conjuguer action et écriture. Malgré cette divergence d'avec ses successeurs, Baudelaire fut l'objet de vibrants hommages, tel celui que lui rendit le jeune Rimbaud, pour qui il représente un modèle :
" Baudelaire est le premier voyant, roi des poètes, un vrai Dieu. Il suffit de comparer ces propos :
" … qui n'a connu ces admirables heures, véritables fêtes du cerveau, où les sens plus attentifs perçoivent des sensations plus retentissantes, où le ciel d'un azur plus transparent s'enfonce dans un abîme plus infini, où les sons tintent musicalement, où les couleurs parlent, et où les parfums racontent des mondes d'idées ?
Eh bien, la peinture de Delacroix me paraît la traduction de ces beaux jours de l'esprit. Elle est revêtue d'intensité et sa splendeur est privilégiée. Comme la nature perçue par des nerfs ultra-sensibles, elle révèle le surnaturalisme
à ce passage du Premier Manifeste du surréalisme :
"réduire l'imagination à l'esclavage, quand bien même il y irait de ce qu'on appelle grossièrement le bonheur, c'est se dérober à tout ce qu'on trouve, au fond de soi, de justice suprême. La seule imagination me rend compte de ce qui peut être, et c'est assez pour lever un peu le terrible interdit ; assez aussi pour que je m'abandonne à elle sans crainte de me tromper"

Ainsi, le surnaturalisme porte en germe certains aspects de l'œuvre de Lautréamont, de Rimbaud et du surréalisme même.
C'est à propos de la peinture d'Eugène Delacroix et de l'œuvre de Théophile Gautier que Baudelaire a usé de cette formule célèbre qui caractérise si justement son art : " Manier savamment une langue, c'est pratiquer une espèce de sorcellerie évocatoire. C'est alors que la couleur parle, comme une voix profonde et vibrante, que les monuments se dressent et font saillie sur l'espace profond ; que les animaux et les plantes, représentants du laid et du mal, articulent leur grimace non équivoque, que le parfum provoque la pensée et le souvenir correspondants ; que la passion murmure ou rugit son langage éternellement semblable".
Baudelaire utilise régulièrement la synesthésie pour créer une fusion des sens, notamment dans le poème Correspondances.
Avant lui, seul Gérard de Nerval avait pratiqué une poésie qui ne fût pas littérature. Libérée du joug de la raison, la poésie peut désormais exprimer la sensation.
" En faisant de Baudelaire le chef de file d'une poésie de la sensation, Barrès le montre s'épuisant à "chercher de sensations en sensations des frissons, des frissons nouveaux"
Lors de l'inauguration du monument Baudelaire au cimetière du Montparnasse, Armand Dayot, inspecteur des Beaux-Arts, rappellera cette recherche de la sensation :
"Ce fait même d'avoir découvert un frisson nouveau, frisson qui va jusqu'à l'extrême limite de la sensibilité, presque au délire de l'Infini, dont il sut emprisonner les manifestations les plus fugitives, fait de Baudelaire un des explorateurs les plus audacieux, mais aussi des plus triomphants de la sensation humaine"
Déjà, dans ses meilleurs poèmes, Baudelaire, tout comme Mallarmé et Maurice Maeterlinck après lui, ne conserve du vers classique que la musique. Par les césures irrégulières, les rejets et les enjambements, il élude le caractère trop mécanique de l'alexandrin et pose les prémices du vers impair de Verlaine et des dissonances de Laforgue, voire du vers libre. Baudelaire jette ainsi les bases du symbolisme.
Inspiré par la lecture de Gaspard de la nuit d'Aloysius Bertrand, qui avait introduit en France le poème en prose, Baudelaire compose les Petits poèmes en prose et explique, dans sa préface :
"Quel est celui de nous qui n'a pas, dans ses jours d'ambition, rêvé le miracle d'une prose poétique, musicale sans rythme et sans rime, assez souple et assez heurtée pour s'adapter aux mouvements lyriques de l'âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience ? ".

Lire la suite -> http://www.loree-des-reves.com/module ... ost_id=6630#forumpost6630

Posté le : 30/08/2014 23:51
Transférer la contribution vers d'autres applications Transférer



 Haut   Précédent   Suivant




[Recherche avancée]


Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

Connexion
Identifiant :

Mot de passe :

Se souvenir de moi



Mot de passe perdu ?

Inscrivez-vous !
Partenaires
Sont en ligne
57 Personne(s) en ligne (19 Personne(s) connectée(s) sur Les Forums)

Utilisateur(s): 0
Invité(s): 57

Plus ...