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Attaque de Pearl Harbour
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Le 7 décembre 1941 les japonais attaquent Pearl Harbor

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base américaine aéronavale d'HawaÏ, construite à partir de 1906. La flotte américaine du Pacifique y fut attaquée par surprise, sans déclaration de guerre, par des avions japonais. Les cuirassés de la flotte étaient hors combat, ainsi que 3 croiseurs et des detroyers ; 159 avions furent détruits.Cette attaque détermina l'entrée en guerre des États-Unis.
L'attaque de Pearl Harbor est une attaque surprise par l'aéronavale japonaise le 7 décembre 1941 de la base navale américaine de Pearl Harbor située sur l’île d’Oahu, dans l’archipel du territoire américain d’Hawaï, au cœur de l'océan Pacifique. Cette attaque visait à détruire la flotte de l'United States Navy qu'elle abritait et entraîna l'entrée dans la Seconde Guerre mondiale des États-Unis. ELLe est dirigée et commandée par les commandants Amiral Husband Kimmel, Général Walter Short Amiral Isoroku Yamamoto, Amiral Chuichi Nagumo, il y avait en présence 8 cuirassés, 6 croiseurs, 29 destroyers, 9 sous-marins, ~390 avions sur 6 porte-avions, 2 cuirassés
3 croiseurs, 9 destroyers, 441 avions, et 5 sous-marins de poche. Les pertes furent : 2 cuirassés et un bateau cible coulés, 6 cuirassés endommagés, 5 autres navires diversement endommagés, 188 avions détruits, 155 avions endommagés, 2 403 tués ou disparus, 29 avions détruits, 55 pilotes tués, 4 sous-marins de poche coulés, un pris par l'ennemi, 9 sous-mariniers tués et 1 sous-marinier capturé.
Cette attaque eut lieu au cours de la seconde Guerre mondiale dans la Guerre du Pacifique

Au cours de cette guerre se déroulèrent les batailles et opérations de : Chine · Indochine française 1940 · Guerre franco‑thaïlandaise · Eaux australiennes · Nauru · Pearl Harbor · Atoll de Wake · Hong Kong · Philippines · Invasion japonaise de la Thaïlande · Attaque du Prince of Wales et du Repulse · Malaisie · Ceylan · Bataan · Singapour · Indes orientales néerlandaises · Bornéo · Birmanie · Nouvelle-Guinée · Timor · Java · Mer de Java · Détroit de la Sonde · Îles Salomon · Australie · Taungû · Île Christmas · Yenangyaung · Mer de Corail · Corregidor · Midway · Îles Aléoutiennes · Komandorski · Attu · Îles Gilbert et Marshall · U-Go · Kohima · Imphal · Peleliu · Angaur · Tinian · Guam · Opération Forager · Saipan · Mer des Philippines · Philippines · Morotai · Leyte · Golfe de Leyte navale · Singapour air · Cabanatuan · Luçon · Manille · Kita · Iwo-Jima · Indochine française 1945 · Okinawa · Opération Ten-Gō · Bornéo · Détroit de Malacca · Bombardements navals sur le Japon · Invasion soviétique de la Mandchourie Kouriles · Bombardements de Hiroshima et Nagasaki · Reddition du Japon

Le contexte international

Sans déclaration de guerre, l'aviation et la flotte japonaises ont détruit la flotte américaine du Pacifique à Pearl Harbor, à 6 000 kilomètres de Yokohama. Les États-Unis sont surpris car ils n'y étaient absolument pas préparés, mais ils entreprennent aussitôt de convertir une grande partie de leur industrie, qui va faire d'eux l'arsenal de la coalition contre l'Axe. L'agression japonaise a comme effet de galvaniser une véritable unanimité nationale derrière le président Roosevelt, qui déclare : "La guerre nazie est une répugnante affaire. Nous ne voulions pas y entrer ; mais nous y sommes et nous allons combattre avec toutes nos ressources ! "
"En 1941, le Japon mène depuis déjà dix ans une politique d'expansion impérialiste. Après avoir imposé l'État satellite du Mandchoukouo en 1931, il a entamé la conquête de la Chine en 1937. En 1940, la défaite française lui permet de pénétrer en Indochine et de prendre la Thaïlande sous sa protectio…
En attendant, le Japon se rend maître de l'Extrême-Orient. Il prend Hong Kong et entreprend la conquête de la Birmanie, qu'il achève entre janvier et mai 1942. Cependant, l'armée japonaise ne pousse pas son avance en direction de l'Inde. Par l'Indochine et le Siam, elle envahit la Malaisie et s'empare de Singapour (févr. 194
Poursuivant sa progression vers le nord de la Birmanie, la 33e division d'infanterie japonaise atteint les champs pétrolifères de la Burma Oil Company et s'apprête à encercler le corps expéditionnaire allié du général Slim le Burma Corps.
Après l'occupation par la marine japonaise des îlots d'importance stratégique dans le Pacifique, l'Indonésie hollandaise est conquise, et la résistance américaine réduite dans les Philippines après le siège de Corregidor en Avril 1942. Ainsi les Occidentaux ont-ils perdu la face en Asie ; les empires coloniaux britannique, français, hollandais et américain sont disloqués. D'un coup, le Japon a conquis les matières premières dont son économie avait besoin.
Les Japonais ont débarqué dans l'île néerlandaise de Java, le 28 février 1942; dès le 8 mars, les Néerlandais capitulent.
Le drapeau américain est descendu par les soldats japonais après la chute de Corregidor, Philippines, en mai 1942 et la défaite des Américains.
Le Japon entreprend d'organiser la Grande Asie sous sa domination. Après avoir encouragé les nationalismes indigènes contre les puissances coloniales, il tend à se substituer à celles-ci et à exploiter à son profit les territoires occupés. D'autre part, toutes ses conquêtes ont été faites sans aucun lien avec la guerre que l'Allemagne mène en U.R.S.S. ; elles se sont arrêtées aux lisières de l'Australie sans avoir pu l'attaquer. Les territoires occupés sont si éloignés les uns des autres que la marine japonaise, disséminée dans le Pacifique, navigue en convois mal protégés, proies faciles pour les sous-marins américains.

L'attaque fut ordonnée par le général Hideki Tojo lancée par surprise le matin du dimanche 7 décembre par le service aérien de la marine impériale japonaise contre la flotte américaine du Pacifique dans le port et d’autres forces qui stationnaient aux alentours. Cette attaque s’inscrit dans la politique d’expansion impériale. L’anéantissement de la principale flotte de l'US Navy devait permettre à l’empire du Soleil levant d’établir sa « sphère de coprospérité de la grande Asie orientale ». Le quartier-général impérial souhaitait également répondre aux sanctions économiques prises par Washington en juillet 1941 après l'invasion de la Chine et celle de l'Indochine française par l'armée impériale japonaise.
À l'issue de l'attaque, conduite en deux vagues aériennes parties de 6 porte-avions japonais et impliquant plus de 400 avions, les pertes américaines furent importantes : 2 403 morts et 1 178 blessés. Quatre navires de ligne, trois croiseurs, trois destroyers et 188 avions furent détruits. Cependant, beaucoup de navires purent être remis en état dans les mois qui suivirent, et les trois porte-avions américains du Pacifique, alors absents de Pearl Harbor, échappèrent à l'attaque.
Les Japonais perdirent 64 hommes, 29 avions et cinq sous-marins de poche ; un marin fut capturé.
En moins de vingt-quatre heures, l'Empire du Japon attaqua également les États-Unis aux Philippines et ouvrit les hostilités avec le Royaume-Uni, en envahissant Hong Kong et en débarquant en Malaisie.
L'attaque de Pearl Harbor provoqua l’entrée des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale aux côtés des Alliés. Aux États-Unis, cette attaque reste un des évènements les plus marquants de l'histoire du pays — chaque année le drapeau est mis en berne à la date anniversaire de l'attaque — synonyme de désastre national. Les historiens ont mis en évidence l’audace du plan de l’amiral Isoroku Yamamoto, le manque de préparation et les négligences américaines. Le rôle du président Roosevelt reste un sujet de polémique.

L’expansionnisme japonais

Expansionnisme du Japon Shōwa, Empire du Japon et Seconde Guerre mondiale.
Pendant l’ère Meiji 1868-1912, l’Empire du Japon s’engagea dans une période de croissance économique, politique et militaire afin de rattraper les puissances occidentales. Cet objectif s’appuyait également sur une stratégie d’expansion territoriale en Asie orientale qui devait garantir au Japon son approvisionnement en matières premières indispensables à son développement.
L’expansionnisme nippon se manifesta dès la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle avec l’annexion de l’île de Formose 1895, du sud de l’île de Sakhaline 1905 et de la Corée (1910). Pendant la Première Guerre mondiale, le Japon s’empara des possessions allemandes d’Extrême-Orient et du Pacifique et gagna des parts de marché au détriment des Européens et des Américains présents dans la région. Après 1920, la croissance économique nipponne ralentit et le chômage augmenta ; l’industrie souffrit du manque de matières premières et de débouchés.
Dans l’entre-deux-guerres, l’archipel se dota d’une marine de guerre moderne. La Grande Dépression des années 1930 n’épargna pas l’économie du Japon. Aux effets de la crise économique s’ajouta une montée des nationalistes et des militaires au cours de l'ère Shōwa. L'armée impériale japonaise envahit la Mandchourie en 1931 et ce territoire devint l'État fantoche du Mandchoukouo. Le Japon prit ensuite progressivement le contrôle d'autres régions de la Chine. En 1937, le Japon envahit le reste de la Chine à partir de Shanghai sans toutefois déclarer officiellement la guerre.

La dégradation des relations entre Tokyo et Washington

L'empereur Showa et Osami Nagano, chef d'état-major de la Marine
Les conquêtes nipponnes en Asie orientale menaçaient les intérêts américains et Washington intervint contre le Japon, sans aller jusqu’à la confrontation armée. Ainsi, le Traité de Washington de 1922 limita le tonnage de la flotte de guerre japonaise au troisième rang mondial. En réponse aux pressions diplomatiques internationales à la suite de l'invasion de la Mandchourie, Tokyo décida de quitter la Société des Nations en 1933. Entre 1935 et 1937, les États-Unis choisirent la non-intervention en promulguant une série de lois sur la neutralité.
Le Japon signa le pacte anti-Komintern en 1936. En 1937, le président des États-Unis Franklin Roosevelt prononça à Chicago le Discours de la quarantaine dans lequel il condamnait les dictatures, y compris celle du Japon. L'année suivante, son discours sur l'état de l'Union propose d'augmenter les dépenses militaires. En décembre 1937, au moment du massacre de Nankin, les avions japonais coulèrent la canonnière américaine Panay sur le Yang-tse-Kiang. Washington obtint des excuses mais la tension monta rapidement entre les deux pays. En 1939, le gouvernement américain mit fin au traité de commerce signé en 1911, prélude à l’embargo commercial.
En 1940, l'Empire rejoignit les forces de l’Axe en signant le Pacte tripartite. La même année, le quartier-général impérial, profitant de la défaite de la France et de l’affaiblissement du Royaume-Uni, autorisa l'implantation de bases militaires en Indochine française. Immédiatement après un accord conclu le 22 septembre avec le gouverneur-général de l'Indochine Française, le Japon déclencha une offensive sur Lang Son et bombarda Haiphong.
1941 fut l'année de l’escalade entre les deux pays : en mai, Washington accorda son soutien à la Chine par l’octroi d’un prêt-bail. À la suite du refus du Japon de se retirer de l'Indochine et de la Chine, à l'exclusion du Mandchoukouo, les États-Unis, le Royaume-Uni et les Pays-Bas décrétèrent à partir du 26 juillet 1941 l’embargo complet sur le pétrole et l’acier ainsi que le gel des avoirs japonais sur le sol américain.
La conférence impériale tenue le 6 septembre 1941 décida qu'une guerre serait entreprise contre les États-Unis et le Royaume-Uni, à moins qu'un accord ne soit trouvé à bref délai avec Washington. L'attaque de Pearl Harbor n'est pas un plan préparé conjointement par l'Allemagne et par le Japon mais une initiative japonaise, les Allemands y ayant vu leur intérêt. Le 16 octobre, le Premier ministre du Japon Fumimaro Konoe, jugeant avoir perdu la confiance de l'empereur Showa et des militaires, démissionna de son poste en proposant le prince Naruhiko Higashikuni, un oncle de l'empereur, pour le remplacer. Hirohito refusa cette candidature, proposée également par les militaires, et choisit plutôt le général Tōjō, un ferme partisan de la guerre mais également un homme renommé pour sa fidélité envers l'institution impériale.

Le prince Nobuhito Takamatsu

Sans même attendre la fin des pourparlers auxquels ils ne croyaient plus, les Japonais commencèrent à préparer l'attaque. Le 3 novembre, l'amiral Osami Nagano expliqua en détail à Hirohito la version finale du plan d'attaque contre Pearl Harbor. Le 5 novembre 1941, l'empereur approuva en conférence impériale le plan d'opération pour une guerre contre les États-Unis, la Grande-Bretagne et la Hollande prévu pour le début décembre6. Le jour même, le quartier-général impérial mit en application la décision adoptée à la conférence et ordonna au commandant en chef de la flotte combinée, l’amiral Isoroku Yamamoto, de mettre en branle la mission sur Pearl Harbor. Les négociations avec les États-Unis demeurant dans une impasse, Hirohito approuva finalement le 1er décembre en conférence impériale la guerre de la Grande Asie orientale, après que Nagano et le ministre de la Marine Shigetaro Shimada, l'eurent rassuré la veille sur les chances de succès de l'entreprise en réfutant l'argument du prince Nobuhito Takamatsu qui jugeait que la Marine impériale ne pourrait tenir plus de deux ans contre les États-Unis.

Les forces en présence

À partir du XIXe siècle, la puissance militaire japonaise se renforça et se modernisa grandement. Pour pallier la hausse du chômage provoquée par la Grande Dépression, le gouvernement multiplia les commandes d'armement. Les dépenses militaires augmentèrent fortement. Au total, le Japon possédait en 1941 une quinzaine de cuirassés, une dizaine de porte-avions, 50 croiseurs, 1 destroyers, 80 sous-marins et quelque 1 350 avions. Surtout, le pays comptait 73 millions d'habitants animés d'une fierté patriotique et d'un esprit de sacrifice. Les militaires japonais étaient confiants dans la supériorité de leur armée ; en outre, Tokyo était assuré du soutien allemand en cas de contre-attaque des Américains.
En 1941, les États-Unis n'étaient pas prêts à entrer en guerre. Certes, le pays était une puissance démographique 132 millions d’habitants et industrielle de premier ordre. En 1941, l'aviation américaine pouvait avancer plusieurs milliers d'avions mais beaucoup étaient obsolètes. En 1940, face aux trois millions de soldats japonais, l'United States Army était en position d'infériorité numérique 250 000 hommes.
Surtout, l’opinion américaine n'était pas prête à entrer en guerre. Le souvenir de la Première Guerre mondiale et des soldats américains morts en Europe était encore très présent. Les emprunts contractés par les belligérants auprès des États-Unis n'avaient pas été remboursés et beaucoup d'Américains étaient isolationnistes. Le président Franklin Roosevelt 1933-1945 ne voulait pas s'aliéner les Américains d'origine allemande, italienne et japonaise. Le comité America First, une association pacifiste influente, faisait également pression pour maintenir les États-Unis hors de la guerre.
En janvier 1941, Roosevelt promit à Winston Churchill que son pays interviendrait d'abord contre l'Allemagne nazie et non contre le Japon. Pour soulager le Royaume-Uni dans la bataille de l'Atlantique, d'avril à juin 1941, trois cuirassés, un porte-avions, quatre croiseurs et deux flottilles de destroyers sont transférés du Pacifique à l'Atlantique soit 20 % de la flotte du Pacifique ce qui laisse la supériorité numérique dans la zone à la marine japonaise.

La base de Pearl Harbor

Pearl Harbor constituait la plus grande base navale américaine dans l'océan Pacifique. Elle se trouvait sur la côte sud de l’île d’Oahu, dans l’archipel d’Hawaï, 15 km à l’ouest d’Honolulu. Elle était relativement isolée dans l'océan Pacifique, à 3 500 km de Los Angeles et à 6 500 km de Tokyo. L'île d'Oahu était la plus peuplée de l'archipel hawaïen et se trouvait sur la route des bases américaines de Guam, Wake et Midway. Au début de la Seconde Guerre mondiale, 140 à 180 000 Japonais résidaient à Hawaï.
La base de Pearl Harbor s'étendait autour d'une rade peu profonde. L'entrée de cette rade se faisait par un chenal très étroit 400 mètres de large. La plupart des navires de guerre mouillaient à l'intérieur de la rade, à l'est et au nord de l'île de Ford. Trois se trouvaient à l’ouest l’USS Utah, l'USS Raleigh et l'USS Curtiss. Les bâtiments de guerre étaient amarrés deux par deux, par souci d'économie et par manque de place.
La flotte de guerre américaine du Pacifique, composée alors de la Battle Force, la Scouting Force, la Base Force et de la Amphibious Force avaient, le dimanche 7 décembre, 86 unités dans la base : 28 destroyers, 9 croiseurs, 8 cuirassés, 4 sous-marins, un cuirassé-cible l’USS Utah et une trentaine de bâtiments auxiliaires. On comptait enfin 25 000 hommes sur la base25 et environ 300 avions et hydravions de l'USAAF et de l'aéronavale dans l’île. Le général Walter Short était le commandant des forces terrestres tandis que la flotte du Pacifique était sous les ordres de l'amiral Husband Kimmel. La défense des installations et des ateliers de réparation était assurée par la DCA et les défenses littorales ainsi que 35 B-.

La stratégie et les plans japonais.Marine impériale japonaise.

L'objectif de l'attaque était d'anéantir la flotte américaine stationnée à Pearl Harbor afin de conquérir sans difficulté l'Asie du Sud-Est et les îles de l'océan Pacifique. Le but était de contraindre les forces américaines à quitter Hawaï pour se replier sur les bases de Californie. Il fallait par ailleurs réduire en cendres les docks, les ateliers de réparation et le champ de réservoirs contenant les approvisionnements en mazout pour la flotte du Pacifique, sans oublier les aérodromes de Wheeler Field et d'Hickham Field. Le Japon voulait aussi effacer l’humiliation des sanctions économiques prises par Washington. Les préparatifs de l'attaque furent confiés au commandant en chef de la flotte Isoroku Yamamoto.

