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Alfred Jarry
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14/12/2011 15:49
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Le 8 Septembre 1873 naît Alfred jarry,

écrivain, romancier et dramaturge français, créateur du mouvement de la "pataphysique"
Auteur au comique grinçant, il met en scène de façon insolite les traits humains les plus grotesques.
Il est l’inventeur du terme de "Pataphysique", science qui cherche à théoriser la déconstruction du réel et sa reconstruction dans l’absurde.

Jarry est l’un des inspirateurs des surréalistes et du théâtre contemporain. Une statue signée Zadkine consacre l’hommage de sa ville natale.
C'est lui qui a lancé lé théâtre de l'absurde.
Cet auteur est transformé par André Gide en personnage de roman dans Les Faux-monnayeurs.
Ubu est entré dans le ciel mythologique : ce qu'il y eut de prophétique dans les dits de ce "maroufle", abondamment illustrés par les événements de ce temps, manifeste une nécessité historique dont Alfred Jarry s'est trouvé l'instrument privilégié.
Tandis que les créateurs d'emblèmes universels, Cervantès ou Goethe, s'abritaient dans les coulisses d'où ils manœuvraient don Quichotte ou Faust, l'écrivain français s'est appliqué à faire de tout un pan de sa vie une interprétation théâtrale du rôle d'Ubu, pour révéler en ce personnage l'instance centrale de l'esprit humain.
Affirmation dénuée d'humilité, sur laquelle s'articulent les thèmes très divers du poète, du dramaturge et du romancier.

Sa vie

Alfred Jarry est le fils d’Anselme Jarry, négociant puis représentant en commerce, et de Caroline Quernest. Né d'une famille petite-bourgeoise, il étonne son entourage, dès son plus jeune âge, par une curiosité multidisciplinaire et la facilité avec laquelle il assimile les connaissances.
En 1878, il est inscrit comme élève dans la division des minimes du petit lycée de Laval.
L’année suivante, sa mère déménage à Saint-Brieuc avec ses deux enfants.
C’est donc au lycée de Saint-Brieuc que Jarry poursuit ses études jusqu’en 1888.
Dès 1885, il compose des comédies en vers et en prose, comme les Brigands de la Calabre en 1885, le Parapluie-Seringue du Docteur Thanaton, le Procès, les Antliaclastes, 1re version 1886, 2e version, 1888.
Il manifeste déjà le besoin de se distinguer, qu'il portera au plus haut point par l'utilisation quotidienne d'objets insolites, comme un revolver ou le port de tenues extravagantes, celle de cycliste par exemple.
Jarry entre en rhétorique au lycée de Rennes, actuel Lycée Émile-Zola de Rennes en octobre 1888.

Après des études brillantes aux lycées de Laval, de Saint-Brieuc et de Rennes, Jarry se rend à Paris dans l'intention de préparer l'École normale ou l'École polytechnique.
Mais il se plaît davantage dans la fréquentation des milieux symbolistes. Il entre au Mercure de France et se lie d'amitié avec Remy de Gourmont, Alfred Vallette, directeur du Mercure et Rachilde.
Il publie différents morceaux de vers et de prose, qu'il recueillera en 1894 dans les Minutes de sable mémorial, auquel succédera en 1895 César Antéchrist.
Jusque-là, rien ne distingue littérairement ce jeune homme curieux, excentrique, doué, avide de gloire.

Là, M. Hébert, professeur de physique, incarne aux yeux de ses élèves "tout le grotesque qui est au monde".
L'enseignant devient le héros d’une littérature scolaire abondante, dont un texte intitulé Les Polonais que Jarry, en classe de première, va mettre en forme de comédie : c’est la plus ancienne version d'Ubu roi.
En 1891-1892, il est élève d’Henri Bergson et condisciple de Léon-Paul Fargue et d’Albert Thibaudet au lycée Henri-IV.
Il échoue au concours d'entrée à l’École normale supérieure, trois échecs successifs suivis de deux échecs pour la licence ès lettres.


Le scandale d'Ubu roi

Le 10 décembre 1896, au théâtre de l'Œuvre, dirigé par A. Lugné-Poe, est présenté Ubu roi de Jarry, musique de Claude Terrasse, avec F. Gémier dans le rôle d'Ubu. Cette représentation provoque un chahut dans la salle et, parmi les critiques, les polémiques les plus vives.
Jules Lemaitre s'interroge : "C'est bien une plaisanterie, n'est-ce pas ?", pendant qu'Henry Bauër déclare :
"De cette énorme figure d'Ubu, étrangement suggestive, souffle le vent de la destruction, l'inspiration de la jeunesse contemporaine qui abat les traditionnels respects et les séculaires préjugés. Et le type restera…".
Tout commença, en effet, par une plaisanterie, un canular de collégiens du lycée de Rennes, qui tournèrent en ridicule leur ridicule professeur de physique, M. Hébert. C'est ainsi qu'on c'est à dire C. Chassé a pu accuser Jarry d'avoir usurpé à un de ses camarades, Ch. Morin, la paternité d'Ubu.
Que Jarry ait utilisé les idées de ses condisciples, cela ne fait aucun doute.
Mais c'est à lui que revient le privilège d'avoir distingué et porté à la connaissance du public – après l'avoir réécrite – cette farce énorme que Morin considérait comme une "connerie", lui donnant une qualité littéraire, enrichissant la langue française d'un mot nouveau : ubuesque.
Le succès de scandale d'Ubu roi sert à la gloire de Jarry, mais surtout à l'affirmation de plus en plus résolue de l'originalité de sa personne, qu'il fignole désormais comme une œuvre d'art.
Sans adopter l'idéologie du Père Ubu, stigmatisant la bêtise humaine, Jarry emprunte à son héros les formes excessives de son comportement pour pouvoir aller jusqu'au bout de lui-même : Aut numquam tentes, aut perfice, n'essaye rien ou va jusqu'au bout ; telle est sa devise.
Dans cette juxtaposition permanente de l'œuvre exemplaire et de la vie, celle-ci devient un théâtre où Jarry lance des répliques devenues fameuses.
À une dame qui se plaignait de la menace que faisait planer sur ses enfants les coups de revolver qu'il aimait à dispenser inconsidérément, Jarry répondra « Si ce malheur arrivait, nous vous en ferions d'autres. »
Une imagination qui va jusqu'à déformer les êtres et les choses ainsi que les mots

En 1900 paraît Ubu enchaîné, qui ne sera joué qu'en 1937 ; en 1901, c'est l'Almanach illustré du Père Ubu et, en 1906 Ubu sur la butte.
Mais si le ventripotent personnage d'Ubu qu'il avait lui-même dessiné le poursuit, il ne suffit pas à combler une imagination sans repos.
Dès 1897, Jarry a fait paraître les Jours et les Nuits, roman d'un déserteur ; en 1898, l'Amour en visites ; en 1901, Messaline ; en 1902, le Surmâle.
Cette série de romans se caractérise par une désinvolture qui permet à l'auteur de prendre une distance par rapport aux personnages envisagés.
Ceux-ci sont campés de telle sorte qu'ils semblent agir comme des automates.
Jarry décrit leur comportement avec une objectivité rigoureuse qui les érige en type universel. Il se sépare de la phraséologie symboliste et de la complaisance des romantiques, essentiellement par l'humour, et pose les premiers jalons de ce qu'il a appelé lui-même, à propos du Surmâle, le "roman moderne".
On ne peut passer sous silence le contenu social et éthique de l'œuvre de Jarry.
Ubu ridiculise le pouvoir abusif ; Sengle, le déserteur, refuse l'armée. Le Surmâle rejette les restrictions de l'être sous quelque forme que ce soit.
"Il importe au Surmâle de dépasser le rythme habituel de l'homme, des actes auxquels l'homme pense être naturellement limité".
Le Surmâle, comme Jarry lui-même, tend à l'appropriation de lui-même dans sa totalité, quitte à scandaliser.
Il n'est nullement question d'un surhomme dominateur, mais d'un homme qui combat le sous-développement aussi bien physique que moral infligé par la société à l'homme.
Dans l'Amour absolu (1899), Jarry use plus particulièrement d'une imagination qui va jusqu'à déformer les êtres et les choses ainsi que les mots.
Le formidable Merdre qui inaugure Ubu roi n'est qu'une préfiguration significative de la transformation à la fois des mots et du monde.
L'Amour absolu, "roman de la métamorphose", laisse la porte ouverte à tous les absolus, et plus particulièrement à celui de l'être libéré pulvérisant les limites d'ordre social, moral ou esthétique.
Il s'agit de cette "pataphysique" formulée dans Gestes et Opinions du docteur Faustroll (1911).
La pataphysique est la "science du particulier" et des "solutions imaginaires".
Elle conduit à une physique nouvelle qui démontrerait qu'il n'y a ni jours ni nuits et que "la vie est continue".
Surréaliste, Jarry l'est non seulement dans l'absinthe, comme l'affirme Breton, mais aussi dans sa vision du monde.
Préoccupé par ses créations, celles de ses œuvres, de son personnage et d'un monde à venir, il ne néglige pas pour autant la vie de ses contemporains.
Dans l'obligation de subvenir à ses besoins – après dilapidation inconsidérée de l'héritage familial – il fait paraître des articles dans la Revue blanche, le Canard sauvage, la Plume, articles qui seront réunis dans Gestes et Spéculations. Il peut ainsi faire valoir sa curiosité, portant un intérêt aux sujets les plus divers, inventions, mode, sport, sciences, arts.
Il fut aussi un cycliste et un escrimeur fervent.
Jarry ne se ménage pas dans sa résolution d'aller jusqu'au bout de lui-même.

Dans l'ouvrage Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien, édité après sa mort, il définit la "Pataphysique comme la science des solutions imaginaires, qui accorde symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur virtualité.
Science que perpétue le Collège de 'Pataphysique fondé en 1948.
S’identifiant à son personnage et faisant triompher le principe de plaisir sur celui de réalité, Jarry a vécu comme il lui plaisait avec ses trois attributs :
la bicyclette, le revolver et l’absinthe.
Il leur sacrifiera la respectabilité et le confort. Dans une petite baraque proche d’une rivière, à côté d’un lit-divan, Rabelais composait l’essentiel de sa bibliothèque.
L’humour lui a permis d’accéder à une liberté supérieure.
Jarry jouant Ubu, non plus sur scène mais à la ville, tend ainsi un terrible miroir aux imbéciles, il leur montre le monstre qu’ils sont. Il dit "Merdre aux assis".
Le 28 mai 1906, Jarry écrit à Rachilde :
"Le Père Ubu n’a aucune tare ni au foie, ni au cœur, ni aux reins, pas même dans les urines ! Il est épuisé, simplement et sa chaudière ne va pas éclater mais s’éteindre. Il va s’arrêter tout doucement, comme un moteur fourbu."

Épuisé, malade, harcelé par ses créanciers, malgré l'aide financière d'Octave Mirbeau et de Thadée Natanson, Jarry fait des allers et retours Paris-Laval.
L'"herbe sainte" : l'absinthe aura raison de ses jours et de ses nuits, et, malgré les efforts de ses amis, qui tentent de le soustraire par des séjours campagnards à cette vie qui l'épuise à Paris, il meurt d'une méningite tuberculeuse six mois plus tard, le 1er novembre 1907 à l’hôpital de la Charité, à Paris.
fidèle à lui-même : son dernier vœu, sa dernière volonté, sera qu'on lui apporte un cure-dent.

Il est enterré au cimetière parisien de Bagneux où sa tombe, aujourd'hui anonyme et non entretenue, est toujours en place

Postérité :

Une salle de l'Université Rennes 2 porte son nom.


Œuvres littéraires


Le Surmâle (dessin de Pierre Bonnard). éditeur CFL 1963
Les Antliaclastes (1886-1888) et premiers poèmes repris dans Ontogénie
La Seconde Vie ou Macaber (1888), repris dans Les Minutes de sable mémorial
Onénisme ou les Tribulations de Priou (1888), première version d’Ubu cocu
Les Alcoolisés (1890), repris dans Les Minutes de sable mémorial
Visions actuelles et futures (1894)
« Haldernablou » (1894), repris dans Les Minutes de sable mémorial
« Acte unique » de César-Antéchrist (1894)
Les Minutes de sable mémorial (1894), poèmes. Texte en ligne
César Antéchrist (1895) Texte en ligne
Ubu roi (1896, rédigé vers 1888) Texte en ligne
L’Autre Alceste (1896).Texte en ligne
Paralipomènes d’Ubu (1896)
Le Vieux de la montagne (1896)
Les Jours et les Nuits (1897), roman. Texte en ligne
Ubu cocu ou l'Archéoptéryx (1897)
L’Amour en visites (1897, publié en 1898), poème
Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien (achevé en 1898, publié en 1911), roman. Texte en ligne
Petit Almanach (1898)
L’Amour absolu (1899)
Ubu enchaîné (1899, publié en 1900)
Messaline (1900)
Almanach illustré du Père Ubu (1901)
« Spéculations », dans La Revue blanche (1901)
Le Surmâle (1901, publié en 1902), roman. Texte en ligne
« Gestes », dans La Revue blanche (1901). Publié en 1969 avec les « Spéculations » sous le titre La Chandelle verte.
L’Objet aimé (1903)
« Le 14 Juillet », dans Le Figaro (1904)
Pantagruel (1905, opéra-bouffe d'après Rabelais créé en 1911, musique de Claude Terrasse)
Ubu sur la Butte (1906)
Par la taille (1906), opérette
Le Moutardier du pape (1906, publié en 1907), opéra-bouffe
Albert Samain (souvenirs) (1907)

Publications post-mortem

La Dragonne (1907, publié en 1943)
Spéculations (1911)
Pieter de Delft (1974), opéra-comique
Jef (1974), théâtre
Le Manoir enchanté (1974), opéra-bouffe créé en 1905
L’Amour maladroit (1974), opérette
Le Bon Roi Dagobert (1974), opéra-bouffe
Léda (1981), opérette-bouffe
Siloques. Superloques. Soliloques Et Interloques De Pataphysique (2001), essais et écrits divers
Paralipomènes d'Ubu/Salle Ubu (2010), livre d'artiste
Ubu marionnette (2010), livre d'artiste

Traductions

La ballade du vieux marin (1893, d’après The ancient mariner de Coleridge)
Les silènes (1900, théâtre, traduction partielle d’une œuvre de l’allemand Christian Dietrich Grabbe)
Olalla (1901, nouvelle de Stevenson)
La papesse Jeanne (1907, traduit du grec d’après le roman d’Emmanuel Rhoïdès)
Principales collaborations à des revues
Écho de Paris
L’Art de Paris
Essais d’art libre
Le Mercure de France (dont «De l'inutilité du théâtre au théâtre» en septembre 1886).
La Revue Blanche
Le Livre d’art
La Revue d’art
L’Omnibus de Corinthe
Renaissance latine
Les Marges
La Plume
L'Œil
Le Canard sauvage (articles de 1901 à 1903)
Le Festin d'Ésope
Vers et prose
Poésia
Le Critique

Dessins et gravures
Gravures sur bois :
Ce est le Centaure vers 1890
Minutes de sable mémorial
Sainte Gertrude, 1895, signé sous le pseudonyme d'Alain Jans.
Dans L'Ymagier, revue trimestrielle qu'il fonde en 1894 avec Rémy de Gourmont, Alfred Jarry,
vise à publier des images et les études sur les images et les imagiers anciens et nouveaux , présentant des graveurs et gravures sur bois depuis Dürer jusqu'aux images d'Épinal.
Cette revue cessa sa publication dès 1896 et Alfred Jarry créa une nouvelle revue Perhinderion, à l'existence éphémère.

Liens

http://youtu.be/FznOszLTsfg UBU roi par JC. Averty

http://www.youtube.com/watch?v=FznOsz ... e&list=PL280D7C8516295D0A 8 vidéos

http://youtu.be/pw2voylmHuM Alfred Jarry lui même

http://youtu.be/XWmAWjrtBLQ Chronique sur Jarry




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Posté le : 07/09/2013 18:29
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Maurice Genevoix
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Le 8 Septembre 1980 à Alicante décéde Maurice Genevoix,

Romancier-poète français, héritier du réalisme.


Il naît le 29 Novembre 1890 dans une île de la Loire, près de Nevers, Maurice Genevoix passe son enfance au contact de la nature.

Maurice Genevoix connut l'épreuve de la Première Guerre mondiale où il y fut gravement blessé, il se fit tout d'abord connaître avec "Ceux de Quatorze" inspiré par ses souvenirs de soldat. Habile à percevoir les liens familiaux, il s'attacha ensuite à célébrer son pays de Loire, évoquant avec une tendresse pudique gens et bêtes auprès des bois, landes et étangs de Sologne : Rémi des Rauches, puis Raboliot qui fut distingué par le prix Goncourt de 1925, ces ouvrages peignent des êtres, passionnés jusuq'à la violence, mais toujours en accord avec le pays qui les entoure, la nature étant pour eux le refuge et l'exemple.
Les récits de Genevoix illustrent sans emphase un naturalisme optimiste, que ce soit dans Marcheloup en 1934, dans La Forêt perdue en 1967 ou encore dans La chèvre aux loups. Particulièrement inspiré pour évoquer avec un réalisme poétique des figures d'animaux, l'écrivain a rattaché des réflexions morales à ses descriptions dans Tendres bestiaires en 1969, suivi de Bestiaire enchanté et Bestiaire sans oubli ouvrages tous nourris de sa vie intérieure.
Maurice Genevoix est également l'auteur de nombreux ouvrages pour enfants comme Milot et Bridinette, reprenant les thèmes qui lui sont chers.
Les étiquettes d'écrivain régionaliste et animalier, souvent utilisées à propos de Genevoix, sont réductrices, car l'amoureux de la nature et des gens du terroir est d'abord un profond humaniste.
Secrétaire perpétuel de l'Académie française de 1958 à 1973, il fut aussi un grand voyageur, Canada en 1945, Afrique noire, Afrique blanche en 1949
Ses études sont brillantes : une voie d'universitaire et d'enseignant toute tracée.

L’ensemble de son œuvre témoigne des relations d’accord entre les hommes, entre l’Homme et la Nature, mais aussi entre l'Homme et la Mort.
Son écriture est servie par une mémoire vive, le souci d'exactitude, et le sens poétique. Normalien, il admire tout autant l’éloquence des artisans ou des paysans. D’une grande vitalité malgré ses blessures reçues lors de la Première Guerre mondiale près du village des Éparges, en avril 1915, et animé de la volonté de témoigner, il écrit jusqu’à ses derniers jours.
Son œuvre, portée par le souci de perpétuer ce qu'il a tenu pour mémorable, produit d'une grande longévité littéraire, rassemble 56 ouvrages.
Maurice Genevoix est surtout connu pour ses livres régionalistes inspirés par la Sologne et le Val de Loire comme son roman Raboliot (Prix Goncourt 1925).
Il a cependant dépassé le simple roman du terroir par son sobre talent poétique qui, associé à sa profonde connaissance de la nature, a donné des romans-poèmes admirés comme la Dernière Harde (1938) ou la Forêt perdue (1967).
Genevoix a également témoigné des épreuves de la génération qui a fait la Grande Guerre de 14-18, particulièrement dans Ceux de 14, recueil de récits de guerre rassemblés en 1949. Il s'est aussi penché plus largement et plus intimement sur sa vie en écrivant une autobiographie : Trente mille jours, publiée en 1980.


Biographie

Enfance

Descendant d'un ancêtre genevois catholique ayant fui la Genève calviniste vers 1550-1560 pour rejoindre la Creuse, et dont le patronyme prend alors un x final, Maurice Genevoix est issu d'une famille de médecins et pharmaciens par sa lignée paternelle.
Son père, Gabriel Genevoix, rencontre en 1889 Camille Balichon, fille d'un épicier en gros, à Châteauneuf-sur-Loire. Il naît le 29 novembre 1890 à Decize, dans la Nièvre, à 35 km en amont de Nevers.
Un an plus tard, ses parents migrent à Châteauneuf-sur-Loire pour reprendre une affaire familiale, un « magasin » réunissant une épicerie et une mercerie.
Il puisera de cette période la plupart des souvenirs évoqués dans Trente mille jours et Au cadran de mon clocher.
Il tiendra pour un privilège d'avoir passé son enfance dans une bourgade rurale d'avant 1914. Son frère René, qui deviendra médecin, naît en 1893.
Alors qu'il n'a que douze ans, sa mère meurt le 14 mars 1903 d'une attaque d'éclampsie.
De cette perte, il gardera une éternelle déchirure qui transparaîtra dans plusieurs romans, comme Fatou Cissé ou Un Jour. Le veuvage de son père le laisse esseulé. Il trouve cependant un réconfort sur les bords de la Loire où il passe son temps libre et où il puisera l'inspiration de ses futurs écrits (Rémi des rauches, la Boîte à pêche, Agnès, la Loire et les garçons).

Études

Reçu premier du canton au certificat d’études, il entre interne au lycée Pothier à Orléans. Il découvre alors « l’encasernement, la discipline, les sinistres et interminables promenades surveillées. »
Il retracera cette période de sa vie dans l’Aventure est en nous. Puis il entre pensionnaire au lycée Lakanal à Sceaux, où il est khagneux durant trois années (1908-1911). Il est admis à l’École normale supérieure de la rue d'Ulm. Il effectue une des deux années de service militaire, comme le permettait alors le statut particulier des jeunes Français admis aux grandes écoles. Il est affecté à Bordeaux, au 144e Régiment d’infanterie.
Il entre ensuite à l’École normale supérieure et, deux ans plus tard, présente son diplôme de fin d'études supérieures sur « le réalisme dans les romans de Maupassant ». C’est à cette période qu’il envisage une carrière littéraire. Mais ce seront les encouragements de Paul Dupuy l’incitant à écrire son témoignage de guerre qui l’emporteront sur l’orientation du jeune Genevoix.
Il est alors cacique de sa promotion.
Il lui reste à accomplir une dernière année d’études universitaires pour se présenter à l’agrégation et aborder une carrière universitaire. Il pense alors à se faire nommer comme lecteur dans une université étrangère pour connaître des formes de cultures originales, mais également afin de disposer de temps pour écrire.

La guerre

Il est mobilisé lors de la Première Guerre mondiale, le 2 août 1914, et sert comme sous-lieutenant dans le 106e régiment d’infanterie.
Sa division, la 12e DI, appartient à la IIIe armée commandée par le général Ruffey. Il participe à la bataille de la Marne et à la marche sur Verdun. Le 17 février 1915, la 12e division est envoyée à l'assaut pour reprendre le village des Éparges. Pendant plusieurs mois, le commandement français tente de tenir les positions conquises.
C'est tout à la fin de cette bataille que Maurice Genevoix est très grièvement blessé de trois balles le 25 avril 1915 sur la colline des Éparges.
Son meilleur ami dans cette guerre, un saint-cyrien, le lieutenant Robert Porchon, avait été tué quelques jours plus tôt16. La lettre du docteur Lagarrigue, adressée à Maurice Genevoix le 2 mai 1915, témoigne de la gravité de ses blessures : « Je suis navré de vous savoir si grièvement touché. Mon pauvre vieux, c'est avec une émotion profonde que je vous ai vu, accablé de fatigue et j'oserais dire de « gloire », sur cette poussette incommode qui vous amenait à Morilly.
Je n'ai pensé qu'à vous expédier au plus vite à Verdun, car votre pâleur m'inquiétait beaucoup. Je suis navré certes, mais rassuré maintenant ; je craignais le pire, et l'absence de nouvelles m'impressionnait péniblement. ».
Il est soigné sept mois durant, conduit d'un hôpital à l'autre : Verdun, Vittel, Dijon, puis Bourges. Il doit peut-être en partie sa survie à sa remarquable condition physique.
Les blessures reçues au bras et au flanc gauche le marquèrent pour le restant de sa vie. Il est réformé à 70 % d'invalidité et perd l'usage de la main gauche.
Il retourne alors à Paris où il assure un service bénévole à la Father's Children Association, logeant à l'École normale. Le nouveau directeur de l'école, Gustave Lanson, lui propose de reprendre ses études afin de présenter l'agrégation. Maurice Genevoix refuse afin d'entreprendre la rédaction de son témoignage de guerre.

La rencontre des Vernelles

Maurice Genevoix avait cherché une maison sur les bords de la Loire : il n'en trouva pas à Chateauneuf-sur-Loire et « vala » ainsi jusqu'aux Vernelles, à Saint-Denis de l'Hôtel
Gravement atteint de la grippe espagnole en 1919, il retourne chez son père dans le Val de Loire, retrouvant le village de son enfance19.
Après avoir été écrivain de guerre, il entreprend la peinture du pays de Loire.
En 1927, tirant parti du prix Goncourt décerné pour Raboliot (1925), il rachète une vieille masure au bord de la Loire à Saint-Denis-de-l'Hôtel, au hameau des Vernelles « une vieille maison, rêveuse, pleine de mémoire et souriant à ses secrets.
» Il y passe un premier été avec le chat Roû, période dont
il tirera un roman du même nom. Après la mort de son père en juillet 1928, il s'y installe en 1929, pour un premier séjour de vingt ans. C'est dans cette maison, dans un bureau donnant sur la Loire, qu'il écrira la plupart de ses livres.
Le 25 aoüt 1937, il épouse Yvonne Louise Montrosier, médecin originaire d'un village proche de Saint-Affrique, qui mourra l'année suivante. Il apprend la déclaration de guerre française alors qu'il est en voyage au Canada.
De juin 1940 à début 1943, il quitte les Vernelles, en zone occupée, pour s'installer en Aveyron, chez ses beaux-parents. Il y écrit Sanglar (rebaptisé plus tard La Motte rouge), un épisode romanesque des guerres de religion, dont l'épigraphe d'un moine de Millau évoque à mi-mot l'Occupation : « c'était un temps fort calamiteux et misérable ».
Il épouse le 27 février 1943 Suzanne Neyrolles (1911-2012), veuve, déjà mère d'une fille prénommée Françoise, puis rejoint les Vernelles, qu'il retrouve saccagées.
En 1944 naît sa fille, Sylvie.

L’Académie française

Il est élu sans concurrent à l’Académie française le 24 octobre 1946, le même jour qu’Étienne Gilson, puis reçu le 13 novembre 1947 par André Chaumeix au fauteuil de Joseph de Pesquidoux. Il s’était porté candidat plus tôt la même année au fauteuil de Louis Gillet mais s'était retiré devant Paul Claudel.
Quatre ans plus tard, il s’installe à Paris, ville qu’il apprend à aimer, dans un appartement de l’Institut, quai Conti.
Il devient Secrétaire Perpétuel de l’Académie Française en octobre 1958, succédant à Georges Lecomte. De 1958 à 1963, il rédige personnellement le discours d'attribution à chaque lauréat des grands prix de littérature, du roman, de poésie, ou d’histoire (prix Gobert). Sous son impulsion, l’Académie française affirme sa présence et sa compétence au sein du Haut Comité de la langue française, créé en 1966, et du Conseil international de la langue française.
Sous son autorité, ont été créées les commissions ministérielles de terminologie qui proposaient des équivalents aux termes anglais proliférant dans les vocabulaires scientifiques et techniques.
Les propositions étaient soumises à l'Académie des Sciences et à l'Académie Française avant d'être officialisées par arrêté ministériel (le premier arrêté ministériel date de 1972, source Monique Feyry (Rapporteur du Haut Comité de la Langue Française de 1968 à 1973).
Il démissionne du poste de secrétaire général de l’Académie en janvier 1974, ce qu’aucun secrétaire perpétuel n'avait plus fait avant lui ni depuis Raynouard en 1826. À quatre-vingt-trois ans, il pense en effet qu’il a encore d'autres livres à écrire, devant pour cela se démettre de ses fonctions. D’aucuns verront dans cette démission l’expression de son goût pour la liberté.

La retraite aux Vernelles

Maurice Genevoix quitte alors Paris pour retrouver "Les Vernelles" qu'il considère comme son port d'attache. Devenu octogénaire, il écrit régulièrement et publie Un Jour (1976), puis Lorelei (1978) et Trente mille jours (1980).
À l'âge de 89 ans, il nourrit encore un projet de roman, traitant du passage de l'enfance à l'adolescence, avec l'intention de mettre en épigraphe une citation de Victor Hugo : « l'un des privilèges de la vieillesse, c'est d'avoir, outre son âge, tous les âges ».
Il conserve jusqu'à sa mort ses facultés intellectuelles.
Il succombe d'une crise cardiaque le 8 septembre 1980, alors qu'il est en vacances dans sa maison d'Alsudia-Cansades, près de Jávea (province d'Alicante) en Espagne. Sur sa table d'écrivain, il laisse inachevé son projet de roman30 intitulé Vent de mars, de même qu'un autre projet, Nouvelles espagnoles31. Il est enterré au cimetière de Passy à Paris.

L'œuvre

L'ensemble de l'œuvre de Maurice Genevoix procède du témoignage de ce qu'il tient pour mémorable : la vie dans une bourgade de province au bord de la Loire à la fin du xixe siècle, les premiers mois de la Grande Guerre, les scènes de la nature et de la chasse en Sologne ou au Canada, le quotidien des hommes dans les colonies françaises. Ses livres sont plus souvent des récits que des fictions. Il est généralement présenté comme un écrivain sensible animé du désir de perpétuer.
Il fait appel à sa mémoire sensorielle peu commune, mais chaque ouvrage est précédé d'une minutieuse recherche documentaire.

