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#211 Jean-Edern Hallier
Loriane Posté le : 28/02/2015 17:47
Le 1er mars 1936 naît Jean-Edern Hallier

à Saint-Germain-en-Laye et mort, à 60 ans, le 12 janvier 1997 à Deauville, écrivain, polémiste, pamphlétaire, journaliste, critique littéraire, présentateur de télé et animateur de télévision français. Il est le créateur du prix anti-Goncourt et du journal L'Idiot international.Ses Œuvres principales sont Le premier qui dort réveille l'autre en 1977, Fin de siècle en 1980, L'Évangile du fou en 1986, L'Honneur perdu de François Mitterrand en 1996.

En bref

Il fonde, en 1960, avec Philippe Sollers et quelques amis la revue Tel Quel, avant d'en être exclu trois ans plus tard pour divergences de vues. Après Mai 68, il participe à la création de l'Idiot international, mensuel soutenu par Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir. Fasciné par le pouvoir, un moment proche de François Mitterrand, il accumule, entre 1975 et 1981, les pamphlets et les coups d'éclat. En 1982, son enlèvement, prétendument perpétré par les Brigades révolutionnaires françaises, laisse perplexe. C'est aussi le moment que choisit J.-E. Hallier pour définitivement tourner le dos à celui qu'il avait jadis adulé en tentant de faire publier l'Honneur perdu de François Mitterrand, dans lequel il révèle l'existence de Mazarine, la fille illégitime du président. Cette menace lui vaudra de figurer sur la liste des personnalités visées par les écoutes téléphoniques de la cellule élyséenne. Persuadé d'être alors victime d'une persécution en règle, l'écrivain fait feu de tout bois en attaquant tour à tour les proches du pouvoir socialiste puis en se ralliant bruyamment à Jacques Chirac lors de l'élection présidentielle de 1995. Son accident vasculaire dans une rue de Deauville alors qu'il faisait de la bicyclette met fin à une carrière de pamphlétaire aussi magistralement orchestrée que chaotique. Il laisse néanmoins plusieurs romans les Aventures d'une jeune fille, 1963 ; le Grand Écrivain, 1967 ; Chagrin d'amour, 1974 ; Le premier qui dort réveille l'autre, 1977 ; Chaque matin qui se lève est une leçon de courage, 1978 ; Fin de siècle, 1980 ; Bréviaire pour une jeunesse déracinée, 1982 ; l'Évangile du fou, 1986 ; la Force d'âme, 1992, qui apportent leur témoignage au malaise de la fin du siècle.
Fondateur de la revue Tel Quel en 1960 avec Sollers et Huguenin, directeur de l'Idiot international après 1968, il fait l'autocritique de son engagement politique et raconte sa désillusion dans ses romans la Cause des peuples, 1972, essais, Bréviaire pour une jeunesse déracinée, 1982 ; Chaque matin qui se lève est une leçon de courage, 1978 et écrits autobiographiques Carnets impudiques, 1988. Pamphlétaire et polémiste, détracteur virulent de V. Giscard-d'Estaing, Lettre ouverte au colin froid, 1980 avant de pourfendre son successeur l'Honneur perdu de François Mitterrand, 1992, il se définit comme le Chateaubriand de l'ordure et multiplie les interventions contre les institutions et les gens en place. Agitateur salutaire pour les uns, provocateur paranoïaque, égaré et insupportable pour les autres, dandy narcissique, doué d'un grand sens de sa propre mise en scène l'Enlèvement, 1983, il est aussi un romancier au lyrisme exarcerbé et désespéré Le premier qui dort réveille l'autre, 1977 ; Fin de siècle, 1980.

Sa vie

Borgne de naissance, Jean-Edern Hallier est le fils du général André Hallier 1892-1988, héros de la Première Guerre mondiale, puis attaché militaire en Hongrie, qui possédait un manoir familial à Edern dans le Finistère et de Marguerite Leleu 1903-1984, d'origine protestante alsacienne et juive selon lui.

Se situant à ses débuts dans la mouvance du nouveau roman, celui qui fut directeur de Tel Quel en 1960, en est exclu en 1963, à la suite d'une virée rocambolesque de Philippe Sollers, dans sa famille, en Suisse. En février 1973, il arrive finalement à être interviewé par Pierre de Boisdeffre et conclut en disant : Croyez bien que ce livre est un livre d'humour. L'année suivante, il publie Chagrin d'amour 1974 dont il fait la promotion dans Ouvrez les guillemets de Bernard Pivot, qui déclare : Cet écrivain sera un jour à l'Académie française. Il part pour le Chili de Pinochet avec des fonds rassemblés par Régis Debray pour la résistance, revient sans l'argent ayant acheté 400 000 hectares dans le bassin amazonien.
Homme de média, Hallier a hébergé en 1977 la première radio pirate déclarée — Radio Verte, de tendance écologiste — qui fera beaucoup parler d'elle en tant qu'écho d'un phénomène nouveau. Dans la lignée des événements de Mai 68, auxquels il avait pris part, il a également créé, l'année suivante en octobre 1969, le journal satirique L'Idiot international — patronné à ses débuts par Simone de Beauvoir qui, par la suite, prendra ses distances avec le journal—, ce qui vaudra plus tard à Hallier d'être accusé d'entretenir un réseau rouge-brun. Aux yeux de certains journalistes, le polémiste était d'autant plus suspect qu'il avait, depuis quelques années, entamé un dialogue avec Alain de Benoist, publiant notamment un de ses essais aux éditions Libres-Hallier filiale des Éditions Albin Michel : Les Idées à l'endroit 1979.
En 1979, il publie un pamphlet anti-giscardien, Lettre ouverte au colin froid, dénonçant notamment son libéralisme économique inspiré des États-Unis, ses louanges de la social-démocratie, le marketing politique ou encore l'anglicisation à outrance du français.
En 1982, l'écrivain est soupçonné d'avoir simulé son propre enlèvement et commandité un attentat contre l'appartement de Régis Debray. Les sources de ces faits rapportés sont nombreuses : récemment l'auteur de sa biographie a confirmé le fait, ainsi que Gilles Ménage. En 1977, il aurait déjà commandité un mini-attentat chez Françoise Mallet-Joris, juré Goncourt, afin de protester contre les magouilles des prix littéraires : la seule conséquence de ce geste fut un feu de paillasson.
En juin 1991, National Hebdo affirme que Jean-Edern Hallier va rallier le Front national. Dans un entretien accordé au Monde, l'écrivain dément, mais ajoute : Le Pen représente beaucoup de Français de la France profonde. Il faut réconcilier Doriot et Thorez, tout en se déclarant de gauche.
Critique littéraire, il est également animateur d'émissions littéraires, voir émission de télévision littéraire en France sur Paris Première avec le Jean-Edern's Club, où il se permettait tout, même de jeter les livres par-dessus son épaule ou dans une poubelle, et sur M6, avec A l'ouest d'Edern.
Durant les dernières années de sa vie, Jean-Edern Hallier s'est adonné à la peinture. Il est l'auteur de nombreux portraits.
Il s'est aussi attaqué à l'homme d'affaires Bernard Tapie dans L'Idiot international en 1991 puis en publiant son casier judiciaire en 1993. D'autres nombreuses personnalités ont aussi été violemment attaquées à cette époque, cela jusqu'à son décès en 1997.
Écrivain pamphlétaire et habitué des coups d'éclats médiatiques, Jean-Edern Hallier s'est montré particulièrement féroce envers le pouvoir socialiste et François Mitterrand — dont il fut un temps proche — en menaçant de révéler l'existence de sa fille cachée, Mazarine Pingeot, son passé lié au Maréchal Pétain et son cancer, dans un pamphlet, L'Honneur perdu de François Mitterrand, qu'il mettra plusieurs années à publier11. Cette hostilité aurait eu pour origine des promesses non tenues présidence d'une chaîne de télévision ou ambassade.
Le pamphlétaire, alors en villégiature à Deauville Normandy Barrière, meurt le matin du 12 janvier 1997 peu avant 8 h du matin, alors qu'il circule à vélo, bien qu'à moitié aveugle, sans que personne n'ait été témoin de l'accident. Peu de temps après la découverte du corps, il a été constaté que le coffre-fort de sa chambre d'hôtel — qui contenait des photocopies de documents concernant François Mitterrand et Roland Dumas — avait été vidé. Son meuble de l'appartement parisien avenue de la Grande-Armée14, avait également fait l'objet d'une visite semblable13. Il devait déjeuner quelques heures plus tard avec le journaliste Karl Zéro, qui fut d'ailleurs appelé pour l'identification du cadavre.
L'hypothèse de son assassinat a été plusieurs fois avancée, notamment par son frère, Laurent Hallier dans une entrevue accordée à Christian Lançon pour le magazine Généreux en novembre 1998, ou par le même Christian Lançon et Dominique Lacout dans La Mise à mort de Jean-Edern Hallier16. Cependant, les plaintes déposées contre X n'ont pas été jugées recevables.
Certains anciens amis de cet homme très décrié gardent le souvenir d'une sorte de clown génial, fantôme de Don Quichotte, venu réenchanter un monde de comptables et de retraités . Et qui, au-delà des frasques et des fulgurances, n'avait pas complètement perdu sa sensibilité18.
Jean-Edern Hallier est le père de trois enfants : Béatrice Szapiro née en 1958 de sa liaison avec Bernadette Szapiro, fille de l'écrivain belge Béatrix Beck, puis Ariane Hallier, née en 1967 et Frédéric-Charles Hallier, né en 1981 avec Anna Devoto-Falck, héritière du Gruppo Falck.

Une personalité contestée

« J'ai une mauvaise image dans les coteries intellectuelles ; c'est normal, j'ai d'abord une forte image populaire ; en somme, je suis le Voltaire des garçons coiffeurs. » Ainsi, Jean-Edern Hallier s'exprimait-il sur lui-même dans les colonnes de L'Événement du jeudi, le 16 juillet 1992. À cette date, celui qui rejetait la sommaire, et trop commode, étiquette de clown médiatique, au nom d'une hybridité qui lui faisait avoir « un pied dans le showbiz » et l'autre « dans la poussière infinie de la bibliothèque d'Alexandrie », allait entrer une nouvelle fois en campagne contre la corruption des lettres, et augmenter d'épisodes riches en rebondissements sa longue carrière de polémiste.
Cette carrière-là commence, en 1963, avec sa retentissante exclusion de la revue Tel Quel qu'il avait fondée trois ans plus tôt en compagnie de Jean-René Huguenin, Philippe Sollers et Renaud Matignon. Pour ce fils de général, diplômé de l'université d'Oxford en littérature comparée, latin-grec et philosophie, ce groupe devait être à l'origine du « dernier mouvement littéraire de la jeunesse française ». Sous sa direction (1960-1963), Tel Quel publia des textes de Francis Ponge, Henri Michaux, Louis-René des Forêts, de Georges Bataille aussi, dont Les Larmes d'Éros.
La rupture de 1963 fut précédée, en 1962, de la tragique disparition de Jean-René Huguenin, dont le souvenir ne cessera de hanter Hallier né le même jour que lui – le 1er mars 1936 –, et qui était son « jumeau stellaire ». Elle fut suivie d'une très vive déception – celle de ne pas voir couronner par le prix Médicis son premier roman, Les Aventures d'une jeune fille (1963), un « roman de terreur » qui avait cependant enthousiasmé Michel Foucault. En dépit des critiques louangeuses de Klossowski et de Mandiargues, ni le livre suivant, Le Grand écrivain, ni La Cause des peuples (1972) n'obtinrent la récompense espérée par celui qui se jugeait pourtant « goncourable ». Cette frustration devait trouver sa compensation dans une dénonciation à répétition des trucages littéraires et des stratégies éditoriales de « Galligrasseuil », le dépôt d'une bombe au domicile de Robert Sabatier et la fondation d'un « anti-Goncourt ».
Les romans que publie, tout au long des années 1970 et 1980, cet « héritier passionné de la tradition classique » ne sont pas dissociables des vicissitudes de la vie politique. Après Mai-68, qui l'a vue passer dans les rangs des gauchistes, Hallier fonde, et dirige par intermittence, L'Idiot international, avec l'appui effectif de Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre. En 1973, paraît Chagrin d'amour, qui lui vaut des démêlés avec Régis Debray, mis en scène dans ce tableau des révolutions en Amérique latine. Entre l'appel à voter pour François Mitterrand en 1974 et le début d'une longue campagne de dénigrement contre le président de la République élu en 1981, ce « guerrier des lettres », qui donne successivement Le Premier qui dort réveille l'autre (1977), Chaque matin qui se lève est une leçon de courage (1978), Un barbare en Asie du Sud-Est. Fin de siècle (1980) où se mêlent amertume et fulgurances, multiplie les interventions et les provocations. Animateur du Secours rouge, il fonde en 1974 les Éditions Hallier qui deviennent, en 1980, les Éditions Jean-Edern Hallier ; il crée, en 1977, avec Antoine Lefébure, la première radio libre. En 1978, il se présente pour la première fois à l'Académie française. L'année suivante, c'est la dénonciation de l'évolution du régime (Lettre ouverte au colin froid) et la constitution d'une liste bretonne pour les élections européennes.
Après 1981 et le spectaculaire retournement d'un amour en haine (« J'ai fait élire Mitterrand, je le quitte »), l'écrivain cède de plus en plus le pas à l'imprécateur... et à l'histrion. Prétendument enlevé, en 1972, par de mystérieuses « brigades révolutionnaires françaises », il commandite en juillet de la même année un attentat contre Régis Debray. Mais la réussite stylistique de L'Évangile du fou (1986) ne peut faire oublier le détestable cynisme de L'Enlèvement (1983). Conseiller littéraire aux éditions Albin Michel en 1980, collaborateur à Paris-Match à partir de 1983 et du Matin de Paris entre 1983 et 1987, Jean-Edern Hallier aborde la décennie de 1990 avec un livre-entretien, Le Dandy de grand chemin (1991). En 1992, il publie aux Belles Lettres, dont il assume la direction littéraire, La Force d'âme, recueil de ses éditoriaux de L'Idiot international – « roman vécu de ma pensée de 1989 à 1992 » –, suivi d'un pamphlet qu'il se proposait déjà de publier en 1982, L'Honneur perdu de François Mitterrand – « mon monument polémique, mes Châtiments à moi ».
Hallier, qui s'en prend désormais systématiquement aux « sous-diacres socialistes » de « l'église mitterrandouteuse » et qui trouve ses principales têtes de Turc dans l'entourage du président de la République, est en fait obsédé par ce dernier : « Il est mon Charles X, je suis son Chateaubriand, son seul véritable historiographe ; la vision qu'on aura plus tard de lui sera la mienne. » Un conflit l'oppose à son éditeur à la fin de 1992, lors de la parution de son dernier livre, Je rends heureux (initiales de Jean-René Huguenin), dont il accuse Albin Michel d'avoir retardé la sortie pour l'exclure de la course au Goncourt. Et c'est la pénible bataille du Monde des livres consécutives aux comptes rendus négatifs, par Josyane Savigneau, de ses deux derniers ouvrages ; puis des démêlés avec le pouvoir, qu'il accuse de le persécuter ; des procès ; un grave accident de santé aussi – une thrombose de l'œil droit qui l'éloigne des travaux d'écriture –, et d'autres événements évoqués dans Le Refus, ou la Leçon des ténèbres (1994), préfacé par Anthony Palou, qui le montrent « tel Voltaire au jour le jour ».
« La poésie transgresse toujours les lois ; l'injure en fait partie », « La nature du style, c'est de transgresser le droit », avait estimé celui qui devait finalement rallier, comme animateur d'émissions littéraires télévisées, la société de spectacle si souvent pourfendue. Sans doute ; mais on peut objecter que l'expression la plus forte de ce que l'on veut dire est rarement la meilleure, et que la réduction de l'adversaire à quelques traits physiques lourdement caricaturés relève du procédé abject naguère utilisé par le plus mauvais Céline et le pire Brasillach. Il reste cependant que ce pamphlétaire pervers à l'ironie cruelle, passé tristement maître dans l'art de la palinodie et qui croyait vivre sa vie « comme le brouillon de son œuvre », en entendant d'abord démystifier un système fondé sur une falsification généralisée, peut aussi apparaître comme le bouc émissaire de la cité endormie qu'il voulait réveiller.Bernard Valade

Procès

De juillet à octobre 1989, Jean-Edern Hallier et son journal sont condamnés à verser 250 000 F à Jack Lang et à son épouse pour diffamation et injures publiques, puis 100 000 F à Christian Bourgois pour propos injurieux et atteinte à la vie privée, 300 000 F à Georges Kiejman pour injures, diffamation et atteinte à la vie privée, et enfin 400 000 F à Bernard Tapie pour des atteintes d'une gravité exceptionnelle que ni l'humour ni les principes régissant la liberté de la presse ne sauraient justifier, selon les termes du tribunal correctionnel de Paris.
En juillet 1991, Jean-Edern Hallier est condamné à cinquante mille francs d'amende et quatre-vingt mille francs de dommages-intérêts à plusieurs associations antiracistes, pour provocation à la haine raciale, par la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, à la suite des « qualificatifs outrageants ou abjects s'appliquant à désigner les juifs comme la lie de l'humanité dans un éditorial de L'Idiot international publié pendant la guerre du Golfe. En septembre de la même année, l'écrivain est condamné à payer 800 000 F de dommages-intérêts à Bernard Tapie pour publication, dans L'Idiot international, de propos diffamatoires, injurieux, et attentatoires à sa vie privée.
À la suite de ses multiples condamnations judiciaires, L'Idiot international cesse de paraître, le journal ne pouvant plus faire face à ses dettes à cause de trop nombreux procès intentés contre lui.
En 2005, l'ancien directeur-adjoint du cabinet de Mitterrand, Gilles Ménage, et le chef de la cellule Élysée, Christian Prouteau, ont été condamnés dans le dossier Hallier de l'affaire des écoutes de l'Élysée. L'ancien directeur de cabinet de Pierre Mauroy, Michel Delebarre, et l'ancien directeur de cabinet de Laurent Fabius, Louis Schweitzer, ont également été condamnés par le tribunal correctionnel de Paris. La justice a ensuite condamné en 2008 l'État à indemniser le fils, la fille et le frère de Jean-Edern Hallier.

Å’uvres

Publications

Les Aventures d'une jeune fille 1963
Rapt de l'imaginaire 1964
Le Grand écrivain 1967
La Cause des peuples 1972
Chagrin d'amour 1974
Le premier qui dort réveille l'autre 1977 Prix Bretagne
Chaque matin qui se lève est une leçon de courage 1978
Romans. Œuvres complètes 1978, 1982, 1994, 1997
Lettre ouverte au colin froid 1979
Fin de siècle 1990
Un barbare en Asie du Sud-Est 1980
Bréviaire pour une jeunesse déracinée 1982
L'enlèvement 1983
Le Mauvais esprit, avec Jean Dutourd 1985
L'Évangile du fou 1986
Carnets impudiques 1988
Conversations au clair de lune 1990
Le Dandy de grand chemin, conversations avec Jean-Louis Remilleux 1991
La Force d'âme 1992
Je rends heureux 1992
Les Français, dessins, éditions Ramsay 1993
Le Refus ou la leçon des ténèbres 1994
L'Honneur perdu de François Mitterrand 1996
Les Puissances du mal 1996
Fulgurances, textes et dessins 1996
Journal d'outre-tombe 1998
Fax d'outre-tombe 2007

Textes

Interview de Jean-Paul Sartre, Du Rôle de l'intellectuel dans le mouvement révolutionnaire 1971
Préface à Mille pattes sans tête de François Coupry 1976
Préface à Je rêve petit-bourgeois de Michel Cejtlin 1979
Préface au Droit de parler de Louis Pauwels 1981
Préface au Icônes de l'instant de Patrick Bachellerie 1987
Préface à Je défends Barbie de Jacques Vergès 1988
Préface aux Poèmes de sans avoir de Jean-Claude Balland 1990
Préface à Petites blagues entre amis de Paul Wermus 1996

Presse

Atelier Jean-Edern Hallier 1998
L'Idiot International. Une anthologie, collectif 2005

Théâtre

Le Genre humain, texte de Jean-Edern Hallier, mise en scène Henri Ronse, Espace Pierre Cardin, 1976.


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#212 Tristan Corbière
Loriane Posté le : 28/02/2015 17:03
Le 1er mars 1875 meurt Édouard-Joachim Corbière, dit Tristan Corbière

à Morlaix, à 29 ans, né le 18 juillet 1845 à Ploujean en Bretagne aujourd'hui Morlaix, poète français breton proche du symbolisme, figure du poète maudit, Adjectifs dérivés Corbiérien, corbiérienne sont des adjectifs dérivés de son oeuvre, fils du romancier maritime Edouard Corbière, auteur de "Les amours jaunes"

En bref

Bien que son œuvre, Les Amours jaunes 1873, s'avère moins magnifique que la leur, le nom de Tristan Corbière, fils d'un écrivain de renom régionaliste, Édouard Corbière, devait être cité aux côtés de ceux de Rimbaud et de Lautréamont : comme les leurs, cette œuvre est porteuse d'une analogue révolte contre l'existence et d'un semblable refus dans la forme même. On aime jaune comme on rit jaune, précisait-il, donnant de la sorte la clé de son recueil grinçant. Il lui faut crier sa détresse de breton errant en la transformant en art, mais rester fidèle à celle-ci par une anti-forme qui dénie toute beauté, toute récupération esthétique. Il faut travailler des vers boiteux, disloqués comme le corps qui les écrivait, reniés par les interruptions de tirets et de points de suspension, récusés d'images triviales ou de rejets dérisoires. Il faut cultiver, pratiquer l'imperfection même, au risque lucide d'être banni de l'art officiel ou classique, au risque de se voir classer parmi les poètes dits maudits — puisque Corbière figure dans le recueil de Verlaine —, au risque d'appartenir au genre baroque, et, si l'on est rejeté du poète reçu de l'époque qu'est Jules Laforgue ce dont on se félicitera, d'influencer des poètes postérieurs tels qu'Eliot, appartenant ainsi au monde des anthologies et des mouvements dont on s'exceptait férocement. Corbière fut de la sorte un des premiers à être hanté dans ces années soixante-dix, que Rimbaud et Lautréamont vécurent dans la même dénégation intime, par la contradiction d'écrire que connaîtront les modernes après 1945. Il fut un des premiers à avoir eu le courage de faire passer la sincérité de son malaise avant l'apaisement harmonieux que doit produire la bonne forme, au point qu'il permet, à le lire, de poser la question : peut-on, doit-on même, écrire mal pour épouser le mouvement d'une vie mal vécue, autrement dit : ne vaut-il pas mieux renoncer à une forme valorisante ?
Si le baroque était une sorte de perfection obtenue dans l'imperfection même, l'irrégularité, la manière outrée, l'exagération violente surveillées encore par la maîtrise technique, Les Amours jaunes pointent dans une direction où le médiocre serait l'objet même de l'art, l'irréussite l'heureux paraphe de l'artiste s'inacceptant, les vers de rebut la véridique réduplication d'une vie, d'un destin manqués — à l'instar de Bouvard et Pécuchet, œuvre inachevée au double sens, dont le second est le consentement à la bêtise qui en est l'objet. Ici, ce serait l'impoétique même qui parlerait dans les vers de Corbière, le laid qui serait l'objet de sa musique de ménétrier, le malaise provoqué remplaçant la délectation de l'amateur. Au On m'a raté ma vie du poète répond le Je me suis raté mon art de son œuvre. Telle est la vertu principale de ce recueil-cercueil d'une courte vie de souffrances, de mal-amour et d'irréconciliation.