Les préparatifs de l'opération Isoroku Yamamoto

Approuvé officiellement le 5 novembre 1941 par Hirohito, le plan d’attaque de Pearl Harbor avait quant à lui été élaboré dès le début de l’année 1941.
Ce plan devait surmonter deux difficultés. Premièrement, l’isolement relatif d’Hawaï rendait impossible le recours aux navires de guerre classiques. Deuxièmement, les eaux peu profondes de la rade de Pearl Harbor empêchaient l’utilisation de torpilles conventionnelles qui auraient explosé sur le fond marin avant d’atteindre leur cible.
La stratégie japonaise reprenait les éléments décisifs de deux batailles sur mer : le premier était l'effet de surprise de l'attaque japonaise menée par l'amiral Heihachirō Tōgō contre la flotte russe à Port-Arthur en février 1904 ; le second était le lancement de plusieurs bombardiers-torpilleurs Fairey Swordfish depuis un porte-avions de l'escadre menée par l’amiral britannique Andrew Cunningham contre la flotte italienne à la bataille de Tarente en novembre 1940.
En 1941, l’amiral Isoroku Yamamoto envoya des experts japonais en Italie pour recueillir des informations qui permettraient de transposer cette stratégie dans le Pacifique. La délégation revint avec des renseignements sur les torpilles que les ingénieurs de Cunningham avaient imaginées. Les plans japonais ont sans doute été aussi influencés par ceux de l’amiral américain Harry Yarnell qui anticipait une invasion d’ Hawaï. Au cours d’un exercice militaire du 7 février 1932, ce dernier avait mis en évidence la vulnérabilité d’Oahu en cas d’attaque aérienne par le nord-ouest. La simulation avait montré que des avions ennemis pourraient infliger de sérieux dommages et que la flotte ennemie, restée à l'écart des côtes, serait indétectable pendant 24 heures. À l'académie navale de Tokyo, les jeunes officiers savaient qu’ au cas où le gros de la flotte de l’ennemi serait stationné à Pearl Harbor, l’idée devrait être d’ouvrir les hostilités par une attaque aérienne surprise.
Le jeune officier Minoru Genda, concepteur du plan d'attaque de Pearl Harbor.
Yamamoto eut du mal à faire accepter son plan d'attaque : par exemple, l’amiral Nagano jugeait l’entreprise particulièrement risquée. L’empereur ne souhaitait pas une attaque surprise sans déclaration de guerre. Les réticences venaient du fait que l’opération devait engager une grande partie de la marine de guerre et parcourir des milliers de kilomètres sans être repérée. Il s'agissait d'une attaque exceptionnelle. Yamamoto menaça de démissionner pour que son plan soit finalement adopté, en octobre 1941. Cela laissa donc peu de temps à Minoru Genda pour préparer l’expédition, essayer les nouvelles torpilles et entraîner les hommes pour la mission.
Pour que la bataille ait des chances de réussir, il fallait qu’elle soit précisément définie et menée dans le plus grand secret. Les ingénieurs militaires japonais créèrent des torpilles spéciales Type 91 munies d’ailerons pour les stabiliser. Ils produisirent également des bombes capables de percer la coque des navires.
Le 3 novembre, l'amiral Nagano expliqua en détail le plan d'attaque à Hirohito. Le 5 novembre, l'empereur approuva en conférence impériale le plan d’attaque. Les renseignements fournis par des Japonais d’Hawaï furent déterminants dans la réussite de l’opération : il fallait attaquer un dimanche car la flotte américaine n’était pas en manœuvre le week-end et de nombreux équipages n’étaient pas complets. Il n’y avait aucune patrouille ce jour-là. Les espions japonais fournirent également des informations sur la situation de la flotte américaine.

Le départ de la flotte japonaise

Le 14 novembre 1941, la flotte combinée se concentra dans la baie d’Hito-Kappu, au sud des îles Kouriles. Elle se composait d'une force de choc avec sa force aéronavale, le Kidô Butai, qui comportait notamment six porte-avions Akagi, Hiryū, Kaga, Shōkaku, Sōryū, Zuikaku et plus de 400 avions : des avions de chasse Mitsubishi A6M les Zéros, des bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N Les Kate et des bombardiers en piqué Aichi D3A les Val. Une flotte de reconnaissance comprenait 22 sous-marins, cinq sous-marins de poche Ko-hyoteki, emportant chacun deux hommes et deux torpilles de 450 mm et trois croiseurs légers. Huit bateaux de ravitaillement en carburant accompagnaient l’expédition.
Le 26 novembre, alors que les deux gouvernements étaient encore en pourparlers, l'armada de la marine impériale japonaise quitta secrètement le Japon. Elle se dirigea vers l'archipel d'Hawaï par le nord en empruntant une route peu fréquentée.
Le 1er décembre, Hirohito approuva en conférence impériale la Guerre de la Grande Asie orientale et autorisa le bombardement de Pearl Harbor. Lorsque la flotte reçut l'ordre officiel d'attaquer le 2 décembre, les pourparlers se poursuivaient encore. Le 6 décembre, la flotte qui se trouvait à 200 milles marins 370 km au nord de Pearl Harbor, reçut le signal d’attaque : Grimpez sur le mont Niitaka

Rupture des négociations et déclaration de guerre

Les négociations entre le Japon et les États-Unis, reprises en novembre 1941, se trouvaient bloquées à la veille de l'attaque : les Japonais exigeaient l'arrêt du soutien américain aux Chinois. Le secrétaire d'État Cordell Hull réclamait quant à lui le retrait des troupes nipponnes de Chine. Le 6 décembre 1941, Roosevelt transmit un télégramme à l’empereur Hirohito afin de reprendre les négociations qui avaient lieu à Washington.
Le même jour, le ministère des affaires étrangères japonais envoya à ses négociateurs et à l'ambassadeur Kichisaburo Nomura en place à Washington un document codé en 14 points, texte diplomatique signifiant la rupture des relations diplomatiques ; ils avaient pour consigne de le remettre au secrétaire d’État américain le lendemain à 13 h, soit 7 h 30, heure d’Hawaï. Mais le message ne fut pas remis à l’heure prévue en raison de retards dans le décryptage de ce texte long et complexe. Les services américains de renseignement réussirent à décoder le message bien avant l’ambassade japonaise : seul le dernier point du mémorandum, c’est-à-dire la déclaration de guerre, n’avait pas été déchiffré par les Américains. Le dimanche 7 décembre à 11 h 58, heure de Washington 6 h 28 à Hawaï, le général George Marshall lut le message ; inquiet par sa teneur, Marshall fut persuadé qu'une attaque se préparait. Il expédia un télégramme pour donner l'alerte aux bases américaines situées aux Philippines, à Panama, à San Diego et à Pearl Harbor. En raison de défaillances techniques, l'alerte arriva trop tard à Hawaï, plusieurs heures après les bombardements. Le message parvint à l’ambassadeur américain au Japon environ dix heures après la fin de l’attaque.

La préparation de l’attaque

L’attaque est préparée pendant plusieurs semaines sur une maquette de la base.
Deux des six porte-avions, le Kaga et le Zuikaku, en route pour les îles Hawa
Une partie des pilotes du porte-avion Kaga prennent la pose la veille de l’attaque.
Les pilotes du Kaga en briefing sur un dessin de la rade, la veille de l’attaque.
À l’aube du 7 décembre, sur le Shokaku, la première vague d’assaut s’apprête à décoller.

L'attaque

Isoroku Yamamoto et d’autres généraux avaient prévu une attaque en trois vagues mais le vice-amiral Chuichi Nagumo décida de n’en retenir que deux. Le nombre total d’avions impliqués dans l’attaque était de 350. 91 avions furent engagés dans la protection des porte-avions et des navires.
Ce fut dans la nuit du 6 au 7 décembre que les opérations débutèrent massivement, l'aube permettant de réduire les précautions à prendre pour éviter d'être repéré et accélérer ainsi la vitesse de progression.
Il est à noter que l'attaque sur la Malaisie, le 8 décembre, a lieu en fait au même moment, car de l'autre côté de la ligne de changement de jour.

Les missions de reconnaissance

Vers minuit, les sous-marins de haute mer lancèrent cinq sous-marins de poche qui se dirigèrent vers l'île d'Oahu.
À 3 h 58, le dragueur de mines USS Condor signala la présence d’un sous-marin dans la rade de Pearl Harbor au destroyer USS Ward. Ce dernier se mit alors à sa recherche sans succès : l'intrus avait rapidement disparu. L'amirauté de Pearl Harbor ne donna pas l'alerte. À 6 h 37, le Ward repéra un autre sous-marin qui était chargé de renseigner la flotte japonaise et le détruisit.

La première vague

C'est entre 6 h et 7 h 15 que la première vague de 183 avions, conduite par le capitaine Mitsuo Fuchida, s'envola vers Pearl Harbor. Elle comprenait :
49 bombardiers moyens d'altitude horizontaux Nakajima B5N2 Kate,
51 bombardiers en piqué Aichi D3A1 Val,
40 bombardiers torpilleurs Nakajima B5N2 Kate
43 avions de combat Mitsubishi A6M2 Zéro.
Leur présence ne fut détectée que vers 7 h par deux soldats américains George Elliot Jr. et Joseph Lockard à la station d’Opana Point un radar SCR-270 situé près de la pointe nord d'Oahu. Ces derniers ne sont pas pris au sérieux par un nouvel officier, le lieutenant Kermit A. Tyler, convaincu qu’il s’agissait de six bombardiers B-17 qui arrivaient de Californie42 et qui étaient attendus pour se ravitailler avant de rejoindre leur destination finale de Clark Field dans les îles Philippines43.
Vers 7 h 30, le premier avion japonais fit une reconnaissance dans les alentours et donna le signal : Pearl Harbor dort.
Les premiers avions survolèrent la base américaine à 7 h 40. Les avions torpilleurs volaient à basse altitude et provenaient de différentes directions. Les bombardiers volaient quant à eux à haute altitude.
À 7 h 53, les premières bombes nipponnes furent larguées et les avions se mirent en formation d’attaque. Le contre-amiral Patrick Bellinger donna l'alerte.
Cinq sous-marins Ko-hyoteki torpillèrent les bateaux américains après le début des bombardements. Sur les dix hommes qui se trouvaient à bord des sous-marins, neuf trouvèrent la mort ; le seul survivant, Kazuo Sakamaki, fut capturé et devint le premier prisonnier de guerre japonais fait par les Américains au cours de la Seconde Guerre mondiale. Une étude de l’institut naval américain conduite en 1999 indique qu’une torpille toucha l'USS West Virginia qui devint la première cible de l’attaque japonaise.
Cette première attaque était divisée en six unités dont une dirigée sur le poste militaire de Wheeler Field. Les Japonais exploitèrent les premiers moments de surprise pour bombarder les navires les plus importants, surtout à l'est de la rade. Chacune des attaques aériennes commençait par les bombardiers et finissait par les unités de combat afin de contrer les poursuites éventuelles. La première attaque engagea le flanc droit de l’ennemi.

La deuxième vague

À 8 h 30, la deuxième phase de l'attaque forte de 167 appareils visa le flanc gauche et utilisa davantage de bombardiers en vol horizontal. Elle comprenait :
54 bombardiers moyens d'altitude horizontaux Nakajima B5N2 Kate,
78 bombardiers en piqué Aichi D3A1 Val, et
35 chasseurs Mitsubishi A6M2 Zéro.
Elle fut menée par le lieutenant-commandant Shigekazu Shimazaki. Elle était divisée en quatre unités dont l’une fut lancée sur la base de Kānehohe, à l'est de Pearl Harbor. Les différentes formations arrivèrent presque en même temps sur le site depuis plusieurs directions.
Au cours de la deuxième vague, un sous-marin de poche venu en surface fut pris pour cible par le Curtiss et coulé par le destroyer USS Monaghan. La seconde vague s’acheva à 9 h 45. Après l'attaque, des avions survolèrent le site afin d’étudier les dommages et de faire un rapport.

Défense américaine

Les hommes qui se trouvaient à bord des navires américains furent réveillés par les explosions. Le fameux message Air raid Pearl Harbor. This is not a drill, Attaque aérienne sur Pearl Harbor. Ceci n’est pas un exercice fut prononcé par le commandant Logan Ramsey à 7 h 58, cinq minutes après les premières bombes. L'amiral Husband Kimmel alerta Washington quelque temps après.
En dépit du manque de préparation et des scènes de panique, plusieurs militaires se sont illustrés durant la bataille. L’amiral Isaac C. Kidd et le capitaine Franklin Van Valkenburgh se ruèrent sur le pont de l'USS Arizona afin d’organiser la défense et furent tués par l’explosion d'un dépôt d’armes tout proche. Les deux hommes furent honorés de manière posthume par la médaille d’honneur. L’enseigne Joe Taussig mit l'USS Nevada en route pendant l’attaque. L’un des destroyers, l’USS Aylwin, fit de même avec seulement quatre officiers à son bord, le reste de l'équipage étant composé d'enseignes qui avaient peu d’expérience en mer. Le capitaine Mervyn Bennion, commandant l'USS West Virginia, dirigea son équipage jusqu’à ce qu'il fut tué par des fragments de bombes. Les premières victimes de l’attaque aérienne se trouvaient sur le sous-marin USS Tautog qui abattit également le premier Japonais. L'Afro-Américain Doris Dorie Miller, qui servait comme cuisinier sur l'USS West Virginia, prit le contrôle d’une mitrailleuse de lutte anti-aérienne et s’en servit pour tirer sur des avions japonais : il en toucha au moins un alors que son navire était bombardé dans le même temps. Il reçut la croix de la marine Navy Cross après la bataille. Quatorze marins et officiers furent par ailleurs récompensés par la médaille d’honneur. Une distinction militaire spéciale, la Pearl Harbor Commemorative Medal, fut par la suite décernée à tous les vétérans de l’attaque. Dans le ciel, la seule opposition importante vint d’une poignée de Curtiss P-36 Hawk et de Curtiss P-40 Warhawk qui firent vingt-cinq sorties et par les défenses anti-aériennes. Des avions décollèrent pour tenter de repérer la flotte japonaise, en vain.

Une troisième vague avortée

Certains officiers pressèrent l'amiral Nagumo de lancer une troisième attaque afin d'anéantir les dépôts de carburant et les infrastructures de Pearl Harbor. Certains historiens ont suggéré que la destruction des réserves de carburant et des équipements de réparation aurait fortement handicapé la flotte du Pacifique, bien plus que la perte des navires de ligne. Cependant, Nagumo décida de renoncer à une troisième attaque pour plusieurs raisons : en premier lieu, les succès des défenses antiaériennes furent plus nombreux au cours de la seconde vague et occasionnèrent les 2/3 des dommages nippons. L'effet de surprise avait disparu et une troisième vague risquait d’accroître les pertes japonaises. Ensuite, la préparation d'une troisième attaque aurait pris beaucoup trop de temps, laissant aux Américains la possibilité d'attaquer les forces de Nagumo situées à moins de 400 km au nord d'Oahu. L'armada pouvait rapidement être localisée et prise en chasse par les sous-marins ennemis. En outre, les Japonais ignoraient toujours la position des porte-avions américains et avaient atteint la limite de leurs capacités logistiques : rester plus longtemps augmentait le danger de manquer de carburant. La deuxième vague avait atteint l'objectif initial de la mission, à savoir neutraliser la flotte américaine du Pacifique. On se souvient que les autorités japonaises avaient été réticentes devant cette opération, c'est pourquoi l'expédition devait s'arrêter là. Il était donc temps de partir, d'autant que le Japon avait d'autres objectifs stratégiques dans le Sud-Est asiatique.

Bilan de l'attaque

Les pertes de l’US Navy classées par durée d’immobilisation des navires
Nom Type Mise en service Touché par Tués Retour au combat Mois d’immob° et
commentaires
Navires détruits
1 Arizona Cuirassé 1916 2 bombes de 800 kg 1 177 Définitif
2 Oklahoma Cuirassé 1916 5 torpilles 429 Définitif
3 Utah Bateau cible 1911 2 torpilles 58 Définitif
Navires endommagés
4 West Virginia Cuirassé 1923 7 torpilles, 2 bombes de 800 kg 1 défectueuse 106 juillet 1944 31
5 Oglala Mouilleur de mines 1917 1 torpille dommages indirects 0 février 1944 26
6 Cassin Destroyer 1936 2 bombes de 250 kg 0 février 1944 26
7 California Cuirassé 1921 2 torpilles, 1 bombe de 250 kg 105 janvier 1944 25
8 Downes Destroyer 1937 1 bombe de 250 kg 12 novembre 1943 23
9 Nevada Cuirassé 1916 1 torpille, 5 bombes de 250 kg 57 octobre 1942 10
Échoué pour éviter la submersion dans le chenal.
10 Vestal Navire atelier 1913 2 bombes de 250 kg 1 défectueuse 7 août 1942 8
11 Shaw Destroyer 1936 3 bombes de 250 kg 24 juin 1942 6
12 Helena Croiseur léger 1939 1 torpille 34 juin 1942 6
13 Pennsylvania Cuirassé 1916 1 bombe de 250 kg 32 mars 1942 3
14 Tennessee Cuirassé 1920 2 bombes de 800 kg défectueuses 5 février 1942 2
15 Maryland Cuirassé 1921 2 bombes de 800 kg défectueuses 4 février 1942 2
16 Raleigh Croiseur léger 1924 1 torpille, 1 bombe de 250 kg 0 février 1942 2
17 Curtiss Porte-hydravions 1940 1 bombe de 250 kg 21 janvier 1942 1
18 Honolulu Croiseur léger 1938 1 bombe de 250 kg dommages indirects 0 janvier 1942 1
19 Helm Destroyer 1937 2 bombes de 250 kg dommages indirects 0 décembre 1941 0
20 New Orleans croiseur lourd 1931 Dommages indirects 0 décembre 1941 0
Dommages légers