Les livres de guerre

L'œuvre de Maurice Genevoix doit à sa formation initiale d'écrivain de guerre. Il trouvera son registre dès le premier livre. Par la suite, il gardera le même souci d'exactitude et de précision dans l'évocation des instants gardés en mémoire. Il se révèle persuadé que toute exagération ne peut qu'affaiblir l'effet de la réalité, et n'aspire qu'à rester un témoin fidèle et scrupuleux. Ses lectures l'y avaient préparé : à l'école de Maupassant, comme à celle de Stendhal et de Tolstoï, Maurice Genevoix avait appris la simplicité de la narration.
En décembre 1915, ses carnets de guerre rassemblent quelques notes griffonnées (ordres de bataille, instructions diverses, liste des secteurs, dates). Les quatre premiers chapitres de Sous Verdun sont esquissés sur le front, dans les intervalles de repos. Le reste tient à l'exercice de la mémoire. Ces notes de guerre s'achèvent en effet très tôt, le 6 septembre 1914.
Maurice Genevoix regrettait que l'on eût souvent donné une importance exagérée à ces carnets. Les lettres de 1915 qu'il écrivit, du front, au secrétaire général de l'École normale supérieure, Paul Dupuy, sont davantage documentées.
Ernest Lavisse, directeur de l'école, avait chargé Paul Dupuy de conserver tout une correspondance des élèves envoyés au front, qui devait servir de documents pour rédiger plus tard une histoire de la guerre. Cette correspondance semble avoir depuis été égarée.
Quelques mois plus tard, au terme du séjour hospitalier de Genevoix, Dupuy devient l'intercesseur auprès des éditions Hachette, en la personne de Guillaume Bréton, qui remet alors à l'ancien normalien un contrat pour un livre qu'il rédigera en quelques semaines.
Entre-temps, Dupuy n'aura cessé d'exhorter Genevoix d'écrire, alors même que celui-ci n'avait pas encore quitté l'hôpital de Dijon, l'encourageant à reprendre jour par jour tous ses souvenirs. Ainsi écrit-il le 16 juin 1915 : « C'est votre pouvoir à vous de charger de sens les moindres mots ou les gestes les plus simples. » Puis le 20 juin 1915, se faisant plus pressant : « J'aurais un grand chagrin si tout ce qu'il y a d'art en toi demeure en l'état de puissance latente et ne se réalise pas dans la plus riche des matières. »
C'est le désir de témoigner qui le décide à écrire. Son récit, parfois interprété comme une thérapie par l'écriture, est servi par une mémoire sensorielle peu commune. Son témoignage de soldat, relaté dans cinq volumes écrits entre 1916 et 1923, tous parus chez Flammarion, et rassemblés par la suite sous le titre Ceux de 14, est un document précieux sur la vie des poilus.
La censure s'est attardée sur les deux premiers récits qui, la guerre n'étant pas encore achevée, montrait trop la réalité des combats et, plus encore, relatait parfois des paniques. Les coupes furent de ce fait nombreuses plus de 269 pages lors de la première édition. Ces écrits sont considérés comme l'une des plus grandes œuvres de guerre.

Les livres régionalistes

Une seconde période démarre avec Rémi des Rauches, roman publié en 1922, qui vaut à son auteur un Prix Blumenthal.
Le roman est une transposition littéraire de la guerre, la crue de la Loire évoquant la boue des Eparges, la nostalgie du village aimé, et le souvenir des camarades tués.
Cette période féconde est couronnée par Raboliot qui obtient le prix Goncourt en 1925.
Raboliot est un roman sur la Sologne où un anti-héros braconnier défend sa condition d'homme libre. Le soir même du prix, il reprend le train pour Châteauneuf, mettant comme son héros cette liberté au-dessus de tout. L'écrivain ne donnera pas suite à ce qui était alors, comme il s'en expliquera dans la préface à sa biographie Au cadran de mon clocher, les premiers volumes d'un cycle consacré au peuple de la Loire. Sa curiosité, tout autant qu'un constant besoin de poésie. Ses livres rapportant ses voyages à l'étranger, ses écrits de guerre, de même que les thèmes universels qu'il aborde, témoignent cependant d'une dimension beaucoup plus large de l'ensemble de son œuvre.

Les livres du voyageur

Maurice Genevoix voulait enseigner à l'étranger. Contraint par ses blessures de choisir une autre orientation, il conserve cependant le goût du voyage.Il visite les grandes villes d'Afrique du Nord en 1934, puis parcourt le Canada durant quelques mois en 1939, de la Gaspésie aux Rocheuses. De sa rencontre avec deux trappeurs « alliant une bonhommie et une morosité agressive », il tire un roman, La Framboise et Bellehumeur. Puis il visite l'Afrique, précisément le Sénégal, la Guinée, le Soudan (1947) et le Niger, quelques années plus tard (1954). De son voyage en Guinée naît Fatou Cisse, un roman sur la condition des femmes en Afrique Noire.
Il part également en Suède en 1945, et au Mexique en 1960. Mais il reste avant tout séduit par ce Canada sauvage qui le ramène à ses propres fondements : la forêt, le fleuve, mais aussi les bêtes libres.

Les romans-poèmes.

(Forêt voisine, la Dernière Harde, la Forêt perdue) que Maurice Genevoix écrit aux Vernelles sont des œuvres où il manifeste son talent poétique.


La Loire coule dans l'œuvre entière de Maurice Genevoix

Dans une interview relative à la Forêt perdue, il reconnaît que cette poésie convole avec la magie. Certains critiques considèrent ces romans-poèmes, qui accordent une grande part à la description de la vie animale et à la chasse, comme des romans spécialisés.
La Dernière Harde, pourtant dénué de péripéties mais touchant, comme la Forêt perdue, à une certaine grandeur épique, est considéré par certains écrivains comme le meilleur roman de Maurice Genevoix.
Le songe n'est jamais loin dans cette partie de l'œuvre. « L'histoire que voici, je l'ai rêvée à partir d'un mot », prévient-il en préface de la Forêt perdue. Les décors aquatiques de la Loire, présents dans plusieurs autres romans, invitent au rêve.
Maurice Genevoix fera partie des premiers comités de la Société des poètes et artistes de France à la fin des années 1950 et au début des années 1960

Les thèmes

Maurice Genevoix est marqué par son enfance où il puise son inspiration : « Il suffit que j'y songe encore pour retrouver une très lointaine ivresse : de joie de vivre, d'augmentation de l'être, de capiteux et éternel printemps. Et comment me tromper à ce délicieux vertige ? C'est l'enfance! ». C'est de l'enfance qu'il se réclame, la comparant à une plaque hypersensible.
Rares sont ses romans qui ne font pas directement référence à sa propre enfance. Rémi des Rauches (1922) puis la Boîte à pêche (1926), remettent à jour des souvenirs d'enfance parsemés de lieux-dits où il aimait pêcher, comme la Ronce, le Chastaing ou l'Herbe Verte. Les Compagnons de l'Aubépin (1938) rapporte le séjour au bord de l'eau d'un groupe de jeunes garçons « dépositaires du chevaleresque. »
Dans L'Aventure est en nous, se retrouve, sous les traits de François Montserrat, le lycéen Genevoix, vif et frondeur.
Mais c'est aussi dans les derniers écrits (Trente Mille jours, Jeux de glaces) que se révèle le plus fidèlement son enfance. L'amitié qu'il accorde à ses proches, est présente d'un bout à l'autre de son œuvre, du Porchon de Sous Verdun (1916) au d'Aubel de Un Jour (1976).

La mort

À l'âge de quatre ans, durant l'hiver 1894, il échappe de peu à la mort alors qu'il contracte le croup.
La mort continuera de hanter l'ensemble de son œuvre. À neuf ans, il voit pour la première fois « couler le sang », le sentant refroidir et se figer autour de sa jambe brisée qu'il s'agit de guérir dans l'échaudoir d'un boucher. « Une médication de Bantou », lâchera-t-il l'année précédant sa mort. À douze ans, la perte de sa mère le confronte à la réalité de la mort.
Mais c'est au Front qu'il la côtoie sous sa forme la plus effroyable. Il y fera l'expérience de ce « vide glacial » que laisse à ses côtés le compagnon fauché dans sa course, et qui ne cessera jamais de le poursuivre. Un épisode qu'il remettra notamment en scène dans la Dernière Harde où le Cerf rouge, fuyant avec sa mère sous les balles des chasseurs, sent à son tour contre lui ce même « vide glacial, extraordinairement profond, qui le suivait dans son élan". Il publie en 1972 un essai sur ce thème, La Mort de près, s'agissant d'une mort dont il s'attache à dépeindre la fréquentation quotidienne au cours de la guerre. Là encore, il se pose en simple témoin
.
La nature

Le procès de Renart
Tous les romans de Maurice Genevoix sont un hymne à la vie où il évoque notamment une complicité à la vie animale67. Qualifié parfois de naturaliste lyrique, il évite cependant l'excès de style, la profusion de sentiment, et s'en tient à la poésie des harmonies présentes dans la nature. Son travail est lié à son aptitude à capter et exprimer les sensations du fond de l'être, y compris dans sa nature la plus proche de l'animal, et à se mettre parfois à la place, par des procédés littéraires relevant de l'anthropomorphisme, d'un autre vivant, d'un cerf ou d'un chat.
La complicité avec l'animal trouve son apogée dans Le Roman de Renard, dont le héros se bat également pour une soif de liberté, et dont l'écriture évoque La Dernière Harde72. Genevoix s'affirme alors avec Louis Pergaud comme l'un des meilleurs écrivains animaliers.
Bien que ses romans s'y réfèrent il se défend d'aimer la chasse. La guerre lui en a ôté le goût, qu'il reconnaît avoir eu auparavant. Il y retrouve son propre goût de la quête, très présent dans Raboliot, mais il réprime ce qui s'apparente à la tuerie, qu'incarne le Grenou de La Dernière Harde.

La mémoire

Genevoix reste pour une bonne part de son œuvre le chantre de la mémoire. Les mots qu'il emploie montrent son travail de mémorisation puis de témoignage, tel le titre donné à l'un de ses Bestiaires, qualifié de Bestiaire sans oubli. Il conservera des traces de son enfance, notamment ses cahiers scolaires, et gardera les travaux de création de ses romans. L'homme est à ses yeux « comptable de ce qu'il est en mesure de transmettre ». Cette mémoire lui est un instrument d'investigation qu'il met au service de ses camarades de guerre, mais également afin de perpétuer les scènes de son enfance.

Les influences littéraires

Lectures d'enfance et d'adolescence
Il s'avoue marqué par l'Enfant des bois, d'Élie Berthet, qui l'invitera à de premières rêveries, puis par Le Livre de la jungle de Kipling dont il restera marqué76 et qui, bien plus tard, l'invitera au voyage. Adolescent, le besoin d'écrire se manifeste sous la forme de premiers poèmes. Il découvre Daudet, puis Balzac.
Il découvre également Stendhal, Tolstoï et Flaubert. Maurice Genevoix admire sa capacité à s'investir dans ses propres personnages. Devenu Normalien, il étudie Maupassant, qu'il apprécie pour la simplicité de son écriture, son honnêteté et son naturel. Mais si l'on retrouve l'ombre de Maupassant chez Genevoix, c'est sous un jour « moins amer, plus humain ».
Au lycée Pothier d'Orléans, il a pour professeur de lettres Émile Moselly (Émile Chenin de son vrai nom), auteur de Jean des Brebis, qui reçut le prix Goncourt en 1907. Celui-ci adressera à l'auteur frais émoulu de Sous Verdun une lettre émouvante datée du 28 mai 191680 : « Je désirerais savoir si l'auteur de Sous Verdun et le petit Genevoix, l'élève intelligent et vif que j'ai eu comme élève à Orléans, ne sont qu'une seule et même personne. Dans ce cas, permettez-moi d'embrasser tendrement et fortement le lieutenant Genevoix pour l'âme vaillante qu'il me révèle. Permettez-moi surtout de dire au Normalien Genevoix, qu'il est déjà un grand artiste, de la race des beaux écrivains, et que son maître un jour sera très fier de lui. »

Lectures universitaires

Conscient des limites de son art, il évite les controverses littéraires69. Il se tient en retrait de la psychanalyse et raille volontiers les critiques qui croient déceler chez lui les clés de l'écriture de certains de ses romans.
Il conduit son existence d'Académicien en dehors des chapelles littéraires », peu sensible aux thèses générales81 ». Dans Un Jour, Genevoix cite Thoreau : « Nous savons plus que nous n'assimilons ».

Place de l'écrivain dans la littérature du xxe siècle

Maurice Genevoix et "les écrivains de terroir"

Le terroir constitue dans l’entre deux-guerres un axe narratif essentiel. Les écrivains qui s’y consacrent visent l’universalité des relations de l’homme à la nature, recherchant par d’autres voies une réponse aux questions sur la condition humaine83. La description de la nature y présente des valeurs poétiques spécifiques, qui guident certaines œuvres de Charles-Ferdinand Ramuz, Henri Pourrat, Jean Giono, Henri Bosco et Maurice Genevoix.
Ces écrivains qualifiés de « régionalistes », ou « de terroir », renouvellent ainsi la tradition du roman rustique inaugurée par George Sand. Ils manifestent une adhésion à l’ordre naturel du monde face à une civilisation moderne, sorte de rousseauisme commun à ces écrivains de terroir. Descripteurs des scènes naturelles, ils s’identifient chacun à un peintre : Ramuz à Cézanne, Bosco à Van Gogh, et Genevoix à Maurice de Vlaminck. Ce réalisme optique sera développé par la suite par le nouveau roman. Mais les romans des écrivains de terroir sont aussi parfois de véritables études de mœurs. Chez Genevoix, la description de Raboliot, braconnier solognot, en constitue un exemple.
Chez Genevoix, le réalisme disparaît parfois sous des réseaux de correspondances et de symboles, telles que l’exigeaient leur considération romantique84. Le symbole, ou le signe, comme s’en exprimera Maurice Genevoix dans Un Jour, reste un moyen privilégié de relation entre l’homme et l’univers. Avec ces autres écrivains, Maurice Genevoix abolit parfois le temps.
Plusieurs de ses romans, comme La Forêt perdue, sont présentés comme relevant tout simplement de temps anciens. D’autres scènes, tel le mouvement en avant du Cerf Rouge de la Dernière Harde, consentant à sa propre mise à mort, sont propices à l’effacement du temps

Maurice Genevoix parmi les autres écrivains de guerre

À la remise du Prix Blumenthal pour Rémi des Rauches, Genevoix raconte que André Gide lui précisa que la littérature de guerre ne relevait pas à ses yeux de la création littéraire, mais que son roman l'avait rassuré. En retour, la littérature apparaissait incompatible avec la vérité historique. Or, Ceux de 14 inaugure l’association de la vérité documentaire et d’une technique littéraire qui autorise l’expression d’un point de vue scrupuleusement objectif86.
La plupart des témoignages de la Grande Guerre ont fait passer leur témoignage du niveau de la sphère intime à celui de la sphère publique. Les quelque 300 ouvrages publiés à Paris et analysés par Jean-Norton Cru, qui épingle Roland Dorgelès (les Croix de bois) comme Henri Barbusse (Le Feu), relèvent souvent de cette ve. Jean-Norton contribuera à porter Genevoix au pinacle des écrivains de guerre, d’où naîtront notamment les « classes Genevoix », mises en œuvre en 1998 et 1999. Il s'agissait pour les élèves d’appréhender la Grande Guerre à travers Ceux de 14, non seulement en confrontant les points de vue historique et littéraire lors d’une étude en classe, mais encore en se rendant sur la crête des Éparges. Ceux de 14 est souvent mise en vis-à-vis de Orages d’acier, le journal de guerre d’Ernst Jünger publié en Allemagne en 1921.

Le style

La volonté de témoigner accompagne les récits de Maurice Genevoix, où il relate les faits d'histoire dans leur exactitude objective, mais également dans ses romans-poèmes, où il s'attache à dépeindre les sentiments qui l'unissent à la nature. Il cède volontiers aux élans de la poésie, qu'il juge la mieux apte à faire apparaître les choses dans leur réalité première. Écrire, c'est à ses yeux livrer à autrui ce que l'on croit avoir en soi de plus précieux et de plus rare. Ainsi est-il conscient de sa singularité, de sa façon propre de percevoir et de sentir. Il revendique le don de création et raille les écrivains cédant aux tentations de la virtuosité. Il s'attache à voir les choses dans la fraîcheur de leur création. Il fut il est vrai, dès sa plus tendre enfance, initié par les « simples ». Ainsi dira-t-il de Daguet, un valet piqueux, qui deviendra La Futaie dans la Dernière Harde, puis La Brisée dans la Forêt perdue, qu'il lui a appris « à lire sur la feuille morte, dans la coulée de glaise, sur la grève du ru forestier ». Il en conservera à jamais le sens des signes, qu'il relève partout au cours de ses promenades.
Le mot est sûr et simple. Ses manuscrits sont peu raturés. « Mais cela ne prouve qu'une chose, précise-t-il : c'est que je ne fixe la phrase, noir sur blanc, qu'après l'avoir élaborée mentalement, orientée, affermie, retouchée. Les ratures, les corrections, ne sont guère qu'une dernière toilette : comme on lime ou polit les bavures, après la fonte. » Un lyrisme pudique81, dominé et serein, anime continuement le texte. La richesse du vocabulaire, qui intègre volontiers des termes régionaux ou de l'ancien Français, contribue à renforcer son écriture. Maurice Genevoix a la passion des mots exacts. On lui reprochera pourtant parfois une virtuosité sémantique, un excès verbal qu'il reconnaitra lui-même dans certains de ses romans, notamment à propos des dernières pages de Sanglar. C'est cependant par la précision du vocabulaire, qui permet de témoigner sans trahir, que Genevoix entend assurer le rôle de témoin qu'il s'est assigné. Au reste, il se garde d'en abuser. Il lui eût été aisé, dans ses romans du Moyen Âge (Le Roman de Renard et La Forêt perdue) d'y recourir, mais il a préféré l'exactitude de la narration.

Musée Maurice-Genevoix

Son domicile de Saint-Denis-de-l'Hôtel, "Les Vernelles", reste une demeure familiale à l'écart du village; sur la place de l'église (Place du Cloître), une vieille maison vigneronne a été transformée en musée.
L'entrée en est libre et assurée les samedi, dimanche et jours fériés, de 10 h à 12 h, et de 14 h à 18 h.
Une exposition permanente sur l'écrivain s'appuie sur la présentation de panneaux thématiques abondamment illustrés et nommés comme suit, dans l'ordre d'une visite en sept étapes :
l'Enfance, la Guerre, l'Écrivain, Les Vernelles, le Val de Loire et la Sologne, l'Académicien français, et un Univers enchanté. Des expositions temporaires sont présentées au premier étage. Une extension de la salle d'exposition est prévue.
À Saint-Denis-de-l'Hôtel, une promenade dite Promenade Maurice Genevoix a été aménagée le long du Chastaing en mémoire de l'écrivain.
Wikipédia





Liens

http://www.ina.fr/video/CPB80054907 maurice Genvoix "apostrophes"

http://youtu.be/9ghlv7bNFAs Maurice Genevoix, son Techkel et sa chatte

http://youtu.be/RfB3KT2oYcA Maurice Genevoix l'appel d'un homme

http://youtu.be/RfB3KT2oYcA extrait de Rabolio en russe

http://youtu.be/5em9fejOUWA Michel delpech Le chasseur




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Posté le : 07/09/2013 17:00
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François Mauriac
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Le 1 septembre 1970, à Paris meurt François Mauriac.



François Mauriac, né le 11 octobre 1885 à Bordeaux est un écrivain français. Lauréat du Grand prix du roman de l'Académie française en 1926, il est élu membre de l'Académie française au fauteuil no 22 en 1933. Il reçoit le prix Nobel de littérature en 1952.

Mauriac est sans conteste l'un des plus importants romanciers français du XXe siècle.
Son domaine est limité. Le décor, les personnages, les thèmes, les procédés, rétrospection, monologue intérieur varient peu d'un livre à l'autre.
Il est essentiellement le peintre de la province française, des combats entre la chair et l'esprit, entre la sensualité de tout jeunes hommes, ou de femmes mûres et insatisfaites, et l'attrait de la religion pour les cœurs inquiets et blessés.
Il s'est posé dans divers ouvrages de critique et dans son Journal bien des problèmes qui tourmentent le romancier catholique, soucieux de ne rien dissimuler de la vérité et des séductions du péché.
Ses livres sont remarquables par la création d'une atmosphère fiévreuse, par leur tension tragique et surtout par leur poésie.
Poète, il le demeura dans l'écrit politique qui, après 1945, devint progressivement sa préoccupation majeure et l'expression d'un engagement que la mort seule arrêta.
Il possédait le don de capter l’évènement pour le transposer de l'éphémère évanescent, qui est son milieu propre, dans l'éternel et situer le relatif dans le sillage de l'absolu. Il restitue l'actualité intégrée dans la durée du poème sous la double optique de la tendresse de l'homme et de l'espérance de Dieu.

Sa vie

Famille, enfance, et formation[modifier | modifier le wikicode]
François Mauriac naît le 11 octobre 1885 dans la maison familiale du 86, rue du Pas-Saint-Georges à Bordeaux, fils de Jean-Paul Mauriac, marchand de bois merrains et propriétaire terrien dans les Landes de Gascogne, et Claire Mauriac née Coiffard, héritière d'une famille du négoce bordelais.
Dernier d'une fratrie composée d'une sœur aînée : Germaine née en 1878 et de trois frères, Raymond né en 1880, Pierre né en 1883, et Jean né en 1884, François Mauriac est orphelin de père à vingt mois après la mort subite de celui-ci suite à un abcès au cerveau, le 11 juin 1887.
Il vit toute son enfance très entourée par une mère très pratiquante, dont il est le fils préféré et qui gère toutes les affaires de la famille, par sa grand-mère Irma Coiffard, née Abribat, et sous le tutorat de son oncle Louis Mauriac, magistrat et seul frère cadet de son père.
François Mauriac fait, à partir de 1892, ses études primaires puis secondaires chez les Marianistes de l'institution Sainte-Marie Grand-Lebrun à Caudéran, où il fera la rencontre d'un ami d'une vie, André Lacaze.
Outre les divers logements que la famille occupera à Bordeaux, son adolescence est marquée par plusieurs lieux girondins qui tous marqueront profondément son œuvre : Gradignan où sa grand-mère Irma possède le Château-Lange, les Landes de Gascogne autour de Langon, Verdelais et surtout l'été à Saint-Symphorien, bourgs dominés par la bourgeoisie viticole ou ayant fait fortune dans l'exploitation forestière, aux climats lourds de secrets étouffés qu'il peindra dans la plupart de ses romans.
Alors que jusqu'ici il n'a écrit que de petits textes et poèmes, il compose à treize ans sa première réelle œuvre, un mélodrame de jeunesse intitulé "Va-t-en" !, dédié à sa sœur Germaine.
En 1902, la mort de sa grand-mère Irma est un profond choc pour l'adolescent qu'il est, constatant la profonde hypocrisie de sa famille religieuse et bourgeoise qui se partage déjà l'héritage à côté de l'agonisante.
François Mauriac rate la seconde partie de philosophie et doit redoubler, préférant refaire son année au lycée public de Bordeaux.
Dans cet établissement il a notamment pour professeur, Marcel Drouin, beau-frère d'André Gide, qui lui fait découvrir les textes de Paul Claudel, Francis Jammes, Henri de Régnier, Arthur Rimbaud, Charles Baudelaire, Colette et Gide, notamment "L'Immoraliste" et "Les Nourritures terrestres" qui le marqueront, tous proscrits dans sa famille et chez les pères, finissant ainsi de constituer son corpus littéraire personnel.
Il découvre également à cette époque les textes et idées de Maurice Barrès qui marqueront sa jeunesse.
Après son baccalauréat obtenu en juillet 1904, il étudie la littérature à la faculté de Bordeaux, sous la direction de Fortunat Strowski.
Il a alors pour condisciple Jean de la Ville de Mirmont et se lie d'amitié avec André Lafon.
À cette époque, il habite toujours avec l'ensemble de sa famille, dans divers appartements et immeubles de Bordeaux, dont le 15 rue Rolland de 1903 à 1907 et fréquente à partir de 1905 les cercles bordelais du Sillon de Marc Sangnier, mouvement catholique ouvriériste , dont il se sent proche mais qui le laisse insatisfait; et dont il s'écarte définitivement en juin 1907.
Ces milieux catholiques étaient proches du modernisme, tendance d'exégètes et de philosophes qui mettaient en cause l'identité historique du Christ, voire la foi chrétienne.
Dans la préface à sa Vie de Jésus, Mauriac avoue qu'il fut durablement troublé par le modernisme, avant de se rendre compte de l'a priori contre le surnaturel de ce courant de pensée.
Si, dans le cas du Sillon, la rupture n'empêcha pas que Mauriac prenne des attitudes politiques qui, pour lui, en prolongeaient l'esprit, avec le modernisme, en revanche, la rupture fut complète et sans compromis, au point que la préface à la deuxième édition de la Vie de Jésus prend violemment à partie la principale figure du modernisme Alfred Loisy.
Sa famille l'envoie avec une rente annuelle de 10 000 francs à Paris, où il s'installe le 16 septembre 1907 — tout d'abord dans une pension étudiante de frères maristes au no 104 de la rue de Vaugirard où il réside un an avant d'être exclu, puis quelques mois dans l'hôtel l'Espérance voisin, et enfin seul en 1909 au cinquième étage du no 45 de la rue Vaneau— pour préparer l'École des chartes qu'il intègre mais finit très rapidement par abandonner pour se consacrer entièrement à l'écriture en publiant des poèmes, à son compte, dans la Revue du temps présent.
Son premier volume de poèmes, "Les Mains jointes", est publié en 1909. Bien que retenant l'attention des milieux littéraires et notamment de Maurice Barrès, auquel il voue un véritable culte, Mauriac ne sera connu du grand public qu'une dizaine d'années plus tard.
En 1913, il épouse Jeanne Lafon, rencontrée chez leur amie commune Jeanne Alleman, auteur qui publie sous le pseudonyme masculin de Jean Balde, et elle lui donne un premier fils, Claude, en 1914, année de la publication de La Robe prétexte.
Ses autres enfants, Claire, Luce, et Jean naîtront respectivement en 1917, 1919 et 1924
Sa carrière littéraire est interrompue par la Première Guerre mondiale, durant laquelle il s'engage un temps, bien que réformé et de santé précaire, dans un hôpital de la Croix-Rouge à Salonique.
Après la victoire de 1918, il reprend ses activités et publie, en 1921, Préséances, qui le brouille pour longtemps avec la bonne société bordelaise, puis, en 1922, Le Baiser au lépreux.


Le romancier

Né à Bordeaux, François Mauriac est resté attaché à cette ville, dont il a dépeint la bourgeoisie sans indulgence.
La plupart de ses romans sont placés dans ce décor de province, étroit, oppressant, parmi des gens soupçonneux et férocement attachés à leurs possessions et à leurs traditions.
Pour Mauriac comme pour Balzac, il n'y a qu'en province que l'on sache bien haïr, et peut-être aussi aimer.
Il a d'ailleurs grossi, par l'imagination ou le souvenir, et les passions de ses personnages, et les angoisses de malheureuses femmes de la province négligées par leurs maris, et la sensualité qui se dégage des étés brûlants, des pins des Landes assoiffées, des tilleuls et des lilas odoriférants des jardins solitaires.
Mais ses meilleurs romans doivent une partie de leur force de suggestion à ces vignettes poétiques par lesquelles la nature sans cesse influe sur les personnages.

Sa sensibilité très vive fut accrue par la perte de son père, mort comme celui de Gide avant qu'il eût atteint sa dixième année.
La mère, laissée veuve avec cinq enfants, le futur romancier était le dernier, dut les élever avec quelque sévérité ; elle était fort pieuse, et le tableau que le romancier a souvent tracé de son enfance est austère.
Il a parlé de son "éducation janséniste", sans qu'il ait aimé beaucoup le jansénisme plus tard.
Il en connut surtout les Pensées de Pascal, mais y regretta un abus de rationalisme dans les choses de la foi.
Il fut élevé d'abord par les Frères maristes, puis au lycée.
Se sentant, en raison de sa sensibilité, qui le rendait très vulnérable, mal armé pour la vie active, il songeait surtout à étudier le passé, il prépara à Paris l'École des chartes et à s'exprimer par la plume.

À Paris, il découvrit avec exaltation la liberté de la vie de l'esprit, mais aussi combien était grande, comme elle le sera chez ses personnages, la nostalgie de la petite patrie familiale et provinciale abandonnée.
"Chaque écrivain venu de sa province à Paris est une Emma Bovary évadée", s'écria-t-il.
Il a, après sa cinquantième année, prodigué les confidences sur sa jeunesse, dans Commencements d'une vie en 1932, Mémoires intérieurs en 1959 et 1965, Le Jeune Homme en 1926, La Province en 1926, Bordeaux en 1926.
Mais c'est dans ses romans qu'avec la liberté procurée par la fiction, plus vraie que le vrai, il s'est le mieux révélé. Longtemps, l'adolescent gauche, rêveur, tourmenté à la fois par le besoin d'idéaliser l'amour et de le souiller, rebelle aux contraintes familiales et se croyant incompris, va réapparaître dans les romans de Mauriac.

Il écrivit d'abord des vers, tendres mais fiévreux, que quelques aînés, dont Barrès, remarquèrent :
"il est revenu à la poésie en vers, influencée par Maurice de Guérin, dans Le Sang d'Atys en 1940."
Mais pas plus que Chateaubriand ou Gide, il n'est devenu un maître de la forme poétique.
Ses premiers romans, deux écrits juste avant la guerre de 1914, à laquelle il prit part, le troisième et le meilleur, au titre significatif, La Chair et le sang, en 1920, sont encore gauches, tendus, trop inclinés vers le lyrisme.


Écrivain Chrétien et journaliste politique

Grand interprète de la vie provinciale, François Mauriac dépeignit aussi les souffrances du chrétien troublé par les questions du monde moderne. Contrastant avec son œuvre romanesque, son activité de journaliste révéla un polémiste au ton volontiers voltairien.