Sa vie

Auteur d'un unique recueil poétique, Les Amours jaunes, et de quelques fragments en prose, Tristan mène une vie marginale et miséreuse, nourrie de deux grands échecs dus à sa maladie osseuse et sa "laideur" presque imaginaire qu'il se complaît à accuser, celui de sa vie sentimentale, il aima non-réciproquement une seule femme, Marcelle, et celui de sa passion pour la mer, il rêvait de devenir marin, comme son père. Sa poésie porte en elle ces deux grandes blessures qui l'amèneront à choisir un style très cynique et incisif, envers lui-même autant qu'envers la vie et le monde qui l'entourent.
Ses vers teintés de Symbolisme et aux idées proches du Décadentisme rejettent et condamnent tous les courants littéraires de son époque, du Romantisme au Parnasse, car leur créateur excentrique se veut indéfinissable, incatalogable, pas être aimé, pas être haï ; bref, déclassé de toutes les latitudes. Son écriture poétique est caractérisée par l'abondance de sa ponctuation, son manque de polissage, et son anti-musicalité, le tout rendant un aspect heurté et brut, d'abord perçu comme une impuissance à mieux faire, mais reconnu plus tard comme une déstructuration volontaire du vers, cassant, concis, cinglant le vers à la cravache.
À la publication en 1873 à compte d'auteur de son unique œuvre, Les Amours jaunes, il passe totalement inaperçu dans les milieux littéraires de son époque, et il faudra attendre dix ans pour que Paul Verlaine le révèle au grand public dans son essai Les Poètes maudits. Il meurt à 29 ans, peut-être tuberculeux, célibataire sans enfant et sans travail retranché dans son vieux manoir breton, incompris de ses contemporains, Ah, si j'étais un peu compris !, et dont la poésie novatrice ne sera reconnue que bien après sa mort.

Enfance et études

Edouard Joachim Corbière nait le 18 juillet 1845 au manoir de Coat-Congar, à Ploujean, près de Morlaix, de l'union de Jean Antoine René Édouard Corbière dit Édouard Corbière et d'Angélique Aspasie Puyo. Son père, alors âgé de cinquante-deux ans, est déjà un célèbre marin, journaliste, et romancier maritime. Il avait épousé la mère du poète l'année précédente, fille de l'un de ses amis, alors qu'elle n'avait que dix-huit ans. À la naissance de l'enfant, trente-trois ans séparent ses deux parents.

Tristan passe une enfance paisible dans la propriété, louée par ses parents, dite "Le Launay", à une centaine de mètres de Coat-Congar, à Morlaix. Sa sœur, Lucie, nait en 1850, puis son frêre, Edmond, en 1855. Tristan est envoyé à Pâques 1859, à l'âge de quatorze ans, en pension au Lycée Impérial de Saint-Brieuc, en classe de quatrième, après avoir suivi l'année précédente les cours du maître morlaisien Monsieur Bourgeois. C'est un moment difficile pour Tristan, jusque là élevé tranquillement près de ses parents. Mise à part en français et en latin, c'est un élève médiocre, qui a des relations difficiles avec ses professeurs comme avec ses camarades. La majeure partie de sa correspondance, cinquante lettres sur soixante date de cette époque, où il écrit en moyenne tous les trois jours à sa famille, et dans-laquelle il raconte son quotidien d'èlève, mais fait également part de ses sentiments, de l'amour qu'il porte à sa famille, et du manque de celle-ci. C'est le jeudi, son jour de sortie, qu'il retrouve un peu du bonheur familial chez des amis de ses parents, les Bazin. C'est à cette époque qu'il commence à souffrir de rhumatismes articulaires, et d'engelures aux mains. Malgré ses mauvais résultats, il obtient à la distribution des prix du 6 août un 2e accessit de thème latin, sa matière de prédilection. C'est l'année suivante au pensionnat que nait sa vocation de poète et de caricaturiste : son premier poème connu "Ode au chapeau", datant de février 1860, est une satire sur le chapeau de son professeur d'histoire. Au palmarès du 6 août 1860, il obtient trois prix : le 2e prix de version latine, le 1er accessit de thème latin, et le 1er accesssit de vers latins.

Son état de santé s'aggravant, il doit quitter Saint-Brieuc en août pour rejoindre son oncle médecin, Jules Chenantais établi à Nantes. Il entre le 9 octobre en seconde-lettres au lycée qui deviendra le Lycée Georges-Clemenceau en qualité d'externe, étant logé chez son oncle. Le 8 août 1861, il remporte le 1er accessit de narration et de thème latin. En 1862, à la suite d'une grave crise, il reste partiellement infirme, et voyage en Provence avec sa mère pendant les vacances d'été pour des raisons de santé. Malgré sa préference de son nouveau lycée, l'aggravation de sa maladie l'empèche de passer le Baccalauréat au therme de sa classe de "rhétorique et logique".

D'une vie d'invalide fantaisiste à la mort

Sa vie de marginal commence lorqu'il s'installe à Roscoff, en Bretagne, dans une maison que possèdent ses parents, où il lit les œuvres de son père, de Hugo, de Baudelaire et de Musset. Les habitants du village le surnomment l'Ankou, c'est-à-dire le spectre de la mort, en raison de sa maigreur et de son allure disloquée. Il aime prendre la mer sur son bateau, Le Négrier, titre du plus célèbre roman de son père et se livre à quelques excentricités. Il s'amuse un jour à se déguiser en forçat, en femme ou en mendiant, l'autre à se raser les sourcils ou bien encore, alors qu'il est en visite à Rome, à traîner un porc en laisse déguisé en évêque lors du carnaval auquel assiste le pape. C'est ainsi que s'écoulent ses jours, jusqu'à sa rencontre avec une petite actrice parisienne que Tristan Corbière se plaît à appeler Marcelle, de son vrai nom Armida Josefina Cuchiani ; elle devient sa muse.
Délaissant son prénom d'état-civil, Édouard-Joachim, pour prendre celui, plus évocateur, de Tristan pour Triste en corps bière, il fait paraître à compte d'auteur en 1873 son unique recueil de poèmes, Les Amours jaunes, qui passe inaperçu. Lui qui ne connut aucun succès de son vivant, il sera révélé de manière posthume par Verlaine, qui lui consacre un chapitre de son essai Les Poètes maudits 1884. Le recueil se trouve également en bonne place dans la bibliothèque élitiste de Des Esseintes, le héros d'À rebours : cette présence dans l'œuvre de Huysmans contribuera à faire connaître le poète au public.
Le poète qui rêvait d'être marin ne put satisfaire son désir de courir les mers, malgré son amour passionné pour celle-ci.
Il meurt à Morlaix le 1er mars 1875 et enterré au cimetière Saint-Augustin8. Il n'a pas trente ans et n'a connu qu'une vie de solitude, brève et misérable, constamment atteint dans sa chair par la maladie, malheureux en amour, englué dans une passion unique et sordide ; sans doute, au figuré, la mer fut-elle sa véritable épouse. Le temps a rendu le poète à la lumière, et reconnu, bien tard, son talent.
Le nom des Amours jaunes, son unique recueil, a été donné à la bibliothèque publique ancienne de Morlaix. H. P. Lovecraft lui rend un bref hommage dans la préface de L'Appel de Cthulhu.

Sa poésie

Parue dans La Plume en 1891.
La poésie de Tristan Corbière est d'une grande originalité par sa forme et ses thèmes. Tout en jouant avec le mythe du poète maudit, tantôt dandy, tantôt misérable, Corbière s'inspire aussi bien de la grande ville moderne que de la campagne bretonne, de la fébrilité amoureuse du poète que de la vie virile des matelots, des légendes anciennes que des événements historiques de son époque.
Mais ce qui frappe dans les textes de Corbière est leur aspect heurté et la crudité des images et des sujets. Maniant une ponctuation complexe, irets, exclamations, suspensions encombrent les vers et jouant de rejets et d'ironies, le rythme de la poésie est haché, presque anti-musical. Corbière joue des thèmes de la rue, de la misère amoureuse, d'une vie sans but ni souci métaphysique, mais au contraire de Rimbaud, il semble d'abord se moquer de lui-même, cruellement et sans afféterie.
Les sources de la poésie de Corbière sont multiples : le poète a été marqué par le romantisme. Son œuvre puise également, de différentes manières, dans le XVIIe siècle, dans la poésie du XVIe siècle, et, suivant la mode romantique pour le Moyen Âge, fait souvent référence à la figure de Villon.interprétation personnelle
Corbière a également puisé l'inspiration de certains textes dans les légendes bretonnes - un des chapitres des Amours jaunes est titré Armor - ce qui lui a parfois valu de passer pour un écrivain régionaliste. Il s'est inspiré des gens qu'il côtoyait, peignant par exemple la foule se pressant aux pardons de Sainte-Anne-la-Palud. Un de ses textes évoque les conscrits bretons oubliés dans des conditions de grand dénuement dans le camp militaire de Conlie Sarthe en 1870

Commentaire

Bohème de l’Océan - picaresque et falot - cassant, concis, cinglant le vers à la cravache - strident comme le cri des mouettes et comme elles jamais las - sans esthétisme - pas de la poésie et pas du vers, à peine de la littérature - sensuel, il ne montre jamais la chair - voyou et byronien - toujours le mot net - il n’est un autre artiste en vers plus dégagé que lui du langage poétique - il a un métier sans intérêt plastique - l’intérêt, l’effet est dans le cinglé, la pointe-sèche, le calembour, la fringance, le haché romantique - il veut être indéfinissable, incatalogable, pas être aimé, pas être haï ; bref, déclassé de toutes les latitudes, de toutes les mœurs, en deçà et au-delà des Pyrénées. Jules Laforgue.

Å’uvres

Les Amours jaunes, 1873 en littérature disponible sur Gallica
nouvelle édition présentée par Serge Safran, Éditions de la Différence, coll. Orphée, Paris, 1989.
Rééditions suivie de Poèmes retrouvés et de Œuvres en prose : Émile-Paul frères, 1942, illustrée par André Deslignères; Poésie/Gallimard, 1973 ; LGF, 2003 ;choix de poèmes, Seuil, 2004.
Éditions critiques : Charles Cros, Tristan Corbière, Œuvres complètes, éd. Pierre-Olivier Walzer et Francis F. Burch pour Corbière, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1970 ; Les Amours jaunes, éd. Élisabeth Aragon et Claude Bonnin, Presses universitaires du Mirail, 1992.
Les éditions Françoise Livinec publient un album inédit de 30 feuillets de textes et de peintures créé à la fin des années 1860. Ce manuscrit, que l’on croyait perdu depuis 1975, a appartenu à Jean Moulin, et a été retrouvé par l'universitaire Benoît Houzé.

Hommages

Le lycée Tristan-Corbière de Morlaix.
L'administration des Postes françaises a émis un timbre Tristan Corbière en 2011, dessiné par Cyril de La Patellière et gravé par Jacky Larrivière.
Un buste en terre cuite représentant Tristan Corbière, dû au sculpteur Cyril de La Patellière, à la Bibliothèque des Amours Jaunes de Morlaix, 2010.

Mises en image

Jean Moulin, haut fonctionnaire, exerça la fonction de sous-préfet à Châteaulin de 1930 à 1933. Pendant son séjour breton, il rencontra Max Jacob et, sur son conseil, illustra le recueil de poèmes de Tristan Corbière, "Armor", extrait des Amours jaunes. C'est sous le pseudonyme de Romanin que sont signées les huit gravures. Ces œuvres sont présentées au Musée des beaux-arts de Quimper.

Mises en musique

Portrait de Tristan Corbière par Félix Valloton paru dans Le Livre des masques de Remy de Gourmont 1896
Michel Melchionne, chanté et accompagné d'un xylophone, issu du CD Cœur Insoumis 1995
Jean D'Udine pseudonyme d'Albert Cozanet, Rondels pour après, Voix, piano, Le Ménestrel, 1923 partition se trouvant à la Bibliothèque nationale de France, département musique.
Albert Huybrechts, Mirliton, Soprano, piano, 1934. CeBeDem, 1956.
Rudolf Escher, Trois Poèmes de Tristan Corbière (Rondel, Petit mort pour rire, Dodo, l'enfant, do- 1936, voix, piano, Donemus, 1991. "Lettre du Mexique" 1941, baryton, piano, Donemus, 1992.
Emmanuel Bondeville, La Rapsodie foraine et le pardon de Sainte-Anne, Voix, piano, Durand, 1937.
Robert Casadesus, Trois rondels pour après composition de 1935, op. 21, Voix, piano, G. Casadesus, 1998, partition se trouvant à la Bibliothèque nationale de France, département musique.
Yves Baudrier, Poèmes de Tristan Corbière" Paysage mauvais, Laisser-courre- 1939, voix, piano, Amphion, 1960.
Guy Morançon, "Nature morte", 1945. Voix, piano.
Tristan Corbière. Les Amours jaunes, EPM, coll. Poètes et chansons, 2005 disque regroupant les mises en musiques de Lino Léonardi chantées en 1975 et pour quelques-unes au début des années 1990 par sa compagne Monique Morelli, ainsi que des mises en musique chantées par Pascal Héni en 1997.
Glenmor lui a consacré un disque, Tristan Corbière : le paria, ArFolk.
Serge Kerguiduff, Kerguiduff chante Tristan Corbière, Vélia, 1976.
Fanny De Lannion, Le Cotre le Négrier, dans À Brest la jolie: chansons de port, Le Chassé-Marée / Armen, 1994 version de la mise en musique de Lino Léonardi.
Antoine Duhamel, L'impossible chanson des matelots mise en musique de Matelots, voix et quatuor à cordes ou orchestre, diffusée sur France Musique en janvier 2006, émission Prima La Musica.
La compositrice Michèle Reverdy a également mis en musique plusieurs poèmes de Tristan Corbière.
Diamanda Galas, chanteuse d'avant-garde américaine d'origine grecque, a mis en musique en 1986 Cris d'aveugle, de Corbière, dans l'album Saint of the Pit.
Casino des trépassés, 1997, disque de 16 chansons avec un grand orchestre, mis en musique par Stéphane Leach et Pascal Héni, chanté par Pascal Héni. Cet album met en valeur le cynisme élégant et le chef-d'œuvre de cabaret qu'évoquait Tristan Corbière. Un spectacle musical très baroque a été créé en 1999 sur la scène National de Quimper.
Thérèse Brenet : Rondel pour Chœurs, Orchestre et Orgue
Bruno Richardot : Le Crapaud, chanson pour ensemble vocal à quatre voix mixtes, et sérénade tragicomique pour baryton soliste et voix de femmes.
Thanasis Papakonstantinou a adapté en grec Insomnie.
Le poète, compositeur et peintre Paul Dirmeikis a mis trois poèmes de Tristan Corbière, Rondel, Petit Mort pour rire, Paria au programme de son récital de poésie chantée Poètes en Bretagne

Utilisations dans des Å“uvres audiovisuelles

Le rondel Il fait noir, enfant, voleur d’étincelles ! a été chanté à la guitare dans la fiction Nés en 68.


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#213 François Cavanna
Loriane Posté le : 21/02/2015 17:24
Le 22 février 1923 à Paris naît François Cavanna

mort, à 90 ans, le 29 janvier 2014 à Créteil, écrivain, journaliste et dessinateur humoristique français.
Son genre est les Récits autobiographiques, le roman historique, l'Humour, ses Œuvres principales sont Les Ritals en 1978, Les Russkoffs en 1979, La famille Cavanna
Son père, Luigi 1880-1954, était venu de Bettola, village du val de Nure, province de Plaisance en Émilie-Romagne. Sa mère, Marguerite, née Charvin 1890-1976, est originaire du village de Sauvigny-les-Bois dans la Nièvre. Luigi Cavanna travaille comme maçon, la plupart du temps pour l’entreprise Taravella et Cavanna. À la suite des menaces de renvoi en Italie pendant les années 1930, il demande la naturalisation qu’il obtient le 25 octobre 1939. François Cavanna est leur fils unique.

En bref

François Cavanna avec son ami Benier est à l'origine d'un fameuux hebdomadaire satirique français.
Ce mensuel satirique créé en 1960 par Georges Bernier, alias le Professeur Choron et François Cavanna.
Entre interdictions de paraître et reparutions, il a fait connaître de nombreux dessinateurs parmi lesquels Fred, Wolinski, Reiser, Gébé, Cabu ou Topor.
Charlie Hebdo.
Les origines de Charlie Hebdo remontent à 1960 lorsque François Cavanna et Georges Bernier, alias le Professeur Choron créent Hara-Kiri Mensuel, journal illustré de mouvance libertaire, lequel devient Hara-Kiri Hebdo en 1969. Le 16 novembre 1970, Hara-Kiri Hebdo est interdit de publication, officiellement censuré pour pornographie alors que le journal s’est attiré les foudres du ministre de l’Intérieur pour avoir titré, à la suite de la mort du général de Gaulle : " Bal tragique à Colombey : 1 mort." Le journal, qui renaît de ses cendres une semaine plus tard sous le nom de Charlie Hebdo, cessera de paraître à la fin 1981 pour raisons financières, avant de retrouver le chemin des kiosques en 1992 sous l'impulsion de Cabu et de Philippe Val. Charlie Hebdo – qui a été au cœur d'une controverse en 2006 après avoir reproduit douze caricatures de Mahomet initialement publiées dans le journal danois Jyllands-Posten – revendique sa liberté d’opinion et privilégie une ironie mordante.
Le 7 janvier 2015, un attentat au fusil d'assaut décime la rédaction historique du journal et bouleverse l’opinion publique : 12 personnes sont assassinées dont les dessinateurs Cabu, Wolinski, Charb, Tignous, Honoré et le journaliste d'économie Bernard Maris.

Sa vie

Durant son enfance, il fait preuve d’un goût exceptionnel pour la lecture et réussit très bien à l’école, malgré une attitude très dissipée. Il passe le certificat d’études primaires à 12 ans, suit les cours de l’école primaire supérieure EPS de Nogent-sur-Marne et obtient le brevet en 1939. Mais il n’a pas envie de poursuivre des études et entre à la poste en septembre 1939.

Le début de la Seconde Guerre mondiale

Affecté5 comme manipulant auxiliaire dans un bureau de poste parisien, Cavanna reçoit, en juin 1940, comme les autres employés, l'ordre de partir pour Bordeaux. Il quitte Paris à vélo au milieu des colonnes de réfugiés de l'exode et, par Melun, Fontainebleau et Nemours, atteint Gien où il voit pour la première fois des soldats allemands. Un peu plus loin, près de Saint-Amand-Montrond, il est bloqué par un poste de contrôle allemand et est obligé de rentrer à Paris.
Il perd son emploi à la poste compressions de personnel ; il est d'abord commis d'un marchand de fruits et légumes, puis travaille dans plusieurs entreprises du bâtiment. Fin 1942, il est recruté comme maçon par le service d'entretien d'une firme nogentaise, mais presque aussitôt se trouve requis pour le STO début 1943.

Le service du travail obligatoire

Après un assez éprouvant voyage en train5, son groupe de requis arrive dans la banlieue sud-est de Berlin, au camp de Baumschulenweg, dans le district de Treptow actuellement : Köpenick-Treptow. Ils sont affectés à l’entreprise de munitions Graetz, Unternehmen. François Cavanna, ne parvenant pas à obtenir le rendement exigé pour la production d’obus, se retrouve très vite dans un commando disciplinaire chargé du déblaiement des gravats après les bombardements alliés. À l’usine Graetz, conduisant sa machine, il est assisté par deux requises soviétiques, dont Maria Tatartchenko avec laquelle il va rester lié pendant les deux années suivantes.
Début 1945, à l’approche de l’armée soviétique, les requis de Baumschulenweg sont transférés près de Stettin pour creuser des tranchées antichars. Le 4 avril, l’ordre de repli est donné ; François Cavanna et Maria quittent la colonne des réfugiés et entrent en contact avec l’armée soviétique dans un village du Mecklembourg. Il est alors séparé de Maria, dont il perd la trace ; pendant un mois et demi, il essaie de la retrouver, puis renonce. Il est amené de Schwerin à Lübeck, en zone américaine, et rapatrié fin mai 1945.

L’après-guerre

Il reprend d'abord son emploi d’avant le STO, puis est employé par l’Association des déportés du travail, fournissant aussi une bande dessinée au journal Le Déporté du travail. De nouveau victime d'une réduction de personnel, il se lance pour une première période comme dessinateur à plein temps, en particulier pour un journal pour enfants, Kim, série Micou et son chien Tomate. Il reprend un travail salarié en 1948-1949, puis redevient dessinateur de presse, activité dont il parvient à tirer un revenu qu'il juge convenable. Il adopte alors le pseudonyme de Sépia, qu'il utilise jusque dans les années 1960.

De Zéro à Charlie-Hebdo

En janvier 19546, il devient collaborateur d’une publication toute nouvelle, le magazine Zéro, créé par Jean Novi, dont il va devenir rédacteur en chef. Il s'agit d'un journal de colportage : parmi les colporteurs apparaît bientôt un ex-engagé en Indochine, Georges Bernier, que son efficacité comme vendeur mène au rang de directeur des ventes. Cavanna abandonne l'activité de dessinateur pour se consacrer à l'écriture, tout en se formant aux aspects techniques du journalisme, mise en page…. Mais il se sent à l'étroit sous la direction de Jean Novi, qui impose des limites au contenu du magazine, d'ailleurs rebaptisé Cordées, nom jugé moins provocant que Zéro.
Après la mort de Jean Novi, en 1959 ou 1960, Cavanna s'associe avec Georges Bernier, qui prend alors le nom de professeur Choron et quelques autres pour fonder en 1960 le magazine Hara-Kiri mensuel, puis en 1969 Hara-Kiri Hebdo et le mensuel de bandes dessinées Charlie. Après l'interdiction de Hara-Kiri Hebdo à la suite de sa une sur la mort du général de Gaulle, Bal tragique à Colombey - un mort, le journal est relancé sous le titre de Charlie Hebdo.
En mai 1968, François Cavanna est brièvement hospitalisé pour une crise hémorroïdaire. Il ne peut donc pas, à son grand regret, participer aux événements. Cet épisode est raconté avec humour dans son ouvrage Les Yeux plus grands que le ventre.
Au début des années 1970, un épisode important de l'histoire de Charlie Hebdo est le départ de Delfeil de Ton. Cavanna et lui se brouillent gravement. L'un comme l'autre, ainsi que leur ami Gébé, ont laissé ce qu'il fallait comme clés pour que l'on puisse comprendre à demi-mot pourquoi : il s'agit clairement d'une affaire non pas politique, ni littéraire, mais personnelle. Cavanna se montre navré de la décision de DDT de quitter Charlie Hebdo, ce qui affecte quelque temps sa production littéraire dans l'hebdomadaire. Il le défend contre des attaques de Jacques Martin, insiste sur le fait que Delfeil a sa place ici à Charlie Hebdo et peut revenir quand il le voudra, peine perdue : la rupture est consommée.
Charlie Hebdo cesse de paraître à la fin 1981, victime d'une perte de lecteurs et d'une mauvaise gestion financière. Cavanna collabore ensuite à nouveau avec Choron de 1986 à 1988, à l'occasion d'une nouvelle version de Zéro.
En juin 1986, sa petite-fille Marie meurt d'une overdose à l'âge de 18 ans. Il passe alors de la tolérance à la dénonciation de la drogue : Vos enfants sont en danger, même les plus sages.
En 1992, Cavanna rejoint la nouvelle formule de Charlie Hebdo, relancé par Philippe Val, Cabu et Wolinski. Il y signe des chroniques et figure à nouveau dans l'ours à la fonction d'ange tutélaire.
En 2000, Choron, qui n'a pas participé à la nouvelle version de Charlie Hebdo, relance Hara-Kiri en association avec André Bercoff : Cavanna intente alors un procès à Choron et Bercoff, leur reprochant à la fois la teneur de cette nouvelle version et le fait que Bernard Tapie ait été annoncé comme collaborateur du journal. Cavanna remporte sa procédure et se voit reconnaître la propriété du titre Hara-Kiri.

Maladie de Parkinson et fin de vie

En janvier 2011, le site web BibliObs publie les bonnes feuilles du dernier ouvrage de François Cavanna, Lune de miel Gallimard. Dans ce livre, l'auteur révèle être atteint de la maladie de Parkinson, qu'il qualifie de salope infâme.
Hospitalisé pour une intervention due à une fracture du fémur et victime de complications pulmonaires, François Cavanna meurt le mercredi 29 janvier 2014 à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil11. Après l'incinération au Père-Lachaise le 6 février, ses cendres sont inhumées le lendemain au cimetière de Chaumes-en-Brie, Seine-et-Marne, la ville ou plus précisément le hameau de Forest où il habitait depuis une quarantaine d'années.

