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L'Oklahoma
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Le 16 novembre 1907 l'Oklahoma adhère à l"union et devient le 46e État

d'Amérique du nord
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Sa devise est "Labor omnia vincitse" qui signifit Le travail conquiert tout L'Oklahoma, en anglais Écouter est un État du Centre Sud des États-Unis. Il est bordé au nord par le Colorado et le Kansas, à l'est par le Missouri et l'Arkansas, à l'ouest par le Nouveau-Mexique et au sud par le Texas dont il est séparé par la rivière Rouge du Sud.
Exploré par les Espagnols au XVIe s, le pays fut annexé, avec la Louisiane, par Cavelier de La Salle 1682. Cédé aux États-Unis 1803, il devint une réserve pour les Indiens des cinq nations en 1834. Progressivement ouvert à la colonisation blanche 1889 à 1904, l'Oklahoma devint État de l'Union en 1907.
Avec une population estimée à 3 642 361 habitants en 2008 et une superficie de 177 847 km, l'Oklahoma est le 28e État le plus peuplé et le 20e plus grand de la Fédération. Le nom de l'État vient des mots choctaw okla et humma, signifiant peuple rouge ; l'Oklahoma est aussi connu par son surnom The Sooner State. Formé par l'unification du Territoire de l'Oklahoma et du Territoire indien. Ses habitants sont appelés Oklahomans et Oklahoma City est sa capitale ainsi que la ville la plus peuplée.
L'économie de l'Oklahoma est diversifiée : le secteur primaire repose sur l'agriculture, la production de gaz naturel et de pétrole. Les autres activités sont l'aéronautique, les télécommunications et les biotechnologies. Avant la crise économique de 2008-2009, l'État connaissait l'une des plus fortes croissances économiques du pays. Oklahoma City et Tulsa sont les deux principaux centres urbains : en effet, près de 60 % des habitants vivent dans ces deux régions métropolitaines. L'Oklahoma est particulièrement dynamique dans les domaines de l'éducation et de la santé. Ses plus grandes universités participent aux principales associations sportives.

La majeure partie de l'Oklahoma appartient aux Grandes Plaines avec des paysages variés de prairie, de montagnes moyennes et de forêts à l'est. Le climat est marqué par des phénomènes violents tels que les tornades. D'après le Bureau du recensement des États-Unis, de nombreux habitants déclarent descendre d'ancêtres allemands, irlandais, britanniques et amérindiens. Plus de 25 langues amérindiennes sont parlées, le record de tous les États américains. L'Oklahoma se trouve au carrefour de plusieurs aires culturelles. Il appartient à la Bible Belt où le succès du christianisme évangélique en fait l'un des États les plus conservateurs. Cependant, les adhérents au Parti démocrate sont très nombreux. L'identité de l'État repose sur un folklore vivant rodéo, western, country, cultures amérindiennes.

Origine du nom

Le nom de l'État vient des mots choctaw okla et humma, signifiant peuple rouge. Le chef choctaw Allen Wright suggéra ce nom en 1866 pendant les négociations entre les Amérindiens et le gouvernement fédéral des États-Unis sur le Territoire indien. L'expression peuple rouge désigne les Amérindiens comme un peuple unique. Oklahoma devint plus tard le nom de facto du Territoire de l'Oklahoma et fut approuvé officiellement en 1890, deux ans après que la région fut ouverte à la colonisation blanche. Le mot Okies a été popularisé par le roman de John Steinbeck les Raisins de la colère ; le terme est utilisé de manière positive par les habitants de l'Oklahoma. Enfin, l'expression Oklahoma is OK joue sur l'abréviation de l'État OK.

Les montagnes Ouachita au Sud-Est de l'Oklahoma

L'Oklahoma est le 20e État des États-Unis pour la superficie avec 181 035 km2, dont 177 847 km2 de terres et 3 188 km2 sous l'ea. Il se trouve dans les Grandes Plaines non loin du centre géographique des États-Unis contigus. Il est bordé au nord par le Colorado et le Kansas, à l'est par le Missouri et l'Arkansas, à l'ouest par le Nouveau-Mexique et au sud par le Texas. L'Oklahoma se trouve entre le 33e et le 37e parallèle nord, entre le 94e et le 103e méridien ouest.
L'Oklahoma est situé entre les Grandes Plaines et les monts Ozark à l'est. L'organisation du relief est simple : plus on se dirige vers l'ouest, plus les altitudes augmentent. L'Ouest de l'État est occupé par de hautes plaines alors que des plaines humides caractérisent le Sud-Ouest. Le point culminant, Black Mesa, 1 516 mètres d'altitude se trouve au nord-ouest, dans le Panhandle. Le point le plus bas 88 mètres d'altitude se situe sur la Little River près de la frontière sud-est et de la ville d'Idabel.
Il existe quatre ensemble de montagnes ou de collines : les Ouachita au sud-est, les Arbuckle au sud, les Wichita au sud-ouest et les Ozark au nord-est. Les Monts Ozark et les Montagnes Ouachita représentent les seules montagnes entre les Appalaches et les Rocheuses. Une partie des Flint Hills s'étire à travers le centre-nord de l'Oklahoma ; Cavanal Hill, au sud-est de l'État est considérée par le Département du Tourisme et des Loisirs comme la plus haute colline du monde 609 mètres d'altitude. Le centre est occupé par les Red Bed Plains,région autour d'Oklahoma City. Entre les Red Bed Plains et la frontière avec l'Arkansas se trouvent les Sandstone Hills particulièrement riches en pétrole et en charbon. À l'ouest, les Gypsum Hills sont aussi appelées Glass Mountains en raison de leur aspect minéral.
Le paysage du nord-ouest est constitué de mesas, de hautes plaines semi-arides et de plateaux disséqués par des gorges comme dans les Glass Mountains. Le Sud-Ouest est dominé par des plaines coupées par de petites chaînes de montagnes comme les Antelope Hills et les montagnes Wichita. Une zone de transition, située au centre de l'État, offre des étendues de prairies et de bois. Les monts Ozark et les montagnes Ouachita s'élèvent d'ouest en est.
Le risque sismique est faible en Oklahoma. Le tiers oriental de l'État est affecté par des glissements de terrains. Les rives des cours d'eau vivent sous la menace des inondations.

Le climat

On recense quelque 500 cours d'eau de diverses tailles et 200 lacs formés par les barrages : l'Oklahoma possède le plus grand nombre de réservoirs artificiels du pays. La plus grande partie de l'État appartient à deux bassins hydrographiques : celui de la Rivière Rouge et celui de l'Arkansas, deux affluents du fleuve Mississippi qui se jette dans le golfe du Mexique. La Cimarron et la Canadian prennent leurs sources dans les Montagnes Rocheuses et se jettent dans l'Arkansas River. La Washita est un affluent de la Red River qui forme la frontière avec le Texas au sud. Les cours d'eau venant de l'ouest sont alimentés par la fonte des neiges au printemps mais subissent une forte évaporation dans les Grandes Plaines. Ils sont fortement chargés en alluvions et en sable, en sel à l'ouest.
Le lac Eufaula 41 278 hectares et le lac Texoma 36 017 hectares sont les plus grands lacs artificiels de l'État. C'est à l'est que se concentrent les lacs formés sur un bras mort d'un cours d'eau. À l'ouest, de nombreux lacs sont temporaires et se remplissent lorsqu'il y a une grosse averse.
L'Oklahoma possède d'importantes réserves d'eau dans son sous-sol : les aquifères permettent de courvir 60 % des besoins en eau de l'État. Les aquifères de l'ouest, comme celui de Rush Springs, servent à irriguer les terres agricoles..
L'Oklahoma se trouve dans la zone tempérée. Son climat est de type continental et la région connaît une forte amplitude thermique annuelle. L'hiver, le blizzard paralyse les réseaux de transport. En janvier et février, les vagues de froid cold waves peuvent faire chuter brutalement les températures. Les tornades sont des phénomènes violents et ponctuels qui concernent cette partie de la Tornado Alley. Elles naissent de la rencontre de l'air tropical avec l'air plus froid venant du nord, particulièrement entre avril et juin. L'État est frappé par 54 tornades par an en moyenne, l'une des fréquences les plus élevées du monde. La tornade de Woodward du 9 avril 1947 fait 107 morts. Celles de 1999 font une quarantaine de morts et plus d'un milliard de dollars de dégâts. La même année, on recense 145 tornades de différentes intensités. Dans le panhandle, les averses soudaines et brutales provoquent la crue des fleuves. En été, les vents brûlants provoquent des sécheresses et favorisent l'érosion des sols comme lors du Dust Bowl des années 1930. Les orages peuvent par ailleurs provoquer des incendies. Le 20 mai 2013, une importante tornade fait 24 morts dans la ville de Moore près de Oklahoma City.
Les températures annuelles évoluent selon un gradient nord/sud, du plus froid au plus chaud. Les précipitations, quant à elles, varient suivant un gradient est/ouest, du plus humide au plus sec. L'est de l'Oklahoma connaît un climat subtropical humide, Cfa selon la classification de Köppen : cette région subit l'influence des vents du sud qui font remonter des masses d'air chaudes et humides en été depuis le golfe du Mexique. Les hautes plaines de l'ouest ont un climat semi-aride, Bsk selon la classification de Köppen. Au sud-est, la température annuelle moyenne est de 17 °C et la hauteur annuelle moyenne de précipitations est de 1 420 mm, alors que le panhandle connaît des températures moyennes de 14 °C et 430 mm de précipitations. L'ensoleillement dans l'ensemble de l'état est très élevé et varie entre 2700 à plus de 3100 heures en moyennes par an en fonction des zones. Lors de la saison estivale les températures peuvent atteindre ou dépasser les 40°C dans l'ensemble de l'état, l'hiver les température peuvent approcher les -18°C dans les zones les plus froides de l'état. La plus haute température record connu dans l'Etat fut de 49°C. Cette température fut observé la première fois lors du très chaud été de 1936: à Alva le 18 juillet, à Altus le 19 Juillet et le 12 Août, et à Poteau le 10 Août. On peut aussi noter que la barre des 49°C fut atteint à Tishomingo 26 Juillet 1943 et plus récemment à Tipton le 27 Juin 1994. La plus basse température fut enregistrer à Nowata avec -35.0°C le 10 Février 2011.
En hiver, les chutes de neige varient de moins de 10 cm dans le sud à 51 cm dans le panhandle. Le centre de prévision des tempêtes, National Storm Prediction Center du Centre national météorologique se trouve à Norman.

Flore et faune

Des troupeaux de bisons vivent dans les prairies de l'Oklahoma. La Tallgrass Prairie Nature Preserve dans le comté d'Osage
L'environnement de l'Oklahoma est l'un des plus divers des États-Unis : les spécialistes distinguent onze régions écologiques : huit sont dans la moitié orientale de l'État, trois dans la moitié occidentale. Les symboles de l'État reflètent la richesse de la flore Gaillardia pulchella, Cercis canadensis, Sorghastrum nutans et de la faune Tyran à longue queue, Crotaphytus collaris, Bar blanc, Dindon sauvage, Raton laveur, Bison, Papilio polyxenes, Ouaouaron, Molosse du Brésil.
Les forêts occupent 24 % de la superficie de l'Oklahoma et se concentrent à l'est ; la prairie reste le milieu naturel dominant au centre, même si elle s'est considérablement réduite avec la mise en valeur agricole des terres. Dans les régions semi-arides de l'ouest, la couverture végétale devient moins haute et s'adapte à la sécheresse : c'est le domaine de la prairie basse, des buissons et des arbrisseaux qui forment la steppe. Les rives des cours d'eau sont propices à la croissance du Pin pignon, du genévrier et du Pin ponderosa. Le Sud-Est Kiamichi Country plus chaud et plus humide en été, est le domaine des marais et des forêts de cyprès, de pins et de feuillus ; au nord-est, on trouve des forêts de feuillus Chêne étoilé, orme, caryer et de conifères cèdre, pin. Le centre est constitué d'une flore particulière de forêts de chênes et de hautes herbes appelées Cross Timbers. Le Sud-Est est dominé par les pinèdes.
L'Oklahoma abrite une importante diversité de mammifères Cerf hémione, Cerf de Virginie, coyote, lynx, etc. et d'oiseaux caille, Columbidae, Pygargue à tête blanche, Buse à queue rousse, Cardinalidae, faisan, dindon sauvage que l'on trouve ailleurs aux États-Unis.
Dans la prairie, le bison d'Amérique du Nord, le tétras des prairies, le blaireau et le tatou sont fréquents. Le Panhandle possède l'une des plus grandes concentrations de chiens de prairie du pays. Les Cross Timbers, une zone de transition entre les prairies de l'est et les forêts de l'est abrite 351 espèces de vertébrés. Les montagnes Ouachita servent d'habitat à l'Ours noir, à la Loutre de rivière, au Renard roux et au Renard gris. Le Sud-Est compte quelque 328 espèces de vertébrés, parmi lesquelles l'Alligator d'Amérique.
Au temps de la Louisiane française et espagnole, le castor fut intensément chassé pour sa fourrure et sa viande. Des tentatives de réintroduction de cet animal ont été entreprises à partir des années 1950. L'Ours noir avait complètement disparu en 1915 ; il est aujourd'hui réintroduit dans les monts Ozark et les montagnes Ouachitas.

Aires protégées

Aujourd'hui, l'environnement de l'Oklahoma est fragilisé par les activités humaines : l'agriculture et l'élevage ont réduit les milieux naturels. Les industries et les grandes agglomérations polluent l'air et les cours d'eau. Les régions minières longtemps exploitées, doivent aujourd'hui être dépolluées.
Oklahoma possède 50 parcs d'État, six parcs nationaux ou aires protégées, deux forêts nationales et un important réseau de réserves naturelles. Six pourcents des 40 000 km2 de forêts sont des terres publiques comme la Forêt nationale d'Ouachita, la plus grande et la plus ancienne forêt du Sud des États-Unis. Avec une superficie de 158 km2, la Tallgrass Prairie Preserve au centre-nord de l'Oklahoma est la plus grande prairie naturelle préservée du monde où vivent 2500 bisons en liberté. La Black Kettle National Grassland s'étend sur 127 km2 de prairie au sud-ouest de l'Oklahoma. Le Wichita Mountains Wildlife Refuge est la plus ancienne 1901 et la plus vaste 238,8 km2 aire sauvage protégée de l'état. La Chickasaw National Recreation Area 18 km2 est la plus grande zone récréative de l'état. Parmi les sites historiques protégés par l'État fédéral, on peut citer le piste de Santa Fe, la piste des Larmes, le fort Smith, le Washita Battlefield National Historic Site et l'Oklahoma City National Memorial.

Histoire

Période précolombienne

Les premières traces de la présence humaine en Oklahoma datent de la dernière ère glaciaire lorsque des groupes nomades de Paléoaméricains parcouraient la région en quête de nourriture. Les cultures Folsom et Clovis ont été identifiées en plusieurs endroits. Vers 500 après Jésus-Christ apparurent les premières céréales cultivées dans la partie orientale, puis des innovations techniques, arc et flèche, céramique, architecture. La population connut alors une importante croissance. Le plus ancien site occupé de façon permanente par l'Homme est celui de Spiro Mounds, dans l'est de l'Oklahoma, qui fut habité entre 850 et 1450 après Jésus-Christ. La civilisation du Mississippi dominait alors le centre de l'Amérique du Nord et laissa de nombreux tertres funéraires ou cultuels. Après la disparition des Mound Builders, la région fut occupée par les Caddos, les Osages et les Wichitas qui chassaient le bison ou pratiquaient l'agriculture maïs, haricot, courge.

Exploration et colonisation

Le conquistador espagnol Francisco Vásquez de Coronado traversa l'Oklahoma en 1541. Puis les explorateurs français sillonnèrent la région pour la traite des fourrures et revendiquèrent la région au XVIIIe siècle qui fit partie de la Louisiane française jusqu'en 1803, lorsque cette dernière fut achetée par les États-Unis. Les années 1800-1820 furent marquées par l'exploration américaine des cours d'eau.

Le Territoire indien

Tout au long du XIXe siècle, plusieurs milliers d'Amérindiens furent contraints de quitter leurs terres pour s'installer en Oklahoma et dans les régions proches. Les Cinq tribus civilisées furent les plus touchées par la déportation comme celle dite de la Piste des Larmes 1831-1838. La région, qui était déjà habitée par les tribus osages et Quapaws, fut attribuée par le gouvernement américain aux Choctaws puis à d'autres peuples déplacés, les Cherokees de Géorgie, les Séminoles de Floride, les Chickasaws de Louisiane. Vers 1890, plus de 30 nations et tribus amérindiennes vivaient sur le Territoire indien .
Durant la guerre de Sécession, le Territoire indien fut envahi par l'armée confédérée et par celle de l'Union. Dès 1866, de nouveaux traités furent passés entre les Indiens et le gouvernement qui amputèrent de moitié le territoire originel des Amérindiens. L'autre moitié servit à parquer des tribus telles que les Ottawas ou les Wichitas. Finalement, le 22 avril 1889, les terres furent ouvertes aux colons qui s'y installèrent en masse près de 50 000. Le 2 mai 1889, le Territoire de l'Oklahoma fut organisé sur la partie occidentale du Territoire indien, auquel fut adjoint l'Oklahoma Panhandle.
Entre 1866 et 1899, la croissance démographique des États-Unis entraîna une augmentation de la consommation de viande. Pour faire face à cette demande, l'élevage se développa au Texas et dans l'Oklahoma. Ce fut la grande époque des cow-boys qui menaient les troupeaux vers les gares du Kansas. En 1881, quatre des cinq chemins de transhumance passaient par le Territoire indien.
Avec l'installation de colons blancs dans la région, le gouvernement fédéral établit le Dawes Act en 1887, approfondi par le Curtis Act en 1898. Cette loi distribuait les terres tribales aux familles amérindiennes et encourageait leur mise en valeur agricole. La moitié des terres amérindiennes fut en réalité ouverte à la colonisation ou achetée par les compagnies de chemin de fer. La course à la terre Land Run en anglais, en particulier en 1889, commençait selon le principe du premier arrivé, premier servi. Ceux qui ne respectaient pas les règles en entrant dans le Territoire avant le départ officiel étaient appelés les sooners, terme qui devint le surnom de l'Oklahoma. Entre 1889 et 1895, six courses à la terre furent organisées. Le 16 novembre 1907, le Territoire de Oklahoma et le Territoire indien furent regroupés au sein de l État de l'Oklahoma qui devint le 46e État de l'Union.
La tentative de créer un état amérindien nommé Oklahoma ou Sequoyah échoua ; mais la Sequoyah Statehood Convention de 1905 posa les fondations de l'Oklahoma Statehood Convention, qui se réunit deux ans plus tard. La découverte du pétrole provoqua l'essor de plusieurs villes à partir de 1896 : au début du XXe siècle, Tulsa fut surnommée la capitale mondiale du pétrole Oil Capital of the World. En 1927, l'État atteignait sa production maximale de pétrole. La même année, l'homme d'affaires Cyrus Avery s'engagea en faveur de la création de la Route 66. Il souhaitait que sa région d'adoption, l'Oklahoma, soit au carrefour de plusieurs routes traversant les États-Unis.

Passé afro-américain

Oklahoma possède également une riche histoire afro-américaine. Plusieurs communautés noires se sont formées au début du XXe siècle pour échapper au racisme qui prévalait notamment dans les États du Sud. Leur installation dans ce qui était alors le Territoire indien a été encouragée par le politicien Edward P. McCabe. Ce dernier essaya même de convaincre le président Theodore Roosevelt que l'Oklahoma deviendrait un État majoritairement noir. Pourtant, de nombreuses communautés afro-américaines sont devenues des villes fantômes, à quelques exceptions près comme Boley et Langston, siège de l'université afro-américaine de Langston.
Malgré les lois Jim Crow et la présence du Ku Klux Klan, le quartier noir de Greenwood, connut son heure de prospérité jusqu'aux émeutes raciales de 1921. Ces dernières firent entre 50 et 500 morts, des milliers de blessés et des destructions importantes. À la fin des années 1920, l'influence du Ku Klux Klan diminua fortement en Oklahoma.

XXe siècle

Pendant les années 1930, le Nord-Ouest de l'État fit partie du Dust Bowl, la région des États-Unis touchée par la sécheresse et l'érosion des sols. De nombreux agriculteurs furent contraints de quitter l'Oklahoma pour s'installer à l'ouest du pays : ce sont les Okies. La catastrophe fit également de nombreux morts victimes de maladies respiratoires ou de malnutrition. La population diminua jusque dans les années 1950. Le président américain Franklin Roosevelt ordonna au Civilian Conservation Corps de planter des arbres entre la frontière canadienne et le Texas afin de couper le vent et de maintenir les sols. Les fermiers furent formés aux techniques de préservation du sol et de l'eau. Plusieurs barrages furent aménagés pour les besoins de l'irrigation et pour contrôler les crues. Ainsi, dans les années 1960, on comptait déjà près de 200 lacs artificiels, le record aux États-Unis._
La prohibition n'y a été abolie que tardivement en 1959.
L'économie de l'Oklahoma reprit sa croissance avec la Seconde Guerre mondiale. Les besoins de l'armée américaine stimulèrent la production de pétrole et de biens manufacturés. L'État connut de nouveau la crise dans les années 1980 avec la multiplication des faillites bancaires et la diminution de la production de pétrole. L'attentat d'Oklahoma City eut lieu le 19 avril 1995 contre le bâtiment fédéral Alfred P. Murrah ; il fit 168 morts dont 19 enfants et plus de 800 blessés. Perpétré par Timothy McVeigh et Terry Nichols, attentat le plus meurtrier de l'histoire des États-Unis après ceux du 11 septembre 2001.

Économie

La BOK Tower à Tulsa, est le plus haut gratte-ciel de l'Oklahoma. Elle abrite le siège social de Williams Companies.
L'économie de l'Oklahoma repose sur les secteurs de l'aérospatiale, de l'énergie, du matériel de transport, de l'agroalimentaire, de l'électronique et des télécommunications. Au début de l'année 2007, l'Oklahoma comptait 1,7 million d'emplois civils. Le gouvernement est le premier employeur avec 326 000 postes, suivi par le transport 285 000, l'éducation 191 000, les affaires 178 000 et l'industrie 151 000.
L'État se classe au deuxième rang national pour la production de gaz naturel et au cinquième pour le blé. En 2007, quatre entreprises du classement Fortune 500 et trois du Fortune 1000 ont leur siège en Oklahoma. L'Oklahoma est attractif pour les entreprises car il se classe au 7e rang pour le faible degré d'imposition.
Entre 2000 et 2006, le PIB augmente de 50 %, ce qui représente la 5e croissance économique du pays. Entre 2005 et 2006, le PIB passe de 122,5 milliards de dollars à 134,6 milliards de dollars, soit une croissance de 10,8 %10 ; le PIB/hab. progresse de 5,9 % 36 364 dollars/hab. en 2006 ; 38 516 $/hab. en 2007, c'est-à-dire la troisième meilleure performance aux États-Unis. En 2007, l'Oklahoma se classe 41e sur 50 États américains pour le PIB/hab. Bien que le pétrole domine l'économie pendant la majeure partie du XXe siècle, près de 90 000 emplois liés au secteur énergétique disparaissent entre 1980 et 2000. En décembre 2009, le taux de chômage est de 6,6 %, un taux très inférieur à la moyenne nationale.
En 2008, les exportations de l'Oklahoma dépassent les 5 milliards de dollars. Les principaux pays importateurs sont le Canada, le Mexique, le Japon, la Chine et Singapour. Les machines, les composants d'avion, les instruments optiques et médicaux représentent la moitié des exportations.

Agriculture

L'Oklahoma est le 27e État américain pour la production agricole, le cinquième pour le bétail et pour la production de blé. Environ 5,5 % du bœuf américain provient de l'Oklahoma, 6,1 % du blé, 4,2 % de la viande de porc et 2,2 % des produits laitiers. Les autres productions sont le fourrage, le maïs, le soja, le coton, les poulets d'élevage 44,3 millions, les poules pondeuses 3,3 millions.
Les rives de la Red River constitue une importante région céréalière alors que la région de l'Arkansas River est vouée à l'élevage. L'État compte 86 600 exploitations 2008 sur 14 millions d'hectares et qui génèrent 5,8 milliards de dollars de recettes. La taille moyenne des exploitations est de 163,9 hectares, mais les plus grandes se trouvent à l'ouest

Énergie et minerais

L'Oklahoma est le cinquième État producteur de pétrole brut du pays
Comme pour le Texas voisin, le secteur pétrolier représente un part importante de l'économie de l'Oklahoma. L'industrie pétrolière représente 23 milliards de dollars du PIB de l'État et les salariés de ce secteur ont un revenu deux fois supérieur aux autres employés. En 2004, 83 750 puits de pétrole à usage commercial étaient recensés sur un total de 750 000 pour une production de 178 000 barils de brut par jour. L'Oklahoma se classe au cinquième rang de la production américaine de pétrole. Il existe cinq raffineries, dont deux se trouvent dans l'aire métropolitaine de Tulsa. Enfin, l'État possède la deuxième concentration de foreuses actives du pays et la cinquième réserve de pétrole brut.
L'Oklahoma est le cinquième État américain pour la capacité de production d'énergie éolienne, qui se concentre à l'ouest ; cependant, 96 % de l'énergie est produite par des sources non renouvelables : 64 % par le charbon et 32 % par des centrales à gaz. Il existe actuellement neuf grands barrages hydroélectriques, essentiellement situés à l'est, dont le plus grand est celui de Pensacola construit pendant la Grande Dépression. Enfin, l'Oklahoma ne possède aucune centrale nucléaire.
En 2004, la production de gaz représentait 8 % de la production nationale, faisant de l'Oklahoma le troisième producteur des États-Unis. 10 % des besoins américains en gaz naturel sont assurés par l'Oklahoma avec une production de 47 1 km3.
Selon Forbes, Devon Energy Corporation, Chesapeake Energy Corporation et SandRidge Energy Corporation, dont les sièges sociaux sont à Oklahoma city, sont les plus grands groupes pétroliers privés du pays. Toutes les compagnies classées dans le Fortune 500 appartiennent au secteur de l'énergie. En 2006, Semgroup, une entreprise de transport des hydrocarbures basées à Tulsa, se classait cinquième dans le classement des plus grandes compagnies privées de Forbe de 2008, QuikTrip 46e et Love's Travel Stops & Country Stores 25e.
L'Oklahoma se classe 11e pour la consommation d'énergie par habitant en 2006.
L'Oklahoma produit également des pierres, du ciment Portland, du sable, des graviers, du charbon dans l'Est et du gypse. Il est le premier producteur américain d'iode, le troisième d'hélium, le cinquième de feldspath. Le gypse et le sel dans l'Ouest alimentent l'industrie chimique.

Industrie

Le secteur de l'aérospatiale emploie 7,6 % de la population active et 10 % de la production industrielle de l'Oklahoma qui figure parmi les dix premiers États pour ce secteur. Il génère quelque 11 milliards de dollars par an. Tulsa abrite la plus grande base aérienne de maintenance du monde ainsi que le siège social de la compagnie American Airlines.
Bénéficiant d'une situation géographique centrale aux États-Unis, l'Oklahoma abrite de très nombreux centres de logistique. Il est le premier producteur de pneus d'Amérique du Nord et connaît une rapide croissance des activités de biotechnologies. Les exportations de produits manufacturés représentaient 4,3 milliards de dollars en 2005. L'agroalimentaire, notamment le conditionnement de la viande, et la production d'après-shampooing sont d'autres productions industrielles majeures.
En 2005, 14,5 % des habitants déclarent avoir des ancêtres allemands, 13,1 % américains, 11,8 % irlandais, 9,6 % anglais, 8,1 % afro-américains et 11,4 % amérindiens dont 7,9 % cherokee. L'Oklahoma possède la plus grande proportion et le plus grand nombre d'Amérindiens du pays 395 219 en 2002. Les Amérindiens forment la première minorité ethnique juste devant les Afro-américains.
La structure par âge de la population est sensiblement la même que celle des autres Américains : 24,9 % ont moins de 18 ans et 13,5 % ont plus de 65 ans. 20,3 % des habitants ont un diplôme de l'enseignement supérieur. Le revenu moyen par habitant est de 17 646 $ soit 3 941 dollars de moins que la moyenne nationale. Le taux de personnes vivant sous le seuil de pauvreté est de 15,8 % contre 13 % pour les États-Unis. L'Oklahoma se classe parmi les États américains où la vie est la moins chère.

Santé

En 2005, l'Oklahoma est le 21e État américain pour les subventions fédérales en faveur de la santé pour une dépense totale de 7 580 364 dollars. Les principaux investissements concernent la vaccination, la prévention contre le bioterrorisme et l'éducation à la santé. L'Oklahoma se situe dans la moyenne nationale pour le proportion de personnes souffrant d'asthme, de diabète, du cancer et d'hypertension.
En 2000, l'Oklahoma se classe 45e pour le nombre de médecins par habitant ; en revanche, il se trouve au-dessus de la moyenne nationale pour le nombre moyen de places à l'hôpital. En 2005, un quart des habitants entre 18 et 64 ans n'ont pas d'assurance maladie, l'un des plus forts taux des États-Unis. 30,3 % des habitants sont obèses, soit le cinquième plus fort taux du pays.
Le principal centre hospitalier est l'Oklahoma Health Center à Oklahoma City, qui regroupe de nombreuses structures de recherche comme l'University of Oklahoma Health Sciences Center
Le centre médical régional pour le traitement du cancer à Tulsa est l'une des quatre institutions de ce genre aux États-Unis, et l'une des plus importantes du pays. Dans la même ville, l'Oklahoma State University Medical Center possède la plus grande école d'ostéopathie des États-Unis et l'un des meilleurs établissements spécialisés dans les neurosciences.

Religion

La Boston Avenue Methodist Church à Tulsa est classée National Historic Landmark.
Oklahoma fait partie de la Bible Belt, littéralement la ceinture de la Bible, une région du Sud des États-Unis dans laquelle vivent un pourcentage élevé de personnes se réclamant d'un protestantisme rigoriste. L'université Oral Roberts de Tulsa est considérée comme l'épicentre du renouveau charismatique et du fondamentalisme protestant dans l'État. La population de Bible Belt se caractérise par son conservatisme sur les questions de société et de politique : condamnation de l'homosexualité, de l'avortement, de la théorie de l'évolution, etc.
D'après le Pew Research Center, plus de 80 % des habitants de l'Oklahoma sont chrétiens. La proportion de catholiques est moitié moins élevée que la moyenne nationale, alors que le pourcentage de personnes pratiquant l'évangélisme est deux fois plus élevée que dans le pays. Les croyants se répartissent dans 73 affiliations religieuses principales et quelque 5 854 congrégations. La Convention baptiste du Sud domine avec 1 578 églises et 967 223 membres ; la Holy Orthodox Church in North America ne compte qu'une église et six membres. L'Église méthodiste unie revendique 322 794 fidèles, l'Église catholique romaine 168 625, les Assemblées de Dieu 88 301 et les Églises du Christ 83 047. En 2000, il y avait environ 5 000 juifs et 6 000 musulmans, avec dix congrégations pour chaque groupe.
Répartition des habitants par confession :
Évangélisme – 53 %
Protestantisme – 16 %
Catholicisme – 13 %
Autres – 6 %
Sans affiliation
Villes de l'Oklahoma.
Oklahoma city est la plus grande ville de l'état.
Tulsa est la deuxième plus grande ville de l'Oklahoma
Les principales aires urbaines de l'Oklahoma sont Oklahoma City 1 206 142 habitants et Tulsa 916 079 habitants qui regroupent à elles deux 58 % des habitants de l'Oklahoma.
Les métropoles de l'Oklahoma ressemblent aux autres grandes villes américaines : elles comportent un centre des affaires avec des gratte-ciel, entouré par des ghettos, des entrepôts et des zones industrielles. Les banlieues, dans lesquelles résident les classes moyennes blanches, sont reliées au centre par des autoroutes et quelques voies ferrées. Des opérations de rénovations des centres-villes programme Main Street depuis 1985 ont pour objectif de revitaliser ces quartiers et attirer les touristes.
Selon la législation en vigueur, les municipalités se rangent en deux groupes : les cities ont plus de 1 000 habitants alors que les towns ont moins de 1 000 habitants. Les deux types de villes possèdent des pouvoirs législatifs et judiciaires propres. Les cities peuvent choisir leur organisation parmi deux modèles : le Mayor–council government ou le Council–manager government Gouvernement à gérance municipale.

Politique

Le Capitole de l’État d'Oklahoma se situe à Oklahoma City.
Le gouvernement de l'Oklahoma est une république constitutionnelle qui suit le modèle du Gouvernement fédéral des États-Unis et qui est séparé en trois branches pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. L'État est divisé en 77 comtés et six districts congressionnels.

Institutions de l'État

La législature de l'Oklahoma est constituée d'un Sénat et d'une Chambre des Représentants. Elle détient le pouvoir législatif et vote le budget de l'État. Les 48 sénateurs sont élus pour quatre ans ; la Chambre des représentants compte 101 membres avec un mandat de deux ans. Les élus de la législature ne peuvent rester en charge plus de douze années consécutives pour les deux fonctions.
Lors de la session 2011–2013, la législature de l'État est largement dominée par les Républicains. Au Sénat, 32 Républicains font face à 16 Démocrates tandis que la Chambre des Représentants est dominée par une majorité de 70 élus républicains contre 31 démocrates.
Le pouvoir judiciaire est assuré par deux cours d'appel : la Cour suprême de l'Oklahoma pour les affaires civiles et l'Oklahoma Court of Criminal Appeals pour les crimes. Cette dernière se prononce sur l'application de la peine de mort. L'État est subdivisé en 77 districts District Courts, qui correspondent aux 77 comtés. Le système judiciaire comprend également deux cours indépendantes : la Court of Impeachment et l'Oklahoma Court on the Judiciary. Les juges de ces deux cours, ainsi que ceux de la Court of Civil Appeals sont désignés par le gouverneur sur recommandation d'une commission judiciaire Judicial Nominating Commission pour six années. Depuis 1976, l'Oklahoma a exécuté 88 personnes, ce qui place cet État au troisième rang derrière le Texas et la Virginie.
La branche exécutive se compose d'un gouverneur et de son équipe ainsi que d'autres personnels élus. Elle élabore le budget, applique les lois, assure la sécurité et l'ordre dans l'État. Le gouverneur, élu pour quatre ans, est le chef du gouvernement : il est le commandant en chef de la garde nationale de l'Oklahoma et possède un droit de veto sur les lois votées par la Législature.
Il existe en outre 39 gouvernements tribaux amérindiens qui exercent des pouvoirs limités sur certains secteurs de l'Oklahoma, des terres attribuées à l'époque du Territoire indien. En revanche, il n'y a pas de réserves indiennes comme dans le reste des États-Unis. Les gouvernements tribaux détiennent une quasi souveraineté sur les membres et les fonctions de la tribu. Ils sont sous l'autorité du Congrès américain dans certains domaines, notamment en matière constitutionnelle.
Depuis l'élection présidentielle de 1952 54,59 % pour Dwight Eisenhower, et à l'exception d'une seule fois, les électeurs de l'Oklahoma ont eu tendance à plébisciter les candidats républicains aux élections présidentielles. De fait, les électeurs d'Oklahoma n'ont pas voté pour un candidat démocrate depuis Lyndon Johnson en 1964. Ainsi, lors de l'élection présidentielle de 2008, le candidat républicain John McCain remporte tous les comtés de l'Oklahoma et obtient son meilleur score national 66 % alors qu'il est battu par le démocrate Barack Obama au niveau national. Bien que l'Oklahoma soit considéré lors des élections présidentielles comme l'un des états les plus républicains du pays, une majorité des électeurs continuent d'être enregistrés sur les listes électorales du parti démocrate.

Culture

Du fait de sa position centrale aux États-Unis, de l'impact de son histoire et de son brassage ethnique, l'Oklahoma possède une culture riche mais qui lui est propre. Le Bureau de recensement américain place l'Oklahoma parmi les États du Sud ; mais l'Oklahoma se trouve à la charnière de plusieurs ensembles culturels comme le Middle West et le Sud-Ouest. Certaines régions de l'Oklahoma appartiennent au Sud supérieur et aux Grandes Plaines.
La culture de l'Oklahoma est marquée par la diversité des influences. Les habitants se réclament de différentes origines, essentiellement allemandes, irlandaises et amérindiennes. 25 langues amérindiennes sont parlées, plus que dans n'importe quel autre État américain. Dans le passé, six gouvernements différents ont revendiqué leur souveraineté sur le territoire de l'Oklahoma. 67 tribus amérindiennes sont présentes et 39 nations reconnues par le pouvoir fédéral. L'afflux de populations amérindiennes dans les siècles précédents, a beaucoup joué sur la personnalité de l'État de l'Oklahoma. Les symboles améindiens y sont d'ailleurs nombreux, jusque dans le drapeau de l'État sur lequel figure un bouclier traditionnel des plaines sur lequel se croisent une branche d'olivier et un calumet de la paix. Les différents gouvernements qui se sont succédé à la tête de l'Oklahoma ont d'ailleurs joué un rôle très important dans ce devoir de mémoire, et dans cette fierté d'appartenir à l'État des Native Americans, c'est-à-dire des Indiens d'Amérique. Cette volonté de conservation s'exprime au travers de la conservation de l'art, de la culture et des croyances amérindiennes dans différents musées et sites spécifiques tels que le musée Tsa-La-Gi de Tahlequah, Musée de la civilisation Cherokee.
La cuisine reflète particulièrement l'appartenance de l'Oklahoma au Sud du pays et sa diversité culturelle. Les plats traditionnels sont ceux de la cuisine du Sud des États-Unis et utilisent des produits comme la cornille, la courge et le maïs. Le barbecue et la tarte aux pacanes figurent parmi les mets incontournables de l'Oklahoma.

Festivals et évènements culturels

Les évènements culturels amérindiens, comme les pow wows, sont fréquents en Oklahoma.
En 2007, le centenaire de l'Oklahoma fut élu meilleur événement de l'année par l'American Bus Association1. De nombreux festivals ethniques se tiennent tout au long de l'année au cours desquels les visiteurs peuvent assister à des pow wows. La foire d'Oklahoma, Oklahoma State Fair et celle de Tulsa Tulsa State Fair se déroulent pendant dix jours et reçoivent chacune près d'un million de visiteurs. En 2006, l'Oktoberfest, une fête de la bière qui se tient à Tulsa, a été reconnue comme l'une des plus importantes dans le monde par le quotidien USA Today.
Tulsa compte également un grand nombre d'événements culturels : en 2007, le Mayfest festival a attiré quelque 375 000 visiteurs sur quatre jours. Le Dfest est un festival de musique renommé. Rocklahoma est un festival annuel de hard rock se déroulant à Pryor, qui a réuni quelque 100 000 spectateurs en 2007. À Norman se déroule le Norman Music Festival.

Architecture et arts plastiques

Les premières habitations des colons sont en bois. Les demeures du Sud ressemblent à celles des grands plantations. L'architecture du début du XXe siècle est marquée par l'éclectisme. Les magnats du pétrole se font construire des résidences à la mesure de leur fortune. Les bâtiments publics sont relativement récents. Certains ont été construits par de grands noms de l'architecture comme Frank Lloyd Wright Price Tower, à Bartlesville. Les campus universitaires et les églises adoptent souvent le style néogothique. Les centres d'affaires sont constitués de gratte-ciel témoignant de la puissance des entreprises.
Les premiers peintres blancs qui visitent le territoire de l'Oklahoma représentent les Amérindiens : George Catlin 1796-1872 qui séjourne dans les Montagnes Wichita dans les années 1830, John Mix Stanley 1814-1872, Frederic Remington 1861-1918, Elbridge Ayer Burbank 1848-1959. Au début du XXe siècle, les magnats de l'industrie et du pétrole investissent leur fortune dans l'art. L'école d'art de l'université de l'Oklahoma commence à rayonner sur la culture de l'état. L'Association of Oklahoma Artists voit le jour en 1916. Pendant l'Entre-Deux-Guerres, des fresques qont réalisées par des artistes amérindiens sur les murs des bâtiments publics. D'une manière générale, la WPA encourage le développement de la culture durant la Grande Dépression.

Arts du spectacle et musique

Le festival Mozart Oklahoma Mozart Festival de Bartlesville est l'un des plus importants du Sud des États-Unis. Le Festival of the Arts d'Oklahoma City est également l'un des meilleurs du pays. Cinq ballerines amérindiennes sont originaires de l'État et ont des tournées mondiales : Yvonne Chouteau, les sœurs Marjorie et Maria Tallchief, Rosella Hightower et Moscelyne Larkin, connues sous le nom de Five Moons. Le Tulsa Ballet est considéré par le journal New York Times comme l'une des meilleures compagnies des États-Unis. Yvonne Chouteau et son époux Miguel Terekhov sont à l'origine de l'Oklhoma City Ballet et de l'University of Oklahoma's dance program en 1962. À Sand Springs, un amphithéâtre en plein air appelé Discoveryland! accueille la comédie musicale Oklahoma !.
Le XIXe siècle fut marqué par la coexistence de traditions musicales différentes : rythmes amérindiens, ballades des cow-boys et des pionniers, Negro spiritual. Le jazz s'est développé dans les grandes villes de l'Oklahoma au début du XXe siècle. L'Oklahoma est le berceau de styles musicaux tels que The Tulsa Sound et Western Swing, qui fut popularisé par le Cain's Ballroom de Tulsa. Le bâtiment appelé Carnegie Hall of Western Swing servit de salle de spectacle pour Bob Wills et les Texas Playboys pendant les années 1930. Stillwater est connue comme le foyer de la musique Red Dirt, dont le principal représentant est le groupe Bob Childers.

Musées et institutions culturelles

Oklahoma possède plus de 300 musées. Le Philbrook Museum de Tulsa est considéré comme l'un des 50 meilleurs musées des États-Unis et le Sam Noble Oklahoma Museum of Natural History à Norman est l'un des plus grands musées universitaires. Les collections de Thomas Gilcrease sont exposées au Gilcrease Museum de Tulsa, qui abrite également la plus grande collection d'art de l'Ouest américain. L'Oklahoma City Museum of Art est célèbre pour ses collections de Dale Chihuly, les plus importantes du monde ; le National Cowboy and Western Heritage Museum à Oklahoma City expose des objets sur la conquête de l'Ouest. Le Sherwin Miller Museum of Jewish Art de Tulsa possède la plus grande collection judaïque du Sud-Ouest des États-Unis.

Cinéma

De nombreux films ont été tournés ou se déroulent en Oklahoma. La La Ruée vers l'Ouest 1960 puis Horizons lointains 1992 évoquent la course à la terre au xixe siècle. Oklahoma ! 1955 est l'adaptation en film musical par Fred Zinnemann de la comédie musicale du même titre. Tulsa 1949 se déroule pendant le boom pétrolier. Outsiders de Francis Ford Coppola 1983 fut tourné à Tulsa. Twister a été filmé en Oklahoma et met en scène des chasseurs de tornades. L'Oklahoma est un lieu de passage pour les héros des road movies Macadam à deux voies 1971 et Rain Man 1989. Meurtre à Tulsa 1997 est une adaptation du roman de Bryan Fair Berkey. Le Mystère Silkwood 1983 raconte l'histoire réelle de Karen Silkwood morte dans des circonstances douteuses alors qu'elle enquêtait sur des actes délictueux dans l'usine de plutonium où elle travaillait à Cimarron Oklahoma. Bien que dans le film Thelma et Louise 1991, l'action se situe en partie en Oklahoma, ce film a en réalité été tourné en Utah et surtout en Californie qui offre certains paysages similaires ceux de l'Oklahoma.

Littérature

Les premiers écrits sur l'Oklahoma datent du xvie siècle. Il s'agit du récit de l'expédition du conquistador Francisco Vásquez de Coronado raconté par Castañeda. Au xixe siècle, le naturaliste anglais Thomas Nuttall 1786-1859 et l'écrivain américain Washington Irving 1782-1859 décrivent la région. En 1835, le missionnaire Samuel Worcester traduit la Bible pour les Cherokees et installe la première presse de l'Oklahoma. Il publie de nombreux textes amérindiens. Entre la Guerre de Sécession et le début du XXe siècle, la littérature de l'Oklahoma s'enrichit des témoignages des pionniers et des officiers comme ceux de Thompson Benton Ferguson 1857-1921, futur gouverneur de l'État. La poésie se développa après la Première Guerre mondiale sous l'impulsion de professeurs de l'université de l'Oklahoma tels que Rollie Lynn Riggs 1899-1954 ou Stanley Vestal 1877-1957. Les poètes Donald Benson Blanding 1894-1957 et John Berryman 1914-1972 eurent des carrières nationales. Benjamin A. Botkin 1901-1975 édite entre 1929 et 1932 la revue Folk-Say sur le folklore américain. En 1945, Marquis James 1891-1955 publie Cherokee Strip: A Tale of an Oklahoma Boyhood ainsi que plusieurs biographies. Plusieurs écrivains de la deuxième moitié du XXe siècle sont originaires de l'Oklahoma : Angie Debo 1890-1988 a écrit de nombreux livres sur l'histoire de l'Oklahoma et sur les Amérindiens. John Joseph Mathews vers 1894-1979 est l'auteur de romans à succès sur les Osages. L'histoire de l'Oklahoma a donné de nombreuses sources d'inspiration aux écrivains nés dans l'état : par exemple, Matt Braun s'est spécialisé dans le western et a reçu plusieurs récompenses littéraires. Cimarron est un roman d'Edna Ferber publié en 1929 qui évoque la course à la terre. L'Oklahoma est aussi le décor choisi par John Steinbeck pour le début de son roman Les raisins de la colère dépeignant la grande misère qui a frappé les petits exploitants lors de la Grande Dépression. Enfin cet État, et plus précisément la période de la course à la terre, a inspiré le dessinateur de Bandes dessinées Morris dans un album de Lucky Luke intitulé 'Ruée sur l'Oklahoma'.

Éducation

Le système éducatif se compose d'écoles publiques financées par l'État de l'Oklahoma et d'écoles privées indépendantes. En 2006, il comptait 631 337 élèves répartis dans 1 846 établissements primaires et secondaires et 540 school districts. L'Oklahoma compte le plus grand nombre d'élèves amérindiens du pays, 120 122 pour l'année scolaire 2005-2006. L'État se classe parmi les derniers pour les dépenses d'éducation 6 614 dollars par élève en 2005 même si celles-ci ont augmenté. En 2004, il était à la 36e place pour le pourcentage d'adultes ayant un diplôme du secondaire 85,2 %, soit l'un des plus forts taux du Sud des États-Unis .
Il existe au total 43 établissements d'enseignement supérieur dans l'État. Les deux plus grandes universités publiques sont l'Université d'Oklahoma 30 000 étudiants et l'Oklahoma State University–Stillwater 32 760 étudiants pour l'année universitaire 2006-2007. Chacune possède un campus principal et des antennes régionales. L'Université d'Oklahoma City 3 800 étudiants, l'Université Oral Roberts et l'Université de Tulsa 4 187 étudiants sont les principaux établissements privés.
L'Oklahoma possède 11 universités publiques régionales. La Northeastern State University est la deuxième institution d'enseignement supérieur fondée à l'ouest du Mississippi 1851 et possède la seule école d'optométrie de l'Oklahoma et le plus important effectif d'étudiants amérindiens du pays.

Sports

L'Oklahoma possède de nombreuses équipes sportives en basket-ball, football américain, baseball, soccer et hockey sur glace, dans les villes d'Oklahoma City, Tulsa, Enid, Norman et Lawton. Le Thunder d'Oklahoma City évolue en NBA et est la seule équipe qui joue dans une ligue professionnelle nationale. Les autres équipes appartiennent à des divisions inférieures : ligue mineure de baseball, les RedHawks d'Oklahoma City, les Drillers de Tulsa, arenafootball, les Yard Dawgz d'Oklahoma City, les Talons de Tulsa, National Women's Football Association, équipe féminine du Lightning d'Oklahoma City, NBA Development League 66ers de Tulsa. Les villes d'Enid et de Lawton possèdent des équipes professionnelles de basket-ball : USBL et CBA. Après le passage du cyclone Katrina sur la Louisiane en 2005, le club de basket-ball des Hornets de La Nouvelle-Orléans fut contraint de s'installer au Ford Center d'Oklahoma City où ils jouèrent pendant deux saisons. En juillet 2008, les SuperSonics de Seattle, propriété d'un groupe d'hommes d'affaires d'Oklahoma City dirigé par Clayton Bennett, furent relocalisés au Ford Center sous le nom du Thunder d'Oklahoma City.
Le sport universitaire est très populaire dans l'État. Les Sooners de l'Oklahoma, Université de l'Oklahoma et les Cowboys d'Oklahoma State qui évoluent dans la division sud de la Big 12 Conference. Les derbys entre les deux équipes sont appelés Bedlam Series et sont particulièrement suivis. Le programme de football américain de l'université de l'Oklahoma réunit en moyenne 84 561 spectateurs lorsque l'équipe joue à domicile.
11 universités ou colleges sont inscrits à la NCAA, dont quatre appartiennent à la première division : l'université de l'Oklahoma, l'université d'État de l'Oklahoma, l'université de Tulsa et l'université Oral Roberts. Le magazine Sports Illustrated place les équipes de l'Université de l'Oklahoma et l'Université d'État d'Oklahoma parmi les meilleures du pays.
Douze autres établissements d'enseignement supérieur participent à la National Association of Intercollegiate Athletics, la plupart dans la Sooner Athletic Conference. La finale de l'US Open féminin de golf a été jouée à Muskogee en 1970 et au Cedar Ridge Country Club à Tulsa en 1983. Le championnat de golf masculin s'est déroulé dans plusieurs lieux de l'État : Southern Hills Country Club Tulsa, Oak Tree Country Club Oklahoma City et Cedar Ridge Country Club Tulsa. Southern Hills a accueilli quatre championnats de la PGA et trois US Open de golf, le plus récent en 2001. Le rodéo est également un sport populaire en Oklahoma et la ville de Guymon organise le plus important des États-Unis.

Presse écrite

En 2006, l'Oklahoma compte plus de 220 périodiques, dont 177 hebdomadaires et 48 quotidiens. The Oklahoman Oklahoma City est le quotidien le plus important de l'État et le 48e du pays. Il est diffusé à 215 102 exemplaires en semaine et 287 505 le dimanche. Le Tulsa World est le deuxième en Oklahoma et le 77e aux États-Unis 189 789 le dimanche et 138 262 en semaine. Le Cherokee Advocate, premier journal de l'Oklahoma, est paru en 1844 ; les articles étaient publiés en langue Cherokee et en anglais.

Radios

WKY est la première station à Oklahoma City en 1920, suivie par KRFU à Bristow, qui est transférée par la suite à Tulsa et devint KVOO en 1927. En 2006, il existe plus de 500 stations de radio en Oklahoma.
Les deux principales radios sont Oklahoma Public Radio et Public Radio International. Lancée en 1955, Oklahoma Public Radio a reçu 271 récompenses pour la qualité de ses programmes. Public Radio International diffuse ses émissions sur dix stations à travers l'État.

Télévision

Les débuts de la télévision hertzienne en Oklahoma remontent à 1949 avec la naissance des chaînes KFOR-TV à Oklahoma City et KOTV-TV à Tulsa. Actuellement, tous les réseaux nationaux sont disponibles.
L'Oklahoma possède quelques chaînes de télévision communautaires à destination des Amérindiens, des Hispaniques et des Asiatiques. Trinity Broadcasting Network est un réseau de télévision chrétienne dont les studios se trouvent à Tulsa.

Transports

Par sa position centrale aux États-Unis, à équidistance entre New York et Los Angeles, l'Oklahoma est un carrefour de voies de communications et possède un réseau de transport diversifié. L'État est traversé par quatre autoroutes inter-États Interstate Highway. À Oklahoma City se croisent l'Interstate 35, l'Interstate 44 et l'Interstate, ce qui constitue le plus important carrefour du système autoroutier américain. Le réseau routier a une longueur cumulée de 19 000 km et se compose notamment d'autoroutes gérées par l'État de l'Oklahoma et de dix autoroutes à péage. La célèbre Route 66 qui relie Chicago à Los Angeles traverse l'État du nord-est à l'ouest en passant par Tulsa. En 2005, l'Interstate 44 à Oklahoma City était l'autoroute la plus fréquentée de l'Oklahoma avec une moyenne de 131 800 voitures par jour.
L'aéroport Will Rogers World à Oklahoma City est le plus important aéroport de l'Oklahoma avec environ 3,5 millions de passagers par an. Le deuxième est l'aéroport international de Tulsa, avec trois millions de passagers par an. En termes de trafic, l'aéroport de Riverside-Jones à Tulsa est le plus actif avec 235 039 décollages et atterrissages en 2006. Au total, l'Oklahoma possède plus de 150 aéroports publics.
L'Oklahoma ne possède qu'une ligne de chemin de fer pour les passagers : depuis 1999, la Heartland Flyer mesure 332 km entre Fort Worth au Texas et Oklahoma City. Un projet d'extension vers Tulsa est à l'étude depuis 2007. Le port de Muskogee et le Tulsa Port of Catoosa sont situés sur le McClellan-Kerr Arkansas River Navigation System qui est relié au Mississippi et qui constitue l'une des voies navigables les plus actives du monde. Le Tulsa Port of Catoosa a un trafic annuel de plus de deux millions de tonnes.