Son œuvre porte fortement la marque de son enfance et de sa jeunesse : d'abord par les images de Bordeaux et des landes girondines qui reviennent constamment sous la plume du romancier, du poète ou du journaliste ; ensuite, et plus profondément, à cause de l'éducation chrétienne marquée de puritanisme, on a pu parler de jansénisme que le jeune François a reçue. C'est alors que s'est forgée la hantise du "péché de la chair" qui marque l'œuvre du romancier.
Des jeunes gens troublés et parfois troubles, l'Enfant chargé de chaînes, 1913 ; le Baiser au lépreux, 1922 ; Genitrix, 1923), des couples déchirés, le Désert de l'amour, 1925 ; le Nœud de vipères, 1932), des femmes révoltées et humiliées dans Thérèse Desqueyroux, 1927 témoignent de l'importance d'une sexualité partout présente et refusée comme le signe d'une dramatique misère humaine.
Cependant, chez cet écrivain chrétien, un attachement tout païen à la terre éclate dans les poèmes d'Orages en 1925 ou du Sang d'Atys en 1940.
De même, on devine, derrière certaines lignes proches de la révolte de Souffrances du chrétien en 1928, les manifestations d'une crise morale et religieuse.
Bonheur du chrétien en 1929 traduit la fin de la crise et marque la "conversion" de Mauriac.
Après une grave opération à la gorge en 1932, Mauriac, qui s'est cru perdu, est élu à l'Académie française en 1933 : s'ouvre alors une carrière prestigieuse où les succès se suivent.
Délaissant les romans centrés sur un drame individuel, Mauriac, sous l'influence d'œuvres contemporaines plus complexes, tente de diversifier et de multiplier les personnages dans les Anges noirs en 1936 et surtout les Chemins de la mer en 1939.
Malgré les critiques de Sartre, qui, en 1939, lui reproche d'intervenir trop souvent dans le destin de ses personnages et de ne pas leur laisser la liberté indispensable à l'indétermination de la créature romanesque, Mauriac reste toujours moins préoccupé des questions de technique romanesque que des répercussions spirituelles de ses écrits.
La Pharisienne en 1941, le Sagouin en 1951, Galigaï en 1952, l'Agneau en 1954" complètent une œuvre qui reste centrée sur les problèmes du péché et de la grâce.
En 1952, le prix Nobel de littérature est non seulement une consécration, mais le point de départ d'une nouvelle carrière : Mauriac, qui ne connaît pas au théâtre le succès escompté evec Asmodée, en 1937 ; et les Mal-aimés, en 1945 ; Passage du Malin, en 1947 ; le Pain vivant, en 1950, se voue désormais presque entièrement à une œuvre journalistique, souvent polémique et politique.
En fait, dès avant 1914, en réaction contre le conservatisme étroit et l'antidreyfusisme de son milieu, l'écrivain avait été touché par le catholicisme libéral du Sillon, le mouvement de Marc Sangnier.
Après 1920, au contraire, les articles de l'Écho de Paris traduisaient la pensée d'un homme de droite.
Il avait fallu la guerre civile espagnole et l'influence spirituelle exercée par les prêtres et les laïcs de l'Action catholique , autour des hebdomadaires Sept et Temps présent, entre 1937 et 1940, pour que Mauriac s'engageât peu à peu aux côtés des catholiques libéraux.
Le Cahier noir, publié dans la clandestinité en 1943 aux Éditions de Minuit, sous le pseudonyme de Forez, révèle une pensée politique nuancée, mais intransigeante sur la défense des droits de l'homme.
La crise marocaine en 1953, puis l'engagement aux côtés du général de Gaulle marquent le Bloc-Notes, publié successivement dans la Table ronde, l'Express puis le Figaro littéraire.
Jamais Mauriac n'a eu autant de lecteurs. Redoutable polémiste, il égratigne, voire déchire les médiocres de la vie politique.
Lorsque les crises marocaine puis algérienne sont réglées, le vieil homme tourne plus facilement sa pensée vers le passé ou vers la réflexion spirituelle : le Bloc-Notes s'élargit en méditation.
Plus qu'un journaliste, Mauriac est alors tantôt poète, tantôt philosophe dans des pages où le lyrisme affleure.
On retrouve alors les thèmes que la réflexion mauriacienne nourrit depuis les origines dans un certain nombre d'ouvrages théoriques ou autobiographiques comme le Journal en 1934-1950, les Mémoires intérieures 1959 et les Nouveaux Mémoires intérieurs en 1965, ou cette sorte de bilan spirituel que constitue Ce que je crois en 1962.
On peut mesurer dans ces ouvrages l'importance affective de Maurice Barrès, qui accueillit et lança le jeune poète des Mains jointes en 1909 et surtout la permanence de l'influence pascalienne, qui date des années de collège et ne se démentit jamais ' Je doute que sans lui je fusse demeuré fidèle '.
Pascal apparaît à Mauriac comme le modèle de l'homme de foi, d'une foi vécue plus que traduite intellectuellement dans des raisonnements.
Le Dieu de Pascal comme celui de Mauriac est le Christ vivant, souffrant et ressuscité, et non le Dieu des philosophes et des savants.
Non que Mauriac prêche le quiétisme : il est au contraire convaincu de l'importance des débats théologiques, mais il sait que sa vocation l'appelle à méditer sur des situations concrètes plus que sur des idées.
Dans cette perspective, les romans peuvent apparaître comme des sortes d'expériences qui poussent à l'extrême des situations réelles en les portant au point où elles éclatent en drames porteurs d'une signification philosophique. En fait, la seule question qui passionne vraiment Mauriac est de savoir comment la grâce parvient à triompher du péché le plus invétéré.
Mais ne serait-ce pas aussi sous l'influence du Pascal janséniste que le péché apparaît comme si puissant et la grâce si peu agissante parfois sur des créatures vouées à la médiocrité et à une quasi-mort spirituelle ?
La fidélité au Christ passe par la fidélité à l'Église, mais elle nourrit surtout la foi, l'espérance et la charité, dont retentissent de plus en plus les pages de Mauriac et qu'il résume dans les dernières lignes de Ce que je crois : "Tu existes puisque je t'aime... Croire, c'est aimer."

Ses romans

Le désert de l'amour
En 1922 et 1923, coup sur coup, parurent deux courts romans, condensés, linéaires, creusant l'analyse vivante de quelques âmes tourmentées et implacables dans leur peinture de la laideur morale et de l'égoïsme des familles :
Le Baiser au lépreux en 1922 et Génitrix en 1923.
Dans le premier, Jean Péloueyre, provincial riche, mais laid, affreusement timide, épouse, sur les conseils du curé et parce que sa richesse fait de lui "un bon parti ", une fille robuste et simple, Noémi.
Il sait vite qu'elle ne donne, à ce " lépreux qu'il croit être, ses baisers que par devoir ou par pitié.
En vain médite-t-il les écrits de Nietzsche pour apprendre à devenir un fort avec volonté de puissance.
Il analyse incessamment sa faiblesse et meurt, se disant presque que sa jeune épouse sera enfin soulagée et libre. Génitrix trace l'image d'une mère, veuve, dominatrice, qui veut maintenir son fils unique en dehors du mariage, pour le conserver tout à elle, entouré de soins qui l'emprisonnent.
Il se marie cependant. Et sa femme, malade, est en train de mourir, abandonnée, dans une chambre isolée de la maison, détestée par la belle-mère, car elle est l'intruse. Une fois disparue cependant, elle sera regrettée du fils bourrelé de remords, intérieurement révolté contre cet égoïsme paysan de sa mère qu'il sait porter aussi en lui.

D'autres œuvres bien connues allaient suivre : Le Désert de l'amour en 1925, peut-être la meilleure réussite technique de Mauriac. Il y use, comme il l'a souvent fait, de la technique de la rétrospection.
Un incident rappelle soudain à Raymond Courrèges, habitué des boîtes de nuit à Paris, son passé d'adolescent bordelais, sa solitude au sein de sa famille où il se croyait incompris et, par timidité, ne savait se faire comprendre.
Maladroitement et brutalement, il avait alors essayé de violer une femme de réputation douteuse, Maria Cross, que son père, médecin naïf et bon, idéalisait.
Elle l'avait repoussé et vexé dans sa jeune fierté. Tout ce passé et la figure pathétique de son père revivent dans ce long récit. Mauriac, grand admirateur de Proust bien qu'il reproche à son œuvre d'avoir laissé béant le trou immense que devrait remplir Dieu, était passé maître dans l'art de remémorer le passé et de l'enchâsser dans le présent.

Deux autres romans de sa quarantaine sont de grandes œuvres : Thérèse Desqueyroux en 1927 et Le Nœud de vipères en 1932.
Le premier, utilisant avec plus de virtuosité encore la technique de la rétrospection, est le dramatique monologue d'une épouse plus fine et plus intelligente que son mari, propriétaire campagnard plein de suffisance ; elle se laisse entraîner à tenter de l'empoisonner, est jugée et, par égard aux convenances familiales, acquittée.
Mise au ban de la famille, contrainte d'abandonner sa petite fille, elle ne se repent point, mais va habiter seule à Paris. Elle y vit en névrosée malheureuse ; dans une nouvelle, "Thérèse chez le docteur", et un autre roman, "La Fin de la nuit" en 1935, Mauriac est revenu à ce personnage maladif et attachant, l'un des rares protagonistes de ses romans qu'il s'est résigné à ne pas convertir in extremis.
Le Nœud de vipères est celui d'une famille avare et haineuse, et plus encore le réseau de méchanceté, de dépit, d'endurcissement dans l'égoïsme et la poursuite des biens matériels d'un riche avocat, Louis.
Il se meurt d'angine de poitrine, note dans un journal atroce de vérité le progrès de sa haine envers sa femme, ses enfants, la religion hypocrite et lui-même. Mais son " effrayante lucidité" ainsi que la quête d'un amour vrai ouvrent une voie à la grâce qui le mène à la conversion.

Controverses

Sept ou huit autres romans de Mauriac, tous reprenant un décor, une intrigue, un leitmotiv analogues, n'atteignent que par moments à la beauté de ces réussites.
La Pharisienne en 1941, atroce peinture d'une dévote rigide et privée de charité, que l'on prendrait pour une attaque contre la religion si Mauriac n'avait tant proclamé sa foi catholique, a quelques parties saisissantes.
Sartre a, dans un célèbre article, pris à partie, non sans injustice, La Fin de la nuit, pour reprocher à l'auteur de priver ses personnages de toute liberté.
Il est vrai que Mauriac a toujours été confronté au dilemme du romancier catholique : éviter le doucereux et la prédication des romanciers dits bien-pensants, peindre le mal et le vice dans leur noire vérité, ne pas fausser la vie, mais par là même risquer de rendre la chair, la passion et le mal pleins d'attraits pour le lecteur peu averti.
Aussi l'orthodoxie de Mauriac a-t-elle été mise en doute par bien des catholiques, qu'il a effarouchés, même après qu'il eut été élu à l'Académie française en 1933, décoré par les gouvernements successifs du pays, consacré par le prix Nobel en 1952 et qu'il eut prodigué depuis 1945 ses éloges éperdus au général de Gaulle.
Néanmoins, avec Bernanos et, par moments seulement, Julien Green, Mauriac représente, dans le roman de ce siècle, le sommet de la littérature catholique, hardie et jeune.
Un autre reproche a été adressé à Mauriac, dont il n'a eu nulle peine à se justifier : celui de monotonie.
Car non seulement le décor, mais les thèmes, les personnages, la technique ne varient guère d'un roman à l'autre, pas plus qu'ils ne le font chez l'auteur qu'il met au-dessus de tout autre, Racine.
Mauriac s'est expliqué sur son art dans divers écrits sur le roman, dans son Journal, dans ses Mémoires et dans de nombreux articles de journal et de revue : depuis 1951, sa veine de romancier s'étant tarie, le théâtre ne lui ayant qu'à demi réussi, il est devenu un journaliste et un moraliste, parfois bavard.
Il a du moins réfléchi assidûment sur son art : il n'a pas caché que son premier souci avait été de rester fidèle à son monde intérieur, de dépeindre le monde qu'il connaissait le mieux et les obsessions ou souvenirs qui l'habitaient, et, acceptant ses limites, de renouveler son mode d'expression, mais non ses sujets.
Il est le plus grand en effet dans sa peinture des Mal-Aimés, c'est le titre d'une de ses pièces de 1945, et de l'amour où la chair lutte contre l'esprit, mais aussi où l'esprit, selon une formule de saint Paul, convoite contre la chair.
L'amour, même quand il devrait être ennobli par le sacrement du mariage et par la progéniture, est présenté par le romancier sous un jour lugubrement féroce : femmes solitaires en vain amoureuses de jeunes hommes égoïstes, adolescents traînant dans la boue l'objet de leurs désirs, hommes mûrs endurant les tortures de la jalousie, démons de midi et du soir et démons plus avides encore de l'adolescence, " cherchant qui dévorer ".
Cette insuffisance de l'amour humain préserve les personnages de Mauriac de la satisfaction dite bourgeoise : le sentiment de l'incomplet de leur existence leur fait enfin désirer le seul vrai amour, celui de Dieu.

La vertu d'engagement

"De sorte que bien loin qu'ils aient le droit de fuir les hommes en Dieu, il leur est enjoint de retrouver Dieu dans les hommes. Qu'ils le cherchent d'abord et qu'ils le trouvent dans ceux qui souffrent persécution pour la justice, chrétiens ou païens, communistes ou juifs, car de ceux-ci, la ressemblance avec le Christ est en raison directe des outrages qu'ils endurent : le crachat sur la face authentifie cette ressemblance."
Ce texte du Cahier noir – manifeste clandestin paru sous l'occupation allemande – détient la clé d'une bonne part de l'aventure mauriacienne : l'inflexion progressive du grand bourgeois vers la gauche comme celle de l'écrivain d'imagination vers le journalisme politique, jusqu'au pamphlet.
La révolution espagnole de 1936 en fut le point de départ ; la guerre de 1940 détermina Mauriac à l'engagement qui prit de plus en plus le meilleur de son talent.
D'abord dans son Journal, ensuite au fil du"Bloc-Notes" qui passa de l'Express au Figaro littéraire, il assuma les soucis majeurs de la France et du monde et y prit résolument parti avec autant de courage que de générosité.
Polémiste redouté, il ne s'est pas montré indulgent pour les jeunes romanciers dont les tentatives allaient à l'encontre de sa technique, paraissaient renoncer à toute action nouée, à toute exploration d'un caractère, à toute poésie dans l'art romanesque. Il n'était pas tendre non plus pour les politiciens de gauche, et moins encore pour ceux de droite, qui lui semblaient incapables de reconnaître, ou de proclamer, que la France recherchait une grandeur morale et l'avait trouvée en de Gaulle. Mais, si ses mots à l'emporte-pièce et ses jugements critiques ne manquaient pas de venin, ils savaient aussi faire place à la bonté et à la compassion.
Si Mauriac a ainsi dépeint un enfer plutôt qu'une antichambre du Paradis, il exerce, moins par la noirceur de ses sujets que par la nostalgie de pureté et de poésie qui est partout en son œuvre, une fascination sur ses lecteurs.
Il a souvent répété que le roman de son époque – et il pensait sans doute au sien – ne se sauvait de la médiocrité que par la poésie qu'il exprimait.
Cette poésie éclate dans le cadre d'une technique sobre et classique, et donne à la prose de Mauriac une vibration et une richesse qui le mettent, avec Malraux et Bernanos, aussitôt après Proust parmi les romanciers modernes de la France.

Fin de vie

Son dernier roman, Un adolescent d'autrefois reçoit un accueil enthousiaste de la critique en 1969. Une suite, Maltaverne, demeure inachevée et sera publiée de manière posthume en 1972.

François Mauriac meurt à Paris le 1er septembre 1970 et est enterré au cimetière de Vémars (Val-d'Oise).

Ses œuvres complètes ont été publiées en douze volumes entre 1950 et 1956. Une édition complète de ses œuvres romanesques et théâtrales a été éditée dans la collection de la Bibliothèque de la Pléiade, en quatre volumes, parus entre 1978 et 1985 ; elle est suivie en 1990 d'une édition de ses œuvres autobiographiques.
Claude Mauriac et Jean Mauriac, ses fils, et Anne Wiazemsky, sa petite-fille, sont aussi écrivains. Luce Mauriac, sa fille, a publié un roman en 2008.
Le domaine de Malagar, à Saint-Maixant, qui fut le lieu de la fin de l'adolescence et que l'écrivain reçut en 1927 à la suite d'un partage familial, est aujourd'hui propriété du Conseil régional d'Aquitaine. Cette maison d'écrivain, transformée en centre culturel, est désormais ouverte à la visite.

Révélations sur l'homosexualité de Mauriac

S'appuyant sur des sources écrites, l'ouvrage biographique de Jean-Luc Barré s'attache au fait que François Mauriac aurait notamment brûlé de passion — dont la nature exacte n'est pas précisée — pour un jeune écrivain, diplomate suisse, Bernard Barbey22,23.
L'information selon laquelle Mauriac aurait vécu des passions, probablement platoniques pour des jeunes gens avait été donnée dans une interview de Daniel Guérin publiée dans le livre de Gilles Barbedette et Michel Carassou, Paris gay 1925 publié aux Presses de la Renaissance.
Daniel Guérin est venu confirmer cette information, vérifiable dans la correspondance qu'il a reçue de Mauriac, conservée à la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine, en contradiction avec la volonté de l'écrivain de la récupérer et de la détruire.

Au cours de sa vieillesse combative, courageusement acceptée, il sut retrouver également son inspiration romanesque d'antan.
Son ultime roman, Un adolescent d'autrefois, publié en 1969, ne renouvelle ni le cadre ni les thèmes de son œuvre antérieure.
Mais il est frémissant encore de vie et il constitue comme le testament d'un romancier qui, à plus de quatre-vingts ans, comprenait encore la passion, les remords et les conflits entre la chair et les aspirations de l'âme.

L' Œuvre

Romans, nouvelles, récits
1913 : L'Enfant chargé de chaînes
1914 : La Robe prétexte
1920 : La Chair et le Sang
1921 : Préséances
1921 : Dialogue d'un soir d'hiver
1922 : Le Baiser au lépreux
1923 : Le Fleuve de feu
1923 : Genitrix
1924 : Le Mal
1925 : Le Désert de l'amour (Grand prix du roman de l'Académie française, 1926)
1927 : Thérèse Desqueyroux
1928 : Destins
1929 : Trois récits : Coups de couteau, 1926 ; Un homme de lettres, 1926 ; Le Démon de la connaissance, 1928
1930 : Ce qui était perdu
1932 : Le Nœud de vipères
1933 : Le Mystère Frontenac
1935 : La Fin de la nuit
1936 : Les Anges noirs
1938 : Plongées comprenant Thérèse chez le docteur, 1933 ; Thérèse à l'hôtel, 1933 ; Le Rang ; Insomnie ; Conte de Noël
1939 : Les Chemins de la mer
1941 : La Pharisienne
1951 : Le Sagouin
1952 : Galigaï
1954 : L'Agneau
1958 : Le Fils de l'homme
1969 : Un adolescent d'autrefois
1972 : Maltaverne (posthume)

Théâtre

1938 : Asmodée
1945 : Les Mal-aimés
1947 : Passage du malin
1951 : Le Feu sur la terre

Poésie


1909 : Les Mains jointes
1911 : L'Adieu à l'adolescence
1925 : Orages
1940 : Le Sang d'Atys
Essais, recueils d'articles
1919 : De quelques cœurs inquiets (Société littéraire de France)
1926 : La Province (Hachette ; réédition Arléa, 1988)
1928 : Le Roman (L'artisan du livre)
1928 : La Vie de Jean Racine (rééd. Paris, Perrin, 1999)
1929 : Dieu et Mammon
1931 : Souffrances et bonheur du chrétien
1933 : Le Romancier et ses personnages
1936 : La Vie de Jésus (rééd. Seuil, 1999)
1945 : La Rencontre avec Barrès (rééd. La Table ronde, 1994)
1981 : Souvenirs retrouvés - Entretiens avec Jean Amrouche, éd. Fayard/INA
1993 : Bloc-notes, Seuil, 5 vol.
1996 : Mozart et autres écrits sur la musique, éd. Encre marine
2000 : La Paix des cimes : chroniques, 1948-1955, éd. Bartillat
2004 : D'un Bloc-notes à l'autre : 1952-1969, éd. Bartillat
2008 : Téléchroniques, 1959-1964, éd. Bartillat
Mémoires
1943 : Le Cahier noir
Publié sous le nom de Forez, qui était son pseudonyme, en clandestinité, par les éditions de Minuit
1948 : Journal d'un homme de trente ans (extraits) Editions Egloff
1959 : Mémoires intérieurs
1962 : Ce que je crois
1964 : Nouveaux mémoires intérieurs
1967 : Mémoires politiques

Autobiographie

1925 : Bordeaux, version première des Commencements d'une vie (L'Esprit du Temps, 2009)
1932 : Commencements d'une vie
1953 : Écrits intimes
Scénario
1955 : Le Pain vivant (scénario et dialogue du film Le Pain vivant sorti en 1955)
Œuvres complètes
Œuvres romanesques et théâtrales complètes, dirigées par Jacques Petit, éditions Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1986-1991, 4 vol.
Œuvres autobiographiques complètes, dirigées par François Durand, éd. Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1990.
Préface
1958 : La Nuit d'Elie Wiesel

Prix et distinctions

Grand prix du roman de l'Académie française (1926)
Membre de l'Académie française (1933)
Prix Nobel de littérature (1952)
Grand-croix de la Légion d'honneur (1958)

Hommages

En 1994, l'État et la ville de Paris rendent hommage à l'écrivain en baptisant de son nom le quai François-Mauriac, aux pieds de la Bibliothèque nationale de France, dont c'est l'adresse officielle, dans le 13e arrondissement.
Par ailleurs, deux prix littéraires portent son nom :
Le prix François-Mauriac de l'Académie française
Le prix François-Mauriac de la Région Aquitaine



Liens

http://youtu.be/rzXRTZe06jM Pivot parle de Cams et Mauriac
http://youtu.be/yCMcJdbchhA Rencontre avec François mauriac
http://youtu.be/YvPIlc0G8IY Biographie de F. Mauriac
http://youtu.be/IqxwzU0bodo Thérèse Desqueyroux (extrait du film)


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Posté le : 01/09/2013 01:13

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Truman Capote
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Le 25 Août 1984 meurt Truman Garcia Capote


Écrivain américain, américain auteur de romans, nouvelles, reportages, portraits, récits de voyages, souvenirs d'enfance, ainsi que de deux adaptations théâtrales d'écrits antérieurs et de deux scénarios de films. Capote était un personnage flamboyant à la "voix de chou de Bruxelles ", d'après son ami Gore Vidal, cultivant l'excentricité et un certain goût du scandale, comme en témoigne cet autoportrait sulfureux :
"Je suis un alcoolique. Je suis un drogué. Je suis un homosexuel. Je suis un génie."
Tour à tour adulé et vilipendé, il a été l'une des figures les plus controversées de son époque.
S'il a fait son entrée en littérature à l'âge de dix-neuf ans, avec ses nouvelles, c'est en tant que précurseur d'un genre nouveau, mêlant fiction et journalisme, qu'il est passé à la postérité.


Sa vie

Une enfance sudiste

Né Truman Streckfus Persons à La Nouvelle-Orléans le 30 septembre 1924, il grandit dans l'Alabama au milieu de trois vieilles tantes célibataires, après la séparation de ses parents. Il rejoint sa mère sur la côte est, lorsqu'en 1932 celle-ci épouse Joe Capote, qui adopte légalement Truman.

Ses parents, Arch Persons et Lillie Mae, se séparent quelques années après leur mariage.
Sa jeune mère le confie à ceux-là même qui l'avaient recueillie orpheline : il est élevé à Monroeville en Alabama par ses trois cousines et leur frère, tous quatre célibataires.
Son enfance est heureuse mais il ressentit toujours douloureusement cet abandon par ses parents.
A Monroeville, il a pour amie d'enfance Harper Lee qui le décrira dans son roman To Kill a Mockingbird : "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur" comme un "Merlin l'enchanteur de poche", sous les traits du personnage de Dill.
En 1932, sa mère qui s'est remariée à un Cubain, Joseph Capote, l'emmène vivre à New York.
Son beau-père l'adopte légalement et Truman Persons devient Truman Capote.
Il fait ses études à la Dwight School de New York ainsi qu'à la Greenwich High School à Greenwich dans le Connecticut où l'un de ses professeurs, Catherine Wood, l'encourage à écrire.
Diplômé d'un collège privé du West Side, il quitte définitivement à 17 ans le système scolaire et travaille de 1941 à 1945 comme pigiste au New Yorker ; en juin 1945, à l'époque de la publication de Miriam dans le magazine Mademoiselle, il rencontre William S. Burroughs : Mademoiselle et Harper's Bazaar sont les deux magazines qui publient ses premières nouvelles ; le New-Yorker les juge trop audacieuses.
Les directeurs littéraires de ces magazines, Mary Louise Aswell pour Harper's Bazaar et George Davis pour Mademoiselle, des personnages influents de l'époque, détectèrent avant tous les autres le talent exceptionnel du jeune homme.
La vie de famille chez les Capote est orageuse, les crises d'éthylisme de sa mère sont fréquentes et violentes.
En 1946, le jeune homme trouve refuge à Yaddo, une résidence qui accueille écrivains, musiciens et artistes, dans l'État de New-York. Il y rencontre Newton Arvin, un professeur de lettres de grande valeur.
Pendant les deux ans que dure leur liaison, il passe chaque week-end auprès de celui qui lui donnera la formation qu'il n'avait pas reçue à l'université. Il lui rendra plus tard hommage en disant qu' "Arvin a été son Harvard ";

Premières publications

Il quitte l'école très tôt et, dès 1942, travaille au New Yorker. Il publie alors plusieurs nouvelles dans Mademoiselle et Harper's Bazaar, avant de signer un contrat avec la maison d'édition Random House pour un premier roman. Ce sera Les Domaines hantés, qui suscite une vive controverse à sa sortie en 1948.
La même année, Capote rencontre Jack Dunphy, un écrivain de dix ans son aîné dont il partagera la vie pendant plus de vingt ans.
Entre 1949 et 1959, les deux hommes parcourent l'Europe, s'établissant en Italie et en Sicile pour de longues périodes d'écriture.
En 1951 sort La Harpe d'herbes, un court roman dont Capote tirera une pièce l'année suivante.
Parallèlement, il écrit des essais et des scénarios, dont Plus fort que le diable pour John Huston.
Mais c'est Petit Déjeuner chez Tiffany qui lui ouvre en 1958 les portes de la notoriété, et plus encore De sang-froid, qui devient en 1966 un best-seller international.

Capote a toujours aimé les mondanités. Ainsi, après le succès de De sang-froid, il convie toutes les célébrités de l'époque à un bal masqué en noir et blanc à l'hôtel Plaza.
Parmi ses amis, on compte, entre autres, Harper Lee, Carson McCullers, Gore Vidal, sans oublier Jane et Paul Bowles, Tennessee Williams, Norman Mailer, mais également Cecil Beaton, Andy Warhol, ou Marilyn Monroe et Jackie Kennedy.
Cependant, après De sang-froid, Capote amorce, sans le savoir, un lent et douloureux déclin. Avec son roman à clé Prières exaucées, il ambitionne d'être le Proust américain.
Mais, dès la publication des premiers extraits, il tombe en disgrâce auprès de la haute société, et ne terminera jamais l'ouvrage.
Il collectionne alors les jeunes amants, sombre dans l'alcool et la dépendance aux médicaments, souffre d'hallucinations et, après plusieurs séjours prolongés à l'hôpital, il s'éteint à Los Angeles le 25 août 1984.
La Traversée de l'été, qui serait en fait son tout premier roman, a fait l'objet d'une récente publication, après avoir resurgi lors d'une vente aux enchères, vingt ans après la mort de l'écrivain.

Un nouveau genre romanesque

Dans ses premiers récits, romans et nouvelles confondus, Truman Capote s'emploie, plus ou moins inconsciemment, à raviver les fantômes de son enfance. C'est le cas des Domaines hantés, qui est de son propre aveu "une tentative pour exorciser les démons".
Dans ce roman d'initiation aux résonances autobiographiques, Joel Harrison Knox, un adolescent parti en quête de son père dans une plantation délabrée de l'Alabama, éprouve une attirance grandissante pour un cousin aux mœurs décadentes. L'éveil à l'homosexualité est évoqué par des biais métaphoriques et, si certains critiques comparent déjà Capote à Faulkner ou à Carson McCullers, d'autres crient au scandale.
Mais plus encore qu'à la tradition romanesque du Vieux Sud, Capote emprunte au genre gothique, tout en faisant la part belle au monde imaginaire de l'enfance et à l'introspection.
Dans un article où il prenait la défense de Capote, Alberto Moravia faisait l'éloge de ce qu'il appelait sa "fantaisie subjective".
Cette prédilection pour des personnages marginaux se poursuit en 1951 avec La Harpe d'herbes, qui met en scène un jeune orphelin et deux vieilles femmes qui trouvent refuge dans un arbre.
Il est ici question de solitude, d'aliénation, de la perte de l'innocence, de la complexité des rapports humains, mais aussi d'amour et de rédemption.
Petit Déjeuner chez Tiffany instaure, en revanche, un changement radical de décor.
L'atmosphère sclérosante du sud s'efface devant la frivolité de la vie new-yorkaise, en la personne d'une demi-mondaine, Holly Golightly, immortalisée en 1961 par Audrey Hepburn dans le film de Blake Edwards, Diamants sur canapé.
L'écriture de Capote se fait plus épurée, et Norman Mailer voit dans l'ouvrage un futur "texte classique".

Slim Aarons, Truman Capote dans son appartement de Brooklyn Heights, 1958, tirage couleur. Le romancier américain pose chez lui, l'année de la publication de Breakfast at Tiffany's, pour le photographe des célébrités artistiques et mondaines.
Crédits: Hulton Getty Consulter
En 1956, avec Les muses parlent, qui relate la tournée en Union soviétique d'une troupe de chanteurs noirs interprétant Porgy and Bess, Capote s'essaie à un genre nouveau pour lui, la chronique.
Il s'intéresse depuis longtemps au rapport entre fiction et journalisme, et met au point une technique narrative inédite qu'il expérimentera plus tard avec De sang-froid : récit véridique d'un meurtre multiple et de ses conséquences.
L'ouvrage s'inspire d'un fait divers sordide – le meurtre de la famille Clutter dans une ferme isolée du Kansas, en novembre 1959. Pendant plusieurs années, Capote va mener une véritable enquête de terrain, interroger la police et les témoins, et même entretenir une relation privilégiée avec Perry Smith, l'un des deux assassins.

De sang-froid retrace scrupuleusement les dernières heures des victimes et le parcours des criminels, depuis le meurtre proprement dit jusqu'à la peine capitale.
Certains jugeront l'ouvrage immoral, car l'auteur s'abstient de tout jugement et, à travers l'étude psychologique des meurtriers, il confronte en fait deux Amériques : la vie rangée d'une petite communauté rurale méthodiste du Kansas et celle, désaxée, de deux inadaptés sociaux qui ne sont peut-être pas entièrement responsables de leurs actes.
De sang-froid inaugure un genre littéraire inédit jusqu'alors : le nonfiction novel, c'est-à-dire le roman objectif ou véridique, où la technique romanesque est au service du réel, tandis que le roman se fait document(aire).