Prises de position

Créateur d'un style de narration très particulier et vivant, toujours complice du lecteur, il s'est positionné comme un grand défenseur des valeurs républicaines et de la langue française. Sa prise de position virulente, en compagnie de Delfeil de Ton et d'autres écrivains et argumentée contre une réforme de l'orthographe par l'Académie française fut très remarquée.
Dans son livre La Belle Fille sur le tas d'ordures, Cavanna prend position en faveur de la langue espéranto, "Vous ne voulez pas de l'espéranto ? Vous aurez l'anglais. Bien fait pour vos gueules!"
Au nom de ces valeurs, Cavanna a sa vie durant mené un combat contre tout ce qu'il considérait comme irrationnel ou injuste, entre autres l'usage de la souffrance des animaux comme agent de distraction des humains.

Stop-crève 1976

Cavanna se montre quelque temps obsédé par les questions d'immortalité physique de l'homme. Ses amis de Charlie Hebdo y font souvent référence de façon mi-admirative, mi-ironique, Wolinski dans quelques dessins, Delfeil de Ton par quelques allusions mordantes, Gébé en rêvant de façon poétique sur la question dans quelques-uns de ses articles.

Son avis sur Choron dernière

En janvier 2009 sort sur les écrans Choron dernière, un documentaire des réalisateurs Pierre Carles et Éric Martin consacré au professeur Choron, qui fut dans les années 1960 le complice de Cavanna et un membre éminent de l'équipe de Hara-Kiri, Hara-Kiri Hebdo et Charlie Hebdo première mouture. Le film accuse la direction du Charlie Hebdo actuel — celui relancé en 1992 — d'avoir délibérément fait l'impasse sur l'héritage du Professeur Choron en cherchant à occulter sa mémoire et sa contribution à la création du journal.
En retour, Philippe Val directeur de la publication et de la rédaction de Charlie Hebdo, Cabu directeur artistique et Jean-Baptiste Thoret critique cinéma critiquent sévèrement le film et dénoncent un parti pris abusif. Cabu, notamment, accuse Choron d'être directement responsable de la faillite de Hara-Kiri, Charlie mensuel et Charlie Hebdo première version. Cavanna, pour sa part, défend un point de vue moins tranché dans cette polémique qui oppose Carles et Martin à la direction du journal actuel. Il estime que ceux qui, aujourd’hui, divinisent Choron ne le font que pour mieux démolir ce qu’est Charlie Hebdo aujourd’hui, mais reconnaît, face à Cabu, les mérites de Choron, qu'il décrit comme une intelligence — non, pas fulgurante, mais fort vive —, un esprit déroutant, alerte, s’adaptant très vite, d’une audace saisissante, d’une agilité souvent imprévisible et rappelle que, sans lui, il n’y aurait pas eu d’aventure Hara-Kiri, ni, conséquemment, de Charlie Hebdo.

Hommages

Cavanna fut considéré par Pierre Desproges comme l'un des derniers grands écrivains vivants : Seule la virulence de mon hétérosexualité m'a empêché à ce jour de demander Cavanna en mariage. Desproges, qui collabora à Charlie Hebdo première mouture pendant la dernière année 1981-1982, admirait le talent de Cavanna qu'il comparait à un Rabelais moderne. Selon lui, Cavanna était un des derniers honnêtes hommes de ce siècle pourri le XXe et l'inventeur d'une nouvelle presse.
Le 15 novembre 2008, François Cavanna inaugure la bibliothèque municipale Cavanna de Nogent-sur-Marne. Avide de lecture dès son plus jeune âge, c'est à la bibliothèque de Nogent-sur-Marne, située à l'époque dans l’hôtel des Coignards, qu'il venait chercher ses livres. Une exposition Cavanna raconte Cavanna suivra l'inauguration de la bibliothèque jusqu'au mois de mai 2009.

Apparitions au cinéma

Il est l'un des conspirateurs dans L'An 01 réalisé par Jacques Doillon, Gébé, Alain Resnais et Jean Rouch en 1973.
Georges Brassens, qui partage beaucoup des points de vue de Cavanna, demande sa participation et celle de l'équipe de Charlie Hebdo pour un clip de sa chanson Le Roi.
En 1982, il fait une apparition dans le film Y a-t-il un Français dans la salle ? de Jean-Pierre Mocky.


Récits et documents autobiographiques

1978 : Les Ritals, éd. Belfond, Paris adapté pour la télévision par Marcel Bluwal en 1991.
1979 : Les Russkoffs, éd. Belfond, Paris suite des Ritals
1981 : Bête et méchant, éd. Belfond, Paris suite des Russkoffs ; Cavanna raconte notamment les débuts de Hara-Kiri
1983 : Les Yeux plus grands que le ventre, éd. Belfond, Paris suite de Bête et méchant
1985 : Maria roman, éd. Belfond, Paris
1987 : L’Œil du lapin, éd. Belfond, Paris
2008 : Cavanna raconte Cavanna, hors-série Charlie Hebdo no 24, novembre 2008 en lien avec l'exposition qui s'est tenue à la bibliothèque municipale, au musée et aux archives de Nogent-sur-Marne du 15 novembre 2008 au 31 mai 2009.
2010 : Lune de miel, éd. Gallimard, Paris

Écrits divers par ordre chronologique

1965 : 4, rue Choron, éd. Hara-Kiri
1968 : Cavanna, éd. Julliard
1970 : Je l'ai pas vu, je l'ai pas lu… mais j'en ai entendu causer, éd. Jean-Jacques Pauvert
1971 : Les Aventures de Dieu, Éditions du Square
1971 : Le saviez-vous ? 1, Éditions du Square
1972 : L'Aurore de l'humanité I : Et le singe devint con, Éditions du Square ; 1984 : éd. Belfond ; 2007 : éd. Hoëbeke
1974 : Le saviez-vous ? 2, Éditions du Square
1975 : L'Aurore de l'humanité II : Le con se surpasse, Éditions du Square ; 1986 : éd. Belfond.
1975 : Je l'ai pas lu, je l'ai pas vu… chroniques Hara Kiri hebdo 1969/1, éd. 10/18
1975 : Je l'ai pas lu, je l'ai pas vu… chroniques Hara Kiri hebdo 1969/2, éd. 10/18
1976 : Je l'ai pas lu, je l'ai pas vu… chroniques Hara Kiri hebdo 1970, éd. 10/18
1976 : Stop-crève chroniques de Charlie Hebdo de 1969 à 1975, éd. Jean-Jacques Pauvert
1977 : L'Aurore de l'humanité III : Où s'arrêtera-t-il ?, Éditions du Square ; 1987 : éd. Belfond
1978 : Gauche, droite, piège à cons chroniques de Charlie Hebdo de 1969 à 1976, éd. Jean-Jacques Pauvert
1980 : La Grande Encyclopédie bête et méchante, éd. Albin Michel
1981 : Louise la Pétroleuse théâtre, éd. Belfond
1982 : La Nouvelle Encyclopédie bête et méchante, éd. Albin Michel
1982 : Les Écritures - Les Aventures de Dieu et du Petit Jésus, éd. Belfond., 2e éd. Albin Michel, 1995
1984 : L'Almanach de Cavanna, éd. Belfond
1986 : Les Fosses carolines, éd. Belfond
1988 : La Couronne d'Irène, éd. Belfond ; 1990 : Livre de Poche
1988 : Les Aventures de Napoléon, éd. Belfond
1989 : Mignonne, allons voir si la rose…, éd. Belfond ; 2001 : éd. Albin Michel
1990 : Traits d'humour sur toiles de maîtres, présentation de Daniel Delamare - éditions Denoël
1991 : La Belle Fille sur le tas d'ordures, éd. L'Archipel
1991 : Coups de sang, éd. Belfond
1991 : Les Grands Imposteurs, éd. Presses de la Cité
1991 : Nos ancêtres les Gaulois, éd. Albin Michel
1992 : Cavanna par Cavanna, éd. Albin Michel
1992 : Le Temps des égorgeurs, éd. Albin Michel
1992 : Dieu, Mozart, Le Pen et les autres, éd. Hors Collection ; 1999 : éd. Presses de la Cité
1993 : De Coluche à Mitterrand 53 chroniques de Charlie Hebdo, éd. L'Archipel
1993 : Tonton, Messaline, Judas et les autres, éd. Presses de la Cité
1993 : Les Enfants de Germinal, éd. Hoëbeke
1994 : Lettre ouverte aux culs-bénits, éd. Albin Michel
1994 : Les Pensées, éd. Le Cherche Midi
1995 : Cœur d'artichaut, éd. Albin Michel
1997 : La Déesse mère, éd. Albin Michel
1998 : Les Mérovingiens 1 : Le Hun blond, éd. Albin Michel, 320 pages ; 2000 : éd. Premières Loges
1999 : Les Mérovingiens 2 : La hache et la croix, éd. Albin Michel, 336 pages
2000 : Les Mérovingiens 3 : Le dieu de Clotilde, éd. Albin Michel, 352 pages
2001 : Les Mérovingiens 4 : Le sang de Clovis, éd. Albin Michel.
2002 : Les Mérovingiens 5 : Les reines rouges, éd. Albin Michel, 336 pages
2003 : Les Imposteurs, éd. Presses de la Cité.
2003 : Sur les murs de la classe, éd. Hoëbeke
2004 : Les Mérovingiens 6 : L'adieu aux reines, éd. Albin Michel
2004 : Les Années Charlie : 1969-2004, éd. Hoëbeke
2005 : Cavanna à Charlie Hebdo 1969-1981. Je l'ai pas lu, je l'ai pas vu…, éd. Hoëbeke
2005 : Plus je regarde les hommes, plus j'aime les femmes…, éd. Albin Michel
2006 : Le Voyage, éd. Albin Michel
2008 : Hara-Kiri. Les belles images, éd. Hoëbeke
2008 : Mai 68 collectif, éd. Michel Lafon
2009 : La pub nous prend pour des cons, la pub nous rend cons, éd. Hoëbeke
2010 : Le Pire de Hara-Kiri, éd. Hoëbeke
2011 : Hara-Kiri. Jusqu'à l'os !, éd. Hoëbeke
2012 : Cavanna raconte Cavanna, éd. Les échappés
2013 : La Gloire de Hara-Kiri, éd. Glénat

Livres de photographie/dessins

1987 : Les Doigts plein d'encre photographies de Robert Doisneau, éd. Hoëbeke
1990 : Maman, au secours ! dessins de Altan, éd. Presses de la Cité
1998 : Je t'aime dessins de Barbe, éd. Presses de la Cité
2002 : Au fond du jardin photos de Patricia Méaille, éd. Terre de Brume
2010 : Instants de grâce photos de Leloir, éd. Fetjaine

Traductions par Cavanna

1971 : Li'l Abner, Éditions du Square
1979 : Crasse-Tignasse, éd. L'École des Loisirs
1980 : Max et Moritz de Wilhelm Busch, éd. L'École des Loisirs
1988 : L'Univers impitoyable de Gary Larson, éd. Presses de la Cité
1989 : L'Univers impitoyable de Gary Larson contre-attaque, éd. Presses de la Cité
2007 : Je ne suis pas n'importe qui ! Jules Feiffer, éd. Futuropolis

Autorité

Notices d’autorité : Fichier d’autorité international virtuel • International Standard Name Identifier • Bibliothèque nationale de France • Système universitaire de documentation • Bibliothèque du Congrès • Gemeinsame Normdatei • Bibliothèque nationale de la Diète • WorldCat

Hara-Kiri


Hara-Kiri est un magazine, créé en 1960 à l'initiative de François Cavanna et du professeur Choron, entre autres. Ce journal satirique de tendance cynique, parfois grivoise, bénéficia d'un soutien télévisé discret de la part du réalisateur Jean-Christophe Averty dont l'émission Les Raisins verts participait du même esprit et connut un succès relativement important en France, à l'histoire riche en publicités radiophoniques provocantes Si vous ne pouvez pas l’acheter, volez-le et entrecoupée de quelques interdictions. Le magazine est d'abord vendu par colportage sur les trottoirs pour atterrir dans les kiosques à la fin de la même année.
Une lettre irritée arrive un jour au courrier des lecteurs, qui dit en substance : Vous êtes bêtes. Et non seulement vous êtes bêtes, mais vous êtes méchants. Le sous-titre du magazine est immédiatement adopté : Hara-Kiri, journal bête et méchant. Dans chaque numéro, le professeur Choron, le siège est au 4, rue Choron proposera le jeu bête et méchant du mois.
Au milieu des années 1950, François Cavanna et Georges Bernier se rencontrent dans la rédaction du journal Zéro où travaille également Fred. Diffusé uniquement par colportage, le journal est dirigé par Jean Novi et est renommé Cordées en 1958.
À la fin des années 1950, Jean Novi meurt brutalement d'un infarctus et sa veuve Denise Novi devient la nouvelle directrice. De son côté, Cavanna souhaite se lancer dans la création d'un nouveau magazine plus corrosif et qui s'inspirerait de la revue satirique américaine Mad. Avec Fred et d'autres dessinateurs de Cordées, il parvient à convaincre Georges Bernier de se rallier à eux. En tant que directeur des ventes, Bernier est en effet essentiel pour s'assurer du soutien des colporteurs de Cordées.
En mai 1960, Bernier fait réunir l'ensemble de ses colporteurs au 4, rue Choron, un local dans le 9e arrondissement de Paris où Bernier possède un bail, et leur propose de travailler pour lui seul et non plus pour la directrice de Cordées. Suite à ce putsch, celle-ci perd donc tous ses vendeurs d'un coup et vend son stock de journaux quelques semaines plus tard.
Septembre 1960 : Création du magazine Hara-Kiri, mensuel. La première de couverture est un dessin de Fred sur fond rouge représentant un samouraï éventré et surlégendé honni soit qui mal y panse. Il est initialement tiré à 10000 exemplaires vendus par des colporteurs dans les rues. Il sera interdit deux fois, en 1961 puis en 1966.
Février 1969 : Hara-Kiri crée, sans supprimer le mensuel, un hebdomadaire qu'il nomme alors Hara-Kiri Hebdo. Cavanna y indique dans son éditorial que le but est de mieux coller à l'actualité et que le journal a failli se nommer Vite fait, vite lu ou Hara-Kiri vite fait. Le journal est en vente en kiosque, et parfois même par colportage, boulevard Saint-Michel. Peut-être pour écouler un numéro interdit à la vente en kiosque soit en 1969, soit 1970 pour 1 franc, prix modeste qui contribuera d'ailleurs à son succès. Ce premier numéro montre le déjà célèbre petit bonhomme de Wolinski s'esclaffer en citant divers sujets, dont les pendus de Bagdad.
Mai 1969 : Le nom de l'hebdomadaire devient L'hebdo Hara-Kiri, le mensuel continuant toujours à paraître.
Cavanna raconte l’histoire du journal dans toute la deuxième partie de son livre Bête et méchant.

Interdiction de l’hebdo

Dans son no 94, daté du lundi 16 novembre 1970, la couverture de l'hebdomadaire titre : Bal tragique à Colombey – 1 mort suite au décès du général de Gaulle dans sa propriété de La Boisserie à Colombey-les-Deux-Églises, le 9 novembre 1970.
Le choix de ce titre faisait référence à un fait divers qui avait défrayé la chronique le 1er novembre précédent : l’incendie d'un dancing, le Cinq-Sept, à Saint-Laurent-du-Pont Isère où 146 personnes avaient trouvé la mort. Durant la semaine suivante, ce drame avait été rebattu par une presse plus préoccupée de spectacle que d’information, et qui employait unanimement le terme de bal tragique, pour évoquer le sinistre. Le deuil populaire fut bref cependant, à l'échelon national, alors que la page choc du magazine souligna de manière spectaculaire le deuil interminable dans lequel le pays était plongé suite à la mort du général, entretenu par toutes les figures d'autorité de l'époque, par les médias et autres organisations bien pensantes. Le titre parodique de Hara-Kiri soulignait la démesure, et pour bien des Français constituait une bouffée d'air frais.
Une rumeur veut que le ministre de l’Intérieur de l’époque, Raymond Marcellin, ait alors interdit la parution du journal le 17 novembre. Une autre, plus sceptique sur les délais de réaction réels des ministères, veut que la procédure d’interdiction, déjà en cours, ait simplement abouti par coïncidence cette semaine-là.

La relève immédiate

Une semaine plus tard est lancé Charlie Hebdo. Le prénom Charlie dans le titre serait une référence à Charles de Gaulle selon Georges Wolinski, cf., L’Écho des savanes no 239. En fait, les Éditions du Square éditaient alors un mensuel de bandes dessinées nommé Charlie et dont le rédacteur en chef était Wolinski. Or on remarque que les premiers numéros de Charlie Hebdo contiennent des bandes dessinées et justement Charlie Brown dans les Peanuts sur une page à fond de couleur, comme pour signaler en somme qu’elles sont surajoutées au journal.

Le journal tire un parti comique de la situation :

Comme l’avait signalé notre malheureux confrère l’hebdo Hara-Kiri, dont nous déplorons la disparition
L’hebdo Hara-Kiri est mort. Lisez Charlie Hebdo, le journal qui profite du malheur des autres
Les rubriques sont rebaptisées de façon à rester parfaitement identifiables. Ainsi Je ne l’ai pas lu, je ne l’ai pas vu, mais j’en ai entendu causer, devient Si ce n’est pas vrai, je suis un menteur ». Certaines ne le sont même pas comme « Les lundis de Delfeil de Ton ou le petit coin de la culture du même.
L’humour de Charlie Hebdo ne sera pas du goût de tout le monde. Lors de la visite surprise du président égyptien Anouar el-Sadate à Tel-Aviv, sa couverture mentionne la rencontre en termes argotiques qui lui vaudront un procès intenté par la LICRA. Les positions antiracistes bien connues et largement affichées de Charlie Hebdo, ainsi que quelques témoignages prestigieux, feront débouter la demande. Les couvertures de Charlie Hebdo sont alors si grinçantes que le journal publie en prime toutes celles qui ont été envisagées, toujours irrévérencieuses, souvent très drôles, dans le journal, en petit format.
L’arrivée au pouvoir de la gauche en 1981 semble avoir été fatale à Charlie Hebdo première manière, qui disparaît en 1982 pour cause d’irrégularité des ventes. Ironie du sort : les premiers numéros du journal disaient : Vous pouvez vous abonner, mais on aimerait mieux pas parce que ça nous oblige à vous l’envoyer ».
Charlie Hebdo reparaît en 1992, sous la direction de Philippe Val.
Un baroud d’honneur aura pourtant été réalisé au préalable : Charlie matin, quotidien qui dès le départ avait été conçu pour ne durer que trois numéros... et provoquer un battage médiatique à sa création comme à son arrêt de parution.

Hara-Kiri mensuel

Le mensuel continue à paraître jusqu'en 1986. On y retrouve tous les collaborateurs de l'hebdomadaire (y compris Delfeil de Ton qui avait quitté l'hebdomadaire en 1975). Avant gardiste, Hara-Kiri ouvre ses pages régulièrement à des auteurs ou dessinateurs non conformistes, à l'humour absurde, noir ou outrancier, souvent rejetés par les autres publications ou tout simplement impubliables à l'époque7. Les détournements salaces de publicités ou de tableaux de maître feront la gloire du journal, lequel multipliait des images et photos à caractère pornographique mais sous couvert de dérision, à l'instar de L'Écho des savanes.
Le journal se voulait un espace de liberté et proposa diverses innovations dans la presse française, comme le premier cadeau gadget et les premiers détournements photos.
Le titre était la propriété du professeur Choron. Après l'échec du mensuel pour enfants Grodada, au début des années 1990, Choron, se sentant trahi par la création du Charlie-Hebdo nouvelle manière — qui ne lui proposa pas de poste à sa convenance —, et suivi par Vuillemin, tenta sa propre aventure en 1993 avec un Hara-Kiri hebdomadaire qui ne durera que quelques semaines. La nouvelle équipe incluait Schlingo, Bruno Blum, Patrick Eudeline, Cécile, Legros-Tiche, Nat, avec les aventures de Pifo, les couvertures étaient dessinées par Vuillemin, dessinateur vedette de L’Écho des savanes. Il vend en fin de compte le titre Hara-Kiri à des acheteurs extérieurs qui conduiront rapidement le magazine à la faillite. Le Professeur Choron continue de son côté le magazine La Mouise, qui contient principalement des dessins de Vuillemin et est vendu par des colporteurs volontaires, comme l'était Hara-Kiri à ses débuts.
Le journal Hara-Kiri reparaît en mars 2000, sous la direction d'André Bercoff qui avait racheté le titre en 1998, contre l'avis de François Cavanna mais avec le soutien de Choron. Cependant le journal sera arrêté au bout de 4 numéros sans donner d'explication.
En mai 2002, la justice reconnaît la paternité des titres Charlie Hebdo et Hara-Kiri à François Cavanna, au détriment de Choron.

Participants Textes

Cavanna
Professeur Choron
Gébé
Gourio
Melvin Van Peebles
Reiser
Jean-Jacques Peroni
Delfeil de Ton
Wolinski
Bruno Blum
Patrick Eudeline

Dessins

Jackie Berroyer
Bruno Blum
Cabu
Copi
Fournier
Fred
Daniel Fuchs
Gébé
Hugot
Kamagurka
Lefred-Thouron
Marc-Édouard Nabe
Nicoulaud
Guy Peellaert
Michel Pichon
Reiser
Charlie Schlingo
Sépia François Cavanna
Serre
Siné
Philippe Soulas
Topor
Vuillemin
Willem
Wolinski

Photos

Beauvais
Chenz
Cinello
Foulon
Lépinay
Arnaud Baumann
Xavier Lambours



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#214 Emmanuel Roblès
Loriane Posté le : 21/02/2015 17:00
Le 22 février 1995 meurt Emmanuel Roblès

à 80 ans, à Boulogne-Billancourt France, né le 4 mai 1914 à Oran Algérie, écrivain romancier, dramaturge, nouvelliste, poète français. Il reçoit le prix fémina, ses Œuvres principales, Les Hauteurs de la ville en 1948, Montserrat en 1948

En bref

Marqué par la nature méditerranéenne et la confrontation des cultures arabe et européennes, espagnole et française en Algérie, ce pied-noir débute dans le journalisme, voyage, élabore des romans sur les luttes sociales et politiques de l'époque et l'épreuve de la guerre, l'Action, 1938 ; Nuit sur le monde, 1944. Fondateur de la revue Forge, auteur fêté de Cela s'appelle l'aurore, roman, 1952, encouragé par son grand ami Camus, il se tourne vers le théâtre et y pose des cas de conscience moraux Montserrat, 1949 ; Plaidoyer pour un rebelle, 1966. Il poursuit, sur le mode autobiographique, Jeunes Saisons, 1961 ou romanesque, l'analyse d'êtres ou de sociétés déchirés les Couteaux, 1956 ; la Croisière, 1968 ; Saison violente, 1974 ; Venise en hiver, 1981 ; la Chasse à la licorne, 1985.

Sa vie

Emmanuel Roblès naît le 4 mai 1914 à Oran dans une famille ouvrière d'origine espagnole. Il fréquente une école primaire du centre d'Oran dénommée École Kargentah puis École Jules-Renard, où il se lie d'amitié avec le peintre Antoine Martinez, qui fera plus tard son portrait. Son père étant mort quelques mois avant sa naissance, il grandit donc entouré de sa mère et de ses sœurs. L'absence du père devient dès lors une dominante dans son œuvre. Doué pour les études, il entre à l'École normale d'Alger où il a pour condisciple Mouloud Feraoun.
Il visite plusieurs pays d'Europe dont l'URSS en 1934 puis l'Indochine et la Chine du Sud en 1935. Il fait son service militaire à Blida, puis à Alger. En septembre 1937, il rencontre Albert Camus à une répétition du théâtre de l'Équipe, ils se découvrent de nombreux points communs et se lient d'amitié. Il rejoint alors le groupe de jeunes écrivains qui se retrouvent autour du libraire-éditeur Edmond Charlot : Albert Camus, René-Jean Clot, Gabriel Audisio, Max-Pol Fouchet et Claude de Fréminville. En 1938, paraît l'Action son premier roman, et Camus le fait entrer à Alger Républicain où il publie, sous le pseudonyme d'Emmanuel Chênes, La Vallée du paradis sous forme de feuilleton. Il prépare aussi une licence d'espagnol à la Faculté des Lettres. Il est l'un des premiers à traduire les écrits poétiques de Federico Garcia Lorca.
La guerre coupe court à ses études, il devient alors interprète auxiliaire de l'armée, officier-interprète, puis correspondant de guerre en 1943. Il visite à ce titre la Corse, la Sardaigne, l'Italie du sud, et participe à des missions de bombardement sur l'Italie du nord et des îles de l'Adriatique. Il est aussi victime de plusieurs accidents d'avion. Il est démobilisé en avril 1946 à Paris. Il collabore alors à divers journaux : Le Populaire, Gavroche, Combat, Aviation Française.