Liens
http://youtu.be/5sWi_IE-nAs La tornade du siècle dans l'Oklahoma
http://youtu.be/Cbix-qdv6c4 Oklahoma
http://youtu.be/B1B7UOKFNvI Tornade en Oklahoma
http://www.ina.fr/video/VDD11021024/tulsa-oklahoma-video.html Tulsa en Oklahoma


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Posté le : 16/11/2014 23:11

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Georges Clémenceau 1
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De Montpellier
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Niveau : 63; EXP : 93
HP : 629 / 1573
MP : 3166 / 57675
Hors Ligne
Le 16 novembre 1917 est élu Georges Benjamin Clémenceau,
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76ème président du conseil des ministres français, 88ème chef du gouvernement, il restera à ce poste jusqu'au 18 Janvier 1920, sous la présidence de Raymond Poincaré. Sa carrière politique commence au poste de ministre de l'Intérieur du 14 mars 1906 au 20 juillet 1909, sous le président Armand Fallières. Dans le gouvernement Clemenceau I, Législature IXe, son prédécesseur est Ferdinand Sarrien son successeur Aristide Briand. Du 25 Octobre 1906 au 20 Juillet 1909, il est 63e président du Conseil des ministres français il est le 75e chef du gouvernement, président Armand Fallières. Sous le président Raymond Poincaré, il préside le gouvernement Clemenceau II, son prédécesseur est Paul Painlevé, son successeur André Lefèvre. Vint ensuite le gouvernement Clemenceau II, Législature XIIe, son prédécesseur est Paul Painlevé, son successeur Alexandre Millerand. Du 16 novembre 1917 au 18 janvier 1920, ministre de la guerre.

Son surnom est "Le tigre" et "Le père la Victoire". Il adhère au parti politique des indépendants proche des Radicaux.
Georges Benjamin Clemenceau, né le 28 septembre 1841 à Mouilleron-en-Pareds Vendée et mort, à 88 ans le 24 novembre 1929 à Paris, homme d'État français, radical-socialiste, président du Conseil de 1906 à 1909, puis de 1917 à 1920.
Issu d'une famille de notables républicaine, il est maire du 18e arrondissement de Paris puis président du conseil municipal de Paris au début de la Troisième République, ainsi que député en 1871, puis de 1876 à 1893, siégeant en tant que républicain radical. Défenseur de l'amnistie pour les Communards et anticlérical, il prône inlassablement la séparation des Églises et de l'État et s'oppose à la colonisation, faisant tomber le gouvernement Jules Ferry sur cette question. Fondateur du journal La Justice et de la Société des droits de l'homme et du citoyen, il travaille ensuite à L'Aurore et prend une part active dans la défense du capitaine Dreyfus.
Élu sénateur du département du Var en 1902, bien qu'il ait critiqué dans sa jeunesse l'institution du Sénat et de la présidence de la République, il est nommé ministre de l'Intérieur en 1906, se désignant lui-même comme le premier flic de France. Surnommé le Tigre, il réprime alors les grèves et met fin à la querelle des inventaires, puis devient président du Conseil à la fin de l'année 1906, fonction qu'il occupe pendant près de trois ans. Retournant ensuite au Sénat, il fonde le journal L'Homme libre, rebaptisé L'Homme enchaîné après avoir essuyé la censure au début de la Première Guerre mondiale.
Le 16 novembre 1917, il est de nouveau nommé président du Conseil et forme un gouvernement consacré à la poursuite de la guerre. Négociateur lors de la Conférence de Versailles, le Père la Victoire, après avoir promulgué la loi des huit heures, échoue à l'élection présidentielle de janvier 1920, étant critiqué à gauche et à droite, et se retire de la vie politique.

En bref

Issu d'une famille de la bourgeoisie vendéenne de tradition républicaine, Georges Clemenceau fait des études de médecine, séjourne de 1865 à 1869 aux États-Unis avant d'entrer véritablement dans la carrière politique. Maire de Montmartre en septembre 1870, puis du XVIIIe arrondissement, il est élu le 8 février 1871 député à l'Assemblée nationale, y siège à l'extrême gauche et en démissionne pendant la Commune. La même année, il devient conseiller municipal, puis président du conseil municipal de Paris en 1875. Il est élu député dans le XVIIIe arrondissement en 1876 sur un programme comportant : suppression de l'état de siège, instruction primaire obligatoire et laïque, séparation des Églises et de l'État. Après 1877, il se sépare des opportunistes et dirige le petit groupe d'extrême gauche d'où sortira le Parti radical. La violence de ses discours et l'adresse de son intelligence font de lui un tombeur de ministères : celui de Gambetta, puis celui de Ferry, au nom du patriotisme intégral contre la politique coloniale. Il fonde un journal : La Justice. À partir de 1885, il représente le Var à l'Assemblée. Il soutient la carrière politique du général Boulanger à ses débuts. À la fois autocrate et libertaire, il multiplie les mots et les duels. En 1893, il est battu aux élections après avoir été impliqué dans le scandale de Panamá. Éditorialiste à L'Aurore, le 13 janvier 1898 il y publie la lettre de Zola J'accuse, à propos de l'affaire Dreyfus. En 1902, le Var l'envoie au Sénat, qu'il a violemment combattu : Le Sénat ... c'est la résistance au mouvement, l'immobilité, la réaction. Dans le cabinet Sarrien 1906, il est ministre de l'Intérieur.
La même année, le Jacobin Clemenceau accède à la présidence du Conseil et appelle à son gouvernement le socialiste indépendant Viviani pour qui il crée le ministère du Travail chargé d'appliquer une série de réformes dans le sens de la justice sociale, limitation du temps de travail, assurance vieillesse. Le nouveau président a un vaste plan de réformes pour tous les secteurs de la vie nationale, et il est appuyé par une écrasante majorité du Bloc des gauches à la Chambre. Mais la C.G.T., où les révolutionnaires viennent de triompher des réformistes, suscite contre lui une vague de grèves. Celui qui s'est proclamé le premier des flics ne supporte pas cette agitation et la réprime durement. Vignerons du Midi, instituteurs, fonctionnaires, armée protestent à leur tour, et les socialistes se désolidarisent des radicaux qui rendent leur chef responsable de cette cassure. Ne voulant ni se rapprocher de la droite, ni pratiquer la politique demandée par la gauche, et brouillé avec Jaurès qui est devenu le porte-parole de celle-ci, Clemenceau, muré dans son intransigeance, est renversé en juillet 1909 par ceux qu'il appelait avec mépris les muets du sérail radicaux.
Il entre en 1909 dans l'opposition, aux côtés de Caillaux et de Briand. Il fonde un nouveau journal, L'Homme libre, qui devient bientôt L'Homme enchaîné, et dans lequel il combat tous les gouvernements qui se succèdent jusqu'en 1917. Mais, le 16 novembre 1917, il prend la direction du gouvernement et fait la guerre. Sa popularité est immense et, pour une génération d'hommes, il incarne l'histoire même de notre pays. À la chute du cabinet Painlevé, Poincaré fait le choix inévitable de celui dont le programme se résume en une phrase : Je fais la guerre. Churchill, qui était présent le jour de la présentation de son gouvernement à la Chambre, écrira : Tout autour de lui était une assemblée qui eût tout fait pour éviter de l'avoir là, mais qui, l'ayant mis là, sentait qu'elle devait obéir.
L'Action française soutient celui qui est maintenant, pour elle, le vieux chouan. La S.F.I.O. le redoute depuis qu'elle l'a connu ministre de l'Intérieur et briseur de grèves. Monarque pour les uns, comité de salut public pour les autres, Clemenceau entreprend la lutte sur le front de l'intérieur comme de l'extérieur. Malvy qui, comme ministre de l'Intérieur dans les précédents cabinets, s'était solidarisé avec les manifestations défaitistes, est banni sous l'accusation de forfaiture ; Caillaux est lui aussi emprisonné pour avoir parlé avec les Allemands. Clemenceau visite le front, soutient le moral des troupes, se bat avec les Alliés pour imposer aux armées le commandement unique de Foch, défend encore celui-ci devant la Chambre lors de la dernière contre-offensive en été 1918. La suprématie du civil sur le militaire, c'est lui et lui tout seul et, s'il a des comptes à régler avec ses généraux, il le fait loin des oreilles parlementaires. Le Tigre est devenu le Père la Victoire .
Le 11 novembre 1918, il donne lecture à la Chambre de la convention d'armistice. Il y est acclamé, et les députés proclament qu'il a bien mérité de la patrie. Président de la Conférence de la paix, il s'oppose souvent à Wilson et à Lloyd George. Pour Clemenceau, l'Allemagne doit payer, réparer, restituer. Il faut démanteler cet ennemi héréditaire. Mais, si Clemenceau obtient la restitution de l'Alsace-Lorraine, il échoue pour la rive gauche du Rhin, ne reçoit pour la Sarre qu'une concession provisoire. Et si le principe des réparations est retenu, le montant n'en est pas fixé.
Clemenceau semble avoir compté sur la garantie américaine pour maintenir le nouvel équilibre européen imposé par le traité de Versailles. Sa renommée est alors universelle. En 1920, la coalition des habiles et des inquiets, autour de Briand, l'écarte de la présidence de la République. Clemenceau présente la démission de son gouvernement le 18 janvier 1920. Il quitte la scène politique et se retire dans son village de Vendée, après une présence politique qui a marqué un demi-siècle.

Sa vie

Né le 28 septembre 1841 au 19 rue de la Chapelle, rebaptisée depuis rue Georges Clemenceau, dans la maison de ses grands-parents maternels à Mouilleron-en-Pareds, petite bourgade vendéenne, Clemenceau affirmera plus tard C'est au caractère vendéen que je dois le meilleur de mes qualités. Le courage, l'obstination têtue, la combativité. Il est le deuxième des six enfants de Sophie Gautereau et de Benjamin Clemenceau, établi comme médecin à Nantes, mais vivant surtout de ses fermages.
Sa famille paternelle qui appartient à la bourgeoisie vendéenne, habite le manoir du Colombier, près de Mouchamps. Au début du XIXe siècle, elle hérite par mariage du domaine de "l'Aubraie" de Féole6, dans la commune de La Réorthe, en Vendée, région de tradition royaliste et catholique.
Son arrière-grand-père, Pierre-Paul Clemenceau 1749-1825, est médecin des Armées de l'Ouest pendant la guerre de Vendée, puis sous-préfet de Montaigu et député du Corps législatif en 1805, au début du Premier Empire.
Son père, Benjamin 1810-1897 est médecin ; c'est un républicain engagé, progressiste, farouchement athée, qui aura une grande influence sur Georges, le second de ses six enfants, en lui transmettant les idéaux révolutionnaires et la haine de toute monarchie.
Il a participé aux Trois Glorieuses de 1830 et, lors de la Révolution de 1848, il a créé une Commission démocratique nantaise. Détenu une brève période à Nantes au lendemain du coup d'État du 2 décembre 1851, il est arrêté après l'attentat d'Orsini de 1858 et soumis, sans procès, à la transportation vers l'Algérie en vertu de la loi de sûreté générale. Il est toutefois libéré avant d'embarquer à Marseille, grâce à l'indignation de Nantes et à l'intervention d'un groupe de notables, notamment de son collègue Pierre Honoré Aubinais, médecin nantais et bonapartiste de gauche, proche de Jérôme Bonaparte, et mis quelque temps en résidence forcée à Nantes. Outre ce fond républicain, marqué par le buste de Robespierre sur la cheminée, son père lui enseigne la chasse, l'équitation et l'escrime : en 1890, Clemenceau sera le nègre de son ami James Fillis pour ses Principes de dressage et d'équitation.
Benjamin Clemenceau, qui, comme tous les hommes qui ne faisaient rien, était très occupé selon son fils, fut à ses heures peintre : portrait en buste de son fils enfant, et sculpteur : profil de son fils et double profil de lui et de sa sœur Emma, l'un et l'autre en plâtre, en 1848, année où il planta dans la propriété familiale du Colombier à Mouchamps 85, avec son jeune fils un cèdre de l'Atlas, son "arbre de la Liberté", qui surplombe sa tombe, et depuis novembre 1929, celle de son fils.
Sa mère, Sophie Gautereau, 1817 - † Hyères, 20 avril 1903 qui lui enseigne le latin, il connaît également le grec, est issue d'une famille de cultivateurs devenus de petits bourgeois, de religion protestante.

Jeunesse : du lycée de Nantes au séjour américain

Clemenceau par Nadar, avec ses cheveux ras, son front dégarni, ses pommettes saillantes, ses sourcils épais et broussailleux, sa moustache tombante.
Georges Clemenceau est élève du lycée de Nantes à partir de la classe de 5e en 1852-53. Son professeur de lettres de 5e est Louis Vallez, le père de Jules Vallès. Il effectue une scolarité convenable, obtenant chaque année sauf en 4e quelques accessits, et seulement trois prix, récitation classique en 5e, histoire naturelle en rhétorique, version latine en logique. Lors de la remise de ce dernier prix, en 1858, l'année de l'arrestation de son père, il est ovationné par les assistants. À partir de 1883, Clemenceau est un membre-fondateur actif de l'Association des anciens élèves du lycée de Nantes, section parisienne où il rencontre Boulanger, son condisciple en 1852-53, mais beaucoup plus âgé, élève de classe préparatoire à Saint-Cyr. Son nom sera donné au lycée dès 1919.
Il obtient le baccalauréat ès-lettres en 1858. Il s'inscrit ensuite à l'école de médecine de Nantes. Après trois années pendant lesquelles il se révèle un étudiant médiocre et dissipé, passant notamment en conseil de discipline, il part en 1861 poursuivre ses études à Paris, où il s'inscrit également en droit.
Il fréquente des cercles artistiques et républicains dans le Quartier latin où il fait connaissance avec Claude Monet en 1863. Avec plusieurs camarades, Germain Casse, Jules Méline, Ferdinand Taule, Pierre Denis, Louis Andrieux, il fonde un hebdomadaire, Le Travail, dont le premier numéro paraît le 22 décembre 1861. Zola se joint au groupe afin de soutenir le journal contre la censure. Clemenceau y publie des piques à l'encontre de l'écrivain Edmond About, rallié au régime.
La publication prend fin au bout de huit numéros : la plupart des membres ont en effet été arrêtés après un appel à manifester place de la Bastille afin de commémorer la Révolution du 24 février 1848. Le 23 février 1862, Clemenceau est envoyé pour 73 jours à la prison de Mazas. Quand on a l'honneur d'être vivant, on s'exprime ! Quand ?.
Libéré, il rend visite à son ami Ferdinand Taule, détenu à Sainte-Pélagie, où il rencontre Auguste Blanqui, alias l'Enfermé, avec qui il se lie d'amitié et de complicité, ainsi qu'Auguste Scheurer-Kestner, personnage central de la défense de Dreyfus. En 1896, il honorera Blanqui en parlant de cette vie de désintéressement total … Qui ne découragera que les lâches du grand combat pour la justice et pour la vérité.
Durant ses années d’études, Clemenceau participe à la création de plusieurs autres revues et écrit de nombreux articles avec son ami Albert Regnard. Après avoir effectué des stages à l'hôpital psychiatrique de Bicêtre, puis à La Pitié, il obtient le doctorat en médecine le 13 mai 1865 avec une thèse intitulée De la génération des éléments anatomiques, sous la direction de Charles Robin, un matérialiste ami d'Auguste Comte. Sa thèse reprend les idées de Robin, qui est un adversaire du catholique bonapartiste Pasteur. Elle est ensuite publiée chez Germen-Baillère en échange de la traduction par Clemenceau d’Auguste Comte and Positivism de J.S. Mill. Plus tard, lorsque Pasteur sera devenu célèbre, Clemenceau reconnaîtra de bonne grâce son erreur.
À la suite d'un dépit amoureux avec Hortense Kestner, la belle-sœur de son ami Auguste Scheurer-Kestner, le 25 juillet 1865, il s’embarque, d'abord pour l'Angleterre, où son père le présente à Mill et Spencer7, puis pour les États-Unis, qui sortent à peine de la guerre de Sécession. Il trouve un poste d’enseignant dans un collège pour jeunes filles à Stamford Connecticut où il donne des cours de français et d’équitation. Il devient également correspondant du journal Le Temps7.
Clemenceau s’éprend alors d’une de ses élèves, Mary Plummer 1848-1922, qu’il épouse civilement le 20 juin 18697, avec qui il aura trois enfants, dont Michel, né en 1873 et deux filles, Madeleine et Thérèse-Juliette.
Sa femme ayant une liaison avec son jeune secrétaire précepteur des enfants, il fait constater l'adultère et l'envoyer brutalement quinze jours dans la prison Saint-Lazare pour adultère, alors qu'il a eu lui-même de nombreuses liaisons féminines, on lui en attribue environ 800 et pendant cette incarcération demande le divorce qu'il obtient en 1891 avant de la renvoyer brutalement aux États-Unis avec un billet de troisième classe et obtenu qu'elle perde la garde de ses enfants et la nationalité française. Revenue vivre en France, mais restée perturbée psychologiquement par ces évènements conjugaux, l'ex-Madame Georges Clemenceau mourra seule, le 13 septembre 1922, dans son appartement parisien du 208, rue de la Convention. Clemenceau l'annoncera ainsi à son frère Albert: Ton ex-belle-sœur a fini de souffrir. Aucun de ses enfants n'était là. Un rideau à tirer. lettre du 27 septembre 1922 dans sa Correspondance 1858-1929, p. 639.
De ce séjour américain, il tire un bilinguisme franco-anglais rare à l'époque et une familiarité avec les cercles anglo-saxons.

L'effondrement de l'Empire

Le 26 juin 1869, il est de retour en France avec sa femme. Son voyage aux États-Unis lui aura fait découvrir la démocratie américaine - il admire la procédure d'impeachment- et lui laisse un goût durable pour la philosophie et la littérature anglo-saxonne.
Dès que la guerre franco-prussienne éclate, il quitte sa femme et son nouveau-né, Madeleine, pour se rendre à Paris, où il arrive début août 1870. À la suite de la défaite de Sedan, le 2 septembre 1870, il prend une part active, avec ses amis Arthur Ranc et Edmond Adam, à la journée du Quatre Septembre au cours de laquelle est proclamée la République.
Formé le jour même, le gouvernement de la Défense nationale nomme Étienne Arago maire de Paris, qui lui-même nomme des maires provisoires dans les différents arrondissements. Arago cherchant des républicains sûrs23 nomme Clemenceau, - introduit auprès d'Arago par son père - à la tête de la mairie de Montmartre, alors commune indépendante. Il rencontre alors l'anarchiste Louise Michel, institutrice du quartier, et permet à Blanqui de devenir commandant du 169e bataillon, alors que le siège de Paris commence le 19 septembre 1870.
Fin octobre, les Parisiens se révoltent en apprenant la reddition du maréchal Bazaine à Metz et l'envoi par le gouvernement provisoire conservateur d'Adolphe Thiers à Versailles, pour négocier l'armistice avec Bismarck. Pour le républicain farouchement antimonarchiste qu'est Clemenceau, c'est une provocation : il fait placarder des affiches annonçant son refus d'une telle trahison. Le jour même, la Garde nationale des quartiers populaires organise un soulèvement afin de prendre l'Hôtel de Ville. La Garde nationale des quartiers bourgeois, emmenée par Jules Ferry, s'y oppose et empêche le coup de force. L'épisode fait de Clemenceau et Ferry des rivaux acharnés.
Désavoués pour leur complicité avec les révolutionnaires, Arago démissionne, suivi de Clemenceau. Le gouvernement obtient la confiance des Parisiens par le plébiscite du 3 novembre, et organise des élections municipales le 5 novembre. Clemenceau est élu dans le XVIIIe arrondissement. Il est cependant destitué le 22 janvier 1871, jour d'une manifestation à l'Hôtel de Ville, pour avoir demandé, avec d'autres maires d'arrondissement réunis par Jules Favre, la démission du général Trochu. L'armistice, refusé par Clemenceau et le peuple parisien, est signé six jours plus tard.
Le 8 février, ayant refusé l'offre de Gambetta de devenir préfet du Rhône, il est élu député de la Seine, en 27e position au sein de la nouvelle Assemblée nationale. Il figure alors sur les listes électorales de l'Union républicaine, s'opposant à la paix léonine avec Bismarck, aux côtés de Victor Hugo, Garibaldi, Gambetta, Courbet, Louis Blanc, etc.

De la Commune au conseil municipal. Commune de Paris 1871.

Début mars 1871, Clemenceau est à Paris. Le 1er mars 1871, il appelle ses concitoyens à s'abstenir de toute violence lors de l'entrée des Prussiens dans la ville. Lors du soulèvement du 18 mars 1871, accompagné du capitaine Mayer et Sabourdy, il tente de sauver de la foule les généraux Thomas et Lecomte. Le soir, le Comité central de la garde nationale a pris le pouvoir à Paris, et décide l'organisation d'élections municipales.
Deux jours plus tard, à l'Assemblée réunie à Versailles, Clemenceau dépose, avec 18 députés républicains, un projet de loi afin d'organiser l'élection d'un conseil municipal de 80 membres à Paris, qui aura le titre et exercera les fonctions de maire de Paris. Il navigue ainsi entre le gouvernement de Thiers et la Commune de Paris, tentant de concilier les camps ennemis, ce qui lui attire l'inimitié des deux parties. Les communards à qui il reproche d'être sortis de la légalité, le font ainsi démissionner de sa fonction de maire le 22 mars, le remplaçant par un délégué du Comité central. Ce dernier organise des élections municipales le 26 mars 1871, au cours desquelles Clemenceau n'obtient que 752 voix.
Minoritaire, il démissionne de son poste de conseiller municipal et de député la veille de la proclamation de la Commune, et fonde avec d'anciens maires la Ligue républicaine des droits de Paris, qui tente de négocier avec les deux camps. Il quitte Paris le 10 mai 1871 afin de rejoindre le congrès des municipalités à Bordeaux, interdit par le gouvernement Thiers. Devant cet échec, il tente de revenir à Paris, mais ne peut entrer dans la ville, soumise à l'attaque sanglante du gouvernement Thiers.
Soupçonné de connivence avec la Commune, il se rend clandestinement en Vendée, puis à Belfort et Strasbourg annexé, avant de retourner à Paris le 15 juin 1871. Battu aux élections complémentaires du 2 juillet 1871, il se fait élire conseiller municipal de Paris le 30 juillet 1871, à Clignancourt. En 1872, il se bat en duel avec Poussargues, ce qui lui vaut 15 jours avec sursis et 25 francs d'amende. Il est réélu lors des élections municipales de novembre 1874. Le 29 novembre 1875, il est élu président du conseil municipal de Paris par 39 voix sur 54 suffrages :
" Le caractère dominant de notre politique municipale, déclare-t-il alors, … c'est d'être profondément imbue de l'esprit laïque, c'est-à-dire que, conformément aux traditions de la Révolution française, nous voudrions séparer le domaine de la Loi, à qui tous doivent obéissance, du domaine du Dogme, qui n'est accepté que par une fraction seulement des citoyens ".

Le député radical 1876-1896

Son élection, le 20 février 1876, comme député de Paris à la Chambre des députés marque son émergence sur la scène nationale. Il est élu dans le 18e arrondissement dès le premier tour avec 15 000 voix contre 3 700 pour son rival. Refusant alors aussi bien les institutions de la présidence de la République et du Sénat que le cumul des mandats, il démissionne de son poste de président du conseil municipal le 24 avril 1876.
Clemenceau s'impose par son verbe comme le chef incontesté des républicains radicaux qui ne sont pas encore constitués en parti et de l’opposition d’extrême gauche aux Opportunistes, emmenés par Gambetta. L'écrivain Julien Gracq parlera a posteriori de son agressivité pure, gratuite, incongrue, de cette personnalité aux arêtes tranchantes comme un rasoir. Il lutte alors pour l'amnistie des Communards, la révision des lois constitutionnelles de 1875 rédigées par les républicains opportunistes et les orléanistes, la laïcité et, 30 ans avant la loi de 1905, la séparation de l’Église et de l’État.

La lutte pour l'amnistie

Dès son discours du 16 mai 1876 à la Chambre, il se fait remarquer par son éloquence, qu'il met au service de l'amnistie30. Raspail, Lockroy et lui, ainsi que Victor Hugo au Sénat, s'unissent dans ce combat, mais ils sont minoritaires face aux opportunistes, qui, derrière Gambetta et Jules Méline, soutiennent une amnistie partielle.
Ils relancent le combat pour l'amnistie trois ans plus tard. Au gouvernement Waddington qui veut exclure de celle-ci ceux qui se déclarent les ennemis de la société, Clemenceau rétorque, suscitant les rires de la Chambre :
À quel signe, à quel critérium, on reconnaît un ennemi de la société : M. le duc de Broglie est un ennemi de la société aux yeux de M. Baudry d'Asson, et moi je tiens M. Baudry d'Asson pour un ennemi de la société. Nous sommes ainsi 36 millions d'ennemis de la société qui sommes condamnés à vivre dans la même société, Nouveaux rires.
Le projet est cependant rejeté. Il soutient alors, avec quelques amis, et incognito, la candidature à la députation de Blanqui, détenu à la maison centrale de Clairvaux. Celui-ci est élu le 20 avril 1879 ; sa situation d'inéligibilité permet à Clemenceau de relancer la bataille pour l'amnistie. En 1880, la démission du maréchal Mac-Mahon, ultime épisode de la crise du 16 mai 1877, son remplacement par Jules Grévy, et le résultat des élections sénatoriales permettent finalement à Clemenceau d'arriver à ses fins : l'amnistie pleine et entière est votée, sur un projet de loi du gouvernement Freycinet.

La rupture avec Gambetta et le discours de Marseille

Après que les républicains se sont scindés entre radicaux et opportunistes, Clemenceau attaque férocement ces derniers pour leur timidité et leur pragmatisme. Il contribue ainsi à la démission du ministre de l'Intérieur Marcère en mars 1879, provoquée par un scandale de police : à cette occasion, qui signe la rupture avec Gambetta, Clemenceau réclame l'épuration des cadres de police hérités du Second Empire.
Son discours de Marseille du 28 octobre 1880, qui reprend le programme de Belleville de Gambetta 1869, blâme ainsi l'opportunisme qui vise à ajourner les réformes dans le cadre de la République victorieuse des monarchistes. Il y réclame la séparation de l'Église et de l'État, la confiscation des biens des congrégations, la suppression du Sénat, l'élection des magistrats, l'autonomie municipale, l'impôt sur le revenu, la limitation de la durée légale de la journée de travail, la retraite des vieux travailleurs, la responsabilité des patrons en cas d'accident, le rétablissement du divorce et la reconnaissance du droit syndical, ainsi que l'interdiction du travail pour les enfants en dessous de 14 ans, la liquidation des grandes compagnies de chemin de fer, des canaux et des mines.
À l'occasion d'une interpellation du jeune socialiste Alexandre Avez, il critique cependant le collectivisme et la socialisation des moyens de production. Lors de ce discours, prononcé le 11 avril 1880 au cirque Fernando à Paris, il rétorque à Avez : il y a aussi des jésuites rouges. Le quotidien centriste Le Temps remarque : Quelque avancé que l'on soit, on se trouve toujours être le réactionnaire de quelqu'un.
Bien que siégeant toujours à l'Extrême-Gauche, il incarne ainsi une voie médiane entre le socialisme émergeant et l'opportunisme. Lors des débats sur la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, il tente de s'opposer à l'institution d'un délit d'outrage au président de la République, qu'il considère comme une forme de censure. De même, il se moque en février 1881 du délit de diffamation :
M. le rapporteur nous présente une loi qui donne paraît-il la liberté de la presse, mais il ne permet pas la diffamation ni envers les cours d'appel, ni envers les tribunaux, ni envers les armées de terre ou de mer, ni envers les corps constitués, ni envers les administrations publiques, ni envers un ou plusieurs membres du ministère, ni envers un ou plusieurs membres de l'autre Chambre, ni envers un fonctionnaire public, ni envers un dépositaire ou agent de l'autorité publique, ni envers un ministre de l'un des cultes salariés par l'État, ni envers un citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public temporaire ou permanent, ni envers un juré ou un témoin à raison de sa déposition. Moyennant qu'on ne parle jamais des personnes que je viens d'indiquer, on aura le droit de tout dire.
Il tente également d'autoriser les assemblées non permanentes lors des débats sur la liberté de réunion, alors que le projet de loi maintient l'interdiction sur les clubs politiques. Concernant les lois Jules Ferry, il s'oppose radicalement à une loi sur l'éducation obligatoire qui n'inclurait pas le caractère laïque de l'éducation publique, considérant l'éducation obligatoire dans des écoles religieuses comme contraire à la liberté de conscience.
Durant ce mandat, il a ainsi voté pour les poursuites judiciaires contre les responsables du 16 mai, Mac Mahon, etc. ; pour la révision des lois constitutionnelles de 1875 proposée par la commission Barodet ; pour l'élection des magistrats ; pour la séparation de l'Église et de l'État ; pour l'amnistie des Communards ; pour l'instruction laïque ; pour le service militaire réduit à 3 ans ; pour la fin de l'exemption du service militaire pour les séminaristes ; pour la diminution du traitement des cardinaux, archevêques et évêques ; pour la suppression de l'ambassade au Vatican ; pour le rétablissement du divorce ; pour la liberté d'association et la liberté de réunion ; contre l'interdiction des clubs ; pour la liberté de la presse ; pour la loi visant à protéger les employés des chemins de fer contre les grandes compagnies ; pour la journée de 10 heures maximum ; pour la reconnaissance des syndicats ; pour le scrutin de liste ; pour les poursuites contre le préfet de police Andrieux.
Pour asseoir davantage son influence, il fonde avec le jeune Stephen Pichon un journal, La Justice, qui paraît pour la première fois le 13 janvier 1880. Le rédacteur en chef en est Camille Pelletan. Malgré un tirage relativement faible et un échec économique durable, le quotidien bénéficie d'une certaine audience dans les milieux politiques.

Jules Ferry et le colonialisme

Réélu aux législatives de 1881, à la fois dans les deux circonscriptions du XVIIIe arrondissement où il s'est présenté et à Arles, où les républicains locaux lui ont demandé de se présenter, Clemenceau acquiert pour sa férocité le surnom de Tigre, un animal qu'il disait ne pas aimer, Tout en mâchoire et peu de cervelle. Cela ne me ressemble pas, et une réputation de tombeur de ministères grâce notamment à ses talents d'orateur redouté pour son ironie et sa férocité verbale. Intransigeant face aux opportunistes, il fait en effet tomber plusieurs ministères successifs, avec l'appoint de voix de droite. Je n'ai pourtant jamais démoli qu'un seul ministère, dit-il pour sa défense, puisque c'était toujours le même.Lors du discours de Salerne en 1893, il déclarera :
Ce qu’on ne dit pas. c’est que les modérés ont, à travers tout, sous des noms divers, maintenu les mêmes hommes et la même politique d’atermoiement. Ce qu’on ne dit pas, c’est que rencontrant un cabinet radical, les modérés ne se sont pas fait faute de s’unir à la droite pour le renverser. Ainsi se retourne contre eux un de leurs principaux griefs contre nous.

Dès novembre 1881, il attaque le cabinet Ferry à propos de l'expédition tunisienne qui a abouti à l'instauration d'un protectorat traité du Bardo, considérant qu'elle ne résulte que de l'action d'hommes qui veulent faire des affaires et gagner de l'argent à la Bourse !. Il dépose une motion proposant une enquête sur les causes de l'expédition, la droite déposant une motion rivale accusant le gouvernement d'avoir trompé les Chambres et le pays. Incapable de faire voter l'ordre du jour, Ferry démissionne et laisse la place au gouvernement Gambetta.
Deux mois plus tard, en janvier 1882, l'action de Clemenceau en faveur de la révision intégrale de la Constitution contribue à la démission du ministère Gambetta, remplacé par le cabinet Freycinet. En incitant les députés à refuser le vote d’un budget pour une intervention militaire sur le canal de Suez, ce qui est fait le 29 juillet 1882, il pousse également Freycinet à la démission.
En février 1883, Jules Ferry forme son deuxième cabinet, appuyé sur une coalition centriste, Union républicaine et Gauche républicaine, groupe de centre-droit en réalité. Clemenceau et les radicaux se sont déjà opposés à Ferry lorsqu'il était au ministère de l'Instruction publique 1879-80 et 1882, l'accusant de timidité dans la mise en œuvre des réformes républicaines. Pour autant, le mouvement ouvrier et socialiste commence à s'organiser, contestant le radicalisme vieille école de Clemenceau. En 1882, Jules Guesde fonde en effet le Parti ouvrier français, tandis que les anarchistes se manifestent : pas seulement par la propagande par le fait, dénoncée dès 1887 par Kropotkine, mais surtout avec la mise en place des Bourses du travail.
Lors des débats sur l'autorisation des syndicats loi Waldeck-Rousseau votée en mars 1884, Clemenceau rétorque à Ferry, en janvier 1884 :
" C'est l'État qui doit intervenir directement pour résoudre le problème de la misère, sous peine de voir la guerre sociale éclater au premier jour."
Durant l'été 1884, alors qu'on débat de la révision constitutionnelle, Clemenceau prône l'abolition du Sénat et la suppression de la présidence de la République. Il échoue, la loi du 9 décembre 1884 se limitant à une simple réforme du Sénat. La même année, il se rend avec une délégation radicale à Marseille lors de l'épidémie de choléra, faisant la connaissance de l'équipe du journal Le Petit Var.
Paul Cambon, résident général de France en Tunisie. Nommé en Tunisie, le général Boulanger ne lui plaira guère, et sera rappelé à Paris en 1885. Clemenceau rencontrera Cambon à Londres lors de la Première Guerre mondiale, et le choisira comme membre de son équipe de négociateurs lors de la conférence de paix.
Son combat contre Jules Ferry aboutit le 30 mars 1885 à la démission de ce dernier sur l'affaire du Tonkin. La Chambre, en particulier la droite et l'extrême gauche, refuse de voter une rallonge de 200 millions de francs pour les troupes françaises au Tonkin attaquées par l’armée chinoise. Le 9 juin 1885, le second traité de Tien-Tsin confirme cependant l'occupation française. Le succès initial de la colonisation française dans les décennies suivantes poussera nombre d'historiens et membres du parti colonial à critiquer Clemenceau pour son aveuglement: la décolonisation ne sera à l'ordre du jour que 70 ans plus tard.
Le débat avec Ferry rebondit le mois qui suit sous le cabinet Brisson, alors que Ferry défend l'expédition de Madagascar. De nouveau, Clemenceau s'oppose farouchement à la colonisation, refusant tout impérialisme au nom du respect envers les autres peuples et civilisations ; il s'oppose par ailleurs à une politique aventuriste et du fait accompli, faite au profit d'une camarilla d'hommes d'affaires, le célèbre parti colonial ; il défend enfin la nécessité de préparer la France face à l'Allemagne. Le 28 juillet 1885, Ferry invoque à la Chambre le devoir qu'ont les races supérieures de civiliser les races inférieures, s'appuyant sur un type de discours alors à la mode, ainsi que la nécessité de trouver des débouchés commerciaux et de ne pas laisser le champ libre aux autres puissances européennes. Clemenceau lui répond vigoureusement.
Plus tard, s'appuyant sur l'exemple de la Cochinchine, Clemenceau contestera, rejoignant en cela la position de Thiers et de la droite de cette époque le profit économique qu'apporterait la colonisation, pour refaire la France vaincue, ne pas gaspiller son sang et son or dans des expéditions sans profit, proclamera-t-il lors du discours de Salerne de 1893. Plutôt que de diffuser la civilisation française dans le monde, il préconise de lutter contre la misère en France et de faire avancer les droits sociaux. Concernant les présupposés racistes de l'idéologie colonialiste, il rétorque le 31 juillet :
" Les races supérieures ont sur les races inférieures un droit qu'elles exercent et ce droit, par une transformation particulière, est en même temps un devoir de civilisation. Voilà, en propres termes, la thèse de M. Ferry et l'on voit le gouvernement français exerçant son droit sur les races inférieures en allant guerroyer contre elles et les convertissant de force aux bienfaits de la civilisation. Races supérieures ! Races inférieures ! C'est bientôt dit. Pour ma part, j'en rabats singulièrement depuis que j'ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande, parce que le Français est d'une race inférieure à l'Allemand. Depuis ce temps, je l'avoue, j'y regarde à deux fois avant de me retourner vers un homme et vers une civilisation et de prononcer : homme ou civilisation inférieure ! Race inférieure, les Hindous ! Avec cette grande civilisation raffinée qui se perd dans la nuit des temps ! Avec cette grande religion bouddhiste qui a quitté l'Inde pour la Chine, avec cette grande efflorescence d'art dont nous voyons encore aujourd'hui les magnifiques vestiges ! Race inférieure, les Chinois ! Avec cette civilisation dont les origines sont inconnues et qui paraît avoir été poussée tout d'abord jusqu'à ses extrêmes limites. Inférieur Confucius ! … Je ne veux pas juger au fond la thèse qui a été apportée ici et qui n'est autre chose que la proclamation de la puissance de la force sur le Droit … "

La vague boulangiste

Les élections d'octobre 1885 marquent un progrès important des monarchistes alors que la Grande dépression s'abat sur la France. Clemenceau, mis en ballotage, est élu à la fois à Paris et dans le Var où le modéré Jules Roche s'est désisté par discipline républicaine, permettant à la liste radicale de l'emporter. Clemenceau opte pour le Var, circonscription de Draguignan, département dont la population vote de plus en plus à gauche. Majoritaire, la gauche est cependant divisée entre les modérés de l'Union républicaine et de l'Union démocratique et l'extrême-gauche, incluant la Gauche radicale dont fait partie Clemenceau.
En 1886, le général Boulanger, ancien condisciple de Clemenceau au lycée de Nantes56, est nommé Ministre de la Guerre dans le cabinet Freycinet, ce qui est considéré comme un geste des modérés vis-à-vis de Clemenceau. Effectivement, Boulanger, républicain et patriote, applique de manière étendue la loi du 22 juin 1886 interdisant aux membres des familles ayant régné sur la France de servir dans l'armée. Opposé au colonialisme, qu'il considère comme un détournement de l'effort militaire vis-à-vis de Bismarck, et préparant la professionnalisation de l'armée, il plaît alors à Clemenceau, qui reste cependant circonspect.
Lors de l'affaire Schnæbelé 1887, Boulanger consulte Clemenceau, qui lui conseille d'agir avec fermeté sans tomber dans la provocation lancée par Bismarck. C'est le début de la vague boulangiste qui manque d'emporter la République. Appuyé par une coalition hétéroclite de radicaux d'extrême-gauche, L'Intransigeant de Rochefort et La Lanterne de Mayer et de monarchistes, Boulanger, démis de ses fonctions en tant que ministre à la suite de la chute du cabinet Goblet provoquée par Ferry, puis démis de ses fonctions militaires en mars 1888, se présente successivement à plusieurs élections partielles, se faisant élire puis démissionnant pour se faire élire ailleurs, afin de faire la preuve de sa popularité. Il critique le parlementarisme et appelle à une réforme institutionnelle qui donnerait une grande place au référendum et à ce qu'il appelle la démocratie directe, proposition de loi du 4 juin 1888. Les sceptiques, au contraire, dénoncent un risque d'autoritarisme. Fin 1887, le scandale des décorations est utilisé par les boulangistes pour discréditer le régime parlementaire : le président Jules Grévy est contraint de démissionner en décembre 1887.
Les républicains, Jules Ferry en tête, s'inquiètent de cette vague antiparlementaire. Ferry fait l'objet de la colère populaire lors d'une manifestation des 1er et 2 décembre 1887, à laquelle participent des membres de la Ligue des patriotes de Déroulède, des proches de Rochefort, des anarchistes, dont Louise Michel, des blanquistes du Comité central révolutionnaire, etc., qui s'opposent à l'élection à la présidence de Ferry. C'est finalement Sadi Carnot qui est élu.
De son côté, Clemenceau semble s'appuyer au début sur la vague boulangiste pour pousser ses propres projets de réforme institutionnelle, abolition du Sénat et de la présidence, avec prudence puisque dès juillet 1887, il critique la manifestation en faveur de Boulanger qui a eu lieu le 1456. En mars 1888, tout en s'opposant aux boulangistes, il refuse de voter l'ordre du jour demandé par le cabinet Tirard, composé d'Opportunistes. Il exige en effet des réformes sociales, et pas seulement politiques : selon lui, c'est leur absence qui explique le succès du général. Il vote donc comme les députés boulangistes, Laguerre, ancien collègue de La Justice, ou Michelin. L'ordre du jour est néanmoins voté par 339 voix, contre 82. Selon l'historien Michel Winock :
" Au fond, Clemenceau, à la mi-mars 1888, utilise la fièvre boulangiste, sans être boulangiste lui-même, pour aiguillonner le parti républicain, ses hommes au pouvoir et les parlementaires. "
En avril, il s'oppose frontalement à Boulanger, l'accusant de césarisme et de bonapartisme, bref, de représenter un danger pour la République. Le 25 mai 1888, avec Joffrin, Ranc et Lissagaray, il fonde la Société des droits de l'homme et du citoyen, unissant contre la vague boulangiste diverses tendances républicaines, à l'exception des partisans inconditionnels de Ferry, ainsi que certains possibilistes Joffrin .
Lorsque le 4 juin 1888, Boulanger présente à la Chambre son projet de réforme institutionnelle, Clemenceau s'y oppose, déclarant :
" Je le dis très haut : je suis pour la politique de parti … Il Boulanger ignore apparemment, lui qui essaie de faire un parti, que c'est d'abord un groupement d'idées, que c'est là ce qui, dans tous les pays du monde, constitue un parti …
Lisez l'histoire de la France depuis la Révolution française, et vous verrez que le parti royaliste, que le bonapartisme lui-même, et en tout cas le parti républicain, ont chacun leurs traditions et leurs titres dont ils peuvent se réclamer. Vous croyez qu'ils peuvent disparaître à votre voix … Le voulussent-ils, ils ne le pourraient pas, et il me sera permis qu'il faut que le parti royaliste ne se sente guère de fierté au cœur pour adhérer à la déclaration que nous avons entendue tout à l'heure … ces cinq cents hommes qui sont ici, en vertu d'un mandat égal au vôtre, ne s'accordent pas sans discussion. Eh bien, puisqu'il faut le dire, ces discussions qui vous étonnent, c'est notre honneur à tous. Elles prouvent surtout notre ardeur à défendre les idées que nous croyons justes et fécondes. Ces discussions ont leurs inconvénients, le silence en a davantage. …
" Si c'est le régime de discussion que vous croyez flétrir sous le nom de parlementarisme, sachez-le, c'est le régime représentatif lui-même, c'est la République sur qui vous osez porter la main. "

" La Révolution est un bloc"

La Révolution est un bloc, discours du 29 janvier 1891 à la Chambre.
… il a été joué à la Comédie-Française une pièce évidemment dirigée contre la Révolution française. Il est temps d'écarter toutes les tartuferies auxquelles on a eu recours pour dissimuler la réalité. Assurément, on n'a pas osé faire ouvertement l'apologie de la monarchie contre la République. On ne pouvait pas le faire à la Comédie Française. On a pris un détour, on s'est caché derrière Danton. Depuis trois jours, tous nos monarchistes revendiquent à l'envi la succession de Danton. … Mais voici venir M. Joseph Reinach qui monte à cette tribune entreprendre le grand œuvre d'éplucher, à sa façon, la Révolution française. Il épluche en conscience et, sa besogne faite, nous dit sérieusement : J'accepte ceci, et je rejette cela ! J'admire tant d'ingénuité. Messieurs, que nous le voulions ou non, que cela nous plaise ou que cela nous choque, la Révolution française est un bloc… un bloc dont on ne peut rien distraire, parce que la vérité historique ne le permet pas.
Je ne pouvais m'empêcher, en entendant M. Reinach, de faire un rapprochement bizarre. Ah ! vous n'êtes pas pour le tribunal révolutionnaire, monsieur Reinach ! mais vous avez la mémoire courte. Il n'y a pas longtemps, nous en avons fait un ensemble, un tribunal révolutionnaire… Nous en avons fait un ensemble, un tribunal révolutionnaire, et le pire de tous. Nous avons livré des hommes politiques à des hommes politiques, leurs ennemis, et la condamnation était assurée d'avance, Clemenceau fait ici allusion à la condamnation par la Haute Cour de justice, le 14 août 1889, de Boulanger, Rochefort et Dillon à la déportation dans une enceinte fortifiée..
Voilà ce que nous avons fait. Dans cet acte réfléchi, voulu, je revendique ma part de responsabilité et je ne regrette rien de ce que j'ai fait.
Vous souvenez-vous de l'état d'esprit de beaucoup de nos collègues à cette époque ? Oui, un jour néfaste est venu où nous avons eu peur pour la République et pour la patrie — nous pouvons le dire, c'est notre excuse.
… et, suivant le mot de Michelet, à l'heure où la France était aux frontières faisant face à l'ennemi, ils lui plantaient un poignard dans le dos. … c'est une besogne facile que de venir dire aujourd'hui à ces hommes qui ont fait la patrie, qui l'ont défendue, sauvée, agrandie : Sur tel point, à telle heure, vous avez été trop loin ! ». Oui ! il y a eu des victimes, des victimes innocentes de la Révolution, et je les pleure avec vous.
… Vous avez tort de rire, quand vos ancêtres massacraient les prisonniers républicains à Machecoul, quand Joubert, le président du district, avait les poings sciés, est-ce que ce n'étaient pas là des victimes innocentes ? Est-ce que vous n'avez pas du sang sur vous ?
Vous savez bien que la Terreur blanche a fait plus de victimes que l'autre.
… si vous voulez savoir pourquoi, à la suite de cet événement sans importance d'un mauvais drame à la Comédie Française, il y a eu tant d'émotion dans Paris, et pourquoi il y a à l'heure présente tant d'émotion dans la Chambre, je vais vous le dire.
C'est que cette admirable Révolution par qui nous sommes n'est pas finie, c'est qu'elle dure encore, c'est que nous en sommes encore les acteurs, c'est que ce sont toujours les mêmes hommes qui se trouvent aux prises avec les mêmes ennemis."
"Oui, ce que nos aïeux ont voulu, nous le voulons encore.
Aux élections générales de septembre-octobre 1889, le camp républicain s'unit contre la menace boulangiste et la droite. Clemenceau se présente de nouveau à Draguignan. Au premier tour, il obtient 7 500 voix sur 15 400 suffrages exprimés, face au boulangiste Achille Ballière, ex-déporté de Nouvelle-Calédonie, et au radical Louis Martin 3 500 voix. Par discipline républicaine, Martin se désiste et Ballière, bon perdant, se retire, permettant la réélection de Clemenceau le 6 octobre 1889, 9 500 voix sur 10 200 suffrages exprimés, l'abstention ayant augmenté au deuxième tour.
Le 29 janvier 1891, à l'occasion d'une interpellation du gouvernement au sujet de l'interdiction de la pièce de Victorien Sardou, Thermidor, Clemenceau fait son célèbre discours dans lequel il affirme : «la Révolution est un bloc.
Lors de la fusillade de Fourmies du 1er mai 1891, Clemenceau évoque un Quatrième État à propos des ouvriers et réussit à faire voter l'amnistie des manifestants arrêtés. Avec Millerand et Pelletan, il proposera, sans succès, une mesure similaire, à la suite de la grève des mineurs de Carmaux de 1892.

Le scandale de Panama

En 1892, Clemenceau est mis en cause dans l'affaire de Panama.
La première attaque vient de Gaston Calmette qui, le 12 décembre 1892, écrit sous pseudonyme un article dans Le Figaro, dans lequel il monte en épingle une rencontre, la veille de la mort de Jacques de Reinach, avec Clemenceau, Maurice Rouvier et Cornelius Herz. Rouvier avait en fait demandé à Clemenceau d'être son témoin pour cette réunion.
Ensuite, il est accusé par les boulangistes, Maurice Barrès, les antisémites, notamment La Libre Parole, Ernest Judet, propriétaire de l'influent Petit Journal, dont les attaques sont douteuses, du 19 août 1893, d'avoir frayé avec Cornelius Herz, d'origine juive, qui achetait les votes de certains députés et avait naguère investi dans La Justice. On intente un procès contre Clemenceau, de fausses preuves sont produites mais il est blanchi.
Néanmoins, le mal est fait, sa réputation est entachée, la revanche de ses nombreux adversaires est en marche. Le nationaliste Paul Déroulède l'accuse de corruption à la Chambre le 20 décembre 1892 et le provoque publiquement en duel. Le 22 décembre 1892, aucune des six balles tirées par chacun des adversaires ne fait mouche. Les témoins sont Barrès et Léon Dumonteil pour Déroulède, Gaston Thomson et Paul Ménard-Dorian pour Clemenceau.
Le journaliste Édouard Ducret va jusqu'à utiliser un faux pour faire accuser Clemenceau d'intelligence avec l'ennemi, en l'occurrence le Royaume-Uni, avec le relais de Lucien Millevoye. Ce dernier, qui accuse non seulement le député radical mais également Rochefort, est ridiculisé à la Chambre. Ducret et son complice, l'escroc Louis-Alfred Véron alias Norton, sont condamnés pour faux et usage de faux.

La campagne haineuse de 1893

Lors de la campagne électorale pour les législatives d'août-septembre 1893, l’opposition utilise abondamment la rhétorique de l’homme vendu aux puissances étrangères, de l’escroc, du parvenu… Il est soumis à une campagne particulièrement haineuse, dépassant de loin le département du Var. Ses ennemis, de gauche et de droite, forment même une Ligue anti-clemenciste, et Engelfred crée le 5 août un nouveau journal, L'Anti-Clemenciste. La presse, nationale et régionale, n'est pas en reste : le Petit Dracénois de Fortuné Rouvier se retourne contre lui, le Petit Journal, une puissance qui tire à un million d'exemplaires, continue sa campagne contre lui, de même que La Cocarde, Le Figaro, Le Petit Marseillais, La Croix, etc. Le marquis de Morès, fondateur avec Drumont de la Ligue antisémitique, se présente contre lui et l'accuse d'être un « agent de l'Angleterre.
En face, Clemenceau est moralement soutenu par Rochefort, Jaurès ou les mineurs de Carmaux. Le 8 août 1893, dans son discours de Salerne, il dénonce la meute lancée contre lui et demande : Où sont les millions ?
Le 20 août 1893, au premier tour, il obtient 6 634 voix : il est le mieux placé des dix candidats, mais en ballottage ; le 3 septembre, il est battu, n'obtenant que 8 610 voix contre 9 503 à l'avocat Joseph Jourdan, soutenu par une coalition hétéroclite de gauche et de droite

Affaire Dreyfus au Sénat 1893-1909 Clemenceau, l'écriture, question sociale

Cet échec électoral force Clemenceau à se mettre en retrait. Il s'appuie sur ses talents d'écriture ainsi que sur sa notoriété pour faire face à ses difficultés financières ; il a en effet des dettes pour La Justice, où il remplace Pelletan à la rédaction en chef à partir d'octobre 1893. Un nouveau duel - il en a eu 12 au total, considérant ceux-ci comme la marque de l’accomplissement de la liberté individuelle garantie par la République- l'oppose à Paul Deschanel, qui l'a de nouveau impliqué, sans preuves, dans l'affaire de Panama, le 27 juillet 1894. Deschanel est légèrement blessé.
Clemenceau profite de ce répit pour écrire dans La Justice une série d'articles, rassemblés en 1895 dans La Mêlée sociale, avec une préface qui décrit un processus de civilisation rigoureusement inverse à celui prôné par le darwinisme social ; le jeune Maurras, pas encore devenu royaliste, la dit d'une tumultueuse beauté. Il y dénonce les tarifs Méline de 1892 qui protègent les cultivateurs de blé, mais pas, selon lui, les petits propriétaires terriens ni les populations urbaines, assujetties à une hausse des prix. Il ne cesse d'appeler à la réforme sociale, mettant l'accent sur la misère à travers des faits divers ; il reprend, à propos du chômage, la phrase de Marx sur l'armée de réserve du travail. Il critique la répression des grèves, fait l'éloge de Louise Michel, critique l'évolution du christianisme, qui, d' insurrection des pauvres, est devenu un syndicat des riches.
Il s'indigne de l'appel à la foi[précision nécessaire], relayé par Jules Simon ou Zola, s'élève contre la propagande par le fait des anarchistes, rappelant une effroyable histoire de sang, de tortures et de bûchers, auprès desquels la bombe de Vaillant est une plaisanterie d'enfants !. Il compare la psychologie de ce dernier à celle de Robespierre qui voulait amener le règne de la vertu sur terre. Comme Jaurès, il s'oppose aussi à la peine de mort, décrivant par le détail l'exécution d'Émile Henry :
" Je sens en moi l'inexprimable dégoût de cette tuerie administrative, faite sans conviction par des fonctionnaires corrects. … Le forfait d'Henry est d'un sauvage. L'acte de la société m'apparaît comme une basse vengeance. "
Il s'oppose aux lois scélérates 1894, prenant la défense de l'ouvrage censuré de l'anarchiste Jean Grave, La Société mourante et l'anarchie.
Il s'attaque au libéralisme économique défendu par Léon Say, Yves Guyot et Leroy-Beaulieu :
" Qu'est-ce que votre laissez-faire, votre loi de l'offre et de la demande, sinon l'expression pure et simple de la force ? Le droit prime la force : voilà le principe de la civilisation. Dès que nous avons constaté votre loi, à l'œuvre contre sa barbarie!"
Contre l'individualisme libéral et la non-intervention de l'État d'un côté, contre le collectivisme de l'autre, il préconise les réformes sociales et l'impôt sur le revenu et sur la propriété67. Il ébauche néanmoins une possibilité d'entente avec Jaurès, affirmant que son programme n'est, en fait, que la reprise du programme radical-socialiste défendu par La Justice depuis quatorze ans.
Par ailleurs, d'août 1894 à 1902, il écrit dans La Dépêche de Toulouse, contrôlée par Maurice Sarraut, d'abord des chroniques littéraires, puis des articles politiques. Il collabore également au Journal de 1895 à 1897, à L'Écho de Paris 1897, devient éditorialiste à L’Aurore et à l'hebdomadaire Le Bloc. Il publie des recueils d'articles : Le Grand Pan 1896, dans lequel il fait l'apologie du paganisme précédant le judéo-christianisme ; Au fil des jours 1900 et Les Embuscades de la vie 1903. Il s'essaie même au roman, avec Les Plus Forts 1898. Ses essais littéraires, qui ne remportent guère de succès populaire, sont raillés par Barrès, Maurras étant plus indulgent. En revanche, Léon Blum est élogieux pour Le Grand Pan ainsi que pour son roman68. Il écrit aussi une pièce de théâtre, Le Voile du Bonheur, jouée au théâtre Récamier en 1901, mais sans grand succès.