Du côté américain

Le bilan humain de l'attaque fut lourd : 2 403 Américains sont morts et 1 178 ont été blessés. Les pertes se répartissent ainsi :
US Army; 218 morts et 364 blessés.
US Navy; 2008 morts et 710 blessés.
US Marine Corp, 109 morts et 69 blessés.
Civils, 68 morts et 35 blessés, tués ou blessés par les bombes ou les éclats de bombes tombés dans les zones civiles, jusqu'à Honolulu.
Près de la moitié des pertes américaines, soit 1 177 hommes, fut provoquée par l'explosion et le naufrage de l'USS Arizona. Celui-ci explosa à cause d'un obus de marine de 400 mm modifié de façon telle qu'il puisse être utilisé comme une bombe par un avion, largué par Tadashi Kusumi. La bombe frappa le navire au niveau de la tourelle avant de 356 mm. Ayant un blindage de pont plus fin cette bombe s’arrêta dans la soute à munitions et explosa. La coque de l'Arizona sert aujourd'hui de mémorial. Il continue d’ailleurs de perdre un peu de carburant, plus de 70 ans après l’attaque.
L'attaque avait visé les cuirassés stationnés dans la rade :
l'USS Nevada fut endommagé par une torpille et un incendie ; il fut la cible de nombreuses bombes japonaises lorsqu'il se mit en route pour éviter la submersion dans le chenal et finit par toucher le fond de la rade par l'avant. Il fut renfloué par la suite.
L'USS California fut touché par deux bombes et deux torpilles. L'équipage reçut l'ordre d'évacuer le navire. Il fut renfloué par la suite.
L'USS Utah, ce cuirassé d’un modèle ancien était utilisé comme cible de bombardement mobile. Il constituait une cible facile et fut touché deux fois par des torpilles.
Sept torpilles affectèrent l'USS West Virginia et la dernière eut pour conséquence de détacher le gouvernail.
L'USS Oklahoma fut frappé par cinq torpilles et chavira.
L'USS Maryland fut atteint par deux obus de marine de 400 modifiés sans subir de dommages sérieux.
L'USS Pennsylvania fut touché par une bombe de 250 kg au cours de la deuxième vague d'attaque alors qu'il était en cale sèche sans subir de dommages sérieux.
L'USSWest Virginia fut touché par 7 torpilles et 2 bombes de 800 kg. Il fut renfloué par la suite.
L'USS Tennessee fut touché par 2 bombes de 800 kg défectueuses occasionnant seulement des dommages légers
Même si les Japonais ont concentré leurs tirs sur les navires de ligne, ils n'ont pas épargné les autres cibles. Le croiseur léger USS Helena fut torpillé et le choc provoqua le chavirement du mouilleur de mines USS Oglala situé à côté. Deux destroyers en cale sèche furent détruits lorsque des bombes touchèrent leur réservoir de carburant. L’incendie se propagea à d'autres navires. Le croiseur léger USS Raleigh fut touché par une torpille qui ouvrit une brèche. Le croiseur léger USS Honolulu fut endommagé mais resta en service. Le destroyer USS Cassin chavira et le destroyer USS Downes fut sérieusement endommagé. Le bateau de réparation USS Vestal, rangé bord à bord avec l’Arizona alors en feu, fut gagné par les flammes qui ravageaient ce dernier et finit par sombrer à son tour. Le navire ravitailleur USS Curtiss fut également endommagé.
La quasi-totalité des 188 avions stationnés à Hawaï furent détruits ou endommagés. Lorsque les Japonais arrivèrent au-dessus des aérodromes américains, ils trouvèrent 155 avions stationnés aile contre aile pour éviter le sabotage 40 % de la population de l'île d'Oahu étant des Américano-japonais mais constituant ainsi des cibles idéales. Les attaques sur les casernes tuèrent des pilotes et d’autres membres du personnel. Des tirs amis ont abattu plusieurs avions américains.
L'aéronavale perdit 13 chasseurs, 67 bombardiers, trois avions de transport et quatre forteresses volantes en plus de la moitié des avions de combat qui se sont retrouvés cloués au sol parce qu'ils avaient été disposés aile contre aile ce qui les empêcha de décoller rapidement. L'aviation de l'armée de terre fut aussi gravement touchée : 12 B-18, 20 A-9, 2 A-20, 4 P-26, 20 P-36 et 32 P-40.

Dans le camp japonais

Du côté japonais, les pertes humaines furent beaucoup moins lourdes : 64 morts 55 aviateurs et neuf sous-mariniers ; l'enseigne Kazuo Sakamaki fut capturé, premier prisonnier de guerre japonais du conflit.
Le bilan matériel fut aussi limité : les cinq sous-marins de poche engagés furent coulés ou capturés et un sous-marin de croisière a été coulé le 10 décembre le I-70 avec 121 membres d'équipage fut détruit par des avions de l'USS Enterprise. Sur les 441 avions japonais disponibles, 350 prirent part à l’attaque et 29 furent abattus durant la bataille, neuf au cours de la première vague, vingt dans la seconde. 74 autres furent touchés par les défenses antiaériennes et l’artillerie au sol. Le plan audacieux de Yamamoto et de Genda avait atteint ses objectifs.

Un succès à relativiser

Vengez Pearl Harbor - Nos balles le feront.
Cependant, l'armada japonaise s'en retourna sans qu'aucun porte-avions américain ne fût détruit car ils ne se trouvaient pas à Pearl Harbor. L'USS Enterprise rentrait au port et se trouvait à 300 km au début de l'attaque six des dix-huit SBD qu'il avait fait décoller à 6 h 20 en direction d'Hawaï ont été détruits, l'USS Lexington livrait des avions aux îles Midway et l'USS Saratoga était à San Diego en train d'embarquer son groupe aérien et de subir des réparations. D'autre part, presque tous les navires touchés étaient des vieux bâtiments ; 80 % d'entre eux furent remis en état et modernisés après l'attaque. Les destroyers Cassin et Downes furent gravement endommagés mais leurs machines furent sauvées et elles équipèrent d’autres bâtiments portant leur nom d’origine. Les pertes matérielles les plus graves furent celles des 155 avions et des dégâts matériels dans la base.
Finalement, l'attaque japonaise sur Pearl Harbor fut une brillante réussite tactique mais un échec du point de vue stratégique. Malgré les pertes, la base resta opérationnelle le port, les pistes, les réservoirs de carburant et les ateliers de réparation n'ont pas été détruits ou marginalement. Yamamoto aurait dit : Je crains que tout ce que nous avons réussi à faire est de réveiller un géant endormi et de le remplir d'une terrible résolution.
Contrainte de se battre sans cuirassés, la marine américaine développa par la suite de nouvelles tactiques navales reposant sur des Task forces combinant des porte-avions et des sous-marins, reprenant la stratégie japonaise employée à Pearl Harbor. Ces nouvelles méthodes permirent de freiner l'avance japonaise en 1942, délai que l'amiral Yamamoto estimait avoir donné au Japon avant que la capacité industrielle démultipliée des États-Unis ne leur donne une supériorité écrasante. Paradoxalement, la doctrine navale japonaise continuait à ce moment à considérer les cuirassés comme les navires les plus importants.

Conséquences, entrée en guerre des États-Unis

Après l'attaque japonaise sur la base navale américaine, le président Roosevelt engagea son pays dans la Seconde Guerre mondiale aux côtés des Alliés. Les Japonais firent une déclaration de guerre officielle mais à cause de divers contretemps, elle ne fut présentée qu'après l'attaque.
Le 8 décembre 1941, le président Roosevelt déclara :
" Hier, 7 décembre 1941 - une date qui restera à jamais marquée dans l'Histoire comme un jour d’infamie - les États-Unis d'Amérique ont été attaqués délibérément par les forces navales et aériennes de l'empire du Japon. Les États-Unis étaient en paix avec le Japon et étaient même, à la demande de ce pays, en pourparlers avec son gouvernement et son empereur sur les conditions du maintien de la paix dans le Pacifique. Qui plus est, une heure après que les armées nippones eurent commencé à bombarder Oahu, un représentant de l'ambassade du Japon aux États-Unis a fait au secrétariat d'État une réponse officielle à un récent message américain. Cette réponse semblait prouver la poursuite des négociations diplomatiques, elle ne contenait ni menace, ni déclaration de guerre …. J'ai demandé à ce que le Congrès déclare depuis l'attaque perpétrée par le Japon dimanche 7 décembre, l'état de guerre contre le Japon. "

Le Congrès américain déclara la guerre au Japon à la quasi unanimité ; seule la pacifiste Jeannette Rankin députée républicaine du Montana s'opposa à cette décision. Roosevelt signa la déclaration le jour même. Avec la loi sur la conscription du 20 décembre 1941, la mobilisation s'élargit à tous les Américains entre 20 et 40 ans. Le 22 décembre 1941 débuta la conférence Arcadia au cours de laquelle Churchill et Roosevelt décidèrent d'unir leurs forces contre l'Allemagne nazie. La Déclaration des Nations unies du 1er janvier 1942 prévoyait la création de l'ONU. Enfin, le pays dut convertir son économie pour répondre aux besoins de la guerre, un processus qui commença le 6 janvier 1942 avec l'annonce du Programme de la Victoire. L'entrée en guerre des États-Unis marquait un tournant dans la mondialisation du conflit.
Le lendemain, 9 décembre, l'Angleterre déclarait la guerre au Japon et Winston Churchill écrira plus tard dans ses Mémoires : Aucun Américain ne m'en voudra de proclamer que j'éprouvai la plus grande joie à voir les États-Unis à nos côtés. Je ne pouvais prévoir le déroulement des événements. Je ne prétends pas avoir mesuré avec précision la puissance guerrière du Japon, mais je compris que, dès cet instant, la grande République américaine était en guerre, jusqu'au cou et à mort. Nous avions donc vaincu, enfin ! .

Réaction du Japon et de ses alliés

Dans les heures qui suivirent, le Royaume-Uni et son empire colonial, le Canada, l'Australie, l'Afrique du Sud entrèrent en guerre contre le Japon.
L'Allemagne nazie et l'Italie fasciste déclarèrent la guerre aux États-Unis le 11 décembre 1941, quatre jours après l'attaque de Pearl Harbor. Selon les termes du pacte tripartite, Hitler et Mussolini n'étaient pourtant pas obligés de déclarer la guerre. Cependant, les relations entre les pays européens de l’Axe et Washington s'étaient détériorées depuis 1937.
Les adversaires du New Deal de Roosevelt, notamment le Chicago Tribune, rendirent public le plan de guerre américain pour l’Europe. Hitler estimait qu'un conflit avec les États-Unis était inévitable. Ce sentiment fut renforcé par la publication du plan américain, par l’attaque de Pearl Harbor et par le discours de Roosevelt. Le Führer méprisait les Américains, en particulier les Noirs qu'il tenait pour inférieurs. Il sous-estima également la puissance productive des États-Unis, leur capacité à combattre sur deux fronts à la fois (en Europe et dans le Pacifique) et les conséquences du prêt-bail sur ses adversaires. Les nazis escomptaient qu'à la suite de la déclaration de guerre contre les États-Unis, le Japon s'engagerait davantage contre l'URSS (avec laquelle il est en paix depuis la conclusion du pacte nippo-soviétique du 13 avril 1941) et les possessions européennes en Asie55. Toutefois, le front chinois et le théâtre d'opération méridional accaparèrent l'essentiel des forces de l'empire du Japon.

Dans les heures qui ont suivi l'attaque de Pearl Harbor, les Japonais attaquèrent diverses colonies et bases militaires britanniques et américaines en Asie et dans le Pacifique : la Malaisie, Hong Kong, Guam et Wake. Peu après les événements de Pearl Harbor, les bombardiers de la 11e flotte aérienne japonaise s'en prirent à la 7e flotte de l'Air Force américaine basée aux Philippines et à la force Z britannique ce qui ouvrait la voie à la capture des deux premiers objectifs visés. Le 16 décembre, les forces nippones contrôlaient le nord de l'île de Bornéo, Hong Kong capitula le 25 décembre et Singapour tomba en janvier 1942.

L’évènement vu par les Japonais

Bien que la propagande anti-américaine eût préparé l'opinion publique japonaise à la guerre contre les États-Unis, il semble que la plupart des Japonais furent surpris lorsqu'ils apprirent la nouvelle : l'attaque avait en effet été menée dans le plus grand secret. Elle était présentée et ressentie comme un coup d'éclat et finit par rallier les sceptiques face à la guerre. Pour l'état-major et le gouvernement japonais, l'attaque de Pearl Harbor n’était qu’une réponse juste à la politique agressive de Washington. Il considérait que les Alliés, et particulièrement les États-Unis, multipliaient depuis longtemps les provocations à l'égard des Japonais. Aussi, l’attaque de Pearl Harbor ne relèverait pas de la trahison car Washington se préparait depuis longtemps à la guerre. Aujourd'hui encore, un certain nombre de Japonais pensent que leur pays a été poussé à se battre pour protéger la sécurité nationale et leurs intérêts. En 1991, le ministre japonais des affaires étrangères rappela que le Japon avait donné une déclaration de guerre à 13h00 le message en 14 points, heure de Washington DC, 25 minutes avant le début de l’attaque de Pearl Harbor.

Le sentiment anti-japonais aux États-Unis

Les photographies des bâtiments en flamme et des destructions à Pearl Harbor soulevèrent une émotion certaine dans le monde entier. L'attaque japonaise galvanisa la nation américaine et l'unit pour atteindre un but : celui de faire capituler l'Empire du Soleil Levant. Le comité pacifiste America First décida lui-même sa dissolution et les adversaires politiques de Roosevelt cessèrent provisoirement leurs attaques. Le sentiment de trahison et la peur du sabotage ou de l’espionnage rendirent suspects les Japonais vivant sur le sol américain et les Américains d'origine japonaise. Le général John DeWitt et le secrétaire à la Marine Frank Knox évoquèrent l'existence d'une cinquième colonne sur le sol américain.
Dans les jours qui suivirent l’attaque, plusieurs rumeurs circulèrent : les ouvriers nippons de l’île auraient coupé les champs de canne à sucre pour former des flèches indiquant le chemin vers Pearl Harbor. D'autres rumeurs touchèrent le président Roosevelt et Marshall qui auraient été au courant de l’attaque. Enfin, la crainte d'un débarquement japonais à la suite de l'attaque ajouta un élément à la confusion qui régnait à Hawaï.
C'est dans ce contexte que 110 000 Japonais et citoyens américains d'origine japonaise60 furent rassemblés et surveillés dans des camps d'internement War Relocation Centers. L'ordre exécutif 9066 du 19 février 1942 fut signé par Roosevelt et concerna l'ouest du pays où se concentraient les populations japonaises ; des camps furent ouverts dans des régions isolées des États de Washington, de Californie et de l'Oregon. Cependant, les Japonais des îles Hawaï ne furent pas internés car l'armée et la marine avaient besoin de main d'œuvre. Des Américains d'origine japonaise furent incorporés dans l'armée américaine notamment dans le 442nd Regimental Combat Team qui combattit en Europe à partir de 1943 et subit de lourdes pertes. En 1988, le Congrès présenta officiellement ses excuses pour ces arrestations arbitraires en votant une loi qui indemnisait les victimes encore vivantes.
Pearl Harbor peut également expliquer la détermination des États-Unis à procéder aux bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki.

Portée et signification

Pearl Harbor est toujours considéré par les Américains comme l'un des événements les plus importants de leur histoire : c'était en effet la première fois depuis la guerre de 1812 que le sol américain était attaqué par un pays étranger. Soixante ans plus tard, les journalistes comparèrent les attentats du 11 septembre 2001 à l'attaque du 7 décembre.
De nombreux films japonais et américains ont relaté cet épisode de la Seconde Guerre mondiale. Tant qu'il y aura des hommes réalisé en 1953 par Fred Zinnemann évoque la vie des militaires à Pearl Harbor. Le film Tora! Tora! Tora! de Richard Fleischer en 1970 donne une description assez réaliste des événements, prenant à la fois les points de vue américain et japonais. Le film documente notamment la longue liste d'erreurs et d'accidents qui rendirent cette attaque si destructrice pour les forces américaines. Le titre reprend le mot Tora qui signifie « tigre ». Il s'agit du message radio envoyé par Mitsuo Fuchida, le commandant de la mission. Le film 1941, réalisé par Steven Spielberg et sorti en 1979, évoque le climat de panique après l'attaque. Dans Nimitz, retour vers l'enfer de Don Taylor 1980, un porte-avions nucléaire voyage dans le temps et se retrouve à Pearl Harbor, la veille de l'attaque, avec la possibilité de changer l'Histoire. Pearl Harbor 2001 de Michael Bay reprend des scènes de Tora! Tora! Tora! comme celle du cuisinier-mitrailleur.

Un événement controversé

L'attaque de Pearl Harbor fit l'objet de nombreuses polémiques dès les lendemains des événements : entre décembre 1941 et juillet 1946, sept commissions administratives et une commission spéciale enquêtèrent pour établir les responsabilités et les négligences.

Les commissions d'enquête

La première commission, dirigée par Owen Roberts, fut constituée dès le mois de décembre 1941 et rendit ses conclusions au Congrès des États-Unis en janvier 1942. Elle accusa les officiers de la base (Walter Short et Husband Kimmel) de manquement à leur devoir, en particulier dans la défense de Pearl Harbor ; les deux hommes furent relevés de leurs fonctions. Cependant, le Sénat des États-Unis vota leur réhabilitation en mai 1999 (non signée ni par Clinton ni par Bush).

Les négligences et erreurs américaines

Walter Short
L'attaque de Pearl Harbor par les Japonais provoqua un choc immense dans l'opinion publique, à la tête de l'armée et de l'État. Les journalistes et les politiques posèrent rapidement la question des responsabilités. Il paraissait en effet évident que plusieurs erreurs avaient été commises : encore fallait-il déterminer si elles l'avaient été de manière intentionnelle ou non. Une série de défaillances se sont accumulées et permettent de comprendre le désastre : l'entrée de la rade n'était pas protégée par des filets anti torpilles. Les navires américains, alignés côte à côte sur ordre de Claude C. Bloch à cause du manque de place, offraient des cibles idéales. Les soldats américains de Pearl Harbor croient lors des premiers bombardements qu'il s'agit d'exercice, pensant que les avions venaient de Californie, les Japonais ayant longé les côtes russes.
Le général Short estimait que le danger le plus immédiat pour les terrains d'aviation était le sabotage, et avait par conséquent ordonné que les avions soient concentrés en des endroits faciles à surveiller, situation qui facilita leur destruction par l'attaque aérienne ; Short ne croyait pas à l’efficacité du radar, une invention relativement nouvelle. L'équipe de surveillance du radar n'avait pas été remplacée après 7 heures ; aucune patrouille n'était de service le dimanche matin. Les diverses installations militaires n'étaient pas camouflées. La cryptanalyse des codes secrets Code 97 des purple machines aurait dû aider Pearl Harbor mais les Japonais pratiquaient la contre-information et ils n’ont pas été transmis à temps George Marshall préféra utiliser le télégraphe au téléphone qu'il pensait être victime d'interceptions par les Japonais, d'autant plus qu'il n'y avait aucun décodeur à Hawaï. Enfin, les divergences qui existaient entre Short et Kimmel expliquent en partie le manque de coordination et les dysfonctionnements dans le système de défense de Pearl Harbor.