En 1947, il retourne à Alger et y fonde la revue littéraire Forge, on y trouve les signatures de Mohammed Dib, Yacine Kateb, Jean Sénac, Ahmed Sefrioui, Malek Ouary. Il anime aussi une émission littéraire à Radio-Alger. En 1948, il reçoit le Prix Fémina pour les Hauteurs de la ville. Il rédige sa première pièce de théâtre : Montserrat. L'œuvre, créée le même jour à Alger et à Paris au Théâtre Montparnasse, obtient tout de suite un retentissement considérable et reçoit le Prix de Portique en juin 1948.

Il fonde, en 1951, aux Éditions du Seuil, la collection Méditerranée, qui révèle des écrivains comme Mouloud Feraoun, Mohammed Dib, José Luis de Vilallonga et Marie Susini. Il fait des voyages au Mexique en 1954 et au Japon en 1957, qui lui inspirent respectivement les romans Les Couteaux et L'Homme d'Avril. Il fait jouer La vérité est morte et publie un roman qui connait un succès vif : Cela s'appelle l'aurore. Luis Buñuel en tire un film éponyme sorti en 1955. Il se passionne également pour une compagnie théâtrale d'amateurs : le Théâtre de la rue dont il est l'un des fondateurs. En 1956 il participe au Comité pour la trêve civile en Algérie et préside l'appel à la trêve du 22 janvier. En avril il perd son fils puis un ami médecin, il appelle alors à ses côtés son ami Albert Camus. À la mort de celui-ci, il fait partie du premier cercle qui soutient Francine Camus. Après l'assassinat par l'OAS de Mouloud Feraoun le 15 mars 1962, il obtient la publication du Journal 1955-1962, tenu par ce dernier jusqu'à la veille de sa mort et dont il rédige la préface.

Il travaille aussi pour des adaptations et dialogues dans plusieurs films et téléfilms. À Paris, il devient membre du Comité directeur du mouvement Peuple et culture. Il devient membre de l'Académie Goncourt en 1973, élu au fauteuil de Roland Dorgelès.

En 1984, il se rend dans la région autonome du Tibet. Il tire de ce voyage un livre intitulé Routes tibétaines, publié en 1986.

Il décède le 22 février 1995 à Boulogne-Billancourt.

Depuis 1991, la Ville de Blois décerne chaque année le Prix Emmanuel-Roblès du premier roman.

Les archives et correspondances d'Emmanuel Roblès sont déposées à la Bibliothèque francophone multimédia de Limoges.

Nouvelle isolée

1942 - La Marie des quatre vents

Théâtre

Sur le théâtre de l'auteur :
Marie J. Petrone Kilker, The Theatre of Emmanuel Roblès: An American Introduction with a Checklist on Criticism and Production, Southern Illinois University, 1972, 470 pages
Josette Frigiotti, Roblès dramaturge, essai de théâtre comparé, conférence prononcée en novembre 1968, au théâtre des Buttes-Chaumont, Éditions Scènes de France, 1972, 62 pages

Liste chronologique :

1941 - Île déserte
1941 - Interlude
1948 - Montserrat
1952 - La vérité est morte
1958 - L'Horloge traduction anglaise : The Clock
1958 - Porfirio traduction anglaise : Porfirio
19?? - Plaidoyer pour un rebelle traduction anglaise : Case for a Rebel
19?? - Un Château en novembre
19?? - La Fenêtre
1984 - Un château en novembre
1991 - Les Yaquils
19?? - Mer libre
19?? - Lanterne magique

Poésie

1990 - Cristal des jours

Autobiographie

1961 - Jeunes saisons

Autres publications

1986 - Routes tibétaines récit de voyage
1988 - Albert Camus et la trêve civile critique
1995 - Camus, frère de soleil biographie

Filmographie

1955 - Cela s'appelle l'aurore de Luis Buñuel, adapté du roman de Roblès.
1967 - L'Étranger de Luchino Visconti, coscénariste... et acteur !

Théâtre

Adaptation
1960 : Carlotta de Miguel Mihura, mise en scène Jacques Mauclair, théâtre Édouard VII


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#215 Jules Renard
Loriane Posté le : 21/02/2015 16:26
Le 22 février 1864 naît, Pierre-Jules Renard dit Jules Renard

à Châlons-du-Maine Mayenne, mort à 46 ans, le 22 mai 1910 à Paris, écrivain et auteur dramatique français.
Il reçoit la légion d'honneur et est reçu à l'académie Goncourt en 1907, ses Œuvres principales sont L'Écornifleur en 1892, Poil de Carotte en 1894, Journal, 1887-1910 en 1925.

En bref

Homme de lettres, Renard vécut pour écrire, pour écrire juste et pour écrire vrai. À l'écart des écoles et des vogues passagères, rebelle à toute influence autre que celle des classiques français, il abandonne bien vite les formes usées de la nouvelle et du roman, pour devenir un maître de l'expression condensée, de la page parfaite. Il fixe un regard aigu, parfois cruel, sur les petits bourgeois, sur la famille et sur l'enfant. Il repose son œil clair, parfois attendri, sur les prés et les bois, les animaux et les paysans, et projette sur lui-même, sans ménagements, le rayon de sa lanterne sourde. Il entend faire coïncider, le plus exactement possible, la littérature et la vie, l'impression et l'expression, la poésie et la vérité.
Jules Renard naquit à Châlons-du-Maine Mayenne. Il était le dernier-né de François Renard, alors âgé de quarante ans, et d'Anne-Rosa Colin, de douze ans plus jeune que son mari, avec lequel elle ne s'entendait plus, pas plus qu'elle ne s'entendra avec son fils. De vieille souche paysanne et nivernaise, du côté paternel, il fait, au lycée de Nevers, des études suffisamment brillantes pour qu'on l'envoie à Paris préparer l'École normale supérieure. Il y renonce vite, décidé à tenter sa chance dans les lettres, en cherchant sans conviction quelque emploi. Il lit beaucoup et il écrit : des vers, qu'une actrice récite dans de modestes salons et dont il tire une mince plaquette 1886 ; des nouvelles, pour lesquelles il cherche un éditeur ; un roman, qu'il ne publiera jamais. Les vers sont quelconques ; les nouvelles font songer à du Maupassant teinté de Daudet ; le roman, villageois, dramatique, social et sentimental, est dans la lignée réaliste. Le mariage de Renard en 1888 avec une toute jeune fille lui apporte une certaine aisance, lui permet d'éditer ses nouvelles, à compte d'auteur, et de participer en tant que principal actionnaire à la fondation du Mercure de France, où il commence à se faire connaître comme critique et comme prosateur.
Dans Sourires pincés 1890, son vrai début, Coquecigrues, La Lanterne sourde 1893 et Le Vigneron dans sa vigne 1894, les histoires villageoises se mêlent aux croquis parisiens. L'Écornifleur 1892 et La Maîtresse 1896, écrits en réaction contre les romans psychologiques et mondains Bourget, Maupassant, relatent en chapitres brefs et en dialogues incisifs les aventures sentimentales peu reluisantes d'un pâle homme de lettres, l'une dans un ménage bourgeois, l'autre avec une femme entretenue. C'est l'impitoyable constat du médiocre et du banal.
Le succès de Sourires pincés, puis de L'Écornifleur, vaut à Renard d'utiles amitiés M. Schwob, L. Descaves et l'accès aux grands quotidiens et aux revues. Il y publie des textes courts, qu'il réunit ensuite en volume. Ce sont des choses vues ou vécues des moments de son enfance, un bouquet d'arbres, la pluie, la rivière, un maçon au travail, un paysan qui fauche ou qui tue le cochon, les animaux de la basse-cour ou des champs, auxquelles une prose de plus en plus nette, solide et serrée donne valeur de poème.
En 1896, Renard a loué, à Chitry Nièvre, un ancien presbytère où il passe désormais, avec sa femme et ses enfants, plusieurs mois chaque année, loin de l'agitation factice de Paris. Poil de carotte 1900 et Histoires naturelles 1896 lui ont valu une certaine notoriété, mais la consécration lui viendra du théâtre.

Sa vie

Pierre-Jules Renard naît le 22 février 1864 à Châlons-du-Maine en Mayenne, par hasard : son père, François Renard 1824-1897, est entrepreneur de travaux publics et travaille alors à la construction du chemin de fer de Laval à Caen. Il a épousé le 8 octobre 1854 Anne-Rosa Colin, fille de Victor Colin, quincaillier à Langres, élevée par son oncle Émile Petit, l'associé de François Renard1. Le jeune Renard est le dernier de la fratrie, après une fille aînée, Amélie décédée en 1858, une seconde fille également prénommée Amélie née en 1859 et un troisième enfant, son frère Maurice né en 1862. La mère de Jules Renard a vingt-huit ans lors de la naissance de son dernier enfant. Elle ne supporte plus son mari et elle aura la même attitude envers son dernier fils.
En 1866, la famille s'installe à Chitry-les-Mines, lieu de naissance de François Renard, le père de Jules, qui y devient maire. La scolarité de Maurice et de Jules se déroule à Nevers, en pension. Jules est reçu bachelier ès lettres en 1883 au lycée Charlemagne à Paris, mais il refuse de se présenter au concours de l'École normale supérieure. Je suis de la vieille école, moi, de l'école qui ne sait pas lire, écrit-il dans son ouvrage, Bucoliques.

Jules Renard ne connaît pas un succès comme auteur immédiat : il fait nombreuses lectures, fréquente les milieux littéraires, collabore à des journaux, publie des poèmes et des nouvelles Crime de village en 1887 dans la Revue de Paris de Léo d'Orfer. Le début de son roman Les Cloportes caractérise ces années au cours desquelles Jules survit grâce à la petite pension que lui versent ses parents. Il habite, début 1888, l’Hôtel des Étrangers, 24 rue Tronchet, près de sa fiancée, Marie Morneau 1871-1938, qui habite 44 rue du Rocher ce sera son adresse parisienne toute sa vie. En 1888, il conclut un mariage de raison avec Marie, qui lui apporte une dot qui s'avère précieuse pour lui, mais ce mariage se révèle heureux et améliore sa situation financière. De cette union naissent un garçon, Jean-François Fantec en février 1889 et une fille, Julie Marie Baïe en mars 1892.

succès

Portrait de Jules Renard par Félix Vallotton paru dans Le Livre des masques de Remy de Gourmont 1898.
Lorsque, en 1889, de jeunes écrivains fondent le Mercure de France, Renard est un des principaux actionnaires : il est à la fois critique et prosateur, rédacteur en chef et administrateur. Le succès arrive avec L'Écornifleur, publié en 1892, qui raconte l'histoire d'un littérateur parasite. Alphonse Allais, Edmond Rostand, Courteline, les Goncourt, Tristan Bernard, Lucien Guitry et Sarah Bernhardt font partie de son entourage. En 1894, il entre à la Société des gens de lettres et rédige Le Vigneron dans sa vigne ainsi que Poil de Carotte. Je cours les dangers du succès, note-t-il dans son Journal qu'il rédige en 1897 et 1910, mais qui n'est publié que de façon posthume, de 1925 à 1927, et constitue un témoignage précieux sur la vie littéraire de la Belle Époque. Dans cette œuvre majeure dont la manuscrit a été amputé puis brûlé par sa veuve, Jules Renard manifeste une grande lucidité, un humour féroce qui cache une infinie tendresse mais aussi une misanthropie et une certaine complaisance envers son malheur.

La controverse de La Demande

On attribue souvent à Renard La Demande. En réalité, il signe cette pièce avec Georges Docquois. Mais ce dernier, dans un article postérieur de deux ans à la mort de Renard, explique que, s'inspirant de la nouvelle de Jules Renard, les deux amis composèrent chacun un acte. Un arbitre préféra celle de Docquois, et ce fut celle-ci qui fut jouée au théâtre municipal de Boulogne-sur-Mer en janvier 1895. Jules Renard regretta vite de s'être prêté à cette aventure médiocre.

La diversion du théâtre

L'exemple et la réussite de ses amis Rostand, Tristan Bernard, A. Capus l'amenèrent à écrire pour le théâtre où il ne voyait cependant qu'un exercice inférieur. D'emblée, ce fut le succès, avec des interprètes comme Granier Le Plaisir de rompre, 1897, Brandès et Guitry Le Pain de ménage, 1898, puis Antoine, qui joue Poil de carotte avec Desprès 1900, Monsieur Vernet avec Cheirel et Signoret 1903 et monte La Bigote à l'Odéon 1910. Ni drame en vers, ni théâtre d'amour ou de boulevard, ni pièce à thèse, le théâtre de Renard sort de son œuvre et de ses expériences. Il tourne autour du couple une rupture : Le Plaisir de rompre ; une tentation : Le Pain de ménage, Monsieur Vernet, du mariage et de la famille Poil de carotte et La Bigote. On y retrouve le sérieux de sa vie et les qualités de sa prose, dans la sobriété et la densité des répliques. Renard est devenu une figure parisienne. On le décore. Il entre à l'académie Goncourt. Mais il éprouve des remords. Le théâtre lui assure quelques ressources bien nécessaires, mais le détourne de sa vocation propre : la page vraiment écrite. Il lui faut se ressaisir, se retrouver, à la campagne.

Le retour au village

Son installation à la Gloriette, en 1896, lui a fait reprendre contact avec la terre et les paysans. Attiré par le socialisme, lié avec France, Jaurès et Blum, il se sent une âme d'apôtre. Ardent dreyfusard, antimilitariste et anticlérical, il mène dans L'Écho de Clamecy le combat pour son idéal laïc et républicain Mots d'écrit, 1908, et Causeries, 1910. Il fait des conférences aux paysans et aux instituteurs. Délégué cantonal, il est élu conseiller municipal de Chaumot 1900, puis maire de Chitry 1904, réélu en 1908. Le contact est difficile. Si, à Paris, il est paysan du Danube, à Chitry, il est le Monsieur de Paris ou Monsieur Jules. Mais, du moins, il observe ses frères farouches, qu'il est si difficile de comprendre et d'aider, et décrit leurs mœurs dans une série de textes Le Vigneron dans sa vigne, éd. augm. 1901 ; Bucoliques, éd. augm. 1905 et surtout dans Ragotte 1908, où il grave, sans images et sans humour, la vie d'une humble domestique, la sienne, et de son mari, le jardinier Philippe, et qui est un chef-d'œuvre de vérité et d'émotion secrète. Mais, prématurément vieilli, il se sent de plus en plus las. Il préside, le 15 février 1910, sa dernière séance du conseil municipal de Chitry, rentre à Paris pour se mettre au lit et mourir, dans le modeste appartement où il a vécu depuis son mariage. Il a noté dans son Journal, avec un mélange de satisfaction et d'amertume : D'ailleurs, j'ai fini. Je pourrais recommencer et ce serait mieux, mais on ne s'en apercevrait pas. Il vaut mieux mettre fin. On l'enterra à Chitry, civilement.
Rongé par le scrupule, Renard n'était jamais content. Il n'en avait pas moins conscience d'être devenu l'écrivain qu'il se proposait d'être : celui du mot juste et mis à sa place. Rien à ajouter ; rien à retrancher. Il conserve des admirateurs fervents, à l'étranger comme en France. Mais on le prend souvent pour un humoriste professionnel alors qu'il exprime simplement l'humour, féroce ou cocasse, de la vie et l'on connaît surtout le créateur de Poil de carotte et de Mme Lepic, le chasseur d'images d'Histoires naturelles, que gâtent parfois l'esprit ou la préciosité, le Théâtre et le Journal. Mais c'est dans Le Vigneron, Bucoliques et Ragotte qu'on trouvera les meilleures pages, les plus humaines et les plus sobres, de ce poète en prose.

Renard et Rostand

En 1895, Renard se lie d'amitié avec Edmond Rostand ; c'est une amitié difficile, mêlée d'envie qui, si elle ne gêne pas l'admiration de Jules Renard pour Cyrano de Bergerac, se dévoile peu à peu dans le ton un peu aigre de ses écrits. Dans un passage de son Journal, Jules Renard raconte la première de Cyrano ; il y détecte immédiatement un chef-d'œuvre. Mais à son enthousiasme se mêle aussitôt une tristesse littéraire : celle de n'avoir pas réussi à faire aussi bien que Rostand. Renard connaîtra à son tour le succès, en 1897, avec Le Plaisir de rompre, pièce à référence autobiographique, qui évoque la rupture de Renard et de Danièle Davyle, pensionnaire de la Comédie-Française après une liaison de plusieurs années, lorsque Renard s'est marié. La pièce Le Pain de ménage, en 1898 est un nouveau succès, mais Edmond Rostand n'assiste à aucune représentation, malgré l'insistance de Jules Renard. Certains analyses, celles de Léon Guichard notamment font état à cet égard de l'admiration de Jules Renard pour Mme Rostand comme, dans la pièce, Pierre admire Marthe.

Le militant républicain

À partir de 1896, Renard passe plusieurs mois par an à Chaumot, proche de Chitry-les-Mines Nièvre, dans une petite maison de curé nommée La Gloriette. En 1897, son père, malade depuis quelque temps et se sachant incurable, se suicide d'un coup de fusil de chasse en plein cœur. En 1900, Jules Renard accepte la Légion d'honneur et devient conseiller municipal de Chaumot le 6 mai. Entre 1901 et 1903, il rédige de nombreux articles pour le journal L'Écho de Clamecy : la tonalité est laïque, anticléricale et républicaine. Succédant à son père, il devient maire de Chitry le 15 mai 1904. Élu sur une liste républicaine, il s'engage dans la lutte contre l'ignorance et une de ses mesures les plus spectaculaires sera la gratuité des fournitures scolaires.
Lors de l'affaire Dreyfus, il soutient Émile Zola et critique sévèrement sa condamnation. Il se révèle un admirateur enthousiaste et presque délirant de Victor Hugo.

Derniers honneurs

Jules Renard est élu membre de l'académie Goncourt en octobre 1907, au fauteuil de Huysmans grâce à Octave Mirbeau, qui a dû menacer de démissionner pour assurer son succès. Il prend sa nouvelle charge très au sérieux et participe à toutes les réunions.
Sa mère, travaillée par le spectre de la folie, meurt en 1909 en tombant dans le puits de la maison familiale, accidentellement ou suicidée. Jules Renard décède au 44 rue du Rocher d'artériosclérose à l'âge de 46 ans. Il est enterré civilement le le 27 mai 1910 à Chitry-les-Mines. Sa tombe en forme de livre ouvert, que Jules Renard a fait tailler en 1900 après la mort subite de son frère Maurice, est notamment entretenue par l’association Les Amis de Jules-Renard.
En 1933, la place Jules-Renard dans le 17e arrondissement de Paris est créée en hommage.

Jugements et citations

Il est, selon Charles Du Bos, « un Montaigne minuscule dont La Bruyère aurait affûté le style.
Par ailleurs, on l'accuse de misogynie. Il écrit, par exemple, dans son Journal 1905 : Les femmes cherchent un féminin à auteur : il y a bas-bleu C’est joli, et ça dit tout. À moins qu’elles n’aiment mieux plagiaire ou écrivaine.

Publications

Å’uvres romanesques
Crime de village (1888
Sourires pincés 1880
L'Écornifleur 1890
La Lanterne sourde 1893
Coquecigrues 1893
Deux fables sans morale 1893
Le Coureur de filles 1894
Histoires naturelles 1894
Poil de carotte 1894
Le Vigneron dans sa vigne 1894
La Maîtresse 1896
Bucoliques 1898
Les Philippe 1907
Patrie 1907
Mots d'écrit 1908
Ragotte 1909
Nos frères farouches 1909
Causeries 1910
L'Å’il clair 1913
Les Cloportes 1919
Théâtre
Le Plaisir de rompre 1897
Le Pain de ménage 1898
Poil de Carotte 1900
Monsieur Vernet 1903
La Bigote 1909
Huit jours à la campagne 1912
Le Cousin de Rose
Journal
Journal, 1887-1910 1925 Texte en ligne
Leçons d'écriture, Les Éditions du Sonneur 2008
Éditions de bibliophilie
L'Écornifleur 1892, gravures originales de Jacques Boullaire, Les Bibliophiles de France, Paris 1955
Les Philippe 1907, lithographies originales d'André Minaux, Les Francs Bibliophiles, Paris 1958



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#216 Jean-Antoine Roucher
Loriane Posté le : 21/02/2015 16:24
Le 22 février 1745 naît Jean-Antoine Roucher à Montpellier

guillotiné, à 49 ans le 25 juillet 1794 à Paris, est un poète français.
Son poème didactique, les Mois, sur le modèle des Saisons de Saint-Lambert, consacre un chant à chaque mois et combine description de la nature, célébration des activités humaines et nombreuses digressions. Des notes en prose apportaient références et cautions scientifiques. Défenseur de la monarchie constitutionnelle dans le Journal de Paris 1790-1791, détenu comme suspect, il entretint avec les siens une émouvante correspondance, et fut guillotiné avec André Chénier, le 7 thermidor.


En bref

Issu d’une famille d’artisans bourgeois de Montpellier, amateurs de belles-lettres, Roucher est initié très tôt par son père aux auteurs classiques grecs et latins1.
Pendant ses études au petit séminaire collège diocésain de sa ville natale, il se distingue comme un élève brillant et les jésuites lui suggèrent d'embrasser l'état ecclésiastique. Mais il préfère rejoindre Paris et retrouve à Versailles son oncle, l'abbé Gros de Besplas, aumônier de Monsieur, frère du Roi, comte de Provence. Son poème écrit à l’occasion du mariage du Dauphin et de Marie Antoinette, La France et l’Autriche au temple de l’hymen*, rencontre un certain succès et lui permet d’obtenir grâce à Turgot la charge de Receveur des gabelles, devenant ainsi aristocrate. Il fera exercer cette charge par son frère Roucher d’Aubanel afin de se consacrer à la poésie.
Il acquiert également une grande renommée avec son monumental poème pastoral en douze chants, les Mois 1779, suivi de longues et intéressantes notes. Il fait partie des deux ou trois poètes français qui remettent en cause la rigidité de l’alexandrin classique, en prenant des libertés avec l’hémistiche pour lui donner de la légèreté. Les salons en vogue s'arrachent le poète, prié de faire la lecture de chaque nouvelle tranche de son ouvrage en cours.
Il meurt guillotiné en 1794.

Sa vie

À vingt et un ans, il se lance dans une entreprise colossale, défi grandiose au simple bon sens : écrire l'épopée descriptive appelée par la philosophie nouvelle, versifier une encyclopédie digne de l'originale, produire le De natura rerum des temps modernes. Pour diviser cet embrassement universel, il retient la formule ovidienne du calendrier : il chantera Les Mois comme Saint-Lambert a chanté Les Saisons 1769 qui lui servent à la fois d'excitant et de repoussoir. Douze années de labeur herculéen lui seront nécessaires. La lecture, en cours de route, du Monde primitif et moderne de Court de Gébelin lui apporte la révélation d'une unité allégorique de l'Univers au-delà de la diversité des apparences : la course annuelle du soleil à travers les douze signes du zodiaque trouve une figuration sensible dans les douze travaux d'Hercule, emblème éloquent de l'énergie vitale du cosmos. Il y avait là une idée sublime dont malheureusement Roucher n'a tiré qu'un parti médiocre : car il pratique un symbolisme à rebours et dépoétise la réalité qu'il croit chanter. Au moins est-il juste de rendre hommage à l'héroïsme de sa tentative. Poème de la force élémentaire, adressé à des hommes laborieux, Les Mois sont un Héraclès manqué. Vers 1775, lisant ses vers dans les salons, Roucher avait fait l'effet d'un météore éclatant Meister et on l'appelait le démon du Midi. L'ouvrage paraît en 1778 après bien des traverses (ennuis avec la censure, avec l'archevêché de Paris, avec l'Académie française, c'est un échec à peu près complet dont l'infortuné poète ne se remettra jamais.