L'affaire Dreyfus

C'est l’affaire Dreyfus qui permet à Clemenceau de revenir au premier plan. Entré comme rédacteur à L’Aurore en octobre 189769, il n’est au départ pas convaincu de l’innocence du capitaine Dreyfus, condamné au bagne en 1894. Approché par Mathieu Dreyfus, par Lucien Herr, le bibliothécaire de l'École normale supérieure, et par son ami Arthur Ranc, il va progressivement entrer dans l'Affaire.
Ranc l'envoie chez son vieil ami, dont il s'était éloigné, Auguste Scheurer-Kestner, vice-président du Sénat, qui a eu connaissance par Me Leblois du témoignage du lieutenant-colonel Picquart innocentant Dreyfus et accusant Esterhazy. Sans se prononcer sur l'innocence de Dreyfus, Clemenceau s'indigne contre le refus de transmettre les pièces du dossier à l'avocat de la défense, et va réclamer la révision du procès sur cette base. Loin de considérer que cela déshonore l'armée, il s'étonne au contraire que l'armée puisse ne pas être soumise à la justice ; il commence aussi à prendre conscience du rôle de l'antisémitisme.
C’est l’acquittement d'Esterházy, le 11 janvier 1898, qui déclenche la crise. Le 13 janvier, Zola publie « J'accuse…!, dont le titre a été trouvé par Clemenceau. Il lui dédicacera ainsi l'Iniquité : À Zola, pour l'avoir suivi dans la bataille ». La même année, il publie un ouvrage sur les mœurs de la communauté juive de Galicie, Au pied du Sinaï, qui, malgré les poncifs nez crochus,maîtres du monde, s'achève sur une note conciliante.
Il plaide ensuite dans le procès intenté à Zola et au journal, aux côtés de son frère, avocat. Le 23 janvier 1898, il lance le néologisme d'intellectuel :
" N'est-ce pas un signe, tous ces intellectuels, venus de tous les coins de l'horizon, qui se groupent sur une idée et s'y tiennent inébranlables ? "
Provoqué par Édouard Drumont, il défie celui-ci en duel le 26 février 1898, aucune des trois balles tirée par chacun ne touchant l'adversaire. Absorbé par l'Affaire, il décline la proposition qui lui est faite de se présenter dans le Var pour les législatives de mai 1898.
Depuis décembre 1897, il publie sans relâche : près de 700 articles dreyfusards publiés entre 1899 et 1903 sont réunis en sept volumes, L'Iniquité, La Honte, etc., articles qui seront des succès populaires, permettant au Tigre de rembourser la plupart de ses dettes. Malgré la réticence de son directeur Arthur Huc, il écrit également dans La Dépêche. C'est après la lecture publique des preuves alléguées contre Dreyfus, par le ministre de la Guerre Godefroy Cavaignac, le 7 juillet 1898, qu'il acquiert l'intime conviction de l'innocence du capitaine, sans toutefois changer sa ligne de défense.
Cloué au lit par une bronchite contractée à la station thermale de Carlsbad, il ne peut assister au procès de révision en août-septembre 1899 à Rennes, ouvert peu après la formation du gouvernement de Défense républicaine de Waldeck-Rousseau. Il recommande alors d'attaquer frontalement les militaires, ce qui n'est pas suivi par Me Demange. En septembre 1899, alors que Dreyfus a été de nouveau condamné pour trahison, mais avec circonstances atténuantes - jugement dont Clemenceau moque l'incohérence -, Waldeck-Rousseau envoie le ministre Millerand proposer à l'équipe dreyfusarde d'accepter de demander une grâce présidentielle. Contrairement à Jaurès, Clemenceau y est opposé, préférant la justice et la reconnaissance de droit de l'innocence de Dreyfus plutôt qu'un acte de clémence : dans une lettre à Me Labori, il avait souligné : Dreyfus n'est ici qu'un protagoniste symbolique. Il faut sauver tout ce que représente l'innocence aux abois.Cependant, interrogé par Mathieu Dreyfus, qui refuse de demander la grâce sans l'unanimité de l'équipe dreyfusarde, il lui laisse le champ libre. Le président Loubet signe le décret de grâce le 19 septembre 1899. Cinq jours plus tard, Clemenceau réitère ses convictions :

" Oh! je n'ignore pas qu'on va poursuivre la réhabilitation de Dreyfus devant la Cour de cassation. … Mais au-dessus de Dreyfus - je l'ai dit dès le premier jour - il y a la France, dans l'intérêt de qui nous avons d'abord poursuivi la réparation du crime judiciaire. La France à qui les condamnations de 1894 et de 1899 ont fait plus de mal qu'à Dreyfus lui-même."
Dreyfus est réhabilité le 12 juillet 1906 par un pourvoi en cassation ; ainsi, comme le préconisait l'avocat à la défense Maître Henri Mornard, le conseil de guerre de Rennes a été annulé sans renvoi : attendu en dernière analyse que de l'accusation portée contre Dreyfus rien ne reste debout ; il est décoré le même jour par le général Gillain.
Clemenceau s'oppose à la loi d'amnistie du 14 décembre 1900, qui concerne aussi bien le général Mercier que Picquart et Zola.
En décembre 1899, Clemenceau quitte L’Aurore, indigné par un article d'Urbain Gohier qui se vantait d'avoir à lui seul défendu Dreyfus. Il crée alors un nouvel hebdomadaire : Le Bloc, qu'il rédige quasiment en entier. Il s'attaque à nouveau au colonialisme, s'intéressant en particulier au cas de l'Indochine, et critiquant au passage les missionnaires. Ce journal paraît jusqu’au 15 mars 1902.

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Liens
http://youtu.be/pENOrVi7ByM Secrets d'Histoire

http://youtu.be/u-K99_0J5h8 Clémenceau contre la paix 4
http://youtu.be/JU7QuvHzU2E Clémenceau visite Oostkerke et Forthem
http://youtu.be/nNrm8q_0OlE Clémenceau courte biographie
http://youtu.be/3E3ewmUJUDc Clémenceau 3
http://youtu.be/zMWSAr59DZQ Clémenceau briseur de grève
http://youtu.be/_TcVHoq7Iv4 Georges Clémenceau aux états-unis


Posté le : 16/11/2014 17:51

Edité par Loriane sur 17-11-2014 11:36:11
Edité par Loriane sur 19-11-2014 17:49:50
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Georges Clémenceau 2
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Le sénateur : anticléricalisme et anticolonialisme 1902-1906

Après dix ans d'absence, son retour à la vie parlementaire s'appuie sur ses nombreuses amitiés, mais aussi sur les résultats de ses campagnes d'agitation en faveur d'Alfred Dreyfus. Lorsqu'une place de sénateur inamovible se libère, ce qui provoque une élection partielle dans le Var, nombreux sont ceux qui l’incitent à poser sa candidature et se déclarent prêts à la soutenir. Réticent au départ, Clemenceau se laisse finalement convaincre par son éditeur, Stock, et surtout la délégation varoise menée par le maire de Draguignan. Une autre raison est que le général Mercier, ennemi acharné lors de l'Affaire Dreyfus, s'est fait élire sénateur. La décision du Tigre est saluée par Jaurès.
Bien que Clemenceau ait affirmé antérieurement son radicalisme et son socialisme, il reste à l'écart du nouveau Parti radical-socialiste, créé en 1901, ce qui ne l'empêche pas d'être soutenu dans le Var par les radicaux d'une part, des républicains indépendants d'autre part.
Le 6 avril 1902, le radical hostile au bicamérisme, qui dénonçait le Sénat comme une institution antirépublicaine vingt ans plus tôt est triomphalement élu avec 344 voix sur 474 votants, contre 122 pour son rival, un conseiller général radical-socialiste. Les législatives d'avril-mai 1902 voient la victoire du Bloc des gauches et la formation du cabinet Emile Combes.
Après la réaction cléricale et militariste provoquée par l'Affaire Dreyfus, l'ordre du jour républicain n'est autre que la séparation des Églises et de l'État revendiquée par le Tigre depuis des décennies. Cependant, dès la rentrée, son discours du 30 octobre 1902 étonne l'assemblée. Constituant selon l'historien Michel Winock une des bases de la philosophie républicaine en matière de laïcité et d'éducation, ce discours critique férocement la « politique romaine et le gouvernement romain, distingué de la religion catholique romaine, ces deux composantes formant l'Église romaine. Alors que la loi 1901 sur les associations visait uniquement les congrégations religieuses non autorisées, il pourfend la théocratie catholique et réclame la suppression pure et simple au nom de la liberté des congrégations religieuses, législativement » supprimées depuis 1790 :
Retirés du monde, les moines sont partout répandus dans le monde. La congrégation plonge ses racines dans tous les compartiments de l'État, dans toutes les familles. Et de toute sa puissance, elle enserre pour notre malheur cette société moderne, ce progrès, ce libéralisme que le Syllabus a condamné.
Il défend cependant la liberté d'enseignement, contestant, à l'encontre de Ferdinand Buisson qu'il cite et de la gauche républicaine, l'intérêt pour l'État du monopole de l'éducation :
l'État, au lieu de s'immobiliser dans le monopole, recevra de ses concurrents l'impulsion nécessaire à son propre développement d'éducateur.
Le Temps s'alarme de ce regain de jacobinisme tandis que Péguy, pas encore converti, publie ce discours dans les Cahiers de la quinzaine, avec le titre : Discours pour la liberté.
Il participe finalement à la chute du cabinet Combes, à la fois en raison de l'affaire des fiches et de la non-dénonciation du Concordat qui aurait dû, selon lui, être l'aboutissement de la crise provoquée par le voyage du président Loubet à Rome.
En avril 1905, lors des débats sur la loi de séparation des Églises et de l'État, Clemenceau passe à nouveau à l'attaque, cette fois-ci contre Aristide Briand et Jean Jaurès ; il s'oppose à leur frilosité à propos de l'article 4, qui concerne la dévolution de la propriété ecclésiastique aux associations cultuelles. Alors que le catholique Albert de Mun se félicite de ce grand coup donné à la loi, Clemenceau traite Briand de socialiste papalin et accuse la nouvelle formulation de l'article de mettre la société cultuelle dans les mains de l'évêque, dans les mains du pape ; voulant rompre le Concordat, la Chambre des députés est demeurée dans l'esprit du Concordat … au lieu de comprendre qu'elle aurait pour premier devoir d'assurer la liberté de tous les fidèles, sans exception. Malgré cela, il vote la loi. Le 30 septembre 1906, la séparation de l'Église et de l'État constitue le deuxième thème de son discours à la Roche-sur-Yon.
Pas plus que sur l'anticléricalisme, revigoré par l'Affaire, Clemenceau ne cède quoi que ce soit sur le colonialisme. Dans L'Aurore du 13 juin 1904, il critique la domination française sur le Maroc, et se moque, le 2 avril 1905, au moment de la crise de Tanger, de la politique de l'inamovible ministre des Affaires étrangères, Théophile Delcassé :
" Les politiques républicains, trouvant plus aisé de remporter des victoires sur les populations désarmées de l'Afrique et de l'Asie que de s'adonner à l'immense labeur de la réformation française, envoyaient nos armées à des gloires lointaines, pour effacer Metz et Sedan, trop prochains. Une effroyable dépense d'hommes et d'argent, chez une nation saignée à blanc, où la natalité baissait. … Partis de France dans l'illusion qu'à la condition de tourner le dos aux Vosges, le monde s'ouvrait à nous, nous rencontrons l'homme de l'autre côté des Vosges devant nous à Tanger."
La volonté de protéger le pays n'est jamais loin : Être ou ne pas être, voilà le problème, qui nous est posé pour la première fois depuis la guerre de Cent Ans, par une implacable volonté de suprématie.L'Aurore, 18 juin 1905. Il s'éloigne de Jaurès, entré aux côtés de Jules Guesde à la SFIO, et critique l'internationalisme de Gustave Hervé dans Pour la patrie 12 mai 1905 :
ils comprendraient peut-être que la nature humaine est à la racine de tous les faits sociaux, bons ou mauvais, et que la suppression de la patrie ne détruirait point le fondement universel de l'égoïsme humain, ne changeant que la forme des manifestations de violence inhérentes à l'homme, seul ou associé.

Clemenceau au pouvoir Le premier flic de France 1906

En mars 1906, après la victoire des radicaux aux législatives, Ferdinand Sarrien est appelé à former le cabinet. Clemenceau ironise : Ça, rien ? Tout un programme!. Mais Briand, qui doit encore négocier les inventaires de l'Église, préfère l'avoir avec lui plutôt que contre lui, et subordonne sa participation à celle de Clemenceau89 : ce dernier obtient ainsi l'Intérieur, alors que la France connaît une vague de grèves importantes, parfois quasi-insurrectionnelles, la CGT a entériné son orientation syndicaliste révolutionnaire avec la Charte d'Amiens, tandis que la SFIO est sur une position révolutionnaire et anti-réformiste bourgeoise, malgré les hésitations de Jaurès. Je suis le premier des flics, dit-il alors.
Place Beauvau, Clemenceau calme le jeu sur la question des inventaires : le 20 mars 1906, alors qu'il ne reste plus à inventorier que 5 000 sanctuaires sur 68 000, il déclare à la Chambre : Nous trouvons que la question de savoir si l'on comptera ou ne comptera pas des chandeliers dans une église ne vaut pas une vie humaine.
Confronté à la grève qui fait suite à la catastrophe de Courrières, plus de 1 000 morts, il refuse d'envoyer, comme c'est l'usage, la troupe de façon préventive, c'est-à-dire dès que la grève se déclare, mais se rend à Lens dès le 17 mars, et affirme aux grévistes que leur droit à faire grève sera respecté, sans envoi de la troupe, tant qu'aucune personne ni propriété ne sera menacée. Les grévistes s'échauffant, il se résout à envoyer une troupe de 20 000 soldats le 20 mars ; le Temps, 22 mars est rassuré89. Cette décision marque le début du divorce entre Clemenceau et la gauche socialiste, révolutionnaire et syndicaliste.
La grève fait tache d'huile, atteignant Paris : L'Écho de Paris titre Vers la révolution. À l'approche du 1er mai 1906, Clemenceau avertit Victor Griffuelhes, secrétaire général de la CGT, qu'il sera tenu responsable pour tout débordement, et fait arrêter préventivement plusieurs militants d'extrême-droite, laissant entendre la préparation d'un complot. Il fait aussi venir 45 000 soldats à Paris : la fête du Travail, sous haute surveillance policière, se déroule dans le respect de l'ordre et de la propriété. En juin 1906, une joute l'oppose à Jaurès à la Chambre pendant six jours.
Le 18 octobre 1906, Sarrien, malade, recommande Clemenceau au président Fallières pour lui succéder.

Le gouvernement Clemenceau 1906-1909

Il accède à la présidence du Conseil le 25 octobre 1906, à 65 ans, et restera au pouvoir presqu'aussi longtemps que Waldeck-Rousseau. Son cabinet comprend le socialiste indépendant René Viviani, à la tête d'un Ministère du Travail inédit, le général Picquart, qui avait dévoilé la supercherie accusant Dreyfus, comme ministre de la Guerre, et son ami journaliste et diplomate Stephen Pichon à la tête du quai d'Orsay. Conformément à l'habitude de cumuler la présidence du Conseil avec un portefeuille ministériel, Clemenceau demeure à l'Intérieur. Enfin, il maintient Briand à l'Instruction publique et aux Cultes.
Son programme ministériel, dévoilé le 5 novembre 1906 à la Chambre, vise à maintenir la paix avec l'Allemagne, tout en réformant l'armée afin de préparer la France à un éventuel conflit. Sur le plan social, il déclare vouloir accomplir la réalisation de la loi sur les retraites ouvrières, la loi sur les 10 heures, améliorer la loi Waldeck-Rousseau sur les syndicats, racheter la Compagnie des chemins de fer de l'Ouest en quasi-faillite, intervenir dans le contrôle de la sécurité dans les mines avec possibilité de rachat des compagnies houillères, préparer un projet de loi sur l'impôt sur le revenu… 17 chantiers sont ainsi lancés.

La séparation de l’Église et de l’État

Le sujet prioritaire, c'est toutefois l'application de la loi de séparation des Églises et de l'État, fermement condamnée par Pie X dans l'encyclique Vehementer nos. Cela soulève de nouveaux débats, le Vatican faisant tout pour empêcher la formation des associations cultuelles, auxquelles sont censées être dévolues les biens de l'Église. Attaqué par Maurice Allard, Briand rétorque le 9 novembre 1906 en rappelant que la loi de séparation est une loi d'apaisement, que l'État laïc n'est pas antireligieux mais areligieux. Si la loi n'est pas appliquée d'ici décembre 1907, Briand déclare qu'il s'appuiera sur la loi de 1881 sur les réunions publiques afin de maintenir la possibilité d'un exercice légal des cultes. Par circulaire du 1er décembre 1906, il précise qu'une déclaration annuelle doit suffire à cet exercice. Le 11 décembre, le Conseil des ministres rappelle qu'en cas de non-déclaration annuelle, les infractions seront constatées : l’intransigeance pontificale menace de créer un délit de messe. Mgr Carlo Montagnini, à la tête de la Nonciature apostolique de la rue de l’Élysée, est expulsé sous l'accusation d’inciter au conflit.
Le 21 décembre 1906, un nouveau débat, durant lequel Briand accuse le Vatican de préconiser l’intransigeance afin de réveiller la foi endormie dans l’indifférence , aboutit à la loi du 2 janvier 1907 qui vise à rendre impossible la sortie de la légalité des catholiques quoi que fasse Rome. Le pape la dénonce à nouveau, le gouvernement parle d'ultimatum… et finalement, par la loi du 28 mars 1907, autorise les réunions publiques, sans distinction d'objet, et sans déclaration préalable. La position d'apaisement du gouvernement est confirmée par la loi du 13 avril 1908, qui considère les églises comme des propriétés communales et prévoit des mutualités ecclésiastiques,pour les retraites, etc.. Ces mesures ne seront cependant acceptées par le Vatican qu'après la Première Guerre mondiale avec le compromis, élaboré par Pie XI et le gouvernement français, des associations diocésaines.

Clemenceau, briseur de grèves

L'article a aussi été publié dans la Neue Freie Presse. Il était nécessaire que Clemenceau devînt chef du gouvernement puisqu'il était chef du parti radical, qui forme la majorité de la Chambre. … J'ai souhaité son avènement aux affaires …Je suis plus socialiste que jamais. … Ce sera l'éternel honneur de Clemenceau d'avoir secoué l'égoïsme bourgeois des opportunistes. … Et quand Jules Ferry, abandonnant jusqu'aux apparences de l'anticléricalisme, s'allia avec le clergé dans des entreprises coloniales, fructueuses seulement pour quelques capitalistes privilégiés …, Clemenceau, au risque de perdre sa popularité, s'éleva contre un système de conquêtes lointaines … Si l'on regarde aux dangers que courra bientôt le ministère … Les dangers qui viennent de lui-même ne sont pas les moindres. D'esprit, il est souple et divers ; de caractère, il est vif et cassant. Je ne le fâcherai pas en disant qu'il y a des choses qu'il préfère au pouvoir. Il a le sens de l'action … il est philosophe … ministre de l'Intérieur, il était déjà tout le ministère avant d'en être le chef. Alors il a opposé aux socialistes les doctrines d'un agnosticisme social sans doute grave et mélancolique Bien qu'il n'ait jamais varié dans ses doctrines … et qu'il soit, aujourd'hui comme en 1870, républicain libéral et patriote, il surprend par l'imprévu de ses idées. …]Libéral de naissance … il est, de caractère et d'esprit, homme d'autorité. Il est révolutionnaire et il exècre la démagogie … Le journal Le Temps chaque jour vante sa sagesse, le loue de sa modération … le compromet ainsi chaque jour, le rend suspect aux yeux des républicains radicaux. Le côté faible de Clemenceau, c'est son indépendance … Il est libéral, mais il ne l'est pas comme eux. … Il faudra bien que Clemenceau, bon gré mal gré, réforme le bloc des gauches, sans quoi, pris entre l'extrême gauche et la droite, il est perdu.

Une journée sanglante, Le Matin du 31 juillet 1908.

Président du Conseil le plus à gauche qu'ait connu jusqu'alors la IIIe République, mais « premier flic de France, Clemenceau est confronté à d'importantes grèves 1906 bat des records. Il s'illustre par sa férocité, à la fois contre les mouvements sociaux et contre le personnel politique qu'il estime peu quand il ne l'accable d'un profond mépris - ainsi quand il décide de retirer le portefeuille des Finances au vieux président Ribot : Il est voûté, mais ce n'est pas un abri sûr.
C'est d'abord, en mars 1907, une grève des électriciens à Paris. Le génie militaire rétablit le courant. En avril, une grève de l'alimentation, lancée par la CGT, touche Paris. La fonction publique réclame le droit de grève,la Poste le 12 mars 1909, inimaginable pour Clemenceau. Des dizaines de postiers, ainsi que Marius Nègre, fondateur du Syndicat national des instituteurs, et le syndicaliste révolutionnaire Émile Janvion sont ainsi révoqués. La Ligue des droits de l'homme apporte son soutien aux révoqués.
Au printemps 1907, la révolte des vignerons du Languedoc s'étend à l'ensemble de la population de la région et prend une tournure insurrectionnelle. Le 10 juin 1907, le maire socialiste de Narbonne, Ernest Ferroul, démissionne, avec l'appui des maires locaux. Les viticulteurs réclament des aides équivalentes à celles accordées aux betteraviers du nord. Cinq ou six manifestants sont tués le 20 juin97, la préfecture de Perpignan est incendiée, et le lendemain, le 17e régiment se mutine.
Le 21 juin, la Chambre confirme son appui à Clemenceau. Le 23, il reçoit le leader gréviste et non-violent, Marcelin Albert. Et, comme celui-ci, venu en train, lui dit candidement n'avoir pas de quoi payer son billet de retour, il lui fait remettre 100 francs, après avoir placé un journaliste dans la pièce voisine de son bureau. La Presse, faisant ensuite passer Albert comme "acheté" par le ministre, le discrédite auprès des vignerons... La grève s'essouffle, et le 29 juin 1907, la Chambre vote la loi revendiquée, qui fixe une surtaxe sur les sucres utilisés pour la chaptalisation.

En juillet 1907, deux grévistes sont tués à Raon-l'Étape.

L'année suivante, il est confronté à la grève de Draveil-Villeneuve-Saint-Georges : deux grévistes tués le 28 mai 1908. Le socialiste Édouard Vaillant accuse la politique du gouvernement d'être responsable du meurtre. Clemenceau rétorque : la Chambre …dira si elle veut faire avec nous l'ordre légal pour les réformes contre la révolution. Hormis les socialistes, la majorité le soutient. Le conflit redémarre le 2 juin 1908 à Vigneux, où deux grévistes sont tués et plusieurs blessés : il s'agit de la violence policière la plus grave depuis le début de la IIIe République, dans la mesure où les gendarmes ont tiré à bout portant dans une salle, sur des ouvriers désarmés et accompagnés de femmes et d'enfants. Le 30 juillet, toujours à Vigneux, quatre grévistes sont tués et il y a plusieurs blessés du côté des forces de l'ordre.
Clemenceau décide alors des arrestations massives dans les rangs de la CGT, Griffuelhes, Pouget, etc., malgré l'attitude conciliante du secrétaire général. Des rumeurs insistantes feront état d'un agent provocateur qui aurait été utilisé par Clemenceau pour dissoudre la CGT anarcho-syndicaliste qu'il abhorrait. Bien que l'existence d'un tel agent soit avérée, elle sera l'objet d'une interpellation de Caillaux en 1911, l'enquête historique de Jacques Julliard, Clemenceau, briseur de grèves, relativise son importance dans les événements : comme le disait Péricat, le secrétaire de la Fédération du bâtiment, surestimer son rôle serait faire bien peu de cas de la Fédération du bâtiment, de son Comité fédéral et de ses militants.
En fin de compte, Clemenceau, tout comme Viviani, préfèrerait plutôt favoriser une tendance moins dure à la CGT, poussant à ce que celle-ci abandonne le vote par membres un membre = une voix au profit d'un vote par syndicat, une fédération = une voix.
Il est également confronté à des grèves d'employés voulant faire appliquer la loi sur le repos hebdomadaire votée sous Sarrien, notamment dans le secteur de la boulangerie.
Il devient rapidement ami avec le préfet de police Lépine — alors qu'ils ne s'aimaient guère au départ — et conduit d'importantes réformes de la police. Alors que la presse s'effraie des Apaches, il soutient la création de la Police scientifique par Alphonse Bertillon, un des experts de l'Affaire Dreyfus, et des Brigades du Tigre officiellement : brigades régionales mobiles par Célestin Hennion, nommé à la tête de la nouvelle Sûreté générale104. Hennion met en place un fichier des récidivistes et crée un service d'archives, tandis que les Brigades régionales fichent les nomades. Le projet de loi du 25 novembre 1908 relatif à la réglementation de la circulation des nomades aboutira à la loi du 16 juillet 1912 sur le port du carnet anthropométrique d’identité : recensant les empreintes digitales ; ce carnet, qui ne s'applique qu'aux Tsiganes, préfigure la carte d'identité105 et le livret de circulation.
Le cabinet Clemenceau ne se résume cependant pas à la répression. L'abolition de la peine de mort est mise à l'ordre du jour de la Chambre le 3 juillet 1908, à la suite d'une intervention de Joseph Reinach. Le gouvernement est pour, ainsi que Jaurès, Briand et l'abbé Lemire ; mais la commission parlementaire est contre et son rapport est approuvé le 8 décembre 1908 par une majorité rassemblant le centre et la droite catholique. Le projet de loi sur l'impôt sur le revenu, présenté en février 1907 par le ministre des Finances Joseph Caillaux, est bloqué par le Sénat. En revanche, la loi Ribot sur les Habitation à bon marché HBM est votée en avril 1908, puis, en juillet 1909, la loi sur le bien de famille insaisissable, qui vise à protéger les paysans. Zola est transféré au Panthéon.
La posture de premier flic de France l'amène à se brouiller durablement avec Jaurès, qui n'écartait pas, au début de son cabinet, une possibilité d'alliance avec le leader radical. La SFIO et la CGT ne sont clairement pas sur la même ligne que le radical-socialisme de Clemenceau. D'où cet échange savoureux au Parlement :
" Monsieur Jaurès, vous promettez tout à l'ouvrier, mais vous n'êtes tout de même pas le bon Dieu !
- Et vous, vous n'êtes pas le Diable !
- Qu'en savez-vous ? "

Politique étrangère et coloniale

En politique extérieure, Clemenceau et Pichon se soumettent aux résultats de la Conférence d'Algésiras et probablement aussi à l'influence du parti colonial. En effet, lorsqu'en mars 1907 un médecin est assassiné au Maroc, il ordonne un débarquement et autorise le général Lyautey à occuper Oujda. Le 30 juillet 1907, plusieurs Français sont tués lors d'une émeute consécutive à la décision de faire passer un chemin de fer à travers un cimetière musulman. Cela finit par un bombardement de Casablanca en août puis par l'occupation de Settat. Ces incidents, comme ils sont qualifiés en France… suscitent aussi quelques remous avec l'Allemagne. En 1908, une querelle franco-allemande au sujet de la désertion de soldats de la Légion étrangère finit par un arbitrage de la Cour de La Haye, qui donne raison à la France le 22 mai 1909. Le 9 février 1909, par un accord franco-allemand, Paris s'engage à accorder l'égalité de traitement aux ressortissants allemands au Maroc, tandis que Berlin reconnait la légitimité de la France à s'octroyer le maintien de l'ordre dans le pays.
En revanche, un décret du 24 septembre 1908 propose une timide réforme en Algérie, avec l'élection des conseillers généraux indigènes, jusque là nommés par le gouverneur. En octobre 1908, une délégation des Jeunes Algériens vient réclamer la reconnaissance de l'ensemble des droits civils et politiques pour les Algériens évolués ». Clemenceau se heurte à ce sujet aux Européens d'Algérie ; il se rattrapera avec la loi du 4 février 1919, louée par Messali Hadj.

Delcassé fait tomber Clemenceau

Clemenceau est renversé au bout de presque trois ans, alors que la session parlementaire touche à sa fin et qu'un grand nombre de députés de la majorité sont rentrés dans leurs circonscriptions. Le 20 juillet 1909, Clemenceau se refuse à répondre à des questions d'ordre technique sur la Marine posées par son rival Delcassé, qui a fait tomber le ministre Gaston Thomson l'année précédente ; il fait voter un ordre du jour. Celui-ci est repoussé par 212 voix contre 176, avec 176 absents dont 76 radicaux-socialistes et 23 républicains de gauche et Clemenceau démissionne. En effet, furieux, il a révélé à la Chambre que les ministères de la Guerre et de la Marine considéraient, lors de la crise de Tanger, que la France n'était pas prête à la guerre, ce qui équivalait à révéler des informations confidentielles presque de l'ordre du secret défense. Dans sa biographie, Jean-Baptiste Duroselle écrit : la chute du gouvernement Clemenceau présenta un caractère accidentel et fut liée à une incontestable maladresse tactique de sa part. Le 21 juillet 1909, L'Humanité titre : La fin d'une dictature .

Le journalisme et l'Amérique latine

Le docteur Domingo Cabrel, qui a installé une clinique psychiatrique à ciel ouvert, dans la localité d'Open Door, Buenos Aires, visitée et louée par Clemenceau. Cabred fut l'un des premiers à plaider pour l'irresponsabilité pénale en matière psychiatrique lors du Congrès national d'anthropologie criminelle de Genève de 1898.
Les années 1909-1912 constituent dans sa carrière une période d'accalmie. Le 10 avril 1910 paraît le premier numéro du Journal du Var dont il est le créateur. Il se détache peu à peu de cette publication pendant les deux années qui suivent.
Le 30 juin 1910, il embarque sur le Regina Elina pour effectuer en Amérique latine Argentine, Uruguay, Brésil une tournée de conférences destinées à renflouer son portefeuille ; il y fait l'apologie du régime parlementaire. L'Illustration, ainsi que le New York Times, rend compte de la tournée et publie ses Notes de voyage. En Argentine, qui fête un siècle d'indépendance et s'apprête à voter la loi Sáenz Peña établissant le scrutin universel secret, le Tigre rencontre Villanueva, président du Sénat argentin, et fait l'éloge des indigènes locaux, du moins des survivants…. Il y assiste avec intérêt à une conférence sur la justice social du criminologue Enrico Ferri. Il fait l'éloge des systèmes scolaires, il remarque que la séparation entre l'Église et l'État existe presque entièrement de fait et pénitentiaire ainsi que des hospices ; il les juge bien meilleurs que leurs équivalents français, tout en soulignant certaines limites matérielles de l'Instruction publique. De même, il est étonné par la modernité du système de santé ; il critique l'enfermement psychiatrique, tel qu'il l'a connu à l'asile de Sainte-Anne, en comparaison avec le traitement en extérieur, accompagné d'essais de réinsertion, pratiqué par le docteur Cabred.
Revenu en Europe à bord du Principe Umberto, il doit passer devant une commission d'enquête parlementaire sur l'affaire Rochette une sorte de chaîne de Ponzi qui avait suscité de nouvelles piques anti-parlementaires de Barrès, mais est blanchi de tout soupçon, ainsi que le préfet Lépine.
En 1912, il subit aussi une opération risquée de la prostate, dont il sort en meilleure forme. Après la crise d'Agadir, il vote, avec une quarantaine d'autres sénateurs, contre la ratification de la convention franco-allemande : nous voulons la paix … Mais … si on nous impose la guerre, on nous trouvera. Clemenceau, sans être devenu revanchard, est désormais convaincu de la réalité de la Weltpolitik allemande.
À la suite de l'élection présidentielle de janvier 1913, il se brouille de nouveau avec Raymond Poincaré, président du Conseil depuis 1912, qui ne s'étant pas retiré devant le candidat choisi par le camp républicain, Jules Pams, a été élu en s'appuyant sur la droite.
En mars 1913, il fait tomber le cabinet Briand en tant que président de la Commission sénatoriale chargée d'examiner le projet de loi, complexe, sur le scrutin proportionnel, destiné à remplacer le scrutin d'arrondissement, voté par la Chambre le 10 juillet 1912. Clemenceau, bien que critique à l'égard de ce dernier, considère celui-là comme propice au césarisme et s'oppose au changement. Le Sénat le suit 161 contre 128 et Briand démissionne : c'est le second cabinet de la IIIe République, depuis celui de Léon Bourgeois 1896, à être renversé par le Sénat.

L'Homme, libre ou enchaîné ? La guerre Première Guerre mondiale.

Le 6 mai 1913 paraît le premier numéro de L’Homme libre, journal édité à Paris. Il y publie quotidiennement son éditorial, et ne cesse d'avertir la France du danger que constitue l'Allemagne, Pour la défense nationale, 21 mai 1913 ; Vouloir ou mourir, 24 mai ; Ni défendus ni gouvernés, 15 juillet, etc.. Il défend avec ardeur la loi des trois ans, qui accroît la durée du service militaire, et qui est votée le 19 juillet 1913 avec l'appui de la droite contre les deux-tiers des députés radicaux-socialistes.
Lorsque la Première Guerre mondiale éclate en juillet 1914, Clemenceau défend dans son journal l'Union sacrée et la prééminence des civils sur l'état-major. Déterminé à se battre, il est loin de l'optique de la fleur au fusil : La parole est au canon … Et maintenant, aux armes ! Tous. J'en ai vu pleurer, qui ne seront pas des premières rencontres. Le tour viendra de tous.… Mourir n'est rien. Il faut vaincre.L'Homme libre, 5 août 1914. Le 26 août 1914, il refuse la proposition de Briand d'entrer dans le cabinet Viviani : il ne veut rien d'autre que la présidence du Conseil !
Il va jusqu'à reprocher au ministre Malvy de n'avoir pas arrêté les militants fichés au carnet B, alors que la quasi-totalité de la gauche socialiste s'est ralliée à l'Union sacrée. Après qu'il a dénoncé les insuffisances du service sanitaire aux armées, qui fait voyager les blessés dans les mêmes wagons que des chevaux atteints du tétanos, son journal est suspendu par Malvy du 29 septembre au 7 octobre 1914, en application de la loi du 4 août qui réprime les indiscrétions de la presse en temps de guerre. Le journal reparaît le 30 septembre sous le titre L'Homme enchaîné ; immédiatement saisi, il reparaîtra sous ce nouveau nom le 8 octobre à Paris. Son quotidien sera à nouveau suspendu en août 1915. Clemenceau enverra alors les articles aux parlementaires.
Pendant les années qui suivent, Clemenceau s’emploie à critiquer l’inefficacité du gouvernement, l'insuffisance des informations qu’il transmet, le défaitisme, l'antimilitarisme et le pacifisme, et défend sans cesse le patriotisme et l'Union sacrée face aux Allemands. Siégeant à la Commission des Affaires étrangères du Sénat et à la Commission de l'Armée, il en devient rapidement président, distribuant rapports et blâmes au ministère, effectuant de multiples visites au front en sa qualité de président de la Commission de l'Armée. Il affirme la légitimité du contrôle du Parlement sur les actes du gouvernement et la conduite de la guerre : Il n'est bon pour personne de n'être pas contrôlé, critiqué ; cela n'est que trop vrai, même et surtout du haut commandement militaire.
En juillet 1915, son secrétaire Léon Martin ayant été envoyé au front, il est remplacé par le poète Jean Martet.
Il siège au sein des comités secrets du Sénat réunis à partir de juin 1916, alors que la bataille de Verdun fait rage. Trois jours après la première réunion du comité secret, il fait partie avec son ami Stephen Pichon des 16 sénateurs qui refusent de voter la confiance au gouvernement Briand. Au lendemain d'une nouvelle réunion, il présente au Sénat, le 24 décembre 1916, un ordre du jour refusant la confiance à Briand, mais celle-ci est votée 194 voix contre 60.
Malgré son patriotisme, Clemenceau reste attaqué par certains royalistes. Ainsi, le 30 août 1916, Léon Daudet, fils de l'écrivain Alphonse, lui adresse cette lettre ouverte : Oh ! Comme je vous connais ! Votre élément, c'est le désastre national à condition de pouvoir y faire des mots. Vous appartenez à la génération absurde et aveugle qui, en 1870-71, guettait une ascension politique sur les malheurs de la patrie. Il est toutefois soutenu par Barrès.
À l'entrée en guerre des États-Unis, avril 1917, il déclare sans prévoir l'évolution des événements en Russie ni le traité de Brest-Litovsk d'avril 1918 :
" Le suprême intérêt des pensées générales par lesquelles le président Wilson a voulu justifier l'action de son pays, c'est que la révolution russe et la révolution américaine se complètent à miracle pour fixer définitivement toute la portée idéaliste du conflit. Tous les grands peuples de la démocratie, c'est-à-dire du juste droit pour tous, ont désormais pris, dans la lutte, la place qui leur était destinée.
Le 22 juillet 1917, lors d'une interpellation concernant l'offensive Nivelle, il fait pendant deux heures et demie une critique acharnée de Malvy ; ce discours, applaudi au Sénat, est reproduit en plusieurs éditions par L'Homme enchaîné du 23 juillet puis diffusé en brochure sous le titre L'Antipatriotisme au Sénat. Malvy démissionne un peu plus tard, ce qui entraîne la chute du cabinet Ribot septembre 1917, remplacé par Painlevé.

Le président du Conseil, le Père la Victoire 1917-1920 1ère Guerre mondiale.

L’homme enchaîné garde son nom jusqu’à l’accession de Clemenceau à la Présidence du Conseil, le 16 novembre 1917. Le 13 novembre en effet, le gouvernement Painlevé tombe et le président Poincaré doit rapidement lui trouver un successeur. Il aurait eu alors à choisir entre Joseph Caillaux et Clemenceau. Bien qu'il n'aime guère Clemenceau, il préfère celui-ci, favorable à une victoire militaire et dont la force morale l'impressionne, plutôt que Caillaux, partisan d’une paix de compromis mais accusé d'intriguer contre la France en faveur de l'Allemagne. Dès janvier 1917, Charles Ier d'Autriche avait entamé des pourparlers de paix secrets avec Poincaré qui se montre enthousiaste et prêt à faire des concessions, colonies et avantages commerciaux à l'Allemagne. Clemenceau, belliciste souhaitant la guerre jusqu'au bout, refuse cette paix négociée, prétextant que c'est un piège tendu par l'Allemagne.
À 76 ans Clemenceau devient ainsi à nouveau président du Conseil, malgré l'opposition de Briand et des socialistes (Marcel Sembat affirme à Poincaré que sa nomination susciterait un soulèvement immédiat. Hormis la presse socialiste, les journaux acclament sa nomination, jusqu'au New York Times, dithyrambique.
Son gouvernement est essentiellement composé de proches et de figures qui s'effacent derrière lui : Stephen Pichon aux Affaires étrangères, Jules Pams à l'Intérieur, Georges Leygues à la Marine, Louis Loucheur à l'Armement. Son ami Georges Mandel devient chef de cabinet et Jules Jeanneney sous-secrétaire d'État à la présidence ; dans son cabinet se trouve aussi Georges Wormser, son futur biographe. En novembre 1919, il fera entrer André Tardieu au gouvernement ; celui-ci restera un ami proche jusqu'à son entrée dans le Gouvernement Poincaré dans les années 1920. Lui-même se réserve le portefeuille de la Guerre, La Guerre ! C'est une chose trop grave pour la confier à des militaires !", avait-il dit en 1887 lors de l'affaire Schnæbelé. Il s'y adjoint les services du général Henri Mordacq, qui devient son chef de cabinet militaire et véritable bras droit pour les questions militaires.
Le 20 novembre 1917, il annonce à la Chambre son programme de gouvernement : Vaincre pour être juste, voilà le mot d'ordre de tous nos gouvernements depuis le début de la guerre. Ce programme à ciel ouvert, nous le maintiendrons. Il rend hommage aux poilus comme au courage de l'arrière : ces silencieux soldats de l'usine, sourds aux suggestions mauvaises, ces vieux paysans courbés sur leurs terres, les robustes femmes de l'arrière et ces enfants qui leur apportent l'aide d'une faiblesse grave. Mais il affirme également la fin des campagnes pacifistes : Ni trahison, ni demi-trahison : la guerre !. Il précise toutefois : Nous sommes sous votre contrôle. La question de confiance sera toujours posée. Il est acclamé. Seuls les socialistes lui refusent la confiance ; le lendemain, La Lanterne de Marcel Sembat écrit : Depuis le début de la guerre, on n'a rien entendu d'aussi vide !
Il restaure la confiance, mettant tout en œuvre pour que la République soutienne le choc de cette guerre Guillaume II prédisait justement le contraire, assurant que les démocraties – France et Royaume-Uni – s'effondreraient d'elles-mêmes si la guerre devait durer. Il s'attache d'abord à épurer l'administration, révoquant le préfet de police et le préfet de la Seine, ainsi que nombre de fonctionnaires jugés incompétents.
Dans sa politique intérieure, Georges Clemenceau s’emploie à mater énergiquement toute tentative de révolte, de mutinerie ou de grève dans les usines. Il mène également une lutte énergique pour le soutien du moral des troupes. Pour ce faire, il pourchasse les pacifistes, les défaitistes, les embusqués pour soutenir le moral des troupes et fait également pression sur la presse favorable à ces mouvements sans pour autant utiliser la censure.
Il généralise l'appel aux troupes coloniales la force noire du général Mangin, qu'il nomme à la tête du 9e corps d'armée malgré l'hostilité de Pétain, nommant le député sénégalais Blaise Diagne, qui vient d'adhérer à la SFIO, Commissaire Général chargé du recrutement indigène. Malgré les révoltes, 65 000 hommes sont ainsi recrutés dans les colonies en 1918. Il fait également appel à l'immigration italienne, négociant avec le président du Conseil Orlando pour obtenir cette main-d'œuvre d'appoint. 70 000 immigrants italiens sont ainsi en France en mars 1918. Par la loi du 10 février 1918, il obtient le droit de réglementer par décret la production, la circulation et la vente des produits servant à la consommation humaine ou animale, point sur lequel le cabinet Briand avait échoué en 1916. Ceci lui permet de renforcer l'économie de guerre.
Les défaitistes sont réprimés, soit à la demande de Clemenceau, soit par la justice. Ainsi, l'ex-ministre de l'Intérieur Malvy, lourdement attaqué par Clemenceau journaliste, demande à ce qu'une Commission de la Chambre examine son cas pour le disculper ; celle-ci le renvoie devant la Haute Cour de justice, et il sera condamné pour forfaiture à l'été 1918.
Le 11 décembre 1917, Clemenceau s'attaque directement à Joseph Caillaux, accusé de chercher une paix blanche sans annexions ; il demande la levée de son immunité parlementaire conjointement à celle du député Louis Loustalot128. 397 députés votent pour la levée ; Caillaux est incarcéré en janvier 1918, Clemenceau refusant toute intervention judiciaire. Caillaux sera condamné par la Haute Cour en février 1920.
Clemenceau frappe aussi la rédaction du Bonnet rouge, journal défaitiste subventionné par l'Allemagne, ainsi que Paul Bolo dit Bolo Pacha, payé par l'Allemagne pour racheter Le Journal, ce qui lui vaudra d'être condamné à mort.
La censure est cependant allégée, étant restreinte aux faits militaires et diplomatiques : Le droit d'injurier les membres du gouvernement doit être mis hors de toute atteinte, déclare-t-il à la suite de la publication d'un article qui le visait férocement. Il pose également régulièrement la question de confiance, se soumettant ainsi au contrôle parlementaire. À de nombreuses reprises, les chambres du Parlement doivent ainsi choisir entre soutenir ses décisions et le renverser.
Mettant la pression sur les États-Unis pour faire venir des troupes, il participe au Conseil supérieur de guerre interallié, dont la première réunion a lieu le 1er décembre 1917 avec Lloyd Georges, Orlando et le conseiller présidentiel de Wilson, Edward House, et à la Conférence interalliée pour tenter de mettre en place une direction intégrée des troupes.
Plus résolu et plus intransigeant que jamais, il conduit ainsi une politique de salut public qui porte ses fruits l'année suivante, consacrant un tiers de son temps à la visite des tranchées, suscitant l'admiration des poilus pour son courage; il se couvre la tête d'un simple chapeau. Le 8 mars 1918, il présente ainsi son programme de gouvernement à la tribune alors qu'il veut faire voter les crédits de guerre :
Vous voulez la paix ? Moi aussi. Il serait criminel d'avoir une autre pensée. Mais ce n'est pas en bêlant la paix qu'on fait taire le militarisme prussien.
Ma politique étrangère et ma politique intérieure, c'est tout un. Politique intérieure ? Je fais la guerre. Politique étrangère ? Je fais la guerre. Je fais toujours la guerre.
Il ajoute alors : Celui qui peut moralement tenir le plus longtemps est le vainqueur.Churchill a ainsi dit de lui : Dans la mesure où un simple mortel peut incarner un grand pays, Georges Clemenceau a été la France
Le 24 mars 1918, trois jours après le déclenchement d'une nouvelle offensive du général Ludendorff, Clemenceau envisage sérieusement d'opérer un retrait du gouvernement sur la Loire, mais Poincaré l'en dissuade. Le Tigre se rend alors à Compiègne voir Pétain, qu'il juge à nouveau trop pessimiste. Le 26 mars, il se rend avec Poincaré à Doullens, au nord d'Amiens. Il préfère alors Foch à Pétain comme généralissime des troupes interalliées, choix entériné le 14 mai après une rencontre à Beauvais, le 3 avril, avec Lloyd George et le général Pershing. Poincaré et Clemenceau se méfient en effet de Pétain, malgré cela nommé maréchal en novembre 1918. Poincaré raconte ainsi que le Tigre lui aurait dit :
" Imaginez-vous qu'il m'a dit une chose que je ne voudrais confier à aucun autre que vous. C'est cette phrase : " Les Allemands battront les Anglais en rase campagne ; après quoi, ils nous battront aussi." Un général devrait-il parler et même penser ainsi ? "
À son surnom de Tigre vient s'ajouter celui de Père la Victoire, qui résume à lui seul la part prise par lui au redressement de 1918, notamment pour son rôle dans la création du commandement unique. Après une nouvelle offensive lancée à partir du Chemin des Dames, qui permet à l'armée allemande de se trouver à 60 km de Paris, Pétain conseille alors à Clemenceau de quitter la capitale, le gouvernement est critiqué par les présidents des Chambres, Dubost et Paul Deschanel. Le 4 juin 1918, il obtient la confiance de la Chambre par 377 voix contre 110. Deux jours plus tard, un Comité de défense du camp retranché de Paris est institué, pour préparer les mesures en cas d'évacuation du gouvernement.
À partir de la bataille de Château-Thierry, en juillet 1918, le vent commence à tourner. En octobre, alors que l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie et la Turquie ont fait savoir qu'elles demandaient l'armistice sur la base des Quatorze points de Wilson, Clemenceau manque de démissionner à la suite d'une lettre de Poincaré, dans laquelle celui-ci refuse tout armistice tant que les troupes ennemies n'auront pas évacué tout le territoire français, voire l'Alsace-Lorraine. Alors que la droite, L'Action française, L'Écho de Paris, Le Matin… fait preuve de jusqu'au boutisme, réclamant d'aller jusqu'à Berlin imposer l'armistice, Clemenceau s'y refuse, préférant mettre fin au carnage et signer l'armistice du 11 novembre 1918. Ceci lui vaut l'ironique Perd-la-Victoire au sein de la droite nationaliste.
Viscéralement antibolchevique, il lance, dans les dernières semaines de 1918, une importante opération en mer Noire pour soutenir les armées blanches en lutte contre la Révolution d'Octobre. Mais les moyens engagés fondent avec la démobilisation, et les soldats, épuisés, ne comprennent pas cette nouvelle guerre lointaine. L'échec de l'expédition sera consommé au printemps 1919 avec la vague de mutineries qui secoue l'escadre de la mer Noire.
Le Conseil des Quatre à la conférence de paix : Lloyd George, Vittorio Orlando, Georges Clemenceau, et Woodrow Wilson.
En compagnie du Président de la République, il entreprend un voyage triomphal dans l’Alsace et la Lorraine libérées. Le 21 novembre 1918, l'Académie française l'élit à l'unanimité, aux côtés du maréchal Foch ; Clemenceau ne siégera jamais. L'Humanité ironise :
M. Clemenceau a contribué à la Commune. Il est devenu conservateur. M. Clemenceau a été dreyfusard. Il a étouffé la justice. M. Clemenceau a assailli, criblé de sarcasmes et ruiné le Sénat. Il est sénateur. M. Clemenceau a mésestimé l'Académie française. Il en a été élu hier membre.
L'empereur déposé Guillaume II écrira au contraire, dans ses Mémoires :
La cause principale de la défaite allemande ? Clemenceau. … Non, ce ne fut pas l'entrée en guerre de l'Amérique, avec ses immenses renforts … Aucun de ces éléments ne compta auprès de l'indomptable petit vieillard qui était à la tête du gouvernement français. … Si nous avions eu un Clemenceau, nous n'aurions pas perdu la guerre.

La Conférence de paix 1919 Conférence de paix de Paris 1919.