Avec une œuvre insolite, hors du commun, allant du plus classique au plus expérimental, explorant et transcendant les frontières entre les genres, Truman Capote apparaît comme l'enfant terrible des lettres américaines, " aussi libre et sauvage qu'un coyote ", – pour reprendre les mots qu'il prête à Perry Smith dans De sang-froid, son chef d'œuvre absolu.
Ses lettres révèlent un écrivain obsédé par ce roman, qui le rendra mondialement célèbre : "Je suis revenu à Verbier, écrasé par le poids de ce livre interminable ".
Parmi ses amis de toujours, apparaissent de nouveaux correspondants : Alvin Dewey, l'inspecteur chargé de l'enquête sur l'assassinat de la famille Clutter, sa femme et leur fils. Cette relation intéressée dans ses débuts par le besoin de collecter des informations se transforme peu à peu en une amitié touchante : "Chers amis de cœur".
Sa correspondance le montre encore soucieux de la parution du livre enfin achevé, qui est suspendue au verdict de la Cour Suprême : "Reçu ton télégramme : Appel rejeté. Mille mercis".
Il écrit à Cecil Beaton, longtemps un ami proche : "Perry et Dick ont été pendus mardi dernier. J'étais là parce qu'ils me l'avaient demandé. Ce fut une épreuve atroce. Dont je ne me remettrai jamais complètement".
Ces quelques mots étaient prophétiques. Truman Capote ne s'est jamais remis de ce livre et de cette plongée dans la réalité la plus noire.
Pour William Styron : "C'était un maître incontesté du verbe... Il avait le don de faire chanter et même danser les mots, de provoquer le rire, de vous donner le frisson, vous toucher le cœur".

Truman Capote au cinéma

Truman Capote, film réalisé en 2005 par Bennett Miller, montre l'écrivain au travail pendant la période d'enquête et d'écriture de De sang froid et vaut à Philip Seymour Hoffman l'oscar du meilleur acteur.
À peine un an plus tard, un autre film revient sur le même sujet, Infamous, en français : "Scandaleusement célèbre", de Douglas McGrath, avec Toby Jones dans le rôle de l'écrivain. La sortie coup sur coup de ces films montre à quel point Truman Capote reste actuel et controversé.
Le romancier apparaît lui-même à l'écran en 1976 aux côtés de Peter Sellers, Alec Guinness et Peter Falk dans le film de Robert Moore : Un cadavre au dessert : "Murder by death".

Le déclin

Il vécut pendant plus de trente ans avec Jack Dunphy , acteur puis écrivain qu'il avait rencontré en 1948.
La quarantaine passée, il mena une vie mondaine.
Il compta parmi ses amis : Babe Paley, la grande amitié amoureuse de sa vie qui se brise en octobre 1975, Harper Lee, l'amie de toujours, auteur en 1960 du best-seller : To Kill a Mockingbird; on y voit Capote enfant déjà grand raconteur d'histoires ; adapté au cinéma sous le titre "Du silence et des ombres", Newton Arvin , son professeur en littérature, Carson McCullers, Tennessee Williams, Norman Mailer, Marilyn Monroe, Lee Radziwill, sœur de Jacqueline Kennedy, Andy Warhol, qui fut à l'origine du dernier livre qu'il publia de son vivant : Musique pour caméléons, Cecil Beaton, photographe officiel de la famille royale britannique, selon Gerald Clarke, "Beaton adorait Capote autant que Capote l'adorait ", etc. Ses inimitiés sont également fameuses, pour Gore Vidal notamment.
Après la publication de De sang-froid en 1966, les années qui suivent sont une lente descente vers l'abîme même s'il écrit encore quelques nouvelles.
Son biographe américain le décrit déçu tant par sa carrière que par sa vie personnelle et de plus en plus dépendant de l'alcool et de la drogue, effectuant des cures de désintoxication sans succès.
La publication dans Esquire, en octobre 1975, d'un chapitre du roman auquel il travaille précipite la catastrophe.
La Côte basque, 1965, un des trois fragments brillants et outranciers du roman, s'inspire de la relation douloureuse entre deux de ses amis, William S. Paley et Babe Paley, ce qui vaut au romancier d'être abandonné par tous ses amis et ostracisé par la haute société new-yorkaise.
Ce roman, Prières exaucées, devait être son chef d'œuvre.
Truman Capote publie en 1977 son dernier livre, Musique pour caméléons, un recueil d'articles et de nouvelles. Il meurt à Hollywood en 1984 d'une surdose médicamenteuse.


La découverte d'un inédit

En 2004 à l'occasion d'une vente aux enchères chez Sotheby's réapparaît miraculeusement un ancien "tapuscrit" rédigé en 1943. Alan U.Schwartz, avocat et ami de Truman Capote a raconté cette découverte :
"Une personne anonyme prétendait que son oncle avait occupé un appartement en sous-sol dans le quartier de Brooklyn Heights où Truman avait vécu aux alentours de 1950. Selon elle, Truman s'en était absenté puis avait décidé de ne plus revenir. Il avait prié le concierge de l'immeuble de vider l'appartement et de mettre tous ses effets sur le trottoir pour que la voirie les ramasse. À en croire ce témoignage, l'oncle, gêné à l'idée de voir ces affaires partir à la poubelle, avait décidé de tout garder. Cinquante ans plus tard, à la mort du dit oncle, un membre de sa famille avait hérité de ces papiers et voulait à présent les vendre."
Ce roman de jeunesse que Truman Capote pensait avoir détruit a finalement été publié en octobre 2005 aux États-Unis et en septembre 2006 en France.
La traversée de l'été, "pièce manquante d'une œuvre remarquable" selon le critique Alexandre Fillon, "comédie tragique new-yorkaise" selon l'écrivain Charles Dantzig est un superbe récit qui montre que ce jeune auteur de dix-neuf ans possède déjà une belle maîtrise de son art.
Grady McNeil, jeune fille insouciante de la haute bourgeoisie new-yorkaise, voit partir sans déplaisir ses parents pour un long voyage en Europe.
Son ami d'enfance, le fantasque et fidèle Peter Bell lui tiendra compagnie. Grady profitera de cette liberté pour vivre un amour passionné cet été-là avec Clyde Manzer, un jeune gardien de parking assez rude dont les parents de la jeune fille ignorent l'existence.
Les thèmes de ce court roman sont universels : l'amour, l'amitié, la difficulté d'affronter les différences sociales, l'insouciance et le besoin d'absolu des adolescents.
Ses personnages sont attachants et la montée dramatique du récit ménage une fin abrupte et inattendue.

La publication de sa correspondance

Gerald Clarke, spécialiste de l'œuvre de Capote, édite en 2004 sa correspondance, traduite en français sous le titre Un plaisir trop bref - titre extrait d'une lettre de l'écrivain à Robert Linscott , "Quel plaisir trop bref que votre lettre...".
Dans son introduction aux lettres de Truman Capote, Gérald Clarke écrit :
"Il s'y livre avec naturel. Lui, qui polissait et repolissait la moindre phrase parue sous sa signature, traquant parfois pendant des heures le mot juste, écrivait ses lettres à la diable, comme s'il craignait toujours de rater la dernière levée."
Cette correspondance couvre, de 1936 à 1982, plus de quarante ans d'existence, constituant ainsi une véritable et inespérée autobiographie épistolaire.
Elle commence par une lettre cinglante écrite à douze ans à son père, Arch Persons :
Comme tu le sais, mon nom a été changé de Persons en Capote, et je te serais reconnaissant de ne plus m'appeler que Truman Capote, car tout le monde désormais me connaît sous ce nom-là .
Mais dans l'ensemble, sa correspondance est drôle et pleine des commérages qu'il affectionnait :
"J'ai vécu d'étranges aventures ces dernières semaines, auxquelles sont mêlés John Huston et Humphrey Bogart, qui m'ont rendu fou tant ils font la bringue - à moitié ivres toute la journée, et complètement ivres la nuit. Tu n'es pas obligé de me croire, mais je suis entré un matin à six heures dans la chambre de Bogart pour y trouver le roi Farouk dansant le"hula hoop ".
Elle n'est pas exempte de traits vachards, par exemple à propos d'un texte de Carson Mac Cullers : " J'ai sûrement lu pire, mais je ne m'en souviens pas".
Elle montre un homme consumé par un intense besoin d'amour, attentionné envers ses amis et attendant d'eux la réciprocité :
"Précieuse Marylou, j'ai été si heureux de recevoir ta lettre. Elle a fait naître en moi un violent désir de te voir ".


Œuvres

1943 : La Traversée de l'été (Summer Crossing), roman. Une histoire d'amour entre une jeune fille de la haute société new-yorkaise et un jeune gardien de parking, sur fond d'Upper East Side et de canicule. Publication posthume en octobre 2005 par Random House Inc., New York.
1943 : Un été indien (I remember my Grandpa), nouvelle. Un jeune garçon recueille « le secret » de son grand-père...
1945 : Miriam, nouvelle. Une vieille dame fait la rencontre d'une petite fille qui devient vite terriblement envahissante.
1948 : Les Domaines hantés (Other Voices, Other Rooms), roman. Un pré-adolescent part retrouver son père et finalement se trouvera lui.
1949 : Un arbre de nuit (A Tree of Night), nouvelles.
1950 : Local Color, croquis de voyages.
1951 : La Harpe d'herbes (The Grass Harp), roman. Un orphelin et deux vieilles dames élisent domicile dans un arbre et ne veulent plus en descendre. Adapté au théâtre en 1952.
1954 : Plus fort que le diable (Beat the Devil), scénario (film de John Huston).
1956 : Les muses parlaient (The Muses are heard), reportage sur son voyage en Russie soviétique avec un groupe théâtral américain donnant des représentations de l'opéra de Gershwin Porgy and Bess à Saint-Petersbourg et à Moscou.
1956 : Un souvenir de Noël (A Christmas memory). Buddy a sept ans, la vieille cousine qu'il adore soixante et plus, et par un froid matin de novembre : "Oh mon Dieu !" s'écrie-t-elle, « Mais c'est le moment de faire les cakes aux fruits !"
1958 : Petit déjeuner chez Tiffany (Breakfast at Tiffany's), "roman court" dont l'héroïne touchante et irresponsable fut incarnée par Audrey Hepburn dans une adaptation cinématographique réalisée par Blake Edwards en 1961 (titre français du film: Diamants sur canapé).
1960 : Les Innocents, The Innocents, scénario d'après Le Tour d'écrou de Henry James (film de Jack Clayton)
1964 : Morceaux choisis. Textes anciens et inédits, Traduit de l'anglais (États-Unis) par Germaine Beaumont, Maurice-Edgar Coindreau, Serge Doubrovsky, Jean Dutourd et Céline Zins. Préface de Mark Schorer. Gallimard, NRF, Collection Du monde entier. ISBN : 9782070212309
1966 : De sang-froid (In Cold Blood), un roman de "non-fiction" où il suit le trajet de deux assassins et qui a inspiré plusieurs films dont De sang-froid (1967) de Richard Brooks avec Robert Blake.
1968 : L'Invité d'un jour (The Thanksgiving Visitor), souvenirs. Un jeune garçon exorcise la peur que lui inspire un camarade de classe...
1980 : Musique pour caméléons (Music for Chameleons), nouvelles et récits dont l'éblouissant Cercueils sur mesure (Handcarved Coffins).
1983 : Un Noël (One Christmas), souvenirs. Un petit garçon en vient à se demander si le Père Noël existe vraiment.
1987 : Prières exaucées (Answered Prayers: The Unfinished Novel), roman inachevé dont deux chapitres sont remarquables : Des monstres à l'état pur (Unspoiled monsters) et La Côte Basque.
1987 : Une anthologie de Capote (A Capote Reader). Ce recueil inclut, entre autres, ses douze nouvelles les plus célèbres : Miriam, My side of the Matter, A Tree of Night, Jug of Silver, The Headless Hawk, Shut a Final Door, Master Misery, Children on Their Birthdays, A Diamond Guitar, House of Flowers, Among the Paths to Eden et Mojave.
2004 : The Complete Stories of Truman Capote.
À l'occasion de ce qui aurait été le 80e anniversaire de Capote, Random House a regroupé en un volume toutes les nouvelles ou courts récits de souvenirs écrits par Capote.
Ces histoires sont au nombre de vingt. Aux douze énumérées ci-dessus, s'ajoutent : The Walls Are Cold, A Mink of One's Own, The Shape of Things, Preacher's Legend, The Bargain, A Christmas Memory, The Thanksgiving Visitor et One Christmas.
Paraît également la même année chez Random House Too Brief a Treat, publié en France en 2007 sous le titre Un plaisir trop bref

Liens
écouter regarder

http://youtu.be/ySkwEXDVgEg Interview sur l'amour (en anglais)
http://youtu.be/8PyZkoWg3os Truman Capote& groucho Marx (en anglais)



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Posté le : 25/08/2013 15:35
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Dominique Fernandez
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Le 25 Août 1929 Dominique Fernandez, naît à Neuilly-sur-Seine.


Romancier, essayiste et grand voyageur, Dominique Fernandez, élu à l'Académie française le 8 mars 2007aun fauteuil 25, il privilégie l'Italie – avec une nette prédilection pour Naples et la Sicile qu'il exprime dans "Mère Méditerranée" en 1965 – et la Russie avec son "Dictionnaire amoureux de la Russie" en 2004.

Œuvres principales
Porporino ou les Mystères de Naples (1974)
Dans la main de l'ange (1982)
Le Rapt de Ganymède (1989)
Dans l'exploration de l'art baroque et de la culture italienne et russe, ses ouvrages mettent en lumière des références historiques, littéraires et esthétiques qui sont autant de prétextes à la méditation sur la condition de l'homme, non seulement politique, historique et morale mais aussi sensuelle.

Sa vie

Dominique Fernandez est né à Neuilly-sur-Seine le 25 août 1929.
Il est le fils de Liliane Chomette, normalienne et professeur de lettres classiques, née à Saint Anthème dans le Puy de Dôme le 1er avril 1901, et de Ramon Fernandez, critique littéraire d'origine mexicaine, collaborationniste à qui il consacre un livre en 2009;

Élève de l'École normale supérieure, agrégé d'italien en 1955, Dominique Fernandez est professeur à l'Institut français de Naples en 1957.
Il épouse en 1961 Diane de Margerie, romancière et critique littéraire, avec qui il aura deux enfants : un fils, Ramon Fernandez prénommé comme son grand-père et une fille, Laetitia.
Il soutient sa thèse de doctorat en 1968, sur "L'Échec de Pavese", une psychobiographie dont il est le spécialiste et l'inventeur.
Nommé professeur d'italien à l'université de Haute-Bretagne à Rennes, il se consacre à l'enseignement, à l'écriture et à la critique littéraire, notamment à la Quinzaine littéraire et au Nouvel Observateur.
Il revendique le choix de l'homosexualité, il n'en fait pas de mystère et se révèle lors de la parution en 1974 de "Porporino", dans son ouvrage "L'Étoile rose" en 1978. ou "Les mystères de Naples" pour lequel il reçoit le prix Médicis, l'histoire d'un castrat au XVIIIe siècle.

Par la suite, il écrit "Dans la main de l'ange", récompensé par le prix Goncourt 1982 sur la vie de Pasolini, puis "La Course à l'abîme" sur celle du Caravage en 2003.
Les artistes, parias sociaux et proscrits de génie dont il s'efforce de résoudre l'énigme, sont ses thèmes de prédilection.
Avec "Ramon" en 2009, l'écrivain fait un pas supplémentaire et s'efforce de comprendre le parcours de son père, Ramon Fernandez, cet intellectuel de gauche qui passa à la collaboration en 1940.
Homme de lettres éclairé et mondain, il fréquente Céline et Proust, Bernanos et Mauriac, Gide et Malraux...
Il écrit un Molière perspicace, avançant que l'homme ne devient comique que par la folie et le dérèglement de la volonté.
Non loin de cette analyse de l'absurde, si ce n'est la gravité tragique d'un engagement politique douteux, le fils fait concorder la dérive paternelle, de la gauche vers le fascisme, avec la séparation de son épouse.
Avec "Pise 1951" en 2010, sous-titré "roman", Dominique Fernandez met en scène, dans l'Italie d'après-guerre, un jeune normalien français, victime d'une passion récurrente de l'échec puisqu'il abandonne à son meilleur ami, étudiant et fils d'ouvrier, l'amour d'une jeune fille qui a les traits d'un Botticelli.
On ne peut s'empêcher de rapprocher le protagoniste de "Pise 1951" de l'auteur lui-même et de son histoire personnelle.
Même foi parentale dans la droiture civique, la justice sociale et la poursuite du progrès. Même climat moral d'une éducation bourgeoise où l'on n'extériorise pas ses sentiments. Même rigueur austère qui fait comprendre au jeune homme que
"tout ce qui lui tenait à cœur, l'art, la beauté, l'amour, la rumeur de la mer sur une plage, ne pouvait être partagé... "
Or, Dominique Fernandez ne cesse de parcourir des terres indescriptibles, comme dans Transsibérien en 2012, illustré des photographies de Ferrante Ferranti.
Grand voyageur, spécialiste de l'art baroque et de la culture italienne, Dominique Fernandez a ramené de ses nombreux voyages en Italie, en Bohême, au Portugal, en Russie, en Syrie, au Brésil ou en Bolivie des récits illustrés par le photographe Ferrante Ferranti, son compagnon durant quinze ans.
Cette migration physique et spirituelle a pour objet le parcours du Transsibérien de Moscou à Vladivostok, capitale de la Russie d'Extrême-Orient.
Trois semaines sur les rails, en mai 2010, pour neuf mille kilomètres de chemins de fer et quelques étapes dans des villes mythiques, Nijni-Novgorod, Kazan, Ekaterinbourg, Irkoutsk...
Une occasion de revenir sur le passé de l'ex-Union soviétique, sur ses écrivains de génie – Gorki, Tsvetaieva, Mandelstam... –, sur le baroque russe ou sur l'art sévère du socialisme. Au-delà des années de terreur et d'une nostalgie discutable pour le régime soviétique, subsistent non seulement la joie de vivre d'un peuple résistant, tourné vers la dévotion aux poètes dans le souvenir de la tragédie, mais aussi la beauté sauvage d'une nature souveraine.
À 77 ans, Dominique Fernandez a été élu à l'Académie française le 8 mars 2007, au siège laissé vacant par le décès du professeur Jean Bernard, et reçu sous la Coupole le 13 décembre 2007 par Pierre-Jean Rémy.
En 1999, il prend la défense du PACS. Se qualifiant de "premier académicien ouvertement gay ", il a fait figurer Ganymède sur le pommeau de son épée.

Distinctions

Prix Médicis (1974), Prix Goncourt (1982), Prix Méditerranée (1989), Membre de l'Académie française (fauteuil 25)

Bibliographie

1959 - L'Écorce des pierres, Grasset
1962 - L'Aube, Grasset
1969 - Lettres à Dora, Grasset
1971 - Les Enfants de Gogol, Grasset
1974 - Porporino ou les Mystères de Naples (prix Médicis), Grasset, coll. Cahiers rouges
1975 - Eisenstein. L'arbre jusqu'aux racines
1976 - La Rose des Tudors, Julliard
1977 - Amsterdam, Collections Microcosme "Petite Planète/ville", Le Seuil
1978 - L'Étoile rose, Grasset - rééd. 2012
1980 - Une fleur de jasmin à l’oreille, Grasset
1981 - Signor Giovanni, Balland (réédition Le Livre de Poche
1982 - Dans la main de l'ange (prix Goncourt), Grasset
1984 - Le Banquet des anges (L'Europe baroque de Rome à Prague), photographies Ferrante Ferranti, Plon
1986 - L'Amour, Grasset
1987 - La Gloire du paria, Grasset
1988 - Le Radeau de la Gorgone (Promenades en Sicile), photographies Ferrante Ferranti, Grasset
1989 - Le Rapt de Ganymède (prix Méditerranée), Grasset
1991 - L'École du sud, Grasset
1992 - Porfirio et Constance, Grasset
1994 - Le Dernier des Médicis, Grasset,
1995 - La Perle et le Croissant (L'Europe baroque de Naples à Saint-Pétersbourg), phot. Ferrante Ferranti, Plon, coll. Terre humaine
1997 - Tribunal d’honneur, Grasset,
1997 - Le Voyage d'Italie (Dictionnaire amoureux), photographies Ferrante Ferranti, Plon
1998 - Rhapsodie roumaine, photographies Ferrante Ferranti, Grasset.
2000 - Nicolas, Grasset
2000 - Mère Méditerranée, photographies Ferrante Ferranti, Grasset
2003 - La Course à l'abîme, Grasset,
2004 - Rome, guide érudit et sensuel
2004 - Dictionnaire amoureux de la Russie (ill. Catherine Dubreuil), Plon, coll. Dictionnaire amoureux , 857 p.
2005 - Sentiment indien, Grasset,
2005 - Rome, photographies Ferrante Ferranti, éd. Philippe Rey,
2005 - L'amour qui ose dire son nom, Stock,
2006 - Jérémie ! Jérémie ! (Sur les traces d'Alexandre Dumas), Grasset,
2006 - Sicile, photographies Ferrante Ferranti, Imprimerie nationale, coll. Voyages et Découvertes,
2007 - L'Art de raconter, Grasset,
2007 - Place Rouge, Grasset,
2008 - Dictionnaire amoureux de l'Italie (ill. Alain Bouldouyre), Plon, coll. « Dictionnaire amoureux », 2 vol. 755 et 843 p.
2009 - Ramon, Paris, Grasset, 2009.
2010 - Avec Tolstoï, Grasset, à l'occasion du centenaire de la mort de l'écrivain.
2010 - Villa Médicis, photographies Ferrante Ferranti, Philippe Rey, 2010
2011 - Pise 1951, Paris, Grasset, 2011.
2012 - Transsibérien, Paris, Grasset, 2012.
2013 - Dictionnaire amoureux de Stendhal, Paris, Plon, 2013.

Citations

Sur les autres projets Wikimedia :
Dominique Fernandez, sur Wikiquote
"Le silence est comme une nudité de l'âme, qui s'est libérée de la parure des mots."(Sentiment indien, 2005)
"Raconter des histoires : ce devrait être la fonction première du roman." (l'Art de Raconter, 2007)
"Être homosexuel, ce n'est pas seulement préférer les personnes de son propre sexe. C'est (ce devrait continuer à être) se tenir en marge de la masse de ses semblables, penser et agir différemment, apporter dans le consensus social un ferment de révolte et de discorde." ("Le Monde", 2009)


Liens
regarder, écouter

http://youtu.be/QNwE_ngMlic " Pardonnez nous" Dominique Fernandez et Pivot
http://youtu.be/kDNVocNqH4U Dominique Fernandez chez Pivot "Dans la main de l'ange"
http://youtu.be/HUUzf6ypoT4 " La Galerne" avec Kérangal et Fernandez



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Posté le : 25/08/2013 15:06
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Jean Guitton
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Le 18 Août 1901 naît Jean Guitton


Jean Guitton est un philosophe et écrivain français, spiritualisme français, membre de l'Académie française, né le 18 août 1901 à Saint-Étienne dans la Loire, mort le 21 mars 1999 à Paris.
Influencé par Bergson, il infuencera à son tour, Louis Althusser par ses pôles d'intérêt que sont la métaphysique, religion, apologétique, épistémologie, sociologie

Écrivain, philosophe, auteur d'une trentaine d'ouvrages qui regardent aussi bien la philosophie que l'exégèse ou l'autobiographie, Jean Guitton s'est inscrit tout au long du XXe siècle, comme un penseur catholique, particulièrement soucieux d'établir des liens rigoureux entre la raison et la foi.
Né dans un milieu catholique de la bourgeoisie de Saint-Étienne, il ressent tout de suite, en fréquentant le lycée public, la distance que le rationalisme a creusé avec ses convictions chrétiennes.
Catholique traditionnel du côté paternel, et catholique humaniste du côté maternel, son grand-père maternel faisant preuve d'agnosticisme.

Cette diversité dans les expressions de la foi marque l'originalité de sa pensée.
Son frère, Henri Guitton, 1904-1992, devint un économiste très réputé.
Il est le cousin du poète Jean Desthieux.
Élève au Lycée de Saint-Étienne, il y fait de brillantes études qui le mènent à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm, promotion 1920.

Monté à Paris, il prépare au lycée Louis-le-Grand son concours d'entrée à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm.
Sous la double influence de Jacques Chevalier et de Léon Brunschvicg son contraire , il se tourne vers la philosophie. C'est la rencontre du philosophe catholique Maurice Blondel ainsi que celle d'Henri Bergson, dont il deviendra un des exécuteurs testamentaires qui détermineront le jeune philosophe agrégé à préparer son doctorat sur Le Temps et l'éternité chez Plotin et saint Augustin 1933.

Il s'agit là de son œuvre philosophique majeure.
Il obtient l'agrégation de philosophie en 1923 et devient docteur ès lettres en 1933.
Il obtient l'une de ses premières affectations au lycée Théodore-de-Banville à Moulins, Allier; Jean Guitton avait de solides racines bourbonnaises, à Saint-Pourçain-sur-Sioule.
Pour passer du temps à l'éternité, explique-t-il, sous l'œil attentif de Brunschvicg, il faut passer "l'intervalle infini" d'une création, et non seulement l'intervalle fini d'une procession, ou d'une génération.

Comme Maurice Blondel quarante ans plus tôt, dans sa célèbre thèse sur l'Action, Guitton fait ressortir la nécessité pour la raison de s'ouvrir à un ordre supérieur, qui loin de lui être contraire, accomplit pleinement ses requêtes.
Vivement soutenu par Henri Bergson, sur lequel il écrira un beau livre "La Vocation de Bergson, 1960", Guitton s'intéresse également aux questions d'exégèse biblique.
Il fera une première étude consacrée au Cantique des Cantiques.

Cela lui vaut une autre des rencontres décisives de sa vie. En juin 1921, il rend visite à un religieux lazariste, M. Pouget, rue de Sèvres à Paris.
L'homme est devenu aveugle, mais son esprit intact, sa prodigieuse érudition dans des domaines très divers, religieux et scientifiques en font un maître incomparable, qui débrouillera notamment pour Guitton la question énigmatique de l'exégèse scientifique.
Celle-ci a mauvaise réputation chez les catholiques depuis Ernest Renan et l'éloignement du catholicisme d'Alfred Loisy, professeur au Collège de France et représentant redouté de l'exégèse rationaliste.
M. Pouget connaît Loisy et ne le redoute pas.
Jusqu'à la mort du lazariste en 1933, Jean Guitton va passer de longues heures dans la cellule du religieux, notant tous ses propos.
Il en fera son chef-d'œuvre, Portrait de M. Pouget, paru en 1941 à Paris, alors que Guitton se trouve en captivité en Allemagne. Albert Camus saluera le livre dans un article chaleureux publié dans Les Cahiers du Sud.

Il enseigne au lycée pendant plusieurs années avant d'être nommé à l'université de Montpellier en 1937.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il est prisonnier de guerre à l'Oflag IV-D Elsterhorst.
La captivité est pour lui l'occasion d'écrire et de publier un essai métaphysique et politique sur l'identité française : Fondements de la communauté française.

Dans cet ouvrage, préfacé par le maréchal Pétain à qui est dédié le texte, Jean Guitton propose de redonner à la "France nouvelle" qu'il pense voir naître depuis la Défaite, une "mystique" qui réussirait la synthèse du meilleur de l'Ancien Régime et de la Révolution française.
Son Journal de captivité 1942-19434 se fait aussi l'écho de ses préoccupations politiques : il y raconte, entre autres choses, son engagement dans le "Cercle Pétain" du camp, où il donne des conférences et organise des rencontres entre officiers français et allemands.
Plusieurs pages du Journal sont publiées, dès le 7 mars 1943, dans l'hebdomadaire pétainiste Demain, dont la mission était de rassembler les catholiques de tous bords autour du maréchal Pétain.
La publication du Journal lui vaut une condamnation devant un tribunal pour "intelligence avec l'ennemi et aide à la propagande allemande". Le jugement a été cassé par le Conseil d'État en 1948 ou 1949 .
Pendant sa période de détention, Jean Guitton organise des cours sur la pensée de Bergson, dont nul n'ignorait qu'il était juif.
"Il va sans dire que mon enseignement était particulièrement écouté par les officiers allemands.
Le Sonderfuhrer était venu me dissuader de poursuivre ce cours dangereux pour moi."
Après que l'ambassadeur allemand à Paris, Abetz, lui eut donné une autorisation exceptionnelle de libération à cause de sa limite d'âge, ce même Abetz expliqua ensuite que sa libération était impossible car il avait fait en captivité des cours sur le juif Bergson.
Guitton, toutefois, demeura positif : "Il m'arriva souvent de me dire avec satisfaction que je souffrais pour Israël."
Ami intime de Mgr Montini, futur pape Paul VI, il est protégé des rigueurs de l'Index.
Il est appelé par Jean XXIII à participer comme simple laïc au concile Vatican II.
Parallèlement, il continue de publier des œuvres philosophiques et apologétiques, qui en ont fait l'un des plus grands penseurs catholiques du xxe siècle.
Jean Guitton a aussi été désigné par Bergson au côté de Vladimir Jankélévitch comme héritier de sa pensée.
Il contribue d'autre part à faire connaître la mystique française Marthe Robin, voir son livre Portrait de Marthe Robin qu'il allait voir régulièrement et à qui il demande conseil avant de se présenter à l'Académie française.
Soutenu par Gabriel Marcel, il est nommé en 1955 à la chaire de la philosophie à la Sorbonne, en dépit de l'opposition de Vladimir Jankélévitch et de Jean Wahl qui y voient le retour du pétainisme.
Il est élu le 8 juin 1961 à l'Académie française, au fauteuil de Léon Bérard 1876-1960.
Le philosophe marxiste Louis Althusser, qui fut son élève et qui l'admirait, vient le voir secrètement de nuit à plusieurs reprises en mai 1968 pour dialoguer avec lui.
En 1987, c'est au tour de l'Académie des sciences morales et politiques de lui ouvrir ses portes, au fauteuil de Ferdinand Alquié.

Il continue d'écrire jusqu'à la fin de sa vie. En 1984, il fait part de ses réflexions sur la mort et l'au-delà dans L'Absurde et le Mystère, à la suite de discussions avec le président de la République François Mitterrand, alors atteint d'un cancer.
En 1991, il est victime d'une affaire de plagiat. L'astrophysicien Trinh Xuân Thuân accuse les frères Bogdanoff d'avoir plagié son livre "La Mélodie secrète" 1988 pour leur livre d'entretien avec Guitton intitulé Dieu et la science. Le procès qui s'ensuit les lave largement de ces accusations.

Pratiquant la peinture depuis son enfance, il y est fortement conduit et encouragé par Édith Desternes, peintre aux résidences parisienne et charitaine, comme lui aux racines bourbonnaises très fortes à Moulins et au Veurdre, et qui l'invite à exposer régulièrement ses œuvres à la Galerie Katia Granoff de Paris.