Les révélations d'un agent double

De nombreux signes et avertissements n'ont pas été entendus ou compris. Quatre mois avant l'attaque, l'espion serbe Dušan Popov, à l'instar de Richard Sorge, informe les services secrets anglais, puis américains des intentions nippones. Les actualités de Paramount dès le 13 novembre 1941 montraient qu'une attaque pourrait avoir lieu sur Pearl Harbor.
Dans sa synthèse historique récente Comment Roosevelt fit entrer les États-Unis dans la guerre, Arnaud Blin indique65 que l'agent double Dusko Popov avait dévoilé par un questionnaire des services secrets britanniques MI:5 que les amiraux japonais avaient réclamé à l'Abwehr une étude détaillée du bombardement par la RAF de la flotte italienne dans le port de Tarente les 11 et 12 novembre 1940. Bien que le directeur du FBI J. Edgar Hoover ait reçu l'espion Popov le 12 août 1941 dans son bureau, il ne transmit qu'un échantillon du questionnaire à la Maison Blanche.
L’amiral Harold Rainsford Stark, chef des opérations navales américaines, avait envoyé un message d’alerte au commandant en chef des flottes de l’Asie orientale et du Pacifique à Hawaï. L'état-major américain redoutait donc une attaque japonaise, il ne l'attendait pas à Pearl Harbor : ils avaient une confiance aveugle dans l'isolement de l'île, située à plusieurs milliers de kilomètres du Japon. L'état-major américain était pour sa part convaincu que l’attaque aurait lieu aux Philippines ou à Singapour, ce qui ne constituait pas une cause de guerre selon les déclarations de Roosevelt.
Arnaud Blin a donc la conviction que la surprise de Roosevelt était bien réelle lorsque Frank Knox l'informa de l'attaque.
Le 7 décembre 1941, lorsqu'il apprend que Pearl Harbor a été attaquée, le secrétaire à la marine Frank Knox s'écria incrédule :
" Mon Dieu, ça ne peut pas être vrai. Il s'agit sûrement des Philippines ! "
Les défenses naturelles de Pearl Harbor semblaient la protéger efficacement. Les officiers américains craignaient davantage un acte de sabotage ou un débarquement plutôt qu'une attaque aérienne, jugée impossible. Les menaces qui leur furent transmises ne furent pas prises au sérieux.

La mise en cause du président Roosevelt

L'amiral Kimmel, déchu de son poste, contributeur de la thèse sur Roosevelt.
Une thèse très controversée affirme que Roosevelt était au courant de l'attaque et qu'il laissa faire pour provoquer l'indignation de la population et faire entrer son pays dans la guerre. Cette théorie fut d'abord avancée par les officiers déchus par les commissions d'enquête : Husband Kimmel se dit victime d'un complot visant à cacher la responsabilité du gouvernement et de l'état-major. Il diffusa cette idée dans ses Mémoires parus en 1955. Le contre-amiral Robert Alfred Theobald, qui à Pearl Harbor commandait les destroyers, écrivit dans un ouvrage traduit en français :
" Notre conclusion principale est que le président Roosevelt contraignit le Japon à faire la guerre en exerçant en permanence sur lui une pression diplomatique et économique, et l'incita à ouvrir les hostilités par une attaque surprise en maintenant la flotte du Pacifique dans les eaux hawaïennes comme appât."
Cette thèse fut ensuite reprise par les adversaires de Roosevelt et de sa politique extérieure. Les négligences furent utilisées par les républicains pour discréditer le camp démocrate après 1945. Plus tard, plusieurs historiens américains, tels que Charles Beard et Charles Tansill ont essayé de prouver l'implication du président.
Les faits cités à l'appui de cette hypothèse sont notamment l'absence supposée providentielle des trois porte-avions en manœuvre le jour de l'attaque et qui n'ont pas été touchés, le fait que les nombreux messages d'avertissement aient été ignorés et enfin les négligences locales. Certains soupçonnent le gouvernement américain d'avoir tout fait pour ne recevoir la déclaration de guerre japonaise qu'après le bombardement. Les partisans de cette thèse sont convaincus que Roosevelt a poussé les Japonais à la guerre tout au long des années 1930 afin de convaincre le peuple américain majoritairement isolationniste et partisan de la neutralité.
Le président américain Roosevelt signant la déclaration de guerre contre le Japon, une fois son discours prononcé devant le Congrès.
Il est cependant difficile d'imaginer que Roosevelt ait laissé détruire autant de bâtiments de la marine juste pour engager son pays dans la guerre. En effet, la valeur tactique des porte-avions était méconnue en 1941, même si d'évidence, compte tenu des investissements réalisés, les Japonais et les Américains fondaient de gros espoirs sur cette nouvelle unité marine. C'était encore le cuirassé qui faisait figure de navire principal dans les flottes de guerre et même l'amiral Yamamoto envisageait la confrontation finale entre les deux pays sous la forme d'un combat entre cuirassés. Dès lors, tout officier au courant de l'attaque aurait fait en sorte de protéger les cuirassés qui seraient alors partis au large en sacrifiant les porte-avions. Ce choix aurait été logique pour les autorités de la marine et aurait été paradoxalement plus néfaste aux Américains dans la poursuite de la guerre. L'amiral Chester Nimitz livre une analyse similaire dès 1945 :
" Si l'amiral Husband Kimmel, alors commandant des forces américaines à Pearl Harbor, avait reçu 24 heures à l'avance la nouvelle de l'attaque, il aurait fait partir toutes nos forces à la rencontre des Japonais. Nous n'avions pas un seul porte-avions capable de s'opposer à la formation des porte-avions de l'amiral Nagumo, et les Japonais auraient coulé chacun de nos bateaux en haute mer. Nous aurions perdu 60 000 hommes et la quasi-totalité de notre flotte du Pacifique. "
Quant au message d’alerte, il est arrivé trop tard à Pearl Harbor à cause du décalage horaire, du jour un dimanche, de maladresses et de problèmes techniques38. En outre, les services de renseignement américains travaillaient séparément et étaient souvent incompétents. Si la plupart des messages secrets ennemis étaient déchiffrés, ceux de la marine japonaise restaient souvent mystérieux. Les services japonais pratiquaient le jeu de la désinformation
Par conséquent, rien ne permet d’affirmer que Roosevelt était au courant de l'attaque de Pearl Harbor, même s'il fait peu de doute qu'il a accumulé les actes contraires à la neutralité durant les années 1930. Cependant, les sanctions économiques visaient avant tout les Allemands, et le président américain donnait la priorité au théâtre d’opération européen comme le montre par exemple la conférence Arcadia, et la guerre contre le Japon ne fut jamais sa priorité absolue.
Si Roosevelt et son entourage étaient conscients des risques de guerre provoqués par la politique de soutien au Royaume-Uni, à l'URSS et à la Chine, il n'y a pas d'indication qu'il ait souhaité l'attaque de Pearl Harbor. Le désastre fut provoqué par la préparation minutieuse des Japonais, par une série de négligences locales et par des circonstances particulièrement défavorables aux Américains.

Liens
http://youtu.be/pHBc4casyyo Pearl Harbour extrait de film en Français
http://youtu.be/Ni_C4Ui06ck La bataille de Pearl Harbour et la chute de Singapour ( en anglais)
http://www.ina.fr/video/AFE85000888/a ... aux-iles-hawai-video.html L'attaque jamponaise
http://www.ina.fr/video/AFE86001080/i ... que-en-flammes-video.html Le pacifique en feu
http://www.ina.fr/video/CPF91008495/l ... -partie-banzai-video.html La bataille du Pacifique


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William Bligh
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Le 7 décembre 1817 meurt William Bligh

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à 63 ans, à Londres, né le 9 septembre 1754, administrateur colonial britannique et un officier de la Royal Navy.Il était marié avec Elizabeth Betham.
Il est surtout connu pour la mutinerie qu'il subit alors qu'il commandait la Bounty, en avril 1789. Après celle-ci, nommé gouverneur de Nouvelle-Galles du Sud, son administration est encore à l'origine d'une insurrection, la Révolte du rhum, dirigée par John MacArthur en 1808.
Il fera toutefois une carrière honorable dans la Royal Navy, ayant commencé comme mousse à sept ans et terminant Vice-amiral.

En bref

La Bounty, vaisseau britannique commandé par un ancien officier de Cook, le lieutenant William Bligh, était venue chercher à Tahiti en 1789 des plants d'arbre à pain pour les colonies anglaises des Antilles. Le 29 avril, une mutinerie éclata à bord. Les causes en ont été discutées : il est possible que l'autorité de Bligh, exercée sévèrement, ait été contestée par certains de ses officiers. L'un deux, Fletcher Christian, suivi de quelques autres, se débarrassa de Bligh et de dix-huit de ses hommes en les abandonnant en pleine mer à bord d'une chaloupe. Après une traversée de plus de 5 000 kilomètres, la chaloupe réussit à gagner l'île de Timor le 12 juin, tandis que Fletcher Christian ramenait la Bounty à Tahiti, espérant s'y établir avec les mutins.
Le projet échoua en partie puisque seulement seize mutins restèrent à Tahiti ; les autres, au nombre de vingt-sept Européens et dix-huit Tahitiens et Tahitiennes, Fletcher en tête, durent repartir pour atteindre une île, inconnue des cartes maritimes de l'époque, celle de Pitcairn, dans laquelle ils établirent une colonie. En 1791, Bligh ayant survécu, la frégate Pandora commandée par le capitaine Edward est envoyée dans les mers du Sud à la recherche des mutins.
Ceux qui étaient restés à Tahiti, vivant dans l'entourage du roi Pomaré Ier, sont livrés par celui-ci. Le retour en Angleterre est mouvementé et la Pandora fait naufrage près de l'Australie. Parmi les survivants, arrivés en Angleterre et traduits en justice, cinq seront acquittés, deux bénéficieront des circonstances atténuantes, et les trois derniers seront pendus. Quant à Fletcher Christian et à ses compagnons, ils s'entretuèrent et il ne resta qu'un survivant mâle, Alexander Smith, sur l'île de Pitcairn. La colonie demeura dans l'île jusqu'en 1831, date à laquelle elle fut ramenée à Tahiti.
Un des officiers de la Bounty a écrit un Journal qui, le premier, a fourni une documentation précieuse sur la société et l'histoire de l'île de Tahiti Société des océanistes, Paris, 1966. Mark Twain a repris le thème de cette mutinerie dans l'une de ses nouvelles.

Sa vie

William Bligh naît à Tinten Manor, dans le village de St Tudy en Cornouailles. Il est le fils unique de Francis Bligh décédé le 27 décembre 1780 et de Jane Pearce elle meurt lorsque William a quatorze ans, une veuve dont le nom de jeune fille était Balsam.
William a son premier contact avec la mer en 1762, à l'âge de sept ans. Il embarque comme serviteur personnel du capitaine du HMS Monmouth.
En 1770, il s'engage dans la Royal Navy sur le HMS Hunter et devient midship, l'équivalent d'aspirant l'année suivante en 1771, il sert ensuite sur le HMS Crescent et le HMS Ranger.
Très tôt, il est remarqué pour son intelligence et ses dons en sciences et en mathématiques, ainsi que pour son talent pour le dessin et l'écriture.
Il embarque avec James Cook sur le Resolution comme maître d'équipage.
Ce voyage est marqué par la fin tragique de James Cook le 14 février 1779 aux îles Hawaï. Durant cette période, Bligh a observé les méthodes de Cook pour maintenir son équipage en bonne santé, notamment l’usage des agrumes contre le scorbut et l’exercice physique quotidien de l’équipage par de la danse sur le pont avec un musicien. Il reprendra tout cela à son compte, mais il ne sera pas compris par ses hommes sur la Bounty.
Le 14 février 1781, profitant d’une période d'inactivité de douze mois, il épouse Elizabeth Betham, la fille d’un contrôleur des douanes dans l’église paroissiale d’Onchan, sur l’Île de Man. Il est déjà lieutenant de vaisseau, et il a effectué d’importants travaux hydrographiques pour la Navy. Peu de temps après son mariage, il réintègre le service et prend part à la bataille de Dogger Bank le 5 août 1781 et combat aussi aux côtés de Lord Howe à Gibraltar en 1782.

Mutinerie de la Bounty.

Le 16 août 1787, il prend le commandement du HMAV Bounty, à l’âge de trente-trois ans. Il appareille le 23 décembre 1787 du port de Spithead, laissant derrière lui sa femme et leurs deux filles.
La suite est bien connue : Bligh tente de rallier Tahiti, but de sa mission. Il doit y embarquer des plants d’arbre à pain pour nourrir les esclaves des plantations des Antilles en passant par l’ouest. Pendant un mois, l'équipage tente en vain de franchir le cap Horn pour finalement rebrousser chemin et prendre la route du Cap de Bonne-Espérance où il fait escale. Après une deuxième escale à Adventure Bay en Tasmanie, l'expédition relâche à Tahiti le 26 octobre 1788. Ce contre-temps fait arriver la Bounty à la mauvaise saison pour récolter les arbres à pain, et Bligh doit patienter six mois pour embarquer sa précieuse cargaison. Pendant ce laps de temps la discipline se relâche, d’autant que l’accueil de la population est plus qu’amical. Finalement la Bounty appareille le 4 avril 1789 et fait route à l’ouest, prenant le même chemin qu’à l’aller.
Le 27 avril Bligh annonce à son équipage son intention de faire route à l’est en passant par le cap Horn et de faire ainsi le tour du globe. Cette idée n’enchante guère l’équipage, l'échec du passage du cap Horn étant encore dans toutes les mémoires. Profitant du mécontentement d’une partie de l’équipage, le lieutenant Fletcher Christian prend la tête d’une mutinerie et s’empare du navire dans la nuit du 28 au 29 avril. Il décide d’abandonner Bligh et une partie de ceux qui lui sont fidèles 18 personnes dans une chaloupe...
Il faut noter que la chaloupe ne pouvait pas accueillir plus de 19 personnes en tout, on peut supposer que parmi les personnes restées à bord du navire certaines ne faisaient pas partie du groupe des mutins, elles y prirent part malgré elles.
C’est ici que commence l’exploit maritime, Bligh ne trace pas la route la plus facile pour atteindre un port espagnol d'où lui et ses hommes pourront être rapatriés, avec une attente probable, vers la Grande-Bretagne. Au lieu de cela, confiant dans ses dons de navigateur et considérant qu'il est de sa mission d'informer au plus vite l'Amirauté de la mutinerie, de façon à faire poursuivre les mutins, il prend la direction de Timor, ce qui implique une navigation de 3 618 milles marins soit 6 701 km. Bligh, sur une chaloupe non pontée d'à peine sept mètres de long, surchargée de dix-neuf hommes, sans carte ni boussole et avec à peine une semaine de vivres au départ, va naviguer de mémoire au travers du Pacifique, de la Grande barrière de corail pour arriver quarante et un jours plus tard à Kupang, dans l'île alors sous la souveraineté hollandaise. Il aura parcouru tout ce périple en bravant les tempêtes et les peuplades hostiles, ainsi que le début d’une nouvelle mutinerie, tant les conditions de survie sont dures, ne perdant qu’un seul homme, le premier maître Norton sur l’île de Tofoa. Un tel exploit ne peut être que le fait d’un marin exceptionnel.
Bligh, de retour en Grande-Bretagne, passe en cour martiale devant l’Amirauté qui l'acquitte le 15 mars 1790 pour la perte du HMAV Bounty et même le félicite pour son exploit dans la chaloupe.
À ce jour, les raisons de la mutinerie sont toujours discutées. Pour certains, c'est la tyrannie de Bligh qui força l'équipage à s'emparer du navire. D'autres pensent que l'équipage, ayant goûté à la vie facile de son escale tahitienne, ne pouvait se résoudre à se plier de nouveau à la discipline de bord, très dure à cette époque, et qu'en s'emparant du navire, il pouvait espérer retourner sur l'île pour y poursuivre une vie de confort et de plaisirs.

Suite de sa carrière

Bligh se voit confier le commandement de la HMS Falcon, puis il embarque sur la HMS Medea. En 1792, il commande la HMS Providence et se voit désigné pour recommencer la même mission qu’avec la Bounty. Il réussit sa mission avec succès cette fois-ci, en fait les esclaves des Antilles ne voudront jamais manger des fruits de l’arbre à pain, mais Bligh n’y est pour rien. Au cours de cette dernière mission, Bligh a pu aussi introduire le aki dans les Caraïbes, mais on n'a pas de certitudes sur ce fait ; néanmoins, cette plante a été nommée d'après lui, dans la classification, sous la forme Blighia sapida.
En 1797 Bligh est commandant du HMS Director. Comme beaucoup de commandants, Bligh eut à subir la mutinerie du Nore en avril 1797.
Il fut simplement déposé à terre par l'équipage de son navire au mouillage du Nore situé dans l'estuaire de la Tamise face à la mer du Nord. À l'issue de la mutinerie, Bligh toujours sur le HMS Director participe le 11 octobre 1797 à la bataille de Camperdown, il engage trois vaisseaux hollandais — le Haarlem, le Alkmaar et le Vrijheid. Alors qu'il inflige de lourdes pertes aux vaisseaux ennemis, seuls sept de ses hommes seront blessés durant le combat.
Il reçoit la reddition du Haarlem.
Au XIXe siècle, Dublin était considérée comme la deuxième ville des îles Britanniques, les bateaux y affluaient, mais le risque de s’ensabler dans la baie et le port trop étroit empêchaient le développement économique de la ville. Bligh suggère dans une étude faite en 1801 la construction d’un mur-digue parallèle à celui existant sur la rive sud de l’embouchure de la rivière Liffey. En canalisant le courant les deux digues doivent se resserrer vers la sortie du port la force de la rivière sera augmentée et elle creusera plus profond le lit de la baie, facilitant l’entrée des gros bâtiments qui seront ensuite à l’abri des digues par mauvais temps. La construction du North Bull Wall s’est déroulée de 1819 à 1824 pour une longueur de 1,7 km.
Au fil du temps et des marées, le sable s’est accumulé le long du mur pour former aujourd’hui des dunes de 6 mètres de haut qui ne cesse de croître en direction de la mer, refuge artificiel des oiseaux et des phoques.
Puis le 2 avril 1801, c'est en tant que commandant du HMS Glatton qu'il prend part à la bataille de Copenhague sous les ordres de l'amiral Nelson. Ce dernier le félicite pour sa bravoure lors du combat. C'est aussi cette année qu'il est élu membre de la Royal Society, elle l'avait déjà recommandé pour la mission du Bounty en considération de ses services tant en navigation qu’en botanique.
1805 le voit nommé comme gouverneur de la toute jeune colonie de Nouvelle-Galles du Sud. Encore une fois, son administration rigide mais surtout la corruption des militaires du 102e régiment d’infanterie de la garnison seront à l'origine d'une insurrection, la Révolte du rhum dirigée par John MacArthur, un marchand de laine, à Sydney en 1808. Il est déposé de son poste par le Major George Johnston et emprisonné durant deux années. C’est son remplaçant, envoyé pour remettre de l’ordre avec un nouveau régiment, qui le délivre.
À son retour, la Cour le lave de toute responsabilité et fait enfermer Johnston à l’hôpital de Chelsea.
Bligh est ensuite promu Contre-amiral de la Flotte bleue en 1810 puis finit Vice-amiral en 1814.
Il passe les dernières années de sa vie dans son manoir de Farningham, dans le Kent, mais c'est à Londres, dans Bond Street qu'il meurt le 7 décembre 1817 à l’âge de 63 ans.
Il est enterré dans la partie est du cimetière de l’église de Lambeth, où il repose à côté de son épouse qui lui a donné six filles.
Sa tombe est surmontée d'une sculpture d'un fruit de l'arbre à pain.
Dans les années 1980, un de ses lointains descendants qui vivait en Australie tenta de rééditer l'exploit de la traversée en chaloupe faite depuis la Bounty avec une équipe de sportifs et de scientifiques, mais ils durent arrêter en cours de route leur challenge devant la difficulté et la mésentente.
Le cinéma au travers de trois films a donné l'image d'un William Bligh, capitaine tyrannique qui malmène l'équipage de son navire, la Bounty, face à l'un de ses officiers, Fletcher Christian, défenseur des opprimés. Il est probable que Bligh n'ait pas été plus cruel que les autres commandants britanniques de son époque. Il a été, sans aucun doute, un marin hors pair ; sa navigation après la mutinerie de la Bounty, aussi bien que son comportement lors des batailles navales, en sont les preuves incontestables.
Ces qualités lui furent d'ailleurs reconnues par ses supérieurs, puisqu'il fit une carrière honorable dans la Royal Navy, ayant commencé mousse à sept ans et terminant Vice-amiral.