Où l'on voit les quatre chefs d'État de la conférence de Versailles, sous le titre Paix et future chair à canon. En bas, la légende : Le Tigre : C'est curieux ! J'ai l'impression d'entendre un enfant pleurer. L'image montre Clemenceau regardant un enfant, avec marqué au-dessus Classe militaire de 1940. Ce dessin prémonitoire de l'Australien Will Dyson est paru dans le Daily Herald en mai 1919.
La gauche lui est alors hostile, invoquant les Quatorze points de Wilson et sa vision idéaliste contre Clemenceau, opposition exprimée tant dans Le Rappel ou La République française que dans Le Matin, proche de Briand et dans L'Œuvre radicale de Gustave Téry. La droite, au contraire, soutient Clemenceau, espérant arracher le plus possible à l'Allemagne, Le Figaro, Le Gaulois, L'Écho de Paris, L'Action française et une partie de la presse radicale, Le Pays, Le Radical ainsi que le centriste Le Temps. Le 29 décembre 1918, la Chambre lui renouvelle sa confiance par 398 voix contre 93.
Représentant de la France à la conférence de paix de Paris janvier-juin 1919, il y défend trois priorités : la ratification de la réintégration de l'Alsace-Lorraine, les réparations et l'assurance de la sécurité de la frontière franco-allemande. Il fixe seul la composition de la délégation française, faisant venir Tardieu comme négociateur, accompagné du ministre des Affaires étrangères Stephen Pichon, du ministre des Finances Klotz et de l'ambassadeur Jules Cambon. Il est élu président du Conseil des Dix, devenu, après le départ du Japon, Conseil des Quatre, avec Wilson, Lloyd George et Orlando.
Pour cela, il exige l'annexion de la rive gauche du Rhin et de lourdes indemnités matérielles et financières. En mars, il obtient la réduction de l'armée allemande à 100 000 hommes, avec un service militaire sur la base du volontariat. Le 14 avril 1919, le Conseil des Quatre lui accorde l'occupation du Rhin pendant 15 ans avec évacuation partielle de 5 ans en 5 ans, celle-ci pouvant être retardée en cas d'absence de garanties suffisantes contre des projets d'agression allemande, art. 429 du Traité. Il s'oppose sur ce sujet au maréchal Foch, qui, soutenu par Barrès, prône l'annexion de la Rhénanie. Il revendique également l'annexion de la Sarre, bassin minier qui remplacerait les pertes du Nord de la France, et obtient finalement, en avril 1919, un consensus avec la création d'un statut autonome, sous administration de la Société des Nations, de celle-ci.
Le 19 février 1919 à 8h30 du matin, après avoir attendu que le président du Conseil sorte de son domicile rue Franklin, l'anarchiste Émile Cottin qui reproche à Clemenceau d'être un briseur de grève et un tortionnaire de la classe ouvrière, tire à neuf reprises sur sa Rolls. Il le touche trois fois, sans le blesser grièvement. Une balle, jamais extraite, se loge dans l’omoplate à quelques millimètres de l’aorte. L’attentat déclenche dans la population et dans la presse une ferveur extraordinaire. L’enthousiasme populaire est exacerbé, on idolâtre Clemenceau. Il s’en sort finalement sans trop de dommages et intervient pour commuer la condamnation à mort de Cottin en dix ans de réclusion. Six jours plus tard, il reprend ses activités, faisant preuve d'une santé vigoureuse pour son âge, et conserve son poste de président du Conseil jusqu'en 1920.
S'il défend les promesses faites à l'Italie lors du pacte de Londres, il refuse de soutenir Orlando sur la question de Fiume, qui n'avait pas été évoquée en 1915. Le Premier ministre italien part, furieux. En juin 1919, les Allemands montrant des réticences à l'égard du traité de paix, Clemenceau consulte Foch pour organiser une éventuelle offensive. Finalement, le traité de Versailles est signé le 28 juin 1919, dans la Galerie des Glaces de Versailles, une idée de Clemenceau qui voulait marquer le coup par rapport au lieu de la proclamation du Reich allemand. La ratification par la Chambre a lieu le 23 octobre 1919, Clemenceau déclarant au Sénat :
" Poussé par une opinion publique traumatisée par les destructions de la guerre, le boche doit payer, Clemenceau a eu envers l'Allemagne et l'Autriche une attitude très intransigeante. Concernant l'Allemagne, concessions territoriales et versement de réparations importantes sont les deux pans de son programme. La République d'Autriche allemande, en allemand Deutschösterreich doit être renommée en Autriche, en allemand Österreich, et la revendication d'une partie de sa population, de bénéficier du 9e point de Wilson en rejoignant la nouvelle république d'Allemagne, est formellement rejetée, le Traité de Saint-Germain, signé en septembre 1919, interdisant ce rattachement. Clemenceau se heurte aux réticences du Royaume-Uni et des États-Unis, soucieux de préserver la stabilité de la toute nouvelle République de Weimar et l'équilibre de l'Europe centrale, et le texte du traité de Versailles sera finalement un compromis, où la position de Clemenceau est cependant dominante.
Clemenceau lui-même devait, sur le plan intérieur, tenir compte des positions antagonistes des partis français : la SFIO se montre très critique, accusant Clemenceau d'avoir surchargé l'Allemagne au risque de compromettre la paix ; en revanche, la droite nationaliste, Jacques Bainville, de l'Action française, est particulièrement virulent, l'accuse d'avoir fait preuve de faiblesse face à l'ennemi héréditaire .

Politique intérieure 1919

Avant de partir, Clemenceau, qui se montre particulièrement dur envers la Russie soviétique, fait tout de même voter la loi des huit heures avril 1919, afin de couper l'herbe sous le pied de la SFIO, quelques jours avant le 1er mai 1919. Le ministre de l'Intérieur Jules Pams interdit toute manifestation. Celle-ci a tout de même lieu : 300 manifestants blessés, deux morts, et 400 blessés du côté des forces de l'ordre. Le gouvernement est interpellé à la Chambre le 6 mai, mais celle-ci lui vote la confiance par une large majorité.
Une loi sur les conventions collectives est également adoptée le 25 mars 1919. Cela n'empêche pas qu'il continue à être attaqué par les socialistes : le 4 avril 1919, à la suite de l'acquittement de Raoul Villain, l'assassin de Jaurès, un article d'Anatole France, publié dans L'Humanité, déclare : Ce verdict vous met hors la loi, vous et tous ceux qui défendent votre cause. En juin, les métallurgistes parisiens entament une grève d'envergure, revendiquant l'application de la loi des 8 heures. Le 18 juillet 1919, le radical et ex-ministre Augagneur fait voter un ordre du jour défavorable au ministre de l'Agriculture Victor Boret. Au lieu de démissionner, Clemenceau remplace ce dernier par Joseph Noulens, ex-ambassadeur en Russie et anti-bolchévique notoire. Il convoque le dirigeant de la CGT Léon Jouhaux, un modéré, et lui promet l'amnistie et l'accélération de la démobilisation tout en affirmant qu'il n'hésitera pas à réquisitionner la fonction publique en cas de grève générale. Le 22 juillet 1919, il est à nouveau mis en difficulté à la Chambre par la gauche, mais parvient à se maintenir.
Aux législatives de novembre 1919, que Clemenceau a refusé de repousser, la droite, réunie au sein du Bloc national, l'emporte largement : c'est la chambre Bleu horizon. Cette victoire est en partie due à la nouvelle loi électorale du 22 juillet 1919, qui a instauré le scrutin proportionnel avec une dose de majorité, mais aussi aux divisions de la gauche.


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Posté le : 16/11/2014 17:47
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Georges Clémenceau3
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Candidature avortée Élection présidentielle française de janvier 1920.

En janvier 1920, Clemenceau, qui aspire désormais à une retraite paisible, accepte que des amis soumettent sa candidature à la présidence de la République, mais ses nombreux ennemis, à gauche comme à droite, s’unissent dans le dessein de soutenir la candidature de son adversaire, le président de la Chambre des députés, Paul Deschanel. Aristide Briand, en particulier, convainc la droite catholique du danger que cet anticlérical impénitent représente Léon Daudet l'appelle le Vendéen rouge, tandis que la SFIO garde en tête l'image du premier flic de France .
Deschanel, qu’il avait battu en duel en 1894, l’emporte d’une courte majorité lors du vote préparatoire au sein du groupe républicain, le 16 janvier 1920, à l’Assemblée nationale. Clemenceau retire alors à ses amis l’autorisation de poser sa candidature à l'Élysée. Le lendemain, le 17 janvier, Paul Deschanel est largement élu président de la République et Clemenceau présente la démission de son gouvernement au chef de l'État sortant, Raymond Poincaré.

Vie sociale L'homme

Être caustique doté d'un humour souvent décapant, Clemenceau s'est régulièrement illustré par des propos sarcastiques concernant la France, sa société et ses voisins.
Clemenceau était athée ou vaguement déiste - car il évoquait Dieu de temps en temps - anticlérical, ardent défenseur de la laïcité. Pourtant, il se disait être bouddhiste : Que voulez-vous, je suis bouddhiste !, a-t-il répondu un jour à des journalistes à la sortie d'une cérémonie bouddhiste organisée au Musée Guimet149.
Il pratiquait le sport gymnastique tous les matins, équitation et aimait les plaisirs de la campagne, la chasse, les animaux il avait un bouledogue, notamment les oiseaux… il installe des paons et des cigognes au ministère place Beauvau ; dans Le Cinquième État, il s'émeut des inutiles travaux infligés aux animaux domestiques150.
Grand amateur d'art asiatique, collectionneur d'estampes japonaises, de bouddhas du Gandhara, de laques, masques et céramiques, et autres objets d'art asiatique.
Il assista en 1890 à l'exposition d'art nippon, organisée par Samuel Bing à la galerie des Beaux-Arts à Paris parmi, entre autres personnalités, Henri Vever et Antonin Proust ; il fait acheter pour le Louvre, en 1891, les deux premières oeuvres japonaises du musée ; il intervint pour faciliter le legs à l'État de la collection de 1 700 objets d'art chinois et japonais de Clémence d'Ennery 1894 - dont il fut exécuteur testamentaire - devenue musée en 1908.
Sa propre collection, qui comptait entre autres peintures et objets 3000 boîtes à encens en porcelaine ou kogos, musée des Beaux-Arts de Montréal, a fait l'objet de l'exposition le Tigre et l'Asie au musée national des arts asiatiques - Guimet à Paris en 2014.

Ami de Monet et défenseur des impressionnistes

Il rencontra Monet dans les cafés du Quartier latin, foyer de l'agitation républicaine face au Second Empire : les deux étudiants républicains s'y croisaient régulièrement. Leur amitié profonde se développa lorsque Clemenceau publia un grand article élogieux, intitulé Révolution de cathédrales dans son journal La Justice, le 20 mai 1895, à propos de l'exposition chez Durand-Ruel. Il écrivit le livret d'un opéra, Le Voile du bonheur.
L'Olympia de Manet déclenche ce 15 juin 1865 au Palais de l'Industrie et des Beaux-Arts de Paris l'indignation ; Une tempête de fureur, soufflait et on vomissait les injures les plus grossières, raconte Clemenceau venu soutenir en compagnie de Zola, son ami Manet. Lorsqu'un rustre à la mine fleurie, vient cracher sur le tableau. Clemenceau se jette sur lui en le souffletant. Un duel s'ensuivit au petit matin dans les faubourgs de Paris. Clemenceau écorcha le bonhomme, qui s'en tirait à bon compte. Cette histoire fit le tour des ateliers parisiens et ses nouveaux amis avaient pour nom: Pissaro, Degas, Toulouse-Lautrec, Sisley, mais il resta très proche de Claude Monet qu'il appelle mon vieux coeur.
Durant sa longue carrière politique, malgré son activité infatigable, il a trouvé le temps de s'intéresser à l'art et fut le protecteur de Claude Monet, il obtiendra que ses Nymphéas soient exposées à l'Orangerie des Tuileries, à Paris et d'autres peintres, tels que Jean Peské.

Fréquentations et salons

N'aimant guère cependant la paysannerie réactionnaire de Vendée, il fréquentait assidûment les salons littéraires et musicaux de la Belle Époque et, ayant divorcé, était connu comme coureur de jupons, nombreuses petites danseuses repérées dans le foyer de l'opéra, Léonide Leblanc, ex-maîtresse du duc d'Aumale, et de Gambetta; en son souvenir il donna son prénom à une ânesse qui, comme elle, avait "de grands yeux humides, la langue chaude et le poil luisant"…, l'actrice Suzanne Reichenberg, la comtesse d'Aunay, et, pendant plus longtemps, la cantatrice Rose Caron.
Il fut également un ami de la féministe Marguerite Durand, de la femme de lettres Anna de Noailles, de l'actrice Sarah Bernhardt ou de Cécile Sorel, autre actrice également amie de Barrès, à qui il déclarera : Toute ma vie j'ai été amoureux.
Il fréquente ainsi le salon de la comtesse de Loynes avant qu'elle ne choisisse, avec son amant Jules Lemaître, le camp des anti-dreyfusards. Celui, surtout, d'Aline Ménard-Dorian, fille du ministre du gouvernement de la Défense nationale Pierre-Frédéric Dorian et épouse de Paul Ménard-Dorian, riche maître des forges député radical, mère de Pauline Ménard-Dorian qui se maria avec le petit-fils de Victor Hugo.
Dans le salon républicain d'Aline, rue de la Faisanderie, on rencontrait Émile Zola, Alphonse Daudet, les frères Goncourt, Rodin, Carrière, Béthune, RenouardLequel ?, Victor Considerant, et nombre d'hommes politiques républicains de l'époque, tels que Georges Périn, Allain-Targé, Challemel-Lacour, Henri Rochefort, etc.
À la fin du siècle, il fréquentait également beaucoup, avenue Hoche, le salon de Mme Arman de Caillavet, l'égérie d'Anatole France, le plus célèbre des salons dreyfusistes, et où l'on rencontrait la fine fleur des arts et des lettres, en même temps que le gratin politique.
Il se rendit à Vienne en 1886, lors de la crise boulangiste, au mariage de son frère Paul avec Sophie Szeps, fille du journaliste Moritz, propriétaire de la gazette libérale Wiener Tagblatt, célébrations au cours desquelles il rencontra l'archiduc Rodolphe d'Autriche 1859-1889, ami des Szeps et favorable à un rapprochement avec la France. Jusqu'à l'annexion de la Bosnie-Herzgovine par l'Autriche-Hongrie en 1908, il put espérer une alliance avec l'Autriche. Par ailleurs, il demeurera proche de sa belle-sœur, Berta Zuckerkandl.
Souvenez-vous du vieux Rembrandt du Louvre, creusé, ravagé qui s'accroche à sa palette, résolu à tenir bon jusqu'au bout à travers de terribles épreuves. Voilà l'exemple. lettre du 12 juillet 1911, puis, Vous l'avez plus cruellement ressentie sa cataracte double parce que vous êtes un artiste hors pair et que vous avez entrepris, quand votre vue défaille, de faire plus beau qu'avec vos deux yeux, et à poursuivre les recherches picturales qui aboutirent aux célèbres Décorations des Nymphéas; c'est à son instigation que le peintre les offrit à son pays le 12 avril 1922.
Nous sommes fous tous les deux mais pas de la même folie. C'est pourquoi nous nous comprendrons bien jusqu'au bout.
Clemenceau fréquenta aussi les peintres et graveurs Jean-François Raffaëlli 1850-1924 et Eugène Carrière 1846-1906, habitué du salon d'Armand de Caillavet.

Fin de vie "Au soir de la Pensée "

À 79 ans Clemenceau va désormais consacrer son temps à de longs voyages. Il part ainsi, en avril 1920, pour l'Égypte à bord du Lotus, puis au Soudan où il rencontre le nationaliste Osman Digma.
De retour à Paris, il paie ses dernières dettes et s'achète une Citroën - André Citroën ne voulant pas la lui faire payer, Clemenceau exige en retour qu'il accepte 10 000 francs pour la caisse de solidarité des ouvriers.
Il fréquente Basil Zaharoff, marchand d'armes millionnaire, vieux Grec d'Odessa qui gagne cent mille francs par jour, fume les cigares les plus chers du monde, très beau, l'air d'un Tintoret, très généreux, splendide aventurier, roi secret de l'Europe, Paul Morand, qui contrôlait la firme d'armement anglaise Vickers, employeur - grâce à son ami Nicolas Pietri - de son fils Michel.
Zaharoff lui procure chauffeur et Rolls-Royce afin de remplacer celle que lui avait offerte en 1917 le roi d'Angleterre en qualité de Président du Conseil, et qu'en conséquence le gouvernement français lui a demandé de laisser à l'État en 1920. Le seul geste du Pouvoir envers lui - il ne reçut aucune pension ou indemnité - a été l'offre de la Médaille Militaire, qu'il a déclinée avec ironie habituelle, lui, simple civil qui n'est même pas un ancien gendarme.
Le 22 septembre 1920, le lendemain de la démission de Deschanel, il part pour Ceylan sur la Cordillère. Il est invité en Inde par Ganga Singh, le maharajah de Bîkâner, rencontré lors de la Conférence de paix. Il visite aussi Colombo, Singapour, Jakarta, Bandung, Rangoun, Bénarès, Bombay, Mysore, où le maharajah local l'a également invité…
De retour à Toulon le 21 avril 1921, il se rend ensuite en Angleterre, où l'université d'Oxford le fait docteur honoris causa 22 juin 1921. Il y rencontre ses amis Churchill, Kipling, le rédacteur en chef du Times Steed, l'ex-Premier ministre Asquith et, à sa demande, fait une visite à Lloyd Georges.
De retour en France, séjournant en Vendée, il inaugure le 9 octobre 1921 le Monument aux Morts de Mouilleron-en-Pareds, son village natal, et le 20 son propre monument, au centre du bourg de Sainte-Hermine Vendée, le célèbre groupe sculpté sur place en deux ans par son ami le sculpteur François Sicard, qui le représente debout sur un rocher surmontant plusieurs poilus : la statue, décapitée pendant l'Occupation par les troupes allemandes, a été restaurée — la tête originale est conservée au musée national maison de Georges Clemenceau de Saint-Vincent-sur-Jard.
Au proche village de Féole se trouve le logis médiéval de L'Aubraie de son grand-père propriété privée, où, enfant, il séjourna et qui fut attribuée à son frère Paul en compensation des secours financiers apportés par leur père à Georges pour apurer ses dettes journalistiques, partage qui brouilla les deux hommes.
En février 1922 il relance un journal, L'Écho national, qui a comme fondateur Clemenceau, et comme directeur politique Tardieu. Édouard Ignace, Georges Bonnefous, Georges Suarez, Gaston Bénac y collaborent.
Le 27 mai 1922 il prononça un discours émouvant lors de l'inauguration du Monument aux Morts de La Grande Guerre du lycée nantais qui portait déjà son nom; le futur Julien Gracq, qui y assistait l'évoqua plus tard.
À l'automne 1922 il part aux États-Unis pour une tournée de conférences, plaidant la cause de la France. De retour le 20 décembre 1922, Clemenceau s’attelle à la rédaction de plusieurs ouvrages : Démosthène, où il peint à la fois l'orateur grec et lui-même ; Grandeur et Misères d’une victoire, où il défend, contre Poincaré et Foch, son action politique de 1917-1919 et évoque le risque du réarmement allemand en raison de l'abandon des garanties du traité de Versailles et de la politique d'apaisement de Briand; et surtout Au soir de la Pensée, un gros ouvrage de réflexion et de philosophie qui va être le but principal de ses vieux jours : il y réfléchit sur l'humanité, les différentes religions et cultures, le progrès, etc.
Fin 1923, à 82 ans, il rencontre Marguerite Baldensperger, de 40 ans sa cadette, et qui venait de perdre une fille, Je vous aiderai à vivre et vous m'aiderez à mourir, voilà notre pacte lui dit-il, directrice de collection et épouse d'un professeur de littérature à la Sorbonne. Il la fait venir chez lui pour écrire une biographie sur Démosthène et lui écrit régulièrement jusqu'à ses derniers jours 668 lettres qui lui tiennent lieu de journal, publiées en 1970 par son fils Pierre sous le titre Lettres à une Amie ; elles révèlent l'amour platonique d'un Clemenceau inconnu, attentif, courtois, plein de tendresse et d'égards … soudain ombrageux, irrité, tel qu'en lui-même l'amour ne l'a pas entièrement changé.
Il lui dédicaça entre autres La France devant l'Allemagne 1918 et un exemplaire des Embuscades de la vie, 1919 - archives pers., en juin 1924, en inscrivant un "Aimons la France", trois mots qui peuvent résumer sa vie politique.
Au vu de la situation internationale, il se décide à écrire au président Coolidge le 9 août 1926 :
" Nous sommes débiteurs et vous êtes créanciers. Il semble que ce soit pure affaire de caisse. N'y a-t-il point d'autres considérations à envisager ? …
Si les nations n'étaient que des maisons de commerce, ce sont des comptes de banques qui règleraient le sort du monde. … Or, c'est le secret de la comédie qu'il ne s'agit ici que d'échéances fictives pour aboutir à l'emprunt, avec de bonnes hypothèques sur nos biens territoriaux, comme en Turquie …
La France n'est pas à vendre, même à ses amis !
Coolidge ne se donna pas la peine de répondre, se contentant d'un communiqué laconique. Ce fut la dernière intervention politique de Clemenceau.

Mort

Frappé d'une crise d'urémie à 88 ans Clemenceau meurt après trois jours de maladie, à l'aube du 24 novembre 1929, à son domicile de la rue Benjamin Franklin à Paris — ancienne garçonnière de Robert de Montesquiou — qu'il habitait depuis 34 ans et qui, mis en vente en 1926 par les héritiers de sa propriétaire Mme Morand, qui, connaissant les ressources modestes de son auguste locataire, avait eu l'élégance de ne pas augmenter le loyer, et, elle-même très âgée, avait même demandé à ses héritiers d'en faire autant jusqu'à la mort de Clemenceau fut alors été acheté en secret le 18 mai 1926 par l'émissaire d'un de ses fervents admirateurs, le milliardaire américain James Stuart Douglas 1867-1949 pour 950 000 francs sur une mise à prix de 500 000 du fait de la concurrence des voisins, les jésuites de Saint-Louis de Gonzague, désireux de s'agrandir.
Pour mes obsèques, je ne veux que le strict minimum, c'est-à-dire moi
Une terrasse plantée d'acacias qui domine le lit d'un ruisseau. Des arbres, beaucoup d'arbres. Quelque chose dans tout cela de simple et en même temps d'orgueilleux. Une sorte de paix des premiers âges … M. Clemenceau me montrant sa tombe : voilà la conclusion de votre livre : un trou et beaucoup de bruit pour rien.
Sur son lit de mort Clemenceau, voyant arriver un prêtre aurait dit : Enlevez-moi ça ! mais l'anecdote est peu sûre ; René Godart le représenta — les méplats asiatiques de son visage le font ressembler à Gengis Khan — et François Sicard réalisa son masque mortuaire dessin et masque sont reproduits dans le numéro-hommage de L'Illustration de novembre 1929.
Son exécuteur testamentaire fut son vieil ami corse Nicolas Pietri. Le lendemain du décès, conformément au testament du 28 mars précédent qui excluait tout cortège ni cérémonie d'aucune sorte, son corps, auprès duquel avait été placé, selon ses instructions, un petit coffret recouvert de peau de chèvre, le livre, Le Mariage de Figaro selon le numéro-hommage de l'Illustration de novembre 1929 qu'y avait déposé sa mère, sa canne à pomme de fer qui est de ma jeunesse , offerte par son père lorsqu'il était enfant, et deux bouquets de fleurs desséchées, dont celui que lui offrirent en Champagne le 6 juillet 1918 deux soldats d'avant-poste promis à la mort, fut transporté dans sa voiture et arriva à 12 heures 30 à Mouchamps Vendée, au bois sacré où reposait depuis 1897 son père, en présence de 200 gendarmes et de nombreux paysans accourus malgré les barrages routiers et la fermeture du chemin menant au manoir-ferme du Colombier, où ses ancêtres avaient vécu du début du XVBIIIe siècle à 1801. Il fut porté en terre par son chauffeur Brabant, son valet de chambre Albert Boulin, deux fossoyeurs et deux paysans, sur le bord d'un ravin boisé dominant une boucle du Petit Lay, terrain qui avait été donné à la commune en avril 1922 par Clemenceau et ses cinq frères et sœurs dans la simplicité des funérailles protestantes traditionnelles.
Une légende tenace veut qu'il ait été enterré debout afin d'être tourné vers la ligne bleue des Vosges voire pour défier l'Église catholique; en réalité, du fait d'une des grosses racines du cèdre impossible à réduire, le cercueil ne put être posé à plat, mais fut légèrement incliné.
Un de ses familiers, le commandant Jean de Lattre de Tassigny, futur maréchal de France — dont la pieuse mère disait chaque jour son chapelet depuis 1918 pour la conversion de Clemenceau — fut avec son épouse parmi ses rares amis vendéens à assister à ses obsèques, et protesta ensuite envers l'évêque qui n'avait cru devoir annuler une réjouissance publique prévue le soir même.
Une copie — sans le livre sur lequel s'appuie la lance de l'original, à la demande de Clemenceau — de la Minerve casquée dite de Samos sculptée par Sicard en pierre blonde d'Égypte surplombe les sépultures jumelles, dépourvue de dalles et de toute inscription, entourées de grilles ombragées par un grand cèdre de l'Atlas, arbre de La Liberté planté en 1848 par Benjamin Clemenceau et son jeune fils pour célébrer la Deuxième République.
Pendant de longues années, la commune de Montmartre fit fleurir la sépulture, de même que celle de Mouchamps, le jour anniversaire de l'Armistice de 1918, et l'État, pour celui de sa mort 24 novembre; c'est probablement lors de l'une de ces deux circonstances, en 1954, que le peintre amateur C. Gauducheau-Merlot brossa un tableautin du lieu coll. privée.
Par décision ministérielle du 15 juillet 1998 les deux tombes, la stèle et l'allée d'accès ont été inscrites à l'Inventaire Supplémentaire des Monuments historiques.

Postérité

Quinze jours après l’Armistice est créée l’Union nationale des combattants, citée dans le Journal officiel du 11 décembre 1918. Elle est reconnue d’utilité publique par décret du 20 mai 1920. Georges Clemenceau et le Révérend Père Daniel Brottier en sont les fondateurs. Clemenceau remet au premier trésorier de l’U.N.C. la somme de 100 000 francs or, provenant d’un don d’une mère, dont le fils est tombé au combat.

Hommages de personnalités

Vinrent s'incliner sur la tombe :
en mai 1943 Erwin Rommel
le 12 mai 1946, Charles de Gaulle, entouré d'une foule estimée à 3000 personnes, honorant sa promesse de venir lui annoncer la victoire, à la suite du message qu'il adressait symboliquement de Londres le 11 novembre 1941 :
Au fond de votre tombe vendéenne, Clemenceau, vous ne dormez pas. Certainement la vieille terre de France qui vous enterre pour toujours a tressailli avec colère tandis que le pas insolent de l'ennemi et la marche feutrée des traîtres foulaient le sol de la patrie…
deux présidents de la République, lors de visites officielles : le 9 novembre 1951 Vincent Auriol et le 11 novembre 1987 François Mitterrand, entouré de 300 personnes, et un ancien président du Conseil et président du parti radical-socialiste, Édouard Herriot en 1955.

Hommages de Nantes

Nantes est une des villes qui a le plus rendu hommage à Clemenceau, de son vivant même.
En effet, c'est dès le 12 novembre 1918 que la municipalité exprime le souhait de donner son nom au lycée où il a fait ses études secondaires, ce qui est entériné par un décret du 4 février 1919.
Peu après est décidée la construction d'un monument aux morts du lycée ; lors de la séance du Conseil Municipal de Nantes du 26 mars 1919, un débat s'élève pour savoir si on doit y représenter Clemenceau : les socialistes, par la voix d'Eugène Le Roux, futur député, estiment que ce n'est pas nécessaire et rappellent qu'il est aussi le président du Conseil de 1906-1907. Le monument sans Clemenceau de Siméon Foucault est inauguré en sa présence, le 27 mai 1922 ; il y prononce un discours dont la dernière phrase, adressée au lycéens, est restée depuis lors gravée sur une plaque dans la cour d'honneur : pour connaître par vous-mêmes, sans attendre l'avenir, la fortune de vos efforts, retroussez résolument vos manches et faites votre destinée, paroles qui marquèrent, entre autres lycéens, le futur écrivain Julien Gracq. Cette cérémonie fit la couverture de L'Illustration du 3 juin.

D'autres hommages sont rendus après sa mort.

Dès le 24 novembre 1929, la municipalité donne son nom à la rue du Lycée et peu après, décide d'ériger un monument en son honneur dans la cour du lycée, en pendant au Monument aux Morts. Ce monument, qui comporte en médaillon un buste de Clemenceau par Sicard, fut inauguré le 26 avril 1931 en présence d'André Tardieu, L'Illustration du 2 mai, de nouveau en couverture.
Enfin, en 1966, un des ponts de la deuxième ligne de ponts reçoit le nom de Clemenceau le second, celui de Briand.

Honneurs anthumes

Le Monument à Georges Clemenceau à Sainte-Hermine Vendée, de Sicard, date de 1920.
Une photo le montrant regardant la statue est reproduite dans le numéro-hommage de L'Illustration novembre 1929.

Honneurs posthumes

Onomastique
Son nom a été donné à un porte-avions français, en service de 1961 à 1997. Lors de son dernier voyage le commandant du Clem' , comme l'appellent encore de vieux marins, vint mouiller entre l'île de Ré et la côte vendéenne et fit tirer une salve d'honneur afin de saluer symboliquement Bel-Ebat à Saint-Vincent-sur-Jard, la maison de vacances de Clemenceau.
Il a aussi été donné à de nombreux établissements scolaires : lycées Nantes, Reims, Montpellier, Chantonnay…, collèges Tulle… ainsi qu'à un hôpital, Hôpital Georges-Clemenceau, à des ponts Pont Georges-Clemenceau, avenues ou rues en France comme à l'étranger : par exemple, rue Georges-Clemenceau à Nantes, rue Clemenceau à Beyrouth .
En Amérique du Nord, on trouve un quartier neighborhood de la ville de Cottonwood Arizona, nommé Clemenceau à la demande de son ami James Douglas, Jr, fondateur du Clemenceau Heritage Museum consacré à l'histoire de la ville, ainsi qu'une montagne dans les Rocheuses canadiennes, le Mont Clemenceau.

Plaque Georges Clemenceau dans la station portant son nom sur la ligne 1 du Métro
En 1931, la station Champs-Élysées sur la ligne 1 du Métro prend le nom de Champs-Élysées - Clemenceau. Une station de la ligne du métro de Rennes porte aussi non nom.
Sa statue du rond-point des Champs-Élysées à Paris 1932. Photo coul. plus haut est due au sculpteur officiel François Cogné 1876-1952 ; des réductions en terre cuite ont été produites.
À Saint-Vincent-sur-Jard Vendée, la longue et basse maison de pêcheur louée à partir de 1920 au commandant Luce de Trémont, châtelain à Avrillé Vendée, un hobereau voisin, afin d'y passer la moitié de l'année, ce qu'il appelait sa bicoque ou son château horizontal, où il réunit meubles familiaux, provenant de sa demeure de Bernouville Eure, vendue entre-temps, voire achetés, le buffet rustique de la cuisine objets personnels et livres, fut achetée par l'État et transformée en une sorte de maison du souvenir, qui est gérée par la Caisse nationale des monuments historiques et des sites.
La mer ici m'enchante …. Il y a des bleus et des verts sur la palette du ciel. On en ferait des tableaux lettre à Monet, automne 1921.
À Paris, son appartement, devenu propriété américaine, fut transformé en musée en 1931 et géré par une fondation qui reçut des trois héritiers de Clemenceau les meubles et objets s'y trouvant à sa mort; demeuré ouvert pendant la Seconde Guerre mondiale, il reçut la visite de militaires allemands, dont le Feldmarschal von Stülpnagel, commandant en chef des troupes d'occupation en France.
Son fils, Michel Clemenceau 1873-1964, résistant, déporté et interné en 1940-1945, homme politique de la Quatrième République, à qui son père avait dédicacé ainsi un de ses ouvrages : À mon fils, qui aura des devoirs après ma mort, meubla et décora avec des meubles, objets d'art et souvenirs personnels de son père, la maison qu'il avait fait bâtir de 1927 à 1929 à Moret-sur-Loing Seine-et-Marne, nommée La Grange-Batelière , qu'il légua à sa quatrième épouse, Madeleine. Celle-ci conserva sa vie durant le musée Clemenceau ainsi constitué, qui fut dispersé en 250 lots le 13 février 2005 à Fontainebleau, dont plusieurs épaves de la collection d'art asiatique de Clemenceau cf. catalogue à qui, en 1922, en remerciement de sa réception en Vendée, le prince héritier du Japon Hirohito, âgé de 11 ans, envoya deux bannières en soie peintes de carpes, qui devinrent le signal de sa présence pour les pêcheurs - et un ivoire millénaire figurant la déesse des eaux , dons personnels du couple impérial.
Dans le cadre de cette vente publique l'État préempta certains souvenirs et documents historiques pour le musée Clemenceau de la rue Benjamin-Franklin et un fonds muséal vendéen ; par ailleurs, l'État acquit cette même année la maison natale de Clemenceau à Mouilleron-en-Pareds, située à deux rues de celle de Jean de Lattre de Tassigny, qui sont réunies dans le projet global du musée national des Deux Victoires, ou musée Georges Clemenceau et Jean de Lattre, créé en 1959 dans la mairie à l'initiative de la maréchale de Lattre et d'André Malraux.
À l'occasion du cinquantenaire de sa mort, une exposition iconographique Clemenceau, du portrait à la caricature s'est tenue du 4 juillet au 29 septembre 1980 au Musée national des Deux Victoires de Mouilleron-en-Pareds Vendée. En novembre 1997, l'Association des maires de Vendée a organisé l'exposition itinérante du riche fonds documentaire et iconographique du collectionneur vendéen Octave Fort, qui fut maire d'Avrillé - comprenant les archives du général Mordacq, chef du cabinet militaire de Clemenceau de 1917 à 1920 - sous le titre Clemenceau, cet inconnu.
Numismatique: "Le Tigre" est l'effigie d'une pièce de 10 € en argent éditée en 2012 par la Monnaie de Paris, pour la collection Les euros des régions afin de représenter les Pays de la Loire, sa région natale.

Expositions:

2013-2014 - Clemenceau et les artistes modernes, Manet, Monet et Rodin' à l'Historial de la Vendée, aux Les Lucs-sur-Boulogne, du 8 décembre 2013 au 2 mars 2014, catalogue par les éditions d'art Somogy et Conseil général de la Vendée ;
Le Tigre et l'Asie, Musée national des arts asiatiques - Guimet, Paris, du 12 mars au 6 juin 2014 ; catalogue et hors-série exposition no 74 de L'Objet d'Art.
Carrière
Maire du 18e arrondissement de Paris, composé pour l'essentiel de l'ancienne commune de Montmartre, de 1870 à 1871
Conseiller municipal de Paris 1871-1876
, président du conseil municipal de Paris 1875
Député à l'Assemblée nationale 1871 puis 1876-1893
Sénateur 1902-1920
Ministre de l'Intérieur 1906, surnommé le Tigre
Président du Conseil 1906-1909 et 1917-1920, surnommé le Père la Victoire
Membre de l'Académie française, élu en 1918, il n'y siègera jamais.

Honneurs

Docteur honoris causa de l'Université jagellonne de Cracovie en 1918
La place Clemenceau, sur l'avenue des Champs-Élysées prend son nom en hommage en 1930.

Iconographie

Georges Clemenceau vu par Aristide Delannoy, Les Hommes du jour, n°1, janvier 1908
1917 ca - Clemenceau visitant une tranchée gouache de Mathurin Méheut Péronne historial de la Grande Guerre, et une version à l'huile réalisée en 1955 pour décorer le navire Le Vendée offerte au Musée Mathurin Méheut de Lamballe
1919 - Clemenceau par Jean-Louis Forain dessin
1920 - Clemenceau par Cecilia Beaux, reproduite supra ;
1932 - Clemenceau , statue du rond-point des Champs-Élysées à Paris. Par le sculpteurFrançois Cogné 1876-1952 ; des réductions en terre cuite ont été produites;
s. d. - Clemenceau par Edmond Heuzé;
par Manet, dont il avait fait entrer L'Olympia au musée du Louvre, et pour lequel il s'était battu en duel;
par René Godart, dessin à la sanguine ? reproduit par L'Illustration ;
par Nadar photographie reproduite supra;
par le caricaturiste Léandre, qui le représente pourfendant symboliquement un rond-de-cuir,
par Manet179 reprod. supra ;
par Rodin180 ; il décrit lui-même ainsi une séance de pose : « montant sur un escabeau pour faire des croquis du sommet de son crâne puis, s'accroupissant, pour mieux voir le bas de sa mâchoire, tout cela pour lui faire une tête de général mongol;
par Albert Besnard dans une gravure à l'eau-forte en 1917.;
un buste en terre cuite fait face à celui de son grand ami et presque exact contemporain Claude Monet dans son l'atelier-salon du peintre à Giverny Eure, qu'il encouragea à se faire opérer de sa cataracte;
un grand buste en grès de Carrière est exposé au musée Sainte-Croix de Poitiers;
une photographie anonyme et non datée de lui assis à son bureau parisien illustre l'article de Jean Silvain cité en bibliographie - arch. pers.;

Filmographie

En 1910, son roman Le voile du bonheur est adapté par Albert Capellani;
En 2012, Didier Bezace interprète Georges Clemenceau dans le téléfilm Clemenceau de Olivier Guignard.

Télévision

Michel Ragon : Georges & Louise, Radio-télévision belge de la Communauté française, Sonuma, 27 janvier 2000,


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Posté le : 16/11/2014 17:44

Edité par Loriane sur 17-11-2014 11:44:27
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Atahualpa dernier Inca
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Le 16 Novembre 1532 est fait prisonnier Atahualpa dernier empereur Inca.
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Après une guerre civile menée contre son frère aîné, Huáscar, il fut capturé par surprise, et exécuté par Pizarro, qui affirma ainsi la domination espagnole sur le Pérou.
Atahualpa né entre 1497 et 1502 à Cuzco ou Quito, mort à Cajamarca en 1533, il est le cinquième et dernier empereur de l'empire inca indépendant. D'abord implanté dans la partie nord du royaume, une région dont les principales villes sont à l'époque Quito et Tomebamba, il s'empare du trône impérial de Cuzco après sa victoire lors de la guerre fratricide qui l'oppose à son demi-frère Huascar pour le pouvoir après la mort de leur père Huayna Capac. Sa victoire coïncide toutefois avec l'arrivée au Pérou des conquistadors espagnols menés par Francisco Pizarro, par lesquels il est capturé en 1532 lors de la bataille de Cajamarca, puis exécuté en 1533.


En Bref

À la mort de Huayna Cápac, l'Empire inca est en proie à une guerre qui oppose le fils légitime du défunt, Huáscar, officiellement couronné dans la capitale du Cuzco, à son fils bâtard, Atahualpa, qui, avec l'appui des généraux de son père, s'empare du nord du pays. En 1531, au moment où l'Espagnol Pizarro guerroie dans le golfe du Guayaquil, Atahualpa triomphe de son demi-frère Huáscar après une bataille décisive devant le Cuzco. Pizarro n'ignore pas ces événements et, après avoir voulu soutenir Huáscar, reconnaît Atahualpa comme souverain légitime ; sa stratégie conquérante commence par la décision hardie de se rendre à Cajamarca auprès d'Atahualpa. L'empereur ne lui fait pas obstacle et même, en réponse à l'ambassadeur Fernando, il promet de venir rendre visite aux Espagnols.
Les sources rapportent l'épisode tragique de la rencontre entre l'Inca et les conquistadores du Nouveau Monde. Le souverain arrive avec dignité dans une litière toute garnie de fin or, accompagné d'une escorte qui chante et danse autour de lui.
Les Espagnols l'exhortent à se convertir au christianisme et lui présentent les Évangiles. Atahualpa répond fièrement qu'il n'a d'autre dieu à adorer que le Soleil ; il feuillette le livre et essaye d'écouter ce qu'il dit, mais comme il n'entend rien, il le jette à terre. Ce refus est suivi d'un massacre. Pour échapper à la mort, Atahualpa promet ses richesses. Sa promesse excite la cupidité de ses adversaires et Pizarro, après avoir tiré tout le parti possible de l'Inca, le fait tuer ; la désintégration de l'Empire inca est immédiate.
L'attitude d'Atahualpa reste assez énigmatique pour les historiens : pourquoi a-t-il laissé traverser son pays par des étrangers ? Contrairement à une hypothèse qui a été avancée, il n'a pas cru à la surhumanité des Espagnols. Certes, les chevaux, les arquebuses et l'écriture l'avaient impressionné, mais il savait que ces barbus étaient des mortels auxquels on pouvait se mesurer. Juste avant qu'il ne rencontre les hommes de Pizarro, le bruit courait dans son camp que les fusils ne tiraient que deux coups et que les chevaux perdaient tout pouvoir pendant la nuit. C'est pour cela que l'empereur, après avoir convenu de l'entrevue avec Pizarro à midi, n'arriva qu'à la tombée de la nuit ; mais le piège qu'il avait pensé tendre se retourna contre lui.

Un avènement difficile

Fils d'une princesse de l'ancien du Royaume de Quito et du Sapa Inca Huayna Capac, Atahualpa naît dans le royaume de Quito vers 1500. Lorsque son père décède, la succession au trône reste incertaine, le fils désigné par Huayna Capac ayant été emporté par une épidémie de variole. Dans l'incertitude, Huascar dont la mère est une princesse de Cuzco est couronné. La noblesse du nord de l'empire étant hostile à cette décision décide de couronner Atahualpa comme Sapa Inca. Le prince régnera ainsi deux années sur les provinces du nord de l'empire où il est honoré et respecté comme souverain unique. Un statu quo se maintient jusqu'à ce que les généraux quiténiens arrivent à persuader le prince de monter sur le trône de Cuzco : l'empire ne doit pas rester divisé. Les généraux Quizquiz, Chalcuchimac et Rumiñahui sont à la tête des armées de Quito, les hostilités s'ouvrent ainsi. Après des mois de guerre civile, les armées de Huascar sont presque défaites. Atahualpa semble pouvoir devenir le 13e empereur inca du Tahuantinsuyu l'empire inca, il est en route pour Cuzco lorsqu'il reçoit la nouvelle du débarquement des hommes blancs et barbus dans la baie de Tumbes. Le prince fait surveiller les étrangers et on rapporte déjà de nombreux abus de leur part.

L'arrivée des conquistadore

Le 16 novembre 1532, après quelques pourparlers, Atahualpa est invité par le conquistador espagnol Francisco Pizarro, dans le village de Cajamarca au nord de l'actuel Pérou.
L'empereur Atahualpa se rend à proximité de Cajamarca entouré de sa cour et escorté de ses armées triomphantes, celles-ci sont suffisamment nombreuses pour encercler toute la ville et camper sur tous les flancs de la vallée. Pour convaincre Atahualpa de le rencontrer, Pizarro lui propose de l'aider dans la lutte qui l'oppose à son frère Huascar. Méfiant, Atahualpa accepte néanmoins et convient d'une entrevue à laquelle Indiens et Espagnols doivent se rendre sans armes.
N'ayant pas décelé le piège, l'Inca se rend en très grande pompe dans la ville de Cajamarca : il souhaite impressionner les étrangers. Dans sa litière d'or, portée par les plus nobles princes de l'empire, le « Fils du Soleil » est escorté par pas moins de 30 000 hommes et femmes de sa cour et de son armée. Un prêtre espagnol présente une bible au prince en lui demandant s'il accepte de suivre la « parole du Dieu unique ». Atahualpa se saisit du livre et le porte à son oreille. Celui-ci s'exclame qu'il n'entend aucune parole et jette le livre à terre. Erreur fatale : pour les Espagnols, le sacrilège sera le prétexte qu'ils attendaient pour capturer le prince, et ils donnent alors le signal de l'attaque.
Cachés dans les maisons de la ville, les Espagnols en armes se ruent sur les Indiens venus désarmés. Ayant attaché des grelots aux jambes de leurs chevaux et tirant en tout sens avec leurs fusils, ils créent une véritable panique chez les Indiens, ceux-ci tentent de s'enfuir de la place dont les issues sont trop petites, beaucoup sont déjà piétinés. Les Espagnols finissent par se saisir de lui et le souverain inca est fait prisonnier. Mais cela ne semble pas suffire aux Espagnols qui, jusqu'à la nuit tombée, pourchassent les Indiens dans toute la vallée, laissant derrière eux plus de vingt mille cadavres dont une grande partie de la noblesse et de l'élite impériale venue en paix.
Voyant que les Espagnols portaient un intérêt spécial aux métaux précieux, le prince propose pour sa libération une fabuleuse rançon en or et en argent. Les Espagnols acceptent. Sur ordre du souverain, les sujets apportent de tout l'empire une quantité extraordinaire d'or et d'argent, les temples sont vidés on parle alors de 12 tonnes d'or et d'argent.
Pendant sa détention, Atahualpa reçoit des nouvelles de ses armées : le prince de Cuzco, Huascar est fait prisonnier et est enfermé au Sacsahuaman, Atahualpa qui semble croire que les Espagnols vont le libérer, ordonne de faire exécuter son rival. On peut considérer qu'Atahualpa fait la même chose à son rival étant donné qu'Huascar avait demandé auparavant l’exécution de son demi-frère.

Exécution d'Atahualpa par le feu.

Funérailles d'Atahualpa.
Après versement de la rançon, les Espagnols, ayant pris la mesure de la puissance du prince en son royaume, commencent à penser que cet homme qui a tant de prestige et d'autorité sur son peuple finira tôt ou tard par reprendre le dessus sur eux. Les Espagnols les plus radicaux proposent d'exécuter le prince et de placer un empereur fantoche à sa place, lequel sera plus manipulable. Pizarro, à contre cœur, doit condamner Atahualpa qu'il a appris à estimer. Le prince est donc condamné à être brûlé sur un bûcher. Les Espagnols l'estimant le supplient de se convertir, auquel cas il sera garrotté et non brûlé ; Atahualpa accepte. L'exécution a lieu dans sa cellule le 29 août 1533.
L'empire inca est anéanti. Les Espagnols poursuivront leur plan en plaçant sur le trône Manco Inca aussi appelé Manco Capac II, qui par la suite mènera une grande rébellion.

Conséquences de l’exécution

Après l’exécution de l’empereur Atahualpa, l’empire Inca est anéanti. Les espagnols le remplacent par Manco Capac II (ou Manco Inca); demi-frère de Atahualpa et d’Huascar. Au départ, le plan des espagnols était de renverser l’empereur Atahualpa afin d’instaurer un monarque plutôt fantoche et plus facilement manipulable. Malgré cela, le nouvel empereur Manco Capac II s’est rebellé contre les conquistadors et réussit à renverser pendant quelque temps la puissance des espagnols. Après la guerre de résistance, les conquistadors amplifient leur puissance militaire au Pérou et Manco Capac II sera finalement assassiné par le fils de Diego de Almagro.

Le tombeau

L'historienne Tamara Estupiñán Viteri, chercheuse à l’Institut français des études andines, est convaincue que la dépouille d'Atahualpa se trouve sur un site archéologique qui a été découvert dans la région de Sigchos, dans l’actuelle province de Cotopaxi en Équateur3. Entre 2004 et 2010, Tamara Estupiñán Viteri y découvre les premiers vestiges, et à proximité, un lieu-dit appelé Machay qui signifie l’endroit où repose le malqui l'empereur en quechua. Les ruines apparentes sont constituées d’un bassin, alimenté par des canaux, surmonté d’une plateforme ou d’un ushnu, une sorte d’oratoire solaire où pouvait s’asseoir l’Inca, et d’une place en forme de trapèze. Une campagne de fouilles devrait débuter en avril 2012

Représentations

Aux yeux de nombreux habitants des pays andins, le prince Atahualpa reste une figure historique très estimée en raison de l'aspect tragique de sa capture par les Espagnols.
Il est également souvent considéré comme le XIIIe et dernier empereur inca annoncé par la prophétie faite à l'époque de Tupac Yupanqui.
Par ailleurs la capture de l'empereur Atahualpa à Cajamarca fut l'objet d'un poème de Pablo Neruda : Las Agonías.

liens

http://youtu.be/bSR2U56Qsp0 Atahualpa bande annonce film en espagnol
http://youtu.be/tfxa4SQz3X8 Loss Sigchos
http://youtu.be/7wQJ6yjdLM8 Atahualpa
http://youtu.be/f-jDOqyeedM L4EMPIRE iNCA
http://youtu.be/gAzGhF3iF_s Tombe des restes présumés d'atahualpa
http://www.ina.fr/video/CPB75055760/p ... erant-du-perou-video.html Pizarre


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Posté le : 16/11/2014 17:36

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Le 9 Novembre 1989 tombe "le mur de la honte "

Le mur de Berlin qui divise l'Allemagne en deux, produit de la guerre froide et symbole du partage du monde en deux blocs depuis sa construction en août 1961, le Mur de Berlin cesse d'être une frontière étanche entre les parties Est et Ouest de la ville au soir du 9 novembre 1989. La chute du Mur intervient au terme de gigantesques manifestations populaires, durant lesquelles des millions de citoyens est-allemands ont protesté contre l'immobilisme du régime communiste et réclamé le droit de passer librement à l'Ouest. Célébrées dans la liesse, les retrouvailles entre Berlinois de l'Est et de l'Ouest procèdent du vent de démocratisation que Mikhaïl Gorbatchev fait souffler sur le bloc de l'Est depuis 1985, et notamment de l'invitation à de profondes réformes lancée le 7 octobre 1989 à l'occasion du quarantième anniversaire de naissance de la R.D.A..

Au-delà de la portée symbolique de l'événement, la destruction du Mur ouvre la voie à la réunification de l'Allemagne et, à terme, à l'effondrement du bloc communiste : après la signature en mai 1990 d'un premier traité prévoyant une union économique et monétaire entre la R.F.A. et la R.D.A., la réunion des deux Allemagnes est officialisée le 3 octobre de la même année. Débarrassée du mur de la honte, la ville de Berlin redevient la capitale de l'Allemagne unie.
L'URSS ne s'y opposa pas, acceptant ainsi la perte du contrôle qu'elle exerçait sur cette partie de l'Europe. Initiés par la Pologne victoire de Solidarité aux élections de juin, poursuivis par la Hongrie, qui ouvrit le rideau de fer en mai, par la RDA, démantèlement du mur de Berlin en novembre et par la Tchécoslovaquie, les mouvements de contestation des régimes en place et de lutte pour l'instauration de la démocratie furent dans l'ensemble pacifiques. Des évolutions plus confuses conduisirent au renversement des gouvernements communistes de Bulgarie et de Roumanie.
Le mur de Berlin en allemand Berliner Mauer, mur de la honte pour les Allemands de l'ouest et mur de protection antifasciste d'après la propagande est-allemande, est érigé en plein Berlin à partir de la nuit du 12 au 13 août 1961 par la République démocratique allemande RDA, qui tente ainsi de mettre fin à l'exode croissant de ses habitants vers la République fédérale d'Allemagne RFA. Le mur, composante de la frontière intérieure allemande, sépare physiquement la ville en Berlin-Est et Berlin-Ouest pendant plus de vingt-huit ans, et constitue le symbole le plus marquant d'une Europe divisée par le Rideau de fer. Plus qu'un simple mur, il s'agit d'un dispositif militaire complexe comportant deux murs de 3,6 mètres de haut avec chemin de ronde, 302 miradors et dispositifs d'alarme, 14 000 gardes, 600 chiens et des barbelés dressés vers le ciel. Un nombre indéterminé de personnes sont victimes des tentatives de franchissement du mur. Cependant, il apparait que les gardes-frontière est-allemands et les soldats soviétiques n'hésitent pas à tirer sur les fugitifs.

"J’aime tellement l’Allemagne que je préfère qu’il y en ait deux ", aurait écrit, au temps de la guerre froide, l’écrivain François Mauriac, si proche du général de Gaulle qu’il en exprimait souvent officieusement la pensée.
Vestige du mur de Berlin, 2004
L'affaiblissement de l'Union soviétique, la perestroïka conduite par Mikhaïl Gorbatchev, et la détermination des Allemands de l'Est qui organisent de grandes manifestations, provoquent le 9 novembre 1989 la chute du mur de la honte, suscitant l'admiration incrédule du Monde libre et ouvrant la voie à la réunification allemande. Presque totalement détruit, le Mur laisse cependant dans l'organisation urbaine de la capitale allemande des cicatrices qui ne sont toujours pas effacées aujourd'hui. Le mur de Berlin, symbole du clivage idéologique et politique de la guerre froide, a inspiré de nombreux livres et films. Aujourd'hui, plusieurs musées lui sont consacrés.

Histoire

Après sa capitulation le 8 mai 1945, l'Allemagne est divisée en trois, puis quatre zones d'occupation sous administrations soviétique, américaine, britannique et française, conformément à l'accord conclu à la conférence de Yalta. Berlin, la capitale du Troisième Reich, d'abord totalement occupée par l'Armée rouge doit également être partagée en quatre secteurs répartis entre les alliés. Les Soviétiques laissent alors aux Occidentaux les districts ouest de la ville qui se retrouvent ainsi totalement enclavés dans leur zone d'occupation, le secteur resté sous contrôle soviétique représentant à lui seul 409 km2, soit 45,6 % de la superficie de la ville. La position et l'importance de Berlin en font un enjeu majeur de la guerre froide qui s'engage dès la fin des hostilités.

Événements en Allemagne

La coopération entre les quatre puissances occupantes de l'Allemagne prend fin en 1948 lorsque l’Union soviétique suspend sa participation au Conseil de contrôle allié et du commandement Interallié le 19 mars 1948. Les Soviétiques s'emploient dès lors à gêner les communications des Occidentaux avec Berlin-Ouest, sans doute pour les forcer à abandonner l'ancienne capitale du Reich. Du 24 juin 1948 au 12 mai 1949, Staline instaure le blocus de Berlin. Tous les transits terrestres et fluviaux entre Berlin-Ouest et l'Allemagne de l'Ouest sont coupés. Cet événement constitue la première crise majeure entre l'Union soviétique et les Occidentaux. Grâce à un gigantesque pont aérien organisé sous l'égide des États-Unis, Berlin-Ouest survit au blocus.
L'année 1949 voit la création de la République fédérale d'Allemagne RFA dans la trizone constituée par les zones française, britannique et américaine, suivie de près par celle de la République démocratique allemande RDA dans la zone sous occupation soviétique. La création de deux États consolide la division politique de Berlin. On commence alors des deux côtés à sécuriser et à fermer la frontière entre les deux États. Des douaniers et des soldats détachés à la surveillance frontalière patrouillent entre la RDA et la RFA ; de solides clôtures seront plus tard érigées du côté RDA.
Légalement, Berlin garde le statut de ville démilitarisée, absence de soldats allemands partagée en quatre secteurs, et indépendante des deux États que sont la RFA et RDA. En réalité, la portée pratique de cette indépendance est très limitée. En effet, le statut de Berlin-Ouest s'apparente à celui d'un Land, avec des représentants sans droit de vote au Bundestag, tandis que Berlin-Est devient, en violation de son statut, capitale de la RDA. La ville reste cependant le seul endroit où les Allemands de l'Est comme de l'Ouest peuvent transiter.
Le 27 novembre 1958, l'URSS tente un nouveau coup de force lors de l'ultimatum de Khrouchtchev proposant le départ des troupes occidentales dans les six mois pour faire de Berlin une ville libre démilitarisée. Les alliés occidentaux refusent.