Guitton a notamment peint un Chemin de croix pour l'église Saint-Louis-des-Invalides : pour chaque station, pour chaque arrêt en ce chemin, il a réalisé une toile – une icône – sur laquelle il a écrit une courte phrase que la peinture éclaire et qui révèle ce qu’il a peint.
Jean Cocteau l'a aussi incité à décorer la chapelle des Prémontés à Rome, puisque saint Gilbert, patron du Bourbonnais, avait fondé un monastère relevant de l'ordre des Prémontrés près de Saint-Pourçain sur Sioule.


Jean Guitton est mort en 1999, à 97 ans. Marié sur le tard à Marie-Louise Bonnet (1901-1974), il n'avait pas d'enfants.
Il est évoqué dans le 155e des 480 souvenirs cités par Georges Perec dans Je me souviens.

Œuvres

(liste partielle)
Portrait d'une mère (1933)
Le Temps et l'éternité chez Plotin et Saint Augustin (1933) (Aperçu sur Google Books)
La Philosophie de Leibniz (1933)
Actualité de saint Augustin (1935)
La Pensée moderne et le catholicisme (1934-1950)
Perspectives (1934)
Newman et Renan (1938)
La Pensée de M. Loisy (1936)
Critique de la critique (1937)
Le Problème de la connaissance et de la pensée religieuse
Le Problème de Jésus et le fondement du témoignage chrétien (1946)
Développement des idées dans l'Ancien Testament (1947)
Portrait de M. Pouget (1941)
Justification du temps (1942)
Fondements de la communauté française (1942)
Journal de captivité 1942-1943 (1942-1943)
Nouvel art de penser (1946)
Le Problème de Jésus (1946)
L'Amour humain (1948)
L'Existence temporelle (1949)
La Vierge Marie (1949)
Pascal et Leibniz (1951)
Le Travail intellectuel (1951)
Journal, études et rencontres (1959 et 1968)
L'Église et l'Évangile (1959)
La Vocation de Bergson (1960)
Une mère dans sa vallée (1961)
Regard sur le concile (1962)
Génie de Pascal (1962)
L'Église et les laïcs (1963)
Dialogues avec Paul VI (1967)
Développement de la pensée occidentale (1968)
Profils parallèles (1970)
Newman et Renan
Pascal et Leibniz
Teilhard et Bergson
Claudel et Heidegger
Ce que je crois (1971)
Paul VI et l'Année sainte (1974)
Écrire comme on se souvient (1974)
Remarques et réflexions sur l'Histoire (1976)
Journal de ma vie (1976)
Évangile et mystère du temps (1977)
L'Évangile dans ma vie (1978)
Paul VI secret (1980)
Le Temps d'une vie (1980)
Jugements (1981)
Pages brûlées (1984)
L'Absurde et le Mystère (1984)
Portrait de Marthe Robin (1985)
Œcuménisme (1986)
Un siècle, une vie (1988)
Dieu et la science (avec Igor et Grichka Bogdanoff, 1991)
Portrait du père Lagrange (1992)
Celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas (avec Jacques Lanzmann, 1994)
Chaque jour que Dieu fait (1996)
Le Siècle qui s'annonce (1996)
Mon testament philosophique (1997)
Ultima Verba (avec Gérard Prévost, 1998)

Récompenses

1954 : Grand prix de l'Académie française
1979 : Médaille d'or Montaigne
1986 : Commandeur de la Légion d'honneur
1990 : Grand-croix de l'ordre national du Mérite
Commandeur des arts et des lettres


Liens regarder, écouter

http://youtu.be/QuHD0eMvmkc Les frères Bogdanoff
http://youtu.be/NRroK0oqzl0 chemin de croix par Guitton
http://youtu.be/KerxYNqgS5k la vie de Jean Guitton
http://youtu.be/j9dQApRlj8g l'art du portrait






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Posté le : 18/08/2013 15:07
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Alain Robbe Grillet
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Le 18 Août 1922 à Brest naît Alain Robbe-Grillet,

un romancier et cinéaste français.
Considéré avec Nathalie Sarraute comme le chef de file du nouveau roman, il a été élu à l'Académie française le 25 mars 2004 sans être reçu.
Son épouse est la romancière Catherine Robbe-Grillet, dont le nom de plume est Jeanne de Berg

Tout au long d'un demi-siècle, Alain Robbe-Grillet aura été, dans le monde des lettres et de la culture françaises, le plus constant des trublions.
Dès son entrée en littérature, cet ingénieur agronome saisi par l'écriture suscita des rejets violents et même haineux. Certains allaient jusqu'à voir en lui un malade mental, voire un assassin parce qu'il projetait d'en finir avec l'héritage romanesque du XIXe siècle.
De plus, il n'agissait pas seul.
Il se voulait le fédérateur et le porte-parole d'un groupe informel d'écrivains fort divers, mais réunis par une réflexion commune sur la forme romanesque et la même volonté de lui faire subir une révolution esthétique comparable à celles opérées en musique par le dodécaphonisme et en peinture par la non-figuration.
Il s'agissait pour eux de mettre un terme à un réalisme et à un psychologisme quasi inchangés depuis Balzac et d'inventorier des modes d'écriture n'aboutissant pas à des histoires.
D'où leur nom de nouveaux romanciers et l'appellation de Nouveau Roman.
Le temps a passé.
Par la force et la cohérence de leurs démarches, les nouveaux romanciers ont peu à peu créé leur public et atteint la renommée.
Claude Simon a obtenu le prix Nobel ; Nathalie Sarraute est publiée dans La Pléiade.
Robbe-Grillet, quant à lui, s'est très tôt imposé au Japon et surtout aux États-Unis, où il a beaucoup enseigné, comme le représentant le plus emblématique et le plus médiatique d'une littérature française moderne, à la fois chic et libertaire.
Le succès remporté à l'étranger lui a valu du coup le respect de la France, où on l'a même admis sous la Coupole. Mais il a su garder une distance ironique vis-à-vis des institutions et éviter toutes sortes de récupération.
Jusqu'à sa mort, le 18 février 2008, à l'âge de quatre-vingt-quatre ans, il sera resté littérairement incorrect et même un peu sulfureux.Le récit en miettes
Rien ne laissait prévoir la vocation littéraire d'Alain Robbe-Grillet.


Sa vie

Il naît à Brest le 18 août 1922, Petit-fils d’instituteur, Alain Robbe-Grillet fait ses études à Paris. Diplômé de l’Institut national d’agronomie en 1945, il est chargé de mission à l’Institut national de la statistique, 1945-1948, puis est nommé ingénieur agronome à l’Institut des fruits et agrumes coloniaux – expérience qui le conduit au Maroc, en Guinée, à la Guadeloupe et à la Martinique 1949-1951.
Après un premier roman refusé par les éditeurs, "Un régicide", 1949, publié en 1978, il démissionne de l’Institut pour se consacrer à l’écriture. De retour en France métropolitaine, fait ses études supérieures à Paris, devient ingénieur agronome, travaille à l'Institut national des statistiques, puis dans un institut de recherche sur les produits tropicaux.
Il séjourne alors au Maroc, en Guinée, à la Martinique, à la Guadeloupe et commence une étude sur les maladies de la bananeraie.
En fait, c'est à des tâches plus artistiques qu'il se livre : à la fin des années 1940, il écrit un premier roman, Un régicide, qui, refusé par diverses maisons d'édition, ne sera publié qu'en 1979.

La parution des Gommes 1953, du Voyeur en 1955, et celle, concomitante, des premières fictions importantes de Claude Simon, de Robert Pinget et de Michel Butor, publiés aux éditions de Minuit, jeune maison qui pariait sur des auteurs que les grands de l'édition avaient refusés donnèrent naissance à une nouvelle Querelle des Anciens et des Modernes et scindèrent le monde littéraire français en deux camps opposés.
Du côté de la tradition, François Mauriac, Pierre de Boisdeffre ou Émile Henriot, l'influent critique du Monde, qui suggère d'interner Robbe-Grillet à Sainte-Anne.
Du côté des gilets rouges, Maurice Blanchot "La Clarté romanesque", Roland Barthes " Littérature objective" ou Gérard Genette "Vertige fixé".
Dans cette lutte organisée autour d'un prétendu mouvement littéraire, Robbe-Grillet est la cible privilégiée.
Que lui reproche-t-on ?
Tout d'abord d'évacuer de ses textes la psychologie et l'humanisme pour accorder l'omniprésence aux lieux et aux choses, restitués avec la méticulosité d'un médecin légiste, dans de minutieuses descriptions, où parle le seul regard, arrêté, dit Barthes, comme sur une "résistance optique" : il s'agit d'une réalité strictement matérielle, neutre, sans ouverture ni référence à quelque sens ou quelque symbolique subjective, dans laquelle il n'y a ni héros, ni antihéros, ni même personnage principal, mais de simples poseurs de voix ou de regard. N'est-ce pas pourtant porter à l'extrême une recherche inaugurée par un écrivain apparemment classique comme Flaubert ?
"On nous présentait, dit Robbe-Grillet, comme surgis du néant pour chasser l'homme de la littérature, chasser l'auteur de son livre, remplacer les êtres humains par les choses, alors que nous nous réclamions d'auteurs très célèbres, mais sans doute peu lus".
Deuxième point sur lequel on incrimine Robbe-Grillet :
l'indétermination chronologique dans laquelle il place ses fictions et qui nuit, pour beaucoup, à l'intelligibilité qu'ils attendent d'un récit.
Mais, là encore, le romancier ne fait que pousser à la limite un travail déjà accompli par Proust ou par Joyce.
Ces références à de tels écrivains montrent bien que le projet de Robbe-Grillet ne réside pas dans l'iconoclasme, mais dans la poursuite logique de démarches entamées avant lui. Abusivement tenu pour un auteur technocratique ou laborantin, Robbe-Grillet récuse ces étiquettes et proclame dans son essai Pour un nouveau roman (1963) : "Je ne suis pas un théoricien du roman." Ou encore : "Le Nouveau Roman ne vise qu'à une subjectivité totale".
Quel est donc, par-delà les mauvais procès,
l'intention artistique de Robbe-Grillet ? Déstructurer le récit, supprimer le personnage, certes, mais de quelle façon ? Tout simplement en instaurant la discontinuité, en créant des îlots de sens non reliés entre eux, en établissant une sorte de puzzle où manquent certaines pièces.
Il ne s'agit pas là de donner vie à l'impossible utopie flaubertienne du "livre sur rien", mais d'employer un certain matériel littéraire fait de séquences narratives disjointes, de noyaux thématiques, de stéréotypes culturels à partir duquel se construit, de manière inédite, le travail sur le sens.
Ce matériel, Robbe-Grillet va l'emprunter dans une première période aux poncifs d'une certaine littérature psychologico-humaniste, dérivée de Sartre et de Camus.
Tout comme La Nausée ou L'Étranger, ses premiers titres sont de simples substantifs.
On perçoit ainsi des clins d'œil à l'assassinat absurde et à Camus dans Un régicide ; "à l'irruption de la tragédie grecque dans le roman policier"selon la définition que donnait Malraux de Sanctuaire de Faulkner dans Les Gommes ; à Proust et au descriptif de troubles paranoïaques dans La Jalousie en 1957 ; à Dostoïevski et à la psychologie du pervers dans Le Voyeur ; à Kafka, à l'errance, à la déréliction avec Dans le labyrinthe en 1959.

Une littérature au troisième degré

À compter de cette date, Robbe-Grillet va radicalement changer la nature des formants narratifs à partir desquels il opère ses montages textuels.
Coupant court avec un matériel devenu trop propice aux récupérations critiques et aux réductions de sens, délaissant l'arsenal à pièges de la littérature dite des profondeurs, il trouve, dans une vulgate sado-érotique faite d'obsessions personnelles, de fantasmes stéréotypés et de mythologies populaires, les nouveaux éléments de construction de ses textes.
Débute alors ce qui sera une véritable tétralogie : La Maison de rendez-vous en 1965, Projet pour une révolution à New York en 1970, Topologie d'une cité fantôme en 1975 et Souvenirs du Triangle d'or en 1978.
Ces quatre romans emploient une même toile de fond : les paysages urbains abstraits, un environnement empreint d'une violence quelque peu elliptique, des maisons réservées à des usages particuliers, des molosses dressés à des fins curieuses, des enlèvements d'innocentes nymphettes, les expériences spéciales de médecins fous, parents de Mabuse ou de Caligari : bref toute une liaison de thèmes érotiques et d'agencements textuels qu'André Gardies a baptisés du nom d érotuelles.
Ces mêmes éléments se retrouvent dans la création cinématographique de Robbe-Grillet.
Celui-ci, scénariste d'Alain Resnais dans L'Année dernière à Marienbad, a réalisé de nombreux films :
L'Immortelle (1963), Trans-Europ-Express (1967), L'homme qui ment (1968), L'Eden et après (1970), Glissements progressifs du plaisir (1974), Le Jeu avec le feu (1975) et La Belle Captive (1983). Films auxquels leur montage savamment agencé n'ôte pas une malice primesautière qui n'est pas loin, parfois, de la gaudriole.
Ceci n'est pas faire injure à Robbe-Grillet.
Révolutionnaire jovial, iconoclaste facétieux, il n'a jamais sombré dans l'esprit de sérieux.
Simplement, son humour est toujours à prendre au deuxième ou au troisième degré et présuppose, de la part du lecteur, quelques connaissances livresques.
La meilleure preuve de sa fantaisie est qu'il ne s'est jamais laissé engluer dans de pontifiantes redites.
Djinn 1981 – compose un savoureux autopastiche en même temps qu'un pot-pourri de tous les éléments thématiques entrant, à titre d'ingrédients, dans l'alchimie de ses compositions narratives.
Autre renouvellement : sous le titre général de Romanesques, l'écrivain donne une trilogie d'inspiration autobiographique Le miroir qui revient, 1985 ; Angélique, ou l'Enchantement, 1988 ; Les Derniers Jours de Corinthe, 1994 qui multiplie les jeux de miroirs et mêle à plaisir l'espace du récit et celui du souvenir.
En 2001, Robbe-Grillet revient au roman et livre peut-être le plus malicieux de ce qu'il appelle ses "petits travaux".
La Reprise désigne la tentative toujours recommencée du narrateur, un agent secret envoyé en mission dans le Berlin en ruines de l'après-guerre, pour rendre compte d'une réalité qui lui échappe.
Sans cesse forcé de "reprendre" ou de "repriser" son récit, celui-ci ne fait que se répéter, mais en distribuant ses paramètres de façon différente. L'action reste la même, mais se déroule dans d'autres lieux, selon une autre chronologie, avec des personnages changeant d'identité ou de rôle.
La Reprise, c'est aussi le désir de l'auteur de reprendre des éléments empruntés à l'ensemble de ses récits, qu'ils soient du côté de Kafka ou du côté de chez Sade, et de "les faire travailler sans des directions, des combinaisons nouvelles, le livre naissant devenant ainsi une sorte d'archi-texte qui contiendrait à la limite tous les textes précédents".
Ce même souci de rassemblement se retrouve, la même année, dans Le Voyageur, ouvrage qui réunit la majeure partie des articles et des interviews de Robbe-Grillet.
À l'approche de ses quatre-vingts ans, celui-ci n'avait donc rien perdu de son rayonnement et de sa force créative.
Aussi certains membres de l'Académie française, désireux de rénover l'image de la vieille institution, lui suggèrent-ils de se présenter sous la Coupole.
Il accepte, mais refuse, s'il est élu, d'étre reçu en grand apparat et de porter l'habit vert ; devenu académicien en 2004, il n'occupera donc jamais son fauteuil. Comme si cette irrévérence ne lui suffisait pas, il publie en 2007, sous le titre trompeur d'Un roman sentimental, le plus pornographique de ses livres.
Vendu sous cellophane avec des pages non coupées, ce conte de fées pour adultes est avant tout un catalogue de viols, de sévices et de tortures, une sorte d'avatar moderne des 120 journées de Sodome.
Délire ? Farce ? Ultime pirouette ? Un peu de tout cela sans doute.
Ce qui est sûr, c'est que Robbe-Grillet restait bien le plus malicieux et, au fond, le plus énigmatique des provocateurs.

L’octogénaire provocateur

Parallèlement à son œuvre littéraire, Robbe-Grillet s’est également consacré au cinéma. Scénariste et dialoguiste du film d’Alain Resnais, l'Année dernière à Marienbad Lion d’or au festival de Venise en 1961, il tourne son premier long-métrage en 1963 : l'Immortelle reçoit le prix Louis-Delluc. Dans ses autres réalisations, Trans-Europ-Express, 1966 ; l'Homme qui ment, 1968 ; l'Eden et après, 1969 ; Glissements progressifs du plaisir, 1973 ; le Jeu avec le feu, 1974 ; la Belle Captive, 1983 ; Un bruit qui rend fou, en collaboration avec Dimitri De Clercq, 1995 ; C’est Gradiva qui vous appelle, 2006, on retrouve la même esthétique que celle qui parcourt l’œuvre écrite, une esthétique du regard où se déploient fantasmes érotiques et violences obsessionnelles.
Élu en 2004 à l’Académie française, Robbe-Grillet s’est toujours refusé à porter l’habit vert des académiciens. Provocateur et polémiste, il n’a pas souhaité être reçu sous la Coupole, et n'a d'ailleurs pas prononcé l’éloge de son prédécesseur, Maurice Rheims, comme l'exige la coutume.

Il s’est éteint à l’âge de 85 ans des suites d’une crise cardiaque, après être revenu sur son parcours dans Préface à une vie d’écrivain (2005) – recueil formé d’entretiens radiophoniques pour France-Culture – et après avoir donné un dernier livre sulfureux et controversé, Un roman sentimental (2007).

Jusqu'à sa mort, le 18 février 2008, à l'âge de quatre-vingt-quatre ans, il sera resté littérairement incorrect et même un peu sulfureux.


Œuvres littéraires


Romans

Un régicide (1949)
Les Gommes (1953, Prix Fénéon)
Le Voyeur (1955) reçoit le Prix des Critiques
La Jalousie (1957)
Dans le labyrinthe (1959)
La Maison de rendez-vous (1965)
Projet pour une révolution à New York (1970)
Topologie d'une cité fantôme (1976)
Souvenirs du triangle d'or (1978)
Djinn (1981)
La Reprise (2001)
Un roman sentimental5 (2007)

Nouvelles

Instantanés (1962)

Fictions à caractère autobiographique


Le Miroir qui revient (1985)
Angélique ou l'Enchantement (1988)
Les Derniers Jours de Corinthe 1994

Essais et divers

Pour un Nouveau Roman (1963)
Le Voyageur, essais et entretiens (2001)
Entretiens avec Alain Robbe-Grillet, par Benoît Peeters, DVD vidéo, Les Impressions Nouvelles, (2001)
Préface à une vie d'écrivain6 (2005)
La Forteresse, scénario pour Michelangelo Antonioni, (2009)

Filmographie

Réalisateur

1963 : L'Immortelle
1966 : Trans-Europ-Express
1968 : L'Homme qui ment
1971 : L'Eden et après
1971 : N. a pris les dés...
1974 : Glissements progressifs du plaisir
1974 : Le Jeu avec le feu
1983 : La Belle Captive
1995 : Un bruit qui rend fou, co-réalisé avec Dimitri de Clerq
2007 : C'est Gradiva qui vous appelle

Scénariste

1961 : L'Année dernière à Marienbad d’Alain Resnais
1969 : Les Gommes de Lucien Deroisy
1971 : La Jalousie de Klaus Kirschner (TV)
1994 : Taxandria, de Raoul Servais
2010 : Campana de la noche, de Michael Mills


Liens écouter regarder :
http://youtu.be/NraQDi3nNX4 A.Robbe Grillet chez B. Pivot
http://youtu.be/3MA9vNDm-oE Le style





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Posté le : 18/08/2013 14:54
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Honoré de Balzac 2
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Œuvres Historique des éditions

Traduction anglaise (1901) des œuvres d’Honoré de Balzac.
Balzac a été publié chez de nombreux éditeurs. Par ordre chronologique, on peut citer les éditions Levasseur et Urbain Canel (1829), Mame-Delaunay (1830), Gosselin (1832), Madame Charles-Béchet (1833), Werdet (1837), Charpentier (1839).
Une édition illustrée de Charles Furne (20 vol., in-8°, de 1842 à 1852) a réuni l’intégralité de la Comédie humaine en association avec Houssiaux, puis Hetzel, Dubochet et Paulin.

Principaux ouvrages

Les Chouans, 1829
La Peau de chagrin, 1831
Le Chef-d'œuvre inconnu, 1831
Le Colonel Chabert, 1832
Le Médecin de campagne, 1833
Eugénie Grandet, 1833
Histoire des Treize, comprenant :
Ferragus, 1833
La Duchesse de Langeais, 1833, 1839
La Fille aux yeux d'or, 1835

Liste des œuvres selon la bibliographie d'Hugo P. Thieme (1907)

La Recherche de l'absolu, 1834, 1839, 1845
Le Père Goriot, 1835
Le Lys dans la vallée, 10 juin 1836
La Vieille Fille, 1836
César Birotteau, 1837
La Maison Nucingen, 1838
Les Secrets de la princesse de Cadignan, 1839
Béatrix, 1839
Illusions perdues (I, 1837; II, 1839; III, 1843)
La Rabouilleuse, 1842
Modeste Mignon, 1844
La Cousine Bette, 1846
Le Cousin Pons, 1847
Splendeurs et misères des courtisanes, 1838, (Werdet), 1844-1846, (Furne), 1847 (Furne)
Ursule Mirouët, 1842, (Souverain), 1843, (Furne)

Œuvres de Balzac

La Comédie humaine
Études de mœurs
Scènes de la vie privée
La Maison du chat-qui-pelote, 1830, (Mame-Delaunay), 1839, (Charpentier), 1842 (Furne)
Le Bal de Sceaux, (idem)
La Bourse, 1830, (Mame-Delaunay), 1835, (Béchet), 1839, (Charpentier), 1842 (Furne)
La Vendetta, (idem)
Madame Firmiani, 1832, (1er éd. Gosselin), 1835, (éd Béchet), 1839, (Charpentier) 1842, (Furne)
Une double famille, 1830, (1er éd.), 1842 (Furne)
La Paix du ménage, 1830, (1er éd.), 1842, (5e éd. Furne)
La Fausse maîtresse, 1842, (1er éd. Furne)
Étude de femme, 1831, (1er éd. Gosselin, 1842, (4e éd. Furne)
Albert Savarus, 1842, (1er éd. Furne)
Mémoires de deux jeunes mariées
Une fille d'Ève
La Femme abandonnée, 1833, (1er éd. Béchet)
La Grenadière
Le Message (1833) éditions Mame-Delaunay
Gobseck, 1830, (1re édition), 1842 (Furne)
Autre étude de femme, 1839-1842
La Femme de trente ans, 1834 (éd. Charles-Béchet), 1842 (Furne)
Le Contrat de mariage, 1835, (1er éd.), 1842, (Furne-Hetzel)
la Messe de l'athée, 1836
Béatrix, 1839
La Grande Bretèche, 1832, 1837, 1845
Modeste Mignon, 1844
Honorine
Un début dans la vie, 1844 (1er éd.), 1845 (Furne).
Scènes de la vie de province
Ursule Mirouët
Eugénie Grandet, 1833
Pierrette
Le Curé de Tours, 1832
La Rabouilleuse, 1842
Un ménage de garçon, 1842
L'Illustre Gaudissart, 1833 et 1843
La Muse du département
Le Lys dans la vallée, 1836
Illusions perdues, 1836 à 1843 comprenant :
Les Deux poètes, (1837)
Un grand homme de province à Paris, (1839)
Ève et David, 1843 (les Souffrances de l’inventeur)
Les rivalités
La Vieille Fille, 1836
Le Cabinet des Antiques, 1839
Scènes de la vie parisienne
Histoire des Treize, comprenant :
Ferragus, 1834
La Duchesse de Langeais, 1834, 1839
La Fille aux yeux d'or, 1835
Le Père Goriot, 1835
Le Colonel Chabert, 1835
Facino Cane, 1837
Sarrasine, 1831
L'Interdiction, 1836
César Birotteau, 1837 (Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau)
La Maison Nucingen, 1838
Pierre Grassou
Les Secrets de la princesse de Cadignan
Les Employés ou la Femme supérieure
Splendeurs et misères des courtisanes, 1838, (Werdet), 1844-1846, (Furne)
Dans les parents pauvres (classement)
Le Cousin Pons, 1847
La Cousine Bette, 1846
Un prince de la bohème
Un homme d'affaires (Esquisse d'homme d'affaires d'après nature)
Gaudissart II
Les Comédiens sans le savoir
Scènes de la vie politique
Un épisode sous la Terreur
Une ténébreuse affaire
Z. Marcas
L'Envers de l'histoire contemporaine
Scènes de la vie militaire
Les Chouans, 1829
Une passion dans le désert
Scènes de la vie de campagne
Le Médecin de campagne, 1833
Le Curé de village, 1841
Le Lys dans la vallée, 1836
Études philosophiques
La Peau de chagrin, 1830, 1834, 1837, Furne : 1846
Jésus-Christ en Flandres
Melmoth réconcilié, suite de Melmoth, l’homme errant, roman gothique de Charles Robert Maturin
Le Chef-d'œuvre inconnu, 1831, 1837, (Furne : 1846)
La Recherche de l'absolu, 1834, 1839, 1845
Massimilla Doni
Gambara
Les Proscrits, 1831176
Louis Lambert
Séraphîta
L'Enfant maudit
Les Marana
Adieu !, 1830
Le Réquisitionnaire
El Verdugo
Un drame au bord de la mer, 1834, 1835, 1843, 1846
L’Auberge rouge
L'Élixir de longue vie, 1831, 1834, 1846
Maître Cornélius, 1832, 1836, 1846
Sur Catherine de Médicis, 1836-1844

Études analytiques

Physiologie du mariage, 1829 (Levasseur), 1846, (Furne)
Petites misères de la vie conjugale
Pathologie de la vie sociale comprenant
Traité de la vie élégante
Théorie de la démarche
Traité des excitants modernes


Ébauches rattachées à la Comédie humaine

Les ébauches rattachées à la Comédie humaine sont des contes, nouvelles, fragments d’histoire ou des essais qui permettent de reconstituer le parcours littéraire d’un auteur prolifique et d’en éclairer les zones d’ombre.
En cela, elles ont une valeur historique importante, et parfois, une valeur littéraire inattendue.
Mais c’est surtout par ce qu’elles nous apprennent de Balzac et de sa manière d’écrire qu’elles sont précieuses.
L’ensemble de ces manuscrits éparpillés à la mort de l’auteur ont pu être réunis grâce au patient travail de collectionneur du vicomte Charles de Spoelberch de Lovenjoul, et après lui aux "archéologues littéraires" qui ont travaillé à remettre en ordre et à interpréter le sens de ces textes en cherchant ce qui les rattachaient à la Comédie humaine.
Ils ont d’abord été rassemblés en 1937 par Marcel Bouteron (huit textes), puis Roger Pierrot en 1959 (dix textes), Maurice Bardèche.
Beaucoup de ces textes étaient restés inédits du vivant de l’auteur, d’autres avaient été publiés179.
En 1950, lors du centenaire de la mort de Balzac, deux textes furent édités séparément : la Femme auteur et Mademoiselle du Vissard.
Et de nouveau la Femme auteur et d’autres fragments de la Comédie humaine.
L’ensemble étant publié dans un tome complémentaire de la Pléiade. Pratiquement toutes les ébauches mises à jour ont été successivement publiées par Maurice Bardèche dans les Œuvres complètes de Balzac, puis en 1968 par Roger Pierrot et J. A. Ducourneau, en respectant les divisions de la Comédie humaine que Balzac avait donné aux vingt-cinq textes et que La Pléiade a également respectées.