Carrière militaire

Dates Grade et navire ou fonction
1er juillet 1762 engagement comme mousse et serviteur du commandant sur le HMS Monmouth
27 juillet 1770 Matelot breveté sur le HMS Hunter.
5 février 1771 Aspirant sur le HMS Hunter.
22 septembre 1771 Aspirant sur le HMS Hunter.
2 septembre 1774 Matelot breveté sur le HMS Ranger.
30 septembre 1775 Second maître HMS Ranger.
20 mars 1776 Maître d'équipage sur le HMS Resolution dernière expédition de James Cook.
14 février 1781 Maître d'équipage sur le HMS Belle Poule.
5 octobre 1781 Lieutenant sur le HMS Berwick.
1er janvier 1782 Lieutenant sur le HMS Princess Amélia.
20 mars 1782 Lieutenant HMS Cambridge.
14 janvier 1783 Bligh rejoint la marine marchande comme Lieutenant.
1785 Commandant en tant que Lieutenant du navire marchand Lynx.
1786 Lieutenant sur le navire marchand Brittania.
1787 Bligh retourne au service actif de la Royal Navy.
16 août 1787 promu en tant que Lieutenant comme commandant du HMAV Bounty.
14 novembre 1790 promu Capitaine de vaisseau, commandant du HMS Falcon.
15 décembre 1790 Capitaine de vaisseau HMS Medea.
16 avril 1791 Capitaine de vaisseau HMS Providence.
30 avril 1795 Capitaine de vaisseau HMS Calcutta.
7 janvier 1796 Capitaine de vaisseau HMS Director.
18 mars 1801 Capitaine de vaisseau HMS Glatton.
12 avril 1801 Capitaine de vaisseau HMS Monarch.
8 mai 1801 Capitaine de vaisseau HMS Irresistible.
2 mai 1804 Capitaine de vaisseau HMS Warrior.
14 mai 1805 Gouverneur de Nouvelle-Galles du Sud Australie.
27 septembre 1805 Capitaine de vaisseau HMS Porpoise.
31 juillet 1808 promu Commodore, HMS Porpoise.
3 avril 1810 Commodore HMS Hindostan.
31 juillet 1810 nommé Contre-amiral de la flotte Bleue Rear Admiral of the Blue.
4 juin 1814 nommé Vice-amiral de la flotte Bleue Vice Admiral of the Blue.

Liens

http://www.ina.fr/video/CPB78051961/l ... ltes-du-bounty-video.html Les révoltés de la Bounty
http://youtu.be/_hmhY7ETetk Les révoltés de la bounty (anglais)
http://youtu.be/MXHp0WATp8k Les révoltés sur Pitcairn
http://youtu.be/BPrWYgcl9AQ Révoltés du Bounty


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Posté le : 06/12/2014 17:45
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Jean Mermoz 1
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Le 7 décembre 1936, à 34 ans, disparaît Jean mermoz
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dans l'Atlantique sud, né le 9 décembre 1901à Aubenton dans l'aisne, aviateur français, figure légendaire de l'Aéropostale, surnommé l"Archange .Il est aussi un des fondateurs en 1936 du Parti social français PSF avec le colonel de La Rocque.
Après avoir appartenu, de 1920 à 1924, à l'armée de l'air, il entra chez Latécoère et devint l'un des pilotes de l'Aéropostale, s'illustrant notamment par l'établissement de la ligne Buenos Aires-Rio de Janeiro 1928 et le franchissement de la cordillère des Andes (1929). Le 12 mai 1930, il réussit la traversée de l'Atlantique sud sans escale, dans le sens est-ouest, puis, le 15 mai 1933, la traversée en sens inverse, de Natal à Saint-Louis du Sénégal. Il disparut en mer, au large de Dakar, à bord de l'hydravion Croix-du-Sud.
Le 7 décembre 1936 disparaissait dans l'Atlantique Sud le Latécoère "Croix du Sud" avec à son bord Jean Mermoz et son équipage, Cruveilher, Ezan, Lavidalie et Pichodou. La stature et la réputation d'invulnérabilité de ce géant de l'aviation qu'était Mermoz étaient telles que sa disparition semblait impossible. Longtemps, Saint-Exupéry, et avec lui une foule de gamins, attendront une nouvelle résurrection du "Grand".

Sa vie

Il est le fils de Jules Mermoz, maître d'hôtel, et de Gabrielle Gillet dite Mangaby -1880-1955, chevalier de la Légion d'honneur en 1952. Le couple se sépare dès 1902 et divorcera en 1922. Mermoz passe une partie de son enfance chez son grand-père à Mainbressy, village situé au sud d'Aubenton avant d'intégrer l'École supérieure professionnelle d'Hirson en tant que pensionnaire, puis le lycée d'Aurillac. En 1917 sa mère l'amène à Paris où il est admis au lycée Voltaire avec une bourse de demi-pensionnaire.
En 1930, Jean Mermoz épouse Gilberte Chazottes, qui, veuve, se remariera avec l'ingénieur René Couzinet. Gilberte Chazottes et René Couzinet se suicideront le 16 décembre 1956.

Engagement dans l'armée

En avril 1920, Jean Mermoz signe un engagement dans l'armée pour quatre ans ; il choisit l'aviation sur les conseils de Max Delty, un chanteur d'opérette. Après un passage à la 7e escadrille du 11e régiment de bombardement de Metz-Frescaty, il a l'occasion de quitter les casernes et de partir en Syrie en 1922 : il y réalise six cents heures de vol en dix-huit mois et découvre le désert, notamment lors d'un atterrissage forcé. Cependant, il doit revenir en France au 1er régiment de Chasse à Thionville-Basse-Yutz . Son dégoût pour la chose militaire se renforce. Il est démobilisé en mars 1924. C'est alors que Mermoz connaît l'une des périodes les plus noires de son existence. Ne trouvant pas d'emploi auprès des compagnies aériennes, il connaît la misère et doit vivre de petits emplois. Enfin, il reçoit le 28 septembre 1924 une proposition de contrat des Lignes aériennes Latécoère, dirigées par Didier Daurat.

L'épopée de l'aviation postale Le désert

Mermoz commence comme mécano. Mais il est rapidement affecté en qualité de pilote sur la ligne Toulouse-Barcelone, sur Breguet XIV. La ligne franchissant les Pyrénées est un défi pour les avions de l'époque. En 1925, Mermoz assure la liaison Barcelone-Malaga et, en 1926, prend en charge le courrier sur la liaison Casablanca-Dakar. En mai 1926, perdu au milieu du désert avec son mécano, il est capturé par les Maures, puis est libéré contre rançon. En novembre, il sauve Éloi Ville, contraint à atterrir dans le désert.
Les 10 et 11 octobre 1927, Mermoz et Négrin réussissent un vol sans escale de Toulouse à Saint-Louis du Sénégal à bord d'un Laté 26. Cependant, à la suite d'un incident à l'atterrissage, sans dommage pour l'équipage, la traversée de l'Atlantique Sud est reportée.

L'Amérique du Sud et la cordillère des Andes

En 1927, Marcel Bouilloux-Lafont, président et fondateur de la Compagnie générale aéropostale qui prend la suite des Lignes aériennes Latécoère envoie Mermoz à Rio de Janeiro afin de développer de nouvelles liaisons en Amérique du Sud. Pour cela, il faut franchir un obstacle majeur : la cordillère des Andes. Au cours d'une tentative de franchissement, Mermoz doit se résoudre à un atterrissage en montagne, puis parvient à redécoller acrobatiquement en lançant son avion dans un précipice et à rebondir à trois reprises sur des crêtes en deçà, parvenant ainsi à prendre de la vitesse en piquant. Le 15 juillet 1929, il ouvre la ligne des Andes avec Henri Guillaumet.
En mai 1930, avec le radiotélégraphiste Léopold Gimié et le navigateur Jean Dabry, il réalise sur avion Latécoère, la première liaison entièrement aérienne entre la France, Dakar et l'Amérique du Sud. Il établit plusieurs lignes régulières.

La traversée de l'Atlantique Sud

Les 12 et 13 mai 1930, il relie d'un trait Saint-Louis à Natal au terme d'un vol de 21 heures et 10 minutes sur un hydravion Laté 28-3 baptisé le Comte de la Vaulx, du nom du président de la Fédération aéronautique internationale FAI qui venait de disparaître tragiquement dans un accident d'avion. Mermoz prouve ainsi que le courrier peut être transporté d'un continent à l'autre avec le même appareil alors que, avant cet exploit, il fallait en utiliser plusieurs.
Moins de trois ans plus tard, parti le 12 janvier 1933 de l'aérodrome de Paris-Le Bourget, Mermoz atterrit à Buenos Aires le 22 à bord du Couzinet 70 Arc en Ciel.
Entre 1930 et 1936, Mermoz aura effectué vingt-quatre traversées de l'Atlantique Sud.
L'avion qu'il pilote, la Croix-du-Sud, un Latécoère 300, disparaît en mer le 7 décembre 1936 avec à son bord Alexandre Pichodou, copilote, Henri Ézan, navigateur, Edgar Cruvelhier, radio, et Jean Lavidalie, mécanicien. À 10 h 43, Edgar Cruvelhier lance le dernier message radio depuis la Croix-du-Sud : Avons coupé moteur arrière droit, sans détail supplémentaire, et complète en répétant les coordonnées de position : 11°08 Nord, 22°40 Ouest.
Malgré de nombreuses recherches, on ne retrouva aucune trace de l'appareil ni de son équipage.

La politique

Déçu par le manque de volonté politique des gouvernements qui se succèdent en France, Mermoz tente de sauver la ligne postale aérienne France-Amérique du Sud menacée par l'Allemagne et les États-Unis en usant d'un porte-voix politique. Il rejoint alors le mouvement nationaliste Croix-de-feu en adhérant à l'association des Volontaires nationaux. Les Croix-de-Feu, en effet, ne regroupent dans leurs rangs que des anciens combattants décorés de la Croix de guerre, ce qui n'est pas le cas de Mermoz, né en 1901. Pendant cette période, il imagine et prône une aviation où la jeunesse française pourra accéder à des valeurs sociales exemptes d'intérêts politiques partisans.
Améliorez sa qualité à l'aide des conseils sur les sources !
Il enseigne notamment les bases de l'aéronautique à des jeunes issus de milieux modestes à l'Association philotechnique de Colombes, près de Paris. Son idée sera reprise plus tard par les créateurs de l'aviation populaire. Après la dissolution des ligues par le Front populaire, Mermoz deviendra vice-président du Parti social français PSF, fondé par François de La Rocque, dernier président des Croix-de-Feu.

Hommages France

Jean Mermoz est fait commandeur de la Légion d'honneur le 4 août 1934.
En 1934, Il est lauréat du Prix Henri Deutsch de la Meurthe de l'Académie des sports, qui récompense un fait sportif pouvant entraîner un progrès matériel, scientifique ou moral pour l’humanité.
En 1937, trois timbres postaux, un vert-gris, un vert-jaune valant tous deux 30 ct et un lilas valant 3 francs sont émis.
En 1998, l'équipage du Catalina périple de Mermoz et du Courrier du Sud, composé de Patrick Baudry, Franklin Devaux et Patrick Fourticq, s'est vu décerner le Prix André de Saint-Sauveur de l'Académie des sports pour son exploit commémoratif.
Les pilotes d'Air France ont longtemps porté la cravate noire, mais depuis peu peuvent opter pour du bleu marine, pour rappeler le deuil de Mermoz et de Guynemer pour les militaires.
Parmi toutes les manifestations qui ont salué en France le cinquantenaire de la disparition de Jean Mermoz, deux initiatives laisseront une trace plus durable : une plaque à l'effigie du pilote est dévoilée, le 4 décembre 1986, sur l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, par Jacques Douffiagues, le ministre chargé des Transports. Quelques jours plus tard, à Aubenton, où est né l' Archange , le maire Christian Pillot et le docteur Alain Schlienger inaugurent un musée Mermoz sur la place du village : À jamais, Aubenton gardera ta mémoire, Aubenton, ô Mermoz ! que tu couvres de Gloire.
Le stade du club de football de l'AS Orly Val-de-Marne porte le nom de Jean-Mermoz.
Les collèges des villes de Laon, Yutz, Marly en Moselle, de Biscarrosse Landes, de Faches-Thumesnil, de Bois-Colombes, de Saint-Laurent-de-la-Salanque Pyrénées-Orientales ainsi que les lycées des villes de Montpellier dans l'Hérault, Saint-Louis dans le Haut-Rhin et Aurillac dans le Cantal ainsi que le lycée de Dun-sur-Meuse Meuse portent le nom de Jean Mermoz.
L'ancien aéroport de Grenoble, dénommé aéroport de Grenoble-Mermoz fermé en 1967

Amérique Latine

Dans les pays latino-américains, la mémoire de Mermoz est vive.
À Buenos Aires, capitale de l'Argentine, une plaque rappelle le lieu où se trouvait le bureau de l'Aéropostale. À l'aéroport, un monument est dédié à Jean Mermoz y sus compañeros. Au lycée franco-argentin qui porte son nom, construit en forme d'avion, les élèves ont dessiné pour le cinquantenaire de sa mort des épisodes de sa vie. Grâce au pont aérien qu'il organisa sur la cordillère des Andes.
Le Chili garde reconnaissance de l'avoir sorti de son isolement. Santiago, la capitale, a baptisé une de ses artères en son honneur. On y trouve une stèle avec cette phrase de Kessel : La route céleste l'attirait comme un aimant.
Une autre stèle lui est dédiée sur l'aéroport de Campos dos Alfonsos aéroport militaire de Rio de Janeiro au Brésil.

Sénégal

À Dakar, on trouve plusieurs lieux qui rappellent son passage :
– un hôtel sur l'avenue Albert-Sarraut porte le nom de son avion, la Croix du Sud ;
– l'un des plus prestigieux quartiers situé à 4 km du centre-ville porte son nom; ce quartier est au bord de l'ancienne piste d'atterrissage de la base française ;
– le lycée français de Dakar porte son nom.

Mes vols par Jean Mermoz

Œuvres et citations Citations de Mermoz
L'accident, pour nous, ce serait de mourir dans un lit.
Ce sont les échecs bien supportés qui donnent le droit de réussir.
La vie moderne autorise les voyages, mais ne procure pas d’aventure
Tu sais, je voudrais ne jamais descendre.


Récit de Philippe Ballarini " Avons coupé moteur arrière droit "