Causes de la construction du mur de Berlin

Depuis sa création en 1949, la RDA subit un flot d'émigration croissant vers la RFA, particulièrement à Berlin. La frontière urbaine est difficilement contrôlable, contrairement aux zones rurales déjà très surveillées. Entre 2,6 et 3,6 millions d'Allemands fuient la RDA par Berlin entre 1949 et 1961, privant le pays d’une main-d'œuvre indispensable au moment de sa reconstruction et montrant à la face du monde leur faible adhésion au régime communiste. Émigrer ne pose pas de difficulté majeure car, jusqu’en août 1961, il suffit de prendre le métro ou le chemin de fer berlinois pour passer d'Est en Ouest, ce que font quotidiennement des Berlinois pour aller travailler. Les Allemands appellent cette migration de la RDA communiste à la RFA capitaliste : voter avec ses pieds. Pendant les deux premières semaines d'août 1961, riches en rumeurs, plus de 47 000 citoyens est-allemands passent en Allemagne de l'Ouest via Berlin. De plus, Berlin-Ouest joue aussi le rôle de porte vers l'Ouest pour de nombreux Tchèques et Polonais. Comme l'émigration concerne particulièrement les jeunes actifs, elle pose un problème économique majeur et menace l'existence même de la RDA.
En outre, environ 50 000 Berlinois sont des travailleurs frontaliers, travaillant à Berlin-Ouest mais habitant à Berlin-Est ou dans sa banlieue où le coût de la vie et de l'immobilier est plus favorable. Le 4 août 1961, un décret oblige les travailleurs frontaliers à s'enregistrer comme tels et à payer leurs loyers en Deutsche Mark monnaie de la RFA. Avant même la construction du Mur, la police de la RDA surveille intensivement aux points d'accès à Berlin-Ouest ceux qu'elle désigne comme contrebandiers ou déserteurs de la République.
Comme tous les pays communistes, la RDA s'est vu imposer une économie planifiée par Moscou. Le plan septennal 1959-1965 est un échec dès le début. La production industrielle augmente moins vite que prévu. En effet, les investissements sont insuffisants. La collectivisation des terres agricoles entraîne une baisse de la production et une pénurie alimentaire. Les salaires augmentent plus vite que prévu à cause d'un manque de main-d'œuvre provoqué en grande partie par les fuites à l'Ouest. Un important trafic de devises et de marchandises, néfaste à l'économie est-allemande, passe par Berlin. La RDA se trouve en 1961 au bord de l’effondrement économique et social.
L'auteur William Blum avance comme cause de la construction du Mur outre la captation de la main d'œuvre qualifiée de la RDA par l'Ouest, mais encore le terrorisme occidental qui aurait alors sévi en RDA.

La construction du Mur, le 20 novembre 1961

Le 13 août 1961, la construction du mur de Berlin commence. Des photos prises par des témoins montrent des hommes des groupes de combat de la classe ouvrière , Kampfgruppen der Arbeiterklasse, organisation paramilitaire est–allemande, sur le côté ouest de la Porte de Brandebourg qui se tiennent exactement sur la ligne de démarcation. Le programme de construction du Mur est un secret d'État du gouvernement est-allemand. Il commence dans la nuit du 12 au 13 août 1961 avec la pose de grillages et de barbelés autour de Berlin-Ouest.
Son édification est effectuée par des maçons, sous la protection et la surveillance de policiers et de soldats – en contradiction avec les assurances du président du Conseil d'État de la RDA, Walter Ulbricht, qui déclarait le 15 juin 1961 lors d'une conférence de presse internationale à Berlin-Est en réponse à une journaliste ouest-allemande : "Si je comprends bien votre question, il y a des gens en Allemagne de l'Ouest qui souhaitent que nous mobilisions les ouvriers du bâtiment de la capitale de la RDA pour ériger un mur, c'est cela ?"
"Je n'ai pas connaissance d'un tel projet ; car les maçons de la capitale sont principalement occupés à construire des logements et y consacrent toute leur force de travail. Personne n'a l'intention de construire un mur ! "
Ulbricht est ainsi le premier à employer le mot Mur, deux mois avant qu'il ne soit érigé.
Si les Alliés sont au courant d'un plan de mesures drastiques visant au verrouillage de Berlin-Ouest, ils se montrent cependant surpris par son calendrier et son ampleur. Comme leurs droits d'accès à Berlin-Ouest sont respectés, ils décident de ne pas intervenir militairement. Le BND, Services secrets de la RFA avait lui aussi reçu début juillet des informations semblables. Après la rencontre entre Ulbricht et Nikita Khrouchtchev lors du sommet des pays membres du Pacte de Varsovie, 3-5 août 1961, le BND note dans son rapport hebdomadaire du 9 août : Les informations disponibles montrent que le régime de Pankow s'efforce d'obtenir l'accord de Moscou pour l'entrée en vigueur de mesures rigoureuses de blocage ; en particulier le bouclage de la frontière de Berlin, avec interruption du trafic de métros et de tramways entre Berlin-Est et Berlin-Ouest. ... Il reste à voir si Ulbricht est capable de faire accepter de telles exigences par Moscou, et jusqu'où.
La déclaration publique du sommet du Pacte de Varsovie propose de contrecarrer à la frontière avec Berlin-Ouest les agissements nuisibles aux pays du camp socialiste et d'assurer autour de Berlin-Ouest une surveillance fiable et un contrôle efficace.
Le 11 août 1961, la Chambre du peuple Volkskammer, le parlement de la RDA, approuve la concertation avec Moscou et donne les pleins pouvoirs au conseil des ministres pour en assurer la réalisation. Ce dernier adopte le 12 août un décret dénonçant la politique d'agression impérialiste des Occidentaux à son encontre. Un contrôle très strict des frontières séparant Berlin-Ouest et Berlin-Est est instauré. Il décide de l'emploi des forces armées pour occuper la frontière avec Berlin-Ouest et y ériger un barrage.
Le samedi 12 août 1961, le BND reçoit l'information qu'une conférence a eu lieu à Berlin-Est au centre de décision du Parti communiste est-allemand SED en présence de hauts responsables du parti. On a pu y apprendre que … la situation d'émigration croissante de fugitifs rend nécessaire le bouclage du secteur d'occupation soviétique et de Berlin-Ouest dans les jours prochains — sans plus de précisions — et non dans deux semaines comme il était prévu initialement.
Dans la nuit du 12 au 13 août 1961, 14 500 membres des forces armées bloquent les rues et les voies ferrées menant à Berlin-Ouest. Des troupes soviétiques se tiennent prêtes au combat et se massent aux postes frontières des Alliés. Tous les moyens de transport entre les deux parties de la ville sont interrompus. En septembre 1961, des métros et des S-Bahn, réseau ferré de banlieue de Berlin-Ouest continueront à circuler sous Berlin-Est sans cependant s'y arrêter, les stations desservant le secteur oriental, qu'on appellera désormais les « stations fantômes ayant été fermées.
Erich Honecker, en tant que secrétaire du comité central du SED pour les questions de sécurité, assure la responsabilité politique de la planification et de la réalisation de la construction du Mur pour le parti, qu’il présente comme un mur de protection antifasciste. Les pays membres du pacte de Varsovie publient, le même jour, une déclaration pour soutenir le bouclage de la frontière entre les deux Berlin. Jusqu'en septembre 1961, la frontière reste franchissable et parmi les seules forces de surveillance, 85 hommes passent à l'Ouest — imités en cela par 400 civils, dont 216 réussissent. Les images du jeune douanier Conrad Schumann enjambant les barbelés, ainsi que de fugitifs descendant par une corde en draps de lit ou sautant par les fenêtres des immeubles situées à la frontière marquent les esprits.
La construction du Mur autour des trois secteurs de l'Ouest consiste tout d'abord en un rideau de fils de fer barbelés. Les pavés des axes de circulation entre les deux moitiés de la ville sont retournés afin d’interrompre immédiatement le trafic. Dans les semaines suivantes, il est complété par un mur de béton et de briques, puis muni de divers dispositifs de sécurité. Ce mur sépare physiquement la cité et entoure complètement la partie ouest de Berlin qui devient une enclave au milieu des pays de l'Est.

Les réactions à l'Ouest

Le chancelier fédéral Adenauer appelle le jour même la population de l'Ouest au calme et à la raison, évoquant sans plus de précisions les réactions qu'il s'apprête à prendre avec les Alliés. Il attend deux semaines après la construction du Mur avant de se rendre à Berlin-Ouest. Seul le maire de Berlin-Ouest Willy Brandt émet une protestation énergique – mais impuissante – contre l'emmurement de Berlin et sa coupure définitive en deux. Sa déclaration est sans ambiguïté : Sous le regard de la communauté mondiale des peuples, Berlin accuse les séparateurs de la ville, qui oppressent Berlin-Est et menacent Berlin-Ouest, de crime contre le droit international et contre l’humanité .... Le 16 août 1961, une manifestation de 300 000 personnes entoure Willy Brandt pour protester devant le Rathaus Schöneberg, siège du gouvernement de Berlin-Ouest.
Les Länder de la RFA fondent la même année à Salzgitter un centre de documentation judiciaire sur les violations des droits de l'homme perpétrées par la RDA, pour marquer symboliquement leur opposition à ce régime.
La réaction des Alliés tarde : il faut attendre vingt heures avant que les colonnes militaires ne se présentent à la frontière. Le 15 août 1961, les commandants des secteurs occidentaux de Berlin adressent à leur homologue soviétique une note de protestation contre l'édification du Mur. Des rumeurs incessantes circulent, selon lesquelles Moscou aurait assuré les Alliés de ne pas empiéter sur leurs droits à Berlin-Ouest. Le blocus de Berlin a effectivement montré aux yeux des Alliés que le statut de la ville était constamment menacé. La construction du Mur représente ainsi une confirmation matérielle du statu quo : l'Union soviétique abandonne son exigence d'un Berlin-Ouest libre déserté par les troupes alliées, tel qu'il avait encore été formulé en 1958 dans l'ultimatum de Khrouchtchev.
Les réactions internationales sont ambiguës. Dès le 13 août, Dean Rusk, secrétaire d'État américain, condamne la restriction de la liberté de déplacement des Berlinois. Les Alliés considèrent que l'URSS est à l'initiative de la construction du Mur entre sa zone d'occupation et celle des alliés comme l'indiquent les notes de protestation envoyées au gouvernement soviétique par les ambassadeurs américain et français. Cependant, Kennedy qualifie la construction du Mur de solution peu élégante, mais mille fois préférable à la guerre. Le Premier ministre britannique MacMillan n'y voit rien d'illégal. En effet, la mesure touche d'abord les Allemands de l'Est et ne remet pas en question l'équilibre géopolitique de l'Allemagne. Après une lettre que Willy Brandt lui a fait parvenir le 16 août, Kennedy affiche un soutien symbolique à la ville libre de Berlin-Ouest en y envoyant une unité supplémentaire de 1 500 soldats et fait reprendre du service au général Lucius D. Clay. Le 19 août 1961, Clay et le vice-président américain Lyndon B. Johnson se rendent à Berlin.
Le 27 octobre, on en vient à une confrontation visible et directe entre troupes américaines et soviétiques à Checkpoint Charlie. Des gardes-frontières de RDA exigent de contrôler des membres des forces alliées occidentales voulant se rendre en secteur soviétique. Cette exigence est contraire au droit de libre circulation, dont bénéficient tous les membres des forces d’occupation. Pendant trois jours, dix chars américains et dix chars soviétiques se postent de part et d'autre à proximité immédiate de Checkpoint Charlie. Les blindés se retirent finalement, aucune des deux parties ne voulant enclencher une escalade qui risquerait de se terminer en guerre nucléaire. La libre circulation par le poste-frontière Checkpoint Charlie est rétablie. Paradoxalement, cette situation explosive, aussi bien à Berlin que dans le reste de l'Europe, va déboucher sur la plus longue période de paix qu'ait connue l'Europe occidentale.

Un pays, deux État

Les ressortissants de Berlin-Ouest ne pouvaient déjà plus entrer librement en RDA depuis le 1er juin 1952. L'encerclement est rendu plus efficace par la diminution des points de passage : 69 points de passage sur les 81 existants sont fermés dès le 13 août. La porte de Brandebourg est fermée le 14 août et quatre autres le 23 août. Fin 1961, il ne reste plus que 7 points de passages entre l'Est et l'Ouest de Berlin. La Potsdamer Platz est coupée en deux. Le centre historique de la ville devient progressivement un grand vide sur la carte, composé du No man’s land entre les Murs de séparation à l’Est et d’un terrain vague à l’Ouest. Les conséquences économiques et sociales sont immédiates : 63 000 Berlinois de l'Est perdent leur emploi à l'Ouest, et 10 000 de l'Ouest perdent leur emploi à Berlin-Est2.
Le mur de Berlin est devenu dès sa construction le symbole de la guerre froide et de la séparation du monde en deux camps. Le 26 juin 1963, John Kennedy prononce à Berlin un discours historique. Il déclare Ich bin ein Berliner : je suis un Berlinois, marquant la solidarité du Monde libre pour les Berlinois. De plus, la construction du Mur donne une image très négative du bloc de l'Est et prouve de manière symbolique son échec économique face au bloc occidental. Le bloc soviétique s’apparente désormais à une vaste prison dans laquelle les dirigeants sont obligés d’enfermer des citoyens qui n’ont qu’une idée : fuir ! Le Mur est un aveu d’échec et une humiliation pour toute l’Europe orientale. Le Mur sape l'image du monde communiste.
Le 17 décembre 1963, après de longues négociations, le premier accord sur le règlement des visites de Berlinois de l'Ouest chez leurs parents de l'Est de la ville est signé. Il permet à 1,2 million de Berlinois de rendre visite à leurs parents dans la partie orientale de la ville mais seulement du 19 décembre 1963 au 5 janvier 1964. D'autres arrangements suivent en 1964, 1965 et 196615. Après l'accord quadripartite de 1971, le nombre des points de passage entre l'Est et l'Ouest est porté à dix. À partir du début des années 1970, la politique suivie par Willy Brandt et Erich Honecker de rapprochement entre la RDA et la RFA Ostpolitik rend la frontière entre les deux pays un peu plus perméable. La RDA simplifie les autorisations de voyage hors de la RDA, en particulier pour les improductifs comme les retraités, et autorise les visites de courte durée d'Allemands de l'Ouest dans les régions frontalières. Comme prix d'une plus grande liberté de circulation, la RDA exige la reconnaissance de son statut d'État souverain ainsi que l'extradition de ses citoyens ayant fui vers la RFA. Ces exigences se heurtent à la loi fondamentale de la RFA qui les rejette donc catégoriquement. Pour beaucoup d’Allemands, l’édification du Mur est, de fait, un déchirement et une humiliation qui accentuent les ressentiments de la partition. Une conséquence inattendue de la construction du Mur est de faire renaître dans le cœur des Allemands l’idée de la réunification.
Les deux parties de la ville connaissent des évolutions différentes. Berlin-Est, capitale de la RDA, se dote de bâtiments prestigieux autour de l'Alexanderplatz et de la Marx-Engels-Platz. Le centre Mitte de Berlin qui se trouve du côté Est perd son animation. En effet, l'entretien des bâtiments laisse à désirer surtout les magnifiques bâtiments situés sur l'île des musées, en particulier l'important musée de Pergame. Poursuivant le développement d'une économie socialiste, le régime inaugure en 1967, dans la zone industrielle d'Oberschöneweide, le premier combinat industriel de la RDA, le Kombinat VEB Kabelwerke Oberspree KWO dans la câblerie. En 1970, débute la construction d'immeubles de 11 à 25 étages dans la Leipzigerstrasse qui défigurent l'espace urbain. La propagande de la RDA désigne le Mur ainsi que toutes les défenses frontalières avec la RFA comme un mur de protection antifasciste protégeant la RDA contre l'émigration, le noyautage, l'espionnage, le sabotage, la contrebande et l'agression en provenance de l'Ouest. En réalité, les systèmes de défense de la RDA se dressent principalement contre ses propres citoyens.
Berlin-Ouest devient vite la vitrine de l’Occident. La réforme monétaire met fin à la pénurie et la reconstruction est bien plus rapide qu’à l’Est. Potsdamer Platz reste un lieu de souvenir. Une plate-forme panoramique permet de regarder par-dessus le Mur. Elle attire les visiteurs au cours des années 1970 et 1980. La partition fragilise cependant l'économie du secteur ouest. En effet, les industriels doivent exporter leur production en dehors de la RDA. De plus, pour éviter l'espionnage industriel, les industries de pointe s'implantent rarement à Berlin-Ouest. La partie ouest se singularise à partir de 1967 par son mouvement étudiant, point de mire de l'opinion publique. En effet, la ville est traditionnellement une ville universitaire. La vie culturelle y est très développée.
Le 12 juin 1987, à l'occasion des festivités commémorant les 750 ans de la ville, le président américain Ronald Reagan prononce devant la porte de Brandebourg un discours resté dans les mémoires sous le nom de Tear down this wall!. Il s'agit d'un défi lancé à Gorbatchev, lequel est apostrophé à plusieurs reprises dans le discours.

La chute du Mur

En 1989, la situation géopolitique change. Les Soviétiques annoncent leur retrait d'Afghanistan sans victoire. Au printemps, la Hongrie ouvre son rideau de fer. En août, Tadeusz Mazowiecki, membre de Solidarność, devient Premier ministre de Pologne. Certains observateurs pensent qu'une contagion de liberté va gagner aussi les Allemands. À la fin de l'été, les Allemands de l'Est se mettent à quitter le pays par centaines, puis par milliers, sous prétexte de vacances en Hongrie, où les frontières sont ouvertes. En trois semaines, 25 000 citoyens de la RDA rejoignent la RFA via la Hongrie et l'Autriche. À Prague, à Varsovie, des dizaines de milliers d'Allemands de l'Est font le siège de l'ambassade de RFA. En RDA, la contestation enfle. Les églises protestantes, comme celle de Saint Nikolai à Leipzig, accueillent les prières pour la paix. Elles sont le germe des manifestations du lundi à partir de septembre. 20 000 manifestants défilent dans les rues de Leipzig le 3 octobre 1989. Mikhaïl Gorbatchev, venu à Berlin-Est célébrer le quarantième anniversaire de la naissance de la RDA, indique à ses dirigeants que le recours à la répression armée est à exclure. Malgré une tentative de reprise en main par des rénovateurs du Parti communiste, les manifestations continuent : un million de manifestants à Berlin-Est le 4 novembre, des centaines de milliers dans les autres grandes villes de la RDA.
Cinq jours plus tard, une conférence de presse est tenue par Günter Schabowski, secrétaire du Comité central chargé des médias en RDA, membre du bureau politique du SED, retransmise en direct par la télévision du centre de presse de Berlin-Est, à une heure de grande écoute. À 18h57, vers la fin de la conférence, Schabowski lit de manière plutôt détachée une décision du conseil des ministres sur une nouvelle réglementation des voyages, dont il s'avère plus tard qu'elle n'était pas encore définitivement approuvée, ou, selon d'autres sources, ne devait être communiquée à la presse qu'à partir de 4h le lendemain matin, le temps d'informer les organismes concernés :
Présents sur le podium à côté de Schabowski : les membres du comité central du SED : Helga Labs, Gerhard Beil et Manfred Banaschak.
Schabowski lit un projet de décision du conseil des ministres qu'on a placé devant lui :
-"Les voyages privés vers l'étranger peuvent être autorisés sans présentation de justificatifs — motif du voyage ou lien de famille. Les autorisations seront délivrées sans retard. Une circulaire en ce sens va être bientôt diffusée. Les départements de la police populaire responsables des visas et de l'enregistrement du domicile sont mandatés pour accorder sans délai des autorisations permanentes de voyage, sans que les conditions actuellement en vigueur n'aient à être remplies. Les voyages y compris à durée permanente peuvent se faire à tout poste frontière avec la RFA."
-"Quand ceci entre-t-il en vigueur ? " demande alors un journaliste
-" Hum ..;Autant que je sache — immédiatement." répond Schabowski hésitant et feuilletant dans ses notes
Immédiatement la pressse s"empare de la nouvelle et l'a diffuse en masse, un flot d'informations tombent dans tous les médias, les annonces des radios et télévisions de la RFA et de Berlin-Ouest, intitulées : Le Mur est ouvert !, résonnent partout et dans les minutes qui suvent dans l'heure qui suit, plusieurs milliers de Berlinois de l'Est se pressent aux points de passage et exigent de passer. À ce moment, ni les troupes frontalières, ni même les fonctionnaires du ministère chargé de la Sécurité d'État responsables du contrôle des visas n'avaient été informés. Sans ordre concret ni consigne mais sous la pression de la foule, le point de passage de la Bornholmer Straße est ouvert peu après 23 h, suivi d'autres points de passage tant à Berlin qu'à la frontière avec la RFA. Beaucoup assistent en direct à la télévision à cette nuit du 9 novembre et se mettent en chemin. C'est ainsi que le mur tombe dans la nuit du jeudi 9 au vendredi 10 novembre 1989, démantelé par les Berlinois; après plus de 28 années d'existence. Cet événement a été appelé dans l'histoire de l'Allemagne die Wende le tournant.
Cependant le véritable rush a lieu le lendemain matin, beaucoup s'étant couchés trop tôt cette nuit-là pour assister à l'ouverture de la frontière. Ce jour-là, d'immenses colonnes de ressortissants est-allemands et de voitures se dirigent vers Berlin-Ouest. Les citoyens de la RDA sont accueillis à bras ouverts par la population de Berlin-Ouest. Un concert de klaxons résonne dans Berlin et des inconnus tombent dans les bras les uns des autres. Dans l'euphorie de cette nuit, de nombreux Ouest-Berlinois escaladent le Mur et se massent près de la porte de Brandebourg accessible à tous, alors qu'on ne pouvait l'atteindre auparavant. Une impressionnante marée humaine sonne ainsi le glas de la guerre froide. En apprenant la nouvelle de l'ouverture du Mur, le Bundestag interrompt sa séance à Bonn et les députés entonnent spontanément l'hymne national.
Présent à Berlin, le violoncelliste virtuose Mstislav Rostropovitch, qui avait dû s'exiler à l'Ouest pour ses prises de position en URSS, vient encourager les démolisseurs, en allemand Mauerspechte, en français "piverts du mur" en jouant du violoncelle au pied du Mur le 11 novembre. Cet événement, largement médiatisé, deviendra célèbre et sera l'un des symboles de la chute du bloc de l'Est.
Le 9 novembre a été évoqué pour devenir la fête nationale de l'Allemagne, d'autant qu'elle célèbre également la proclamation de la République en 1918, dans le cadre de la Révolution allemande de novembre 1918. Toutefois, c'est aussi la date anniversaire du putsch de la Brasserie mené par Adolf Hitler le 9 novembre 1923, ainsi que celle de la nuit de Cristal, le pogrom antijuif commis par les nazis le 9 novembre 1938. Le 3 octobre, jour de la réunification des deux Allemagne lui a donc été préféré.

Chronologie des jours précédant la chute du mur

7 octobre : le gouvernement est-allemand célèbre le 40e anniversaire de la RDA sur fond de manifestations. À Berlin-Est, les manifestants lancent un appel à l'hôte d'honneur de la commémoration, le dirigeant de l'Union soviétique Mikhaïl Gorbatchev : Gorbi, Gorbi, hilf uns Gorbi, Gorbi, aide-nous. À Potsdam et à Karl-Marx-Stadt (aujourd'hui Chemnitz, les forces de l'ordre interviennent avec violence contre les manifestations.
16 octobre : la télévision est-allemande évoque pour la première fois les manifestations.
18 octobre : le chef d'État est-allemand, Erich Honecker démissionne pour raison de santé. Egon Krenz lui succède et prononce pour la première fois le terme de Wende, changement.
21 octobre : les manifestations touchent l'ensemble du pays. La police intervient avec une rare violence.
24 octobre : le parlement confirme la position d'Egon Krenz comme chef de l'État. Aussitôt des manifestants expriment partout leur opposition à Krenz et aux anciens partis politiques, le CDU chrétien-démocrate, le DBD des paysans, le DPD libéral, qui règnent aux côtés du SED.
27 octobre : les 2 000 prisonniers condamnés pour avoir tenté de quitter le pays sont relâchés.
29 octobre : la police présente ses excuses pour son intervention brutale. La télévision de la RDA promet de diffuser désormais des informations correctes.
31 octobre : Margot Honecker, l'épouse de l'ancien chef d'État, démissionne de son poste de ministre de l'Enseignement.
4 novembre : par heure, 300 personnes fuient la RDA via la Hongrie et la Tchécoslovaquie. En RDA, un million de personnes descendent dans la rue, dont la moitié à Berlin-Est.
6 novembre : célébration du 72e anniversaire de la Révolution d'Octobre. Des artistes appellent la population à manifester en masse.
8 novembre : la direction du Parti socialiste unifié d'Allemagne SED démissionne collectivement. Neues Forum, une coalition des mouvements de résistance, est reconnu comme nouveau parti politique.
9 novembre : Günter Schabowski, membre du Politburo du SED, réputé réformateur, annonce lors d'une conférence de presse que tous les citoyens de la RDA peuvent quitter le pays. Nombre de Berlinois suivent cette déclaration à la télévision et se ruent aussitôt vers les postes frontières. Dépassés, les gardes-frontières pratiquent des ouvertures dans le mur de Berlin.
Réactions à la chute du mur de Berlin
Le partage de l'Europe en deux blocs était devenu un fait établi. Aussi, l'ouverture du Mur et la chute des régimes communistes d'Europe centrale qui s'ensuivit ont stupéfié le monde occidental. Peu de spécialistes avaient compris les mouvements de fond qui laminaient les régimes communistes. Seuls, certains observateurs pensaient qu'une contagion de la liberté, après les changements en Pologne et en Hongrie, allait gagner aussi les Allemands.
Le délitement du régime est-allemand est tel que, très vite pour le chancelier Helmut Kohl, la seule solution qui s'impose, c'est la réunification, c'est-à-dire l'absorption de la RDA par la RFA. Dès le 28 novembre, il présente un plan en dix points pour réunifier les deux Allemagne. Soucieux de stopper le flot migratoire de la RDA vers la RFA, de ne pas laisser le temps aux vainqueurs de 1945 de demander des conditions trop strictes, il veut mener l'affaire le plus vite possible. La paix qui n'avait jamais été signée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale l’est le 12 septembre 1990 à Moscou. Le traité de Moscou rend à l'Allemagne sa pleine souveraineté. La chute du mur de Berlin a donc abouti, presque un an plus tard, à la réunification des deux Allemagne RFA et RDA le 3 octobre 1990. Le 3 octobre est aujourd'hui la fête nationale allemande Tag der Deutschen Einheit, jour de l'unité allemande.
Les télévisions du monde entier relaient l'événement extraordinaire qu'est l'ouverture du Mur. Elles le décrivent comme un symbole de paix, de retour à la liberté et de communion du peuple allemand. Les diplomates eux évaluent les conséquences de la chute du Mur. La diplomatie française fait une erreur de jugement importante. Les diplomates et responsables politiques français pensent que l'URSS ne laissera pas la RDA s'unir à la RFA. Ainsi, François Mitterrand effectuant une visite officielle en RDA, du 20 au 22 décembre 1989, déclara même au cours d'un dîner officiel : République démocratique d'Allemagne et France, nous avons encore beaucoup à faire ensemble. Les dirigeants ouest-allemands sont surpris et déçus de l'attitude de la France. La réaction américaine est totalement différente. L'ambassadeur américain à Bonn, Vernon Walters, comprend immédiatement que la chute du Mur ne peut avoir pour seule conséquence que la réunification. Il parvient à convaincre George Bush que l'intérêt des États-Unis est d'accompagner le mouvement pour obtenir des conditions qui leur conviennent plutôt que de s'opposer à la réunification allemande. Helmut Kohl a mené une politique de rapprochement avec l'URSS de Gorbatchev depuis 1988. Le premier secrétaire du parti communiste soviétique prône un rapprochement entre les deux Allemagne mais il ne songe pas à une réunification. Aussi, l'ouverture du mur de Berlin provoque-t-elle son mécontentement. Moyennant quelques concessions à l’URSS et un crédit de cinq milliards de marks, Helmut Kohl arrive à ses fins.
La seconde conséquence de l'ouverture du Mur est la désagrégation de l’empire soviétique. À Prague, la Révolution de Velours, 17-18 novembre 1989 met fin au communisme. Au même moment, en Bulgarie, le stalinien Todor Jivkov doit accepter son remplacement par un communiste plus ouvert, Petar Mladenov. En Roumanie, Nicolae Ceaușescu est éliminé plus violemment lors de la révolution de 1989. En Union soviétique, les États baltes proclament leur indépendance en mars et mai 1990, provoquant ainsi les premières brèches qui allaient remettre en cause l'unité et l'existence même du plus vaste état du monde qu'était alors l'URSS, lequel disparut à son tour 18 mois plus tard le 26 décembre 1991. La destruction du Mur signifie la fin d'une Europe coupée en deux.

Conséquences à plus long terme

À la suite de la chute du mur de Berlin, plusieurs pays anciennement communistes d'Europe de l'Est ont adhéré à l'Union européenne : Pologne, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Lituanie, Lettonie et Estonie en 2004, Roumanie et Bulgarie en 2007

Structure du Mur de Berlin.

Le Mur, long de 155 kilomètres, dont 43,1 km sur sa longueur intraberlinoise venait en complément des 1 393 kilomètres de la longue frontière RFA-RDA et, dans une moindre mesure, des frontières Ouest des pays du Pacte de Varsovie, le tout donnant un visage palpable au fameux rideau de fer.
Le tracé du mur ne correspondait d'ailleurs pas toujours à celui de la frontière politique entre les deux secteurs, et en de nombreux endroits, les autorités est-allemandes durent abandonner du terrain afin d'effectuer un replis stratégique vers des zones plus faciles à surveiller. Il coupait 193 rues principales et adjacentes.
Comme le reste de la frontière des deux Allemagne, le mur de Berlin était pourvu d'un système très complet de fils de fer barbelés, de fossés, de pièges à tank, de chemins de ronde et de miradors. Au début des années 1980, la frontière ne mobilisait pas moins de mille chiens de garde. Le système se perfectionnait d'année en année. En particulier, les maisons du secteur Est proches du Mur, la limite entre les deux Berlin passait parfois au pied des façades des immeubles situés en secteur oriental, étaient progressivement vidées de leurs habitants puis murées. Ce processus dura jusqu'au 28 janvier 1985, avec la démolition de l'Église de la Réconciliation dans le
Bernauer Straße. Une trouée claire comme le jour divise alors un Berlin autrefois dense et sombre.
Dans leur état final, qui ne vit le jour à bien des endroits qu'à la fin des années 1980, les installations frontalières consistaient en :
un mur de béton d'arrière-plan haut de deux ou trois mètres ;
une alarme à détection de contact au sol ;
une barrière de contact en tôle métallique, plus haute qu'un homme, tendue de fil de fer barbelé et de fils de détection par contact.
jusqu'à l'ouverture de la frontière en 1989, il y avait en outre sur certaines parties des pistes pour chiens redoutables bergers et similaires, libres de courir attachés à un filin, des fossés de défense contre les véhicules, et des défenses antichar chevaux de frise en rails soudés en croix, qui coûtèrent à l'Allemagne des milliards de marks pour leur démolition
un chemin de ronde éclairé de nuit pour l'accès aux postes de garde et la circulation des colonnes militaires ;
des miradors en tout 302 en 1989, équipés de projecteurs de recherche, en vue des postes frontières le jour, et avec un renfort de soldats la nuit ;
des pistes de contrôle KS ou pistes de la mort, toujours hersées de frais, pour détecter les traces, et qui ne devaient pas être piétinées sans motif par les soldats ;
des barrières de tôle supplémentaires en partie dépassant la hauteur d'un homme et à travers lesquelles on ne pouvait voir qu'en oblique ;
le mur ou la paroi frontière proprement dite, vers Berlin-Ouest, en parpaings en partie en béton roulé, censé ne pas donner de prise pour l'escalade, de 3,60 mètres de haut ;
par devant, encore quelques mètres du territoire sous l'autorité de la RDA.
La largeur totale de ces installations dépendait de la densité des maisons près de la frontière et allait environ de 30 à 500 mètres sur la Potsdamer Platz. On ne construisit pas de champs de mines ni d'installations de tir automatique au voisinage du Mur contrairement à la frontière allemande intérieure mais ce point ne fut pas connu en général en RDA.
Le détail de ces installations – désignées en interne par les troupes frontalières comme zone d'action – était placé sous secret militaire et donc mal connu des citoyens de la RDA. Les soldats détachés à la frontière devaient garder le silence. Comme nul ne savait exactement quel espion de la Stasi pouvait faire un rapport sur un bavardage inconséquent, tous s'astreignaient fermement au silence. Quiconque s'intéressait de trop près aux installations frontalières risquait pour le moins d'être arrêté et mené au poste de police pour contrôle d'identité. Cela pouvait déboucher sur une condamnation à la prison pour planification de tentative d'évasion. La zone à proximité immédiate de la frontière avec Berlin-Est était interdite sauf sur autorisation spéciale.

Les frontières aquatiques

La frontière extérieure de la ville de Berlin-Ouest croisait à de nombreux endroits des voies navigables. Le tracé de la frontière avait été matérialisé par le Sénat de Berlin-Ouest gouvernement berlinois par des lignes de bouées blanches portant l'inscription Sektorengrenze, limite de secteur. Les bateaux de tourisme ou de sport naviguant dans Berlin-Ouest devaient respecter les limites du secteur ainsi marquées par les bouées. Du côté RDA, des bateaux des troupes frontalières patrouillaient à l'occasion.
Les fortifications frontalières de la RDA se trouvaient toujours sur leurs rives, ce qui imposait des détours parfois importants, et qui emmurait les rivages de plusieurs lacs de la Havel. Cette aberration était telle qu'en certains endroits du cours de la Spree, seules les rives étaient inaccessibles : ce fut le cas, des 150 mètres situés en aval du Marschallbrücke, non loin du palais du Reichstag. Le plus grand détour se trouvait sur le lac Jungfern, où le Mur se trouvait jusqu'à deux kilomètres du tracé réel de la frontière. En plusieurs endroits, la bande frontalière passait à travers d'anciennes pièces d'eau et les rendait inutilisables pour les habitants, comme sur la rive ouest du lac de Groß-Glienicke et sur la rive Sud du lac Griebnitz.
Sur les cours d'eau de la frontière intérieure, celle-ci passait partout le long de la rive ouest ou est de sorte qu'aucun marquage de son tracé ne se trouvait dans l'eau. Le véritable Mur y était toujours sur la rive est. Cependant, les cours d'eau appartenant à Berlin-Est étaient toujours surveillés.
Sur les canaux et rivières affluents, la situation devenait parfois inextricable. Bien des nageurs et des bateaux de Berlin-Ouest se sont trouvés par mégarde ou légèreté en territoire est-berlinois et ont essuyé des tirs qui ont fait plusieurs morts.
En quelques endroits sur la Spree, il y avait des barrières immergées contre les nageurs. Pour les fugitifs, il n'était pas évident de savoir quand ils atteignaient Berlin-Ouest et ils couraient encore le risque d'être abattus après avoir dépassé les limites du Mur.

Formation et équipement des gardes-frontières

Les soldats à la frontière est-allemande avaient l'ordre de tirer, c'est-à-dire l'obligation d'empêcher les tentatives d'évasion par tous les moyens, même au risque de la mort du fugitif. Ramenés à la longueur de la frontière, on peut même dire qu'il y eut beaucoup plus de morts à Berlin qu'en moyenne sur le reste du Mur. Lors des grands jours fériés ou de visites d'État, l'ordre de tirer était parfois suspendu, pour éviter les répercussions négatives dans la presse de l'Ouest. Des découvertes récentes ont mis en lumière la responsabilité de l'État est-allemand dans les exécutions de fugitifs. En octobre 1973, un ordre est adressé aux agents de la Stasi infiltrés dans les unités de gardes-frontières. Ceux-ci doivent empêcher que des soldats ne passent à l'Ouest. L'ordre est très clair : N'hésitez pas à faire usage de votre arme, même si la violation de la frontière concerne des femmes et des enfants, ce qui est une stratégie souvent utilisée par les traîtres.
Selon les indications du Ministère de la Sécurité d'État, les troupes de gardes-frontières de Berlin comprenaient, 11 500 soldats et 500 civils, au printemps 1989.
Outre les unités affectées au commandement du GK-centre, au siège de Berlin-Karlshorst, environ 1 000 agents, la sécurité frontalière était assurée par sept régiments de gardes-frontières GR, à Treptow, Pankow, Rummelsburg, Hennigsdorf, Groß-Glienicke, Potsdam-Babelsberg et Kleinmachnow, ainsi que deux régiments frontaliers de formation à Wilhelmshagen et à Oranienburg.
Chaque régiment comprenait cinq compagnies commandées directement avec le support d'un groupe de génie, de transmissions, du train, une batterie de mortiers et une d'artillerie, un groupe de reconnaissance et un de lance-flammes ainsi qu'une meute de chiens de garde et, en cas de besoin, une compagnie de bateaux et des compagnies de sécurité pour les points de passage.
Au total, à la frontière centre, il y avait 567 véhicules blindés de tir, 48 mortiers, 48 canons antichars, 114 lance-flammes. En outre, il y avait 156 chars ou appareils lourds du génie et 2 295 véhicules à moteur motos, voitures et camions. Dans la dotation figuraient également 992 chiens.
Dans un jour calendaire normal, environ 2 300 agents étaient engagés dans la zone d'action et l'espace voisin.
La sécurité renforcée découlait de circonstances particulières comme des sommets politiques ou une météo difficile brouillard, neige. Dans certains cas, l'effectif engagé était encore augmenté de 200 à 300 agents supplémentaires.

Points de passage Poste frontière de Berlin.

Il y avait 25 postes de passage à travers le Mur : treize par la route, quatre par voie ferrée et huit par voie d'eau, ce qui représentait 60 % du total des passages entre RDA, et RFA ou Berlin-Ouest. Les points de passage étaient fortement équipés du côté RDA. Ceux qui désiraient passer devaient s'attendre à des contrôles très stricts, multiples et successifs de la part des douaniers et des services d'émigration et d'immigration ; cependant les formalités se déroulaient de façon ostensiblement correcte. Les véhicules étaient fouillés de manière particulièrement minutieuse ouverture du coffre, du capot moteur, examen des sièges, passage au-dessus de miroir pour examen du châssis. Les formalités ne permettaient qu'un trafic très réduit.
Le transit par moyens de transports terrestres entre l'Allemagne de l'Ouest et Berlin-Ouest à travers le territoire de la RDA était également soumis à des restrictions draconiennes :
Le transit ferroviaire imposait aux trains venant de l’Ouest et circulant sur trois axes pré-définis de ne pas s’arrêter en territoire est-allemand.
Le transit routier se faisait par trois autoroutes de transit, sur lesquelles les conducteurs occidentaux ne pouvaient s’arrêter que sur des aires de repos ou des stations-services Intertank réparties sur ces axes et qui leur étaient spécialement réservées, l’auto-stop étant également formellement interdit. Celles-ci étaient équipés de magasins d’États Intershop qui offraient des produits occidentaux payables en Deutsche Mark, ces endroits étaient donc théoriquement interdits aux Allemands de l’Est.
Les rapports entre citoyens de la RDA et les voyageurs occidentaux en transit furent prohibés. Il était donc fortement déconseillé de laisser traîner dans les lieux publics toutes sortes de publication, livres, brochures, revues, magazines, cassettes audio ou vidéo, etc., ainsi que d’offrir le moindre cadeau à un citoyen est-allemand ou de recevoir quoi que ce soit de leur part.
De plus, il était formellement interdit aux voyageurs en transit de photographier les ponts, les gares, les voies ferrées, les zones industrielles et infrastructures militaires ou paramilitaires situés sur le territoires de la RDA.
Malgré toutes ces précautions, il s'avéra par la suite qu'il existait cependant des passages secrets sous le Mur, utilisés à l'occasion, souterrains creusés aussi bien par les services secrets de RDA que par des passeurs.
Du côté Ouest, on franchissait des postes de police et de douane mais les simples personnes n'étaient en général pas contrôlées. Ce n'est que pour les passages en transit que les voyageurs étaient contrôlés de façon statistique demande de la destination, et à l'occasion, contrôlés plus étroitement, notamment s'il y avait quelque soupçon d'un motif de poursuites recherche restreinte.
Le trafic de marchandises vers l'étranger était soumis au contrôle douanier, tandis que vers la RFA, on ne faisait que des enquêtes statistiques. Les policiers ouest-allemands et des patrouilles alliées faisaient des rapports sur les activités suspectes, afin d'éviter au mieux une infiltration d'espions de l'Est.
Les forces d'occupation alliées avaient installé pour les officiels des points de contrôle au Checkpoint Bravo Dreilinden et au Checkpoint Charlie Friedrichstrasse mais ceci n'avait aucune influence sur le trafic des voyageurs et des visiteurs.
Lors de l'unification monétaire de l'Allemagne, le 1er juillet 1990, tous les postes frontières furent abandonnés : seules quelques installations restèrent érigées en guise de mémorial.

Victimes et tireurs Un nombre de victimes incertain

Le nombre exact des victimes du Mur fait l'objet de controverses : il est en effet difficile à évaluer car les nouvelles victimes étaient passées sous silence en RDA. D'après des recherches de la collectivité berlinoise de travailleurs Collectif du 13 août, 1 135 personnes y ont laissé la vie. La Staatsanwaltschaft, bureau du Procureur général de Berlin en a dénombré 270 où on a pu démontrer un acte de violence de la RDA. Le Zentrale Ermittlungsgruppe für Regierungs- und Vereinigungskriminalität, Groupe de recherches central sur la criminalité du gouvernement et de la réunification ne recense que 421 morts susceptibles d'être imputées aux forces armées de la RDA. D'autres sources indiquent 125 morts à Berlin.
Dans le Mauer Park, ensemble commémoratif, un panneau recense 136 morts : 98 fugitifs, 8 autres Allemands de l'Est, 22 Allemands de l'Ouest et 8 soldats. 42 sont des enfants ou adolescents.
Les premières balles mortelles sont tirées par la police de la route le 24 août 1961 sur Günter Litfin 24 ans près de la gare de Friedrichstraße, onze jours après la fermeture de la frontière, au cours d'une tentative d'évasion. Le 17 août 1962, Peter Fechter 18 ans perd tout son sang sur la piste de la mort. En 1966, deux enfants de 10 et 13 ans sont abattus par au total quarante balles.
Chris Gueffroy est la dernière victime du Mur le 5 février 1989.
Des estimations parlent de 75 000 hommes et femmes condamnés jusqu'à deux ans de prison en tant que déserteurs de la république. La peine dépassait en général cinq ans si le fugitif dégradait les installations frontalières, était armé, soldat ou détenteur de secrets.
Parmi les victimes du Mur figurent aussi quelques soldats. Le cas le plus connu est sans doute celui du soldat Reinhold Huhn, abattu par un passeur.

Le procès des soldats-tireurs

Une série de procès a duré jusqu'au printemps 2004 pour savoir qui portait la responsabilité juridique d'avoir donné l'ordre de tirer sur les fugitifs. Parmi les accusés figuraient entre autres le président du Conseil d'État Erich Honecker, son successeur Egon Krenz, les membres du Conseil national de défense Erich Mielke, Willi Stoph, Heinz Keßler, Fritz Streletz et Hans Albrecht, le chef du SED pour le district de Suhl et quelques généraux comme Klaus-Dieter Baumgarten, général de corps d'armée commandant les troupes frontalières de 1979 à 1990. Ce procès a suscité une vive controverse en Allemagne, bon nombre d'accusés faisant valoir que leurs actes, à l'époque, ne constituaient pas des crimes au regard du droit est-allemand. Ils accusent les tribunaux actuels de pratiquer la justice des vainqueurs.
Les tireurs exécutants étaient recrutés en grande partie dans la NVA Armée nationale populaire ou dans les troupes frontalières. Parmi les accusés, 35 furent acquittés, 44 condamnés avec sursis et mise à l'épreuve et 11 à une peine ferme : entre autres Albrecht, Streletz, Keßler et Baumgarten, de quatre ans et demi à six ans et demi de prison. Le dernier dirigeant communiste de la RDA, Egon Krenz, a été condamné en 1997 à une peine de six ans et demi de prison pour la mort de quatre personnes le long du mur de Berlin dans les années 1980. En août 2004, le tribunal de Berlin condamne deux ex-membres du Politbüro avec sursis et mise à l'épreuve. Le dernier procès des tireurs du Mur se termine par une condamnation le 9 novembre 2004, quinze ans jour pour jour après la chute du mur de Berlin.

Le Mur aujourd'hui

En souvenir des victimes du mur de Berlin, divers mémoriaux de types très différents ont été construits. Outre les petites croix ou autres signes, avant tout érigées en mémoire de fugitifs abattus, souvent d'initiative privée, et que l'on trouve en divers endroits de l'ex-frontière, un ensemble de lieux de souvenir plus importants a été créé.
Il y a toujours eu des controverses sur le style des monuments, comme à la fin des années 1990 à propos du mémorial de la Bernauerstraße. Pour l'instant, le paroxysme des débats publics a été atteint à propos du monument de la Liberté, construit à proximité du Checkpoint Charlie, puis démoli. Le sénat de Berlin, pour contrer le reproche qui lui était fait de ne pas avoir de politique précise, proposa une politique au printemps 2005.
Le tracé historique du mur de Berlin est marqué au sol par une double rangée de pavés et des plaques en fonte portant l’inscription Berliner Mauer 1961-1989. Il existe un parcours historique du Mur de 29 étapes avec des illustrations et des explications en quatre langues sur les événements qui s’y sont déroulés.

Le musée du Mur au Checkpoint Charlie

Le musée du Mur au Checkpoint Charlie est ouvert depuis 1963 juste en face de la frontière par l'historien Rainer Hildebrandt. Il est exploité par le Collectif du 13 août. C'est l'un des musées de Berlin les plus visités. Il montre le système de sécurité du Mur et relate les tentatives de fuite réussies, avec leurs moyens tels que montgolfières, autos, téléphériques, ULM bricolé, coffre de voiture, valise et même un mini sous-marin. Le musée du Mur de Checkpoint Charlie est un musée privé, il n'est soumis à aucun contrôle officiel, il s'agit donc de faire attention aux informations qu'on y trouve. Checkpoint Charlie est devenu, lui, un lieu folklorique. Le célèbre panneau qui y figurait - You are leaving the American sector, vous quittez le secteur américain est représenté sur d’innombrables cartes postales.

Gedenkstätte Berliner Mauer.

Depuis la fin des années 1990, il y a dans la Bernauer Straße, à la limite des anciens districts de Wedding et du Centre, un ensemble mémorial du mur de Berlin, qui a entre autres permis de contrer le refus du projet de conservation du mur dans la Bernauerstraße. Il comprend le mémorial du mur de Berlin, le centre de documentation, la chapelle de la Réconciliation, divers mémoriaux commémoratifs de l'ancien cimetière de la Sophienkirchengemeinde, la fenêtre de souvenir, ainsi que des fenêtres archéologiques.
Le Mémorial issu d'un concours fédéral d'architecture a été inauguré, après de longues et vigoureuses discussions, le 13 août 1998. Il présente un fragment de 64 mètres de mur et de No Man's Land, délimités à leurs extrémités par deux immenses parois en acier, hautes de 6 mètres et implantées à angle droit. Leurs côtés extérieurs sont rouillés et créent l'association avec le rideau de fer. Leurs faces intérieures, qui forment un angle droit avec le mur, sont en acier inoxydable poli, ce qui en fait d'immenses miroirs, dans lesquels le mur se projette à l'infini.

Le centre de documentation fut ouvert le 9 novembre 1999. Il a été complété en 2003 par une tour d'observation qui permet de bien voir une portion du dispositif frontalier, conservé dans son intégralité, avec le mur d'arrière-plan, le No Man's Land, le chemin de ronde, les pylônes d'éclairage, la clôture de signalisation, puis le mur extérieur… Outre une exposition, ouverte depuis 2001 sous le titre Berlin, 13 août 1961, on peut y trouver diverses possibilités d'information sur l'histoire du Mur. La chapelle de la Réconciliation a été conçue par les architectes berlinois Peter Sassenroth et Rudolf Reitermann et inaugurée le 9 novembre 2000. Elle a été construite sur les fondations du chœur de l'église de la Réconciliation, située sur la piste de la mort et démolie en 1985. Cette église bâtie en 1894, devint inaccessible dès la séparation de Berlin, car elle se trouvait dans le No Man's Land. En 1985, le gouvernement est-allemand décida la destruction de l'édifice, puis, en 1995, après la chute du mur, l'emplacement fut rendu à la paroisse avec l'obligation d'y bâtir un nouveau lieu de culte. C'est ainsi que ce lieu de culte a connu la résurrection de son nom et d'une partie de son architecture: en effet, la paroi intérieure de la nouvelle chapelle en glaise pilonnée intègre des pierres concassées de l'ancienne église. Le noyau ovale de l'édifice est enveloppé d'une façade translucide en lamelles de bois.
La Fenêtre de Souvenir, achevée en 2010, est un élément central de ce secteur commémoratif pour les victimes du Mur de Berlin.
Les fenêtres archéologiques sur Bergstrasse, une rue qui a été en grande partie préservée au-dessous de la zone frontière, montrent les couches plus vieilles des fortifications de frontière qui ont été retranchées dans la rue et les détails du système de fortification de frontière.
Enfin, le Mille historique du mur de Berlin est une exposition permanente en quatre langues, consistant en 21 panneaux d'information. Ceux-ci sont répartis le long du tracé de la frontière intérieure et présentent des photographies et des textes se référant à des événements, comme des fuites qui se sont produits à l'endroit même où sont placés les panneaux.

Destruction et restes du Mur Liste des segments du mur de Berlin.

Il ne reste plus grand-chose du Mur aujourd'hui. Les chasseurs de souvenirs désignés dans le langage populaire par Mauerspecht soit nouveau bâtiment dans son fort de Langley. Entre la fin 1989 et le début de l'année 1990, le Mur est démantelé à raison de cent mètres en moyenne par nuit. La RDA s'efforce ensuite de démonter le plus vite et le plus complètement possible les installations. À partir du 13 juin 1990, 300 gardes-frontières de l'Est et 600 sapeurs de l'Ouest, 175 camions, 65 grues, 55 pelleteuses et 13 bulldozers y ont été affectés. Le Mur a disparu du centre-ville en novembre 1990, le reste en novembre 1991. Au total, il a été physiquement détruit à peu près partout, à l'exception de six sections, conservées en souvenir.

Le reste le plus connu du Mur, l'East Side Gallery, est situé le long de la Spree, entre la gare de l'Est et le pont de l'Oberbaum qui enjambe la Spree. Il mesure 1,3 km. Il a été peint par 118 artistes du monde entier, tel Thierry Noir ou Dmitrij Vrubel et comporte 106 peintures murales. Classé monument historique, il tombe aujourd'hui en ruine. De ce fait, la ville de Berlin a alloué une subvention pour permettre sa reconstruction à l'identique. Les artistes ont accepté de repeindre leur œuvre sur un nouveau Mur.
Un des fragments du mur réel le mieux conservé se trouve le long de la Niederkirchnerstraße, dans le district centre, à proximité de la chambre des députés de Berlin. Il a aussi été classé monument historique en 1990.
Un autre fragment du mur réel de type 75 se trouve le long de la Bernauer Straße. Ce fragement de 212 mètres de mur d'origine, qui séparent la Ackerstraße de la Bergstraße, a été classé au patrimoine historique depuis le 2 octobre 1990. Malheureusement, ce fragment de mur a été creusé et excavé jusqu'à la charpente en acier, par les chasseurs de souvenirs. La Bernauer Straße étant le seul endroit à Berlin où une portion du dispositif frontalier a été conservée dans son intégralité, une partie du mur, longue de 64 mètres, a été assainie et restaurée, afin de retrouver son état originel afin de témoigner le renforcement interminable de ce dispositif, poursuivi autrefois par la RDA. Au sud du mémorial, dans l'enclos du cimetière, un tronçon assez important de mur en plaques de béton, qui faisait partie du périmètre de sécurité aux abords de la zone frontalière, a également été conservé. Ce dernier figure, lui aussi, au patrimoine historique depuis 2001.
Marquage commémoratif du tracé du Mur le long du pont Lohmühlenbrücke
Cinq des 302 miradors subsistent :
l'un est transformé en musée de l'art interdit à Treptow, près de l'allée Pouchkine, dans une partie de la piste transformée en parc ;
dans la Kielerstraße dans le district Centre. Le mirador est classé, mais a été entouré sur trois côtés de constructions récentes ;
sur la Stresemannstraße, près de la "Potsdamer Platz" dans le même district. Ce mirador, bien plus élancé que les autres, a été déplacé pour permettre des constructions et n'est donc plus à sa place originelle ;
au sud de Nieder-Neuendorf, hameau de Hennigsdorf, dans l'exposition permanente sur les installations militaires de la frontière RFA-RDA ;
à Hohen-Neuendorf. Ce mirador se trouve dans une partie nouvellement boisée du tracé de la piste. Il est utilisé avec le bois qui l'entoure par la Jeunesse forestière allemande .