Publiés après la mort de l’écrivain

Les Paysans (inachevé)
Le Député d'Arcis (inachevé), terminé et publié en 1854 par Charles Rabou, selon la promesse qu’il avait faite à Balzac peu avant sa mort.
Le texte se compose de trois parties :
L'Élection 1847
Le Comte de Sallenauve (inachevé), terminé et publié par Charles Rabou en 1856
La Famille Beauvisage, 1854-1855
Les Petits bourgeois de Paris (inachevé), terminé et publié par Charles Rabou en 1856-1854

Divers

La Comédie du diable, 1831
Les Cent contes drolatiques, 1832 - 1837.
La Belle Impéria, (conte satirique).
Le Péché véniel, (idem).
La Chière nuictée d'amour, (idem)
Contes bruns, 1832 en participation avec Philarète Chasles et Charles Rabou
Peines de cœur d'une chatte anglaise et autres Scènes de la vie privée et publique des animaux - Études de mœurs. 1844 et 1845. Éditions Hetzel.
Voyage d'un moineau de Paris à la recherche du meilleur gouvernement (signé George Sand, mais écrit par Balzac).
Les Amours de deux bêtes (Balzac).
Guide-âne à l'usage des animaux qui veulent parvenir aux honneurs, (Balzac)
Voyage d'un lion d'Afrique à Paris
Essai sur l'argot, 1844 inséré dans la quatrième partie de Splendeurs et misères des courtisanes.
Voyage de Paris à Java, 1832.
La Chine et les chinois, 1842.
Œuvres de jeunesse
Sténie, 1819
Falthurne, 1822
Clotilde de Lusignan, 1823
Annette et le criminel, 1824
Le Vicaire des Ardennes, 1822
le Centenaire ou les Deux Beringheld,1824
L'Héritière de Birague, 1822
Wann-Chlore, 1825


Postérité de l’auteur et de son œuvre

Après l’acharnement contre Balzac de la presse, de la critique, et d’universitaires qui poursuivront leur dénigrement après la mort de l’auteur (notamment Émile Faguet), La Comédie humaine est saluée comme un chef-d’œuvre par les plus grandes plumes.
Dans les premiers à prendre la défense de Balzac, on compte Jules Barbey d'Aurevilly qui écrit en 1857 dans Le Pays :
"Pour tout dire en un mot, il restera prouvé qu’en hachant n’importe où, une page de Balzac, en tronquant cet ensemble merveilleux d’une page, on aura, avec des teintes nouvelles et l’originalité la plus profonde, quelque chose comme les Caractères de La Bruyère, les Maximes de La Rochefoucauld, les Pensées de Vauvenargues et de Joubert, et les Aphorismes de Bacon".
Hippolyte Taine publie en 1865 une étude intuitive de La Comédie humaine, ainsi que plusieurs articles élogieux dans Le Journal des débats (février et mars 1858), et dès 1858 Balzac : sa vie, son œuvre, qui sera réédité en 1865 et 1901187, texte auquel Zola se réfèrera souvent, tout en prétendant le contester.
Il déclare dans Evénement qu’il est "l’humble disciple de Monsieur Taine".
Émile Zola, dès 1866, commence la publication de ses critiques intitulées Mes Haines où il fait l’éloge de La Comédie humaine.
Le 29 mai 1867, à Antony Valabrègue il écrit :
"Avez-vous lu tout Balzac ? Quel homme ! Je le relis en ce moment. Il écrase tout le siècle. Victor Hugo et les autres, pour moi, s’effacent devant lui".
Quant à La Comédie humaine, il la définit ainsi : "L’épopée moderne, créée en France, a pour titre la Comédie humaine et pour auteur Balzac".
Et encore : "Balzac est à nous, Balzac, le royaliste, le catholique a travaillé pour la république, pour les sociétés et les religions libres de l’avenir".
Roland Barthes compte aussi parmi les critiques enthousiastes de Balzac :
"Balzac, c’est le roman fait homme, c’est le roman tendu jusqu’à l’extrême de son possible. C’est en quelque sorte le roman définitif".
Félicien Marceau voit même une étrange similitude phonétique entre "En attendant Godot" de Samuel Beckett et "Le Faiseur de Balzac" :
"Godeau !… Mais Godeau est un mythe !… Une fable !… Godeau, c’est un fantôme… Vous avez vu Godeau ?… Allons voir Godeau ! (Balzac, Le Faiseur)".
Félicien Marceau de conclure :" … qui dira le mystérieux pouvoir des syllabes qui, à plus de deux cents ans de distance, fait écrire à Samuel Beckett : En attendant Godot, et à Balzac sa pièce Le Faiseur, où, pendant cinq actes, on ne fait qu’attendre Godeau194 ? ".
"Qu’on le veuille ou non, Balzac est le plus grand des romanciers français195 "
— Michel Lichtlé, 11 septembre 2008

Balzac et les artistes

Balzac et les écrivains de son temps
Article détaillé : Balzac face aux écrivains de son siècle.
Balzac avait peu d’ennemis parmi les grandes plumes de son époque, même si d’inévitables chamailleries éclataient parfois.
Ses seuls véritables ennemis étaient ceux que Boris Vian désignera comme des "pisse-copie", à savoir les critiques littéraires hargneux et impuissants tels Sainte-Beuve auquel Michel Polac attribue "la petite aigreur de l’écrivain raté qui le rend plus proche d’un critique de la NRF des années 20-40, que de ses contemporains196"
et qu’Angelo Rinaldi attaque avec humour dans l'Express du 16 décembre 1988.
D'après lui, l'auteur a pour idée fixe de décrire la société dans son entier, telle qu’elle est : avec ses parties vertueuses, honorables, grandes, honteuses, avec le gâchis de ses rangs mêlés, avec sa confusion de principes, ses besoins nouveaux et ses vieilles contradictions".


Les illustrateurs de Balzac

De nombreux peintres, caricaturistes ou illustrateurs ont enrichi les œuvres d’Honoré de Balzac depuis leur parution, dans des éditions multiples.

-Henri Monnier : le Curé de Tours
-Grandville et Paul Gavarni : Peines de cœur d'une chatte anglaise et Autres scènes de la vie privée et publique des animaux, éd. Hetzel en 1844 et 1845
-Célestin Nanteuil contribue huit dessins dans l’édition Furne de La Comédie humaine.
-Charles Huard : la Cousine Bette pour l’édition 1910
-Honoré Daumier : dessin pour Ferragus, Le Père Goriot et liste des illustrateurs de Balzac
-Louis Édouard Fournier : illustrations du Lys dans la vallée
-Édouard Toudouze : une dizaine de romans ou nouvelles
-Auguste Leroux : illustrations pour Eugénie Grandet, Ferroud 1911
- Collection Librairie des amateurs; Les 26 compositions d'Auguste Leroux, en texte et hors texte, dont un frontispice, ont été gravées sur bois en couleurs par Florian, Froment et Duplessis.
-Gustave Doré : 425 dessins pour les Cent contes drolatiques
-Daniel Hernandez, peintre péruvien : illustrations pour Le Curé de village, Illusions perdues, Le Médecin de campagne.
Albert Robida : illustrations pour les Cent contes drolatiques
-Oreste Cortazzo : dessins pour La Rabouilleuse, Le Député d'Arcis, Petites misères de la vie conjugale, Peines de cœur d'une chatte anglaise
-Pablo Picasso : Picasso et le Chef-d'œuvre inconnu. Ambroise Vollard proposa en 1921 à Picasso d’illustrer le Chef-d'œuvre inconnu de Balzac.
-L’histoire met en scène un vieux peintre de génie (Frenhofer) auquel Picasso, fasciné par le texte, s’identifia d’autant plus aisément que l’atelier de Frenhofer se situait rue des Grands Augustins.
-Peu de temps après la proposition de Vollard, Picasso allait louer lui-même un atelier au numéro 7 de cette même rue où il peindrait son chef-d’œuvre : Guernica.
-Pierre Alechinsky : le Traité des excitants modernes, 1989. Le livre, accompagné d’une postface de Michel Butor est publié par Yves Rivière.
-Pol Bury : La deuxième partie de Pathologie de la vie sociale, Théorie de la démarche, livre illustré en 1990
-Dai Sijie : Balzac et la Petite Tailleuse chinoise. Il est évoqué par Luo et le narrateur comme un dieu dans le temps de la rééducation de Mao Zedong.

Portraits de l’auteur Peintures représentant Balzac

Balzac par David d'Angers.
Portrait de Balzac par Louis Boulanger, 1829
Portrait de Balzac (vers 1825) attribué à Achille Devéria200,201
Portrait et médaillon par David d'Angers
Daguerréotype par Louis-Auguste Bisson
Portrait de Balzac lithographie par Pablo Picasso
Portrait de Balzac lithographie par Gen Paul

Sculptures Monument à Balzac Rodin

Des sculptures de Balzac ont été réalisées par Jean-Pierre Dantan, Auguste Rodin, Francesco Putinati, David d'Angers (buste de Balzac), Alexandre Falguière, statue de Balzac aujourd’hui avenue de Friedland à Paris202, et d'autres artistes203.
Vers la fin du xixe siècle la Société des gens de lettres passe commande d’une statue de Balzac à Henri Chapu qui meurt en juillet 1891, ne laissant qu’esquisses et ébauches du monument.
Émile Zola obtient alors que la commande soit confiée à Auguste Rodin le 14 août 1891.


Monument à Balzac (1891-1898), Le musée Auguste Rodin.

Rodin, ne connaissant pas Balzac, se livre à de nombreuses recherches. Il s’immerge dans la Comédie humaine, consulte archives et collections, produit des têtes des bustes, des nus. Jusqu’au moment où jaillit l’idée finale en observant l’une des figures de ses Bourgeois de Calais. Il s’ensuivra une polémique violente lors de la première présentation de l’œuvre qui fait scandale.
Malgré les articles élogieux d’Émile Zola, le sculpteur est en bute aux pires insultes.
La Société des gens de lettres désavoue Rodin et commande à Alexandre Falguière un "Balzac sans heurt".
Rodin emporte l’œuvre dans sa villa de Meudon et c’est là, que, quelques années plus tard, un jeune photographe allemand en découvrira la beauté, assurant les débuts de sa postérité. Ce n’est qu’en 1939 qu’un tirage en bronze fut érigé à Paris, boulevard Raspail.
Rodin écrivait en 1908 : "Si la vérité doit mourir, mon Balzac sera mis en pièces par les générations à venir. Si la vérité est impérissable, je vous prédis que ma statue fera du chemin. Cette œuvre dont on a ri, qu’on a pris soin de bafouer parce qu’on ne pouvait la détruire, c’est la résultante de toute ma vie, le pivot même de mon esthétique. Du jour où je l’eus conçue, je fus un autre homme.
On peut trouver d'autres sculptures monumentales de Balzac au XIXe siècle celle de David d'Angers pour la tombe de l'écrivain au cimetière du Père-Lachaise et au XXe siècle, celle que le sculpteur russe Zourab Tsereteli a offert à la ville d'Agde.
Balzac s'est lui-même passionnément intéressé à la sculpture en lui consacrant une nouvelle : Sarrasine où il montre ce qu'il y a de dangereux, (voire de mortel), dans cet art qui recrée l'être humain : "Contournable, pénétrable, en un mot profonde la statue appelle la visite, l'exploration, la pénétration; elle implique idéalement la plénitude et la vérité de l'intérieur; la statue parfaite selon Sarrasine, eût été une enveloppe sous laquelle se fût tenue une femme réelle (à supposer qu'elle-même fût une chef-d'œuvre) dont l'essence de réalité aurait vérifié et garanti la peau de marbre qui lui aurait été appliquée".


Balzac et le daguerréotype


L’apparition du daguerréotype touche à une question centrale des préoccupations artistiques.
En ce qui concerne la littérature, la possibilité de reproduire le réel à l'identique ne peut qu’attirer l’attention, mais aussi inquiéter, celui qui se vantait de faire "concurrence à l’état civil".
Mais si Balzac éprouve quelques craintes au sujet du daguerréotype, elles seront vites dissipées par son enthousiasme pour cette invention nouvelle, qu’il manifeste dans une lettre à Mme Hanska, et par son admiration pour Jacques Daguerre qu’il cite plusieurs fois dans la Comédie humaine, allant jusqu'à utiliser le mot "daguerréotyper" comme un verbe usuel.
Balzac n’est d’ailleurs pas le seul à attribuer des pouvoirs extraordinaires au daguerréotype. Théophile Gautier, adepte comme lui de sciences occultes, et Gérard de Nerval, prêteront à l’invention de Niépce et Daguerre des vertus magiques et des rapports avec l’âme.

Films inspirés de l’œuvre de Balzac

Article détaillé : Films basés sur l'œuvre d'Honoré de Balzac.
Balzac n’a cessé d’être adapté à l’écran, télévision et cinéma depuis le début du XXe siècle. Anne-Marie Baron lui reconnaît d’ailleurs un certain talent de metteur en scène dans sa façon minutieuse de planter les décors, de décrire les costumes, et d’agencer les dialogues.

Adaptations musicales

-La Grande Bretèche, 1911- 1912. Opéra d'après Honoré de Balzac, par Albert Dupuis, édité en 1913 chez Eschig, Paris.
-La Belle Impéria, 1927 par Franco Alfano sous le titre Madonna Imperia, livret d'Arturo Rossato d'après un conte drolatique, opéra en 1 acte.
-Massimilla Doni, opéra en 4 actes (6 scènes), d'Othmar Schoeck texte d'Armin Rüeger selon la nouvelle du même nom d'Honoré de Balzac. Première représentation : 2 mars 1937, -Staatsoper Dresden.
-La Peau de chagrin, drame lyrique en quatre actes de Charles-Gaston Levadé, 1869-1948, livret de Pierre Decourcelle et Michel Carré.
-La Peau de chagrin, (Die tödlichen Wünsche), opéra de Giselher Klebe, 1959-1962.
-La Chatte anglaise, livret de l'opéra, en deux actes, tiré de la nouvelle de Balzac Peines de cœur d'une chatte anglaise, musique de Hans Werner Henze. Création mondiale au Festival de Schwetzingen en 1983, coproduction avec l’Opéra de Lyon en 1984.
-Gambara, théâtre musical d’Antoine Duhamel, livret de Robert Pansard-Bresson, 1978.

Idées politiques

Balzac, qui fut un romancier libéral sous la Restauration, mais qui fut favorable au droit d'aînesse en 1824, devient légitimiste, c'est-à-dire partisan de la branche aînée de la Maison de Bourbon en 1831.
En avant-propos de La Comédie humaine (1842), il déclare écrire "à la lumière de deux Vérités éternelles, la Religion et la Monarchie".
Partisan de la légitimité, il prône un pouvoir monarchique, seul capable de reconstituer selon lui une société organique.
Sa conception résulte d'une analyse du phénomène révolutionnaire et de ses conséquences : promotion de l'individu, atomisation du corps social, conflit des intérêts, rôle primordial de l'argent, pouvoir de la bourgeoisie.
Cependant, contrairement aux théoriciens contre-révolutionnaires, comme Louis de Bonald, il n'est pas théocrate.
Il tient compte d'une révolution irréversible, est critique à l'égard d'une aristocratie repliée sur elle-même.
Il veut un autoritarisme centralisé et l'alliance des classes, qui unirait le dynamisme énergétique et conquérant et la stabilité d'un conservatisme bien compris.

Balzac et ses contrefacteurs

Balzac est l’auteur du XIXe siècle qui a été le plus contrefait en Belgique, et c’est seulement après sa mort, en 1853, que fut signée entre la France et la Belgique une convention bilatérale garantissant réciproquement les droits des auteurs sur la protection de leurs œuvres.
D’après Robert Paul, créateur du Musée du Livre belge, la contrefaçon était née de l’absence de toute entente internationale pour la protection des œuvres de l’esprit. L’industrie qui en découlait et qui se développait en Hollande dès le XVIIe siècle consistait à reproduire et à lancer sur le marché européen des ouvrages récemment publiés à Paris. Comme le contrefacteur belge ne rémunérait pas les auteurs, il pouvait facilement concurrencer l’éditeur parisien.
Si la France lui demeurait fermée, il était libre d’inonder la Belgique, l’Angleterre, l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie et même la Russie.
En 1836, trois contrefacteurs bruxellois, Wahlen, Hauman et Méline ont des dépôts en Allemagne et en Italie, à Kehl et jusqu’en Algérie.
Éditeurs et écrivains français protestent. Dès 1834, Honoré de Balzac a pris la tête du mouvement avec sa célèbre "Lettre aux écrivains français du XIXe siècle".
D’autres auteurs le suivront, jusqu’à ce qu’une convention franco-belge de 1853 vienne mettre un terme à cette pratique.
Actuellement, on peut encore trouver ces contrefaçons dans des librairies ou sur des sites de livres anciens de vente par correspondance :
-Physiologie du mariage, chez Meline, à Bruxelles, en 1834.
-Les Chouans, 1835 chez Hauman à Bruxelles, sous le titre "Le Dernier Chouan ou la Bretagne en 1800".
-Une autre chez Méline en 1837.
-Le Père Goriot histoire parisienne par Honoré de Balzac. Bruxelles, Meline, Cams et Compagnie, 1837. Imprimée deux ans après l’édition originale.
-La Peau de chagrin Bruxelles, Louis Hauman, 1831, paru à la date de l’édition originale.
-Le Lys dans la vallée.
-Les Employés ou La Femme supérieure paraît en juillet 1837, en quinze feuilletons quotidiens.
-Et la même année, trois contrefaçons.
-Un début dans la vie. 1842. Sous le titre le "Danger des mystifications".
-Plus trois contrefaçons la même année.
-La dernière incarnation de Vautrin, 1847. Bruxelles, Lebègue et Sacré fils.
La contrefaçon paraît un an avant l’édition française.
-Illusions perdues, "Un grand homme de province à Paris". 1839, parue la même année que l’édition originale de Paris.
-Nouvelles scènes de la vie privée. Bruxelles, Méline, 1832, contenant : "le Conseil, la Bourse, le Devoir d’une femme, les Célibataires, le Rendez-vous, La Femme de trente ans, le Doigt de Dieu, les Deux rencontres, l’Expiation".

L’affaire Octave Mirbeau

Voir le détail de "L’affaire Octave Mirbeau" sur la page de Ewelina Hańska.
Voir aussi la notice sur La Mort de Balzac.
Octave Mirbeau, écrivain et journaliste français, inséra dans son récit de voyage La 628-E8 trois sous-chapitres intitulés La Mort de Balzac, qui firent scandale par le comportement prêté à Ewelina Hańska pendant l'agonie de Balzac.
Sur la prière de la fille de Mme Hanska, il consentit à les faire retirer in extremis, alors que le volume était déjà imprimé.

L’affaire Radziwill

La princesse Catherine Radziwill, née Rzewuska le 30 mars 1858 à Saint-Pétersbourg, épouse d’un prince prussien Guillaume Radziwill, était la fille du frère cadet de Madame Hanska, le comte Adam Rzewuski.
Après avoir quitté son mari en 1899 pour une vie aventureuse qui la conduisit successivement en Angleterre, puis en Afrique du Sud où elle imita la signature de Cecil Rhodes, fondateur de la compagnie de diamants De Beers, elle se réfugia aux États-Unis.
Se réclamant de ses origines et de sa parenté avec Madame Hanska, donc avec Balzac, elle monnaye des lettres de Mme Hanska fabriquées de toutes pièces, dont les originaux lui auraient été inaccessibles à cause de l’arrivée au pouvoir des Soviets: Dix-sept lettres de Mme Hanska à son frère cadet, dans lesquelles la comtesse faisait des confidences très précises sur Balzac.
Elle se présente comme ayant passé son enfance sous le toit de Madame de Balzac, ce qui est impossible compte tenu de sa date de naissance (1858).
La supercherie est éventée en 1926 à Paris, à la parution chez Plon de la thèse de doctorat d’une jeune Américaine, Juanita Helm Floyd : les Femmes dans la vie de Balzac.
Le texte, préfacé et annoté par Catherine Radziwill comporte en appendice les dix-sept lettres fabriquées.
En outre la princesse publie un article où elle prétend avoir retrouvé les lettres que Mme Hanska avait demandé à Balzac de brûler.
Très vite la Revue politique et littéraire, plus connue sous le nom de Revue Bleue, trouve cette correspondance suspecte et Sophie de Korwin-Piotrowska, qui connaissait bien la famille Rzewuski, fait savoir que Mme Hanska n’avait aucune relation avec son frère cadet et qu’elle n’aurait eu aucune raison de lui parler d'un littérateur français qu’il désapprouvait.
Enfin on découvre dans le Gotha que la dernière adresse de la princesse Radziwill était en 1929 à Leningrad : 63, Ligowka ; et qu’elle n’était donc pas victime des Soviets comme elle l’avait affirmé pour être mieux accueillie en Amérique.

Les voyages de Balzac

Balzac a beaucoup voyagé : Ukraine, Russie, Prusse Autriche, Italie.
Le 13 octobre 1846, il assiste au mariage d'Anna Hańska, fille d'Ewelina Hańska, à Wiesbaden.
Mais bien peu de lieux, en dehors de Paris et de la province française, seront une source d’inspiration pour lui.
Seule l’Italie lui inspire une passion qu’il exprime dans de très nombreux écrits, notamment les contes et nouvelles philosophiques.
En Russie, c’est plutôt Balzac qui laissera ses traces en inspirant Dostoïevski.

L’Italie L’Arsenal de Venise.

Il aime l’Italie, cette "mère de tous les arts ", pour sa beauté naturelle, pour la générosité de ses habitants, pour la simplicité et l’élégance de son aristocratie, qu’il considère comme " la première d’Europe", pour le génie de ses musiciens dont Rossini.
Envoyé en 1836 à Turin par ses amis Guidoboni-Visconti, il découvre cette même année Milan où il est l’hôte du prince Porcia auquel il enverra en juin 1837 le manuscrit de Massimilla Doni, puis l’année suivante Venise, pays des merveilles.
Balzac ne tarit pas d’éloges sur ces splendeurs, et il place Lord Byron dans la catégorie des "hypocrites qui plaignent la décadence de Venise".
Honoré de Balzac est au contraire ébloui par la créativité italienne perçue via le Mosé et le Barbier de Séville de Rossini, qu’il rencontre à Bologne, et auquel il consacre deux nouvelles jumelles : Massimilla Doni et Gambara.
Il est également ébloui par les beautés de Florence, de Gênes, de Rome, par ses peintres, sculpteurs, architectes qui servent partiellement de cadre à Sarrasine et Facino Cane.
S’il a été enthousiasmé par la Chartreuse de Parme, c’est aussi parce que le roman de Stendhal offre des statues italiennes comparables à celles des jardins des grandes villas.
Un engouement que l’Italie lui rend bien puisqu’il y est accueilli à bras ouverts.
Même ses désastreux investissements dans les mines argentifères de Sardaigne ne le dégoûtent pas de ce pays.

La Russie

C’est au contraire avec un peu de méfiance qu’on le voit arriver à Saint-Pétersbourg en 1843 pour aider Madame Hanska dans une affaire de succession.
Sa réputation d’endetté l’a précédé.
À Paris déjà, lorsqu’il demande un visa, le secrétaire d’ambassade Victor de Balabine suppose qu’il va en Russie parce qu’il n’a pas le sou, et le chargé d’affaires russe à Paris propose à son gouvernement "d’aller au-devant des besoins d’argent de Monsieur de Balzac et de mettre à profit la plume de cet auteur, qui garde encore une certaine popularité ici, … pour écrire une réfutation du livre calomniateur de Monsieur de Custine".
Ce en quoi il se trompe.
Balzac ne réfutera pas Astolphe de Custine, non plus qu’il cherchera des subsides à Saint-Pétersbourg. Il n’est venu que pour voir madame Hanska.
Balzac est déjà très aimé et très lu en Russie. Le public le considère comme l’écrivain qui a "le mieux compris les sentiments des femmes".
Parmi ses admirateurs : un jeune homme qui se flatte d’avoir lu tout Balzac dès l’âge de seize ans et qui fait ses premiers pas en littérature en traduisant, en 1841, Eugénie Grandet : Fiodor Dostoïevski à qui ce roman va inspirer notamment Les Pauvres gens;

Distinctions

Honoré de Balzac figure sur une pièce de 10 € en argent édité en 2012 par la Monnaie de Paris pour représenter sa région natale, la Région Centre.

Liens à regarder, écouter


http://youtu.be/bNFxjs3El7Q le père Goriot
http://youtu.be/DZF7BV5qOVw le colonel chabert
http://youtu.be/stMpzUthQVk Eugénie Grandet 1
http://youtu.be/INMQ-48v3x0 Eugénie Grandet 2
http://youtu.be/cDJlR8zRnE4 Eugénie Grandet 3
http://youtu.be/be5MzbR_VQQ Eugénie grandet 4
http://youtu.be/JeAxuD84GDU Eugénie Grandet 5
http://youtu.be/HBt7iQaQ-Nw Eugénie grandet 6
http://youtu.be/n89WcnP5LiM La comédie Humaine

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Posté le : 18/08/2013 14:47
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Honoré de Balzac 1
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Le 18 Août 1850 disparaît Honoré De Balzac, monument de la littérature française.


La prodigieuse vitalité de cette vie aux multiples entreprises et au gigantesque travail littéraire se développe sur le terrain d'une famille bourgeoise représentative des ascensions de ce temps de mutations.
La famille du père, né Balssa, est une famille de paysans du Tarn. Le père, Bernard-François, petit clerc de notaire, monte à Paris à vingt ans et finit comme directeur des vivres aux armées.

La mère, née Laure Sallembier, appartient à une famille de passementiers-brodeurs parisiens. Quand Balzac naît à Tours le 20 mai 1799, le père a cinquante-trois ans et la mère vingt et un. Balzac est l'aîné de quatre enfants : Laure, la sœur bien-aimée, naît en 1800 ; Laurence en 1802 ; Henri-François en 1807, vraisemblablement fils naturel de M. de Margonne, le châtelain de Saché. Bachelier en droit, d'abord clerc de notaire et clerc d'avoué à Paris, Balzac décide, à vingt ans, de se consacrer à la littérature.
C'est en effet sa principale occupation de 1820 à 1824, puis de 1829 à 1848, deux ans avant sa mort. Mais, de 1824 à 1828, et pendant tout le reste de sa vie, parallèlement à l'œuvre littéraire, les entreprises de tout ordre se sont succédé. En 1825, l'édition. En 1826, l'imprimerie. En 1827, une société pour l'exploitation d'une fonderie de caractères d'imprimerie. C'est l'échec ; ce sont, déjà, les dettes. Après le retour à la littérature, les années 1829-1833 sont des années d'intense activité journalistique.
Des ambitions électorales se manifestent en 1831. En 1836, c'est l'entreprise malheureuse de la Chronique de Paris, revue éphémère. En 1838, désireux d'exploiter une mine argentifère, Balzac part pour la Sardaigne, mais, quand il arrive, la place est déjà prise. En 1839, il devient président de la Société des gens de lettres ; il milite pour tenter de sauver le notaire Peytel, accusé du meurtre de sa femme, et qui est condamné à mort par les assises de Bourg.
En 1840, il lance la Revue parisienne : c'est un échec. En 1848, il se porte candidat à la députation. Quant à ses candidatures à l'Académie française, elles sont toujours restées sans succès.
Les éléments marquants de sa vie personnelle ont été l'absence d'affection maternelle, l'amitié pour sa sœur Laure, la tristesse ressentie à la mort de sa sœur Laurence, à vingt-trois ans, après un mariage malheureux, l'irritation de voir Henri-François, le frère incapable, toujours adulé par la mère. On ne sait pas quelles informations précises Balzac a pu recueillir sur l'oncle paternel guillotiné à Albi pour l'assassinat d'une fille de ferme. Une longue amitié platonique le lie à Zulma Carraud. Ses amours ont été nombreuses, mais ce qui a surtout marqué sa vie, ce sont la liaison avec Laure de Berny, la Dilecta (de vingt-deux ans plus âgée), qu'il rencontre en 1822 ; la liaison avec la duchesse d'Abrantès (de quinze ans plus âgée), qu'il rencontre en 1825 ; le long roman avec l'Étrangère, Ève Hanska, riche propriétaire d'Ukraine, dont il reçoit une lettre, postée à Odessa, en 1832, qu'il rencontre pour la première fois à Neuchâtel en 1833, qu'il revoit ensuite épisodiquement pendant dix-sept ans, jusqu'au mariage en 1850, le 14 mars. Balzac meurt rue Fortunée, à Paris (aujourd'hui rue Balzac), à 11 heures et demie du soir, le 18 août.
Quand on essaie d'embrasser l'œuvre gigantesque, on est saisi par la variété de la production, qui n'est pas seulement romanesque, mais philosophique, théâtrale, journalistique, épistolaire, et par la masse des projets laissés dans les cartons, dont nous ne connaissons parfois qu'un titre. La plupart des manuscrits et des épreuves corrigées se trouvent à la bibliothèque Lovenjoul à Chantilly ; les ratures et les ajouts sont multiples et donnent l'impression d'une œuvre en extension perpétuelle, artificiellement interrompue.
L'histoire de la genèse de La Comédie humaine montre que l'unité organique de l'œuvre ne s'est réalisée que peu à peu, entre 1829 et 1848, pour une "illumination rétrospective", dit Proust.
Ainsi, on voit naître successivement les Scènes, les Études, le plan d'ensemble, la technique des personnages reparaissants, puis le titre.
Il est impossible de négliger l'insistante référence de Balzac à la philosophie et aux tenants des diverses sciences : naturalistes, physiciens, chimistes, théosophes, illuministes, mystiques... Mais il ne serait pas conforme à l'esprit de l'œuvre de s'en tenir à la doctrine : substance originelle ; homme extérieur et homme intérieur ; unité diversifiée ; vouloir, pouvoir, savoir, sinon pour ce qui favorise la coexistence des contraires.
La méthode proprement balzacienne privilégie la "spécialité", intuition spécifique.
Elle est à la fois analytique et synthétique, inductive et déductive, comparative et analogique. Elle se propose de tout voir, l'envers et l'endroit.
D'où la technique des contrastes, des contrepoints, de la coexistence.
L'histoire que Balzac s'est proposé de faire est surtout l'histoire d'une société : les deux bourgeoisies, l'aristocratie, la banque et la finance. Mais l'écrivain ne néglige jamais de faire voir comment l'individu vit l'histoire. Par ses silences et ses ellipses, le roman fait que le lecteur sonde les âmes et découvre des « souffrances inconnues ». En particulier les souffrances de l'abandon, les humiliations, les faiblesses secrètes. Dialogique, le roman balzacien interdit toute lecture unidimensionnelle.
C'est une œuvre "comi-tragique". Si bouffonnerie il y a, elle demeure pleine de charité.
Son œuvre gigantesque aux ambitions démesurées fait de Balzac l’écrivain le plus emblématique du roman français. Si l'auteur de la Comédie humaine passe pour l'un des initiateurs du réalisme en littérature à l'époque romantique, l'ambiguïté de son œuvre va bien au-delà de cette catégorie. Il est aussi celui qui inaugure une nouvelle forme de relation de la vie à l’œuvre, celui pour qui les événements vécus et l’aventure littéraire, de revers en triomphes, sont portés par le même élan.
Famille


Sa vie

Il est né le 20 mai 1799. Son père, Bernard-François Balzac, est d’origine paysanne, dans l’Albigeois. L'ascension sociale de ce dernier sera constante avant la Révolution puis sous l’Empire, de 1804 à 1814.
Bernard-François fait accoler une particule au nom "Balzac" en 1802.
Formation
Honoré étudie au collège de Vendôme (1807-1813), avant de devenir pensionnaire de l’institution Ganser à Paris (1813).
Il montre un intérêt certain pour la philosophie et fait des études de droit (1816-1819).
Début de carrière
En 1819, il s’essaie à la tragédie (Scylla, Cromwell) ; entre 1820 et 1825, il compose plusieurs "romans de jeunesse" sous divers pseudonymes : lord R’Hoone, Horace de Saint-Aubin.
Il devient imprimeur en 1826 mais fait faillite en 1828 et contracte de lourdes dettes.
Premiers succès
En 1829, le Dernier Chouan est le premier roman signé "M. Honoré Balzac", il signera "de Balzac" à partir de 1830. Il fréquente les salons à la mode. La Peau de chagrin (août 1831) et Eugénie Grandet (décembre 1833) lancent sa carrière d’écrivain. Il rencontre Mme Hanska, une comtesse polonaise admiratrice de son œuvre en septembre 1833.
La consécration :
le Père Goriot (1834-1835) inaugure le principe du retour des personnages d'un roman à l'autre. Élaboration d’un vaste univers romanesque, divisé en trois axes : Études de mœurs, Études philosophiques et Études analytiques. Le Lys dans la vallée (1835) et Illusions perdues (1837-1843) finissent de consacrer Balzac comme maître du réalisme.
Dernière partie de carrière
De 1842 à 1848, il édifie la Comédie humaine : un ensemble de romans formant une fresque de la société française de la Révolution (1789) à la fin de la monarchie de Juillet (1830-1848). Plus de 2 000 personnages composent une société hantée par le pouvoir de l’argent et de la presse, livrée à des passions dévorantes. En 1845, il élabore le plan d’ensemble de la Comédie humaine, lequel prévoit 137 titres (90 romans seront achevés).
Il épouse Mme Hanska le 14 mars 1850.