Cette chute illustre le décalage qui existait dans la poésie sublime entre les intentions et les possibilités techniques d'exécution, mais aussi entre les hardiesses de la création poétique et la réceptivité du public. Mal préparé à sa mission, mal servi par l'environnement, Roucher était à peu près le seul de sa génération capable d'exhumer un lyrisme sauvage des profondeurs où il sommeillait. Il a essayé d'inventer un pittoresque approprié à son sujet. Sur des pensers nouveaux désirant faire des vers nouveaux, il a tenté la formule d'un alexandrin désarticulé, en état de surpuissance et de perpétuelle mouvance, débordant de la mesure à la démesure : le résultat fut l'objet d'une réprobation unanime. Sa fresque voulait développer une géographie sacrée de l'Univers saisie dans le déroulement toujours recommencé du devenir. Doué d'une imagination puissante, même s'il fait trop souvent du naturalisme en chambre, aimant les aspects excessifs ou extraordinaires de la nature, allant de merveille en horreur, Roucher anticipe sur le génie visionnaire d'un Hugo. Mais il est garrotté par de vieux préjugés dont il n'arrive pas à se dépêtrer. En outre, sa somme poétique est un labyrinthe décourageant pour le lecteur : trop souvent le vers obscurcit la pensée et gèle le lyrisme qu'on trouve, en revanche, à torrents dans les remarques nombreuses et interminables qui accompagnent le texte. Rivarol disait des Mois : C'est le plus beau naufrage du siècle. Et Hippolyte Babou ajoutait : Oui, naufrage sans doute ; mais naufrage à toutes voiles et en pleine mer, sous un ciel brillant et ardent.

Après avoir ainsi usé sa jeunesse, Roucher connaît des années difficiles : pauvre et découragé, il vit en bourgeois besogneux. Il ne publie plus rien mais fréquente la loge des Neuf-Sœurs et se dévoue à la cause maçonnique : il écrit des odes de circonstance où se déploie un lyrisme philosophique d'une grande beauté et poursuit plusieurs projets dans le silence : des Jardins, une Astronomie, un Guillaume Wasa. La Révolution le trouve dans la force de l'âge et convaincu dès la première heure, engagé dans l'action politique, puis vite débordé par la montée des fanatismes. Son ardeur le perdra. Prisonnier sous la Terreur, il a laissé une correspondance à sa femme et à sa fille Les Consolations de ma captivité, 1797 qui est un témoignage curieux sur la vie à Saint-Lazare et l'esprit des détenus, mais aussi sur la naïveté du rédacteur. Malchanceux jusqu'au bout, il alla à la guillotine dans la même charrette qu'André Chénier, et c'est, fort injustement, tout ce que la postérité a retenu de lui.
S’opposant à La Harpe, il refuse les compromissions que le critique lui propose en échange d'une admission à l’Académie française : Laharpe exigeait, en échange du fauteuil d'académicien, que Roucher cessât de publier les quatre lettres à Malesherbes de Rousseau. La Harpe ne lui pardonna jamais son refus, et, à compter de ce jour, dénigra son œuvre. Roucher fut longtemps en relation avec Turgot ; les deux hommes se retrouvent régulièrement pour commenter les événements politiques du temps soit chez Madame Helvétius soit à la Loge des Neuf Soeurs dont ils étaient membres.. Il publie et édite La collection universelle des mémoires particuliers relatifs à l’Histoire de France Paris, 1790.

Il fréquente les salons de Julie de Lespinasse et d’Anne-Catherine Helvétius à Auteuil. Cette dernière se prend d’affection pour sa fille Eulalie. C’est là qu’il se lie d’amitié avec Benjamin Franklin vénérable de la Loge des Neuf soeurs et étudie assidûment l’anglais.

En 1790, Roucher introduit en France les idées libérales anglaises en traduisant La Richesse des Nations d'Adam Smith.

Sous la Révolution, après avoir éprouvé un certain enthousiasme pour les idées nouvelles, et de l'admiration pour Voltaire et Jean-Jacques Rousseau, dont il est le premier à publier les quatre Lettres à M. de Malesherbes, il prend vite conscience des abus que cette insurrection porte en elle et rédige des articles contre-révolutionnaires. Son inimitié pour Robespierre, auquel il reproche ses excès, lui vaut d’être arrêté sous la Terreur. Antoine Roucher est l'auteur d'une célèbre phrase passée à la postérité sous forme résumée : Robespierre, surnommé l'incorruptible par des gens qui ne le sont pas .

Il est emprisonné à Sainte-Pélagie puis à Saint-Lazare, où il a entre autres compagnons de captivité Michelle de Bonneuil, à laquelle il dédie fin 1793 des Stances sur les fleurs, puis l'année suivante André-Marie Chénier, Aimée de Coigny, duchesse de Fleury, la Jeune captive et Hubert Robert, qui le représente une dizaine de fois dont un dessin émouvant avec son fils Pierre-Angélique, dit Émile, l’Archange, derrière les barreaux de la prison en compagnie d’Aimée de Coigny. En prison, il refond sa première traduction 1790 des Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations d’Adam Smith, Paris, F. Buisson, an 3 de la République.

André Chénier et Jean-Antoine Roucher sont victimes de la répression contre une conspiration des prisons qui s'avère imaginaire. Transférés à la Conciergerie, ils sont jugés pour complot monarchiste, condamnés à mort et guillotinés le 7 thermidor an II. L'acte d’accusation de Roucher, signé Fouquier-Tinville, indique : aristocrate puant, salarié de la liste civile, écrivain stipendié du tyran, mercenaire du parti autrichien, Président du club de la Sainte Chapelle, conspirateur à la maison d’arrêt de Saint-Lazare, pour Roucher, ennemi du peuple : la mort.

Dans la charrette qui emmène Chénier et Roucher vers la guillotine, ils échangent des vers tirés d’Andromaque : Oui, puisque je perds un ami si fidèle….

Roucher est inhumé à Paris au cimetière de Picpus.

Un tableau d’Hubert Robert le représente dans sa cellule quelques jours avant son exécution3. Un dernier portrait, aujourd’hui au musée Carnavalet, est peint juste avant sa mort. Il compose alors pour l’orner ces quatre derniers vers, qu’il adresse à sa famille, et qui sont aujourd’hui connus sous le nom de Quatrain de Roucher :

À ma femme, à mes enfants, à mes amis :

Ne vous étonnez pas, objets sacrés et doux,
Si quelqu’air de tristesse obscurcit mon visage.
Quand un savant crayon dessinait cette image
J’attendais l’échafaud et je pensais à vous.

Une partie de la belle et émouvante correspondance qu’il a échangée depuis la prison avec sa famille et ses amis principalement avec sa fille Eulalie à laquelle il prodiguait d'affectueux et avisés conseils fut rassemblée après sa mort et publiée sous le nom de Consolations de ma captivité chez Agasse, imprimeur, 1797, témoignage passionnant sur la vie dans les prisons révolutionnaires.

André Chénier, moins connu à l’époque, et Jean-Antoine Roucher, tous les deux morts trop jeunes, peuvent être considérés comme les précurseurs du foisonnement poétique que connaîtra le XIXe siècle.

Un monumental tableau peint au début du XIXe siècle par Charles-Louis Muller, L'appel des dernières victimes de la Terreur, le représente avec un certain nombre de condamnés, dont André Chénier et Aimée de Coigny, à la Conciergerie. Ce tableau est exposé au musée national de la Révolution française, à Vizille ; le tableau préparatoire se trouve chez l’un de ses descendants.

La poétesse Marceline Desbordes-Valmore, admiratrice de l'homme et du poète, est touchée par la culture familiale de ses descendants et la façon dont ils honorent sa mémoire. Elle compose pour eux un poème Aux petits-enfants du Poète Roucher :

Il est des noms aimés qui s’attachant à l’âme
Vivent comme des fleurs au fond du souvenir :
Gémissant, mais baigné d’harmonie et de flamme,
Le vôtre a des parfums pour tout votre avenir.

Beaux enfants ! Que ce nom mélodieux rassemble
Doux héritiers du cygne, ah, ne nous quittez pas :
Un écho pleure encore où vous parlez ensemble,
Mais une gloire chante où vous posez vos pas.

Il existe une « Société des Amis de Roucher et André Chénier » fondée par Antoine Roucher aidé d'Édouard Guitton 1er Président en 1980 à Versailles, dont le siège est situé à la mairie du 16e arrondissement de Paris et qui organise chaque année un colloque sur ou autour de la poésie du XVIIIe siècle avec une publication de ses actes Cahiers Roucher-André Chénier 32 numéros en 2011

La devise d'Antoine Roucher était : Se regarder passer dansLes Consolations, Lettres à Eulalie.

Les armes de la famille Roucher sont d’azur à une hachette d’or accompagnée d'une plume passée en sautoir .

En 1820, le nom de Roucher a été donné à une orchidée découverte en Colombie : la Roucheria punctata.

Il existe depuis 1883 une rue Antoine Roucher dans le seizième arrondissement à Paris, ainsi qu'une rue Roucher à Montpellier.

Jean-Antoine Roucher (1745-1794)
Les mois: poème en douze chants.

A MON PERE

Combien vous avez de titres au
foible hommage que je vous présente! Je
vous dois plus que la vie; vous avez été
mon premier instituteur. Je n' oublierai
jamais ces jours de mon enfance, où me
menant avec vous dans des promenades
solitaires, vous m' entreteniez du génie
précoce de Paschal et du Tasse, et
me faisiez lire la vie de ces deux grands
hommes. Grâces à vous, mon coeur palpitoit
déjà au nom de la gloire. Je n' oublierai

jamais qu' à ces premières lectures,
vous fîtes bientôt succéder celles de
Télémaque et de la Jérusalem délivrée.
Quel charme je trouvai à
ces deux ouvrages! Comme je m' intéressois
aux scènes champêtres qui les
embellissent! Calypso, dans son isle,
Erminie, parmi des bergers, firent
couler mes premières larmes de plaisir.
Je dois à cette éducation mon amour pour
la campagne et la poésie: oui, c' est vous
qui m' aurez fait poëte, si l' ouvrage que
je vous offre peut toutefois me mériter ce
nom.

Mais quand je n' aurois pas ce motif
pour mettre le fruit de douze années de
travaux sous les auspices de mon père,
les leçons de vertu, les exemples de piété
filiale, de tendresse fraternelle, de

bienfaisance même que vous m' avez donnés,
(car vous m' avez fait voir que l' homme,
qui n' est pas riche, peut faire encore du
bien) ne me commanderoient-ils pas ce
que je fais aujourd' hui par un libre mouvement
de mon coeur? Vous vouliez avant
tout que je fusse bon, et vous l' étiez vous-même
en m' apprenant à l' être. Ah! Puisse
ce tribut de ma tendre vénération et de
ma reconnoissance, vous prouver que je
n' ai pas tout-à-fait négligé vos avis! Je
me flatte du moins que vous retrouverez
dans mes vers ce respect pour les moeurs,
cet amour de la vertu, ce sentiment des
choses honnêtes que je puisai près de vous
dans mes premières années. Que d' autres
jugent mes foibles talens; vous, mon
père, jugez l' âme de votre fils, et
applaudissez lui, si elle a quelques traits
de ressemblance avec la vôtre.

EXPOSITION

Ambitieux rival des maîtres de la lyre,
Qu' un autre des guerriers échauffe le délire;
Qu' un autre, mariant de coupables couleurs,
Soit le peintre du vice, et le pare de fleurs:
Moi, voué jeune encor à de plus nobles veilles,
Moi, qui de la nature observai les merveilles,
J' aime mieux du soleil chanter les douze enfans,
Qui d' un pas inégal le suivent triomphans,
Et de signes divers la tête couronnée,
Monarques tour-à-tour, se partagent l' année.
Sur la roche sauvage où le chêne a vieilli
J' irai m' asseoir; et là, dans l' ombre recueilli,


À l' aspect de ces monts suspendus en arcades,
Et du fleuve tombant par bruyantes cascades,
Et de la sombre horreur qui noircit les forêts,
Et de l' or des épis flottant sur les guérets;
À la douce clarté de ces globes sans nombre,
Qui flambeaux de la nuit rayonnent dans son ombre;
À la voix du tonnerre, au fracas des autans,
Au bruit lointain des flots se croisans, se heurtans,
De l' inspiration le délire extatique
Versera dans mon sein la flamme poétique,
Et parcourant les mers, et la terre, et les cieux,
Mes chants reproduiront tout l' ouvrage des dieux.
Bienfaiteur des mortels, ô géant invincible;
Dont l' hercule Thébain fut l' image sensible;
Toi qui combats toujours, et toujours plus ardent;
De triomphe en triomphe atteins à l' occident;
Toi qui de la nature enfantas l' harmonie,
Ô soleil! C' est toi seul qu' implore mon génie.
Sois l' astre de ma muse, et préside à mes vers:
Comme toi, mon sujet embrasse l' univers.

MARS

Grossis par le torrent des nèges écoulées,
Les fleuves vagabonds roulent dans les vallées;
Et les rochers de glace aux Alpes suspendus,
Sous un ciel plus propice amollis et fondus,
Se changent en vapeurs, et pèsent sur nos têtes.
La mer gronde; les vents précurseurs des tempêtes
Courent d' un pôle à l' autre, et tourmentant les flots,
Entourent de la mort les pâles matelots.
Mais du joug de l' hyver la terre enfin se lasse:
La terre, trop long-temps captive sous la glace,
Lève ses tristes yeux vers le père des mois,
Et frissonnante encor remplit l' air de sa voix.


Dispensateur du jour, brillant flambeau du monde;
Des vapeurs, des brouillards perce la nuit immonde;
Impose un long silence aux aquilons jaloux,
Et rens à mes soupirs le printems mon époux.
Elle se tait: le Dieu, sensible à sa prière,
Remonte à l' équateur; là, r' ouvrant sa carrière,
Il chasse au loin l' hyver, repousse les autans,
Et des rives du Nil appelle le printems:
"Prens tes habits de fleurs, mon fils; prens la ceinture
Qui pare tous les ans le sein de la nature;
Va: la terre soupire, et ses flancs amoureux
Attendent la rosée et tes germes heureux:
Mon fils, va la remplir de ton ame éthérée. "
Le printems à ces mots fend la plaine azurée,
Et porté mollement sur l' aîle des zéphirs,
De l' hymen créateur vient goûter les plaisirs.
La terre, devant lui frémissant d' allégresse,
S' enfle, bénit l' époux qu' imploroit sa tendresse;
L' embrasse, le reçoit dans ses flancs entrouverts:
La séve de la vie inonde l' univers.


De cet hymen fécond, dieux, quels biens vont éclore!
Déjà d' un feu plus vif l' Olimpe se colore.
Le Bélier, du printems ministre radieux,
Paroît, et s' avançant vers le plus haut des cieux,
De la terre amoureuse annonce l' hyménée,
Et vainqueur de la nuit, recommence l' année.
À peine dans les airs dévoile-t-il son front,
Que soudain tressaillant dans son antre profond,
L' immortel océan gronde, écume de joie,
S' élève, et sur la plage à grands flots se déploie.
Sa vague mugissante appelle à d' autres bords
Ces vaisseaux, que l' hyver enchaînoit dans nos ports.
Les voilà donc ces jours si rians, si prospères,
Ces jours qui tarissoient les larmes de nos pères!
Tous les ans, quand l' hyver dans son obscurité
Engloutissoit leur Dieu, le Dieu de la clarté,
Un long deuil sur les murs des sacrés édifices
S' étendoit; et l' autel privé de sacrifices,
Sans brâsier, sans parfum, sans lampe, sans flambeau,
Figuroit le soleil éteint dans le tombeau.


Durant trois jours entiers consacrés aux ténèbres,
Aux lamentations, aux pleurs, aux chants funèbres,
Ils craignoient que leur Dieu brisé par un géant
N' entraînât avec lui l' univers au néant.
Mais sitôt que vainqueur de cette nuit funeste,
Il rallumoit ses feux sous le Bélier céleste,
Les brâsiers, les flambeaux, éteints sur les autels,
Brilloient, renouvellés aux regards des mortels;
Des nuages d' encens emplissoient les portiques,
Et le prêtre et le peuple, en de joyeux cantiques,
S' écrioient: "notre Dieu renaît à la clarté;
Célébrons son triomphe: il est ressuscité. "
Pouvoient-ils en effet refuser leur hommage
À l' astre, qui des dieux est la plus belle image,
Quand ce roi de lumière au Bélier de retour,
De ses douze palais recommençoit le tour?
Lorsque des premiers tems l' antique témoignage,
Par la voix des vieillards confirmé d' âge en âge,
Disoit aux nations, en de sublimes vers,
Qu' au printems, le cahos enfanta l' univers?
La terre aime à le croire et le répète encore. ...
.....


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#217 Gotthold Ephraim Lessing
Loriane Posté le : 14/02/2015 14:21
Le 15 février 1781, à 52 ans meurt Gotthold Ephraim Lessing

dans la capitale de la principauté de Brunswick, né le 22 janvier 1729 à Kamenz en Saxe, écrivain, critique et dramaturge allemand. Critique et polémiste, théoricien des arts et de la littérature, auteur dramatique éminent, il est à la fois le plus grand écrivain de l'Aufklärung et l'initiateur du classicisme allemand. Fils de pasteur, il s'installa après ses études comme journaliste à Berlin et prit part à la guerre de Sept Ans. Il devint le critique attitré du Théâtre national à Hambourg 1767-1770, puis bibliothécaire du duc de Brunswick à Wolfenbüttel.

En bref

Lessing, premier grand critique littéraire et fondateur de la critique théâtrale en Allemagne, fut le « libérateur » de la scène allemande à laquelle il a donné quelques pièces demeurées classiques. Au temps de Diderot et de Voltaire, il se révéla comme la meilleure plume de son pays au service de la philosophie des Lumières. Historien des arts, des religions, polémiste et quelquefois théologien, il a été un représentant éminent de l'Europe des Lumières, bourgeoise et cosmopolite.
La famille Lessing était établie à Kamenz, en Lusace Saxe : c'est là que naquit Gotthold Ephraim Lessing. Son père, pasteur luthérien, lui fit donner une excellente formation grecque, latine et française avant de l'envoyer étudier la théologie à Leipzig. Un an plus tard, après un violent conflit avec lui, Lessing abandonnait les études de théologie, passait pour peu de mois à la médecine et, finalement, décidait de se consacrer au théâtre. Un des premiers en Allemagne, il allait tenter de vivre de sa plume. Jusque-là, les poètes avaient toujours plus ou moins dépendu de la faveur des princes ; Lessing, sa vie durant, vécut des revues auxquelles il collabora et de ses pièces : en fin de compte, de la faveur du public. Le premier en Allemagne, il s'est appuyé sur la bourgeoisie des villes, sur un public de femmes et d'hommes éclairés qu'il appelait à fonder et soutenir une culture allemande moderne, rationaliste, en même temps fidèle aux traditions nationales et ouverte à l'Europe. Il a vivement combattu le théâtre classique français, mais il était proche de Diderot et son action a souvent ressemblé à celle des Encyclopédistes.
Ses premières pièces de théâtre, intitulées Le Libre Penseur Der Freigeist et Les Juifs Die Juden, sont oubliées mais montrent une verve qui lui avait valu à Leipzig, dès ses jeunes années, le renom d'être un Molière allemand. Leurs sujets ne manquaient pas de hardiesse, en particulier quand il raille les préjugés et l'hostilité systématique envers les juifs. En 1765, il donnait, avec Miss Sarah Sampson, un drame bourgeois, inspiré du théâtre anglais, sur un sujet contemporain, dans le simple cadre d'une auberge. Cette œuvre était destinée à illustrer une idée que Lessing opposait aux admirateurs allemands du théâtre classique français : Il est certain que si l'Allemand voulait, au théâtre, suivre son penchant naturel, notre scène ressemblerait plus à l'anglaise qu'à la française. Corneille et Molière allaient bientôt être chassés de la scène allemande par Shakespeare.
En marge de ses polémiques, menées en particulier à Berlin dans les Lettres sur la littérature, Literaturbriefe, 1759-1765, Lessing publiait en 1766 un ouvrage classique sur la théorie des arts : Laokoon ou les Limites entre peinture et poésie, Laokoon oder über die Grenzen der Malerei und der Poesie. Cette question des différences entre peinture et poésie a été beaucoup débattue dans un siècle où on parlait encore de la peinture comme d'une poésie muette. L'analyse très serrée de Lessing a eu le mérite d'établir que poésie et peinture diffèrent aussi fondamentalement que le temps et l'espace, les actions et les objets.
Lessing traduisit le théâtre bourgeois de Diderot et, en 1767, donna lui aussi une comédie sérieuse : Minna von Barnhelm, dont la parution marque une des grandes dates de l'histoire du théâtre allemand. Pour la première fois on voyait à la scène la réalité contemporaine ; au jugement de Goethe, « cette pièce est le produit le plus vrai de la guerre de Sept Ans ; elle est d'un contenu national parfaitement représentatif de l'Allemagne du Nord ; elle est la première œuvre théâtrale tirée de la vie, d'un événement important, spécifiquement de son temps ; son effet fut incalculable Poésie et Vérité, chap. VII.
La même année, Lessing, attaché pour deux ans au théâtre national de Hambourg, commençait à publier les feuilletons dramatiques, réunis ensuite sous le titre de Dramaturgie de Hambourg Hamburgische Dramaturgie, où il a développé sa campagne de libération du théâtre allemand. Pour lui, ce ne sont pas les Français, c'est Shakespeare qui peut aider les Allemands à se donner un grand théâtre tragique ; lui seul est vrai, son génie créateur multiforme fait apparaître tous les aspects de l'homme moderne, avec une force digne de l'antique ; comparées à ses créations, celles des Français paraissent faibles et artificielles.
La tragédie publiée par Lessing en 1772, Emilia Galotti, ne peut guère être appelée shakespearienne, mais c'est une pièce d'une grande noblesse, tragédie de la vertu et de l'honneur dans le cadre d'une principauté despotique. Son dernier ouvrage dramatique, Nathan le Sage, Nathan der Weise, publié en 1779, dut attendre vingt ans avant d'être créé. C'est une pièce philosophique sur l'idée de la tolérance, symbolisée dans la parabole des trois anneaux. La pièce demeure au répertoire ; elle vaut par la belle figure de Nathan, marchand philosophe, habile et généreux, qui s'applique à faire coexister, au temps des croisades, juifs, musulmans et chrétiens à Jérusalem.
Deux ans avant sa mort, Lessing donnait là le dernier mot de sa philosophie morale et religieuse ; trente ans durant, il s'était passionné pour l'histoire des religions et avait polémiqué contre nombre de théologiens. S'il avait refusé de se faire pasteur, c'est parce qu'il avait tôt perdu la foi dans l'orthodoxie luthérienne ; il était à la recherche d'une foi fondée en raison, d'une révélation qui pût soutenir l'examen critique de l'historien. Dès ses premiers opuscules sur Le Christianisme de la raison, Das Christentum der Vernunft, 1753, ou bien Sur les frères de Herrnhut, Über die Herrnhuter, 1755, se manifestent deux convictions pour lui cardinales : Dieu échappe à toute théologie, mais la polémique peut servir, dans le combat des opinions, à faire apparaître quelques fragments de vérité ; ensuite, et peut-être surtout, ce sont les œuvres qui comptent : plus que les disputes sur le dogme, c'est la pratique du bien qui fera le bon chrétien.
La philosophie religieuse de Lessing devait beaucoup à Spinoza, comme il apparaît dans le traité Sur la réalité des choses en dehors de Dieu, Über die Wirklichkeit der Dinge ausser Gott, et comme il le déclare à Jacobi peu avant de mourir. S'appuyant sur les ouvrages d'exégèse de H. S. Reimarus, qu'il avait connu à Hambourg, il a mené à partir de 1770, depuis Wolfenbüttel où il était bibliothécaire, une série de publications et de polémiques, en particulier contre le pasteur Goeze.
Sa propre philosophie des religions se trouve exprimée, après les Dialogues maçonniques, Gespräche für Freimaurer, dans L'Éducation du genre humain, Die Erziehung des Menschengeschlechts, 1780. Ce fut le dernier de ses ouvrages, auquel il a donné la forme très concise d'une suite de propositions, comme dans une profession de foi ; elle se termine toutefois par une interrogation. Il y considère la marche de l'humanité, de révélation en révélation, depuis le polythéisme des premiers temps. Après le monothéisme mosaïque, la religion du Christ a ouvert un second état moral de l'humanité ; demain pourra apparaître le début d'un troisième âge, celui où les hommes, devenus pleinement conscients de ce qu'ils peuvent, feraient le bien pour lui-même.
Lessing était trop rationaliste pour oser prophétiser ; mais l'élargissement qu'il a su donner à la philosophie des Lumières, reçue d'Angleterre et de France, annonce les grands idéalistes de l'Allemagne classique.