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Posté le : 09/11/2014 01:04
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La chute du mur de Berlin 2
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Organisation de l'espace urbain berlinois après la chute du Mur

La chute du Mur a changé considérablement le trafic de l'agglomération. On circule sans problème d'est en ouest sur des réseaux métropolitain, ferroviaire et de bus totalement modernisés au cours des années 19902. La bande frontière se reconnaît encore bien aujourd'hui par les grands espaces vides, comme sur des parties de la Bernauer Straße ou le long de la Vieille Jakobstraße. La large trouée entre les deux ex-Murs s'appelle actuellement la piste des Murs . Dans ce centre ville précédemment densément construit, cette piste a pour sa plus grande partie été convertie en espaces d'utilité publique. Il comporte également des parcs et des lieux commémoratifs du Mur. C'est aussi dans l'ancien no man's land que la nouvelle gare centrale a été inaugurée le vendredi 26 mai 2006. La Potsdamer Platz, cœur du Berlin chic et bourgeois d'avant-guerre et devenue un vaste terrain en friche, au cœur du no man's land, symbolise le désir de retrouver l'unité de la ville. Sa reconstruction est en passe d'être achevée. Les immeubles construits par Renzo Piano, Richard Rogers et Helmut Jahn frappent par leur élégance et offrent un remarquable échantillonnage non neutre d'architecture contemporaine. La semaine, les salariés des bureaux et les ouvriers des chantiers y côtoient les touristes. Le week-end, la Potsdamer Platz est déjà l'un des lieux les plus fréquentés de Berlin.
Pourtant, le Mur, c'est-à-dire le clivage entre Berlin-Ouest et Berlin-Est, est toujours là. À l'Ouest, les autorités ont tenu à préserver des marques du passé de la ville comme la ruine de l'église commémorative de l'empereur Guillaume Kaiser Wilhelm, surnommée dent creuse par les Berlinois. Le Reichstag, incendié en 1933 et devenu une ruine en 1945, n'a pas été reconstruit entièrement à l'identique. La coupole en verre conçue par Norman Foster symbolise la démocratie allemande qui se veut résolument transparente. À l'Est, la RDA n'a laissé subsister aucun trait du nazisme. Aujourd'hui, ce passé est rappelé dans le quartier juif où la synagogue a été reconstruite.
Sur le plan architectural, les deux parties de la ville sont également très différentes. Berlin-Ouest comporte de vastes espaces de campagne car son enclavement passé dans la RDA a été un puissant frein à son expansion démographique et économique. En revanche, la RDA, dont Berlin était la capitale, a voulu faire de la ville une vitrine du socialisme avec l'Alexanderplatz et par la construction de banlieues grandiosement répétitives. La statuaire socialiste est toujours présente de ci, de là à Berlin-Est avec Marx, Lénine, la faucille et le marteau. Le palais de la république des années 1970, construit à la place de l'ancien palais impérial détruit en 1950 sur l'ordre de Walter Ulbricht, voulait rappeler la victoire du régime communiste. Il est toutefois à son tour aujourd'hui détruit.
La partition de la ville avait fait perdre à Berlin sa place de grande métropole industrielle. Depuis la chute du Mur, le développement économique de Berlin reste modeste et inférieur aux espoirs. L'île des musées, anciennement à Berlin-Est, est devenue un haut lieu touristique mais les commerces ne se sont pas développés autour. Il n'y a même pas de kiosques à journaux. En revanche, un marché périodique vous propose essentiellement tous les restes de la période socialiste insignes militaires, sculptures miniatures de Lénine.
Le mur de Berlin laisse donc dans l'histoire architecturale, économique, comportementale, démographique des traces certaines malgré les milliards d'euros dépensés pour relever Berlin depuis 1989 et bien que la ville exerce de nouveau la fonction de capitale de l'Allemagne.

Survol en hélicoptère


Au printemps 1990, un hélicoptère de type MI-8 survole pour la première fois à 50 mètres d'altitude tout le côté Est du Mur depuis Potsdam jusqu'au point de passage de la Bornholmer Straße. Un caméraman filme le début de la destruction du mur de Berlin avec notamment l'abattage des miradors.

20e anniversaire de la chute du Mur

Les dominos peints par des artistes du monde entier renversés lors du 20e anniversaire de la chute du Mur.
Un millier de dominos géants et colorés ont été installés sur le tracé du mur et renversés le 9 novembre 2009 par Lech Walesa pour célébrer le 20e anniversaire de sa chute.
Le Prix Grand Témoin, prix littéraire de La France Mutualiste, a été remis le 5 novembre 2009 sur le thème du 20e anniversaire de la chute du mur de Berlin. Ce prix a pour thème principal le devoir de mémoire . Les récipiendaires :
Frederick Taylor pour Le Mur de Berlin 1961 – 1989, aux éditions JC Lattes ;
Jean-Marc Gonin et Olivier Guez pour La Chute du Mur, aux éditions Fayard.

Dans la culture Au cinéma

Allemagne Terminus Est Deutschland Terminus Ost sorti en 1965 et réalisé par le Belge Frans Buyens est un documentaire de cinéma-vérité à propos de la construction du mur de Berlin.
Les Années du mur sorti en 1995 et réalisé par Margarethe von Trotta raconte l'histoire d'un couple séparé en 1961 lors de sa fuite vers Berlin-Ouest. Le 9 novembre 1989, vingt-sept ans après leur séparation, ils se croisent au milieu de Berlinois en liesse.
Le Tunnel sorti en 2001 et réalisé par Roland Suso Richter raconte l'histoire d'un champion est-allemand qui passe à l'ouest alors que le mur de Berlin est en construction et tente d'y faire venir sa sœur. Le film est inspiré de la vie d'Hasso Herschel qui creuse avec ses amis une galerie de 145 mètres de long pendant près de 6 mois dans le secteur français de Berlin. Cela permet à 28 personnes de fuir Berlin-Est.
Good Bye, Lenin! sorti en septembre 2003 et réalisé par Wolfgang Becker, évoque la chute du Mur et les changements importants qui se sont produits dans les jours et les semaines qui ont suivi : une forme de liesse mais aussi une importante perte de repères pour ceux de la RDA les Ossis.
La Vie des autres Das Leben der anderen sorti en janvier 2007 et réalisé par Florian Henckel von Donnersmarck raconte comment les dirigeants de la RDA utilisent dans les années 1980, la Stasi pour leurs fins personnelles.
Le Perroquet rouge Der Rote Kakadu sorti en février 2006 et réalisé par Dominik Graf, raconte l'histoire de jeunes Allemands de l'Est qui rêvent de liberté. Ceux-ci se retrouvent dans un bar, 'Le perroquet rouge', où ils écoutent du rock venant des États-Unis. Ils sont bien sûr contrôlés de nombreuses fois par la Stasi. Le film se déroule en 1961, avant et le jour de la construction du mur.
Les Ailes du désir de Wim Wenders 1987. Des anges vivent au-dessus de Berlin et peuvent entendre tout ce que disent le commun des mortels même les plus intimes pensées. Le Mur apparaît à plusieurs reprises pendant le film et devient un personnage à part entière…

Dans la littérature

L'Armoire de Pierre Bourgeade Gallimard, 1977
Cet instant-là de Douglas Kennedy Belfond, 2011
L'Écluse prix Renaudot 1964 est un roman de Jean-Pierre Faye, publié en 1964, dont le personnage principal est précisément le mur de Berlin.
Le Miroir aux espions est un roman d'espionnage de John le Carré, publié en 1965. L'histoire concerne un service de renseignement britannique pendant la guerre froide, mentionné comme le Service et sa tentative pour infiltrer un agent en République démocratique allemande.
Le Sauteur de mur de Peter Schneider 1982 raconte l'histoire d'un écrivain berlinois de l’Ouest. Celui-ci va et vient de part et d’autre du Mur au début des années 1980.
Berlin sous la Baltique d'Hugo Hamilton 1990 est un livre plein de surprises et de trouvailles qui se déroule dans le Berlin des années 1980, au moment où le Mur se fissure.
Villa Vortex de Maurice G. Dantec 2003 est un roman à mi-chemin entre les journaux et le polar classique avec comme cadre chronologique la chute du mur de Berlin et celle des Twin Towers de New York septembre 2001.
L'Homme de la frontière de Martine-Marie Muller est un roman se déroulant autour du mur de Berlin.
Les Chiens noirs de Ian McEwan 2007 raconte l'histoire d'un jeune homme sur les traces de l'engagement politique communiste de ses beaux-parents. Le livre se termine au pied du mur de Berlin au moment de sa chute60.
Toutes ces choses qu'on ne s'est pas dites de Marc Levy 2008. Lors de la chute du Mur, Berlin est le lieu de rencontre entre le personnage principal et un Allemand de l'Est.
Cet instant-là de Douglas Kennedy 2011

Dans la musique

Pink Floyd, groupe de rock psychédélique, sortit en 1979 un album nommé The Wall décrivant un mur psychologique. L'album a fait l'objet d'un concert de Roger Waters, l'ex-bassiste du groupe, en 1990 en plein milieu de l'ancien no man's land. La presse souligna le contexte historique, ce qui avait été évidemment voulu pour le marketing, le disque n'évoquant jamais vraiment Berlin. Plus tard, le groupe enregistra une chanson évoquant directement le mur de Berlin, A Great Day for Freedom, en 1994.
Le jour de la chute du mur de Berlin, Mstislav Rostropovitch improvisa un concert de violoncelle sur une chaise, devant le mur. Cette prestation a été immortalisée par de nombreuses télévisions internationales. Il fut suivi par Roger Waters et sa reprise de The Wall avec de nombreux artistes dont Cyndi Lauper, Scorpions, Bryan Adams.
L'album Les Aventures de Simon et Gunther... 1977, de Daniel Balavoine, met en scène deux frères allemands, l'un vivant à Berlin-Ouest, l'autre à Berlin-Est, leur séparation forcée au moment de la construction du Mur, et leur tentative de se retrouver.
L'Autre côté, paroles et musique de Yves Duteil.
Le concept album de Lou Reed Berlin utilise le mur de Berlin comme métaphore des relations du couple au centre de l'album.
Berlin ce jour-là, paroles et musique de Salvatore Adamo.
Wind of change, la célèbre chanson du groupe allemand Scorpions est connue comme un des symboles de la réunification de l'Allemagne et de la fin du rideau de fer. Le groupe a reçu de nombreux honneurs et distinctions pour cette chanson : les membres ont été reçus au Kremlin à Moscou par Gorbatchev en personne, en 1991, lors d'une cérémonie au cours de laquelle ils ont remis une plaque sur laquelle étaient inscrites les paroles de la chanson à ce dernier. Ils ont aussi été invités en 1999 à jouer la chanson lors de la cérémonie qui a eu lieu pour célébrer les dix ans de la chute du Mur.le soir du 9 novembre de Jean Pax Mefret
Le groupe français Concrete Knives a écrit une chanson sur la chute du mur appelée "Bornholmer". Elle est la chanson d'ouverture de leur premier album.
Au théâtre
Berlin, 9 novembre, de Pierre Bourgeade, pré-mise en scène de Kai Woly Wolters, Rheinische Landestheater, Neuss, 1999. Publication : Paris, L'Avant-scène théâtre, 2002, 62 p. (Collection des Quatre-vents.
Berlin, de l'autre côté du mur, de Sandrine Gauvin. Publication : France, éditions Ex Aequo, 2010,

Liens
http://youtu.be/Awsn9sNKUxs Rostropovitch joue au pied du mur
http://youtu.be/_romprNFd70 le mur détruit par les allemands
http://youtu.be/vMblPdY6nQs Documentaire
http://youtu.be/Ds6_laEmKNI La chute du mur
http://youtu.be/_WPWegAuL0A Guerre propagande


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Posté le : 09/11/2014 01:02
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La nuit de Cristal
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La nuit du 9 au 10 novembre 1938 est nommée "La Nuit de Cristal"

en allemand Reichskristallnacht est le pogrom contre les Juifs du Troisième Reich dans la nuit et dans la journée qui suivit. Présenté par les responsables nazis comme une réaction spontanée de la population à la suite de l'assassinat d'un secrétaire de l'ambassade allemande à Paris, par un jeune Juif polonais d'origine allemande, Herschel Grynszpan, le pogrom fut en réalité ordonné par le chancelier du Reich, Adolf Hitler, organisé par Joseph Goebbels, et commis par des membres de la Sturmabteilung SA, de la Schutzstaffel SS et de la Jeunesse hitlérienne, soutenus par le Sicherheitsdienst SD, la Gestapo et d'autres forces de police.

En bref

Nuit de Cristal . Nom donné aux violences antisémites qui, à l'instigation du parti nazi, embrasèrent, dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938, la plupart des villes d'Allemagne et d'Autriche.
L'assassinat, le 7 novembre à Paris, du conseiller d'ambassade Ernst vom Rath par Herschel Grynszpan, un jeune Juif de 17 ans, fournit aux SA, aux SS et à la Gestapo un prétexte pour déchaîner une violence antisémite planifiée depuis longtemps par Himmler et Heydrich.
La Nuit de cristal se solda par la mort de 91 juifs, la destruction de 7 500 magasins et l'incendie de plus de 250 synagogues. Ce pogrom fut aussi le signal de la première vague d'arrestations de quelque 35 000 Juifs qui furent aussitôt déportés vers les camps de concentration alors existants : Dachau, Oranienburg-Sachsenhausen et Buchenwald.
En Autriche, où la Nuit de cristal fut particulièrement violente, 6 500 Juifs furent arrêtés par la Gestapo ; 3 000 d'entre eux furent déportés à Dachau. Outre une amende d'un milliard de marks qui fut imposée aux Juifs pour payer les dégâts, de cette nuit de violences appelée de cristal par allusion aux débris de verre des vitrines saccagées, le régime nazi mit aussitôt en œuvre un vaste plan de spoliation des Juifs allemands : dès le 12 novembre, une circulaire ordonna la fermeture de tous les commerces de détail tenus par des Juifs et la radiation de tous les artisans juifs des registres professionnels. Cette aryanisation fut complétée le 3 décembre par un décret étendant ces interdictions à toutes les entreprises industrielles et aux biens immobiliers juifs.
À la suite de ce déchaînement de violences, l'émigration juive s'intensifia vers la France, la Grande-Bretagne, les États-Unis et la Palestine. En 1940, le gouvernement de l'État français livra H. Grynszpan aux nazis.
Le nom étrangement poétique de Kristallnacht, qui signifie nuit de cristal ou nuit du verre brisé, symbolise la brisure définitive de l'existence des Juifs en Allemagne. Après la Nuit de cristal, le régime nazi rendit impossible aux Juifs de continuer à vivre dans ce pays.
Le coût des seuls carreaux brisés s'éleva à des millions de Reichsmarks. Le Reich confisqua toutes les indemnités accordées aux Juifs par les compagnies d'assurances Ceux-ci durent déblayer eux-mêmes les décombres des synagogues en ruine. Le gouvernement nazi condamna la communauté juive à une amende collective de 1 milliard de Reichsmarks environ 400 millions de dollars en 1938. Après en avoir fixé le montant, Hermann Göring remarqua : Ces porcs ne commettront plus d'autres meurtres. Soit dit en passant... je n'aimerais pas être un Juif en Allemagne.
Le gouvernement nazi exclut les Juifs des écoles le 15 novembre et autorisa les responsables politiques locaux à décréter des couvre-feux fin novembre. En décembre 1938, l'accès des Juifs à la plupart des lieux publics était interdit en Allemagne.
Pendant longtemps on a cru que H. Grynszpan avait assasssiné vom Rath pour venger les persécutions dont ses parents avaient été victimes en Allemagne. La lecture des archives a révélé que l'assassin et sa victime s'étaient en fait rencontrés dans des cercles homosexuels parisiens et tout porte à croire qu'ils eurent une liaison ensemble. H. Grynszpan séjournant à Paris dans la clandestinité avait demandé à vom Rath de lui délivrer un visa d'entrée et de sortie pour regagner l'Allemagne. Le secrétaire d'ambassade refusa. C'est sans doute cette fin de non recevoir qui motiva le geste de Grynszpan.
Lorsque les nazis commencèrent à comprendre la nature des relations qui avaient très certainement uni ces deux hommes, ils furent bien embarrassés : l'homosexualité n'était-elle pas un crime aux yeux du IIIe Reich ? Pour éviter le scandale, ils tentèrent, sans succès, d'obtenir de l'ambassadeur Welczeck un témoignage par lequel il aurait démontré que c'était lui et non son secrétaire que Grynszpan avait cherché à tuer. Finalement, le procès n'eut jamais lieu. Grynszpan fut sans doute déporté au camp d'Oranienburg-Sachsenhausen.

L'histoire

Sur tout le territoire du Reich, près de deux cents synagogues et lieux de culte furent détruits, 7 500 commerces et entreprises exploités par des Juifs saccagés ; une centaine de Juifs furent assassinés, des centaines d'autres se suicidèrent ou moururent des suites de leurs blessures et près de 30 000 furent déportés en camp de concentration : au total, le pogrom et les déportations qui le suivirent causèrent la mort de 2 000 à 2 500 personnes. Point culminant de la vague antisémite qui submergea l'Allemagne dès l'arrivée des nazis au pouvoir en janvier 1933, la nuit de Cristal fut l'une des prémices de la Shoah.
En provoquant cette première grande manifestation de violence antisémite, les nazis voulurent accélérer l'émigration des Juifs, jugée trop lente, en dépit de la politique de persécution et d'exclusion mise en œuvre depuis février 1933. L'objectif fut atteint : le nombre de candidats à l'émigration crût considérablement, mais au-delà de l'indignation que l'évènement suscita dans le monde, les frontières des autres pays restèrent fermées.
Marquant une rupture avec la politique nazie de 1933 à 1937, ainsi qu'une étape dans la violence et la persécution antisémites, cet évènement fut également révélateur de l'indifférence des nations au sort des Juifs d'Allemagne et d'Autriche, et de l'incapacité des États démocratiques à contrecarrer les coups de force menés par l'Allemagne de Hitler.

Les mesures antisémites

Un SA à côté d'une affiche proclamant : "Allemands ! Défendez-vous ! N'achetez pas chez les Juifs !", 1933.
Le programme du NSDAP, rédigé le 24 février 1920, prévoit que « seul peut être citoyen un frère de race Volksgenosse. ... Aucun Juif ne peut donc être frère de race et dans Mein Kampf, Adolf Hitler proclame à de nombreuses reprises son désir de voir l'Allemagne libérée des Juifs, Judenfrei. Les Juifs sont victimes d'une politique antisémite dès l'arrivée des nazis au pouvoir en janvier 1933. Cette discrimination se traduit notamment par le boycott des commerces juifs, voulu par Hitler, organisé par Julius Streicher et mis en œuvre par la SA, le 1er avril 1933, dans une opération au succès limité et largement condamnée à l'étranger. Au cours du même mois, les Juifs sont exclus de la fonction publique, à quelques rares exceptions près, par le décret sur la restauration du fonctionnariat du 7 avril 1933 et ses règlements d'application.
L'ostracisme envers les Juifs est officialisé le 15 septembre 1935 lors de l'adoption des Lois de Nuremberg, principalement la Loi pour la protection du sang et de l'honneur allemands, Blutschutsgesetz et la Loi sur la citoyenneté du Reich, Reichsbürgergesetz. Ces lois et les décrets qui leur font suite établissent la détermination du caractère juif, demi-juif ou quart de juif Mischling, en fonction de l'ascendance, interdisent les relations sexuelles et le mariage entre citoyens de sang allemand ou apparentés et juifs, privent les Juifs de la citoyenneté allemande, ainsi que de la plupart de leurs droits politiques, dont le droit de vote, et les excluent de certaines professions libérales et de l'enseignement.
La campagne anti-juive se durcit en 1937, notamment via l'organisation de l'exposition Der ewige Jude Le Juif éternel, mais surtout au cours de l'année suivante6. Début 1938, les passeports des Juifs allemands sont confisqués. Le 26 avril, les Juifs reçoivent l'ordre de faire enregistrer tous les biens qu'ils possèdent, ce qui facilite leur aryanisation. Le 17 août, les prénoms portés par les Juifs sont réglementés et trois décrets additionnels aux Lois de Nuremberg définissent la notion d'entreprise juive et interdisent aux Juifs l'exercice de la profession médicale. Tout est fait pour pousser les Juifs à émigrer, quel qu'en soit le prix.

Un prétexte : l'assassinat de vom Rath

Herschel Grynszpan après son arrestation à Paris
"Avec l'aide de Dieu .... Je ne pouvais agir autrement. Mon cœur saigne quand je pense à notre tragédie .... Je dois exprimer ma révolte de telle sorte que le monde entier l'entende, et je compte le faire. Je vous supplie de me pardonner. "

Le 7 novembre 1938, un jeune Juif polonais d'origine allemande réfugié à Paris, Herschel Grynszpan, âgé de dix-sept ans dont la famille résidant à Hanovre a été expulsée, le 27 octobre, d'Allemagne vers la Pologne, achète un pistolet puis se rend à l'ambassade d'Allemagne à Paris, où il demande à voir un responsable. Envoyé au bureau du premier secrétaire Ernst vom Rath, Grynszpan tire sur celui-ci et le blesse gravement.
Il ne s'agit pas du premier événement du genre. Le 4 février 1936, un étudiant talmudiste yougoslave, David Frankfurter, avait assassiné, à Davos, le responsable du parti nazi en Suisse, Wilhelm Gustloff, sans susciter de réaction des autorités ou de la population allemandes, les circonstances, et notamment la proximité des jeux olympiques de Berlin, exigeant de serrer la bride aux fanatiques du parti en Allemagne.
L'attentat contre le diplomate vom Rath ne fait l'objet d'aucune déclaration publique des responsables nazis, même si une campagne antisémite dans la presse orchestrée par Joseph Goebbels dès le 8 novembre 1938 encourage les premiers pogroms menés par des responsables locaux du parti naziN 4, notamment en Hesse-Cassel10, à Munich11 ou à Hanovre.
Dans son journal, le 9 novembre, Joseph Goebbels relatant la journée du 8, n'écrit rien sur l'attentat de Paris, alors qu'il a passé la fin de soirée avec Hitler au café Heck ; lors de son discours du 8 novembre commémorant le Putsch de la brasserie de 1923, Adolf Hitler est lui aussi muet sur le sujet. Pour Saul Friedländer, de toute évidence, les deux dirigeants nazis avaient décidé de passer à l'action, mais jugé sans doute préférable d'attendre le décès d'Ernst vom Rath, grièvement blessé ; ce silence insolite était la plus sûre indication de l'existence de plans visant à accréditer une explosion spontanée de la colère du peuple.
Vom Rath, au chevet duquel Hitler avait envoyé son médecin personnel, le docteur Karl Brandt, décède le 9 novembre 1938 à 17 heures 30, et Hitler en est informé entre 19 et 21 heures, alors qu'il participe à Munich, au dîner traditionnel des compagnons de combat, la vieille garde du parti.

L'organisation des violences : la fiction de la réaction spontanée

"Je présente les faits au Führer. Il décide : laisser les manifestations se poursuivre. Retirer la police. Les Juifs doivent sentir pour une fois la colère du peuple. C'est justice. Je donne aussitôt les consignes correspondantes à la police et au Parti. Puis je fais un bref discours en conséquence devant les dirigeants du Parti. Tempêtes d'applaudissements. Tout le monde se précipite immédiatement sur les téléphones. Maintenant, c'est le peuple qui va agir.
— Joseph Goebbels, Munich, 10 novembre 1938
Le 9 novembre 1938 au soir, à Munich à l'occasion du Tag der Bewegung Jour du Mouvement, Adolf Hitler, après un long entretien à voix basse avec Joseph Goebbels au cours duquel le Führer semble particulièrement agité, quitte la réunion sans prononcer son discours traditionnel et sans faire la moindre allusion au décès de vom Rath. Vers 22 heures, Joseph Goebbels, dans un discours bref mais incendiaire, annonce aux participants la mort d'Ernst vom Rath et leur apprend que des émeutes anti-juives ont éclaté en Hesse-Cassel et en Saxe-Anhalt, en ajoutant que le Führer avait décidé que rien ne devait être fait pour décourager le mouvement au cas où celui-ci s'étendrait à l'ensemble du Reich. Le parti devait organiser et exécuter l'affaire sans paraître ouvertement y être engagé.
La colère populaire spontanée mise en avant par les responsables nazis fait en réalité l'objet de quatre vagues d'ordres successives : à partir de 22 heures, les chefs régionaux de la SA donnent, par téléphone, instruction à leurs subordonnés de lancer incendies, destructions et violences à grande échelle ; peu avant minuit, Heinrich Müller, chef de la Gestapo enjoint aux forces de police de ne pas s'opposer aux actions contre les Juifs, d'empêcher les pillages et tout autre débordement particulier et de préparer l'arrestation de vingt à trente mille Juifs, de préférence fortunés ; à une heure vingt du matin, les instructions de Müller sont complétées et précisées par un télex de Reinhard Heydrich à la police et au SD. Heydrich demande de prévenir les actions qui peuvent mettre en danger des personnes ou des biens allemands, notamment lors de l'incendie des synagogues, d'autoriser la destruction des appartements et commerces appartenant à des Juifs, mais pas leur pillage, de ne pas s'attaquer aux étrangers et de trouver le personnel nécessaire pour arrêter autant de Juifs, surtout fortunés, que peuvent en accueillir les prisons. À 2 h 56 du matin, c'est au tour de Rudolf Hess de donner ses consignes.
Pour Rita Thalmann et Feinermann, la succession des ordres, et surtout, la précision des instructions données par Müller, notamment l'ordre d'arrêter de 20 000 à 30 000 Juifs, témoignent de l'existence d'un plan préétabli, antérieur à l'assassinat de vom Rath. Cette analyse est partagée par Gerald Schwab, selon lequel le télex envoyé par Muller, dans lequel il n'est fait aucune allusion à la mort de vom Rath, avait été rédigé au préalable en attendant une opportunité appropriée ; Schwab souligne également que les camps de concentration se préparaient, depuis plusieurs mois, à faire face à un afflux massif et soudain de détenus. Le caractère fallacieux de l'affirmation selon laquelle les violences auraient été spontanées est en outre étayé par un rapport du tribunal suprême du parti rédigé début 1939 : les instructions orales du Ministre de l'Intérieur ont apparemment été comprises par tous les responsables présents comme signifiant que le parti ne devait pas apparaître, à l'extérieur, comme l'initiateur des manifestations, mais qu'il était, en réalité, chargé de les organiser et de les exécuter.
Commentant les événements et témoignant de la difficulté d'imposer la version d'un pogrom spontané, un Blockleiter de Hüttenbach en Moyenne-Franconie, dont le temple juif a été incendié par les responsables locaux du parti nazi et de la SA écrit dans un rapport à sa hiérarchie le 7 février 1939 : on ne doit pas écrire que le feu a été mis à la synagogue par les membres du parti ..., mais par la population. C'est juste. Mais en ma qualité de chroniqueur, je me dois de relater la vérité. Il est facile d'enlever cette page et d'en rédiger une nouvelle. Je vous en prie, mon chef, comment dois-je établir cette entrée et comment faut-il la formuler ? .
Le 10 novembre 1938, Goebbels consulte Hitler par téléphone aux premières heures de la matinée et le rencontre ensuite lors du déjeuner, alors que les violences se poursuivent. Avec l'aval du Führer, Goebbels donne l'ordre d'arrêter le pogrom. Cette instruction est diffusée par la presse berlinoise à 17 heures, par les stations de radio à 20 heures et dans l'ensemble de la presse le lendemain. Elle est suivie par des messages de Heydrich aux forces de police dont les patrouilles « qui avaient disparu comme par enchantement, ressurgissent à tous les coins de rue.

Le pogrom : violences antisémites dans l'ensemble du Reich

Je vais pour rentrer à mon hôtel, lorsque je vois le ciel virer au rouge sang. La synagogue brûle. ... Nous ne faisons éteindre les incendies que si c'est nécessaire pour les bâtiments allemands du voisinage. Sinon, laisser brûler. ...
Des vitres volent en éclats. Bravo, bravo! Dans toutes les grandes villes, les synagogues brûlent.
La synagogue de la Herzog Rudolf Strasse à Munich après son incendie.
Dès la fin du discours de Goebbels, des membres de la Stosstrupp Adolf Hitler se déchaînent dans les rues de Munich et détruisent la synagogue de la Herzog-Rudolf-Strasse, leur violence allant jusqu'à susciter l'inquiétude du Gauleiter Adolf Wagner. Goebbels donne également des ordres pour qu'ils démolissent la synagogue de la Fasanenstrasse.
Le pogrom s'étend rapidement sur tout le territoire du Reich, des grandes villes aux bourgades : les Gauleiters entrèrent en action vers 22 h 30. La SA suivit à 23 heures, la police peu avant minuit, les SS, à 1 h 20 du matin.
À Innsbruck, dans le Gau du Tyrol-Vorarlberg, où ne vivent que quelques centaines de Juifs, un commando de membres de la SS, habillés en civil, assassine plusieurs Juifs influents. Des diplomates témoignent de la violence des saccages opérés à Cologne et à Leipzig ; des scènes semblables se produisent dans la petite ville de Wittlich, en Moselle, où un SA monte sur le toit de la synagogue en agitant les rouleaux de la Torah et en s'écriant Torchez-vous le cul avec, Juifs !. À Marbourg, à Tübingen, des membres du parti nazi et de la SA, souvent ivres à la suite de la célébration de l'anniversaire du putsch de la brasserie, incendient les synagogues sous le regard de pompiers, dont l'action se borne à éviter que les incendies ne se communiquent aux édifices voisins. À Esslingen, des Chemises brunes saccagent un orphelinat dans la cour duquel ils font un bûcher avec les livres, les objets religieux et tout ce qui est combustible, en menaçant les enfants en pleurs de les jeter dans le brasier s'ils ne partent pas immédiatement ; à Potsdam, c'est un internat qui est envahi et dont les enfants sont chassés en pleine nuit. À Leipzig, le cimetière juif est saccagé : le lieu de culte et la maison du gardien sont incendiés, les pierres tombales renversées et des sépultures profanées. Dans la petite ville de Treuchtlingen, la violence atteint des sommets : des membres de la SA, encouragés par certains habitants, mettent le feu à la synagogue, brisent les vitrines des magasins juifs et en pillent le contenu, saccagent les habitations occupées par des Juifs, détruisant mobilier, vaisselle et sanitaires et obligeant les femmes, réfugiées dans la cave, à détruire bouteilles de vin et conserves. C'est à Vienne, où s'étaient déjà produites des émeutes anti-juives lors de l'Anschluss, que l pogrom prend ses formes les plus violentes et les plus meurtrières, avec 42 synagogues incendiées, 27 personnes juives tuées et 88 grièvement blessées.
Les violences sont systématiquement assorties de l'humiliation des victimes. À Sarrebruck, on oblige les Juifs à danser, à s'agenouiller et à chanter des chants religieux devant la synagogue, avant de les asperger à la lance à incendie ; à Essen, on met le feu à leur barbe ; à Meppen, on les force à baiser le sol devant le quartier général de la SA, pendant qu'ils sont frappés à coup de pied. À Fürth, des Juifs sont conduits au théâtre : les uns parqués dans la salle obscure, les autres montés sur la scène violemment éclairée pour y être battus. À Baden-Baden, les Juifs sont rassemblés dans la synagogue où ils doivent rentrer en piétinant un manteau de prières : une fois à l'intérieur de l'édifice, on leur fait entonner le Horst Wessel Lied, puis lire un passage de Mein Kampf à la table de l'officiant.
À côté des centaines de synagogues et lieux de culte incendiés, plusieurs milliers de commerces, de boutiques et d'appartements juifs sont détruits, saccagés ou pillés, et presque tous les cimetières juifs sont profanés ; des femmes, des enfants et des vieillards sont battus et victimes de brutalités bestiales ; les suicides sont nombreux et plus de 20 000 Juifs sont déportés dans les camps de concentration, où ils sont victimes de sadisme et de tortures indescriptibles de la part des gardiens. Un nombre indéterminé de viols et une centaine d'assassinats sont également perpétrés.
Les exactions ne sont pas commises que par des membres de la SA ou de la SS, mais aussi par des citoyens ordinaires, par d'autres secteurs de la population, surtout – mais pas seulement – des jeunes que cinq ans de national-socialisme à l'école et aux Jeunesses hitlériennes n'avaient pas laissés indemnes : à Düsseldorf, des médecins de l'hôpital et plusieurs juges prennent part à l'incendie de la synagogue ; à Gaukönigshoven, en Basse-Franconie, des paysans respectés profanent le sanctuaire de la Torah et pillent les maisons des Juifs ; dans la matinée du 10 novembre, écoliers et adolescents accablent de leurs sarcasmes, de leurs quolibets et de leurs injures les Juifs raflés par la police et souvent houspillés par des meutes hurlantes qui leur lancent des pierres. Si une partie de la population participe au pogrom, des Allemands témoignent toutefois leur sympathie aux victimes, et dans certains cas, leur prodiguent aide matérielle et réconfort.

Bilan : une communauté traumatisée

On trouve une grille d'entrée avec l'inscription en allemand ARBEIT MACHT FREI signifiant en français LE TRAVAIL REND LIBRE au camp de concentration de Dachau.
Dans un rapport du 11 novembre 1938, Reinhard Heydrich fait état de 36 morts et d'autant de blessés graves pour l'ensemble du Reich. Pour Saul Friedländer, le bilan se révéla bien plus lourd ; dans toute l'Allemagne y compris l'Autriche annexée, outre les 267 synagogues détruites et les 7 500 entreprises et commerces saccagés, 91 juifs périrent et des centaines se suicidèrent ou moururent par la suite des sévices infligés dans les camps. Sur ce dernier point, Raul Hilberg estime à plus de 25 000 le nombre des hommes envoyés dans les camps de concentration nazis, comme Dachau 10 911 dont environ 4 600 en provenance de Vienne, Buchenwald 9 845 personnes et Sachsenhausen au moins 6 000. Pour F. Kersaudy, plus de 100 Juifs sont tués et 20 000 déportés en camps de concentration, tandis que 7 500 boutiques sont détruites et 12 000 pillées, 101 synagogues sont incendiées, 76 démolies et 267 endommagées. Daniel Goldhagen parle d à peu près 100 juifs assassinés, et de 30 000 autres déportés en camps.
Au total — et selon les estimations les plus modérées retenues dans les documents de la Wiener Library — le pogrom coûta la vie de 2 000 à 2 500 hommes, femmes et enfants et laissa des séquelles indélébiles chez tous ceux qui en vécurent l'horreur.

Réactions : de l'indignation à l'indifférence À l'étranger

Des Juifs étrangers ont été victimes du pogrom, en dépit des directives ordonnant de les épargner : les protestations diplomatiques affluent et sont transmises, sans commentaire, à la chancellerie du Reich où elles sont enfouies dans les dossiers.
La presse internationale condamne les événements : plus de mille éditoriaux paraissent à ce sujet dans la presse américaine, particulièrement véhémente, et le président Roosevelt rappelle l'ambassadeur des États-Unis en consultation. Si l'indignation est générale, elle ne se traduit pas par un élargissement de la politique d'accueil des Juifs du Reich : en 1938, les États-Unis n'atteignent pas leur quota d'immigration juive en provenance d'Allemagne et d'Autriche et n'accordent que 27 000 visas sur les 140 000 demandés ; l'année suivante la Grande-Bretagne ferme, de fait, les portes de la Palestine à l'immigration juive sans proposer d'autre refuge. Les réactions sont également indignées dans la presse danoise ou française et le gouvernement fasciste italien s'étonne que la recrudescence des persécutions antisémites en Allemagne n'entraîna pas l'abandon du projet d'accord franco-allemand. Il était clair que les émeutes avaient tout d'abord fait perdre à l'Allemagne une grande part des sympathies dont elle bénéficiait dans le monde.
À la suite des protestations internationales, les entreprises contrôlées par des Juifs étrangers au Reich sont dispensées, le 1er décembre 1938, de la prestation expiatoire et peuvent poursuivre leurs activités après le 31 décembre. Le boycott des exportations allemandes se généralise, notamment en France, en Angleterre, aux États-Unis, au Canada, en Yougoslavie ou aux Pays-Bas.

En Allemagne

Le pogrom suscite immédiatement de sérieuses tensions parmi les principaux dirigeants nazis. Si aucun de ceux-ci ne s'oppose à des mesures ou des violences anti-juives, les conséquences de la nuit de Cristal sur l'image de l'Allemagne à l'étranger, ses éventuelles répercussions économiques négatives et le fait qu'elle ait été déclenchée par Goebbels sans concertation, entraîne de vives réactions d'Heinrich Himmler, de Hermann Göring ou de Walther Funk.
À de rares exceptions individuelles près, ni les Églises protestante et catholique, ni les milieux universitaires, ni les généraux, ni ucun représentant de la bonne Allemagne n'émettent aucune protestation à la suite du pogrom66. Si, d'après les rapports du SD, la population réprouve largement la violence et les dommages causés par le pogrom, c'est essentiellement en raison de la destruction inutile de biens qui lèse tous les Allemands et l'État ; l'annonce de l'amende de 1 milliard de marks infligé aux Juifs rassérène les esprits. La direction du parti social-démocrate allemand en exil, la SOPADE, observe également que la grande majorité du peuple allemand a vivement condamné les violences, et ce pour des raisons diverses comme le souligne Ian Kershaw Si la vague d'indignation populaire contre les Juifs qu'escomptait Goebbels ne s'est pas matérialisée, selon la thèse controversée de Daniel Goldhagen, face à des critiques limitées, il y avait l'enthousiasme des Allemands pour l'entreprise éliminationniste, que la Nuit de Cristal n'entamait pas, et l'immense satisfaction avec laquelle tant d'Allemands avaient accueilli l'événement.
"D'un point de vue global, le régime a ... pu considérer comme un succès l'attitude généralement passive dans laquelle se sont enfermés la plupart des Allemands pendant les débordements. Une action violente contre les Juifs allemands, telle qu'on n'en avait plus connue depuis les pogroms du Moyen Âge, avait pu être déclenchée sans soulever de protestation publique. Sur le plan de la propagande, cela revenait à une approbation. La radicalisation des persécutions avait réussi à franchir une nouvelle étape" analyse l'historien allemand Peter Longerich.

Suites et conséquences : la radicalisation de l'antisémitisme

"J'aurais préféré que vous tuiez deux cents Juifs plutôt que de détruire de telles valeurs."
— Hermann Göring, Berlin, 12 novembre 1938
La nuit de Cristal est suivie d'une radicalisation des mesures antisémites du régime nazi. Les suites du pogrom sont examinées dès le 12 novembre 1938, lors d'une réunion de haut niveau, présidée par Hermann Göring, à la demande explicite et insistante de Hitler : parmi la centaine de participants, on note la présence de Joseph Goebbels, du chef du RSHA Reinhard Heydrich, des ministres de l'Économie Walther Funk, des Finances Lutz Schwerin von Krosigk et de la Justice Franz Gürtner, de représentants de la Reichsbank et des dirigeants du parti nazi en Autriche et dans le territoire des Sudètes. Les premières discussions portent sur l'indemnisation des dégâts, les seules vitrines détruites étant assurées pour 6 millions de dollars. Après de longs échanges, notamment entre Göring, Reinhard Heydrich et le représentant des assureurs allemands, il est décidé que les indemnités versées par les assureurs aux bénéficiaires seront confisquées par l'État et il est imposé aux juifs allemands une amende de réparation d'un milliard de ReichsmarkN 11 et de les obliger de remettre en état, à leurs propres frais, les commerces, bureaux et logements saccagés.
Lors de cette même réunion, Göring décrète la cessation, à partir du 1er janvier 1939, de toutes les activités commerciales menées par des Juifs, qui doivent vendre leurs commerces et entreprises, titres, bijoux et œuvres d'art, ce qui constitue une phase essentielle de l'aryanisation des biens juifs. Alors que Goebbels évoque tour à tour l'interdiction, pour les Juifs, de l'accès aux distractions publiques, aux forêts ou aux parcs, l'éviction des enfants juifs des écoles allemandes, Heydrich plaide vigoureusement pour une accélération de l'émigration, prenant pour modèle les résultats obtenus à Vienne par Adolf Eichmann : pour accélérer cette émigration, il préconise le port d'un insigne spécial par toutes les personnes considérées comme juives aux termes des Lois de Nuremberg, Göring étant, pour sa part, partisan de la création de ghettos. Si ces deux mesures ne sont pas retenues, le pogrom a atteint son but et l'émigration juive s'accélère : 80 000 Juifs fuient le Reich, dans les circonstances les plus traumatisantes, entre la fin de 1938 et le début de la guerre.
Dans la foulée, les discriminations antisémites se multiplient et se durcissent : le 15 novembre 1938, tous les enfants juifs encore présents dans les écoles allemandes en sont chassés ; le 19, les Juifs sont privés d'aide sociale ; le 28, le ministre de l'intérieur informe les présidents des länder qu'ils peuvent exclure les Juifs de certains espaces publics et le lendemain, il interdit aux Juifs de posséder des pigeons voyageurs. Durant les mois de décembre 1938 et janvier 1939, les mesures destinées à exclure les Juifs de la vie publique, professionnelle et culturelle sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus dures.
Si les autorités nazies s'acharnent sur les victimes des pogroms, elles font preuves d'une mansuétude toute particulière à l'égard des auteurs des pires exactions. Les incendies, les destructions et les brutalités sont conformes aux instructions données successivement par les responsables de la SA, Heinrich Müller et Heydrich, mais tel n'est pas le cas des pillages, des meurtres et des viols. Le pogrom terminé, les tueurs ne sont que rarement poursuivis ou condamnés à des peines particulièrement légères ; dans une lettre secrète au procureur de Hambourg, le ministère de la Justice précise, le 19 novembre, que l'assassinat de Juifs et les dommages corporels graves … ne devaient être sanctionnés que s'ils avaient été dictés par des raisons personnelles. En revanche, les coupables de viol sont expulsés du parti et traduits devant les tribunaux civils, le tribunal interne du parti nazi estimant ce crime contraire aux lois de Nuremberg qui interdisent depuis 1935 toute relation sexuelle entre Juifs et Gentils plus grave que le meurtre. Dans son rapport du 13 février 1939 adressé à Goebbels, l'Obergruppenführer Walter Buch, qui enquête sur les excès commis pendant la nuit de Cristal, relève 16 faits, dont 3 à caractère sexuel et 13 meurtres ; il recommande que les poursuites soient abandonnées à l'exception de deux cas de viol, les assassins ayant agi sur l'ordre de leurs supérieurs ou en pensant que leurs crimes étaient conformes aux instructions.

Commémorations en Allemagne : du silence à la célébration

La commémoration de la nuit de Cristal reste confidentielle pendant de nombreuses années. Au cours des années quarante et cinquante, les mentions dans la presse sont rares : la première d'entre elles est effectuée dans le Tagesspiel, quotidien de Berlin-Ouest, le 9 novembre 1945, ce journal ne revenant sur l'événement qu'en 1948. À l'Est, le journal officiel Neues Deutschland, publie sur le sujet en 1947 et 1948, puis après plusieurs années de silence, en 1956 ; en 1958, le vingtième anniversaire du pogrom n'est pas mentionné. Il faut attendre le quarantième anniversaire de l'événement, en 1978, pour que celui-ci soit commémoré par la société tout entière.
Le 70e anniversaire de la nuit de Cristal, le 9 novembre 2008 à la synagogue de la Rykestrasse, est l'occasion pour la chancelière allemande Angela Merkel de lancer un appel afin que l’héritage du passé serve de leçon pour l’avenir. La chancelière dénonce l’indifférence à l‘égard du racisme et de l’antisémitisme . Pour elle, c’est un premier pas qui peut remettre en cause des valeurs incontournables. Trop peu d’Allemands ont eu à l’époque le courage de protester contre la barbarie nazie .... Cette leçon à tirer du passé vaut aujourd’hui pour l’Europe, mais aussi pour d’autres régions, notamment pour les pays arabes.
Une commémoration importante s'est aussi tenue à Bruxelles le 9 et le 10 novembre 2008.

Kristallnacht ou Reichspogromnacht ? : querelle étymologique

Si tous les auteurs s'accordent sur le fait que l'expression nuit de Cristal Kristallnacht fait référence aux débris de verre encombrant les trottoirs devant les vitrines des magasins juifs saccagés, et qu'elle apparaît à Berlin, le consensus ne dépasse pas cette généralité. Pour Kershaw, ce terme provient du parler populaire, pour Karl A. Schleunes, il s'agit d'une dénomination inventée par de beaux esprits berlinois. Selon Arno J. Mayer, l'appellation a été créée par la propagande nazie afin de concentrer l'attention du public sur les dommages matériels, en occultant les pillages et les violences physiques. Elle est utilisée par un responsable nazi du Gau de Hanovre lors d'un discours prononcé le 24 juin 1939, avec une connotation humoristique .
Nuit de Cristal ! Cela brille et pétille comme lors d’une fête. Il est grand temps que ce terme, offensant par sa minimisation, disparaisse à tout le moins des ouvrages historiques
— Avraham Barkai, 1988.
Dans un ouvrage paru en 2001, le politologue allemand Harald Schmid souligne la multiplicité des termes utilisés pour désigner les violences antisémites des 9 et 10 novembre 1938 et l'interprétation controversée donnée au vocable nuit de Cristal. Remis en cause dès le 10e anniversaire de l'événement, il est remplacé, en 1978, par le terme politiquement correct de Reichspogromnacht, qui s'impose durablement à partir des célébrations du cinquantième anniversaire en 1988. Ce débat sur la terminologie est essentiellement circonscrit en Allemagne et en Autriche et peut susciter un profond étonnement dans le monde universitaire anglophone. La diversité du vocabulaire selon les aires linguistiques est illustrée lors du 70e anniversaire : alors qu'en Allemagne, la chancelière Angela Merkel n'utilise que le terme Pogromnacht92, à Bruxelles, le président du CCOJB emploie le terme Kristallnacht

Bibliographie

Hans-Jürgen Döscher, Reichskristallnacht. Die Novemberpogrome 1938, Econ Tb., 2000
Peter M. Daily (dir.), Building history : the Shoah in art, memory and myth, New-York, P. Lang,‎ 2001
Richard J. Evans, Le troisième Reich. 1933-1939, Flammarion Lettres, coll. Au fil de l'histoire,‎ 2009, 1046 p.
Saul Friedländer, L'Allemagne nazie et les Juifs, 1933-1939, Les années de persécution, Paris, Seuil,‎ 2008
(de) Helmut Genschel, Die Verdrängung der Juden aus der Wirtschaft im Dritten Reich, Göttinger Bausteine zur Geschichtswissenschaft Band 38,
Joseph Goebbels, Journal. 1933-1939, Paris, Tallandier,‎ 2007
* D. J. Goldhagen, Les bourreaux volontaires de Hitler, trad. par P. Martin, 1997, Seuil, Paris.
(de) Angela Hermann, Hitler und sein Stoßtrupp in der "Reichskristallnacht". Vierteljahrshefte für Zeitgeschichte,
Raul Hilberg, La destruction des Juifs d'Europe, t. 1, Paris, Gallimard, coll. « Folio Histoire »,‎ 2006
Ian Kershaw, Hitler, 1889-1936, Paris, Flammarion,‎ 2001
Ian Kershaw, Hitler, 1936-1945, Paris, Flammarion,‎ 2001
Kurt Pätzold, La nuit de cristal : les responsables, les victimes et la majorité silencieuse, in François Bédarida, La politique nazie d'extermination
(de) Kurt Pätzold, Irene Runge, Kristallnacht. Zum Pogrom 1938, Pahl-Rugenstein, Cologne, 1988
William L. Shirer, Le IIIe Reich, Paris, Stock,‎ 1967
Gerald Schwab, The day the Holocaust began : the odyssey of Herschel Grynszpan, New-York, Praeger,‎ 1990
Rita Thalmann, Emmanuel Feinermann, La nuit de cristal. 9-10 novembre 1938, Paris, Robert Laffont,‎ 1972
(de) Jörg Wollenberg (Hrsg.), Niemand war dabei und keiner hat's gewusst. Die deutsche Öffentlichkeit und die Judenverfolgung 1933-1945, Piper, Munich,
(de) Herbert Schultheis, Die Reichskristallnacht in Deutschland nach Augenzeugenberichten, Rötter Druck und Verlag GmbH, Bad Neustadt a. d. Saale

Nouvelle synagogue de Berlin
Histoire des Juifs en Allemagne
Synagogues détruites pendant la nuit de Cristal : plus de 600 synagogues ou oratoires juifs furent détruits lors de la nuit de Cristal aussi bien dans des grandes villes que dans de petits bourgs. Certaines synagogues étaient reconnues comme des monuments historiques. Ce lien renvoie à l'historique de certaines de ces synagogues.
La Synagogue de Cassel est pillée et les objets de culte brûlés le 7 novembre 1938 2 jours avant la nuit de Cristal, et le conseil municipal de la ville décide de la démolir par vote du 11 novembre 1938, pour des raisons de "difficultés de stationnement".

Liens

http://youtu.be/SJVi-ncBexI Devoir de mémoire
http://youtu.be/cdMFkEKb-ds La nuit de Cristal
http://youtu.be/iwkcoJiR1O0 Vision française de la nuit de cristal
http://youtu.be/fRZqToj9dGY Documentaire rétrospective


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Posté le : 09/11/2014 00:25

Edité par Loriane sur 09-11-2014 18:42:22
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Général De Gaulle 1
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Le 9 novembre 1970 à Colombey-les-Deux-Églises, à 79 ans meurt

Charles de Gaulle,


souvent nommé le général de Gaulle et parfois appelé de façon absolue le Général,son nom de naissance est Charles André Joseph Pierre-Marie de Gaulle né le 22 Novembre 1890, résistant, écrivain et homme d'État français de religion catholique. Il est à la tête de la France du 3 juin 1944 au 20 janvier 1946 en exerçant le poste de premier président du Gouvernement provisoire de la République française, puis du 8 janvier 1959 au 28 avril 1969 en tant que 18e président de la République française.Il épouse Yvonne Vendroux avec qui il a trois enfants Philippe de Gaulle, Élisabeth de Gaulle épouse de Boissieu et Anne de Gaulle.
Il est Sous-secrétaire d'État à la Guerre et à la Défense nationale du 6 juin 1940 au 16 juin 1940 sous le Président Albert Lebrun, Président du Conseil Paul Reynaud avec pour Prédécesseur Hippolyte Ducos.Il est Chef de la France libre du 18 juin 1940 au 1er août 1943 avec le Gouvernement de Conseil de défense de l'Empire
Comité national français CFLN. Il est Président du Comité national français du 24 septembre 1941 au 3 juin 1943 dans le Gouvernement Comité national français

Prédécesseur Conseil de défense de l'Empire où il se Succède à lui-même avec Henri Giraud CFLN. Il est Président du Comité français de Libération nationale du 3 juin 1943 au 3 juin 1944 dans le Gouvernement CFLNP CNF-France libre avec Henri Giraud, Commandement en chef français civil et militaire. Il est 1er Président du Gouvernement provisoire de la République française, Chef de l’État de facto, 124e chef du gouvernement du 3 juin 1944 au 20 janvier 1946 Gouvernement de Gaulle I après celui de Philippe Pétain chef de l'État, et Pierre Laval, chef du gouvernement du régime de Vichy. Il est Ministre de la Défense nationale du 1er juin 1958 au 8 janvier 1959, sous le Président René Coty, Président du Conseil Lui-même dans le Gouvernement de Gaulle III, son prédécesseur était Pierre de Chevigné le ministre des Forces armées et son successeur Pierre Guillaumat. Il est 132e président du Conseil des ministres français, 148e chef du gouvernement du 1er juin 1958 au 8 janvier 1959, Président René Coty, dans le Gouvernement de Gaulle III, Législature IIIe législature, son prédécesseur est Pierre Pflimlin, son successeur est Michel Debré, Premier ministre. Il est 18e président de la République française du 8 janvier 1959 au 28 avril 1969 soit pendant 10 ans, 3 mois et 20 jours, élu le 21 décembre 1958, Réélu le 19 décembre 1965 ses premiers ministres sont successivement Michel Debré, Georges Pompidou, Maurice Couve de Murville, sont prédécesseur était René Coty pendant la IVe République, son successeur Alain Poher par intérim, puis Georges Pompidou élu.

