Plume d'Or
Inscrit: 18/01/2012 14:41
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(Le voilà enfin à la bonne place. Merci Couscous et KJtiti)
« C’est moi, Alessandro! Dites à Dom Carmelo que l’âme de mon bon maître s’en va quitter ce monde! »
On pousse la porte de la demeure du vieux maître. « Ah! c’est vous mon père. Il vous a réclamé. Il est tant affaiblit! »
Cependant qu’il procède aux derniers sacrements, le prêtre approche son oreille des quelques mots décharnés que tente de balbutier le vieil architecte. Il entent à peine: « douze poulets et trois pommes ». Il se dit: « c’est sans doute un ultime délire de ce bon mangeur qu’était le maître. » « J’entends bien mon fils. Douze poulets et trois pommes! » reprend-t-il distinctement. Du peu de lucidité qu’il lui reste, le mourant comprend le quiproquo, il fait un gigantesque effort pour répéter, en détachant péniblement chaque syllabe: « dou-ze-cou-dées-et-trois-pau-mes », ajoutant, après une lente bouffée d’air et avec le peu d’agacement que lui consentent ses dernières forces: « les mesures! » Puis à son grand coussin abandonne d’un coup sa volonté. Tandis que le prêtre quelque peu dérouté, lève les yeux au plafond et cherche dans une travée de plâtre une quelconque indication, un sens aux propos du vénérable maître, celui-ci, rassemblant ses forces restantes, poursuit: « c’étaient des unités Pisanes! » Le prêtre: « Ah oui! Pisanes!… Heu…Pisanes? » Le mourant: « Iacopo… Ponente… était… Florentin! » Le prêtre: « Iacopo Ponente? » Le mourant: « le…maître….terrassier… » il s’ensuit un très long silence interrompu seulement par de gutturaux gargouillis.
Soudain, mu par une énergie aussi inattendue que mystérieuse, le vieux maître entrouvrant son regard vers d’accablants souvenirs, ajoute lentement d’une voix faible mais claire: « La coudée Pisane vaut une palme de plus que la florentine. Lorsque je me suis aperçu de la méprise, les travaux étaient trop engagés, alors je n’ai rien dit. » « D’après mes calculs, une fois achevée, elle pourrait s’incliner jusqu’à … », alourdie par la mort, sa tête bascule et penche vers la fenêtre où émergent les perches sommitales de l’immense cage en bois qui contient la base de la tour, haute de trente coudées pisanes.
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Posté le : 18/08/2014 21:07
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