La vie de Balzac Jeunesse et milieu familial (1799-1806)

Balzac est né à Tours, où les hasards d'une carrière administrative avaient conduit son père, dans une famille de bourgeois à la fois nantis et incertains, quelque peu bohèmes, ayant eu richesse et puissance, mais, pour les avoir en partie perdues, restés toujours à l'affût, toujours en calculs et en spéculations.
Balzac n'était d'une terre et d'un milieu naturel que par hasard et tourangeau que d'occasion, alors que Chateaubriand était breton, alors que Péguy sera vraiment orléanais et Barrès lorrain : son enracinement, à lui, n'était pas provincial et terrien, mais social et politique ; c'était cette France nouvelle, décloisonnée, brassée par la Révolution, lancée aussi bien, un moment, dans une grande aventure collective, que, de manière plus durable, dans la ravageuse épopée de l'ambition.
Du côté paternel : la réussite d'un berger de l'Albigeois, parti à pied, devenu secrétaire du Conseil du roi puis ayant fait carrière comme directeur des vivres, à Tours puis à Paris, pour la première région militaire de France ; la tradition philosophique, le progressisme raisonné, un peu naïf ; la fierté d'avoir été, avec la Révolution et l'Empire, de cette classe d'hommes nouveaux et d'organisateurs qui avaient contribué à la libération d'une humanité fruste mais entreprenante et vigoureuse.
Du côté maternel : une lignée de commerçants, la bourgeoisie peu politisée de la rue Saint-Denis et sensible aux écus ; une jeune mal mariée, jetée pour des raisons de fortune à un quinquagénaire ; des liaisons, un fils adultérin, l'indifférence, voire la haine, pour les deux plus jeunes, Laurence et Honoré, « enfants du devoir » ; des soucis de respectabilité ; des souffrances réelles aussi.

La formation d'un jeune philosophe (1807-1818 Les Illusions perdues

De huit à quatorze ans, Honoré est pensionnaire du collège des oratoriens de Vendôme, où il se livre à une débauche de lectures, se passionne pour les idées et la philosophie, et sans doute commence quelque chose qui ressemblait à ce Traité de la volonté dont il devait parler dans la Peau de chagrin et dans Louis Lambert.
À la fin de l'année 1813, il découvre la vie parisienne. C'est la grande époque de l'Université restaurée : Balzac suit les cours de Villemain, Guizot, Cousin ; il va écouter Cuvier, Geoffroy Saint-Hilaire. Il veut alors être philosophe ; il accumule notes et ébauches ; il est matérialiste convaincu ; il reproche à Descartes d'avoir "trahi" et se proclame disciple de Locke. Mais il veut aller plus loin que ses premiers maîtres sensualistes et idéologues ; il a médité les leçons de Cousin, qui lui a fait découvrir Thomas Reid et sa philosophie du sens intime et de la "seconde vue".
Lavater et Gall, que lui a fait connaître le docteur Jean-Baptiste Nacquart, un des plus proches amis de la famille Balzac, sont ses maîtres : il retiendra d’eux que tout est explicable à partir du visible et du physique ; mais il tente déjà, comme il le fera toute sa vie, d'intégrer le matérialisme descriptif et explicatif à une philosophie de l'aventure humaine et de son mouvement.

Les débuts et l’écriture alimentaire (1819-1822)

Premier obstacle : sa famille veut le faire notaire. Il refuse.
Il veut faire sa fortune par une œuvre littéraire. En 1819, il s'enferme dans une mansarde de la rue Lesdiguières à Paris, et il entreprend, pour réussir dans ce qu'on appelle alors "littérature", poésie lyrique, histoire, philosophie, théâtre, d'écrire une tragédie, Cromwell, 1819, péniblement imitée des maîtres classiques.
Pour vivre, il va se faire romancier mercenaire : il travaille pour des officines qui ravitaillent en romans les cabinets de lecture. C'est le début d'un pénible apprentissage. Le jeune homme apprend à connaître le monde des éditeurs et des petits journaux ; il découvre ce par quoi doit passer le talent lorsqu'on n'a pas l'indépendance et la fortune. Il fait, en profondeur, l'expérience de l'envers de la société libérale.
L'histoire de cette première production, parue sous les pseudonymes de lord R'Hoone et Horace de Saint-Aubin, est aujourd'hui bien connue. Balzac y exploite la tradition ironique du roman gai et de la satire parodique (l'Héritière de Biraque et Jean Louis, 1822).
Le Vicaire des Ardennes et le Centenaire (fin 1822) se réclament, eux, du roman philosophique et du roman sentimental ; Balzac commence à s'y exprimer par l'intermédiaire de héros jeunes et beaux, et amorce la peinture des milieux et des types. Il aborde aussi les thèmes de la vie privée et met en place ses premières figures de jeunes filles : Annette et le Criminel (1823, réédité en 1836 sous le titre plus connu d'Argow le pirate), roman de l'amour d'une jeune bourgeoise pour un hors-la-loi, et surtout Wann Chlore, roman réaliste et intimiste dans la lignée de Jane Austen (Orgueil et Préjugés), commencé en 1822 et publié seulement en 1825, qui s'inspire directement du drame familial qui s'est joué entre Mme Balzac et sa fille Laurence.


Les affres de l’éditeur-libraire-imprimeur (1823-1828)

Balzac fait la connaissance d'Horace Raisson (1798-1852), un autre polygraphe, qui le fait pénétrer dans de nouveaux cercles de la vie parisienne. Tous deux collaborent au Feuilleton littéraire, qui soutient d'abord Saint-Aubin, puis le brise comme les petits journaux briseront son futur personnage Lucien de Rubempré. Est-ce parce que Balzac a opéré, ou semblé opérer, comme le héros d'Illusions perdues, un quart de conversion à droite ?
Au début de 1824, il a publié deux brochures anonymes, certainement bien payées, peut-être provocatrices : Histoire impartiale des Jésuites et Du droit d'aînesse. Travaux de libraire, mais dans lesquels l'auteur expose des idées directement antilibérales sur l'unité, sur l'autorité, et auxquelles il ne renoncera jamais.
À l'automne 1824, Balzac se lance dans une opération de librairie avec son nouvel éditeur Canel : publier une édition à bon marché de Molière, puis de La Fontaine. La spéculation tournera court, ne laissant que du passif.
Après l’échec de Wann Chlore, en 1825, Balzac, malade, abandonne la littérature. Il trouve une aide financière auprès de Laure de Berny (1777-1836), femme mûrissante qui lui tient lieu à la fois de mère et d'initiatrice amoureuse et mondaine, et il se fait imprimeur, puis fondeur.
L'expérience durera deux ans, tournant elle aussi au désastre. Seul un prêt de sa mère empêchera le déshonneur, mais ce prêt ne sera jamais remboursé et pèsera sur sa vie entière.

Premiers succès (1828-1830)

En 1828, ayant totalement échoué comme industriel, Balzac n'a plus qu'une ressource pour gagner sa vie : reprendre la plume.

Les chouans

Il écrit un roman sur les guerres civiles de Vendée : le Gars, titre remplacé par le Dernier Chouan et que Balzac publie en 1829 (voir les Chouans). Le modèle est évidemment l'écrivain écossais Walter Scott, mais Balzac, admirateur récent des saint-simoniens (→ saint-simonisme), nourrit son roman historique de deux thématiques nouvelles : celle de la vie privée (la femme abandonnée, la femme dans la Révolution) et celle de la critique antilibérale. Le livre, cette fois, ne passa pas totalement inaperçu. On le compara même à Cinq-Mars, et pour le déclarer supérieur à l'ouvrage du comte de Vigny. Ce n'était encore qu'un in-12 pour cabinet de lecture, mais c'était assez sans doute pour faire admettre à Balzac que sa voie était tracée : désormais, il ne quittera plus jamais la littérature.
Il entre de manière plus sérieuse dans les milieux de la presse et de la librairie. Il devient l'ami de Latouche, fait sans doute la connaissance personnelle de Stendhal. Ses activités se développent dans deux directions : il devient l'un des animateurs du Feuilleton des journaux politiques, feuille saint-simonienne, et collabore à la première Presse de Girardin, ayant ses entrées à la Silhouette et à la Caricature, vivant alors l'expérience qu'il prêtera plus tard à Lucien de Rubempré dans Illusions perdues. Par ailleurs, il écrit une Physiologie du mariage (commencée en 1826, mais qui n'est achevée que fin 1829) et entreprend une série de Scènes de la vie privée, dont les premières paraissent en mars 1830. C'est en février 1830 qu'il utilise pour la première fois la particule devant son nom dans une publication en revue.


Le tournant (1830-1831) La Peau de chagrin

En juillet 1830, Balzac est en Touraine avec Mme de Berny. Lorsqu'il rentre à Paris en septembre, il commence par tenir une chronique régulière des événements politiques dans le Voleur de Girardin : ce sont les Lettres sur Paris, qui analysent, au fil des semaines, la retombée de l'enthousiasme et le début de la réaction après la chute de Charles X pendantles journées de juillet 1830.
Balzac tend à devenir féroce à l’égard du parti démocratique, pour la phraséologie qui envahit la politique, en même temps qu'il souhaite que la révolution continue et aille au bout de ses conséquences.
Dans le même temps, il signe un très riche contrat avec la Revue de Paris, par lequel il s'engage à fournir mensuellement des nouvelles et des contes (ceux-ci seront rassemblés dans Contes drolatiques, 1832-1837). Renonçant au genre vie privée, qui convient mal à ces lendemains agités de révolution, il devient une célébrité par ses récits fantastiques et philosophiques, dont le couronnement est, en 1831, la Peau de chagrin. Cette fois, Balzac est lancé. Il est l'une des figures du nouveau Paris, il gagne de l'argent, et le dépense sans compter.


Les ambitions politiques


En même temps, Balzac rêve de fortune politique. Jusqu'alors, il avait été « de gauche », tout en ayant montré par ses écrits son hostilité fondamentale au libéralisme en tant que système économique et social. Les problèmes consécutifs à la révolution de Juillet précipitent son évolution dans un sens en apparence inattendu.
Trop réaliste pour accepter l'idéalisme saint-simonien ou républicain, il ne saurait admettre la consécration du pouvoir bourgeois. Que faire ?
Sans perspectives du côté de la gauche, refusant le juste milieu, Balzac ne voit de solution que dans un royalisme moderne, fonctionnel, organisateur et unificateur, chargé d'intégrer les forces vives et d'assurer le développement en mettant fin à l'anarchie libérale et à l'atomisation du corps social par l'argent et les intérêts. C'est la fameuse conversion.
Balzac entre dans les milieux aristocratiques.
Il milite auprès du duc de Fitz-James, prépare une candidature aux élections, collabore au Rénovateur, à l'Écho de la Jeune France. Du même mouvement, il se met en tête d'être aimé de la marquise de Castries (1796-1861), qui va le conduire au bord du désespoir.


Balzac, héros balzacien (1832-1833)

L'été 1832 voit l'une des grandes crises de la vie de Balzac. Au bord de l'écroulement nerveux, il part pour son havre de Saché en Indre-et-Loire, chez M. de Margonne, un ancien amant de sa mère et il écrit Louis Lambert, en quelques nuits.
Puis il file vers la Savoie où l'attend Mme de Castries. Pour avoir l'argent du voyage, il vend à l’éditeur Mame un projet de roman, le Médecin de campagne, centré sur deux éléments contradictoires : le docteur Benassis, que la passion a failli détruire – Balzac transposant son échec sentimental personnel avec la marquise de Castries, qui s'est définitivement refusée à lui – trouve le salut par l'œuvre sociale de transformation d'un village des Alpes.
Le Médecin de campagne est ainsi une suite et un prolongement de Louis Lambert : Louis Lambert est mort fou, tué par les idées, tué par le désir, mais Benassis échappe à cet enfer par la création et l'organisation d'une utopie.
Au moment où Michelet (Introduction à l'histoire universelle, mars 1831) veut voir la modernité, depuis Juillet, comme transparente promesse, le texte balzacien en dit le caractère profondément problématique et truqué.
Si l'on ajoute que c'est parallèlement à cette carrière d'écrivain fantastique et philosophique que Balzac s'est remis aux Scènes de la vie privée (une nouvelle série paraît en 1832, centrée sur une double figure désormais clairement nommée : la femme abandonnée, la femme de trente ans) et qu'il greffe ainsi son écriture de l'intense sur une grande maîtrise de l'intimisme réaliste, on comprendra que l'on soit alors au seuil de quelque chose de capital.

Le Colonel Chabert

Le maillon intermédiaire va être, en 1833, dans le cadre d'un contrat passé avec la veuve Béchet, l'idée des Études de mœurs, puis bientôt (dans le cadre d'un autre contrat avec Werdet) celle des Études philosophiques : le polygraphe brillant et pathétique se mue en organisateur de son écriture et de sa vision des choses. Des préfaces retentissantes (Félix Davin, Philarète Chasles) soulignent l'ambition de l'entreprise.
Une cathédrale est en train de naître.
C'est ce que, à l'orée de l'époque décisive qui s'ouvre, signale le roman-carrefour qu'est la Recherche de l'absolu, à la fois étude philosophique et scène de la vie privée, ravage de la passion dans le quotidien, vision de l'unité ascendante et fascinante de la réalité.
Nul n'a raison ni tort, de Claës qui ruine sa famille pour l'Absolu, et de sa fille qui entend vivre et faire vivre la vie. Et les descriptions de maisons et d'intérieurs sont là comme éléments décisifs d'un nouveau type de narration.


L’année charnière (1834) Le Père Goriot

À la fin de cette année 1834 se produit l'événement décisif, la grande cristallisation. Pour la Revue de Paris, Balzac écrit le Père Goriot, scène de la vie privée, scène de la vie parisienne, roman d'éducation.
Balzac applique pour la première fois un système appelé à devenir fameux, celui du retour des personnages : on retrouve le Rastignac de la Peau de chagrin, mais à vingt ans, lors de son arrivée à Paris. Balzac, par ce moyen technique, découvre un moyen d'unifier son œuvre à venir et constate l'unité profonde de ce qu’il a déjà écrit ; il n'y a plus qu'à débaptiser quelques personnages, qu'à arranger quelques dates (ce sera souvent du bricolage, et les invraisemblances ne disparaîtront jamais toutes) pour que les récits sortent de leur isolement et tendent à constituer les fragments d'une fresque. Conquête suprême : grâce à ce système, Balzac s'affranchit même du fameux dénouement, héritage du théâtre bien fait, et Rastignac peut conclure par son "À nous deux maintenant !" : on attend la suite – que d'ailleurs on connaît déjà un peu, depuis la Peau de chagrin.

Mme Hanska

Le roman balzacien est vraiment né, non par miracle et génération spontanée, mais dans le mouvement d'une recherche. Si l'on ajoute que c'est en 1834 qu'un article (désagréable) de Sainte-Beuve consacre, quand même Balzac comme écrivain important, on verra que c'est bien en cette année charnière que Balzac est définitivement sorti d'apprentissage.
Et comme rien ne va jamais sans rien, Mme de Berny va bientôt mourir. Il est vrai aussi que, depuis 1832, elle est remplacée dans les préoccupations de Balzac par une comtesse polonaise, Mme Hanska, qui lui avait écrit une lettre d'admiration signée l'Étrangère.
Désormais, Balzac dispose d'une incontestable maîtrise littéraire.

L’école du roman-feuilleton (1836-1841)

En 1836, Balzac se lance dans une périlleuse entreprise de journalisme.
Il fonde la Chronique de Paris, qui échoue et le laisse un peu plus endetté encore. Un dur procès l'oppose à Buloz à propos d'une publication anticipée du Lys dans la vallée. Comme en 1832, épuisé, affolé, il s'enfuit à Saché.
Il y écrit la première partie d'Illusions perdues.
Puis, à la fin de l'année, c'est comme un nouveau départ. Girardin lance la Presse, un journal à bon marché où il inaugure la formule du roman-feuilleton. Il s'agit là d'une mutation capitale, qui va fournir à Balzac un nouveau support, un moyen d'étonnante multiplication de soi, publication d'abord en feuilleton, ensuite en volume isolé, puis reprise dans des publications collectives, et lui permettre de toucher un tout nouveau public.
À grands coups d'ébauchoir, pour un public encore dressé à la lecture des genres nobles, Balzac est en train de faire dériver le romanesque vers ce qui n'avait jamais été réellement son objet : la connaissance du réel et son explication. Balzac renonce, vers cette époque, au conte philosophique, et il est exact que le roman-feuilleton condamnait ce genre quelque peu élitiste, qu'il appelait de l'intrigue, voire du mélodrame, qu'il privilégiait les sujets parisiens, les bas-fonds, etc.
Mais aussi, la philosophie se fond désormais aux fictions vraies qui sont racontées ; elle n'a plus réellement besoin de se manifester en discours explicites.
La Comédie humaine peut venir.
C'est le feuilleton qui va, chose étrange, permettre, dans ses bas de pages quotidiens et sur son papier sale, cette explosion et cette diffusion : les Employés et César Birotteau (1837), la Maison Nucingen (1838), Une fille d'Ève (1838-1839), le Curé de village (1839-1841), Béatrix (1839), Pierrette (1840), Une ténébreuse affaire, la Rabouilleuse, Ursule Mirouet (1841) sont tous des carrefours de personnages balzaciens, mais aussi des diffuseurs des anciennes théories désormais incarnées, marchant dans leur force et leur singularité personnelles.
Le meilleur exemple est sans doute celui de César Birotteau, d'abord programmé comme conte philosophique sur les dangers de l'ambition et du vouloir-être, reprise de la Peau de chagrin et qui devient la peinture minutieuse du commerce parisien, expliquant les mécanismes d'une faillite, mais diluant la démonstration abstraite dans une histoire qui s'adresse à l'imagination et provoque l'intérêt.
Le caractère pompeux du sous-titre : Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau, avec son clin d'œil en direction de Montesquieu, amplifie et souligne le projet.
Mais l'essentiel est bien que Balzac ait désormais fondu son projet philosophique dans sa pratique romanesque.
Le plus fécond de nos romanciers , comme l'appelle alors avec une méchanceté calculée Sainte-Beuve, celui que, non sans agacement, lisent Stendhal et le jeune Flaubert, va franchir en 1840 un pas décisif.
Cette année-là échoue une nouvelle entreprise de presse, la Revue parisienne, dans laquelle il aura quand même le temps de saluer la Chartreuse de Parme en des termes surprenants. Mais cette année voit naître aussi la Comédie humaine.


Le grand auteur de la Comédie humaine (1842-1848)

La Comédie humaine est d'abord une entreprise de librairie : édition compacte, suppression des préfaces, des alinéas, des chapitres, souscription.
C'est aussi une entreprise d'unification un peu extérieure aux textes : beaucoup de romans réédités seront remaniés de manière à entrer dans le système de reparution des personnages ; les plus anciens, comme les Chouans ou la Peau de chagrin, subiront les modifications les plus importantes ; souvent les personnages réels disparaîtront et céderont la place à leurs homologues de l'univers balzacien, le plus intéressant est le poète Canalis, qui remplace sans problème apparent, du moins Balzac le pense-t-il, Lamartine et Victor Hugo.
Le point le plus important est évidemment la naissance d'un espace biographique imaginaire, aucun personnage n'étant connaissable dans un seul roman, et surtout les périodes les plus anciennes de sa vie n'étant données à lire qu'après les périodes les plus récentes : ainsi pour Rastignac, dont le passé le plus lointain figure dans le Père Goriot, dont la période 1830 est contée dans la Peau de chagrin, la période intermédiaire dans la Maison Nucingen et l'Interdiction, et dont l'aboutissement politique se trouve dans les Comédiens sans le savoir.
Mais, surtout, la Comédie humaine est l'occasion pour Balzac de classer ses romans et de les présenter en termes philosophiques. Un classement ascensionnel de la vie privée conduit aux études analytiques et refuse les facilités de la chronologie des intrigues.
Un Avant-Propos inflige au lecteur de bonne foi toute une théorie de la littérature et de la société. Le contrat fut signé en 1841, les premiers volumes parurent en 1842. Il devait y avoir dix-sept volumes, dont le dernier devait paraître en 1848. Désormais, Balzac, dans ses lettres à Mme Hanska, pouvait parler de lui comme du grand auteur de la Comédie humaine


Les dernières années (1848-1850)

Honoré de Balzac, la Cousine Bette
Bien des choses cependant demeuraient à faire, et le grand œuvre était plein de trous. De plus, Balzac continuait à courir après l'argent.
C'est d'abord la tentative au théâtre : mais Vautrin est interdit en 1840, les Ressources de Quinola tombent en 1842.
C'est surtout une sorte de troisième carrière romanesque : Un début dans la vie et Albert Savarus (1842), Honorine et la Muse du département (1843), Modeste Mignon (1844), Splendeurs et misères des courtisanes (1847), l'Envers de l'histoire contemporaine (jusqu'en 1848), les Paysans, le Député d'Arcis, les Petits Bourgeois sont aussi de cette époque.
En 1846-1847, une œuvre capitale, les Parents pauvres (le Cousin Pons, la Cousine Bette) accomplissent la prouesse de rejoindre le temps : la date de l'intrigue est la même que la date de l'écriture.
Le temps est rattrapé au moment où règnent les nouveaux maîtres dont le lecteur connaissait le passé.
Ensuite, la production se ralentit, puis se tarit. Balzac, épuisé, est pris tout entier par son idée fixe d'épouser Mme Hanska, pour qui il installe à Paris, rue Fortunée, un invraisemblable palais.
L'année 1848 est une année à peu près vide : nouvelle tentative au théâtre avec la Marâtre puis la fin de l'Envers de l'histoire contemporaine.
Pendant les journées de juin 1848, Balzac, ruiné par la révolution, hurlera à la mort, du moins dans les lettres à Ève Hanska.
Pendant les deux années qui suivent, Balzac cesse d'écrire.
En 1850, il finira par épouser sa comtesse, mais mourra presque aussitôt d'épuisement, salué par Victor Hugo.
Après sa mort, sa veuve paiera ses dettes et fera éditer ou terminer les manuscrits disponibles.
Balzac avait corrigé de sa main un exemplaire de sa Comédie.
C'est lui qui devait servir aux éditions ultérieures.


L'œuvre de Balzac


Il existe aujourd'hui un modèle de roman balzacien, ou stendhalien comme il a existé un modèle de tragédie classique ou de sonnet français. Ce modèle a été contesté à la fin du XIXe s. et au XXe s. par toute la littérature qui se réclame de Joyce, Proust, des romanciers américains et du nouveau roman.
Le roman balzacien, fondé sur la description, l'analyse, la fourniture d'une documentation et le récit logique et complet d'une histoire, est-il dépassé ? Avant d'envisager la question, il importe de comprendre comment le roman balzacien, qui a servi au moins de repère au roman naturaliste avant de servir de repoussoir et d'antiroman au roman poétique, n'est pas sorti tout armé de l’esprit de Balzac, celui-ci fût-il un créateur hors normes.

Les préoccupations philosophiques

Pendant longtemps, Balzac a été un conteur philosophique. Les préoccupations théoriques (psychologie, philosophie de l'histoire, philosophie générale) dominent, des premiers romans (1822) aux Études philosophiques (1833-1835), peintures et narrations n'apparaissant guère que comme leurs annexes ou illustrations. Une œuvre réaliste de la maturité comme César Birotteau devait être d'abord une Étude philosophique, c'est-à-dire l'illustration romanesque d'une proposition abstraite sur le danger des passions et du besoin d'absolu.
On a peu à peu retrouvé aujourd'hui ce soubassement et cette impulsion philosophique, après que l'on eut abusivement, pendant longtemps, vu en Balzac uniquement un peintre de façades et de vieilles maisons, un narrateur d'histoires privées aux allures de vieilles dentelles et de costumes agressivement réels, les uns modernes, les autres surannés.
Romancier malgré lui, Balzac n'a que peu à peu et très tardivement accepté le roman comme moyen d'expression de soi. En 1835-1836, il considère encore que Séraphita est ce qu'il a écrit de plus important, et, dans l'économie de la Comédie humaine, les romans ne seront justifiés, in fine, que par les Études philosophiques et par les Études analytiques. On risque aujourd'hui de ne voir là que bavardages, à-côtés, sous-produits ou fausses fenêtres. C'est là un risque, immense lui aussi, de mutilation de l'œuvre et de sa signification.
En fait, le problème est le suivant : quand, pourquoi et comment l'œuvre balzacienne, qui visait autre chose, est-elle devenue une œuvre objectivement et purement romanesque ?

Les élans et les échecs du siècle nouveau, L'élan de la révolution bourgeoise

Honoré de Balzac, le Lys dans la vallée

Les hommes de la Comédie humaine sont tous nés sans doute pour être beaux (la Fille aux yeux d'or), mais ils nous sont montrés peu à peu avilis, utilisés par le système libéral, soumis aux intérêts. Même – et peut-être surtout – lorsqu'ils jouent le jeu, ils n'en sont que les illusoires vainqueurs et bénéficiaires.
S'ils ont écrasé ou dominé les autres, ils n'ont finalement qu'écrasé les premières aspirations et les idéaux de liberté qu'ils portaient en eux-mêmes.
Le roman balzacien déclasse radicalement les prétentions libérales bourgeoises à avoir définitivement promu et libéré l'humanité. Au cœur même du monde nouveau, que ne menacent plus ni les théologiens ni les seigneurs féodaux, mais que mènent les intérêts, se sont levés des monstres, caricatures du vouloir-vivre et du vouloir-être qui avaient porté la révolution bourgeoise : ambition, énergie, argent, naguère vecteurs humanistes universalistes, formes et moyens de la lutte contre le vieux monde, deviennent pulsions purement individualistes, sans aucun rayonnement, peut-être efficaces mais en tout cas trompeuses et génératrices d'illusions perdues.
Cela, c'est la face sombre.
Mais il est une face de lumière : celle de tant d'ardeur, de tant de foi en la vie, qu'ignoreront les héros et les héroïnes de Flaubert.
Le roman balzacien est celui de toute une vie qui pourrait être et qu'on sent sur le point d'être : l'amour d'Eugénie Grandet, le cénacle de la rue des Quatre-Vents, la fraternité de Rastignac, Michel Chrestien et Lucien de Rubempré.
Il est beaucoup de laideur au monde, mais le rêve n'est pas encore massacré.
L'argent barre l'avenir, mais s'il est déjà tout-puissant, il est encore balancé par d'autres forces dans les âmes, dans les cœurs, dans l'histoire même, avec toutes les forces qui ne sont pas entrées en scène.
Le roman balzacien est porté, comme toute l'histoire avant 1848. Les bourgeois même de Balzac ne sont pas encore bêtes et béats.
Ils ont de l'âpreté, du génie, et Nucingen est le Napoléon de la finance comme Malin de Gondreville est le roi de l'Aube, comme Popinot est le fondateur d'un empire, comme Grandet unit le vieux charme français à l'inventivité, à l'intelligence, au dynamisme de tout un monde libéré. Les bourgeois de Zola seront bien différents, sans génie, uniquement jouisseurs et possesseurs, installés, flasques, à la rigueur méchants, mais n'étant plus messagers de rien.


L'omniprésence de l'échec

La dramaturgie balzacienne en son fond est constituée par l'interférence de deux élans à la fois solidaires et contradictoires : l'élan de la révolution bourgeoise, l'élan des forces qui contestent et nient la force bourgeoise, qui en annoncent et signifient le dépassement, mais qui n'auraient jamais surgi et ne seraient jamais affirmées ni imposées si la révolution bourgeoise n'avait d'abord eu lieu et n'avait d'abord été dite.
Le roman balzacien, malgré certaines apparences, est le roman de la jeunesse de la bourgeoisie, en ce qu'elle est – aussi, encore – un moment de la jeunesse du siècle et de l'humanité.
Cependant, le roman balzacien est le plus souvent un roman de l'échec, seuls les êtres vulgaires et indignes acceptant de réussir et pouvant vraiment réussir dans cet univers faussé.
Mais il faut bien comprendre le sens de cet échec : il n'est pas échec constitutif et naturel, échec qui fasse preuve contre l'homme ; il est échec de ce qui méritait de réussir.
L'ambition, l'énergie balzacienne définissent un monde romanesque ouvert. Or, le sort fait au vouloir-être fait que la seule fidélité possible à soi-même et aux promesses originelles est le naufrage ou la catastrophe.
On peut toujours finir par durer (Eugénie Grandet vieillissante, voir Eugénie Grandet, Vautrin chef de la Sûreté, David Séchard dans sa maison au bord de la Charente), mais on ne dure qu'en ayant renoncé, qu'en ayant dû renoncer à l'intense et au fort, en devenant bourgeois, ou en étant capable de vivre sans briser le cadre bourgeois.


Stendhal en 1840.


Balzac s’en prend encore çà et là assez injustement à Eugène Sue, mais rend un hommage vibrant à La Chartreuse de Parme de Stendhal, à une époque où, d’un commun accord, la presse restait muette sur ce roman :
"Monsieur Stendhal a écrit un livre où le sublime éclate de chapitre en chapitre. Il a produit, à l’âge où les hommes trouvent rarement des sujets grandioses, et après avoir écrit une vingtaine de volumes extrêmement spirituels, une œuvre qui ne peut être appréciée que par les âmes et les gens supérieurs".
Mais ceci marque le dernier numéro de La Revue parisienne qui s’éteindra après la troisième parution.
Balzac et Dutacq partageront les pertes qui n’étaient d’ailleurs pas très lourdes. Cependant, une fois encore, Balzac a encore échoué dans la presse, et dans les affaires.