Sa vie

Né à Kamenz, petite ville de Lusace où son père était pasteur et théologien réputé de Lusace, Lessing est l’aîné de dix garçons. Il reçoit, à l'école saxonne de Meissen, une très bonne éducation classique. Son père, qui veut faire de lui un pasteur, l'envoie ensuite étudier la théologie à Leipzig, en 1746. Mais le jeune Lessing préfère la poésie et le théâtre. Dès 1748, il fait jouer une comédie contre les précieux, le Jeune Savant Der junge Gelehrte, qui lui vaut d'être comparé par une gazette à un nouveau Molière, mais qui est aussi le signal de la rupture avec le pasteur, son père, comme de l'abandon de ses études théologiques.
Déjà lecteur assidu à douze ans, il entre dans la célèbre Fürstenschule, école du Prince de Saint Afra de Meissen où il acquiert une bonne connaissance du grec, du latin et de l’hébreu. À cette époque, son admiration pour Plaute et Térence lui donne envie d’écrire des comédies. À l’automne 1746, il entre à l’université de Leipzig pour y étudier en théologie, mais ses vrais centres d’intérêt sont la littérature, la philosophie et l’art. Il se livre aux exercices qui développent la force et la souplesse du corps, fréquente le théâtre et se lie avec les comédiens. Après avoir étudié quelque temps la médecine et les mathématiques, il s’installe, en 1747 chez son cousin l’écrivain Mylius, un auteur comique avec qui il débute au théâtre.
Devenu l’ami des écrivains Mylius et Weiße, dont les opinions peu orthodoxes eurent sur lui de l’influence, son père, affligé de cette direction d’esprit, le rappela subitement auprès de lui. Après avoir reconnu que son fils avait acquis des connaissances solides et variées, il voulut lui faire reprendre ses études théologiques. Lessing retourna donc à Leipzig, puis passa à Berlin, où il resta trois ans, et à Wittemberg, où il étudie la philologie. En 1752, il obtient une maîtrise de lettres, ce qui lui permet de vivre de sa plume et devient précepteur. Cette petite ville lui étant devenue insupportable, il retourne à Berlin en 1753 où il se lie étroitement avec Ramler, Nicolai, von Kleist, Sulzer et surtout Mendelssohn, etc. De 1756 à 1758, il voyage en Angleterre.
Lessing fit ensuite à Leipzig un séjour de trois années, qui comptent parmi les plus actives et les plus fécondes de sa vie. En 1760, il accompagna, en qualité de secrétaire, le général de Tauenzien à Breslau, revint de nouveau à Berlin en 1765, et alla, deux ans plus tard, fonder à Hambourg un théâtre national, qu’il ne put soutenir deux ans, mais qui, malgré son insuccès, accrut sa réputation littéraire. Il essaya aussitôt, mais non moins infructueusement, de fonder une librairie savante à Hambourg. En 1769, il devient membre de l'Académie royale des sciences et des lettres de Berlin. Enfin, en 1770, il devint bibliothécaire et conseiller à Wolfenbüttel, où le prince héréditaire de Brunswick, Ferdinand, l’établit libéralement, en disant qu’il ne mettait pas Lessing au service de la bibliothèque, mais la bibliothèque au service de Lessing.
Il visita l’Italie vers cette époque. Ses dernières années furent remplies par des controverses théologiques, dans lesquelles il prit contre Goetze le parti de la tolérance. En 1776, Lessing avait épousé une veuve, Eva König, avec qui il était lié depuis plusieurs années, et qui mourut en 1778 en mettant au monde un enfant qui ne put vivre. À partir de ce moment, il devient dépressif et s’éteindra le 15 février 1781.

Les thématiques

Lessing a surtout marqué sa trace dans la littérature allemande par ses travaux de critique et ses écrits didactiques ou de controverse où éclata son originalité comme écrivain. Là, sa langue est un modèle de clarté, de vivacité, d’agrément et souvent de force. Il a au plus haut point le sentiment de l’art et de ses rapports avec la nature et la vie. Ayant subi l’influence des critiques français de l’école encyclopédique, Lessing était, dans l’art, réaliste par tendance autant que par système, et en philosophie, proche du scepticisme de Bayle et de Voltaire. La vue de la stérilité produite en Allemagne par l’imitation servile de la littérature française lui faisant préférer les auteurs anglais, il professa pour Shakespeare la même admiration que Klopstock pour Milton. Germaine de Staël l’a parfaitement caractérisé lorsqu’elle a écrit que Lessing écrivit en prose avec une netteté et une précision tout à fait nouvelles. La profondeur des pensées embarrasse souvent le style des écrivains de la nouvelle école ; Lessing, non moins profond, avait quelque chose d’âpre dans le caractère qui lui faisait trouver les paroles les plus précises et les plus mordantes. Il était toujours animé dans ses écrits par un mouvement hostile contre les opinions qu’il attaquait, et l’humeur donne du relief aux idées. Il s’occupa tour à tour du théâtre, de la philosophie, des antiquités, de la théologie, poursuivant partout la vérité, comme un chasseur qui trouve encore plus de plaisir dans la course que dans le but. Son style a quelque rapport avec la concision vive et brillante des Français ; il tendait à rendre l’allemand classique... C’est un esprit neuf et hardi, et qui reste néanmoins à la portée du commun des hommes ; sa manière de voir est allemande, sa manière de s’exprimer européenne. Dialecticien spirituel et serré dans ses arguments, l’enthousiasme pour le beau remplissait pourtant le fond de son âme ; il avait une ardeur sans flamme, une véhémence philosophique toujours active, et qui produisait, par des coups redoublés, des effets durables.

L'esthétique et les lois du beau

Les principes de critique littéraire et d’esthétique de Lessing sont exposés dans de nombreux ouvrages. Le plus célèbre est son Laokoon Laocoon, 1766, qui a pour objet propre la détermination des limites respectives des arts plastiques et de la poésie. Dans cette suite de dissertations ingénieuses et savantes intéressant à la fois le critique, l’artiste et l’archéologue, Lessing enseigne que la première loi de l’art est la beauté et que le caractère particulier de la poésie est l’action. L’art qui s’adresse aux yeux ne doit traduire, de l’action développée par le poème, que les détails qui, offerts à la vue, ne détruisent pas la beauté. Témoin le précieux groupe de Laocoon découvert à Rome en 1506, qui est loin d'être une traduction fidèle de la magnifique scène décrite au deuxième livre de l'Énéide. Aucun exemple ne marque mieux les différences qu’entraîne, entre les règles de l’art plastique et de la poésie, la distinction de leurs conditions essentielles : Le poète, selon Lessing, travaille pour l’imagination, et le sculpteur pour l’œil. Celui-ci ne peut imiter toute la réalité qu’en blessant les lois du beau ; il ne reproduit qu’une situation, qu’un instant, tandis que le poète développe l’action tout entière. Le Laocoon a été traduit en français par Vanderbourg 1802.
On trouve la théorie de Lessing sur l’art dramatique allemand et sur le théâtre en général dans la Hamburgische Dramaturgie Dramaturgie de Hambourg ; 1767-1768 qui est, à proprement parler, le journal du théâtre dont Lessing était directeur. L'objet de ce journal était de rendre compte des pièces représentées, d’en juger la valeur, d’en constater et d’en expliquer le succès ou la chute. Lessing y combat de toutes ses forces l’imitation de la tragédie française comme le principal obstacle de l’établissement d’un art national allemand. Il y dénonce la règle des trois unités et démontre que c’est par erreur qu’on l’a attribuée à Aristote. Il rejette les modèles français pour chercher à constituer un type de drame tragique, en combinant la poétique d’Aristote avec l’exemple des maîtres grecs, de Shakespeare et de Calderón et les idées de Diderot. La Hamburgische Dramaturgie a été traduite en français par Mercier et Juncker en 1785.
On citera, parmi les autres ouvrages de critique de Lessing, les Antiquarische Briefe Lettres archéologiques ; 1768-1769, destinées à défendre les idées du Laocoon contre les objections du professeur Klotz, de Halle ; Abhandlungen über die Fabel Dissertations sur la fable ; 1759, où il s’occupe surtout de la moralité de ce genre littéraire ; Anmerkungen über das Epigramm Réflexions sur l’épigramme ; 1771 ; Beiträge zur Historie und Aufnahme des Theaters Mélanges d’histoire dramatique ; 1750, avec Mvlius ; Theatralische Bibliothek Bibliothèque théâtrale ; 1754 ; Wie die Alten den Tod gebildet De la Peinture de la mort chez les anciens ; 1769; des Literaturbriefe Lettres littéraires, traitant de Shakespeare et de la formation d’un théâtre allemand.

Dans l'ordre de la critique littéraire, les contributions de Lessing aux Lettres sur la littérature récente, Briefe die neueste Literatur betreffend, publiées à Berlin de 1759 à 1765, offrent un bel exemple de méthode rationaliste appliquée à la connaissance des œuvres. Lessing se soucie peu de la personne d'un auteur, non plus que des conditions dans lesquelles les œuvres ont été écrites : tout, pour lui, est dans la logique des structures, dans l'efficacité qui en découle, dans le profit que peut en attendre le lecteur pour découvrir la nature humaine, pour se former et avancer sur le chemin de la vérité des êtres et des choses. Lessing n'est pas exempt de passions, et l'admiration l'inspire mieux que le dédain, car il lui arrive alors d'être spécieux et de se laisser prendre à sa propre vivacité verbale. Son vocabulaire n'est ni très riche ni imagé, mais sa prose est rigoureuse ; elle a gardé quelque chose de la concision latine.
La clarté d'analyse distingue aussi le Laokoon : oder über die Grenzen der Malerei und Poesie, 1766, son principal traité d'esthétique. Il y réfléchit sur la différence entre la poésie et la peinture, sujet ancien, où ses prédécesseurs immédiats ont été le Français J. B. Dubos, 1670-1742 et l'Anglais A. Shaftesbury 1671-1713. Le succès des études de J. J. Winckelmann 1717-1768 sur les arts plastiques de l'Antiquité, sa théorie de l'imitation contribuaient aussi à répandre les formules suivant lesquelles la peinture serait comme une poésie muette, et plus encore la fameuse comparaison d'Horace : ut pictura poesis.
Pour Lessing, toute poésie se déroule dans le temps, dans l'ordre de l'avant et de l'après. La peinture, elle, sert à représenter des objets qui existent ensemble au même instant, des attitudes non pas successives mais concomitantes. Certes, le peintre peut suggérer, par une nuance, ce qui a précédé ou ce qui va suivre, mais ce qu'il représente est présence, donc instantanéité. De la même façon, le poète a le droit de décrire, mais en liant les couleurs et les formes à des actes ; la bonne description est celle d'un changement, du passage d'un état à un autre.
Selon la classification des Anciens, la poésie peut être épique, dramatique ou lyrique. C'est la poésie dramatique qui est, selon le Laokoon, la plus sûrement et purement poétique : Que la poésie dramatique soit la plus haute, qu'elle soit même la seule, Aristote l'a dit et il n'accordait le second rang à l'épopée que dans la mesure où elle était ou bien pouvait être, en grande partie, dramatique. Le vrai poète, selon Lessing, est un génie dramatique : son élément est l'enchaînement des intentions et des actes, des causes et des effets ; il se meut dans le temps, comme l'historien, mais il est plus libre et sans doute plus vrai, car il va au-delà de l'apparence.

L'Éducation du genre humain

Dès ses premiers écrits apparaît, chez Lessing, le besoin de se faire, en dehors de l'orthodoxie, une foi qui soit justifiable en raison. Cette exigence mène à un examen critique des Écritures et il reste alors à sortir du doute, qui est la suite obligée de toute exégèse critique. Aussi Lessing s'est-il intéressé aux hérétiques et a-t-il entrepris la réhabilitation de plusieurs d'entre eux ; ses plaidoyers laissent vite apparaître sa propre conviction : un homme qui cherche sincèrement le vrai ne mérite pas d'être condamné ; de plus, il peut approcher quelques aspects de la vérité. Prétendre connaître toute la vérité est un péché contre l'esprit. Dans une parabole imitée de l'Évangile, Lessing dit que, si Dieu lui avait offert de lui montrer la vérité, il aurait refusé, préférant garder la part qui est proprement de l'homme : l'aspiration au vrai et la volonté de découvrir. Ailleurs, sous une forme imagée, il a ramassé la vérité psychologique de ce qui était pour lui conviction métaphysique et règle de travail : On a plus de plaisir à chasser qu'à posséder sa proie.
Une pareille philosophie permettait à Lessing d'éluder les formulations qui l'auraient gêné ; il a souvent refusé la métaphysique et plus encore la théologie, au nom de cette impossibilité de formuler les vérités dernières. Aussi a-t-on pu se poser des questions sur les convictions de Lessing lui-même, surtout en ce qui concerne les rapports de Dieu et du monde. En 1785, après la mort de Lessing, F. H. Jacobi 1743-1819, dans un ouvrage sur Spinoza, écrivit que Lessing lui avait déclaré qu'il n'y avait point d'autre philosophie que celle de Spinoza.
Lessing a, cependant, mis ses dernières pensées dans deux ouvrages de caractère plus doctrinal, les Dialogues maçonniques, Ernst und Falk, Gespräche für Freimaurer, 1778-1780 et l'Éducation du genre humain, Die Erziehung des Menschengeschlechts, 1780.
Les francs-maçons des Dialogues sont des élèves de Nathan, comme lui tolérants, généreux, cosmopolites, confiants dans l'avenir ; capables de travailler en secret, de ne dire que ce qu'il est utile et fécond de dire, soumis à la volonté divine, mais décidés aussi à instaurer, au-delà des nationalités et des confessions, la fraternité des meilleurs. D'abord en secret, un jour publiquement.
L'Éducation du genre humain résume en une suite de paragraphes concis les révélations successives qui ont été données aux hommes. Ils ont été l'objet d'une véritable éducation, au cours de laquelle leur ont été dévoilées, graduellement, selon le développement de leur esprit, les vérités de leur destinée et de celle du monde. Dieu, bon pédagogue, a mesuré ses révélations aux capacités de ses élèves. Ainsi, on a pu passer du polythéisme des premiers âges au monothéisme de Moïse, puis à la doctrine chrétienne de l'immortalité de l'âme. Chaque fois, un progrès moral accompagnait la révélation : Moïse menaçait de la vengeance divine, mais le Christ exhorte à faire le bien pour lui-même. Ainsi, l'humanité poursuit une immense et lente marche, souvent retardée ou détournée, vers un avenir qu'elle ne connaît pas, mais dans lequel elle garde confiance parce qu'en fin de compte c'est la raison qui l'emportera. Mouvement si ample et si lent que l'homme impatient désespère et que l'utopiste crie à l'absurde, alors que l'homme de foi et de raison prend patience, car il sait que le temps viendra.

Son Å“uvre

Indépendamment des éditions particulières des divers ouvrages ou séries d’ouvrages de Lessing, il a été donné plusieurs éditions de ses Œuvres complètes Berlin, 1771-1794, 30 vol. ; 1825-1828, 32 vol. ; 1838-1840, 13 vol., édition. Lachmann, très estimée.
Lessing avait un frère plus jeune, Charles-Gotthelf, né en 1740, mort en 1812, directeur de la Monnaie à Breslau et auteur de quelques comédies, qui a publié les ouvrages posthumes de son frère.

Théâtre

Les ouvrages originaux où Lessing applique lui-même ses principes appartiennent surtout au théâtre. Il suffit de rappeler ses drames de jeunesse : Damon, ou la Véritable amitié 1740 ; le Jeune savant 1747, satire contre l’érudition stérile et pédante ; le Misogyne 1748 ; la Vieille fille 1749 ; les Juifs 1749, où sont combattus les préjugés contre cette religion ; der Freigeist l’Esprit fort ; 1749, dirigé contre l’athéisme ; les femmes sont des femmes Weiber sind Weiber ; 1749. Les drames suivants sont des œuvres de transition : Miss Sara Sampson 1755, tragédie bourgeoise en cinq actes, dont le sujet, tiré de Clarissa Harlowe, est traité dans le goût de la sentimentalité allemande ; Philotas 1759, tableau larmoyant du dévouement à la patrie.
On met à part, comme les meilleures œuvres de Lessing et comme marquant enfin l’avènement du drame national, les trois compositions de Minna de Barnheim, en cinq actes 1763, considérée comme la première comédie vraiment allemande, et où respire l’esprit guerrier qui animait l’armée du grand Frédéric à la fin de la guerre de Sept Ans ; Emilia Galotti, le chef-d’œuvre de l’auteur dans le genre tragique et dont le sujet est l’histoire de Virginie, transportée à Venise, Lessing ayant choisi un fait de l’histoire étrangère pour mieux laisser passer ses idées sur les intérêts et la situation politique de son pays ; Nathan le Sage 1779, dont le sujet, emprunté au conte des Trois Anneaux de Boccace, a pour morale que tous les hommes honnêtes méritent la même estime sans acception de foi religieuse : plus faite pour la lecture que pour la scène, cette pièce, qui manque d’action, compte parmi les productions les plus pures et les plus élevées de Lessing et de son temps. Ces trois dernières œuvres ont été traduites dans le recueil des Chefs-d’œuvre des théâtres étrangers de Barante. Les mêmes pièces et quelques autres, l’Esprit fort, le Misogyne, Sara Sampson, Philotas, etc., ont été aussi traduites par Juncker et Liébault, dans leur Théâtre allemand, par Kriedel et Bonneville, par Cacault, etc. Nathan l’a encore été par Herm. Hirsch Paris, 1863, in-18. Minna a été imitée par Rochon de Chabannes, dans ses Amants généreux, et Nathan par Chénier et Cubières.
Dans les Souffrances du jeune Werther, Emilia Galotti est le livre que Werther laisse ouvert à l’attention de Charlotte le jour où il se suicide par amour pour elle :« Du vin il n’avait bu qu’un verre. Emilia Galotti était ouvert sur son pupitre.

Fables

Un des livres de Lessing les plus connus, hors d’Allemagne, est son recueil de Fables, en prose (1759), acceptées comme le modèle d’un genre dont il donnait en même temps la théorie : envisageant sous un jour étroit le but moral qu’il visait, il tendait à ramener le récit à la simplicité d’Ésope, sans chercher à réformer les mœurs en les peignant. Ces Fables, qui figurèrent dans tous les recueils de lectures allemandes, ont été plusieurs fois traduites en français Paris, 1764, 1770, 1811.

Philosophie

Comme écrits plus spécialement philosophiques de Lessing, où l’on trouve toutes les qualités ordinaires de l’auteur, les cinq entretiens intitulés : Ernst et Falk 1778-1780, et surtout die Erziehung des Menschengeschlechts Éducation de l’humanité ; 1780, ouvrage qui ouvre les voies à toute l’école philosophique de Herder. Il ne faut pas oublier enfin quelques publications théologiques : Berengarius turonensis, oder Ankündigung Bérenger de Tours, ou Découverte d’une œuvre importante de cet auteur, etc.; 1770, qui fut l’occasion de violentes attaques de la part des théologiens allemands, surtout de celles de Goetze, pasteur à Hambourg ; l’Anti-Goetze, pamphlet spirituel qui fit retirer à l’auteur l’autorisation de se faire imprimer à Wolfenbüttel ; das Testament Johannis l’Évangile de Jean ; 1777 ; Über den Beweis des Geistes und der Kraft l’Esprit et la force ; 1778, etc.
En septembre 1785 Friedrich Heinrich Jacobi fit paraître Lettres à Moses Mendelssohn sur la philosophie de Spinoza. Il révélait qu'au cours d'une conversation de juillet ? 1780 avec Lessing, celui-ci lui avait déclaré : "Έν καì Πãν [Hen kai pân : Un et Tout : je ne sais rien d'autre. ... Il n’y a pas d’autre philosophie que la philosophie de Spinoza." Jacobi, lui, s'opposait au spinozisme, qui tient la liberté pour une illusion, et qui, surtout, selon lui, aboutit à l'athéisme, comme, d'ailleurs, le rationalisme. Les positions étaient prises : Aufklärung la Philosophie des Lumières, rationaliste, représentée jusqu'alors par Lessing contre Schwärmerei irrationalisme, illuminisme attribués prestement à Jacobi. Ainsi naissait la querelle du panthéisme, qui dura de 1785 à 1815 au moins. Moses Mendelssohn découvrait que Lessing, son maître et ami, figure des Lumières, adhérait au spinozisme, donc, potentiellement au panthéisme, et, de là, à l'athéisme.

Å’uvres

Théâtre

Les Juifs 1749.
Miss Sara Sampson 1755.
Faust vers 1759. "Demeuré à l'état de fragment. Drame réaliste bourgeois substituant à Méphistophélès un mauvais conseiller".
Minna von Barnhelm 1767, trad. fr. Paris, José Corti, 1997. "Comédie sérieuse".
Emilia Galotti 1772, trad. fr. P. Sucher, Paris, Aubier-Montaigne, 1940. "Tragédie de la vertu et de l'honneur" P. Grappin
Nathan le Sage 1779, trad.fr., Paris, Aubier, 1993.
Théâtre complet de Lessing, trad. fr. Félix Salle, 1870, 3 tomes.

Essais

Traités sur la fable 1759, trad. fr. Paris, Vrin, 2008.
Lettres sur la littérature moderne, 1759-1765.
Sur la réalité des choses en dehors de Dieu Über die Wirklichkeit der Dinge ausser Gott, 1763. Trad. fr. in Herder, Dieu. Quelques entretiens, Paris, PUF, 1998, p. 127-160. "Philosophie religieuse de Lessing qui devait beaucoup à Spinoza" P. Grappin.
Laocoon ou Des limites respectives de la poésie et de la peinture 1766-1768, trad. fr. Paris, Hermann, 1990.
La Dramaturgie de Hambourg 1767-1769, trad.fr., Bruxelles, Klincksieck, 2009.
Comment les Anciens représentaient la Mort 1769, trad. fr. Paris, Hermann, 1968 avec Laocoon.
Sur la preuve de la force et de l'Esprit 1777.
Ernst et Falk. Dialogues maçonniques 1778-1780, trad. fr. Lionel Duvoy, Paris, Dervy, édition du texte intégral établie par Lionel Duvoy.
L'Éducation du genre humain 1780, trad. fr. P. Grappin, Paris, Aubier, 1946 suivi de : Dialogues maçonniques.