Né en 1901, le jeune garçon timide qui se passionnait pour la poésie devint rapidement une sorte de géant à l'épaisse chevelure dont la carrure athlétique fera tourner la tête à nombre de femmes de par le monde. Rien ne semblait pourtant destiner cet adolescent sensible qui se vouait à la sculpture ou au journalisme à une glorieuse carrière d'aviateur. Une enfance austère, une adolescence bousculée par la Grande Guerre, il terminait ses études en 1919 en échouant à l'oral du baccalauréat : Jean ne réalisera pas le rêve de sa mère tant aimée, "Mangaby" Gabrielle, qui rêvait pour lui d'une préparation à l'École Centrale.
Alors qu'il allait s'engager dans l'Armée, c'est sur les conseils d'un chanteur d'opérettes, Max Delby, qu'il opta pour l'aviation, signant en avril 1920 un engagement de quatre ans. Après ses classes, il fut envoyé comme élève pilote à la base d'Istres. Pilote-né, Jean Mermoz ne l'était sans doute pas, puisqu'il échoua à deux reprises à son brevet de pilote avant de le décrocher le 2 février 1921.
Après sa formation, le caporal Jean Mermoz dut rejoindre la 7éme escadrille du 11ème régiment de bombardement de Metz-Frescaty il s'y ennuya ferme avant de partir l'année suivante, en 1922, pour la Syrie où il connut ses premiers contacts avec le désert : après un atterrissage forcé, il mit quatre jours de marche dans la montagne et le désert avant de rejoindre sa base. En mars 1923, il lui fallut s'arracher aux délices du Levant. C'en fut fini des nuits de Beyrouth et de la liberté de Palmyre. Après un voyage de retour où se manifesta le paludisme qu'il avait contracté au Moyen-Orient, il dut se résoudre au retour à la vie de caserne au 1er Régiment de Chasse à Thionville. Mermoz, qui n'avait guère de goût pour l'armée, se mit à la détester.
C'est un pilote aguerri qui, en mars 1924, fut démobilisé… et se retrouva sans emploi. Sans doute l'aviation était-elle en plein essor, mais elle ne manquait pas de pilotes démobilisés. Aussi c'est sans succès qu'il frappa à la porte de compagnies d'aviation ou de constructeurs, traversant une période très dure, où il fut réduit à la soupe populaire et aux asiles de nuit sordides.
C'était l'époque où, à Toulouse, Latécoère lançait l'extraordinaire aventure de sa ligne. Son génie avait consisté à s'entourer des meilleurs pilotes de la dernière guerre à peine éteinte, sans distinction de camp, comme l'ex commandant de la célèbre escadrille des Cigognes, Dombray, ou Doerflinger, qui avait été son adversaire... Et c'est à l'intraitable Didier Daurat que Latécoère avait confié l'exploitation de la "Ligne".
Mermoz, ayant entendu dire que Latécoère embauchait, se rendit donc à Toulouse et se présenta à Didier Daurat. Lorsque ce dernier lui indiqua un appareil sur la piste et lui demanda de faire un petit vol d'essai, Mermoz fut enchanté: cette fois était la bonne! Avec ses 600 heures de vol, et sa maîtrise du pilotage, il était certain d'être engagé. Il effectua une démonstration de ses talents, enchaînant des figures aériennes avant de se poser, radieux. Il dut vite déchanter. Daurat n'était même plus sur la piste: il avait simplement regagné son bureau.
C'est un Mermoz désappointé qui alla le rejoindre. Daurat fut net: ici, on avait besoin de pilotes, pas d'acrobates! Mermoz, dépité, allait franchir le seuil du bureau quand Daurat le rappela: il allait commencer comme mécano, après, on verrait bien! L'homme de fer de Latécoère avait jaugé son homme: certainement un très bon pilote, mais à qui il appliquerait, comme aux autres, la rigueur qui était de règle chez Latécoère. Mermoz l'acrobate aurait tout le temps de le faire lorsqu'il sera pris dans une tourmente au-dessus des Pyrénées. L'histoire d'amour qui se tissera entre la "Ligne" et Mermoz était née dans le coup de gueule de Daurat. C'est dans cette entreprise folle qu'était la "Ligne" que Mermoz deviendra Mermoz, le "Grand", comme l'appellera Saint-Exupéry.
Daurat ne le laissera guère moisir dans les ateliers: il l'affectera bien vite à la ligne Toulouse-Barcelone, vraisemblablement soucieux de ne pas laisser filer un bon pilote. Si de nos jours, un tel trajet semble anodin, voire banal, il suffit de jeter un œil sur ce qu'étaient les machines de l'époque. Le Breguet XIV utilisé pour cette liaison était certes une excellente machine, l'un des artisans méconnus de la victoire de 1918, mais passer les Pyrénées par tous les temps avec un tel engin n'était pas une sinécure.
La "Ligne" Latécoère, qui joignit d'abord Toulouse à l'Espagne, s'étirait de plus en plus loin. Le saut de puce qui avait porté ses couleurs à Barcelone, dès la fin de la Grande Guerre, s'était mué en long périple qui, après Alicante, atteignant le Maroc où Latécoère avait livré le journal de la veille à l'emblématique Lyautey, sans oublier un bouquet de violettes de Toulouse pour Madame la Maréchale. Puis ce fut le dangereux survol du désert mauritanien pour joindre les étapes de Cap-Juby, Villa Cisneros, Port Etienne et enfin Saint-Louis du Sénégal et Dakar.
Comme ses autres compagnons, Mermoz survolera régulièrement la partie du Sahara qui longe l'Atlantique, lieu de tous les dangers. Une panne de moteur, par ailleurs assez fréquente, et c'était la catastrophe. Les options étaient aussi nombreuses que peu réjouissantes: la noyade dans l'Atlantique, l'écrasement au sol, la soif et la mort par petit feu sous le soleil africain, à moins que les bandes de bandits qui hantaient la région n'égorgent proprement le pilote perdu dans le désert. Mermoz aura plus de chance que certains de ses compagnons: en mai 1926, à la suite d'une panne, il fut capturé par les Maures et libéré contre rançon.
La "Ligne" ne fut pas qu'une aventure extraordinaire, ce fut le lieu d'une mystique où la carte postale expédiée de Toulouse à un fiancé en poste au Sénégal valait la vie d'un pilote. Outre un gouffre financier, ce fut le tombeau d'un grand nombre de navigants: entre 1920 et 1923, un de chez Latécoère disparaissait chaque mois.
Pour mettre fin à cette hécatombe, Latécoère se lança en 1927 dans la construction d'appareils plus performants, destinés à remplacer les bons vieux Breguet XIV. Ce fut la naissance des Laté 25 et Laté 26 qui donnaient aux pilotes davantage de chances de parvenir sains et saufs à destination. Si le trajet Casablanca-Dakar, sur lequel était affecté Mermoz n'était pas encore de la routine, au moins ne relevait-il plus du déraisonnable.
Acheminer la poste jusqu'à Dakar, c'est bien, mais il fallait aller plus loin. De l'autre côté de l'Atlantique Sud, d'autres pilotes et mécaniciens talentueux, comme Vachet, Hamm et Lafay, avaient défriché les lignes d'Amérique du Sud, de Natal à l'extrême ouest du Brésil à Rio de Janeiro, Montevideo et Rio de Janeiro avant de se lancer à l'assaut de la cordillère des Andes pour atteindre la côte de l'Océan Pacifique à Santiago du Chili.
L'objectif était de joindre Toulouse à Santiago dans des délais de plus en plus courts. L'acheminement du courrier entre Saint-Louis du Sénégal et Natal s'effectuait par voie maritime à bord d'un aviso. Il devenait urgent que la "Ligne", devenue en 1927 l'Aéropostale lorsque Latécoère céda ses parts au dynamique industriel Bouilloux-Lafont, mette en place une liaison entièrement aérienne entre l'Europe, l'Afrique et l'Amérique du Sud. La concurrence allemande se faisait jour sous la forme d'une liaison alliant sur l'Atlantique Sud hydravion et bateau, qu'allaient bientôt remplacer les "Zeppelin". En attendant un appareil capable vaincre l'Atlantique Sud de façon régulière, Mermoz travailla à la mise en place des vols de nuit, établissant une liaison nocturne entre Rio de Janeiro et Buenos Aires les 16 et 17 avril 1928.
C'est l'année suivante, en mars 1929, qu'avec Collenot, il se lança dans une nouvelle tentative d'établir une route par-dessus les Andes. Rabattus contre la montagne par des vents violents, les deux hommes mirent quatre jours à rafistoler leur appareil dans des conditions épouvantables, avant de s'envoler à nouveau dans des conditions relevant de l'acrobatie et de gagner Santiago du Chili.
Il devint évident en 1930 à Marcel Bouilloux-Lafont que la mise en place d'une liaison exclusivement aérienne relevait de l'urgence. C'est ainsi que le 12 mai 1930, Mermoz, accompagné du navigateur Jean Dabry et du radio Léopold Gimié, embarqua à bord du Laté 28, un monomoteur à flotteurs baptisé "Comte de la Vaulx", pour joindre Natal, assurant ainsi la première liaison aérienne postale sur l'Atlantique Sud, après un trajet de vingt et une heures.
La liaison postale aérienne reliant la France à l'Amérique du Sud via les côtes africaines était née, l'Aéropostale, quant à elle, vivait ses dernières heures. Si la crise économique de 1929 et la révolution brésilienne n'avaient pas suffi à briser l'élan de l'énergique Bouilloux-Lafont, le lâchage sordide dont il fut la victime sonnèrent le glas de sa prestigieuse entreprise dont il dut déposer le bilan en 1931.
Au début des années trente, Mermoz fit la connaissance d'un constructeur aux idées de génie, René Couzinet, qui lui confiera l'un des appareils les plus élégants de l'histoire de l'aviation, l'Arc en Ciel. A bord de ce trimoteur racé et efficace, il effectua en janvier 1933 une liaison spectaculaire entre Paris et Buenos-Aires, accompagné comme à l'accoutumée d'un équipage éprouvé. Il effectua plusieurs rotations avec l'"Arc en Ciel". C'est l'année suivante qu'il ouvrira la liaison régulière entre la France et l'Amérique du Sud.
Entre temps, on a préféré au Couzinet "Arc en Ciel" les nouveaux hydravions à coque de Latécoère, la série des Laté 300. C'est à bord de l'un d'entre eux, le Laté 300 "Croix du Sud", que Mermoz effectua 24 traversées entre 1934 et 1936.
Air France était née le 30 août 1933: on nomma en 1935 Jean Mermoz Inspecteur Général. Il avait été fait commandeur de la Légion d'Honneur en 1934 et, l'été 1935, s'était lancé dans des liaisons rapides entre la France et l'Afrique du Nord à bord d'un De Havilland DH 88 "Comet", un petit bimoteur exceptionnel.
Le 7 décembre 1936, pour sa 25e traversée sur "La Croix du Sud", l'hydravion quadrimoteur effectuait un faux départ en raison d'une fuite d'huile. Après réparation, l'appareil décollait, emportant vers leur destinée son équipage. Quelques heures après, ce fut le dernier message:
« Avons coupé moteur arrière droit. »
On peut raisonnablement penser aujourd'hui à une rupture de l'arbre d'hélice de ce moteur arrière droit qui avait donné du souci au décollage. Cette hélice, se détachant, aurait-elle percuté et profondément cisaillé, voire coupé le fuselage au moment même où Edgar Cruveilher lançait son dernier message ? Nul ne peut confirmer ou infirmer cette hypothèse plausible avec certitude.
Jean Mermoz, une sorte d'idole de son époque, avait disparu, après 8200 heures de vol. Ironie du sort, celui qui avait tant prêché avec son ami René Couzinet la cause de l'avion "terrestre" rapide, avait péri avec son équipage dans un hydravion à coque. Sa droiture, son courage et son intégrité en avaient fait un meneur respecté. Respecté, mais dérangeant. Son refus de voir immoler l'Aéropostale et son soutien à Marcel Bouilloux-Lafont, celui qu'il apporta à René Couzinet et à ses avions terrestres alors qu'un puissant courant se manifestait en faveur de l'hydravion, l'avaient amené à une opposition manifeste au Ministère de l'Air. Quand bien même Mermoz, vraisemblablement profondément déçu par les manœuvres économico-politiques qui sonnaient le glas de l'Aéropostale, et ultérieurement de René Couzinet, n'avait pas caché ses sympathies pour les "Croix de feu" du colonel Delarocque, il reçut un vibrant hommage du Ministre le l'Air socialiste Pierre Cot, le 30 décembre 1936 aux Invalides et fut cité à l'Ordre de la Nation.
Cette fois, Mermoz, le "Grand", ne ressusciterait pas.

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Posté le : 06/12/2014 17:32
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Jean Mermoz 2 et histoire de l'aviation
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Histoire de l'aviation

L'histoire de l'aviation prend sa source dans le désir immémorial des hommes de s'élever dans les airs ; la légende d'Icare en témoigne. Mais c'est à la Renaissance, avec Léonard de Vinci, que la première étude raisonnée sur le vol humain trouve son expression. On remarque que, si l'art de la navigation a pu se développer empiriquement au cours des siècles et au hasard des rivages, l'histoire de l'aviation est indissolublement liée aux progrès mêmes de la science ; pour imiter ce que les oiseaux font en se jouant, l'homme est obligé d'en appeler aux ressources les plus abstraites de son génie.
Les ascensions réussies de la montgolfière gonflée d'air chaud en 1783 et le développement des ballons à hydrogène auraient retardé la naissance et les progrès de l'aviation si ceux-ci n'avaient dépendu du perfectionnement du moteur à explosion. Il n'en fallut pas moins l'entêtement ou le génie des promoteurs du planeur ou de l'hélice pour triompher de l'idée que, pour évoluer dans l'air, il fallait être plus léger que lui.
Si l'oiseau bat des ailes ou plane, si le ballon ou le dirigeable flotte dans l'air, le planeur ne vole que parce qu'il tombe. Dans sa chute, il acquiert la vitesse qui la retarde. Course de l'air sous l'aile au profil calculé et attraction terrestre sont les composantes de la force qui soulève l'avion vers le ciel. L'hélice en brassant l'air, le réacteur en propulsant l'appareil lui donnent cette vitesse qui l'appuie sur le vent comme sur un solide.
C'est pourquoi on ne parlera ici ni de l'aérostation ou vol des ballons ni de l'astronautique déplacement des astronefs dans le vide.
Entre le premier vol – contesté – de Clément Ader 1890 et le premier vol contrôlé effectué par les frères Wright, il s'est écoulé quatorze ans. Cinq ans plus tard, en 1909, Louis Blériot traverse la Manche, et les chancelleries mesurent les conséquences de l'événement. Deux guerres allaient contribuer aux progrès foudroyants de l'aviation, élément désormais caractéristique de la civilisation mécanique. Seuls les pays disposant d'un haut potentiel industriel sont en mesure aujourd'hui de posséder une aviation.
Louis Blériot 1872-1936, ingénieur français, industriel et pionnier de l'aviation, fut le premier à traverser la Manche, le 25 juillet 1909.

Des origines aux environs de 1900

Avant même de voler, le premier problème qui s'est posé à l'homme désireux d'imiter les oiseaux a été celui de quitter le sol. La légende cède peu à peu la place à l'histoire et, après les livres saints de toutes les religions, dont certains sont de véritables « volières », les textes des chroniqueurs apportent quelque précision sur les « mécanismes ingénieux » capables de faire voler l'homme. Aristote et Galien se penchent sur le problème, Aulu-Gelle décrit la fameuse colombe d'Archytas et les poètes célèbrent le malheureux Icare, tandis que les mathématiciens s'intéressent davantage à son père, l'inventeur Dédale.
Accrochés à des oies, des condamnés à mort sont précipités du haut des falaises ; d'autres, des ailes sur le dos, s'élancent de points élevés, tours et collines, font quelques battements et tombent ou atterrissent un peu plus loin et un peu plus bas que leur point de départ. Beaucoup y laissent leur vie. L'histoire retient parfois leur nom.
Vers 1500, Léonard de Vinci, le premier, étudie scientifiquement le problème. Des pages et des pages d'écriture, plus de quatre cents dessins l'attestent : le Florentin a pressenti l'hélicoptère, le parachute. On dit même qu'il aurait essayé un planeur en vraie grandeur.
Au XVIe siècle, l'Anglais Bate introduit en Europe la mode du cerf-volant, empruntée aux anciens Chinois. Guidotti, Burattini, Allard sont les héros de tentatives malheureuses. En 1673, on signale un serrurier du Mans, Besnier, qui, avec des surfaces à clapets, aurait réussi à voler. En 1742, le marquis de Bacqueville aurait parcouru quelque trois cents mètres au-dessus de la Seine, à Paris.
En 1783, la découverte de l' aérostat par les frères Montgolfier suscite un engouement tel pour les globes que les recherches sur les appareils plus lourds que l'air seront suspendues et vont prendre un certain retard. Blanchard, Resnier de Goué, Degen, Berlinger deux Français, un Suisse, un Allemand proposeront bien quelques solutions et tenteront même quelques expériences en vol, mais il faudra attendre la fin du XVIIIe siècle pour trouver celui que les Anglais ont appelé l'inventeur de l' aéroplane , sir George Cayley. En 1796, reprenant les travaux des Français Launoy et Bienvenu, il construit un hélicoptère. En 1799, il grave sur un disque d'argent la représentation des forces aérodynamiques sur un profil d'aile. En 1808, il dessine un ornithoptère à l'échelle de l'homme. En 1809, il construit un planeur qui vole sans passager. En 1843, il dessine le premier modèle de convertiplane et, en 1849, construit un planeur qui aurait été expérimenté avec un passager.

Montgolfière

Le 21 novembre 1783, au château de la Muette, à Paris, Pilâtre de Rozier et le marquis d'Arlandes effectuent la première ascension à bord d'un ballon à air chaud conçu par les frères Montgolfier.
Vers la même époque, deux autres Anglais, Henson et Stringfellow, furent bien près de trouver la solution. Si l'Ariel, dont nous possédons de très nombreuses gravures publiées à l'époque, ne fut jamais construit, il n'en reste pas moins que Stringfellow, continuant les travaux de Cayley et de Henson, fit voler pour la première fois dans l'histoire un modèle réduit d'aéroplane à vapeur.
C'est en 1856, avec le Français Jean-Marie Le Bris, que les premiers essais de planeur avec passager ont lieu, et c'est encore avec lui, en 1868, que sera prise la première photographie d'un plus lourd que l'air, en vraie grandeur.
En 1862, on aura noté l'invention du mot aviation par Gabriel de La Landelle, le lancement de la campagne de la sainte hélice par Nadar et la construction, par Ponton d'Amécourt, d'un hélicoptère à vapeur, première application de l'aluminium au plus lourd que l'air.
Depuis Cayley, l'attention des chercheurs a été attirée sur l'importance des données aérodynamiques. Un pas décisif sera fait dans ce domaine par un autre Anglais, Wenham, qui construira le premier tunnel, on dira soufflerie par la suite pour l'expérimentation des maquettes. La notion d'essai systématique apparaît, remplaçant bientôt les tâtonnements.
En France, Pénaud et Gauchot proposent en 1876 un aéroplane avec train escamotable, hélices à pas variable, gouvernes compensées et commande unique pour la profondeur et la direction.
D'autre part, vers 1874, le Français Félix du Temple parvient à lancer son aéroplane à vapeur le long d'un plan incliné, avec un jeune marin à bord. Mais pour qu'il y ait décollage, il ne faut ni plan incliné ni moyen additionnel catapulte, contrepoids, et, pour qu'il y ait vol, il faut : trajectoire soutenue, dirigeabilité, enfin atterrissage à un niveau au moins égal à celui du point de départ.
Nous arrivons à la fameuse controverse relative au premier vol de l'histoire : Clément Ader a-t-il volé le premier, le 9 octobre 1890 au château d'Armainvilliers ou le 14 octobre 1897 à Satory ? Les témoignages que l'on cite à l'appui sont-ils valables ? Si l'on répond par la négative à la première question, c'est aux frères Wright, disent les Américains, qu'il faut attribuer l'exploit, réalisé le 17 décembre 1903 à Kitty Hawk, en Caroline du Nord. Les historiens sont partagés. Aucun procès-verbal officiel n'a été établi sur le moment, ni pour l'un ni pour l'autre de ces vols. Il est certain dans les deux cas qu'il y a eu soulèvement. Peut-on dire qu'il y a eu vol soutenu du fait du moteur ? En tout cas, il n'y a pas eu virage. C'est le 15 septembre 1904 seulement que l'on voit apparaître dans les carnets des frères Wright la notion de demi-cercle. Il convient également de se replacer à l'époque : on constate alors que les constructeurs, aussi bien Ader que les frères Wright, tenaient à entourer leur invention du plus grand secret. Ce n'est que bien plus tard, au bout de quelques années, que se firent jour les déclarations d'antériorité. Entre 1890 et 1905, le public, pour passionné d'aviation qu'il fût, était assez mal informé des expériences précises de nos précurseurs. C'est aujourd'hui seulement, avec un certain recul, que nous avons en main les données du problème : travaux d'Ader, des frères Wright, mais également recherches et expériences de Mojaïski en Russie, de Maxim en Angleterre, de Jatho en Allemagne, de Kress en Autriche, de Langley aux États-Unis. Tous ceux que nous venons de citer ont essayé de décoller avec un moteur, mais cela ne doit pas faire oublier les noms de ceux qui ont fait faire de grands progrès à l'aviation au moyen du planeur : c'est en premier lieu l'Allemand Lilienthal, puis l'Écossais Pilcher, les Américains Montgomery et Maloney, les Français Ferber, Charles et Gabriel Voisin. Il ne faut pas oublier non plus les expériences de Hargrave en Australie, avec ses cerfs-volants cellulaires, et les études sur le vol des oiseaux des Français Mouillard et Marey. Il faut enfin se rappeler qu'il s'en est fallu de bien peu pour qu'un autre Américain, Langley, décollât avant les frères Wright, si ses expériences sur le Potomac avaient été couronnées de succès le 8 décembre 1903.