Monographie de la presse parisienne

Cette monographie humoristique, par Balzac (1843), a été rééditée par Jean-Jacques Pauvert en 1965, tirant ainsi des oubliettes une analyse complète des composantes de la presse répertoriées par Balzac. On trouve dans ce pamphlet la définition du publiciste, du journaliste, du "rienologue" : "Vulgarisateur, alias : homo papaver, nécessairement sans aucune variété, qui étend une idée d’idée dans un baquet de lieux communs, et débite mécaniquement cette effroyable mixtion philosophico-littéraire dans des feuilles continues" Balzac sait se montrer désinvolte dans la satire.
La préface de Gérard de Nerval est dans le même ton. Dans un style pince-sans-rire, il donne une définition du canard : « information fabriquée colportée par des feuilles satiriques et d’où est né le mot argot "canard" pour désigner un journal

Balzac, Latouche et Sainte-Beuve

Balzac se lance alors dans la compétition, rédigeant pratiquement seul pendant trois mois une revue qu’il veut également littéraire et politique.
Il publie entre autres Z. Marcas, le 25 juillet 1840, qui sera intégré à La Comédie humaine en août 1846 dans les Scènes de la vie politique.
Outre ses attaques contre le régime monarchique, la Revue parisienne se distingue par des critiques littéraires assez violentes dans l’éloge comme dans la charge.
Parmi ses victimes on compte Henri de Latouche avec lequel Balzac est brouillé et qu’il hait désormais :
"Monsieur de Latouche n’a ni l’art de préparer des scènes, ni celui de dessiner des caractères, de former des contrastes, de soutenir l’intérêt. "
Et aussi, son ennemi naturel, Sainte-Beuve, dont le Port-Royal fait l’objet d’un véritable déchaînement.
Balzac se venge des humiliations passées :
"Monsieur Sainte-Beuve a eu la pétrifiante idée de restaurer le genre ennuyeux. En un point, cet auteur mérite qu’on le loue : il se rend justice, il va peu dans le monde et ne répand l’ennui que par sa plume.


Donner à comprendre le monde, Un réel objectif

Rigoureusement descriptif, analytique et narratif, le roman balzacien est le roman d'un réel connaissable.
Les descriptions, les récits, toute l'information fournie au lecteur pour comprendre ce qui va se passer postulent la validité d'un discours qui entend saisir et surtout transmettre le réel objectif. À cet égard, le roman balzacien est bien dans la lignée théorique du xviiies.
scientifique, et il est bien aussi le roman de la période positiviste, avant que le positivisme se sclérose en scientisme mécaniste.
Que ce soit l'industrie d'un pays, ses structures économiques, les relations qui s'établissent entre les hommes, le roman balzacien ne doute jamais qu'on puisse les faire comprendre et que ce soit objets pleins, jamais apparents ou illusoires. D'où le ton fortement historique de la narration balzacienne, même lorsqu'elle concerne des faits ou personnages imaginaires : tel fait s'est produit telle année, tel mariage, telle rencontre sont contemporains de telle mystérieuse disparition, etc.


Eugénie Grandet

C'est toujours avec assurance que Balzac met en place l'imaginaire, figure semblable du réel, et dont le triomphe est sans doute ces biographies fictives qui se constituent à partir de ses romans, et dont lui-même a donné le premier modèle à propos de Rastignac, préface d'Une fille d'Ève : Rastignac (Eugène-Louis), fils aîné du baron et de la baronne de Rastignac, né à Rastignac, département de la Charente, en 1799 ; vient à Paris en 1819, faire son droit, habite la maison Vauquer, y connaît Jacques Collin, dit Vautrin, et s'y lie avec Horace Bianchon, le célèbre médecin.
Il aime madame Delphine de Nucingen, au moment où elle est abandonnée par de Marsay, fille d'un sieur Goriot, ancien marchand vermicellier, dont Rastignac paye l'enterrement. Il est un des lions du grand monde (voyez tome IV de l'œuvre) ; il se lie avec tous les jeunes gens de son époque, avec de Marsay, Beaudenord, d'Esgrignon, Lucien de Rubempré, Emile Blondet, du Tillet, Nathan, Paul de Manerville, Bixiou, etc.
L'histoire de sa fortune se trouve dans “la Maison Nucingen” ; il reparaît dans presque toutes les scènes, dans “le Cabinet des antiques”, dans “l'Interdiction”.
Il marie ses deux sœurs, l'une à Martial de La Roche-Hugon, dandy du temps de l'Empire, un des personnages de “la Paix du ménage” ; l'autre, à un ministre. Son plus jeune frère, Gabriel de Rastignac, secrétaire de l'évêque de Limoges dans “le Curé de village” dont l'action a lieu en 1828, est nommé évêque en 1832, voir la “Fille d'Ève”.
Quoique d'une vieille famille, il accepte une place de sous-secrétaire d'État dans le ministère de Marsay, après 1830, voir les “Scènes de la vie politique”, etc.
Il n'existe aucun tremblé dans ce texte profondément sérieux : c'est là la vraie vie de Rastignac, et le retour des personnages est tout autre chose qu'artifice ou habileté technique pour coudre ensemble des morceaux ou relancer l'intérêt.
Il ne s'agit pas de suite : il s'agit d'épaisseur et de multiplication des plans ; il s'agit de sortir de l'univers rigoureux et réservé du théâtre intellectuel ou mondain pour rendre compte d'un monde réel devenu immense.
Balzac ne s'évade pas du réel dans l'imaginaire : son roman double le réel, constitue un univers parallèle et surdimensionné qui, loin de mettre en cause la valeur et l'intérêt du réel, administre par l'acte même de l'écriture comme la preuve de son existence. On ne contestera ce style et cette vision que lorsqu'on commencera, à la fois, à douter des vertus du positivisme bourgeois et de toute science, devenue menace pour l'ordre bourgeois.


Le réalisme balzacien

On peut parler de réalisme du roman balzacien dans la mesure où il vit de l'expression de réalités qui ne sont pas encore admises en littérature, et donc dans la mesure où il fait brèche dans un idéalisme littéraire ignorant des réalités vécues par les lecteurs du xixes.
On a du mal aujourd'hui à mesurer ce qu'il y eut de neuf à évoquer, de plein droit et en pleine lumière, les problèmes et les choses de l'argent, du mariage, des bas-fonds, tout simplement des rapports humains. Balzac est le premier à avoir dit que tout, dans la vie, dépendait des problèmes de budget et des problèmes sexuels. Déterminismes économiques, déterminismes psycho-physiologiques : il liquide la vision classique d'une humanité libre.
Et cela, il le fait d'une manière à la fois systématique et ouverte, non polémique et crispée, ce qui le distingue des réalistes et naturalistes qui suivront. (déterminisme.)
Les secrets du lit de Mme de Mortsauf, voir le Lys dans la vallée, la pièce de cent sous de Raphaël, le "mécanisme des passions publiques" et la "statistique conjugale dans la Physiologie du mariage, les phénomènes d'accumulation primitive et de la recherche d'investissements nouveaux, le problème de l'organisation du crédit : Balzac a vite choqué parce qu'il éventait des mystères connus de tous.
On l'a accusé de sordide matérialisme ; on a dit qu'il se ruait vers le bas parce qu'il a montré de manière impitoyable qu'au sein de la France révolutionnée l'homme était de nouveau dans les fers. Michelet n'a pas aimé les Paysans, qui mettaient à mal certaines constructions théoriques sur la libération des campagnes.
Il y a certes dans les Paysans une volonté de noircissement ; l'essentiel toutefois n'y est pas l'image directe et explicite, mais l'expression des rapports sociaux (néo-féodaux ; classes majeures des villes ; prolétariat rural).
Balzac est un écrivain des tensions et contradictions de la France révolutionnée. Son réalisme, par conséquent, n'est pas seulement descriptif, mais scientifique et par là même épique. Une lecture superficielle n'y voit que le détail et le culte du détail. Une lecture approfondie y trouve le réel en son mouvement.


Un réalisme mythologique

Balzac a expliqué qu'il ne suffisait pas de peindre César Birotteau : il fallait le transfigurer. La précision est capitale. Mais il ne s'agit pas là d'un froid procédé littéraire, applicable ou non par quiconque, en tout temps et en tout lieu. On ne transfigure que le transfigurable. On ne transfigure que dans une époque apte à la transfiguration.

Honoré de Balzac, les Dangers de l'inconduite
Balzac, comme tous ses contemporains, connaissait et avait pratiqué les textes réalistes, qui, dans la mouvance du journalisme et de la littérature populaire ou industrielle , s'étaient multipliés depuis l'Empire. Jouy (l'Hermite de la Chaussée d'Antin, 1812-1814) et ses imitateurs Henri Monnier.
Les sujets étaient pris à la vie quotidienne, à Paris, au monde moderne. Passant au romanesque, le style était évidemment guetté par la vulgarité, par le scepticisme narquois ou par le réalisme sans perspectives.
L'infraréalisme des « Hermites » et de Monnier ne pouvait en aucun cas déboucher dans un réel nouveau roman. Il ne pouvait que fournir en croquis et pochades un public ne demandant qu'à être rassuré.
À l'inverse, le frénétique ou le néo-dramatique, les romans de Jules Janin ; le Dernier Jour d'un condamné de Hugo, tout ce qui relevait plus ou moins directement de la perception d'un nouvel absurde et d'un nouvel inhumain dans le réel moderne, manquait parfois d'enquête et d'enracinement.
Le réalisme balzacien est le réalisme des inventaires et des budgets en même temps que le réalisme d'une immense ardeur. Réalisme mythologique, le réalisme balzacien s'inscrit de Raphaël à Vautrin en passant par Louis Lambert : non pas personnages falots ou plats, mais personnages de dimensions surhumaines.
Baudelaire disait que, chez Balzac, même les concierges avaient du génie, et il est vrai que Pons, malgré son spencer du temps de l'Empire, se transforme en statue du commandeur. Il n'est pas de ganache chez Balzac qui ne s'illumine, et le colonel Chabert, avec son mystère et sa folie, est bien aux avant-postes de toute une littérature qui, dans le décor moderne et quotidien, est une littérature de l'absolu dans le Colonel Chabert.
La leçon est claire : chez Balzac, l'absolu n'est pas menacé par le réalisme et le réalisme implique l'absolu.


Mort

Le 18 août 1850. Balzac est inhumé le 21 août au cimetière du Père-Lachaise, où Victor Hugo prononce son éloge funèbre.



Une œuvre inclassable. Un créateur hors normes

Du jeune plumitif ardent, besogneux et inconnu de 1822 au mari de Mme Hanska que voit Victor Hugo sur son lit de mort, du Balzac de trente-quatre ans, auteur fantastique reçu et tout juste auteur de quelques Scènes de la vie privée, au Balzac des Parents pauvres en passant par celui du cycle Vautrin, la courbe est impressionnante, immense. Pendant cette trentaine d'années sont préparées ou produites certaines des œuvres majeures du XIXème siècle français, et sans doute de la littérature universelle.
Visionnaire, journaliste, homme de lettres, caricaturé aux côtés d'Alexandre Dumas, courant après le genre Eugène Sue, attendu par le génie de Baudelaire, promis aux sculptures de Rodin, Balzac, à s'en tenir aux apparences et aux schémas, se meut de l'univers de Dante à celui de Sacha Guitry.
Ses revenus, ses tirages, ses amours, ses folles dépenses, ses voyages, son audace, sa vanité, ses collections, son gros ventre, ses coups de pioche dans le siècle, ses efforts pour se faire admettre à droite, ses fidélités continues à gauche, son refus du style bucolique, messianique, romantique ou social, tout fait de lui un personnage difficile à classer, absolument incapable de prendre place dans le cheminement littéraire, idéaliste et lumineux, du XIXème siècle romantique, romantisme en littérature.

Déjà au-delà du XIXème siècle.

Il y a, dans toute l'entreprise balzacienne, quelque chose qu'il est impossible de mobiliser ou de récupérer pour un finalisme quelconque.
On y chercherait en vain l'équivalent du drapeau tricolore de 1830 ou de 1848, du rocher de Jersey, de la maison du berger ou d'une expulsion du Collège de France.
Mais une chose est sûre, et qui vérifie le caractère inclassable de Balzac : la tradition comme la pratique républicaine bourgeoise de la fin du siècle ne sauront quoi faire de cet homme pour qui le conflit majeur du monde moderne avait cessé d'être celui qui oppose les classes moyennes aux nobles et aux prêtres, pour devenir celui opposant l'argent à la vie, au besoin de vivre et à tout ce qui naissait de la victoire de l'argent même.
La IIIe République ne l'a pas plus aimé qu'elle n'a aimé Stendhal.
Pour ses rues, pour ses places, pour ses fastes, pour ses distributions de prix, pour ses départs à la guerre, elle leur a préféré à tous deux Hugo, Michelet, Gambetta, voire Thiers ou Chateaubriand. Pourquoi ? Ainsi se pose le problème de la signification et de l'efficacité réelles de l'œuvre balzacienne.
Toute cette production, de 1820 à 1850, à la fois épousait la courbe du siècle et la dépassait.
Monstre sacré de la vie parisienne et moderne, Balzac se trouvait anesthésié, neutralisé, comme mis sur orbite et hors planète par la critique officielle.
À distance, aujourd'hui, tout le messianisme bourgeois laïc et républicain a perdu nombre de ses rayons. Balzac en a gagné de nouveaux. Il n'est pas sans intérêt de noter que le bénéficiaire n'est nullement de la race des écrivains angéliques, mais de la race des écrivains producteurs et prolétaires.
D'autres, autant que par leur œuvre, se sont imposés par leur vie exemplaire ou par leurs aventures. Il n'a pas été possible de réduire, ou simplement de ramener Balzac à ce genre de sous-épopée. Son œuvre prime, dont longtemps on n'a pas trop su que faire, contenu qui contestait formes et pratiques enseignées : admirable témoignage sur la force de la littérature, alors que balbutient encore les idéologies ...

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Posté le : 18/08/2013 14:40
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Alexander Murray Palmer Haley
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Le 11 août 1921 naît Alex Haley écrivain auteur de "Racines" et de l'autobiographie de "Malcom X"


Journaliste et écrivain autodidacte, lauréat du prix Pulitzer, Alex Haley est l’auteur de l’autobiographie de Malcolm X, mais c’est surtout avec Racines, un livre dont l’adaptation fut un des plus grands succès de l’histoire de la télévision, qu’il a marqué l’histoire.


Alexander Murray Palmer Haley est né à Ithaca, dans l’Etat de New-York le 11 août 1921.
Il est le fils de Simon Alexander Haley (qui est enseignant), et de Bertha George Palmer qui est également enseignante. La famille s’installe en 1921 à Henning, dans le Tennessee où le jeune Alex passera les cinq premières années de sa vie.
C’est à Henning qu’Alex se familiarisera avec les histoires de sa grand-mère maternelle, Cynthia Palmer, qui fait remonter la généalogie d’Alex à son arrière-arrière-arrière-arrière grand-père.
Ce dernier était selon elle un africain dont le nom originel était « Kin-Tay » et qui a été renommé Toby lors de son arrivée aux Etats-Unis.
Le père d’Alex Haley se remarie deux ans après le décès de cette dernière lorsque le jeune Alex a 10 ans.
Loin d’être un étudiant brillant, Haley n’est guère passionné par les études et en mai 1939 à l’âge de 17 ans, s’engage pour trois ans dans la marine américaine.
Il est embauché comme garçon à tout faire...et sert d’abord sur le "Pamlico". Pour tuer le temps, il se met à l’écriture et apprend à écrire des histoires et raconter des récits.
Il commence par écrire à sa famille et à ses amis, envoyant jusqu’à 40 lettres par semaine.
En retour, il recevait à peu près autant de lettres qu’il en avait envoyé. Il devient rapidement célèbre auprès de ses camarades marins, et ces derniers le sollicitent pour qu il écrive leurs lettres, certains lui offrant même une rémunération financière.
Alex Haley écrit donc pour eux des lettres, notamment des lettres d’amour, envoyées aux épouses, petites amies, fiancées...
En mai 43, il est transféré sur le USS Murzim, un cargo qui navigue dans le pacifique, à l’époque théâtre d’opérations de guerre. Haley continue d’écrire et rapidement décrit les scènes de combat, et un de ses articles est publié dans un journal de la marine, "Coast Guard Magazine", en février 1944.
Parallèlement, Haley enverra des articles à des magazines grand public, mais il faudra attendre plusieurs années avant de voir un de ses articles publié.
Ces années lui permettront néanmoins de perfectionner son écriture.
Un article de Haley dans lequel il décrit la déception des marins qui restent sans nouvelles de leurs familles ou amis est ainsi repris dans les grands journaux du pays.
Vers la fin de la guerre, Haley est nommé responsable d’un périodique de la marine. Son travail est apprécié et lui vaut de monter en grade.
Il est successivement reporter, sous-responsable éditorial, puis directeur de la publication des gardes côtes, appelée "Helmsman" il est alors basé au QG du 3ème district des gardes côtes à New-York.
En juin 49, il est promu journaliste, première classe, et en décembre journaliste en chef, un poste spécialement créé pour lui puisqu’il est le seul à l’occuper à l’époque dans la marine.
Il continue d’écrire pour la Marine, et travaille comme adjoint du responsable des relations publiques.
Il occupera ce poste jusqu’en 1959, date de son départ de la marine qu’il quitte après avoir passé plus de 20 ans.
Après avoir quitté la marine, Alex Haley devient écrivain à plein temps, travaille pour le « Reader’s Digest » dans lequel il écrit notamment des biographies.
Il conduit parallèlement des interviews qui feront date pour le magazine Playboy Miles Davis est la première personnalité reçue par Haley dans le cadre de ces interviews.
L’interview de Miles Davis paraît dans le numéro de septembre 1962.
Dans cette interview, Miles Davis livre notamment ses sentiments à propos du racisme.
Les interviews réalisées par Haley prennent peu à peu une importance significative dans le magazine.
Haley fera ainsi d’autres interviews marquantes de personnalités célèbres, comme Martin Luther King, la plus longue que ce dernier ait jamais accordé à un magazine ou Cassius Clay, qui explique notamment pourquoi il change son nom en Mohammed Ali.
Sammy Davis Jr ou Quincy Jones feront partie des célébrités interviewées par Alex Haley.Mais c’est son travail sur Malcolm X qui va rendre Haley célèbre dans tous les Etats-Unis.
Pour arriver à achever son livre, Haley a suivi pendant deux ans Malcolm X et travaillé avec lui.
De leurs conversations, il tire l’autobiographie de Malcolm X, telle qu’exprimée par Malcolm X lui-même.
L’idée de réaliser un livre est venue suite à une interview de Malcolm X réalisée en 1963 par Haley pour le compte de Playboy.
A l’époque de leurs premières rencontres, Malcolm X est encore porte-parole de la Nation de l’Islam.
Le livre publié en 1965, après la mort du leader afro-américain aura un grand impact sur le mouvement noir aux Etats-Unis.
Dans l’autobiographie, Malcolm X décrit son expérience du racisme dans de petites bourgades, la violence raciale, les délits qu’il a commis et qui le mènent en prison.
En 1977, un peu plus de dix années après sa parution, l’autobiographie de Malcolm X s’était vendue à plus de six millions d’exemplaires aux Etats-Unis et dans le reste du monde.
Elle fut classée par Time Magazine comme un des dix livres de non-fiction les plus importants du 20ème siècle.
Mais le travail de Haley sur Malcolm X sera surpassé par une autre œuvre qui lui apportera la gloire, le prix pulitzer, et une renommée mondiale.
En 1976, son roman “Roots : the saga of an American Family” est publié. Le roman est une adaptation plus ou moins romancée de l’histoire de sa propre famille.
Elle commence avec la capture de Kunta Kinte, un africain capturé en 1767 en Gambie et amené dans la province du Maryland dans le Sud des Etats-Unis où il devient esclave. Haley affirme être descendant à la septième génération de Kunta Kinté.
Haley s’est donné corps et âme pour que le projet prenne vie.
Il lui a fallu plus de 10 ans de recherches, de voyages, d’écriture sur plusieurs continents pour accoucher de ce livre. Il a parcouru les Etats-Unis, s’est rendu sur le continent africain en Gambie, dans le village de Jouffouré pour retrouver la trace de ses ancêtres et pour rencontrer un griot local, Kebba Kanji Fofana, qui avec sa mémoire orale de l’histoire put citer le nom de Kunta Kinté , l’ancêtre d’Alex Haley.
En 1977, Roots remporta le prix national du livre aux Etats-Unis National, Book Award, et un prix Pulitzer spécial.
En l’espace d’une année, le livre se vendit à plusieurs millions d’exemplaires et devint un support de cours dans pas moins de 500 universités américaines. Il fut traduit par la suite en plus de 37 langues.
Avec Racines , Alex Haley montrait que les esclaves ne venaient pas de nulle part, mais qu’ils avaient emporté d’Afrique des traditions qui avaient survécu, comme certaines chansons, certaines croyances, certains mots…
Par ailleurs son portrait de Kunta Kinté montrait que les esclaves n’acceptèrent pas leur condition docilement, mais qu’ils essayaient de s’enfuir ou de se rebeller.
L’adaptation télévisée de Racines, diffusée pour la première fois du 23 au 30 janvier 1977 attira plus de 130 millions de téléspectateurs, la plus grosse audience de l’histoire de la télévision américaine à cette époque.
Mais "Racines" fut sujet à plusieurs controverses.
Tout d’abord, le livre fut attaqué pour plagiat.
Après un procès, Haley signa un accord pour 650 000 dollars, avec Harold Courlander, auteur d’un livre intitulé "The African" "L’Africain". Haley avait admis que de larges passages de "racines" avaient été copiés de ce livre, mais affirma que s’il se les était appropriés, ce n’était pas de façon intentionnelle...Il fut également poursuivi en 1988 par une autre auteure, Margaret Walker, mais cette dernière fut déboutée par le tribunal.
Bien que Haley ait reconnu que son roman était avant tout une œuvre de fiction, il affirmait que son ancêtre était bien Kunta Kinté, un africain enlevé du village de Juffuré situé dans l’actuelle Gambie.
Il prit le nom de Toby aux Etats-Unis et eu une fille appelée Kizzy, qui serait l’arrière-arrière-arrière grand-mère d’Alex Haley. L’écrivain affirmait également avoir identifié le bateau sur lequel Kunta Kinté avait été transporté d’Afrique en Amérique en 1767.
Cependant, selon certains généalogistes et historiens qui ont repris les recherches de Haley, l’histoire ne colle pas.
Si un esclavage nommé Toby a bien été retrouvé à cette époque, il figurait déjà dans les registres en 1762, soit 5 ans avant la date donnée par Haley, et il est décédé avant la naissance de ses descendant(e)s supposés.
On a également affirmé que le griot que Haley avait retrouvé en Gambie avait été prévenu que celui-ci effectuait des recherches historiques, et s’était arrangé pour citer le nom de Kunta Kinté faisant ainsi croire à Haley qu’il avait véritablement découvert le village d’où son ancêtre était originaire.
Par la suite, Alex Haley travailla sur d’autres projets, comme l’histoire de Henning, la ville où il avait grandi, ou sur une biographie de Frank Wills, l’officier de sécurité qui avait découvert le cambriolage qui déclencha l’affaire du Watergate.
Il travailla également sur une série télévisée intitulée "Palmerstown", et écrivit des nouvelles.
En 1987, Haley qui vivait en Californie à Beverly Hills déménagea pour aller vivre dans le Tennessee, l’Etat où sa famille avait vécu.

Il mourut d’une crise cardiaque le 10 février 1992 à Seattle.

Son roman "Queen", un roman épique centré sur la branche familiale de Simon Alexander Haley, son père, fut achevé en 1993 après sa mort.
Malgré les controverses qui entourent le livre, "Racines" eut un impact fantastique aux Etats-Unis et dans le monde, à une époque où le pays sortait juste de la fin de la lutte pour les droits civiques, alors que les afro-américains cherchaient encore leur place comme citoyens américains à part entière.
Comme l’écrivirent des journalistes du "Time Magazine", "Racines" avait permis aux Blancs de mieux comprendre l’histoire des Noirs, et avait symboliquement aidé les Noirs américains à faire partie de la communauté nationale américaine.
Roots a aussi suscité un intérêt des afro-américains et des Noirs de la diaspora pour l’Afrique et pour leurs racines.
Aujourd’hui, un afro-américain qui le souhaite peut grâce aux progrès de la science déterminer de quel endroit d’Afrique certains de ses ancêtres sont originaires.
Spike Lee a ainsi apprit que certains de ses ancêtres seraient venus d’une partie d’Afrique qui se trouve aujourd’hui au Cameroun, tandis que Whoopi Goldberg voit ses origines remonter dans ce qui est aujourd'hui la Guinée Equatoriale.

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"Racines"

Il y a 25 ans : le formidable succès de "Racines" La série popularisa le nom de "Kunta Kinté" l'africain


"Racines" ou Roots : série télévisée qui a marqué plusieurs générations de téléspectateurs.
Produite par David Wolper d’après le livre d’Alex Haley récompensé par le prix pulitzer, qui retrace la saga d’une famille d’esclaves africains.
Acteur star, Levar Burton alias "Kunta Kinté".

Quand la chaîne ABC diffusa pour la première fois la série, celle ci pris le monde par surprise et créa une onde de choc à travers la diaspora noire, et à travers tous les Etats-Unis.
C’était au cours de la dernière semaine de janvier 1977.
La lutte pour les droits civiques en Amérique du Nord, et les mouvements anti-colonialistes africains avait popularisé dans le monde le problème de la condition des noirs.
Cependant, le succès de la série pris son créateur Alex Haley et la chaîne ABC par surprise.
Celle ci craignant que le sujet abordé ne fasse chuter les audiences et diminuer le nombre de téléspectateurs avait en effet diffusé les huit épisodes de la série en seulement une semaine.
Mais "Racines" dépassa largement les attentes en réunissant un des publics les plus larges jamais rassemblé pour une série dramatique dans l’histoire de la télévision aux Etats-Unis.
La saga commençait avec l’histoire de Kunta Kinté, joué par Levar Burton, un jeune africain capturé par des chasseurs d’esclaves et envoyé par mer en Amérique dans les années 1700.
Kunta était traité brutalement par son maître blanc et se rebellait constamment.
Plus âgé, il se maria et ses descendants se transmirent son histoire de génération en génération après sa mort.
Kizzy (Leslie Uggams), la fille de Kunta Kinté fut violée par son maître et donna naissance à un fils appelé plus tard Chicken George.
Dans le dernier épisode, l’arrière petit-fils de Kunta Kinté Tom rejoignit l’armée de l’union et gagna son émancipation. Pendant la durée de la saga, les téléspectateurs virent des châtiments corporaux cruels et brutaux, coups de fouets et beaucoup de moments déchirants, viols, séparation forcée des familles, vente des esclaves aux enchères….
A travers tout cela cependant, "Racines" montraient les personnages d’esclaves en tant que vrais êtres humains et pas simplement comme des victimes ou des symboles de l’oppression.
Dans un des numéros du Time Magazine paru à l’époque de la première diffusion de la série, son impact était évalué positivement : elle avait donné aux blancs une image plus sympathique des noirs en leur permettant de mieux comprendre l’histoire noire.
Dans le même article, on pouvait lire que les restaurants et les boutiques voyaient leurs chiffres d’affaires diminuer à l’heure où la série était diffusée.
Dans les cafés et les bars, les gérants retenaient les clients en zappant, délaissant les chaînes sportives et les matchs de basket pour regarder ABC qui diffusait "Racines". Certains parents noirs choisirent le prénom de leurs nouveaux-nés d’après les personnages de la série, et plus particulièrement Kunta Kinté.
Les gens en parlaient partout, dans les rues, les églises, les écoles, les centres commerciaux.
C'était le thème national.

Pourtant lorsque David Wolper, le producteur de la série, rencontra pour la première fois la chaîne ABC en vue de lui soumettre le projet, l’idée ne semblait pas être si bonne que ça, car produire une mini série de 12 heures en huit épisodes, dans laquelle les noirs sont les héros et les blancs les méchants dans un pays où 90 % de la population était blanche et 10 % noire était inédit à l’époque. Néanmoins, la série était une saga familiale et Wolper pensait que ce fait finirait par convaincre la chaîne.
Alex Haley, l'auteur du livre racines vint également parler du projet de façon convaincante.
ABC fut finalement séduite et décida de produire et diffuser la série sur son réseau.

Wolper explique le succès de "Racines" par le fait qu’elle était innovante et racontait un sujet qui n’avait jamais été traité auparavant.
Dans des films comme "Autant en emporte le vent", on voyait des esclaves, mais on ne savait pas d’où ils venaient. Les gens n’étaient pas conscients qu’un esclave pouvait avoir des parents ou des grands-parents.
Dans "Racines", en les voyant traverser l’océan dans le bateau des négriers, on se rendait compte de la déchirure familiale, et on suivait le parcours des différentes générations.
C’était une histoire de famille, et qu’on soit noir ou blanc, on s’attachait à Kunta Kinté et aux autres personnages dit-il.

Selon certaines rumeurs que Wolper confirme, certains membres de la production ou de la chaîne ne voulaient pas de Levar Burton, alias Kunta Kinté, qui décrocha le premier rôle alors qu’il n’avait que 19 ans dans le rôle principal car ils le trouvaient trop "noir"! mais Alex Haley avait spécifié qu’ils voulait des acteurs extrêmement "sombres" pour interpréter les personnages du début de la série, supposé se dérouler en Afrique, tels que Kunta Kinté.
La série connu des pics d’audience à 130 millions de téléspectateurs, c'est à dire plus de la moitié des habitants du pays, et une audience moyenne de 100 millions de téléspectateurs.
Près de 85 % des foyers américains équipés d’une télévision avaient vus au moins un des huit épisodes.

Toutefois, la saga racontée par Alex Haley n’échappe pas aux critiques.
Il semble que certains évènements relatés dans son livre n’aient jamais vraiment eu lieu.
Ainsi Haley n’aurait jamais retrouvé de griots lui retraçant la généalogie complète de sa famille, ce qui a fait dire ironiquement à ses détracteurs que "Racines" était une "Faction", un terme provenant des mots anglais "fiction" et "facts", mélange de fiction et de réalité.
Quoi qu’il en soit, Racines a marqué des générations d’individus de toute origine et sur tous les continents, popularisé le nom de "Kunta Kinté" l’africain, contribué à faire tomber le mythe de l’esclave "docile" et montrer aux afro-américains qu'ils avaient des racines.

"Racines" donna lieu à une suite en 1979 intitulée "Roots, the Next Generations" qui connu également un grand succès, sans toutefois égaler l'original.

Liens


http://www.dailymotion.com/video/xnny ... nes-roots-1x01_shortfilms
http://www.dailymotion.com/video/xnod ... nes-roots-1x02_shortfilms
http://www.dailymotion.com/video/xnor ... nes-roots-1x03_shortfilms

http://www.dailymotion.com/video/xp2f ... nes-roots-2x01_shortfilms
http://www.dailymotion.com/video/xp2f ... nes-roots-2x02_shortfilms
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Posté le : 10/08/2013 17:15
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Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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