En bref

Naître dans une famille de la bourgeoisie patriote à la fin du XIXe siècle, choisir la carrière des armes pour la revanche, traverser malgré les blessures et la captivité la Première Guerre mondiale avant d'aller vingt ans durant d'une unité à un état-major pour se retrouver – à l'approche de la cinquantaine et, déjà, de la retraite – simple colonel. Puis, quatre ans plus tard, surgir en héros national, libérateur du territoire et restaurateur de la république, personnage historique de première grandeur, c'est un singulier destin.
Se retirer dans son village pour écrire ses Mémoires de guerre, fonder un régime à 68 ans, le diriger en maître pendant onze années, puis accepter l'échec et le désaveu.
Survivre à cinq générations de grands de ce monde, s'asseoir à la table de Churchill, de Staline, de Roosevelt, puis voir défiler Attlee, Truman, apparaître Adenauer, traiter avec Macmillan, Eisenhower, Khrouchtchev, avec Harold Wilson, J. F. Kennedy, Brejnev et encore avec Edward Heath, L. B Johnson ou Nixon, Kiesinger ou Brandt, c'est une extraordinaire carrière.
Pourtant, ce furent là le destin et la carrière de Charles de Gaulle. Dans la vie de ce personnage hors série, on pourrait distinguer trois actes ou plutôt trois incarnations successives : de l'enfance à la Seconde Guerre mondiale, l'officier ; du 18 juin 1940 à la retraite de 1953, le résistant et l'homme politique ; et, après l'entracte de la traversée du désert, de 1958 à 1970, l'homme d'État.
L'empreinte qu'il aura laissée sur l'histoire de son temps, le caractère à la fois tragique et décisif de ses interventions dans la vie du pays, l'originalité exubérante de son personnage, l'ampleur de ses vues, les talents d'orateur, d'artiste et d'écrivain qu'il aura déployés pour les faire prévaloir, font sans doute de Charles de Gaulle le Français capital du XXe siècle
De quelque façon que l'on juge la décision prise le 18 juin 1940 par ce général de brigade à titre temporaire, son comportement avec ses alliés, ses rapports avec la résistance intérieure, la politique menée à la Libération, son départ brusqué en janvier 1946, la création du Rassemblement du peuple français, les conditions de son retour en 1958 et de l'émancipation de l'Algérie, le caractère donné au régime de la Ve République et sa conception de la grandeur, – on ne saurait nier que le général de Gaulle aura orienté un tiers de siècle de l'histoire de France, rendu à ce pays brisé par l'invasion nazie une espérance dont il ne dépendit pas de lui qu'elle fût plus créatrice et conféré à sa patrie, pendant dix ans, un poids dans les affaires du monde qui excédait manifestement les réalités matérielles de l'époque.
Chef de la France libre puis dirigeant du Comité français de Libération nationale pendant la Seconde Guerre mondiale, président du Gouvernement provisoire de la République française de 1944 à 1946, président du Conseil des ministres français de 1958 à 1959, instigateur de la Ve République fondée en 1958, il devient le 18e Président de la République française du 8 janvier 1959 au 28 avril 1969. Il est le premier à occuper la magistrature suprême sous la Cinquième République.
Élevé dans une culture de grandeur nationale, Charles de Gaulle choisit la carrière d'officier. Prisonnier lors de la Première Guerre mondiale, il sert et publie dans l'entourage de Philippe Pétain, prônant l'usage des divisions blindées dans la guerre moderne auprès de personnalités politiques. En mai 1940, colonel, il est placé à la tête d'une division blindée et mène plusieurs contre-attaques pendant la bataille de France ; il est promu général de brigade à titre temporaire le 25 mai 1940. Il est nommé sous-secrétaire d'État à la Guerre et à la Défense nationale dans le gouvernement Reynaud, pendant l'exode de 1940.
Il rejette l'armistice demandé par Pétain à l'Allemagne nazie. De Londres, il lance, à la BBC, l'appel du 18 juin 1940 au peuple français pour résister et rejoindre les Forces françaises libres. Condamné à mort, et déclaré déchu de la nationalité française par décret du 8 décembre 1940 par le régime de Vichy, il veut incarner la légitimité de la France et être reconnu en tant que puissance par les Alliés. Ne contrôlant que quelques colonies mais reconnu par la Résistance, il fusionne, en 1943, la France libre au sein du Comité français de Libération nationale, dont il finit par prendre la direction. Il dirige le pays à la Libération. Favorable à un exécutif fort, il s'oppose aux projets parlementaires des partis et démissionne en 1946. Il fonde le Rassemblement du peuple français RPF, mais son refus de tout compromis avec le régime des partis l'isole dans une traversée du désert.
De Gaulle revient au pouvoir lors de la crise du 13 mai 1958, pendant la guerre d'Algérie. Investi président du Conseil, il fait approuver la Ve République. Élu président de la République, il veut une politique de grandeur de la France. Il affermit les institutions, la monnaie, nouveau franc et donne un rôle de troisième voie économique à un État planificateur et modernisateur de l'industrie. Il renonce par étapes à l'Algérie française, malgré l'opposition des Pieds-Noirs et des militaires, qui avaient favorisé son retour. Il décolonise aussi l'Afrique noire, en y maintenant l'influence française. De Gaulle prône l'indépendance nationale en rupture avec le fédéralisme européen et le partage de Yalta : il préconise donc une Europe des nations qui irait de l'Atlantique à l'Oural, réalise la force de dissuasion nucléaire française, retire la France du commandement militaire de l'OTAN, pose un veto à l'entrée du Royaume-Uni dans la Communauté européenne, soutient le Québec libre, condamne la guerre du Viêt Nam et reconnait la Chine communiste.
Sa vision du pouvoir, c'est-à-dire un chef directement approuvé par la Nation, l'oppose aux partis communiste, socialiste, centristes pro-européens et d'extrême droite, qui critiquent un style de gouvernance trop personnel, voire un coup d'état permanent, selon la formule de François Mitterrand. Il est réélu en 1965 au suffrage universel direct. Il surmonte la crise de mai 68 après avoir semblé se retirer, convoquant des élections législatives qui envoient une écrasante majorité gaulliste à l'Assemblée nationale. Mais en 1969 il engage son mandat sur un référendum sur la réforme du Sénat et la régionalisation et démissionne après la victoire du non. Il se retire dans sa propriété de Colombey-les-Deux-Églises où il meurt, dix-huit mois plus tard.
Charles de Gaulle, considéré comme l'un des dirigeants français les plus influents de son siècle, est aussi un écrivain de renom. Il a notamment écrit des Mémoires, dans lesquels il s'identifie à une certaine idée de la France.

Sa vie

Les travaux généalogiques du grand-père et du père du général de Gaulle prétendaient rattacher la famille de Gaulle à une très ancienne famille de noblesse d'épée, inconnue cependant des nobiliaires français, issue d'un Richard de Gaulle, écuyer du roi Philippe Auguste qui l'avait doté d’un fief à Elbeuf-en-Bray, en Normandie, en 1210. Vers 1420 un Jehan de Gaulle, après le désastre d’Azincourt, résista pendant près de deux ans aux Anglais à Vire, dans l’ouest de la Normandie, avant de s'exiler en Bourgogne2 où, aux XVBI et XVIIe siècles, on retrouve trace de capitaines-châtelains de Gaulle à Cuisery : Gaspard de Gaulle, qualifié par le roi Charles IX de chevalier , fut délégué du bailliage de Chalon-sur-Saône aux états généraux de Blois en 1576. Ils se seraient ensuite installés en Champagne où, à Châlons-en-Champagne aux XVII et XVIIIe siècles, exerçant des charges de justice, ils se seraient intégrés à la noblesse de robe.
Les de Gaulle s'installent à Paris vers le milieu du XVIIIe siècle. L’arrière-arrière-grand-père du général de Gaulle, Jean-Baptiste de Gaulle 1720-1797 était procureur auprès du Parlement de Paris. Il est le père d'un autre Jean-Baptiste de Gaulle 1759-1832, cité dans les généalogies comme avocat au parlement de Paris qui comparut devant le Tribunal révolutionnaire pendant la Terreur mais réussit à éviter la guillotine3. Les de Gaulle résidaient depuis près de cent cinquante ans à Paris quand Charles de Gaulle naquit à Lille en 1890.
La famille maternelle de Charles de Gaulle, les Maillot, était originaire de la Flandre française. C'est du côté de cette famille maternelle que le général de Gaulle avait des ancêtres irlandais, les MacCartan, Jacobites réfugiés en France après la Glorieuse Révolution, écossais, les Fleming, et allemands, les Kolb, du duché de Bade. Le grand-père maternel du général de Gaulle était un industriel lillois.
Bien que la famille de Gaulle vécût à Paris, la mère du général de Gaulle se rendit dans sa famille à Lille pour donner naissance à son fils, en accord avec la tradition familiale de la famille Maillot.

Éducation et famille

Issu d'une famille catholique résidant à Paris au 15 de l'avenue de Breteuil, Charles André Joseph Pierre-Marie de Gaulle est le fils de Jeanne Maillot et d'Henri, professeur de lettres, d'histoire et de mathématiques au collège de l'Immaculée-Conception de Paris, dirigé par les Jésuites.
Charles de Gaulle a trois frères et une sœur :

Xavier de Gaulle 1887-1955, prisonnier de guerre, puis résistant pendant la Seconde Guerre mondiale. Il est notamment le père de Geneviève de Gaulle-Anthonioz ;
Marie-Agnès de Gaulle 1889-1982, nommée à titre honorifique colonel dans l'armée russe en 1950;
Jacques de Gaulle 1893-1946, handicapé en 1926 à la suite d'une encéphalite, père de quatre fils : François père blanc, Bernard 27 août 1923, Jean et Pierre, 13 août 1926 ;
Pierre de Gaulle 1897-1959, résistant, homme politique et administrateur de sociétés.
Très tôt, grâce à son père, Charles découvre les œuvres de Maurice Barrès, Henri Bergson et Charles Péguy. Son père se dit monarchiste de regret et lit L'Action française, mais croit en l'innocence de Dreyfus. Sa mère est davantage passionnée de politique : dès la première page des Mémoires de guerre, Charles de Gaulle rend hommage à sa mère admirée, qui portait à la patrie une passion intransigeante à l'égal de sa piété religieuse.

Ascendance de Charles de Gaulle

Charles de Gaulle fait une partie de ses études primaires à l'école des Frères des écoles chrétiennes de la paroisse Saint-Thomas-d'Aquin. Il a son père comme enseignant. Lors de la crise politico-religieuse résultant des lois de 1901 et 1904, Charles de Gaulle est inscrit pour poursuivre ses études chez les jésuites français en Belgique au collège du Sacré-Cœur installé au château d'Antoing8, vivant ainsi sa première expérience d'exil.
Il a quinze ans quand, en 1905, il rédige un récit dans lequel il se décrit en général de Gaulle sauvant la France, témoignage d'une ambition nationale précoce9. Plus tard, il expliquera à son aide de camp Claude Guy avoir eu dès son adolescence la conviction qu'il serait un jour à la tête de l'État.
Entré 119e sur 221 à l'École militaire de Saint-Cyr en 1908, après avoir suivi une année de préparation au collège Stanislas11 à Paris, il en sort diplômé en 1912, se classant à la 13e place, et rejoint l'infanterie. Il choisit d'être affecté au 33e régiment d'infanterie à Arras et se retrouve sous les ordres du colonel Pétain.

Première Guerre mondiale Charles de Gaulle

Allégeance France
Arme Armée de terre
Grade Général de brigade
Années de service 1908 – 194012
Conflits Première Guerre mondiale
Seconde Guerre mondiale
Faits d'armes Bataille de Dinant
Bataille de Verdun
Bataille de Montcornet
Bataille d'Abbeville
Bataille de Dakar
Autres fonctions Homme d'État
Président du gouvernement provisoire de 1944 à 1946
Président du Conseil des ministres français en 1958
Président de la République de 1959 à 1969
Famille De Gaulle

Première Guerre mondiale 1914.


Lieutenant depuis le 1er octobre 1913, il est nommé capitaine en janvier 191513. Dès son premier combat à Dinant le 15 août 1914, il est touché à la jambe, fracture du péroné par balles avec éclats dans l'articulation. Il rejoint ensuite le 33e RI sur le front de Champagne pour commander la 7e compagnie. Il est à nouveau blessé le 10 mars 1915, à la main gauche, à Mesnil-Les-Hurlus en Champagne. Décidé à en découdre, il désobéit à ses supérieurs en ordonnant de tirer sur les tranchées ennemies. Cet acte lui vaut d'être relevé huit jours de ses fonctions. Officier tatillon, volontiers cassant, son intelligence et son courage face au feu le distinguent au point que le commandant du 33e RI lui offre d'être son adjoint.
Le 2 mars 1916, son régiment est attaqué et décimé par l'ennemi en défendant le village de Douaumont, près de Verdun. Sa compagnie est anéantie au cours de ce combat et les survivants sont encerclés. Tentant alors une percée, la violence du combat l'oblige à sauter dans un trou d'obus pour se protéger, mais des Allemands le suivent et le blessent d'un coup de baïonnette à la cuisse gauche. Capturé par les troupes allemandes, il est soigné et interné.

Ses états militaire

M. De Gaulle, Charles André, Joseph, Capitaine commandant la 10° Compagnie du 33° Régiment d’Infanterie, a été nommé dans l'ordre de la Légion d'Honneur au grade de chevalier.
À Douaumont le 2 mars 1916 sous un effroyable bombardement, alors que l'ennemi avait percé la ligne et attaquait sa compagnie de toute part, a organisé après un corps à corps farouche, un îlot de résistance où tous se battirent jusqu'à ce que fussent dépensées les munitions, fracassés les fusils et tombés les défenseurs désarmés ; bien que très grièvement blessé d'un coup de baïonnette, a continué à être l'âme de la défense jusqu'à ce qu'il tombât inanimé sous l'action des gaz.
La présente nomination comporte l'attribution de la croix de guerre avec palme.
Le maréchal de France, commandant les armées de l'Est
Après une tentative d'évasion manquée à Osnabrück, il est transféré au fort d'Ingolstadt, en Bavière, un camp de représailles destiné aux officiers prisonniers remuants. Il y croise le futur général Georges Catroux, l'aviateur Roland Garros, le journaliste Rémy Roure, l'éditeur Berger-Levrault et le futur maréchal soviétique Mikhaïl Toukhatchevski. Un lamentable exil, c'est en ces termes qu'il décrit à sa mère son sort de captif. Pour tromper l'ennui, de Gaulle organise pour ses compagnons de captivité des exposés magistraux sur l'état de la guerre en cours. Mais surtout, il tente de s'évader à cinq reprises, sans succès au cours de sa détention de trente-deux mois dans une dizaine de camps différents, Osnabruck, Neisse, Sczuczyn, Ingolstadt, forteresse de Rosenberg de, prison militaire de Passau, camps de Wülzburg de et de Magdebourg. Il est libéré après l'armistice du 11 novembre 1918 et retrouve les siens le mois suivant. De ces deux ans et demi de captivité, il garde un souvenir amer, estimant être un revenant, un soldat inutile qui n'a servi à rien. Toutefois, il reçoit la croix de chevalier de la Légion d'honneur, le 23 juillet 1919, et la croix de guerre 1914-1918 avec étoile de bronze.

Entre-deux-guerres

Charles de Gaulle poursuit sa carrière militaire sous la protection de Pétain, dans un premier temps. De 1919 à 1921, il est envoyé en Pologne, qui vient juste d'accéder à l'indépendance. Sur place, il participe à la formation de la nouvelle armée polonaise luttant victorieusement contre l'Armée rouge dans la Guerre soviéto-polonaise. Il donne à nouveau des conférences et observe le retour à une guerre de mouvement liée aux circonstances.

Charles de Gaulle épouse, le 7 avril 1921 dans l'église Notre-Dame de Calais, Yvonne Vendroux 1900-1979. Ils ont trois enfants :
Philippe de Gaulle, né le 28 décembre 1921 à Paris, amiral puis sénateur ;
Élisabeth de Gaulle, née le 15 mai 1924 à Paris et décédée le 2 avril 201321 ;
Anne de Gaulle, née le 1er janvier 1928 à Trèves et décédée le 6 février 1948 à Colombey-les-Deux-Églises, née trisomique.
À son retour, le capitaine de Gaulle est chargé de cours d'histoire à l'École de Saint-Cyr, avant son admission à l'École supérieure de guerre en 1922. En conflit de doctrine avec ses supérieurs dont il conteste la vision stratégique trop liée à la planification défensive et compartimentée du terrain, mais bénéficiant de la protection du maréchal Pétain, il est mal noté, mais continue de se faire une réputation prometteuse.
En 1924, le maréchal Pétain fit rectifier les notes jugées injustes infligées à son protégé.
En 1925, il est détaché à l'état-major du maréchal Pétain, vice-président du Conseil supérieur de la Guerre. Celui-ci l'impose comme conférencier à l'École de guerre et lui demande de préparer la rédaction d'un ouvrage sur l'histoire du soldat. En 1927, en présence du maréchal Pétain, il présente à l'École de guerre trois conférences remarquées, respectivement intitulées : L'action de guerre et le chef, Du caractère, et enfin Du prestige.

Le militaire

Promu chef de bataillon le 25 septembre 1927, il part le mois suivant pour Trèves prendre le commandement du 19e bataillon de chasseurs à pied BCP. Il y conduit un commandement énergique et continue ses conférences comme dans son poste suivant. En 1929, il est muté au Levant et passe deux ans à Beyrouth avec sa famille.
Grâce à l'appui du maréchal Pétain, il est affecté en novembre 1931 au Secrétariat général de la défense nationale à Paris. Ce nouveau poste est capital, car c'est l'occasion de s'initier aux affaires de l'État, puisqu'il est chargé en particulier de travailler au projet de loi militaire. Le 25 décembre 1933, il est promu lieutenant-colonel.
C'est durant ces années que Charles de Gaulle développe ses théories militaires : il publie La Discorde chez l'ennemi 1924, Le Fil de l'épée 1932, Vers l'armée de métier 1934 et enfin La France et son armée 1938.
Ce dernier livre, préparé d'abord en 1925 pour Philippe Pétain et auquel de Gaulle se consacra pendant deux ans, ne fut finalement pas retenu par le maréchal, qui l'ayant remanié confia le travail à un autre. Ceci blessa de Gaulle qui dédia néanmoins au maréchal Pétain son ouvrage Le Fil de l'épée : Car rien ne montre mieux que votre gloire, quelle vertu l'action peut tirer des lumières de la pensée. En 1938, de Gaulle décida de publier sous son nom son texte et en avertit Pétain. Pour arranger les choses, le maréchal le reçut chez lui et lui proposa de rédiger une préface que de Gaulle ne reprit pas, d'où une brouille définitive entre les deux hommes qui ne se reverront brièvement qu'en juin 1940.
Dans son premier ouvrage, de Gaulle insiste sur la nécessité de l'unité du commandement et de la nation, donnant la primauté au politique sur le militaire. C'est selon lui à cause de ses divisions que l'Allemagne a perdu. En publiant la reprise de ses conférences sur le rôle du commandement, en 1932, dans Le Fil de l'épée il rappelle l'importance de la formation des chefs et le poids des circonstances. Si de Gaulle étudie l'importance de la défense statique au point d'écrire : La fortification de son territoire est pour la France une nécessité permanente … L'encouragement de l'esprit de résistance d'un peuple par l'existence de fortifications permanentes, la cristallisation, l'exaltation de ses énergies par la défense des places sont des faits que les politiques comme les militaires ont le devoir de reconnaître dans le passé et de préparer dans l'avenir, il n'en est pas moins sensible aux idées du général Jean-Baptiste Eugène Estienne sur la nécessité d'un corps de blindés, alliant le feu et le mouvement, capable d'initiatives et d'offensives hardies. Sur ce point il entre de plus en plus en opposition avec les doctrines officielles, en particulier celles de Pétain.
Dans son ouvrage Vers l'Armée de métier, il développe cette question de fond qui nécessite la création d'une armée professionnelle aux côtés de la conscription. Il devient alors le promoteur de la création d'unités blindées autonomes non liées à l'infanterie. Cependant, cette idée rencontre peu d'échos favorables, à l'exception notable de Paul Reynaud, député de centre-droit, ou de Philippe Serre.
À l'étranger, en revanche, l'idée du général Jean-Baptiste Eugène Estienne d'employer des blindés dans une percée motorisée reprise par de Gaulle a déjà suscité la plus grande attention Heinz Guderian, Liddell Hart. Vers l'armée de métier n'a en France qu'un bref succès de curiosité et n'exerce aucune influence sur le général Guderian, déjà en train de créer la force mécanique allemande.
En revanche, contrairement à son influent aîné le colonel Émile Mayer, de Gaulle, attaché à la professionnalisation de l'armée de terre, ne perçoit pas l'importance de l'aviation à laquelle il n'attribue qu'un rôle secondaire : les troupes à terre recevront de l'aviation une aide précieuse quant à leur camouflage. Les fumées épandues sur le sol du haut des airs cachent en quelques minutes de vastes surfaces du sol tandis que le bruit des machines volantes couvre celui des moteurs chenillés. Il faudra attendre l'édition de 1944 où il fera ajouter une phrase : Mais surtout en frappant elle-même à vue directe et profondément, l'aviation devient par excellence l'arme dont les effets foudroyants se combinent le mieux avec les vertus de rupture et d'exploitation de grandes unités mécaniques.
À Paris, de Gaulle fréquente diverses personnalités autour du colonel Émile Mayer, retraité très ouvert, favorable à une réforme de la stratégie : l'état-major ne doit pas se contenter d'une stratégie défensive derrière la ligne Maginot. Cependant, ni l'un ni l'autre ne sont écoutés. Partant des idées du général Fuller et du critique militaire britannique Liddell Hart, Charles de Gaulle défend une guerre de mouvement menée par des soldats de métier, et appuyée par des blindés.
En revanche, en Allemagne, les théories de Charles de Gaulle sont suivies avec intérêt en haut lieu, Albert Speer rapportant notamment qu'Adolf Hitler avait lu à plusieurs reprises le livre du général de Gaulle et qu'il affirmait avoir beaucoup appris grâce à lui.

Avant la guerre

Charles de Gaulle fait une conférence à la Sorbonne au printemps 1934, sous l'égide du cercle Fustel de Coulanges, une vitrine de l’Action française. Influencé originellement par la tradition monarchiste, Charles de Gaulle, militaire soumis au devoir de réserve, révèle dans sa correspondance privée son peu de considération pour le parlementarisme et lui préfère un régime fort, tout en se tenant publiquement à l'écart de l’anti-républicanisme d'une partie de l'armée. Cette méfiance à l'égard du parlementarisme explique que Charles de Gaulle se soit senti avant la guerre proche de l'Action française, avant que la position de Maurras relative aux accords de Munich ne l'en éloignent. Ainsi, Paul Reynaud, qui rencontra en captivité en Allemagne la sœur du général de Gaulle, Marie-Agnès Caillau, note dans ses carnets de captivité parlant de cette dernière : Très franche, intelligente et bonne, elle nous raconte que Charles était monarchiste, qu'il défendait Maurras contre son frère Pierre jusqu'à en avoir les larmes aux yeux dans une discussion. Mais au moment de Munich, il a désapprouvé entièrement l'attitude de Maurras. De même, Christian Pineau dira à André Gillois que le général avait reconnu devant lui qu’il avait été inscrit à l’Action française et qu’il s’était rallié à la République pour ne pas aller contre le sentiment des Français. Lui-même résistant de gauche, Claude Bourdet qualifiera de Gaulle d’homme de droite, longtemps proche de l’Action française, devenu républicain par mimétisme. Selon Edmond Michelet, de Gaulle subit l’influence de Maurras. Ses idées se heurtent pourtant d'une part au profond conservatisme des dirigeants militaires, et d'autre part aux réticences des républicains face à un militaire de réputation maurrassienne.
Pourtant, si la pensée de Maurras a influencé de Gaulle, celui-ci est aussi un disciple de Péguy, influencé par le socialisme de Pierre Leroux et de Bergson. Il a été formé par le colonel Mayer, officier d'origine israélite, dreyfusard et socialisant. Ayant avant la Première Guerre mondiale assisté à Lille à des meetings de Jaurès, il a aussi fréquenté le socialiste Club du Faubourg et les mouvements non-conformistes des années Esprit. Il adhéra également aux Amis de Temps Présent, groupe de militants qui soutenait Temps présent, comme l'indique Éric Roussel, qui signale cependant que de Gaulle n'est pas devenu pour autant démocrate-chrétien, loin s'en faut. Cet hebdomadaire est en effet de la mouvance catholique progressiste et proche du Sillon de Marc Sangnier, mouvance qui fut favorable au Front populaire et à l'intervention de la France aux côtés des Républicains espagnols. L'hebdomadaire Temps présent saluera la nomination de Charles de Gaulle comme sous-secrétaire d'État à la guerre dans son dernier numéro de juin 1940, comme le signale le Centre d'information sur le gaullisme, signalant au passage que de Gaulle fut aussi l'un des premiers abonnés à Sept, hebdomadaire à direction religieuse dont Temps présent était le successeur.
Le 1er janvier 1934, Charles de Gaulle publie dans la revue militaire une étude sur la mobilisation économique à l'étranger. À la recherche d'exemples pour la France, il cite parmi d'autres l'Italie mussolinienne. Le général de Gaulle fera l'apologie du livre La réforme de l'État publié par André Tardieu en 1934 et dira s'en être inspiré pour la constitution de la Ve République.
De fait, avant la guerre, de Gaulle n'est pas un idéologue, mais un homme d'action et d'ambition prêt à faire son miel de tout.
À cette fin, il se rapproche d'hommes politiques de différentes tendances pour se faire connaître et faire progresser ses idées. S'il fréquente beaucoup Paul Reynaud à qui il écrira soixante fois de 1936 à 1940, il se rapproche également de Marcel Déat qui après avoir rompu avec Léon Blum, souhaite intégrer au projet socialiste les valeurs d'ordre, d'autorité et de nation. De Gaulle rencontre Marcel Déat à plusieurs reprises grâce à un de ses proches, l'avocat Jean Auburtin ; les deux hommes s'estiment et resteront en contact jusqu'à la veille du conflit. De Gaulle affirme à propos de Marcel Déat en novembre 1937 : Déat a sans aucun doute un grand talent et une haute valeur. C'est de quoi on lui en veut. Mais patience, je crois qu'on le verra remonter et aller très haut.
À la publication de l'ouvrage, Léon Blum manifeste sa vive hostilité pour les idées de l'armée de métier du colonel de Gaulle dans trois articles publiés par le Populaire, car il craint qu'elle ne soit utilisée contre le peuple, notamment les grévistes. Et, de fait, comme le montre une lettre de 1935 envoyée à Paul Reynaud, de Gaulle n'excluait nullement une telle possibilité. Certains passages des livres publiés par le colonel de Gaulle suscitent d'ailleurs l'approbation de l'Action française.
En 1935, de Gaulle approuve le pacte franco-soviétique signé par Laval et Staline, évoquant l'alliance de François Ier avec les Musulmans contre Charles Quint pour justifier une alliance destinée à assurer la survie du pays pour justifier un accord avec les Russes quelque horreur que nous ayons pour leur régime. La vision de De Gaulle fait abstraction des idéologies qui pour lui comptent peu face aux permanences géopolitiques et nationales, l'alliance est avec les Russes, non avec le communisme, de même que la guerre est contre l'Allemagne, non contre le national-socialisme.
Charles de Gaulle explique dans Vers l'armée de métier quelle est la condition pour faire aboutir ses idées qui sont d'abandonner le service militaire universel au profit d'une armée motorisée composée exclusivement de professionnels : Il faut qu'un maître apparaisse, indépendant dans ses jugements, irrécusable dans ses ordres, crédité par l'opinion. Serviteur du seul État, dépouillé de préjugés, dédaigneux des clientèles, commis enfermé dans sa tâche, pénétré de longs desseins, au fait des gens et des choses du ressort, faisant corps avec l'armée, dévoué à ceux qu'il commande, homme assez fort pour s'imposer, assez habile pour séduire, assez grand pour une grande œuvre, tel sera le ministre, soldat ou politique, à qui la patrie devra l'économie prochaine de sa force. Il affirme également :Il n'est point de regroupement, de parti, de consul, qui n'invoque le redressement, l'ordre nouveau, l'autorité. Nul doute qu'à bref délai le jeu des institutions, suivant le mouvement des besoins, n'ouvre le champ aux résolus. Cet appel à la figure du grand homme était déjà présente dans Le Fil de l'épée, où, dès 1932, il exalte, les ambitieux de premier rang ... qui ne voient d'autre raison que d'imprimer leur marque aux événements ; dans cet ouvrage, il affirme également : On ne fait rien de grand sans de grands hommes, et ceux-ci le sont pour l'avoir voulu. Dans le Fil de l'épée, il dresse le portrait de l'ambitieux de haute stature qui n'est pas seulement un soldat : c'est un soldat qui parfois prend en charge les affaires de la nation et il offre comme exemples Louvois et Carnot, dictateurs de guerre.
Néanmoins, Blum se laisse progressivement intéresser par la thématique des chars qu'il soutiendra tardivement au moment de la guerre.
En juillet 1937, le lieutenant-colonel de Gaulle est affecté au 507e régiment de chars de combat basé au quartier Lizé à Montigny-lès-Metz. C'est la rencontre concrète avec « son » outil. Il en prend le commandement par intérim en septembre suivant, sous les ordres du général Charles Delestraint. Lieutenant-colonel depuis le 25 décembre 1933, il est promu colonel le 25 décembre 1937. Lors des manœuvres, il tente d'imposer, contre le règlement, sa conception de l'usage autonome des blindés, ce qui lui vaut l'hostilité de son supérieur, le général Henri Giraud.

Seconde Guerre mondiale

Lorsque la guerre éclate, Charles de Gaulle est toujours colonel, commandant le 507e régiment de chars de combat RCC, à Metz. En janvier 1940, il envoie à quatre-vingts personnalités, dont Léon Blum et Paul Reynaud, ainsi qu'aux généraux Maurice Gamelin et Maxime Weygand, un mémorandum fondé sur les opérations de Pologne. Intitulé L'Avènement de la force mécanique, le texte insiste sur la nécessité d'allier le char et l'aviation.
Trois jours avant l'offensive allemande du 10 mai 1940, qui conduit à une percée rapide du front français, le colonel de Gaulle est averti de la décision du commandement de lui confier la 4e DCR, la plus puissante des grandes unités blindées de l'armée française, 364 blindés52 dont il prend effectivement le commandement le 11 mai.
Le 15 mai, il reçoit la mission de retarder l'ennemi dans la région de Laon afin de gagner des délais nécessaires à la mise en place de la 6e armée chargée de barrer la route de Paris. Mais sa division blindée n'est encore qu'en cours de constitution, ses unités n'ayant jamais opéré ensemble. Il dirige pourtant avec cette unité une contre-attaque vers Montcornet, au nord-est de Laon. C'est l'une des seules qui parvient à repousser momentanément les troupes allemandes. Prévoyant la défaite rapide de l'armée française sous l'offensive allemande, les civils et les militaires désarmés sur les routes, il affirme que c'est durant la journée du 16 mai que ce qu'il a pu faire, par la suite, c'est ce jour-là qu'il l'a résolu. N'ayant reçu qu'une partie des unités de la 4e DCR, le colonel de Gaulle lance une première attaque avec 80 chars pour tenter de couper les lignes de communication des divisions blindées allemandes le 17 mai. Après avoir atteint ses objectifs dont la ville de Montcornet, la 4e DCR, n'étant pas appuyée, est contrainte de se replier face à l'intervention de renforts ennemis. Les autres unités de la 4e DCR ayant rejoint, une nouvelle attaque peut être lancée avec 150 chars qui, après avoir permis d'atteindre les premiers objectifs, est arrêtée par l'intervention de l'aviation d'assaut et de l'artillerie allemandes.
Charles de Gaulle en compagnie du Premier ministre du Royaume-Uni, Winston Churchill à Marrakech en 1944, durant la Seconde Guerre mondiale.
Le 25 mai 1940, il est nommé général de brigade à titre temporaire. Cette nomination, dans une promotion de six colonels, correspond au fait que de Gaulle en tant que commandant d'une division blindée depuis le 7 mai 1940, fait déjà fonction de général, ses trois collègues commandants de division blindée DCR étant tous déjà généraux. Elle suscite la satisfaction de Charles Maurras dans l'Action française.
Trois jours plus tard, le 28 mai, il attaque à deux reprises pour détruire une poche que l'ennemi a conquise au sud de la Somme, à hauteur d'Abbeville. Malgré un déplacement préalable de 200 km qui a lourdement éprouvé le matériel de la 4e DCR, l'opération est un succès. Elle permet de faire plus de 400 prisonniers et de résorber toute la poche à l'exception d'Abbeville, en raison de la supériorité en nombre et en artillerie de l'adversaire. Celui-ci ne peut franchir la Somme que plus tard au nord d'Abbeville, mais une deuxième attaque ne permet pas à la 4e DCR de prendre la ville.
Commentant le comportement militaire de De Gaulle sur le terrain, l'historien Henri de Wailly avance que celui-ci, loin d'avoir été particulièrement brillant, a montré dans la bataille, les mêmes faiblesses et les mêmes incompétences que les autres dirigeants militaires. De son côté, le général Weygand, chef des armées, décerne, le 31 mai 1940, au général, à titre temporaire de Gaulle une citation très élogieuse en tant que commandant d'une division blindée près d' Abbeville : Chef admirable de cran et d'énergie. A attaqué avec sa division la tête de pont d'Abbeville très solidement tenue par l'ennemie. A rompu la résistance allemande et progressé de 14 kilomètres à travers les lignes ennemies, faisant des centaines de prisonniers et capturant un matériel considérable.
Le 6 juin, le général de Gaulle est convoqué d'urgence à Paris par Paul Reynaud, président du Conseil, pour occuper un poste ministériel dans son gouvernement, celui de sous-secrétaire d'État à la Guerre et à la Défense nationale. Charles de Gaulle sort alors de la hiérarchie militaire. Il a pour mission de coordonner l'action avec le Royaume-Uni pour la poursuite du combat. Le 9 juin, il rencontre Churchill qu'il tente en vain de convaincre d'engager davantage de forces, y compris aériennes, dans la bataille. Le 10 juin, de Gaulle quitte Paris qui est déclarée ville ouverte. Il rejoint alors Orléans, Briare et Tours. C'est le moment des ultimes réunions du Comité suprême interallié où Churchill, lors de la conférence de Briare à laquelle de Gaulle participe, tente de convaincre le gouvernement français de continuer la guerre. Le 16 juin, il est en mission à Londres. Il y dicte au téléphone la note de Jean Monnet à Paul Reynaud, intitulée Anglo-French Unity, et qui évoque une possible union franco-britannique. De retour de mission, à Bordeaux, il apprend, le 17 juin 1940, la démission du président du Conseil, Paul Reynaud, son remplacement par le maréchal Pétain et la demande d'armistice. Le même jour, le général Weygand alors chef d'état-major de l'Armée est nommé ministre de la Défense nationale. Le transfert des pouvoirs au maréchal Pétain n'ayant lieu que le lendemain, de Gaulle est encore membre du gouvernement et court alors peu de risque60. Après maintes hésitations selon l'officier de liaison le général britannique Edward Spears, il a l'intention de regagner Londres. Il rencontre Paul Reynaud pour lui faire part de son projet. Ce dernier lui fait remettre par son ex-directeur de cabinet Jean Laurent 100 000 francs prélevés sur les fonds secrets pour sa logistique à Londres. Le 17 juin, accompagnant Spears qui n'a pas réussi à convaincre Reynaud et Georges Mandel de rejoindre Londres, il s'envole à Londres avec son aide de camp Geoffroy Chodron de Courcel dans le de Havilland Flamingo, son avion de la veille que Churchill a laissé à sa disposition.

Appel du 18 juin 1940

Le 18 juin 1940, de Gaulle se prépare à parler au peuple français via Radio Londres de la BBC. Ce jour-là, il appelle les Français, et tout particulièrement les militaires, à la résistance depuis l'Angleterre où il s'est réfugié. En France, l'Appel du 18 juin peut être entendu à 19 heures. Depuis ce jour, ce texte demeure l'une des plus célèbres allocutions de l’Histoire de France, à l'origine du mythe faisant du général le père de la Résistance alors que ce dernier ne prend conscience de l'intérêt de la Résistance intérieure qu'à partir de 1941. Aucun enregistrement n'a été conservé, contrairement au discours du 22 juin 1940, que l'on confond parfois avec le véritable appel.
Le gouvernement britannique avait au préalable proposé au ministre français de l'Intérieur Georges Mandel de passer au Royaume-Uni et de lancer lui-même un appel. Par ses avertissements répétés contre les menaces du IIIe Reich, et en opposition à ce sujet avec son ami le président du Conseil Léon Blum, Mandel s'était signalé comme un homme d'État et de caractère. Tout au long de la journée du 18 juin, le Conseil des ministres britannique discute du texte de De Gaulle. Le cabinet britannique tente de s'y opposer, mais Winston Churchill le soutient65. Les anciens Munichois, derrière le ministre des Affaires étrangères lord Halifax, veulent encore ménager le gouvernement Pétain et attendre de voir s'il va effectivement signer l'Armistice. Winston Churchill, vieux partisan de la fermeté contre Hitler et de la poursuite de la lutte, doit mettre son autorité dans la balance. De Gaulle peut finalement prononcer son texte, mais doit accepter d'en modifier les deux premières lignes66 dans un sens moins dur pour le gouvernement français. Cette modification longtemps occultée disparait dans le texte transmis à la presse, puis dans les Mémoires de De Gaulle.
Le 19 juin, Weygand, supérieur hiérarchique de De Gaulle, lui ordonne de revenir de Londres, ignorant l'invitation à poursuivre le combat que ce dernier lui adresse. Peu après, de Gaulle est rétrogradé au rang de colonel par son ministre qui convoque successivement deux tribunaux militaires, le premier n'ayant prononcé qu'une peine symbolique. Le second condamne à mort le chef de la France libre, le 2 août 1940.

La France libre et Forces françaises libres.

De Londres, de Gaulle crée puis dirige les Forces françaises libres. Il est reconnu par Winston Churchill chef des Français libres le 27 juin 1940. Le but n'est pas de mettre en place une légion de volontaires qui continuerait la lutte aux côtés de l'Empire britannique. Il s'agit pour de Gaulle de remettre la France en tant que telle dans la guerre contre Hitler, en formant une armée et un contre-État doté de tous les attributs de souveraineté et légitimité, et qui se donne une base territoriale en ralliant les territoires français de l'Empire colonial, future plate-forme de la reconquête.
Dès le début de l'été 1940, à partir de presque rien et assisté de quelques volontaires, de Gaulle jette ainsi les bases d'une marine FNFL, d'une aviation FAFL, de forces terrestres FFL, d'un service de renseignements le BCRA du colonel Passy, vite actif en métropole. La Croix de Lorraine proposée par l'amiral Muselier, devient son emblème. Les statuts juridiques de la France libre et ses rapports avec le gouvernement anglais sont fixés par le juriste René Cassin. La France libre a bientôt sa banque, son journal officiel, ses décorations — le Général fonde l'Ordre de la Libération à Brazzaville dès octobre 1940, pour honorer ses compagnons. Des comités français libres actifs dans le monde entier se constituent et tentent de rallier à de Gaulle les Français de l'étranger, les opinions et les gouvernements.
En France, de Gaulle est condamné deux fois par contumace, d'abord à quatre ans de prison et la perte de la nationalité française, puis, le 2 août 1940, le Tribunal militaire de Clermont-Ferrand le condamne à mort, dégradation militaire et confiscation de ses biens meubles et immeubles pour trahison, atteinte à la sûreté extérieure de l'État, désertion à l'étranger en temps de guerre sur un territoire en état de guerre et de siège. En Grande-Bretagne, il trouve en revanche le soutien de Winston Churchill, mais aussi celui du Parlement, de la presse et de l'opinion publique, reconnaissantes au gallant French d'être resté aux côtés du pays au pire moment de la menace allemande. Cet appui, comme celui de l'opinion américaine, se révèle plus tard un atout très précieux lors des tensions avec Londres et Washington.
Obtenant le ralliement de plusieurs possessions coloniales françaises, notamment en Afrique grâce au ralliement rapide du gouverneur Félix Éboué, le 28 août le Tchad, le Congo et le Cameroun, le Gabon étant conquis dans le mois de novembre 1940, de Gaulle se place à la tête du Comité national français à partir du 24 septembre 1941. Mais il fait surtout en sorte que la France reste présente dans le camp allié, par ses Forces françaises libres FFL qui continuent le combat sur les différents fronts. En outre, à partir de 1941-1942, il stimule et obtient le ralliement de la résistance intérieure, grâce au colonel Passy, à Pierre Brossolette et à Jean Moulin. Le 13 juillet 1942, le Comité national français propose au gouvernement britannique, qui l'accepte, de changer l'appellation officielle du mouvement France libre en France combattante, afin d'intégrer la Résistance intérieure.
De nombreux facteurs s'opposaient à ce rapprochement de la résistance intérieure et des forces française libres. Dans La France de Vichy, Robert O. Paxton remarque qu'en 1940, bien des résistants de gauche refusent de voir un chef convenable dans ce militaire qu'ils croient à tort proche de l'Action française. Beaucoup de résistants de droite lui reprochent sa dissidence explicite avec Vichy — à moins qu'ils ne préfèrent, comme Marie-Madeleine Fourcade, n'avoir de relations qu'avec les services secrets britanniques. Selon Jean Pierre-Bloch, Christian Pineau, Henri d'Orléans comte de Paris et même le gaulliste Pierre Lefranc, le ralliement à la République n'aurait d'ailleurs été que tactique.
Dès 1940, de Gaulle n'a de cesse que soient protégés les intérêts de la France, dans la guerre et après le conflit. Le 7 août 1940, il obtient ainsi de Churchill la signature de l'accord des Chequers, par lequel le Royaume-Uni s'engage à sauvegarder l'intégrité de toutes les possessions françaises et à la restauration intégrale de l'indépendance et de la grandeur de la France. Le gouvernement britannique s'engage de plus à financer toutes les dépenses de la France libre, mais de Gaulle insiste pour que ces sommes soient des avances remboursables et pas des dons qui jetteraient une ombre, aussi ténue soit-elle, sur l'indépendance de son organisation.
Malgré les relations de confiance scellées par traités entre Churchill et de Gaulle, les deux hommes ont des relations parfois tendues, gênées par l'anglophobie que manifestait le Général dans les années 1920 et 1930. Et quand Churchill, à court d'arguments, lance à de Gaulle : Mais vous n'êtes pas la France ! Vous êtes la France combattante, nous avons consigné tout cela par écrit, de Gaulle réplique immédiatement : J'agis au nom de la France. Je combats aux côtés de l'Angleterre mais non pour le compte de l'Angleterre. Je parle au nom de la France et je suis responsable devant elle. Churchill abdique alors en poussant un J'avais espéré que nous pourrions combattre côte à côte. Mais mes espoirs ont été déçus parce que si vous êtes si combatif que non content de lutter contre l'Allemagne, l'Italie et le Japon, vous voulez aussi combattre l'Angleterre et l'Amérique…. De Gaulle recadre alors le débat en précisant : Je prends cela comme une plaisanterie, mais elle n'est pas du meilleur goût. S'il y a un homme dont les Anglais n'ont pas à se plaindre, c'est bien moi.
Les relations avec Franklin Delano Roosevelt sont plus problématiques. Le président américain, personnellement francophile, a été déçu par l'effondrement de la France en 1940 et refroidi à l'égard de De Gaulle par l'échec de son entreprise devant Dakar, fin septembre 1940. Les antigaullistes français sont nombreux à Washington, par exemple l'ancien secrétaire général du Quai d'Orsay Alexis Léger, Saint-John Perse qui lui décrit ce général comme un apprenti dictateur. Le président est aussi très mal informé sur la situation en France par l'ambassadeur américain à Vichy, jusqu'au mois de mai 1942, l'amiral Leahy, lui-même intoxiqué par les pétainistes. Il n'a donc aucune confiance en de Gaulle. Un mot de De Gaulle à Churchill explique en partie l'attitude française face à l'Amérique : Je suis trop pauvre pour me courber. De surcroît, au contraire du Général qui mise beaucoup sur l'Empire français, le président américain est profondément hostile au système colonial. Roosevelt projetait de faire de la France un État faible, et le projet d'Allied Military Government of Occupied Territories AMGOT allait d'ailleurs très loin dans cette direction, en traitant la France comme un vaincu, plutôt que comme une des puissances victorieuses. La haine de Roosevelt était tellement flamboyante (il considérait de Gaulle au pire comme un futur tyran, au mieux comme un opportuniste que même ses adjoints finirent par en prendre ombrage, y compris le Secrétaire d'État Cordell Hull qui, finalement, se rangea aux côtés de la France libre et de son chef.
Jusqu'en 1943, les gouvernements en exil en Angleterre s'étaient contentés de relations de bon voisinage avec les gaullistes. C'est que tous ces gouvernements, qui étaient légaux, s'estimaient installés dans une meilleure position que les gaullistes qui étaient, de fait, des dissidents par rapport au gouvernement Pétain que les Français avaient installé dans des conditions reconnues légales, au début, par les grandes puissances. Cette situation évolua lentement. Mais, en 1943, le gouvernement belge en exil de Hubert Pierlot et Paul-Henri Spaak précipita le mouvement et fut le premier à reconnaître officiellement les Français Libres et de Gaulle comme seuls représentants légitimes de la France. Le gouvernement anglais, en l'occurrence Anthony Eden, un proche de Churchill, avait tenté de dissuader les Belges, craignant que leur initiative serve de modèle aux autres gouvernements en exil. Les Américains eux-mêmes intervinrent, croyant pouvoir utiliser les relations commerciales belgo-américaines pour faire pression sur les Belges, notamment quant à leurs commandes d'uranium du Congo belge. Rien n'y fit. Malgré les pressions britanniques et américaines, Spaak fit savoir officiellement que la Belgique considérait dès lors le gouvernement Pétain comme dépourvu de légitimité et le Comité des Français libres, plus tard Gouvernement provisoire de la France, comme seuls habilités à représenter légalement la France.

Libération de la France et de ses colonies

Malgré son exclusion par Roosevelt du débarquement américano-britannique en Afrique du Nord, opération Torch, et surtout malgré le soutien apporté par les États-Unis à l'amiral François Darlan, puis au général Henri Giraud, de Gaulle réussit à prendre pied à Alger en mai 1943. Le Comité national français fusionne avec le Commandement en chef français civil et militaire dirigé par Giraud, pour donner naissance au Comité français de Libération nationale, CFLN, dont Giraud et de Gaulle sont coprésidents. Mais en quelques mois, de Gaulle marginalise Giraud au sein du CFLN, avant de l'évincer en novembre à la faveur de la formation d'un nouveau gouvernement, et de s'affirmer comme le seul chef politique des forces françaises alliées. Les Forces françaises libres fusionnent quant à elle avec l'Armée d'Afrique placée sous le commandement de Giraud : l'Armée française de la Libération, composée de 1 300 000 soldats, participe aux combats aux côtés des Alliés. Le 3 juin 1944 à Alger, le CFLN devient le Gouvernement provisoire de la République française GPRF.
Après le débarquement de Normandie, le 6 juin 1944, le général de Gaulle fait son entrée en territoire français sur la plage de Courseulles-sur-Mer, en Normandie, le 14 juin, à bord du torpilleur La Combattante. Ce même jour, il prononce le premier discours de Bayeux et les Français découvrent alors son imposante silhouette, il mesure 1,93 m
La fermeté et la rapidité avec lesquelles le général de Gaulle rétablit l'autorité d'un gouvernement national permettent d'éviter la mise en place de l'AMGOT, prévu par les Américains, qui aurait fait de la France libérée un État administré et occupé par les vainqueurs.
La 2e division blindée du général Leclerc libère Paris le 25 août et celui-ci reçoit la reddition de Von Choltitz. Ce même jour, le général de Gaulle se réinstalle au ministère de la Guerre, rue Saint-Dominique à Paris, dans le bureau qu'il occupait jusqu'au 10 juin 1940, signifiant ainsi que Vichy était une parenthèse et que la République n'avait jamais cessé d'exister. Puis il se rend à l'Hôtel de ville, où il prononce un discours dans lequel il insiste sur le rôle essentiel joué par les Français pour leur propre libération. Le lendemain, 26 août, il descend triomphalement les Champs-Élysées et fleurit la tombe du soldat inconnu. Le peuple dans ses profondeurs manifeste un enthousiasme indescriptible.
Le GPRF est transféré à Paris. Le 9 septembre 1944, un gouvernement d'unité nationale est constitué, sous la présidence du général de Gaulle. L'Assemblée constituante est ensuite élue en octobre 1945, six mois après la fin de la guerre.

Au Gouvernement provisoire de la France

Les femmes purent ainsi voter pour la première fois aux élections municipales de 1945. D'autres réformes figurant dans ce même programme sont entreprises à la Libération : depuis les nationalisations à la mise en place du monopole de l'assurance maladie obligatoire qu'est la sécurité sociale l'Alsace et la Moselle conserveront le système d'assurance maladie instauré par Bismarck. Elles doivent beaucoup à la SFIO, au Parti communiste et au Mouvement républicain populaire (MRP) qui étaient les forces politiques les plus représentées dans le Conseil national de la Résistance.
Président du Gouvernement provisoire, mais en désaccord avec l'Assemblée constituante sur la conception de l'État et le rôle des partis, de Gaulle remet sa démission sur la question des crédits militaires au président de l'Assemblée nationale, Félix Gouin, le 20 janvier 1946. Il a rempli la mission qu'il s'était donnée le 18 juin 1940 : libérer le territoire, restaurer la République, organiser des élections libres et démocratiques, entreprendre la modernisation économique et sociale. Durant cette période, il exerça de fait une fonction équivalente à celle de chef de l'État.

Parcours politique pendant la IVe République

Le 16 juin 1946, de Gaulle expose sa vision de l'organisation politique d'un État démocratique fort à Bayeux, en Normandie, dans un discours resté célèbre ; mais il n’est pas suivi. Il inaugure alors sa fameuse traversée du désert jusqu'en 1958, date de son retour au pouvoir.

Fondation du RPF Rassemblement du peuple français.

En 1947, il fonde un mouvement politique, le Rassemblement du peuple français RPF, afin de transformer la scène politique française, de lutter contre le régime exclusif des partis, de s'opposer à l'avancée du communisme et de promouvoir une nouvelle réforme constitutionnelle privilégiant le pouvoir exécutif. Il propose également une troisième voie économique l'association capital-travail. Le RPF reprend également les thèmes de la droite la plus traditionnelle : ultra-conservatisme colonial il critique jusqu'à la construction de lycées d'enseignement général à Madagascar, anticommunisme virulent (exploitant les inquiétudes sur l'avancée du communisme dans l'Union française et en Indochine et même, au moins jusqu'en 1950, la clémence à l'égard de Philippe Pétain. Toutefois, les déclarations du colonel Rémy réhabilitant le rôle du maréchal Pétain seront immédiatement désavouées par le général de Gaulle, mais pas l'initiative de Terrenoire, demandant son amnistie. Il est vrai, comme le rappelle l'historien René Rémond dans Les Droites en France, que c'est au nom de la réconciliation nationale qu'en 1949 et 1950, le même général de Gaulle plaidait pour l'élargissement du vieillard de quatre-vingt-quinze ans.
Le parti rallie des résistants dont Jacques Chaban-Delmas mais aussi des notables comme Édouard Frédéric-Dupont ou Edmond Barrachin, qui fut, dans les années 1930, directeur du comité central du Parti social français. D'anciens pétainistes et même d'anciens collaborateurs parviennent à s'y faire admettre, notamment dans les sections d'Indochine et d'Algérie, dans le service d'ordre, dans les rangs des syndicats ouvriers proches du R.P.F. et parmi les maires élus en 1947. Certains polémistes du parti, notamment Jean Nocher, déploient une extrême agressivité verbale. Pour ces raisons, l'historien Henry Rousso dans Le Syndrome de Vichy discerne au RPF des tendances pro-pétainistes, soit qu’elles aient été envoûtées par la magie du verbe maréchaliste, soit qu’elles aient été convaincues de son impact dans l’opinion. René Rémond, Les Droites en France préfère rapprocher le RPF de la lignée du bonapartisme et du boulangisme, tout en observant que le RPF est, dans l'histoire du gaullisme, l'épisode le moins éloigné de ce qu'en France on a l'habitude de qualifier de fascisme.
Après un grand succès en 1947-1948 35 % des suffrages aux municipales de 1947, 42 % des sénateurs élus en 1948, le RPF décline de 1949 à 1951. La gestion efficace des événements sociaux de l'automne 1947 par le gouvernement de la troisième force a affaibli le mouvement gaulliste. Le recours à de Gaulle semble alors moins nécessaire pour les conservateurs, les modérés et le patronat. Dans l'opposition, le RPF est frappé d'un véritable ostracisme de la part des autres partis politiques, entretenu par le refus du général de Gaulle de se compromettre avec les autres partis. En 1951, le RPF obtient encore plus de 4 millions de voix, 22,3 % des suffrages et 16,8 % des inscrits et 117 députés.
Le RPF est irrémédiablement affaibli par la défection de vingt-sept députés : ainsi, contre les consignes du Général, Édouard Frédéric-Dupont et Edmond Barrachin votent la confiance au gouvernement d'Antoine Pinay en 1952. En juillet, quarante-cinq autres font défection. Les gaullistes se divisent alors entre les loyalistes, qui fondent l'Union des républicains d'action sociale URAS, et les autres, qui rejoignent l'Action républicaine et sociale, ARS.

Mise à l'écart du pouvoir

Aux élections locales de 1953, le RPF perd la moitié de ses suffrages. Il entre alors en hibernation. Les élus gaullistes participeront encore avec le PCF à l'échec de la Communauté européenne de défense CED en 1954, avant la mise en sommeil définitive du RPF le 13 septembre 1955.
À la suite de la défaite électorale de son parti, le général de Gaulle se retire à Colombey-les-Deux-Églises et rédige ses Mémoires de guerre. Les cinq années qui suivent sont surnommées la traversée du désert, expression qui sera reprise pour désigner les périodes où d'autres personnalités politiques ou sportives se seront trouvées hors des feux de la rampe dans l'attente d'un retour en grâce.