Les frères Wright

Le premier vol réalisé par Orville Wright 1871-1948, le 17 décembre 1903, sur la plage de Kill Devil, en Caroline du Nord, sous les yeux de son frère Wilbur 1867-1912. Cet appareil, le Wright Flyer, effectuera le même jour trois autres vols dont le dernier, réalisé par Wilbur à 5 mètres d'altitude et sur une distance de 260 mètres.
Les débuts de l'aviation
C'est le 17 décembre 1903 que les frères Orville et Wilbur Wright inaugurent l'ère de l'aviation. Au cours de ce vol historique de 59 secondes, qui s'effectue devant cinq témoins, ils parcourent une distance de près de 260 mètres. Après eux, nombreux sont les hommes qui vont œuvrer au développeme
L'ingénieur allemand Otto Lilienthal 1848-1896 et son planeur, en 1894. Il réalisa plus de deux mille cinq cents vols avant de s'écraser au sol et de se tuer.
Henri Farman et Gabriel Voisin
Henri Farman, à gauche 1874-1958, et Gabriel Voisin, deux pionniers de l'aviation, en 1908.
Qui a volé le premier ? Qu'importe si l'exploit a été réalisé en France ou en Amérique, en 1890, 1897 ou 1903. Ce qu'il faut retenir de cette époque héroïque, c'est la passion avec laquelle tous ces pionniers se dévouaient à l'aviation, risquant leur vie et leur fortune et – il faut bien le dire – profitant tous de leurs découvertes respectives, dans la mesure où le secret n'empêchait pas l'échange des informations. L'un des théoriciens de l'époque, Octave Chanute, avait très bien compris cette nécessité de la circulation et de l'échange de la documentation. Il est certain qu'on lui doit beaucoup, non seulement en raison de ses propres travaux, mais encore pour tous les contacts qu'il sut établir entre les Américains et les Français.

De 1906 à 1914

Théoriciens et aviateurs travaillent ferme en même temps dans tous les pays : Phillips en Angleterre, Ellehamer au Danemark, Joukovski en Russie, Crocco en Italie, Esnault-Pelterie en France, Drzewiecki en Pologne. La grande difficulté est de trouver un moteur léger et puissant. C'est un Français, Levavasseur, qui y parvient le premier avec le moteur Antoinette, mais c'est un Brésilien, Alberto Santos-Dumont, qui va inscrire – avec ce moteur et sur un aéroplane de sa construction, le 14 bis – son nom à la première ligne d'un palmarès unique au monde, celui des records d'aviation. L'Aéro-Club de France fondé en 1898 et la F.A.I. Fédération aéronautique internationale, fondée en 1905 s'étaient en effet portés garants de l'homologation de ces performances officielles. Le 12 novembre 1906, sur la pelouse de Bagatelle, Santos-Dumont allait donc s'attribuer les trois premiers records du monde : durée, distance et vitesse 41,292 km/h. De l'altitude, il n'était pas encore question, puisqu'il arrivait aux commissaires de se plaquer sur l'herbe pour constater que les roues avaient bien quitté le sol. Précisons que les vols du 12 novembre 1906 s'étaient effectués en moyenne à 6 mètres de haut.
Robert Esnault-Pelterie
Le Français Robert Esnault-Pelterie 1881-1957, aviateur et ingénieur, s'illustra en aéronautique et en astronautique. Il commence dès le début du XXe siècle par construire ses propres appareils, les monoplans baptisés R.E.P. selon ses initiales, puis il met au point le moteur en étoile…

Aviation : records entre 1906 et 1914

Évolution des records entre 1906 et 1914.
Une autre date importante : le 13 janvier 1908. Ce jour-là, sur un Voisin à moteur Antoinette, Henri Farman s'adjuge le prix offert par les mécènes Deutsch et Archdeacon ; il réussit le premier kilomètre en circuit fermé officiellement contrôlé. Un peu plus tard, en octobre de la même année, il réussira une autre première, la liaison de ville à ville Bouy-Reims, 27 km. En octobre 1908 également, Wilbur Wright, en France, bat le record de distance avec 66,6 km. Il terminera l'année avec 124,7 km. Le vrai départ est donné, courses et meetings vont se succéder au cours desquels de nouveaux noms vont apparaître : Blériot, Breguet, Delagrange, Latham, Paulhan, Curtiss, Roe, Rolls, Cody, Grahame-White.

Henri Farman

Le 13 janvier 1908, Henri Farman 1874-1958 réussit le premier kilomètre en circuit fermé officiellement contrôlé, à Issy-les-Moulineaux, sur un appareil Voisin équipé d'un moteur Antoinette. Il s'adjuge ainsi le prix offert par les mécènes Deutsch et Archdeacon.
Louis Blériot va associer son nom à un exploit spectaculaire : la traversée de la Manche. Le 25 juillet 1909, en 37 min, sur un Blériot, moteur Anzani de 25 ch, il réussit, battant de justesse le courageux Latham qui, sur Antoinette, deux fois de suite, tombe dans la mer.
L'année suivante, l'Anglais Charles Rolls effectue avec succès la double traversée, tandis que son compatriote Grahame-White perd la course Londres-Manchester, au profit du Français Paulhan. 1910 est également l'année pendant laquelle le record d'altitude passe de 1 000 m Latham à 3 000 m Legagneux. De même, le 10 juillet, les 100 km/h sont dépassés par Morane, et, le 25 août, les 500 km en distance par Tabuteau. Blériot, Voisin et Farman sont les marques des avions respectivement vainqueurs. Enfin, toujours en 1910, les Alpes sont traversées par un jeune Péruvien, Geo Chavez, qui se tue à l'atterrissage.

Pionniers de l'aviation

De gauche à droite : le général Bares, Gabriel Voisin, le général Pujo, Henri Farman, Louis Blériot, le général Niesel, le maréchal Franchet d'Esperey, Santos-Dumont vers 1920.
Les militaires commencent alors à s'intéresser à l'aviation et organisent les premières manœuvres avec des avions avant de les employer en opérations en 1911 guerre italo-turque en Tripolitaine.
L'année 1910 voit encore de nombreuses innovations : le premier hydravion du Français Fabre, le premier «avion à réaction du Roumain Coanda, le premier décollage du pont d'un navire par l'Américain Ely, la première liaison radio air-sol, les premières vues cinématographiques prises d'avion. Cette année-là, l'aviation a fait vingt-neuf morts

Hydravion

Le Français Henri Fabre 1882-1984 fit décoller le premier hydravion à moteur, en 1910.
Premier appontage
Après s'être posé, le 18 janvier 1911, à l'arrière du croiseur USS Pennsylvania, l'Américain Eugene Burton Ely réussit à redécoller aux commandes de son Albany Flyer pour rejoindre Selfridge Field, son lieu de départ.
Cela n'empêche pas l'idée d'aviation de s'imposer dans le public. En 1911, on a construit 1 350 aéroplanes dans le monde, on a fait 13 000 voyages au-dessus de la campagne , et 12 000 aviateurs ont parcouru un total de 2 600 000 km... Mais on a consommé 8 000 hélices ! Il faut dire que l'on casse du bois assez souvent à l'atterrissage. Très vite, dès 1911, nous voyons apparaître le métal dans la construction aéronautique : les frères Morane revêtent de tôles d'acier le fuselage de leur monoplan, tandis que Ponche et Primard créent le Tubavion avec voilure entièrement en aluminium.
C'est également l'époque à laquelle Levavasseur lance le monobloc, monoplan à aile cantilever montée en porte à faux, sans hauban, et recouvre le moteur et les roues de surfaces profilées. Bientôt, on parle d'aérobus, puisque Breguet et Sommer se livrent un duel épique à qui transportera le plus de passagers : le 23 mars, Sommer en fait décoller douze avec un moteur de 70 ch.
Le 18 février 1911 a lieu, aux Indes, un grand événement : la première poste aérienne au monde, avec le Français Henri Péquet sur Sommer, moteur 50 ch.
Après les frères Voisin, les premiers constructeurs ouvrent leurs usines : Bristol, Farnborough, de Havilland, Avro, Hawker, Short en Angleterre, Martin avec Bell, Douglas et McDonnell, Curtiss et Cessna aux États-Unis ; Morane-Saulnier, Caudron, Hanriot, Nieuport en France ; Fokker aux Pays-Bas, et Sikorsky en Russie, qui construira le premier quadrimoteur du monde, le Bolchoï, en 1913.
Cependant, on donne de plus en plus d'importance aux questions de sécurité et les instruments de bord viennent un à un prendre place dans les avions : notons l'indicateur de vitesse du capitaine Etévé et l'anémomètre qui fera du nom de Badin un nom commun.
Ainsi équipés, les aviateurs peuvent affronter la nuit : le 11 février 1911, Robert Granseigne survole Paris à 3 heures du matin sur un Caudron. Une sécurité supplémentaire apparaît à la même époque : le parachute. C'est l'Américain Berry qui, le premier, saute d'un avion, le 1er mars 1912, au-dessus de Saint Louis.
L'Exposition de 1912 réservait une surprise à ses visiteurs : un monoplan construit par Deperdussin présentait pour la première fois la formule monocoque rigidité de la coque obtenue par le seul revêtement qui allait permettre un important gain de place. De plus, cette trouvaille allait faire gagner des kilomètres : c'est sur un Deperdussin que Védrines et Prévost devaient battre le record du monde en 1912 et 1913 Prévost dépassera le premier les 200 km/h, le 29 septembre 1913, avec un moteur Gnome de 160 ch.
Les grands voyages commencent à intéresser les aviateurs. Les 366 km séparant Paris du puy de Dôme, enjeu du prix Michelin, sont franchis par Renaux et Senouque sur appareil Maurice Farman, moteur Renault de 60 ch, le 7 mars 1911 le prix avait été fondé en 1908.
En mai 1911, la course Paris-Madrid est gagnée par Védrines, le seul à terminer le parcours ; Paris-Rome voit la victoire de Beaumont devant Garros. Beaumont devance Garros encore au circuit européen 11 étapes et 1 710 km et Védrines au tour d'Angleterre 2 200 km.
Aux États-Unis, on applaudit la première traversée du continent par Rodgers en 49 jours et 68 escales soit un temps de vol de 82 h.
L'année suivante, 1912, marque un tournant décisif pour les raids. Brindejonc des Moulinais réalise le premier circuit des capitales ; Marc Bonnier, Barbier et Védrines relient Paris au Caire ; enfin – exploit qui fera date, comme celui de Blériot en 1909 – Roland Garros traverse la Méditerranée. Il est à bord d'un Morane et met 7 h 53 min à franchir les 730 km qui séparent Saint-Raphaël de Bizerte, avec un parcours au-dessus de l'eau de 500 km.

Roland Garros 1888-1918

L'aviateur français Roland Garros s'est rendu célèbre le 23 septembre 1913 en effectuant la première traversée de la mer Méditerranée en aéronef. Il parcourt avec un Morane-Saulnier les 730 km qui relient Saint-Raphaël à Bizerte en 7 h 53 minutes. Engagé dans la Première Guerre mondiale, il est fait…
Et une nouvelle sensationnelle arrive d'Allemagne : le pilote Reinhold Bœhm vient de voler pendant plus de 24 h sur son Albatross, moteur Mercedes 75 ch. Nous sommes en juillet 1914.
À cette date, un mois avant le déclenchement du premier conflit mondial, les progrès réalisés en moins de dix ans par l'aviation sont énormes. Il suffit de comparer les records officiels de la F.A.I. de 1906 et de 1914.

De 1914 à 1918

Avant la Première Guerre mondiale, l'avion avait déjà fait ses premières armes. La mission du capitaine italien Piazza, au-dessus des lignes turques, près de Tripoli, le 22 octobre 1911, consistait en une reconnaissance avec un Blériot. Le baptême du feu en avion fut effectué par le capitaine Moizo, avec un Nieuport 25 octobre 1911. Mais ce sont les Turcs qui emploient pour la première fois l'artillerie contre les avions. Le premier combat aéronaval fut celui d'un hydravion grec contre une canonnière turque.
Depuis le 29 mars 1912, les Français ont une loi portant création de l'Aéronautique militaire, et depuis le 13 avril de la même année, les Anglais ont créé le Royal Flying Corps, ancêtre de la R.A.F.
Rappelons enfin qu'à partir de l'été 1913, l'avion a prouvé qu'il pouvait prendre toutes les positions dans le ciel : le Russe Nesterov et le Français Pégoud ont déjà bouclé la boucle , c'est-à-dire fait un looping.
Dans les premiers jours de la guerre, les grands chefs, des deux côtés, estiment que l'aviation est seulement un moyen supplémentaire d'information pour voir de l'autre côté de la colline. Ce sont les aviateurs eux-mêmes qui vont prouver que ce «service peut être considéré comme une arme ; ils donneront peu à peu à cette arme un caractère offensif qui ne s'affirmera que vers 1918.
Dès 1915, le bombardement s'organise avec le commandant de Göys de Mezeyrac, et la chasse avec le commandant de Rose ; la reconnaissance s'intéresse à la photographie aérienne.
Du côté allemand, Boelcke formule les principes du combat aérien, tandis que, du côté français, Garros cherche à réaliser le tir à travers l'hélice. Mais c'est Fokker qui en trouvera la solution.
Junkers met au point un avion entièrement métallique, tandis que la firme Hispano-Suiza crée son fameux moteur 8 cylindres en V, dont plus de 50 000 exemplaires seront construits.
On commence à spécialiser les avions pour certaines missions : les Voisin, les Breguet et les Handley-Page serviront au bombardement, tandis que les chasseurs seront construits par Morane, Nieuport, Spad, Bristol, Fokker. Quant à la reconnaissance, elle empruntera surtout des Caudron et des Farman.

Manfred von Richthofen et son Fokker

La Première Guerre mondiale a vu la naissance de l'aviation militaire. Les exploits de certains « as », comme le « Baron rouge » (ou « Diable rouge »), l'Allemand Manfred von Richthofen, sont entrés dans la légende.
En 1916, les progrès continuent : Yves Le Prieur fixe des fusées sur les haubans d'un Nieuport ; Sperry, dont les travaux ont été repris par les Anglais Follands et Low, est à l'origine du premier avion guidé par radio. Douhet, en Italie, préconise l'emploi des bombardiers Caproni en masse, et Sikorsky, en Russie, construit en série ses quadrimoteurs.
Les Américains ne sont pas encore en guerre, mais certains volontaires, après être passés par la Légion étrangère, ont constitué une escadrille, qui deviendra bientôt l'escadrille La Fayette.
Parmi les progrès réalisés pendant la guerre, il faut noter, en 1916, l'étonnant exploit d'un pilote français, le lieutenant Marchal : avec un Nieuport équipé spécialement, il réussit à couvrir 1 370 km, ce qui lui aurait valu largement le record du monde si les homologations de la F.A.I. n'avaient été interrompues pendant les hostilités ; parti de Nancy, après avoir lancé des tracts au passage sur Berlin, il atterrit non loin des lignes russes, mais il est fait prisonnier avant d'avoir pu réaliser le premier raid « navette » de l'histoire.
Les civils même reconnaissent à quel point l'aviation s'est imposée : les Anglais ouvrent l'Air Ministry et les Allemands créent un Commandement de l'air unique.
En 1917, les effectifs des forces aériennes ont augmenté dans des proportions énormes et l'on commence à songer sérieusement à employer les bombardiers en masse pour une action offensive. Les Français sortent le fameux Breguet XIV et les Allemands lancent la première bombe de 1 000 kg 16 février 1918.
Deux décisions importantes sont à signaler en 1918 : les Anglais groupent le Royal Flying Corps et le Royal Navy Air Service et forment la Royal Air Force R.A.F., tandis que les Français créent la Ire division aérienne, représentant un ensemble de 600 avions de chasse et de bombardement sous un commandement unique ; le commandement unique est également adopté du côté britannique : le général Trenchard est nommé à la tête de l'Independent Air Force.

De 1918 à 1939

La Première Guerre mondiale n'était même pas terminée qu'un bombardier britannique Handley-Page 0/400 donnait le signal des liaisons pacifiques en reliant Londres au Caire au mois de juillet 1918, piloté par le major McLaren. Dans un premier temps, en effet, les nations disposant de nombreux surplus militaires vont s'appliquer à adapter les avions de guerre aux besoins du transport civil. Mais, avant de tracer des lignes sur la carte, il reste encore des terres à explorer, des mers à traverser, des montagnes à franchir : ce sera l'époque des grands raids.
L'Atlantique d'abord : trois hydravions de la marine américaine, avec le lieutenant-commander Read, relient en 1919 les États-Unis à l'Angleterre en trois étapes. Dans le même sens, mais sans escale cette fois, c'est encore un bombardier, un Vickers Vimy, qui, la même année, réussit l'exploit avec Alcock et Brown. Dans les deux cas, il faut noter que l'on a fait un large appel aux différents équipements de bord et de navigation.

Aviation : records entre 1920 et 1939

Les Français Bossoutrot, Coli, Lemaître, Dagnaux, Vuillemin ; les Italiens Ferrarin, Masiero ; les Australiens Ross et Keith Smith sillonnent les ciels d'Afrique, d'Asie et d'Australie, cependant que les Portugais Cabral et Countinho franchissent l'Atlantique Sud 1922.
De 1919 à 1923, les premières grandes compagnies aériennes jettent les bases de leurs réseaux : Deutsch Luft Rederei en Allemagne, B.A.T. en Grande-Bretagne, K.L.M. aux Pays-Bas, Ad Astra en Suisse, S.A.B.E.N.A. en Belgique, Q.A.N.T.A.S. en Australie, Messageries aériennes, Franco-Roumaine, Lignes Latécoère en France. La liaison Casablanca-Dakar est réalisée en 1923.
De 1924 à 1927, les surplus de la guerre étant épuisés, on voit les constructeurs se pencher sur le problème de l'avion de transport proprement dit, ce qui représente une nouveauté dans l'histoire de l'aviation : ce sont Farman, Breguet, Caudron, Lioré et Olivier en France ; Douglas, Boeing aux États-Unis ; de Havilland en Grande-Bretagne ; Fokker aux Pays-Bas.
À la même époque, le tourisme aérien s'impose peu à peu aux esprits et un marché privé s'intéresse aux Caudron en France ou aux Moth en Angleterre, bientôt aux Cessna aux États-Unis.
En 1924, le tour du monde a été réalisé par trois Douglas de l'armée américaine. Parti de Rome pour atteindre le Japon, l'Italien de Pinedo fait le tour de l'Australie, 55 000 km, la plus longue randonnée en avion à cette date.
En 1926, Byrd et Bennett ont survolé le pôle Nord avec un Fokker. Quant à 1927, on peut dire que c'est l'année de l' Atlantique : Nungesser et Coli disparaissent, ayant échoué de peu sans doute, le 8 mai. Quelques jours plus tard, Lindbergh va réussir, à bord du Spirit of St. Louis que lui a construit Ryan. C'est un nouveau triomphe du pilotage aux instruments.