Sources

Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littératures, Paris, Hachette, 1876, p. 1238-40
Michel Henri Kowalewicz, Lessing et la culture du Moyen Âge, Weidmann, 2009 coll. Spolia Berolinensia
Michel Henri Kowalewicz, Gotthold Ephraim Lessing et la pensée médiévale Tome I Tome II




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#218 Maxime Ducamp
Loriane Posté le : 07/02/2015 14:50
Le 8 février 1822 à Paris, à 72 ans meurt Maxime Du Camp,

à Baden Baden, né le 8 février 1822 à Paris, écrivain réaliste et photographe français, membre de l’Académie française. Ses Œuvres principales sont "souvenirs littéraires"

En Bref

D'avoir été pendant trente-sept ans l'ami, le compagnon de Gustave Flaubert ne semble pas avoir porté chance à Maxime Du Camp. La postérité est à cet égard fautive, qui n'a pas pris la peine, depuis un siècle, de relire cet excellent polygraphe. À l'exception du Nil, réédité en 1987 par D. Oster et M. Dewachter chez Sand/Conti et des extraits des Souvenirs littéraires, présentés en 1984 par M. Chaillou chez Balland, l'œuvre de Du Camp demeure ignorée. À eux seuls, pourtant, ces Souvenirs, 2 t., Hachette, 1882-1883 constituent un exceptionnel document sur un demi-siècle de vie littéraire où passent, avec les déformations propres au genre, quelques-unes des figures les plus marquantes de ce temps : Gautier, Nerval, Fromentin, Delacroix, Sand, Musset, Louise Colet, Baudelaire, les saint-simoniens, et au moins deux lieux de publication essentiels : la seconde Revue de Paris, où Du Camp publia Madame Bovary et la Revue des Deux Mondes, ainsi que la plupart des événements, 1848, l'expédition des Deux-Siciles, la Commune, la République dont Du Camp fut acteur ou témoin. Pour une description un peu scientiste et une phrase un peu rapide sur l'épilepsie de Flaubert, Du Camp passa à tort pour un perfide et devint un proscrit littéraire, pour reprendre l'expression de Julian Barnes, Le Perroquet de Flaubert, 1986. Quant à la répulsion que lui inspira la Commune, répulsion qu'il partagea avec la quasi-totalité des gens de lettres de son temps, Flaubert et Sand compris, elle ne justifie plus qu'on se passe d'une vue, même cavalière, sur ce Fregoli d'une époque dont il épousa, plus par curiosité et bonne volonté que par opportunisme, tous les avatars.
Romancier, Du Camp se bat contre les démons d'un romantisme attardé en mettant à mort dans les Mémoires d'un suicidé 1853 la race maladive et douloureuse qui a pris naissance sur les genoux de René. Tenace, le héros de son bovarysme ennuyé et moralisateur ressuscitera dans au moins deux autres récits : Le Chevalier au cœur saignant 1862 et surtout Les Forces perdues, 1867. Pour tromper son ennui, Du Camp aura entre-temps revêtu le costume qui lui alla le mieux, celui du voyageur : Le Nil 1854, récit de son voyage en Égypte et en Nubie avec Flaubert, remarquable par son écriture composite, romantique, artiste et saint-simonienne, se prolongera à travers les nouvelles des Six Aventures 1857, ou les souvenirs personnels de l'Expédition des Deux-Siciles, 1861. De son voyage de deux ans en Orient, il aura rapporté un superbe ensemble de quelque cent cinquante calotypes qui font de lui un des premiers reporters-photographes de son époque.

Sa vie

La fortune de son père, médecin réputé, permet à Du Camp, ses études terminées, de satisfaire le goût très vif qu’il a pour les voyages. Il visite l'Europe et l'Orient entre 1844 et 1845, puis de nouveau entre 1849 et 1851, cette fois en compagnie de Gustave Flaubert avec qui il entretient ensuite une abondante correspondance. Pour son voyage oriental de 1849-1851, il sollicite une mission archéologique auprès du ministère de l'Instruction publique. Il la documente par de nombreuses photographies, pour lesquelles il utilise la technique du calotype. Les tirages sur papier salé réalisés dans les ateliers et selon le procédé de Blanquart-Evrard sont restés d'une très grande qualité2. Il publia le récit de ses voyages.

En 1851, il est un des fondateurs de la Revue de Paris supprimée en 1858 et est un contributeur fréquent de la Revue des deux Mondes. En 1853, il est promu au grade d’officier de la Légion d'honneur. Ayant servi comme volontaire sous Garibaldi en 1860, il raconte ses expériences dans Expédition des Deux-Siciles (1861). En 1870 il entre au Sénat, mais sa nomination est réduite à néant par la chute de l’Empire. On l’élit membre de l’Académie française en 1880, surtout, dit-on, à cause de son histoire de la Commune, publiée sous le titre de les Convulsions de Paris 1878-1880.

Voici ce que dit de lui La Petite Revue du 24 février 1894 : En 1848, il était à Paris, revenant de son premier voyage en Orient, quand éclata la Révolution. Il se battit contre l'insurrection, aux journées de juin, dans les rangs de la garde nationale, fut blessé et mérita d'être décoré de la main de Cavaignac. C'est de là sans doute que lui vint l'idée d'écrire les Convulsions de Paris, une de ses dernières œuvres et celle qui restera la plus connue avec Paris, ses organes et ses fonctions.
Ses premiers ouvrages sont relatifs à ses voyages en Orient : Smyrne, Éphèse, Constantinople, l'Égypte, la Nubie, la Palestine. Il a parcouru et décrit ces pays. Il fait notamment partie de la célèbre expédition des Mille, en Sicile, et il en a écrit l'histoire. La Petite Revue, 7e année, 1er semestre, 24 février 1894. Il est aussi l'un des premiers à utiliser la photographie dans ses explorations et ses livres de voyage furent parmi les premiers à être illustrés de photographies. On a de lui aussi les Mémoires d'un suicidé, des ouvrages de critique, d'art, des poésies et des romans. Son œuvre est des plus fécondes.

Collaborateur assidu de la seconde Revue de Paris, il meurt au moment où naît la troisième. La Revue des Deux-Mondes l'a compté également au nombre de ses plus brillants collaborateurs.

Il est l’auteur d’un livre qui demeure un témoignage précieux sur la vie quotidienne à Paris, Paris, ses organes, ses fonctions, sa vie dans la seconde moitié du XIXe siècle, 1869-1875. Il publie plusieurs travaux sur les questions sociales, dont l’un, Auteurs de mon temps, a été conservé dans l’Enfer de la Bibliothèque nationale jusqu’à 1910. Ses Souvenirs littéraires, 2 vols., 1882-1883 contiennent de nombreux renseignements sur les auteurs contemporains, surtout Gustave Flaubert.

Converti un instant aux merveilles du progrès technique et de la révolution industrielle et morale, Du Camp publie en 1855, l'année même de l'Exposition universelle, un fort volume de poèmes, Les Chants modernes, réponse aux Poèmes antiques de Leconte de Lisle, avant de s'adonner comme tout un chacun à la critique d'art, Salons de 1857, 1859, 1861, En Hollande, 1868. Il semble alors que la palinodie est accomplie, la conversion réalisée. Passant sur le Pont-Neuf, Du Camp reçoit l'illumination qui décidera, en 1865, de la seconde partie de sa vie. Voilà qu'il se lance dans une grande enquête sur Paris, publiée par articles dans la Revue des Deux Mondes : Paris, ses organes, ses fonctions et sa vie dans la seconde moitié du XIXe siècle, t. I à VI, Hachette, 1875-1879. Physiologie et mécanique sont les deux modèles métaphoriques de cette enquête que l'on peut situer entre Louis Sébastien Mercier et Frédéric Le Play. Enquête balzacienne mais située hors de la fiction, annonciatrice de Zola, et grâce à laquelle Maxime Du Camp va accomplir sa vocation de reporter. Statisticien « ébloui » par le Paris moderne qui s'édifie sous le second Empire, modèle de plénitude, de cohérence et d'organisation, maîtrisé par une administration inspirée et dévouée au bien public, Du Camp se fait le vivisecteur et l'expérimentateur d'une utopie urbaine qui échappera peut-être au destin des nécropoles.
Élu à l'Académie française en 1880, Maxime Du Camp consacrera ses dernières années à l'examen clinique et éthique d'une capitale qui aura survécu à la Commune : Les Convulsions de Paris, 1878-1880, La Charité privée à Paris, 1885, Paris bienfaisant, 1888. Ainsi, le compagnon de Gustave Flaubert aura-t-il échappé à la littérature pour se faire le chroniqueur d'une société gouvernée et gérée par la bourgeoisie.

Il meurt en 1894 et est enterré au Cimetière Montmartre.

Å’uvres

Maxime Du Camp, Ibsamboul Abou Simbel, colosse médial du spéos de Phré, épreuve sur papier salé obtenue à partir d'un calotype négatif par procédé Blanquart-Evrard 1850

Essais

Chants modernes 1855
Convictions 1858
Les Convulsions de Paris 1878, 4 vol.
Paris bienfaisant 1888
Ouvrages sur le voyage

Souvenirs et paysages d’orient 1848
Égypte, Nubie, Palestine, Syrie 1852

Critique d’œuvres d’arT

Les Salons de 1857, 1859, 1861

RomanS

Les Forces perdues 1867, réédition 2011 Paris, Euredit, préface de Thierry Poyet
L’Homme au bracelet d’or 1862
Une histoire d’amour 1889

Études littéraires

Théophile Gautier 1890

Hommage

Le Voyage, poème qui clôt Les Fleurs du mal, est dédié à Maxime du Camp. Bien que Baudelaire et Du Camp fussent proches, la dédicace était peut-être ironique. La foi positiviste dans le progrès, dont témoignent les Chants Modernes de Du Camp, est raillée tout au long du poème. Le poète demanda d'ailleurs au progressiste l'autorisation d'associer son nom au poème : « Si le ton systématiquement byronien de ce petit poème vous déplaisait, si, par exemple, vous étiez choqué de mes plaisanteries contre le progrès, ou bien de ce que le Voyageur avoue n'avoir vu que la banalité, ou enfin de n'importe quoi, dites-le-moi sans vous gêner.»


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#219 Théodore Agrippa d'Aubigné
Loriane Posté le : 07/02/2015 14:48
Le 8 février 1552 naît Théodore Agrippa d’Aubigné

au château de Saint-Maury près de Pons, en Saintonge, mort le 9 mai 1630 dans la république de Genève, homme de guerre, écrivain controversiste et poète baroque français, du mouvement baroque, protestantisme, ses Œuvres principales sont "Les Tragiques" poèmes héroïques racontant les persécutions subies par les protestants.
Les Armes de la famille d'Aubigné :
de gueules au lion d'hermine, armé, lampassé et couronné d'or, Source : Euraldic
Calviniste intransigeant, il soutient sans relâche le parti protestant, se mettant souvent en froid avec le roi Henri de Navarre, dont il fut l'un des principaux compagnons d'armes. Après la conversion de celui-ci, il rédigea des textes qui avaient pour but d'accuser Henri IV de trahison envers l'Église. Chef de guerre, il s'illustra par ses exploits militaires et son caractère emporté et belliqueux. Ennemi acharné de l'Église romaine, ennemi de la cour de France et souvent indisposé à l'égard des princes, il s'illustra par sa violence, ses excès et ses provocations verbales.
À sa grande horreur, son fils Constant d'Aubigné abjure le protestantisme en 1618 pour mener une vie de débauche dans le château paternel de Maillezais, avant de tuer sa première femme, qu'il surprend en flagrant délit d’adultère dans une auberge, puis de se remarier en prison à Jeanne de Cardilhac qui donnera naissance à Françoise d'Aubigné, qui devient Marquise de Maintenon et maîtresse puis épouse du roi de France Louis XIV.


En bref

Après la mort de Henri II, la poésie française s'enrichit d'accents nouveaux. On assiste au développement de la poésie sérieuse, avec Du Bartas, Le Triomphe de la foi, 1574, La Semaine ou Création du monde, 1578, et de la poésie politique et polémique. Les poètes interviennent dans le conflit qui divise la France à l'époque des guerres de Religion, comme l'attestent les poèmes patriotiques de Du Bellay, la Remontrance au peuple français, 1559 de Des Autels et enfin les Discours des misères de ce temps, 1562-1563 de Ronsard. Du côté protestant, d'Aubigné commente avec véhémence les événements contemporains.
Fils de Jean d'Aubigné et de Catherine de l'Estang, Agrippa d'Aubigné naquit à l'hôtel Saint-Maury, près de Pons, en Saintonge, le 8 février 1552. Avec un grain de vanité, il fait à ses enfants, Sa vie à ses enfants le récit édifiant de sa vie. Son père ne négligea rien pour le former aux études sérieuses, tout jeune, Agrippa lisait le grec, le latin et l'hébreu, et pour l'élever en sincère huguenot. Passant par Amboise en 1560, au lendemain de la Conjuration, il lui montra les têtes de ses compagnons attachées à une potence, et lui fit prêter serment de les venger. Après la mort de son père, Agrippa achève ses études à Genève, mais, de retour en Saintonge, il ne tarde pas à rejoindre ses compagnons d'armes. Il est à Jarnac en 1569, aux combats de la Roche-Abeille et de Pons ; partout il se distingue par sa bravoure, et il n'échappe que par hasard à la Saint-Barthélemy, 1572. C'est l'époque où il tombe amoureux de Diane Salviati, qu'il célèbre dans le Printemps ; mais le projet de mariage est rompu à cause de la différence de religion. Écuyer du roi de Navarre en 1573, il partage avec lui tous les hasards des guerres et prépare son évasion de la Cour, 1576. Ce fut une amitié fidèle, qui n'alla pas sans quelque brouille, mais que l'abjuration ne parvint pas à effacer. Après le périlleux combat de Casteljaloux, 1577, où il fut blessé, il commence à écrire Les Tragiques. En 1583, il épouse Suzanne de Lezay. On le retrouve à Coutras, 1587, à Ivry, 1590. Après la mort de sa femme, en 1596, il s'éloigne de la Cour, complète Les Tragiques et commence l'Histoire universelle. Il a la douleur de voir son fils Constant, le père de Mme de Maintenon se convertir puis mener une vie de débauche. En 1620, il s'exile à Genève pour y prendre le chevet de la vieillesse et de la mort. Il meurt le 9 mai 1630, au terme d'une existence de fierté et de droiture.
Héros exalté et généreux, absorbé par l'action, et dont le courage affecte volontiers les formes chevaleresques, Agrippa d'Aubigné aime les coups d'épée et revendique la gloire du négociateur. Malgré sa fierté ombrageuse et sa vanité, il se recommande avant tout par sa sincérité de croyant qui n'a jamais discuté sa foi. Il est nourri de la Bible, fidèle à la Cause, plein de compassion pour les humbles et impitoyable contre les tyrans. Après des années de lutte, il peut se tourner vers l'éternité de paix profonde qui l'attend.
Tour à tour poète, pamphlétaire et historien, il a produit une œuvre diverse, mais cohérente.

Sa vie

Théodore Agrippa est né a Saint Maury près de Pons, en Saintonge. Il est le fils du juge Jean d’Aubigné, d'origine roturière4, et Catherine de L’Estang, de petite noblesse, qui meurt en lui donnant la vie. On l’appelle ainsi Agrippa aegre partus, parce qu’il a été enfanté avec peine. Agrippa est baptisé dans la religion catholique mais est élevé dans la religion calviniste. Son père Jean, converti au calvinisme devient un activiste du soulèvement protestant. Il participe aux opérations de la conjuration d'Amboise sous les ordres de Tanneguy du Bouchet, dit Saint-Cyr, chef militaire protestant du Poitou5. En avril 1560, alors qu'il passe par Amboise avec son fils, il lui aurait fait jurer de venger la mort de ses compagnons.
Sous la férule de précepteurs calvinistes, Agrippa apprend entre autres disciplines, le latin, le grec et l'hébreu. En avril 1562, pour ses études, Jean installe Agrippa à Paris chez Mathieu Béroalde. Deux mois plus tard, la guerre est déclenchée et un arrêt ordonne l'expulsion des protestants ; Agrippa quitte la ville avec son professeur. Sur le chemin, ils sont arrêtés et emprisonnés par des pillards catholiques, mais parviennent à s’échapper grâce à un complice, et gagnent Montargis, où les accueille Renée de France. Ils séjournent ensuite à Orléans, où Agrippa est atteint de la peste mais en guérit. Il se rompt aux armes, et assiste au siège d’Orléans au cours duquel meurt son père.
Envoyé à Genève en 1565, Agrippa y poursuit ses études sous la protection de Théodore de Bèze. Un an plus tard, il est contraint de fuir la ville du fait de son implication dans une histoire de mœurs. Lorsqu'éclate la deuxième guerre de religion 1567, il s’engage sans hésiter dans l’armée protestante.
Il était, à la suite d’un duel, absent de Paris durant les massacres de 1572 mais en garda une rancune tenace contre la monarchie. Les Tragiques conservent la trace des visions d’horreur dont il fut le témoin.

Au service du roi de Navarre

À la cour des Valois

Quelque temps après la Saint-Barthélemy, Aubigné retourne à la cour de France où il se lie avec le roi de Navarre futur Henri IV et devient son écuyer août 1573. Il a vingt-et-un ans. À cette époque, Henri de Navarre est assigné à résidence à la cour et placé sous une étroite surveillance. On ignore si, comme lui, Aubigné a feint d'être catholique. Toujours est-il qu'il participe à la tentative d'évasion de son maître lors des évènements de la conjuration des Malcontents. L'affaire échoue, et Henri de Navarre doit donner des gages de sa soumission en écartant ses serviteurs les plus suspects et en envoyant ses hommes combattre les troupes protestantes. Aubigné se retrouve alors enrôlé à plusieurs reprises dans l'armée catholique. Guidon du seigneur de Fervaques, il combat les protestants en Normandie puis à la bataille de Dormans où il se lie d'amitié avec le duc de Guise.
À la cour où il côtoie les plus grands, Aubigné fait figure de courtisan accompli. Apprécié pour son intelligence et son esprit mordant, il aurait fait partie de l'Académie de musique et de poésie qui siège au Palais du Louvre. Amateur des mascarades et des joutes, il invente des divertissements de cour et se fait connaître comme expert en magie. C'est aussi un querelleur courant sans cesse après les duels. Il assista à l’exécution du Comte de Montgommery sur la place de Grève, le 26 juin 1574, qui le salua, lui et Fervaques avant de mourir. Il fait partie des compagnons du roi de Navarre lorsque ce dernier fuit la cour le 4 février 1576.

A la cour de Nérac : entre faveur et disgrâce

Cette amitié entre le roi et son écuyer dura plusieurs années, le roi lui confiant de nombreuses missions. Mais de caractère emporté et intransigeant, Aubigné se brouilla à de nombreuses reprises avec son maître. Aubigné lui reprochait de ne pas être suffisamment attaché à la cause protestante, l'accusant de trop favoriser les catholiques de son entourage. Henri de Navarre était porté à la conciliation et ménageait la cour de France, alors qu'Aubigné appelait à la poursuite de la lutte. Après la signature de la paix de Poitiers qu'il condamne, il quitte une première fois son maître, 1577. Grièvement blessé à Casteljaloux, il se retire pendant deux ans sur ses terres aux Landes-Guinemer dans le Blaisois où il se met à écrire. Selon la légende qu’il a lui-même forgée bien plus tard, c’est à Casteljaloux que, alors qu'il était entre la vie et la mort, lui seraient venues les premières clauses de son grand poème épique sur les guerres de religion, Les Tragiques.
Aubigné retourne à la cour de Navarre en 1579. En 1582, il se met au plus mal avec la reine Marguerite de Valois qui demande à son époux de l'éloigner. Ses relations avec Diane d'Andoins, maîtresse du roi ne sont pas meilleures11. En 1588, il déconseille au roi de se séparer de son épouse légitime pour épouser sa maîtresse. Entretemps, Aubigné a épousé Suzanne de Lezay 1583.

Les dernières désillusions

Pendant les guerres de la Ligue, Aubigné s'illustre de nouveau au combat. Il participe à la bataille de Coutras que remporte Henri sur l'armée royale en 1587. Henri de Navarre le nomme maréchal de camp en 1586, puis gouverneur d’Oléron et de Maillezais, que d'Aubigné avait conquis par les armes en 1589, puis vice-amiral de Guyenne et de Bretagne.
Après l’assassinat du duc de Guise en 1588, Aubigné reprit part aux combats politiques et militaires de son temps. Il est alors le représentant de la tendance dure du parti protestant les Fermes et voit d’un mauvais œil les concessions faites par le chef de son parti pour accéder au trône. Comme de nombreux protestants, d’Aubigné ressent l’abjuration d’Henri IV, en 1593, comme une trahison. Les divergences politiques et religieuses finissent par le séparer du roi. Aubigné est peu à peu écarté de la cour, dont il se retira définitivement après l’assassinat d’Henri IV en 1610. Aubigné et Henri IV ne se doutaient pas que leurs petits-enfants respectifs, Louis XIV et Françoise d’Aubigné, s'uniraient en 1683.

Retraite et exil

En 1611, à l’Assemblée des églises protestantes de Saumur, D’Aubigné, élu pour le Poitou, ridiculise le parti des Prudents dans Le Caducée ou l’Ange de la paix.
Il semblerait que c’est à cette période qu’il se tourna vers l’écriture de ses œuvres, et en particulier des Tragiques. Mais ce n’est pour lui qu’un autre moyen de prendre les armes, en multipliant les pamphlets anti-catholiques et les attaques polémiques contre les protestants convertis.
De son premier mariage, il a un fils, Constant, père de Françoise d’Aubigné, la future marquise de Maintenon, et deux filles, Louise Arthémise de Villette 1584-1663 et Marie de Caumont d’Adde 1586-1624. Son fils Constant lui causa les plus grandes déceptions de sa vie en se convertissant au catholicisme puis en menant une vie scandaleuse de débauche et de malversation ; il le déshérita, plongeant du même coup sa belle-fille et ses petits-enfants dans la misère. Après la mort de son épouse en 1596, d'Aubigné eut un fils naturel avec Jacqueline Chayer, Nathan d'Aubigné, ancêtre de la famille suisse des Merle d'Aubigné.
Refusant tout compromis, d’Aubigné est contraint de quitter la France en 1620, après la condamnation de son Histoire universelle depuis 1550 jusqu’en 1601 par le Parlement. D'Aubigné se retire alors à Genève, où est publié l’essentiel de ses œuvres. Il y épouse en 1623 Renée Burlamacchi, petite-fille du Lucquois Francesco Burlamacchi, et y meurt le 9 mai 1630.

Généalogie

* Agrippa d’Aubigné (1552-1630)
x Suzanne de Lezay
│
│─> Louise-Artémise (1584-1663)
│ x Benjamin Le Vallois de Vilette
│
│─> Marie (1586-1624)
│ x Josué de Caumont d'Adde
│
├─>Constant d'Aubigné (1585-1647)
│ x Anne Marchant (+1619)
│ x Jeanne Isabelle de Cardillac (1611-1650)
│ │
│ ├─> Constant d'Aubigné (1628-1647)
│ ├─> Charles d’Aubigné (1634-1703)
│ │ x Geneviève Philippe Piètre (+1728)
│ │ │
│ │ ├─> Françoise d’Aubigné (1678-1739)
│ │ x Adrien Maurice de Noailles
│ │
│ ├─> Françoise d'Aubigné (1635-1719), Marquise de Maintenon
│ │ x Paul Scarron
│ │ x Louis XIV
│ │
│ ├─> Anne d’Aubigné (1630)[réf. nécessaire]
│ x Olivier de Brioul
│ │
│ ├─> …
│
x Jacqueline Chayer (1559-1636)
│
├─>Nathan d'Aubigné (1601-69) → 14 enfants dont :
x Claire de Pelissari (1600-31)
x Anne Crespin (1602-51)
│
├─> Samuel d’Aubigné (1638-1710)
│ x Elisabeth Lesage (1638-1732)
│ │
│ ├─> Georges-Louis d’Aubigné (1680-1732)
│ │ x Lucrèce Dufour (1696-1778)
│ │ ├─> Charlotte (1719-86)
│ │ │ x Georges-Daniel Argand (1711-79)
│ │ │
│ │ ├─> Élisabeth d’Aubigné (1720-80)
│ │ │ x François Merle (1703-61), ancêtres de la famille Merle d'Aubigné
│ │ │
│ │ ├─> Lucrèce (1729-93)
│ │ x Pierre Eynouf
│ ├─> 5 autres enfants
│
x Elisabeth Hubertary (1604-84)
L’œuvre littéraire

Méconnu de ses contemporains, il fut redécouvert à l’époque romantique, notamment par Victor Hugo, puis par le critique Sainte-Beuve. En 1976 dans une chanson polémique et anticolonialiste, Un air de liberté, Jean Ferrat le mentionne : "La terre n’aime pas le sang ni les ordures, Agrippa d'Aubigné le disait en son temps". Son œuvre la plus connue est son recueil Les Tragiques.