Crise de mai 1958

L'instabilité ministérielle, l'impuissance de la IVe République face à la question algérienne, déclenchée par une insurrection le 1er novembre 1954, conduisent le régime à une crise grave. Des responsables politiques de tous bords en viennent à souhaiter le retour du Général.
Le 13 mai 1958, un comité de vigilance appelle à manifester contre le FLN à Alger. Un comité de salut public est créé, à la tête duquel se trouve le général Massu, et composé notamment du général Salan. Ce dernier poussé par Léon Delbecque, lance son appel au retour du général de Gaulle vive de Gaulle du haut du Gouvernement général, devant la foule le 15 mai. L'insurrection prend de l'ampleur et risque de dégénérer en guerre civile. Le 19, le Général se dit prêt à assumer les pouvoirs de la République. Certains voient dans cette déclaration un soutien à l'armée et s'inquiètent. Il rassure et insiste sur la nécessité de l'union nationale et s'il se présente encore comme le recours, il ne donne officiellement aucune caution ni à l'armée ni à quiconque. Néanmoins, un plan d'action militaire, baptisé Résurrection, a déjà été mis en place en cas d'échec des négociations politiques.

Le 29 mai, le président de la République, René Coty, fait appel au « plus illustre des Français ». Charles de Gaulle accepte de former un gouvernement. Sous pression, l'Assemblée nationale l'investit le 1er juin, par 329 voix sur 553 votants. Le général de Gaulle devient ainsi le dernier président du Conseil de la IVe République. Les députés lui accordent la possibilité de gouverner par ordonnance pour une durée de six mois, et l'autorisent à mener à bien la réforme constitutionnelle du pays.
La nouvelle Constitution, élaborée au cours de l'été 1958, est très proche des propositions avancées à Bayeux, avec un exécutif fort. Le général de Gaulle accepte cependant que le Parlement ait plus de poids qu'il ne le souhaitait. En particulier, de Gaulle doit renoncer à l'élection du président de la république au suffrage universel un élément central de son dispositif constitutionnel qu'il finira par imposer en 1962.
La Constitution est adoptée par référendum le 28 septembre 1958, avec 79,2 % de oui. L'Empire l'approuve également, sauf la Guinée qui devient ainsi la première colonie française de l'Afrique sub-saharienne à obtenir son indépendance. Charles de Gaulle est élu par un large collège électoral, président de la République française et de la Communauté africaine et malgache, le 21 décembre, avec 78,51 % des suffrages. Il prend ses fonctions le 8 janvier 1959.
Entre le moment de son entrée en fonctions comme président du Conseil et son élection à la présidence de la République, Charles de Gaulle a largement amorcé la politique qui marquera son passage au pouvoir : outre la volonté de doter la France d'une nouvelle Constitution, le Général se soucie de la politique européenne de la France rencontre avec le chancelier Adenauer le 14 septembre, de l'indépendance du pays face aux États-Unis (mémorandum du 17 septembre adressé au président Eisenhower, de l'assainissement des finances publiques mesures du 27 décembre et du sort de l'Algérie, il refuse les choix des comités de salut public et appelle à la Paix des Braves en octobre.

Crise de l'Algérie Décolonisation.

À la suite des échecs de la IVe République en Indochine et en Algérie, une insurrection éclate à Alger et les putschistes civils et militaires organisent un Comité de salut public, en référence à celui de la Révolution française le 13 mai 1958 pour maintenir l'Algérie française. Ils en appellent au retour du général de Gaulle. L'antenne d'Alger mise en place par le ministre de la Défense Jacques Chaban-Delmas dès 1957, dirigée par Lucien Neuwirth et Léon Delbecque a influencé les partisans de l'Algérie dans la république française. Comme l'a rapporté Olivier Guichard dans Avec de Gaulle voir bibliographie, l'antenne d'Alger faisait surtout de la transmission : le travail d'influence était supervisé par les deux plus proches collaborateurs du général de Gaulle, Guichard lui-même et, pour les militaires, Jacques Foccard

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Posté le : 08/11/2014 19:13
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Général de Gaulle 2
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Mise en place des réseaux français en Afrique Françafrique.

C'est sous l'autorité de De Gaulle que les réseaux de ce que l'on appellera plus tard la Françafrique furent mis en place. À la tête d'une partie de son cabinet, issue de l'éphémère communauté française, Jacques Foccart maintient des liens étroits, non seulement de coopération, mais souvent de contrôle, avec les nouveaux pouvoirs des états africains ayant accédé à l'indépendance, notamment au moyen d'accords de coopération militaire et financiers mais aussi par l'action des services secrets. L'expression de pré carré est alors courante, et ces liens politiques et économiques assurent un soutien diplomatique dans la stratégie d'entre deux blocs de De Gaulle.

Président de la Ve République

En novembre 1958, les gaullistes remportent les élections législatives et obtiennent une confortable majorité. Le 21 décembre suivant, de Gaulle est élu président de la République avec 78,51 % des voix, au suffrage indirect, par un collège de plus de 80 000 grands électeurs.
Charles de Gaulle prend ses fonctions de président de la République le 8 janvier 1959, succédant ainsi à René Coty. Il engage de difficiles mesures pour revitaliser le pays, avec en particulier une dévaluation de 29 % et l'introduction du nouveau franc valant 100 anciens francs, qui fait revenir les centimes disparus depuis 1945.
Sur la scène internationale, refusant la domination des États-Unis comme de l'URSS, il défend une France indépendante, disposant de la force de frappe nucléaire. Il met en place également les débuts du programme spatial français. En tant que membre fondateur de la Communauté économique européenne CEE, il pose son veto à l'entrée du Royaume-Uni.
Le 6 février 1968, dans le stade olympique de Grenoble, il devient le second président français à ouvrir une cérémonie olympique, à l'occasion des Xe jeux olympiques d'hiver.

Quatre années de conflit en Algérie

Alger, le 4 juin 1958. Il est 19h. Au balcon du siège du gouvernement général de l'Algérie, tendu de tricolore, le général de Gaulle vient de prononcer la fameuse phrase historique à la foule algéroise Je vous ai compris… Aux côtés du général se tiennent le général Salan à sa droite et Jacques Soustelle à gauche.
En ce qui concerne la guerre d'Algérie, de Gaulle suscita d’abord de grands espoirs parmi les Français d’Algérie, auxquels il déclara à Alger le 4 juin 1958 : je vous ai compris. Ce jour-là, il se garda de rien leur promettre de précis, lors de ce discours, et ne reprit ni leur mot d'ordre d'intégration ni leur slogan Algérie française. Il proclame que à partir d'aujourd'hui, la France considère que, dans toute l'Algérie, il n'y a qu'une seule catégorie d'habitants : il n'y a que des Français à part entière. Ce n'est qu'à Mostaganem, le 6 juin, qu'il prononça les mots : Vive l'Algérie française, exception davantage révélatrice d'un désaccord que d'une adhésion, pour René Rémond.
Mais il adopta aussi quelques mesures libérales en direction des insurgés algériens : paix des braves proposée au FLN en octobre 1958, grâces accordées à plusieurs rebelles dont Yacef Saâdi, condamné à mort comme ancien dirigeant du FLN pendant la bataille d'Alger, interdiction officielle formelle des actes de torture. C'est également sous de Gaulle que les femmes musulmanes d'Algérie obtinrent le droit de vote, que l'on vit les musulmans pouvoir enfin voter à égalité avec les Européens, de ce fait, dès avant l'indépendance en 1962, une majorité des maires d'Algérie sont eux-mêmes des musulmans, ou que fut nommé le premier préfet musulman d'Algérie, Mahdi Belhaddad à Constantine. De Gaulle annonça en personne la mise en œuvre du plan de Constantine, dans cette ville, en septembre 1958 : ce plan prévoyait, sur cinq ans, la redistribution de 250 000 ha de terres, la construction de 200 000 logements et la création de 400 000 emplois.
Il laissa son Premier ministre, Michel Debré, vilipender comme manœuvre communiste le rapport accablant établi par le jeune Michel Rocard, et qui dénonçait l'entassement inhumain de deux millions de personnes civiles dans des camps de regroupement. Dès 1959, de Gaulle en revint aussi à une solution classique de répression militaire. À l'été 1959, l'opération Jumelles, dite plan Challe, porta au FLN ses coups les plus rudes à travers tout le pays. Certes, de Gaulle réalisa rapidement qu'il n'était pas possible de résoudre le conflit par une simple victoire militaire, et à l'automne 1959 il commença à s'orienter vers une solution conduisant inéluctablement à l'indépendance de l'Algérie. Mais jusqu'à l'hiver 1961/62, il choisit tout de même de poursuivre la guerre, au prix de nombreuses victimes et, selon l'historien Rémi Kauffer, d'un accroissement de l'usage de la torture. Jusqu'à la fin de 1961, la lutte contre le FLN est menée avec autant de vigueur, et même davantage, qu'avant. Selon Constantin Melnik, conseiller spécial de Michel Debré chargé de coordonner les services secrets, il y eut environ 500 assassinats politiques entre 1958 et 1961.
Il reste difficile de savoir quand de Gaulle comprit que l'indépendance était la seule solution pour sortir d'un conflit coûteux en hommes, en argent et en prestige international. D'autant plus qu'il perd le soutien de proches et d'anciens combattants luttant pour l'Algérie française. Édouard Lebas, à cet effet, écrit le 17 mars 1963 dans Combat : Nous vivons depuis mai 1958 sur la plus grande duperie de l'histoire et depuis octobre 1962 sur la plus grande imposture. La cause du mal c'est la volonté tenace, bien que supérieurement camouflée, du Général de Gaulle. Il faut donc dénoncer à la masse, sans subterfuges et sans faux-fuyants, le responsable du mal dont meurent la République et la Liberté. En 1961, de Gaulle fit encore rédiger par Alain Peyrefitte un plan de partition de l'Algérie, sans doute en fait pour faire pression sur le FLN. Au même Alain Peyrefitte, il expliquait dès 1959 que l'intégration de l'Algérie à la France, défendue par les partisans de l'Algérie française, était une utopie : deux pays culturellement si éloignés et présentant un tel écart de niveau de vie n'avaient pas vocation à en former un seul. Sans compter qu'au vu de l'accroissement démographique des musulmans, ce serait ouvrir la porte à leur immigration massive en métropole, dépassant de fort loin la simple venue traditionnelle de populations étrangères appelées à se fondre dans le creuset français: Mon village deviendrait Colombey-les-Deux-Mosquées !.
Dès le 16 septembre 1959, de Gaulle parle de l'autodétermination de l'Algérie. En janvier 1960, le limogeage du général Jacques Massu, qui avait critiqué sa politique, provoque la rupture avec les Français d'Algérie et l'érection de barricades au centre d'Alger. Malgré ce climat insurrectionnel, de Gaulle abroge définitivement, par une ordonnance du 4 juin 1960, la peine de déportation. En janvier 1961, un référendum valide cependant massivement sa politique des deux côtés de la Méditerranée.
Avec l'armée de conscription, il fait échec au putsch des généraux à Alger en avril 1961. Quatre jours suffisent à mettre en déroute le quarteron de généraux à la retraite stigmatisés dans un de ses plus célèbres discours. Cette attitude provoqua de fortes résistances dans certains groupes nationalistes et de Gaulle fut obligé de réprimer des soulèvements de pieds-noirs en Algérie.
Il fut la cible d'organisations terroristes telles que l'Organisation armée secrète OAS, qui le surnommait la Grande Zohra. La métropole devint alors l'objet de plusieurs vagues d'attentats commis par l'OAS. L'ancien directeur de la DGSE, l'amiral Pierre Lacoste, a déclaré en 1992 dans un interview au journal The Nation, que certains éléments du réseau Gladio étaient impliqués dans des activités terroristes contre le général de Gaulle et sa politique en Algérie.
Dans la nuit du 17 au 18 octobre 1961, au lendemain de l'assassinat de policiers par des militants du FLN, une manifestation, interdite par les autorités françaises, fut organisée par le FLN. Les manifestants protestaient contre le couvre-feu imposé en métropole aux ressortissants d'Afrique du Nord. Cette manifestation fut férocement réprimée. Le préfet de police Maurice Papon couvrit ses policiers et le gouvernement l'ensemble de ses fonctionnaires. Selon le rapport de l'avocat général Jean Geromini, remis le 5 mai 1999, il y aurait eu au moins 48 noyés pendant la nuit du 17 au 18 octobre, sans compter les personnes décédées des suites de leurs blessures ou de leurs conditions d'internement. Selon l'historien et éditorialiste Alain-Gérard Slama et Linda Amiri laquelle a dépouillé les archives de la préfecture de police, le chiffre total est de l'ordre d'une centaine de victimes, L. Amiri compte 100 morts certains et 31 disparus. Les propos tenus par de Gaulle en conseil des ministres quelques jours après le drame sont connus grâce aux notes prises par son ministre Louis Terrenoire, et publiées par Éric Rossel.
Quelques mois plus tard, le 8 février 1962, lors d'une manifestation interdite, huit manifestants sont tués par les forces de police au métro Charonne et un autre mourra à l'hôpital. Selon l'historien Jean-Paul Brunet, Charles de Gaulle est tout autant responsable de cette tragédie que le ministre de l'Intérieur Roger Frey, le préfet de police Maurice Papon, et toute la hiérarchie policière. Une des raisons est, explique J.-P. Brunet, l'autoritarisme du Général. Selon l'historien Alain Dewerpe, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales, le massacre de Charonne n'est qu'une conséquence logique des habitus de pouvoir de De Gaulle et des gaullistes, dans la situation de la guerre d'Algérie.
Quant à l'organisation terroriste OAS, elle fut réprimée par des moyens impitoyables : exécutions sommaires, tortures, polices parallèles, lesquelles n'hésitaient pas à recruter des truands, comme Georges Boucheseiche et Jean Augé. La Cour de sûreté de l'État fut créée en janvier 1963 pour en condamner les chefs, lesquels seront amnistiés quelques années plus tard, la Cour continue ensuite de juger des terroristes, jusqu'à sa suppression, en août 1981. En 1962, à la suite des Accords d'Évian, un cessez-le-feu est proclamé en Algérie. Le général de Gaulle fit adopter par référendum l'indépendance de l'Algérie, effective en juillet 1962.
Très irrité par le ralliement massif des Pieds-Noirs à l'OAS, à l'heure où celle-ci lance une vague de terreur et de terre brûlée en Algérie, de Gaulle n'aura aucun mot de compassion ni en public ni en privé pour le sort du million de Français rapatriés d'Algérie en juillet 1962 à la suite de la non-application des Accords d'Évian par la partie algérienne.
Le lendemain de la signature des accords d'Évian, les supplétifs de l'armée française, les harkis, furent désarmés par la France, et abandonnés sur place. Le gouvernement s'opposa au rapatriement de la majorité d'entre eux, et fit interdiction aux officiers de l'armée de les aider à gagner la France, hors du cadre d'un plan de rapatriement général. Le 25 juillet 1962, en Conseil des ministres, alors que les massacres de pieds-noirs et harkis avaient commencé, Charles de Gaulle s'opposa au repli des harkis en France. Par la suite, plusieurs dizaines de milliers furent torturés et massacrés.
En avril 1962, le Premier ministre Michel Debré fut remplacé par Georges Pompidou, et en septembre de la même année, Charles de Gaulle proposa d'amender la Constitution afin de permettre au président d'être élu au suffrage universel direct, dans le but de renforcer sa légitimité à gouverner directement. La réforme de la Constitution, malgré l'opposition du Parlement, de la totalité de la gauche et d'une bonne partie de la droite, fut aisément acceptée lors du référendum du 28 octobre 1962 avec 62,25 % de oui
En octobre, l'Assemblée nationale vota une motion de censure contre le gouvernement Pompidou, mais le Général refuse la démission que lui présentait le Premier ministre et choisit de dissoudre l'Assemblée. Les nouvelles élections renforcèrent la majorité parlementaire gaulliste.

Opposition armée Attentat du Petit-Clamart

Un polytechnicien ingénieur de l'armement nommé Jean Bastien-Thiry âgé de 35 ans considérait la politique algérienne du général de Gaulle comme une politique d'abandon et de trahison. Il conçut donc, avec l'aide de personnes partageant son point de vue, appartenant à l'OAS - Organisation armée secrète, d'enlever de Gaulle, voire, si ce rapt se révélait impossible, de le tuer. Un attentat fut ainsi organisé au Rond Point du Petit-Clamart le 22 août 1962. Il échoua, bien que la DS présidentielle montrât, parmi les impacts, environ 150 balles tirées, une trace de balle passée latéralement à quelques centimètres des visages du couple présidentiel.
Dans la déclaration qu'il fit lors de l'ouverture de son procès en 1963, Bastien-Thiry développa les motivations du complot basé essentiellement sur la politique algérienne du général de Gaulle. Parce qu'il avait fait tirer sur une voiture occupée par une femme et parce que, contrairement aux autres membres du commando, il n'avait pas pris de risques directs, Bastien-Thiry ne fut pas gracié par le général de Gaulle, comme le furent les autres membres du commando tout comme d'ailleurs les autres membres de l'OAS qui furent pris. Bastien-Thiry sera fusillé au Fort d'Ivry en mars 1963.
En 1968, une première amnistie permit aux derniers responsables de l'OAS, aux centaines de partisans de l'Algérie française encore détenus, et à d'autres, exilés, comme Georges Bidault ou Jacques Soustelle de rentrer en France. D'anciens activistes de l'Algérie française se rallièrent alors au gaullisme, en adhérant au SAC ou aux Comités de défense de la République CDR. De Gaulle déclare à Jacques Foccart le 17 juin 1968 : Il faut que nous allions vers une certaine réconciliation. Les autres condamnations pénales sont effacées par les lois d'amnistie de 1974 et 1987.

Autres attentats

L'attentat du Petit-Clamart fut celui qui fut le plus près de réussir. De nombreux autres attentats furent organisés contre la personne du Général, parmi lesquels :
8 septembre 1961 : une bombe commandée à distance est enterrée sur la route de Colombey, à Pont-sur-Seine, mais la DS présidentielle conduite par le gendarme Francis Marroux n'est pas endommagée.
23 mai 1962 : de Gaulle devait être abattu sur le perron de l'Élysée par un tireur posté près de l'Élysée.
15 août 1964 : de Gaulle est en visite au Mont Faron, près de Toulon. Une jarre avait été piégée de huit pains de TNT mis à feu à distance. Ceux-ci n'explosent pas, le déclencheur étant trop faible.
Le thème d'un attentat imaginaire contre le général de Gaulle faisant suite à celui du Petit-Clamart fut exploité dans le film Chacal 1973 tiré du roman éponyme de Frederick Forsyth.

Élection présidentielle française de 1965

Durant la campagne de l'élection présidentielle de 1965, ses adversaires lui reprochent en particulier son nationalisme. La télévision, pour la première fois dans l'Histoire, joue un rôle très important dans une campagne ; malgré son refus de jaspiner dans les étranges lucarnes, le Général se plie à cette nouvelle mode entre les deux tours. On note aussi l'apparition des sondages, qui mettent en évidence la baisse des intentions de vote en sa faveur avant le premier tour.
Lors du premier tour, il arrive en tête avec 44,65 % des suffrages, devant notamment le candidat de la gauche, François Mitterrand 31,72 %, et Jean Lecanuet 15,57 %. Il est réélu président de la République le 19 décembre 1965, avec 13 083 699 voix, soit 55,20 % des voix.

Politique étrangère Histoire de France sous la Cinquième République.

Témoignage de la réconciliation franco-allemande, en 1962.
De Gaulle dut attendre la fin du conflit en Algérie pour lancer réellement sa politique étrangère. En effet, le boulet algérien réduisait considérablement la marge de manœuvre française et, d'une façon ou d'une autre, il fallait avant toute chose mettre un terme à ce conflit. La politique de l'indépendance nationale est alors pleinement mise en application.
Sur le plan international, de Gaulle continua à promouvoir l'indépendance de la France : il refusa à deux reprises en 1963 et en 1967 l'entrée du Royaume-Uni dans la CEE101 ; il condamna dès 1964 l'aide militaire apportée par les États-Unis à la République du Viêt Nam, dite Viêt Nam du Sud contre la rébellion communiste menée par le Viêt Cong guérilla soutenue par le Nord-Viêt Nam, ainsi que la riposte israélienne au blocus du détroit de Tiran par l'Égypte, lors de la Guerre des Six Jours en 1967. Il prit l'une de ses décisions les plus spectaculaires en 1966, lorsque la France se retira du commandement militaire intégré de l'OTAN, expulsant les bases américaines de son territoire.
En ce qui concerne l'Europe, de Gaulle était partisan d'une Europe des nations, où celles-ci devaient conserver leur pleine souveraineté, et hostile à l'idée d'une Europe supranationale ; le terme volapük employé pour parler de la coopération européenne entraîna le départ du gouvernement des cinq ministres MRP.
C'est l'Europe qui fixe le cadre de son ambition, une Europe qui va même de l'Atlantique à l'Oural, gommant d'un trait le provisoire rideau de fer. En effet, le pivot de la politique étrangère française est le rapprochement avec l'autre poids lourd du continent : l'Allemagne. Ainsi, de Gaulle tourne le dos aux Anglo-Saxons.
On pourrait en effet s'étonner de l'intransigeance gaullienne vis-à-vis du Royaume-Uni, tout particulièrement. Pour de Gaulle, comme pour Churchill d'ailleurs, le Royaume-Uni n'avait fait que son devoir en 1940, et il n'existait pas de dette française envers Londres liée à la Seconde Guerre mondiale. De Gaulle désapprouvait les relations privilégiées rapprochant le Royaume-Uni des États-Unis depuis la guerre, ainsi que la préférence économique impériale qui jouait entre celle-ci et les États du Commonwealth, rendant ainsi difficile son admission au sein de l'Europe. Aussi l'entrée d'un tel cheval de Troie américain au sein de l'Europe lui paraissait-elle non souhaitable. Les Britanniques attendront donc 1973 avant de rejoindre la communauté économique européenne CEE.
La position de De Gaulle face au monde communiste était sans ambiguïté : il était totalement anticommuniste. Il prône la normalisation des relations avec ces régimes transitoires aux yeux de l'Histoire de façon à jouer le rôle de pivot entre les deux blocs. La reconnaissance de la République populaire de Chine dès le 27 janvier 1964 va dans ce sens. De même sa visite officielle en République populaire de Pologne, 6-11 septembre 1967 fut un geste qui montrait que le président français considérait le peuple polonais dans son ancrage historique. La question allemande, et donc le tracé de la frontière occidentale de la Pologne, ont joué un grand rôle dans les discussions officielles. Malgré la domination exercée alors par l'URSS de Gaulle fut accueilli spontanément par des foules enthousiastes. Il misait, comme il l'a dit devant la diète Assemblée nationale polonaise, sur un futur où la Pologne recouvrirait sa place d'État indépendant. Il s'agissait une fois de plus de son projet d'Europe continentale élargie. Dans sa politique vis-à-vis de la Yougoslavie, De Gaulle soutiendra le mouvement royaliste de Draza Mihajlovic et le mouvement Tchetniks, dont il était un admirateur. Tito l'un des leader des non-alignés ne le lui pardonnera jamais et soutiendra fortement l'indépendance Algérienne avec des livraisons massive d'armes au FLN via la Tunisie
Les relations entre de Gaulle et les États-Unis sont assurément les plus épicées. Malgré quelques tensions vives, de Gaulle sera toujours au rendez-vous en cas de vrai coup dur : Berlin ou Cuba, notamment. En revanche, dès que les Américains entament le processus d'escalade, de Gaulle prend publiquement ses distances, notamment par son discours du 1er septembre 1966 à Phnom Penh vilipendant l'attitude américaine au Viêt Nam, théâtre d'opération que la France connaissait fort bien.
La notion gaullienne d' une certaine idée de la France se manifeste surtout en politique étrangère. De Gaulle puise une force dans sa connaissance de l'Histoire de France, qu'il a d'ailleurs enseignée à Saint-Cyr. Selon lui, le poids de cette Histoire donne à la France une position particulière dans le concert des nations. Convaincu que les relations internationales reposent avant tout sur les réalités nationales et les rapports entre États, il surnomme l'ONU le machin et refuse que la France participe au financement des opérations menées par les casques bleus contre la sécession katangaise au Congo ex-belge. Passablement irrité par l'attitude du Nigeria lors de l'explosion de Gerboise bleue, le troisième essai nucléaire français, en 1960, et souhaitant le morcellement de ce pays, comme il le raconte à son conseiller aux affaires africaines Jacques Foccart, de Gaulle soutient la sécession du Biafra en 1967-68, qui fait de un à deux millions de morts.
En Afrique francophone, il ne prend pas position face aux coups d'État qui se succèdent, mais apporte son soutien aux régimes en place quand il le juge nécessaire, faisant intervenir les troupes françaises au Gabon 1964 et au Tchad 1968.

Force de frappe Force de dissuasion nucléaire française.

Convaincu de l'importance stratégique de l'arme nucléaire, de Gaulle poursuit le développement de celle-ci, sous la protestation de l'opposition qui n'y voyait qu'une bombinette. La réponse de De Gaulle sera : Dans dix ans, nous aurons de quoi tuer 80 millions de Russes. Eh bien je crois qu'on n'attaque pas volontiers des gens qui ont de quoi tuer 80 millions de Russes, même si on a soi-même de quoi tuer 800 millions de Français, à supposer qu'il y eût 800 millions de Français.
Le rôle des États-Unis dans cette affaire paraît étrange. Kennedy proposa à de Gaulle de lui donner des missiles Polaris, comme il l'avait fait avec le Royaume-Uni accords de Nassau. Mais de Gaulle refusa, déclarant qu'il voulait que la France se bâtisse elle-même une armée. La question nucléaire empoisonna les relations franco-américaines durant toutes les années 1960. Il fallut attendre Richard Nixon pour trouver un premier président américain clairement gaullien. Nixon contourna d'abord les contraignantes législations américaines dans les domaines nucléaires avant d'ouvrir officiellement la voie de la collaboration nucléaire franco-américaine. Le gros du travail était déjà fait et les bombinettes françaises déjà fort efficaces.

Conversion des dollars

Sur la recommandation de l'économiste Jacques Rueff qui voyait la conquête de l'espace et le conflit vietnamien déséquilibrer la balance des paiements des États-Unis, de Gaulle réclama à ces derniers la contrepartie en or d'une forte proportion des dollars détenus par la France. L'opération était légale, car le dollar était défini officiellement comme correspondant à 1/35 d'once d'or. Règlements internationaux obligent, les États-Unis durent obtempérer et de Gaulle fit procéder par la Marine nationale au rapatriement de la part de l'or de la Banque de France déposé à New York auprès de la Banque fédérale de réserve. En 1971, les États-Unis mettront fin à la parité pour faire flotter le dollar. À la suite des chocs pétroliers de 1973 et de 1979, les cours de l'or s’envoleront : le conseil de Jacques Rueff était judicieux à long terme.

Le Québec libre Vive le Québec libre !.

Lors d'une visite d'État au Canada en 1967 afin, officiellement, de prendre part aux festivités entourant l'expo 67 comme l'y avait invité le Premier ministre québécois Daniel Johnson, de Gaulle provoqua l'indignation des autorités fédérales canadiennes, lorsqu'à Montréal, devant une foule de plus de 100 000 Québécois, il ponctua son discours d'un retentissant : Vive Montréal, vive le Québec… vive le Québec libre !, salué par une ovation générale. Cela déclencha une crise avec le gouvernement canadien. À la suite du discours de De Gaulle, qui contenait un certain nombre de clins d'œil, le Premier ministre canadien, Lester B. Pearson répliqua sèchement à de Gaulle dans un discours livré le lendemain, déclarant que les Canadiens n'ont pas besoin d'être libérés, et faisant savoir très clairement que de Gaulle n'était plus le bienvenu au Canada. Il repartit séance tenante pour la France, délaissant le croiseur qui l'avait amené, le Colbert. Le but de De Gaulle n'était pas de provoquer un scandale entre le Québec et le gouvernement fédéral canadien, mais plutôt de regonfler les Français du Canada face aux voisins Anglo-Saxons. Il déclara d'ailleurs dans la foulée de cette visite au Québec, je leur ai fait gagner 30 ans.
Dans la perspective de la Seconde Guerre mondiale, cette déclaration fut ressentie comme injuste par les Canadiens anglophones qui avaient soutenu la France libre, alors que les Québécois francophones, soucieux de l'indépendance du Canada vis-à-vis du Royaume-Uni, étaient moins enthousiastes pour participer à l'effort de guerre. Des envoyés de la France libre, Élisabeth de Miribel et le capitaine de vaisseau Georges Thierry d'Argenlieu - dont le titre de supérieur majeur de la province des Carmes de Paris était censé lui valoir le respect des catholiques - tentèrent en 1941 de rallier les Canadiens à la cause du général de Gaulle.
Le gouvernement d'Ottawa dut dès cette époque traiter avec une attention particulière les revendications du Québec qui, fort de cet encouragement qui laissait présager un soutien fort de la France si besoin, commença à parler de faire sécession.
De plus, lors de la conférence de presse du 27 novembre 1967 à l'Élysée, Charles de Gaulle justifia une fois de plus son geste d'éclat par un discours engagé, ponctué par un solennel allons, allons, pour eux aussi, pour eux surtout, il faut que la France soit la France !
Cette déclaration était cohérente avec la pensée du général de Gaulle qui, déclaré à Alain Peyrefitte en septembre 1965 : L'avenir du Canada français, c'est l'indépendance. Il y aura une République française du Canada. Selon Alain Peyrefitte, « sans préjuger de la forme que la souveraineté québécoise devait revêtir, de Gaulle, avec ce sens historique qui valut à la France son salut, s'en vint donc à Montréal, en juillet 1967, exhorter les Canadiens français à préserver leur identité française dont, sous Louis XV, l'indifférence des élites françaises avait fait si légèrement bon marché. Vive le Québec libre ne fut pas plus improvisé que l'appel du 18 juin 1940. L'appel à la liberté, lancé le 24 juillet, n'eut rien de fortuit.

Mai 1968 Mai 1968.

Outre la réforme financière de 1958, la France bénéficie des Trente Glorieuses et de la croissance amorcée sous la IVe République. Les structures économiques sont modernisées, le niveau de vie s'accroît. Mais la croissance profite inégalement à tous, et un certain désenchantement apparaît face au blocage de la société. Les événements de Mai 1968 en sont le révélateur. Comme dans de nombreux pays étrangers, la contestation des étudiants se développe à partir de mars 1968. Les syndicats et les partis politiques de gauche profitent des manifestations étudiantes pour lancer une grève générale qui sera suivie par les ouvriers. Cette grève générale paralyse le pouvoir pendant le mois de mai.
De l'avis de ses propres partisans, de Gaulle a été complètement surpris par une crise qu'il ne prévoit pas et ne comprend pas. Indifférent aux revendications étudiantes et à la « crise de civilisation qu'elles révèlent, il ne voit là au mieux qu'un gigantesque chahut de jeunes qui ne veulent pas passer leurs examens, au pire une contestation de l'autorité de l'État à faire cesser sur-le-champ. Dans les premiers jours de mai, ses seules consignes sont de réprimer brutalement les manifestations étudiantes, contre l'avis de plusieurs de ses ministres qui conseillent l'apaisement.
Après la nuit des barricades du 10 mai au 11 mai 1968, de Gaulle, sceptique, laisse toutefois son Premier ministre Georges Pompidou, rentré d'un voyage en Iran et en Afghanistan, mener une nouvelle politique d'apaisement. Pompidou, qui a dû mettre sa démission dans la balance, veut éviter désormais les heurts, et parie sur l'essoufflement à terme du mouvement.
Du 14 au 18 mai, de Gaulle part en Roumanie. Or, en son absence, la grève générale se développe et des millions de grévistes paralysent la France, tandis que la Sorbonne et l'Odéon sont occupés sans réaction de la police. Seul aux commandes de l'État et de la majorité parlementaire, Pompidou paraît entre-temps devenu le vrai chef du pays.
À son retour anticipé de Roumanie le 18 au soir, de Gaulle déçoit jusqu'à des fidèles inconditionnels en apparaissant dépassé et flottant, sans cette vivacité et cette efficacité de réaction qui le caractérisent d'habitude. Il semble écartelé entre la prudence pompidolienne et la fermeté qu'il prêche lui-même. Il attend le 24 au soir pour parler en public, et pour n'annoncer des mesures déjà éventées depuis plusieurs jours, qui ne répondent à aucune préoccupation de l'heure. J'ai mis à côté, confesse-t-il aussitôt après avoir visionné son allocution. Le Général expose, dans cette allocution, qu'il entend que l'État doit rétablir l'ordre, maintenir la République. La rue, c'est le désordre, la menace du totalitarisme, “la chienlit”. Le soir même, de violents incidents éclatent à Paris, on relèvera des centaines de blessés et plusieurs barricades érigées.
Le 26 mai, les accords de Grenelle passés entre le gouvernement Pompidou, les représentants des syndicats et du patronat aboutissent à un train de mesures classiques. De Gaulle préside le Conseil des ministres qui ratifie aussitôt les accords, mais à la surprise de Pompidou et des chefs syndicaux, la base rejette les avancées de Grenelle, estimant que c'est la société entière qui est en cause. Les grèves continuent. Le 27, une manifestation au stade Charléty lance l'idée d'un gouvernement provisoire. Le jour même, François Mitterrand reprend cette solution et annonce sa candidature à la présidence de la République. La crise politique atteint son sommet.
La disparition soudaine et inexpliquée du chef de l'État, parti avec son épouse en hélicoptère le 29 mai pour une destination inconnue, provoque la stupeur et ouvre la voie à toutes les supputations. Il passe par Baden-Baden, où il est reçu par le général Massu. Dès son retour à Paris le lendemain, son allocution radiodiffusée a le ton de la fermeté. Il y annonce la dissolution de l'Assemblée nationale. Elle est suivie d'une immense manifestation organisée par les gaullistes sur les Champs-Élysées
De Gaulle était prêt à accepter certaines des revendications des manifestants. Il voulut faire approuver les réformes par référendum mais Georges Pompidou, en mettant sa démission dans la balance, le persuada de plutôt dissoudre l'Assemblée nationale. De Gaulle l'annonça le 30 mai 1968, dans un discours radiodiffusé, comme l'appel du 18 juin ou l'intervention de 1960 pendant les barricades d'Alger. Les phrases étaient courtes, chacune ou presque annonçait une décision :

Étant le détenteur de la légitimité nationale et républicaine, j'ai envisagé, depuis vingt-quatre heures, toutes les éventualités, sans exception, qui me permettraient de la maintenir
J'ai pris mes résolutions. Dans les circonstances présentes, je ne me retirerai pas.
Je ne changerai pas le Premier ministre, qui mérite l'hommage de tous.
Je dissous aujourd'hui l'Assemblée nationale
Je charge les préfets, devenus ou redevenus Commissaires de la République, d'empêcher la subversion à tout moment et en tous lieux
Quant aux élections législatives, elles auront lieu dans les délais prévus par la Constitution, à moins qu'on entende bâillonner le peuple français tout entier, en l'empêchant de s'exprimer en même temps qu'on l'empêche de vivre, par les mêmes moyens qu'on empêche les étudiants d'étudier, les enseignants d'enseigner, les travailleurs de travailler. Ces moyens, ce sont l'intimidation, l'intoxication et la tyrannie exercées par des groupes organisés de longue date en conséquence et par un parti qui est une entreprise totalitaire, même s'il a déjà des rivaux à cet égard. De Gaulle opposait ainsi le Parti communiste français aux groupes maoïstes, alors que le premier semblait déjà bien dépassé par les événements. En clouant le PCF au pilori et lui prêtant une visée subversive délibérée, de Gaulle rompt avec la stratégie de Pompidou, qui n'a cessé de négocier avec le Parti au long du mois.
La fin du discours mentionne au sujet d'une déclaration antérieure, et sans la citer, l'ambition et la haine de politiciens au rancart » et affirme qu'après avoir été utilisés ces personnages ne pèseraient pas plus que leur poids, qui ne serait pas lourd. Mais le Général néglige les 44,5 % des voix qui se sont portées en 1965 sur Mitterrand au second tour de la présidentielle, ou encore le simple siège de sa majorité aux élections législatives de 1967.
Une manifestation fut organisée et fut créditée d'un million de participants selon les organisateurs, sept cent mille selon la préfecture de police. Les élections de juin 1968 furent un grand succès pour la droite qui obtient 354 des 487 sièges, du jamais vu dans l'histoire du parlementarisme français. Georges Pompidou fut remplacé par Maurice Couve de Murville au mois de juillet.
La campagne des législatives occupa les forces politiques, tandis que la reprise du travail se faisait progressivement. La reprise en main, autoritaire, se fait parfois sans ménagement. Des Comités d'action civique, répondant à l'appel de De Gaulle, se constituent pour dresser des listes noires de grévistes et d'agitateurs notoires, et la police même renoue avec la brutalité des premiers jours de mai, quatre morts à déplorer en juin 1968. Cependant, de Gaulle bénéficie de la lassitude d'une opinion qui après avoir manifesté jusque fin mai sa sympathie majoritaire pour les révoltés, commence à se fatiguer de l'absence de perspectives du mouvement.
Les élections n'ont pourtant pas assez redynamisé le pouvoir. L'Assemblée nationale, plus à droite, est aussi plus frileuse face aux réformes pourtant nécessaires participation, régionalisation, réforme de l'Université…. L'éviction du vrai vainqueur de la crise, Pompidou, a été mal comprise, et ce dernier fait désormais figure de recours et de successeur potentiel. De Gaulle n'est plus irremplaçable.

Référendum du 27 avril 1969 sur la réforme du Sénat et la régionalisation.

Dans un référendum portant sur le transfert de certains pouvoirs aux régions et la fusion du Sénat avec le Conseil économique et social, de Gaulle proposait d'introduire des représentants des organisations professionnelles et syndicales au sein des conseils régionaux. Mettant tout son poids dans le référendum, il annonça à l'avance son intention de démissionner en cas de victoire du non. Celui-ci, auquel s'était rallié Valéry Giscard d'Estaing, l'emporta par 52,41 % le 27 avril 1969. Quelques minutes après minuit, le 28 avril 1969, un communiqué laconique tombe de Colombey : Je cesse d'exercer mes fonctions de président de la République. Cette décision prend effet aujourd'hui à midi.

L'après-pouvoir

Ce communiqué est le dernier acte public de l'homme du 18 juin : pour éviter d'être impliqué dans sa propre succession, il passe le temps de la campagne en Irlande où il arrive le 10 mai pour un séjour d'un mois. Treize jours à Sneem puis à Cashel où il vote par procuration ; ensuite il s'enferme à La Boisserie pour y écrire ses Mémoires d'espoir qui prendront la suite des Mémoires de guerre ; il y mène une existence retirée voire recluse.
Il effectue un voyage en Espagne, durant lequel il fait une visite de courtoisie au général Franco, déclarant regretter ne pas avoir pu le rencontrer plus tôt du fait des circonstances internationales. Même si de Gaulle n'exerçait plus alors de charge publique, qu'un homme de son prestige aille conférer aimablement avec le dictateur espagnol suscita de nombreuses critiques.

Décès

Le 9 novembre 1970, comme à l'accoutumée, le Général entame une partie de patience. À 19 h 10, il est pris d'un malaise causé par une rupture d'anévrisme et meurt vingt minutes plus tard. La nouvelle n'est communiquée que le lendemain par une allocution télévisée du président Georges Pompidou. La mort de De Gaulle qui, selon l'expression de son successeur, laisse la France veuve, est l'occasion de prendre la mesure du rôle qu'il a joué dans l'histoire de France, ainsi que dans l'histoire de l'Europe et du monde. Ainsi, le lendemain du décès du général, le Roi des Belges Baudouin vint personnellement, en compagnie de la Reine et à titre privé, présenter ses condoléances à madame De Gaulle et à la famille. C'est que le roi tenait à manifester sa sympathie pour un homme qui, dans ses Mémoires de guerre, s'abstint de condamner le roi Léopold III de Belgique lors de la reddition de l'armée belge, en 1940. Le roi des Belges agissait aussi au nom des liens tissés, pendant la guerre, avec les Français libres du général de Gaulle, lorsque le gouvernement belge d'Hubert Pierlot et Paul-Henri Spaak en exil à Londres fut le premier des gouvernements alliés à reconnaître la légitimité du Gaullisme, malgré les pressions anglaises.
La rupture d'anévrisme est une complication fréquente du syndrome de Marfan, maladie dont aurait pu être affecté de Gaulle et qui expliquerait sa grande taille.
Les obsèques religieuses du général ont lieu le 12 novembre 1970 à Colombey-les-Deux-Églises en présence d'une foule nombreuse et d'une délégation des armées françaises, seule participation officielle autorisée par le Général dans son testament. L'homélie est alors prononcée par le prêtre et résistant Maurice Cordier. À Paris, de nombreux chefs d'États étrangers sont rassemblés pour honorer sa mémoire à Notre-Dame, tandis que plusieurs centaines de milliers de Parisiens remontent l'avenue des Champs-Élysées.
Seul l'hebdomadaire satirique Hara-Kiri osa un titre provocateur, dans son no 94, daté du lundi 16 novembre 1970 : Bal tragique à Colombey, un mort, l’opinion était encore sous le choc de l’incendie d’un dancing qui avait causé la mort de 146 personnes une semaine plus tôt à Saint-Laurent-du-Pont. Ce choix de titre fustigeait le fait qu'une certaine presse plus préoccupée de spectacle que d’information, employait unanimement le terme de bal tragique pour qualifier le drame ; L'hebdomadaire fut interdit le lendemain.
Son testament qu’il avait rédigé en 1952 en trois exemplaires numérotés, reste une dernière gifle d’outre-tombe aux conventions :
Je veux être enterré à Colombey .
À mes obsèques, ni présidents, ni ministres, ni n’importe quels autres représentants de quelconque assemblée, le ministre des Finances, Valéry Giscard d'Estaing, s’y rend tout de même en argumentant que ce n'est pas en ministre qu’il vient, mais en simple Français. Tous les autres officiels, le président Nixon compris, assistent au même moment à une simple messe en l'honneur du général à Notre-Dame de Paris.
Seules les armées françaises, mais par une participation très modeste… et les Compagnons de la Libération sont autorisées à assister. ce qui incluait Jacques Chaban-Delmas et André Malraux.
Sur ma tombe : Charles de Gaulle, 1890-... Rien d’autre
Je déclare refuser d'avance toute distinction, promotion, dignité, citation, décoration, qu'elle soit française ou étrangère. Si l'une quelconque m'était décernée, ce serait en violation de mes dernières volontés.

Postérité

Distinctions et récompenses
Chevalier de la Légion d'honneur 1919, militaire
Officier de la Légion d'honneur 1934, militaire
Grand-croix de la Légion d'honneur 1945, président du gouvernement provisoire
Compagnon de la Libération
Grand-croix de l'ordre national du Mérite 1963, président de la République
Croix de guerre 1914-1918 militaire
Croix de guerre 1939-1945 militaire
Médaille d'honneur des sapeurs-pompiers
Médaille interalliée de la Victoire
Médaille commémorative de la Grande Guerre
Armoiries en tant que chevalier de l'Ordre du Séraphin

Distinctions de grand maitre :

Grand maître de la Légion d’honneur 1945, président du gouvernement provisoire125, 1959-1969, président de la République
Grand maître de l’ordre de la Libération, premier et seul Grand-Maître, 1947-1970, Libérateur de la France
Grand maître de l’ordre national du Mérite 1963-1969, président de la République

Distinctions étrangères :

Grand-croix de l'ordre de Léopold Ier de Belgique 1945
Chevalier de l'ordre du Christ 1959
Chevalier grand-croix décorée de grand cordon de l’ordre du Mérite de la République italienne 16 juin 1959
Chevalier de l’ordre de la Maison Royale de Chakri Thaïlande
Chevalier de l’ordre de l'Éléphant Danemark
Chevalier de l’ordre du Séraphin Suède, 1963
Chevalier grand-croix de l’ordre royal de Victoria Royaume-Uni
Chevalier grand-croix de l’ordre de Saint-Olaf Norvège
Croix d'argent de l’ordre militaire de Virtuti Militari en 1920
Chevalier grand-croix de l’ordre de la Rose blanche Finlande
Grand cordon de l’ordre du Dragon d'Annam
Chevalier grand-croix de l’ordre royal du Cambodge
Grand-croix de l'ordre du Million d'Éléphants et du Parasol Blanc Laos
Ordre Polonia Restituta

Hommages

En 1972, est inauguré sur les hauteurs de Colombey-les-Deux-Églises le mémorial Général de Gaulle, signalé par une grande croix de Lorraine en granite. Le nouveau mémorial Charles de Gaulle est inauguré le 11 octobre 2008 par Nicolas Sarkozy, président de la République française, et Angela Merkel, chancelière fédérale d'Allemagne.
Inauguré en février 2008 dans les sous-sols de l’Hôtel des Invalides, l’historial Charles de Gaulle est une des composantes du Musée de l'Armée.
Le 23 décembre 1970 est votée une loi exonérant de droits de mutation sa succession pour "services exceptionnels rendus à la Nation".
Le nom de Charles de Gaulle a été donné à de nombreuses artères, des ponts ou des bâtiments importants des communes françaises : en 2007, l’Institut Charles-de-Gaulle dénombrait plus de 3600 voies de Gaulle, les municipalités de droite ou du centre choisissant volontiers l’appellation militaire Général-de-Gaulle, tandis que celles de gauche préféraient souvent la forme civile Charles-de-Gaulle. On peut citer notamment la place Charles-de-Gaulle anciennement place de l’Étoile et le pont Charles-de-Gaulle à Paris, la Place du Général-de-Gaulle à Lille, l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle ex-aéroport de Roissy et le porte-avions nucléaire Charles de Gaulle.
Le 4 avril 2005, lors d'une émission de France 2 diffusée en direct du Sénat, il est désigné par les téléspectateurs comme le plus grand Français de tous les temps, devançant notamment Louis Pasteur, l'Abbé Pierre, Marie Curie, Coluche, Victor Hugo. Une partie des centristes, voire de la gauche, à l'image de Régis Debray, déclare aujourd'hui trouver en lui un inspirateur.
Selon un sondage effectué en 2005, dans le contexte du dixième anniversaire de la disparition de François Mitterrand, ce dernier, alors seul président de gauche de la Ve République, est considéré comme le meilleur président par 35 % des sondés, suivi par Charles de Gaulle 30 % et Jacques Chirac 12 %, qui se réclame du gaullisme. Un autre sondage réalisé par BVA quatre ans plus tard indique que 87 % des Français jugent positivement la présidence de Charles de Gaulle, le classant ainsi en première position de tous les présidents de la Ve République. Un sondage réalisé par le même institut en 2013 va dans le même sens : avec 89 % d'opinions positives, de Gaulle apparaît comme étant le président préféré des Français, tandis que Mitterrand n'est qu'en cinquième position avec 55 %. En novembre 2010, à l'occasion du 40e anniversaire de sa disparition, un sondage qualifie le général de Gaulle de personnage le plus important de l'histoire de France pour 44 % des sondés, devant Napoléon 14 %, Charlemagne 14 %, Jean Jaurès 12 %, Louis XIV 7 % et Léon Blum 4 %. Une enquête réalisée par l'Ifop en avril 2011 indique que 45 % des Français considèrent le général de Gaulle comme celui ayant le plus changé la France, devant tous les autres présidents de la Ve République, François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, Valéry Giscard d'Estaing, puis Georges Pompidou.
Des statues ont été érigées en sa mémoire aussi bien à Québec ou Londres qu'à Varsovie ou Moscou. La République populaire de Chine lui garde une forte reconnaissance publique pour l'avoir reconnue diplomatiquement en 1964. Israël ressentit d'autant plus durement ses déclarations fracassantes de 1967 que le culte populaire qui était voué à l'homme du 18 juin ne pouvait se comparer jusque-là, comme le rappelle Éric Roussel, qu'à celui du Père de la nation David Ben Gourion. Le monde arabe se souvient de ses critiques contre l'occupation de Gaza et de la Cisjordanie. Ben Bella rendit hommage à de Gaulle comme au plus valeureux adversaire du FLN : Chef militaire, c'est lui qui nous a porté les coups les plus durs, mais qui finit par accepter l'indépendance algérienne. En effet, pour Ben Bella : De Gaulle voyait plus loin et De Gaulle n'était pas un politicien. Il avait cette dimension universelle qui fait trop souvent défaut aux dirigeants actuels. À ceux qui lui reprochaient d'être resté un client de la France gaullienne, Léopold Sédar Senghor répliquait que peu de chefs d'État occidentaux pouvaient se vanter d'avoir risqué personnellement leur vie pour conduire une colonie à l'indépendance. Il n'est pas jusqu'au maître de Cuba, Fidel Castro, qui déclara devant les caméras avoir trouvé un modèle en de Gaulle à la lecture de ses Mémoires de guerre. L'Amérique latine ou le Viêt Nam apprécient encore le pourfendeur de la domination américaine, le Québec le contempteur de la prédominance anglophone.

Legs historiques

La Constitution de 1958 dure maintenant depuis plus d'un demi-siècle, avec des modifications. L'homme de Londres est entré dans un passé mythique où, pour les Français, il incarna à lui seul l'opposition au Régime de Vichy.
Les années que l'économiste Jean Fourastié a nommées les Trente Glorieuses 1945-1975 ont laissé aux Français le souvenir d'une époque, sinon heureuse deux guerres coloniales, au moins de croissance et de prospérité. Nous ne sommes pas les plus riches, nous ne sommes pas les plus puissants, mais je vous garantis que nous sommes parmi les plus heureux, affirma Georges Pompidou lors de vœux usuels de nouvel an aux Français. Or la fin de cette période heureuse se trouve correspondre à peu près à celle de De Gaulle : difficile dans ces conditions de séparer objectivement ce qui est dû à l'homme et à son dauphin désigné de ce qui est dû au contexte économique.
De façon plus anecdotique, le premier président de la Ve République apparaît en revanche aujourd'hui comme un des derniers grands fabricants d'histoire, qui a su souvent mener les événements au lieu de se laisser mener par eux. Son vocabulaire non conventionnel pour un homme politique de l'époque et de cet âge culbute, chienl, ses boutades. Pourquoi voulez-vous qu'à 67 ans, je commence une carrière de dictateur ? son sens de la repartie au cours d'une conférence de presse, il répondit à un journaliste dont la question était simplement Comment allez-vous ? : Je ne vais pas mal. Mais rassurez-vous : un jour je ne manquerai pas de mourir; à Louis Vallon, qui s'était écrié Mort aux cons ! au cours d'une réunion, au temps du RPF, de Gaulle répondit : Vaste programme ! Son mépris affiché des partis politiques, sa défiance envers une droite qui ne l'aimait pas et le lui fit voir en 1969, comme envers une gauche qui n'avait jamais vraiment soutenu le projet de participation des salariés aux bénéfices de leur entreprise qui lui était cher, conformément à sa politique directement inspirée du catholicisme social, tout cela avait entraîné une sympathie des Français envers sa personne. De Gaulle, c'était, dans un esprit très Astérix, un de ces petits qui ne se laissent pas avoir par les grands. On ne s'étonnera pas de sa déclaration que son livre préféré était Cyrano de Bergerac. Et il fit un jour cette remarque ironique : Au fond, vous savez, mon seul rival international, c'est Tintin.
Le général de Gaulle a planifié et modernisé la recherche et l'industrie par l'impulsion de l'État. C'est de son époque que datent le début des grands programmes qui ont fait la force de l'industrie française et qui trouvent leur aboutissement aujourd'hui dans de grands champions français ou européens : dans l'aéronautique, la Caravelle a donné naissance à Airbus Industrie ; dans l'industrie spatiale, la création du Centre national d'études spatiales CNES en 1961, le programme spatial français des « Pierres Précieuses et la fusée Diamant, premier lanceur construit en dehors des États-Unis et de l'URSS, ont abouti à la naissance d'Arianespace et de l'Agence spatiale européenne ; dans l'industrie nucléaire, la création du Commissariat à l'énergie atomique CEA en 1945 a permis à la France de contrôler l'ensemble de la filière nucléaire avec la société Areva ; dans l'industrie informatique148, les objectifs du Plan Calcul 1966 ne furent pas atteints, mais, notamment grâce à la création de l'IRIA devenu INRIA en 1967, la France est le seul pays européen qui ait réussi à conserver un constructeur informatique purement européen, Bull, qui fabrique aujourd'hui des superordinateurs et, rapproché avec Atos, forme un champion européen de l'informatique.

Dans la culture populaire

Dans le film La Carapate 1978, l'avocat parvient à se faire accorder la grâce présidentielle pour son client par le Président Charles de Gaulle, alors que ceux-ci se retrouvent tous les deux dans des toilettes.
Dans la bande dessinée uchronique Paris brûle encore de la collection Jour J, Charles de Gaulle est assassiné lors des événements de Mai 68, quand le palais de l’Élysée est attaqué par les manifestants. La France sera alors plongée dans 8 ans de guerre civile et Paris sera totalement en ruines.

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Posté le : 08/11/2014 19:11
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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