Mais d'Aubigné n’est pas l’auteur d’une seule œuvre. Le printemps est un recueil de sonnets, de stances et d’odes qui reprend la lyrique pétrarquiste sur les tons opposés de la rage du désespoir et d'une fantaisie plus légère. Le premier recueil de sonnets du Printemps, L'hécatombe à Diane, est dédié à Diane Salviati, jeune fille qu'il aimait et qu'il n'a pas pu épouser à cause de la différence de religion. À la fin de sa vie, les Petites oeuvres meslees associent Méditations sur les Psaumes et poésies religieuses.
L’essentiel de son œuvre est polémique. D'Aubigné, engagé dans les combats de son époque, cherche ainsi à discréditer les vanités de la cour royale et la religion catholique dans la Confession du Sieur de Sacy et Les aventures du baron de Faeneste . Son Histoire Universelle est aussi, malgré son titre, une œuvre engagée, destinée à justifier l'autonomie politique et militaire des protestants français. Il publie aussi de nombreux opuscules politiques.
À la fin de son existence, il écrit ses mémoires, Sa vie à ses enfants, Constant, Marie et Louise, pour leur montrer sa gloire et ses fautes et leur être par là-même un exemple profitable.

L'Å’uvre

L'œuvre poétique

Le Printemps
Pour célébrer Diane Salviati, la nièce de la Cassandre de Ronsard, dont il est un admirateur fervent, d'Aubigné reste soumis à la tradition pétrarquiste, à la manière de Du Bellay dans l'Olive (1549) et de Ronsard dans le premier livre des Amours. Il chante la beauté physique et morale de Diane, condamne ses rigueurs et plante en son honneur deux arbres dans le parc de Talcy. Il y a dans ce recueil une telle violence dans la plainte, une telle hantise du sang et de la mort, qu'il est difficile d'oublier, en lisant l'Hécatombe à Diane ou les Stances, le climat de guerre civile qui les baigne. Mieux, quand il invective et qu'il maudit, quand son esprit est transporté en extase, d'Aubigné écrit comme une préface des Tragiques, œuvre plus grave, où il ne veut « chanter que de Dieu ».

Les Tragiques

Commencés en 1577, achevés sous leur forme première en 1589, ils paraissent en 1616, au lendemain de la paix de Loudun, dans un siècle de goût et d'autorité qui a oublié les temps héroïques de la geste protestant. Ce poème de dix mille vers n'entre dans aucun genre défini : il contient de l'histoire, de l'épopée, de la satire, du lyrisme chrétien. Le poète retrouve l'indignation de Juvénal contre les fauteurs de troubles, et l'assurance du prophète biblique dans le triomphe final de l'Église réformée. C'est sans doute l'élément dramatique (mis en évidence par le titre) qui donne unité et force à l'ensemble des sept chants. Misères évoque la France déchirée et les affreux spectacles de la guerre ; Princes invective Catherine de Médicis, Charles IX et Henri III ; Chambre dorée condamne les juges sanguinaires, et décrit sous forme allégoriques les vices du Palais de justice de Paris. Plus narratifs, Feux et Fers relatent l'un l'époque des bûchers, en exaltant la constance des martyrs, l'autre les principales scènes des guerres de religion, éclairées par l'aube sanglante de la Saint-Barthélemy, « la tragédie qui efface le reste ». Vengeances et Jugement forment le dénouement du drame : le premier énumère les châtiments exercés par Dieu contre les persécuteurs de l'Église depuis Caïn ; le second nous transporte au moment du Jugement dernier, et nous fait assister à la vision apocalyptique de la résurrection des corps, à l'inéluctable séparation des élus et des réprouvés. On regrette que cette belle ordonnance soit ternie par la rhétorique et par les surcharges, et qu'un poète d'une imagination visionnaire et d'une telle force satirique ne sache pas mieux discipliner son inspiration tumultueuse.

Il n'y a pas grand-chose à glaner dans le monotone poème didactique en quinze chants, La Création, inspirée par La Semaine de Du Bartas. Tout au plus peut-on admirer quelques strophes mélancoliques et résignées de son dernier recueil, L'Hiver ; d'Aubigné est donc avant tout le poète des Tragiques.

L'Å“uvre en prose

Le pamphlétaire

La passion partisane qui caractérise certains chants des Tragiques apparaît aussi dans l'œuvre en prose. Le Caducée, ou l'Ange de la paix est une attaque contre les « prudents, ses coreligionnaires trop accommodants, sous la régence de Marie de Médicis, avec le pouvoir royal. Il met en valeur la politique noble et intransigeante des fermes. Le traité des Devoirs des rois et des sujets date de l'époque de la guerre de Louis XIII contre les protestants, et oppose le bon roi au tyran. La Confession catholique du sieur de Sancy, qui ne fut publiée qu'en 1660, est suscitée par une rancune personnelle d'Agrippa d'Aubigné contre Du Perron. L'ouvrage parodie les abjurations des protestants qui se sont convertis au catholicisme pour obtenir le profit et l'honneur. C'est déjà, pour souligner la dangereuse influence de la politique sur la religion, le ton des Provinciales. Plus savoureuses sont les Aventures du baron de Faeneste, dont deux livres parurent en 1617, le troisième en 1619, et le quatrième en 1630 à Genève, où il fit scandale. Retrouvant la verve de Rabelais, maître François, auteur excellent, d'Aubigné imagine les dialogues d'un gentilhomme poitevin, Enay, qui représente l'auteur lui-même, et d'un aventurier gascon ignorant et poltron, Faeneste, digne héritier du Miles gloriosus de Plaute : être et paraître, deux caractères qui s'opposent dans de véritables scènes de comédie. Par le souci de l'observation exacte, par les étonnantes caricatures des courtisans, par les tableaux de mœurs de la société de son temps et par les anecdotes rustiques du Poitou, d'Aubigné est un authentique précurseur du roman réaliste et du genre burlesque.

L'historien

Dans l'Histoire universelle, son œuvre maîtresse qu'il dédie à la postérité, d'Aubigné s'astreint à l'impartialité que l'on attend d'un ouvrage historique et d'une apologie lucide du protestantisme. Oubliant la fureur de ses jeunes années, il déclare maintenant : Quand la vérité met le poignard à la gorge, il faut baiser sa main blanche, quoique tachée de notre sang.Le livre mentionne les luttes soutenues de 1553 à 1602 par les protestants et les replace dans l'histoire européenne. Les deux premiers tomes étaient achevés en 1619. Traînant désormais le pesant chariot de l'histoire, d'Aubigné s'efforce de ne dire que la vérité, fait un bel éloge d'Henri IV et se montre moins injuste que jadis pour Catherine de Médicis, Charles IX ou le cardinal de Lorraine. Dans ce livre de bonne foi, écrit avec une gravité sereine, les souvenirs personnels et les minutieux récits de batailles sont les pages les plus remarquables ; elles permettent de nuancer ou de préciser certains récits trop partiaux des Tragiques.

Son influence

On ne peut pas toujours, comme le fait Mathurin Régnier, laisser aller la plume où la verve l'emporte. Agrippa d'Aubigné fut méconnu par les classiques, parce qu'il s'était trop affranchi des scrupules du goût. Sainte-Beuve le réhabilite et voit dans son œuvre l'image abrégée de la Renaissance. Sa vie de droiture et de générosité, sa loyauté nous charment, même s'il s'éloigne de nous par son fanatisme. Homme racine et souche de poètes, plutôt que grand poète affirme Barbey d'Aurevilly. Son œuvre poétique est dominée par les Tragiques, dont l'autorité et le prestige sauront retenir le Victor Hugo des Châtiments. Il fait penser à Corneille par son goût des vers sentencieux ; il est tout proche de Claudel par son assurance à découvrir les desseins de la Providence. Son œuvre en prose et sa correspondance attestent la variété de ses dons, mais aussi sa fidélité constante à la cause protestante. S'il est un représentant incontesté du baroque littéraire, il nous propose partout une noble conception de la dignité humaine. La résistance absolue au réalisme sordide, le refus de la prudence intellectuelle, la sauvegarde de l'idéal, voilà l'essentiel de l'humanisme que nous transmet ce champion de la Réforme, ce témoin de l'époque des guerres civiles, ce compagnon des héros qui ont lutté sur un terrain marqué de leur sanG.J Bailbe.

Histoire Universelle, 1616

Hécatombe à Diane, recueil de sonnets Textes en ligne
Les Tragiques, Éd. Frank Lestringant, Paris, Gallimard, 1995
Les Tragiques 1616, retravaillé sur manuscrit jusqu'en 1630, éd. Jean-Raymond Fanlo, Paris, Champions Classiques, 2006.
Histoire universelle 11 vol., 1616-1630, Éd. André Thierry, Genève, Droz, 1981-2000
Les Aventures du baron de Faeneste 1630, Éd. Prosper Mérimée, Nendeln, Liechtenstein, Kraus Reprint, 1972
Petites œuvres meslées du sieur d’Aubigné 1630 Genève, Aubert, 1968
Mémoires de Théodore Agrippa d’Aubigné publiés pour la première fois d’après le ms. de la bibliothèque du Louvre par M. Ludovic Lalanne, suivis de fragments de l’histoire universelle de d’Aubigné et de pièces inédites, Éd. Ludovic Lalanne, Paris, Charpentier, 1854
Sa Vie à ses enfants, Paris, Nizet, 1986 il s’agit d’une édition plus récente du texte publié par Lalanne sous le titre de Mémoires
Le Printemps : l’hécatombe à Diane et Les stances, 1873-1892, éd. H. Weber, Paris, Presses universitaires de France, 1960
Œuvres, Henri Weber, Jacques Bailbé, Paris, Gallimard, 1969
La Responce de Michau l’aveugle, suivie de La replique de Michau l’aveugle : deux pamphlets théologiques anonymes17 publiés avec des pièces catholiques de la controverse, éd. Jean-Raymond Fanlo, Paris, Honoré Champion, 1996
Petites oeuves meslees, Éd. Véronique Ferrer, Paris, Champion, 2004
Écrits politiques, éd. Jean-Raymond Fanlo, Paris, Champion, 2007

Distinction

Dans le 4e arrondissement de Paris, une rue Agrippa-d’Aubigné située entre le boulevard Morland et le quai Henri-IV lui est dédiée.
À Genève, une promenade, située derrière la cathédrale à l’emplacement de l’ancien château épiscopal, porte aussi son nom. 46° 12′ 06″ N 6° 08′ 56″ E Terrasse Agrippa-d’Aubigné, 1204 Genève, Suisse.
À La Rochelle, dans le quartier de La Genette, une rue Agrippa-d’Aubigné.


[img width=600]http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/f/f8/Agrippa_d'Aubign%C3%A9.jpg/220px-Agrippa_d'Aubign%C3%A9.jpg[/img]

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#220 Baldassare Castiglione
Loriane Posté le : 07/02/2015 14:46
Le 8 février 1529 à 50 ans à Tolède meurt Baldassare Castiglione

comte de Novellata né le 6 décembre 1478 à Casatico, dans le marquisat de Mantoue, écrivain et diplomate italien de la Renaissance. Il reste connu pour avoir écrit Le Livre du courtisan, manuel de savoir-vivre qui connut un succès important à sa parution.
Si détaché qu'il semble de la dure histoire italienne du temps où il fut écrit, Le Parfait Courtisan, Il Cortegiano de Castiglione est le fruit d'une expérience à la fois guidée, compensée et transcendée par un idéal éthique foncièrement tributaire de la culture humaniste. Il a constitué, pendant un siècle et plus, en Europe occidentale, la source et souvent le modèle d'un art de cour équilibré entre le devoir politique et l'animation culturelle, ayant pour double objet de soutenir la gloire du souverain et la dignité du courtisan. De 1537 à 1690 ont paru six traductions françaises.

En bref

Fils d'un homme de guerre et d'une parente des Gonzague, Baldassarre Castiglione naquit à Mantoue. C'est à Milan, quand s'y exerçait le mécénat de Ludovic le More, qu'il fit ses études. Entré en 1499 au service de François Gonzague, à Mantoue, il passe, en 1503, à la cour du beau-frère de François, Guidobaldo da Montefeltro, seigneur d'Urbino, et, abstraction faite de diverses campagnes et missions, y reste jusqu'en 1513, année où il part pour Rome en qualité d'ambassadeur du duché d'Urbino auprès du pape. Le duché passant, en 1516, aux mains d'un Médicis, Castiglione retourne au service des Gonzague, devient en 1520 leur ambassadeur à Rome, avant d'être nommé, en 1524, protonotaire apostolique par le pape Clément VII et envoyé, l'année suivante, en Espagne en qualité de nonce auprès de Charles Quint. Ce ne fut pas la mission la plus heureuse de sa vie. Le terrible sac de Rome de 1527, commis par des mercenaires à la solde de Charles Quint, advint au temps de sa nonciature : Clément VII lui reprocha violemment de n'avoir su ni le prévoir ni le prévenir. Castiglione présenta sa défense avec une dignité que se plaisent à souligner tous ses biographes. Apprenant, sur ces entrefaites, qu'un manuscrit du Cortegiano, confié à un de ses amis, commençait à être reproduit sans son assentiment, il prit le parti de le publier avant d'en avoir achevé la révision. Le livre fut imprimé à Venise en 1528. Cette première édition devança de peu la mort de Castiglione, survenue à Tolèd
Bien que les entretiens qui forment l'essentiel du livre soient fictivement situés entre septembre 1506 et février 1507, il semble que Castiglione n'ait pas entrepris de composer son ouvrage avant 1513, au terme de son séjour à la cour d'Urbino, où il s'était lié d'amitié avec Pietro Bembo, avec le futur cardinal Bibbiena, favori de l'exilé Jean de Médicis qui allait bientôt devenir le pape Léon X, et avec bien d'autres qui se retrouvent dans les rôles du Cortegiano.
Des invasions, des batailles, des renversements d'alliances qui se succèdent en Italie, de 1494 à 1529, et qui furent loin d'être sans effet sur la vie et la carrière du diplomate Castiglione, on ne perçoit dans le Cortegiano que de brefs et lointains échos. Bien qu'il y soit souvent question de la formation et des devoirs des princes, l'ouvrage peut passer pour apolitique, si l'attention politique véritable est celle qu'un auteur, témoin ou juge, donne aux mouvements et aux crises de la société où il vit. À la différence de son contemporain Machiavel, Castiglione ne s'interroge pas sur les chances qu'ont les dynasties ou les États de second ordre de subsister ou de s'agrandir. Son propos n'a pas trait à leur débilité relative en face des grands royaumes dévorants, mais au style de vie prestigieux que tout État peut tendre à édifier au niveau de la cour, comme si la fin du pouvoir régnant était non la puissance mais une civilité supérieure. Plus qu'un centre d'où s'exerce la force politique, la cour est dans le Cortegiano le lieu où aboutit et s'affine la culture, où l'apparat se rend inséparable du savoir, l'agrément de la dignité, où s'élabore, en un mot, un art de vivre exemplaire, de portée universelle.
On ne peut rêver assemblage plus révélateur d'une vision d'époque, de l'importance des qualités et des grades. Au centre, deux animatrices représentant la dynastie régnante : l'épouse du souverain, Elisabeth, et la dame de palais, Emilia Pio, apparentée au souverain par alliance. Près d'elles, des hommes réputés et hautement protégés auxquels sourit un bel avenir : trois futurs cardinaux, Bembo, Bibbiena, Federico Fregoso ; le fils de Laurent le Magnifique, Julien de Médicis, qui sera duc de Nemours ; Ottaviano Fregoso, qui sera doge de Gênes ; le comte Ludovic de Canossa, qui sera ambassadeur de Léon X en Angleterre et en France. À ceux-ci s'ajoutent des gentilshommes qui donnent de grands espoirs, mais disparaîtront prématurément. Moins chargés de dignités ou de promesses, d'autres personnages sont plus strictement fonctionnels. Ils font songer aux experts qui composent de nos jours l'escorte des diplomates. Spécialistes à l'autorité restreinte et subordonnée, ils sont là pour garantir l'information de leurs supérieurs et répondre, le cas échéant, aux questions que ceux-ci leur posent. La distribution obéit donc à une hiérarchie des rôles où les simples commis de cour restent à bonne distance des dignitaires, de ceux qui sont destinés à le devenir, et des seigneurs.

Sa vie

Baldassare Castiglione est né à Casatico, province de Mantoue, en Italie, dans une ancienne famille lombarde ayant émigré à Mantoue à l'époque du marquis Ludovic Gonzague, un parent de Luigia Gonzague, la mère de Castiglione. À Casatico, son lieu natal, il y a encore la Corte Castiglioni, le palais de la famille Castiglione, symbole du marquisat de la famille sur ces territoires, et résidence où Baldassarre Castiglione est né et à vécu ses premières années.

Il fait des études classiques à Venise et à Milan, où il est l'élève de Merula et de Calcondila. Il fait partie de la cour de Ludovic le More et à la mort de celui-ci, il rejoint la cour des Gonzague à Mantoue. En 1495, son père meurt et Baldassare lui succède dans ses fonctions de chef de famille, il accompagne ainsi le marquis lors de l'arrivée de Louis XII à Milan. Pour le service de Gonzague, il part à Rome rencontrer Guidobaldo Ier de Montefeltro, duc d'Urbino, dont il rejoint la cour en 1504.
Urbino est alors la cour la plus brillante et la plus raffinée d'Italie, un carrefour culturel dirigé par la duchesse Elisabetta Gonzague et sa belle-sœur Maria Emilia Pia avec parmi les invités permanents Pietro Bembo ou Michel-Ange, ainsi que de nombreux hommes de lettres. Les invités ont pour habitude d'organiser à la cour des compétitions intellectuelles produisant ainsi une riche activité littéraire et culturelle.
En 1506, Castiglione écrit et interprète avec Cosimo Gonzague, son églogue Tirsi dans lequel de façon voilée, il dépeint la vie de la cour d'Urbino. L'œuvre contient des résonances de poésie ancienne et contemporaine, avec des rappels à Virgile, Poliziano ou Sannazzaro. Il fut ambassadeur du duc d'Urbino auprès de Henri VIII d'Angleterre, roi d'Angleterre.
François Marie Ier della Rovere succède à Guidobaldo à la mort de ce dernier, et Castiglione demeure à sa cour, et, avec lui, prend part à l'expédition contre Venise menée par le pape Jules II, ce qui lui vaut d'obtenir le comté de Novellata, près de Pesaro. Quand le pape Léon X est élu, Castiglione est envoyé à Rome comme ambassadeur d'Urbino. Il y devient l'ami d'artistes et d'écrivains, notamment de Raphaël, qui a peint son portrait, conservé aujourd'hui au musée du Louvre.
En 1516, Castiglione retourne à Mantoue, où il se marie avec Ippolita Torelli, descendante d'une famille noble. Il lui avait écrit deux lettres passionnées, lui exprimant ses sentiments profonds, mais celle-ci devait mourir quatre ans plus tard, alors que son époux se trouvait à Rome, en qualité d'ambassadeur du duc de Mantoue. En 1521, le pape Léon X lui accorda la tonsure et Castiglione commença une carrière ecclésiastique. C'est à cette époque qu'il met en relation le peintre et architecte Giulio Romano avec le duc de Mantoue, celui-ci cherchant embellir sa ville et à se faire construire un palais.
En 1524, le pape Clément VII l'envoie à Madrid en qualité de nonce apostolique (ambassadeur du Saint-Siège), il suit l'empereur Charles V à Tolède, Séville et Grenade. En mai 1527 les impériaux envahissent et mettent Rome à sac ; le pape reprochera à Castiglione de ne pas l'avoir prévenu des intentions de Charles Quint. Castiglione enverra une lettre au pape, datée du 10 décembre 1527, soulignant que le saccage était motivé par l'ambiguïté et les contradictions de la politique du pape.
Contre toute attente, il reçut des excuses du pape, et les honneurs de l'empereur. De nos jours, Baldassare Castiglione n'est plus perçu comme responsable du sac de Rome, car il semble qu'il ait joué honnêtement son rôle en Espagne. Ainsi, le bruit que Castiglione soit décédé suite aux remords qu'il aurait pu éprouver est infondée, il est mort des suites d'une épidémie de peste.

En 1528, l'année précédant sa mort, son livre le plus célèbre, Le Livre du courtisan, est publié à Venise. Il décrit la cour d'Urbino, au temps du duc Guidobaldo Ier de Montefeltro, et son courtisan idéal, au travers de dialogues philosophiques et culturels qui lui ont été rapportés alors qu'il se trouvait en Angleterre. Son livre est traduit en français dès 1537, puis en espagnol, en anglais, en allemand et en latin. Ce livre deviendra vite un manuel de savoir-vivre dans les cours européennes.
Cette œuvre prône la courtoisie et les valeurs sociales que l'homme civilisé se doit d'avoir. Il s'inspire alors du célèbre proverbe de Platon : " Omnia vincit politus "qui renvoyait initialement à l'utilité de l'éducation.
Ses œuvres mineures sont moins connues mais intéressantes. Les sonnets d'amour et les quatre Amorose canzoni content son amour platonique pour Elisabetta Gonzaga dans un style qui rappelle Pétrarque. Les pré-romantiques puiseront leur inspiration dans son sonnet Superbi colli e voi, sacre ruine. Ses poésies latines sont remarquables, comme l'élégie De morte Raphællis pictoris à la mort de Raphaël, et une autre, où il imagine sa propre mort. Son intéressante correspondance dépeint non seulement l'homme et sa personnalité, mais aussi les gens célèbres qu'il a rencontrés et fréquentés, lors de son activité diplomatique.

Une vision aristocratique et humaniste

Cette hiérarchie est assurément le signe d'une vision aristocratique. Mais Castiglione, qui fut à Milan l'élève des humanistes, en vient à équilibrer sa considération entre un Bibbiena, plébéien de cour savant et disert, et le noble lettré vénitien Pietro Bembo. Plus qu'à leur naissance, il mesure le prix des hommes à leur culture, au rôle qu'ils tiennent auprès des grands, au succès qu'on peut leur prédire. Par là est annoncé le courtisan bourgeois, apte autant que le noble à devenir l'animateur et le sage du milieu privilégié auquel l'attachent ses dons et ses mérites.
Sous son triple visage de féal, de juge en toute matière et d'instructeur, le bon courtisan a pour premier devoir d'informer loyalement son prince, d'abattre les écrans de l'adulation ou des fausses prévenances qui dissimulent à ses regards le monde qui lui appartient, sans mettre jamais en cause son pouvoir absolu. Aucun participant du Cortegiano ne conteste la maxime énoncée par Ottaviano Fregoso : le prince n'est responsable que devant Dieu ; tout ce que les hommes peuvent faire est de tâcher à le rendre meilleur.

Pour informer son prince, l'homme de cour devra se mettre au fait de tout ce que requièrent l'intérêt politique de la dynastie et son prestige, dont une large part tient à l'éclat de sa cour. C'est sous cette rubrique, qui commande tout un programme de culture, que s'inscrit ce que le Cortegiano offre de plus riche et de plus neuf.
Si la dignité des armes n'est pas réfutée, il en est fait peu de cas, lorsqu'elle prétend tenir lieu de tout. Dès le premier livre de l'ouvrage, l'axe de la balance tend à se déplacer des aptitudes guerrières vers les qualités de l'esprit. Le deuxième livre s'ouvre bien par des considérations sur les batailles, les tournois, les exercices corporels, mais on passe bientôt à la musique, aux entretiens de société, à la modestie, avant que ne commence un long propos sur l'art de divertir par de bons mots ou de bons tours. Après une discussion animée entre féministes et antiféministes, le troisième livre s'offre comme un exemple de conversation brillante et raffinée sur l'amour. Le dernier livre, enfin, traite surtout de l'utilité du courtisan pour le prince dans l'espèce de préceptorat qu'il se sera rendu digne d'exercer par son savoir et de faire accepter par son charme. Dans ces pages, Bembo disserte longuement, en termes platoniciens, de la beauté corporelle et spirituelle avant de célébrer, dans une ample péroraison, la divinité de l'amour.
Un absolutisme princier tempéré par la sagesse éclairée de l'homme de cour : la « pédagogie » du Cortegiano aboutit au ministre d'État, confident respecté du souverain, non moins qu'au courtisan. Ce ministre ne saurait se trouver pour Castiglione que dans l'« homme complet » de l'idéal humaniste. À l'homme qui a su se composer harmonieusement lui-même, confiance peut être faite en politique, non moins qu'en culture, s'il se dit prêt au service du souverain et de l'État. Tel est le sens dominant d'un ouvrage où une inquiète revendication d'intellectuel se marie à un tranquille esprit de caste au fil d'une prose d'art à la fois substantielle et détendue, noblement appropriée à sa matière.Paul Renucci

Baldassare Castiglione meurt à Tolède en 1529.


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Il vole à moi un vieux cahier
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Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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