Charles Lindbergh

Le Spirit of Saint Louis de Charles Lindbergh, peu de temps après son arrivée triomphale au Bourget, le 21 mai 1927, après qu'il eut réussi à traverser l'Atlantique nord sans escale.
L'année 1927 est aussi celle du Pacifique : Maitland et Hegenberger relient San Francisco à Honolulu 3 890 km les 28 et 29 juin. Un nouveau record est créé, qui indique bien les préoccupations du monde de l'aviation à cette époque : le record de distance en ligne droite.
Les compagnies continuent leur travail de défrichement : Mermoz sur l'Amérique du Sud, Noguès vers l'Orient, tels sont les deux grands noms français qui resteront associés à ces efforts, tandis que les compagnies aériennes Pan American, Lufthansa, Imperial Airways et Dobrolet (en Russie) voient le jour et accordent une place de plus en plus importante au confort des passagers.
Dès 1928, l'Allemagne relève la tête et reprend sa place parmi les constructeurs. Avec les Italiens, les Allemands ne vont pas tarder à faire parler d'eux dans les compétitions internationales.
L'aviation, qui tient la première page dans les journaux, est véritablement entrée dans les mœurs. En France, le ministère de l'Air « intégral » est fondé en 1928 et les ingénieurs de tous les pays font preuve d'une imagination telle que les progrès techniques sont très rapides : Doolittle réalise le premier vol entièrement sous capote, grâce aux instruments de Sperry ; la construction métallique se généralise ; le premier décollage « assisté » par fusées a lieu en 1929 (Junkers 33) ; l'avion au service de l'agriculture apparaît aux États-Unis ; enfin le pôle Sud est survolé à son tour Byrd et Balchen.

Si, pendant huit ans, le Français Bonnet garde le record de vitesse sur avion «terrestre , l'hydravion prend de l'avance et ne cédera la place à l'avion qu'en 1937.

Français et Italiens se livrent une lutte passionnée pour le record de distance en circuit fermé aussi bien qu'en ligne droite : Breguet XIX contre Savoia-Marchetti. D'un côté Ferrarin et Del Prete, de l'autre Costes, Codos, Bellonte, Bossoutrot, Rossi.
Les 1er et 2 septembre 1930, Costes et Bellonte font Paris-New York en 37 h 18 min sur le Breguet Point-d'Interrogation, traversant d'est en ouest l'Atlantique Nord, qu'en sens inverse venaient de franchir trois autres Français, Assollant, Lefèvre et Lotti (sans parler d'un jeune Américain passager clandestin !) sur Oiseau-Canari, au mois de juin 1929.
Quant à l'Atlantique Sud, il est traversé en 1930 au cours d'un vol commercial avec Mermoz, Gimié et Dabry sur l'hydravion Laté 28 Comte-de-La-Vaulx : il ne faut plus que cinq jours pour transporter le courrier de Toulouse à Santiago du Chili.
À la même époque, le trajet New York-Los Angeles ne demande plus que 36 heures ; il est devenu entièrement aérien. Enfin, signalons que la ligne la plus longue du monde est inaugurée par la K.L.M. : il s'agit d'Amsterdam-Batavia, soit 13 740 km en douze jours.
Vers les années trente, cette fois, on peut dire qu'il n'y a plus d'imprévu en aviation. Les lignes aériennes mettent l'accent sur la sécurité, le passager est confortablement installé, le pilotage automatique commence à entrer en jeu. Une des grandes conquêtes de cette époque est celle de l'altitude qui doit permettre de réaliser d'appréciables économies : en 1934, l'Italien Donati a dépassé les 14 000 m sur un Caproni. Cependant, l'Américain Wiley Post tient pendant huit heures, à 10 000 m.
En vitesse pure, l'Italien Agello détient le record du monde, avec son hydravion qu'il a poussé jusqu'à 709 km/h, le 23 octobre 1934.
L'aviation est vraiment devenue populaire . Les avions légers, grâce à des subventions gouvernementales, sont mis à la portée d'un plus grand nombre : Potez, Caudron, Morane-Saulnier et Farman, en France, rivalisent avec de Havilland en Angleterre et Taylor aux États-Unis, des amateurs commencent à construire eux-mêmes leurs propres modèles, et les fêtes d'aviation n'ont jamais été aussi fréquentées. On y applaudit les spécialistes de la voltige, Détroyat, Doret, la patrouille d'Étampes avec Fleurquin ; Cobham, Scott, Stewart, Tyson en Angleterre ; Udet, Fieseler en Allemagne ; Locklear, Chennault en Amérique. Les femmes prennent leur part de raids ou de voltige avec Maryse Bastié, Maryse Hilsz, Hélène Boucher, Amy Johnson, Amelia Earhart, Vera von Bissing ou Liesel Bach.
Les 4 et 5 octobre 1931, la traversée du Pacifique sans escale est réalisée par les Américains Pangborn et Herndon, du Japon à Seattle : ils terminent ainsi un très spectaculaire tour du monde. Très spectaculaire aussi la démonstration de Balbo qui, par deux fois, va s'attaquer à l'Atlantique en vol de groupe avec ses hydravions Savoia S-55. En 1931, c'est l'Atlantique Sud avec dix appareils ; en 1933, c'est l'Atlantique Nord, aller et retour avec vingt-quatre équipages.
Autre démonstration de masse d'équipages militaires : la Croisière noire du général Vuillemin, randonnée de 22 000 km à travers l'Afrique ; vingt-huit Potez 25, sur les trente qui avaient pris le départ, sont à l'arrivée (8 nov. 1933 – 15 janv. 1934).
C'est sur un Lockheed Vega que, le 23 juin 1931, Harold Gatty et Wiley Post partent pour un tour du monde qu'ils réaliseront en huit jours. Sur le même appareil, baptisé Winnie Mae, Wiley Post, seul cette fois, devait renouveler l'exploit en 1933, faisant entièrement confiance à son pilotage automatique.
Le Français Couzinet construit l'Arc-en-Ciel, sur lequel Mermoz va traverser l'Atlantique Sud, le 16 janvier 1933. La Croix-du-Sud, hydravion piloté par le commandant Bonnot, lui succédera. Un trimoteur du même Couzinet, le Biarritz, va réaliser, du 6 mars au 5 avril 1932, un Paris-Nouméa avec Verneilh, Devé et Munch. Et c'est sur un autre trimoteur, construit par Dewoitine, que Noguès trouvera la mort, au retour de Saigon le 15 janvier 1934.
L'événement sans doute le plus important de ces années trente est la course Londres-Melbourne, qui allait démontrer les possibilités des avions commerciaux. Vingt concurrents se sont inscrits ; ils partent le 20 octobre 1934. Cinq escales obligatoires sont prévues le long des 18 185 km : Bagdad, Allahabad, Singapour, Port Darwin, Charleville. Si la course est gagnée par un Comet spécialement construit par de Havilland, il importe de noter que les deuxième et troisième places sont prises par des avions de ligne : un Douglas DC 2 de la K.L.M. et un Boeing 247. Ce fut une exceptionnelle démonstration au profit des constructeurs américains, dont les appareils de transport allaient être offerts en nombre aux compagnies européennes ; il y a là un virage caractéristique dont on ne saurait trop souligner l'importance.
Autre événement important de l'époque : en 1933, la fusion de plusieurs compagnies françaises donne naissance à Air France, qui se trouve alors disposer d'une flotte de 260 appareils sur un réseau de 38 000 km.
De 1935 à 1939, tout se passe comme si les nations, délaissant les exploits pacifiques, se livraient une concurrence acharnée pour préparer et expérimenter les flottes de guerre les plus puissantes. À l'inverse de ce qui s'est passé au lendemain de la Première Guerre mondiale, les constructeurs semblent avoir pour souci de réaliser des appareils civils qui pourront s'adapter rapidement aux missions militaires, et si possible à toutes les missions, d'où la notion d'avion « polyvalent » qui fait son apparition, mais qui, finalement, provoquera de cuisantes désillusions.
C'est en 1935 qu'est sorti le B-17 de Boeing, ainsi que le Hurricane de Hawker, le 142 de Bristol et le fameux DC-3 de Douglas. Celui-ci, qu'on allait bientôt appeler C-47 puis Dakota, allait commencer une brillante carrière plus de 11 000 exemplaires avec ses deux moteurs Pratt et Whitney de 1 000 ch chacun. Il transporte vingt et un passagers à 340 km/h : le transport aérien devient rentable.

Dakota

Un procédé vient d'être mis définitivement au point, celui du vol aux instruments : le major Eaker traverse le continent américain entièrement « sous capote ».
Une vieille querelle prend fin : l'avion terrestre enlève à l'hydravion le record du monde de vitesse, avec Hans Dieterle Allemagne sur Heinkel 112 746,604 km/h le 30 mars 1939.
En altitude, le record établi par l'Italien Mario Pezzi, avec 17 083 m sur Caproni 161 bis, est encore valable de nos jours pour les avions à hélices. En distance, les 10 000 km représentant le quart de la circonférence de la Terre sont dépassés par les Soviétiques Gromov, Youmachev et Daniline Moscou-Los Angeles, du 12 au 14 juillet 1937, en 62 h 17 min.
En 1938, deux Vickers Wellesley devaient porter ce record à 11 520 km entre Ismaïlia et Darwin. Ce sont deux Japonais, Fujita et Takahashi, qui battent le record du monde de distance en circuit fermé en 1938 11 651 km avant de céder la place aux Italiens Dagasso et Vignoli, avec 12 935 km en 1939.
On pense à une course New York-Paris annulée en 1937, à la suite de la catastrophe du dirigeable Hindenburg, mais finalement on organise un Istres-Damas-Paris qui voit le triomphe des Savoia-Marchetti italiens en 1938. Le 28 juin 1939, on salue le premier vol transatlantique avec passagers : un hydravion quadrimoteur Boeing 314 relie Port Washington à Marseille.
Göring, ministre de l'Air du Reich et commandant en chef de la Luftwaffe, développe une flotte aérienne moderne et puissamment articulée, tandis que les Anglais commencent leurs travaux sur le radar. Les Italiens expérimentent leurs forces aériennes en Éthiopie, et la malheureuse Espagne va servir de banc d'essai aux différentes armées de l'air allemande, italienne, soviétique et, plus modestement, française. On commence à parler du Messerschmitt 109, du Stuka et du Heinkel 111.

De 1939 à 1945

À la date du 27 septembre 1939, jour de la capitulation de Varsovie, après la victoire sur la Pologne à laquelle l'aviation d'assaut et de bombardement n'a pas peu contribué, le Reich dispose de 3 500 appareils (dont 1 500 chasseurs). Dans le camp adverse, Français et Britanniques peuvent aligner environ 2 500 avions de types très variés.
En l'espace d'une année, la guerre va s'étendre peu à peu sur presque toute la planète : Finlande, Danemark, Norvège, campagne de France, bataille dans le ciel d'Angleterre, Gibraltar, Alexandrie, Malte, Italie, Crète, partout les aviateurs et les parachutistes jouent un rôle déterminant. Pearl Harbor est une victoire aérienne des Japonais. Les cuirassés sont désormais à la merci des avions ; et la revanche américaine dans la mer de Corail n'est rendue possible que par l'utilisation stratégique de l'aviation.

Pearl Harbor

En ce qui concerne la guerre sur terre, la mobilité, condition du succès des stratèges, a en effet réalisé des progrès inouïs, grâce aux avions de transport militaire dont l'importance, dans cette nouvelle guerre, est au moins aussi grande que celle des avions de chasse ou de bombardement. Nouvel aspect qui oriente les constructeurs vers de nouveaux modèles : il s'agit, bien sûr, de transporter le plus d'hommes et de matériel possible, mais aussi de franchir tous les obstacles, mers et montagnes, de résister à tous les climats polaire ou tropical et de décoller et d'atterrir quel que soit le terrain. Il convient également d'équiper ces avions de transport avec des instruments de navigation de plus en plus perfectionnés tandis que, dans l'autre camp, il est d'une urgence vitale de mettre au point des installations de radar pour avertir du danger qui s'approche.
Si la bataille d'Angleterre, au cours de laquelle 600 Hurricane et Spitfire tiennent tête à 3 000 appareils de la Luftwaffe, marque un tournant capital de l'histoire de la guerre, il en est un autre sur lequel il faut attirer l'attention : le premier bombardement de Tōkyō par les Américains. Il a été réalisé par les avions B-25 Mitchell du lieutenant-colonel Doolittle, partis d'un porte-avions, le Hornet, dans le Pacifique, à 1 300 km de leur cible, et dont l'aventure devait se terminer en Chine.

Bataille d'Angleterre

Dès 1942 tabl. 5, la production industrielle allemande est considérablement ralentie par les bombardements anglo-américains, tandis qu'au contraire la production des usines d'aviation des États-Unis augmente dans des proportions étonnantes : 5 500 avions dans le mois de décembre, contre 600 pour décembre 1940.
L'avion se spécialise. À côté du bombardement, de la chasse et de la reconnaissance, notions héritées du conflit précédent, à côté du transport, élément nouveau, apparaissent de nouvelles missions et de nouveaux types d'appareils : les planeurs pour transporter les troupes ; les boîtes volantes, aux faibles vitesses, véritables P.C. du champ de bataille; les bombardiers de précision, capables de faire sauter un barrage ou d'ouvrir une brèche dans les murs d'une prison. Chaque guerre voit fleurir de nombreuses inventions. Ces armes secrètes, si elles n'ont pas toujours apporté la décision à ceux qui les ont employées les premiers, si elles n'ont pas toujours vu le jour, auront au moins eu pour conséquence de contribuer aux progrès scientifiques d'après la guerre. V 1 et V 2 se trouvent ainsi à l'origine de l'astronautique. Les premiers jets , Gloster Meteor, Messerschmitt Me-262, participent aux opérations, tandis que les deux camps s'attaquent au problème de la propulsion par réaction et mettent au point un grand nombre de prototypes, de l'avion-fusée au bélier volant. Par la bombe atomique, le combattant tombe sous la dépendance du savant.
En tout cas, on constate que 675 000 avions ont été construits dans le monde au cours des cinq années du conflit. Radar, turboréacteur,

Liens

http://youtu.be/QTOis9qY5ek jean Mermoz et l'Arc en ciel
http://youtu.be/hyP_PfEFOg4 Hommage à Jean Mermoz


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Posté le : 06/12/2014 17:27
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Ferdinand de Lesseps
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Le 7 décembre 1894 meurt Ferdinand Marie, vicomte de Lesseps
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à 89 ans, à La Chesnaye près de Guilly Indre né à Versailles le 19 novembre 1805, diplomate et entrepreneur français. Il est surtout connu pour avoir fait construire le canal de Suez et pour être à l'origine du scandale de Panama pour lequel il a été condamné. Il était le neveu du diplomate Jean-Baptiste Barthélemy, baron de Lesseps
Diplomate, Ferdinand de Lesseps occupa des postes successifs en Égypte, où il devint l'ami du prince héritier Sa‘īd. Ministre à Madrid, puis à Rome en 1849, au moment de l'intervention des troupes françaises, il y signa un accord qui dépassait ses pouvoirs et fut désavoué. Il quitta alors la diplomatie.


Consul au Caire en 1833, il se lie avec le prince héritier Said, et s'intéresse aux projets des saint-simoniens relatifs à un canal entre la Méditerranée et la mer Rouge en perçant l'isthme de Suez. Rappelé par Said devenu souverain 1854, il obtient un acte de concession novembre 1854, puis forme la Compagnie universelle du canal maritime de Suez. Le canal est inauguré le 17 novembre 1869 par l'impératrice Eugénie. Lesseps s'intéresse ensuite 1876 à un canal dans l'isthme de Panamá, négocie avec la Colombie et fonde une compagnie 1880 dont la faillite 1889 provoquera le scandale de Panamá. Académie française, 1884.
Après l'accession au trône de son ami Sa‘īd pacha 1854, il conçut le projet d'un percement de l'isthme de Suez ; l'idée provenait des saint-simoniens au nombre desquels était Lesseps. Il obtint un acte de concession et fonda la Compagnie du canal de Suez. Bénéficiant de l'appui de Napoléon III, il sut mener à bien l'achèvement du canal qui fut inauguré par l'impératrice Eugénie le 17 novembre 1869. L'admiration qu'il inspirait aux Français résista même au scandale de Panamá qui mit fin, en février 1889, à la Compagnie du canal interocéanique de Panamá qu'il avait fondée en mars 1881 et qui engloutit dans sa faillite l'épargne de bon nombre de Français. Ferdinand de Lesseps et son fils Charles furent condamnés à cinq ans de prison après une interminable instruction. Mais la raison du grand homme avait sombré avec la faillite de son œuvre et il mourut en ignorant sans doute ce suprême opprobre. Il avait été élu à l'Académie des sciences en 1873 et à l'Académie française en 1884.

En bref

Ferdinand Marie, vicomte de Lesseps, Diplomate français, promoteur du percement de l'isthme de Suez, né à Versailles le 19 novembre 1805, mort à La Chenaie, près de Guilly Indre, le 7 décembre 1894. Il était le frère cadet du comte Théodore de Lesseps. Il fit de brillantes études au collège auj. lycée Henri IV, à Paris, fut attaché en 1825 au consulat de Lisbonne, revint en 1827 à Paris, passa une année dans les bureaux de la direction commerciale du ministère des affaires étrangères, fut nommé en 1828 élève-consul à Tunis, en 1831 vice-consul et en 1833 consul au Caire, et géra, à deux reprises, le consulat général d'Alexandrie. La première fois, ce fut pendant la terrible peste de 1834-1835, qui emporta le tiers des habitants; il se dévoua pour combattre le fléau, transformant sa résidence en ambulance, soignant lui-même les malades et s'efforçant de rassurer tout le monde par son sang-froid.
Durant le second intérim 1836-1838, il s'employa principalement à obtenir d'Ibrahim Pacha de nouvelles garanties pour les catholiques de Syrie et à rétablir les bons rapports entre le sultan et le vice-roi d'Egypte, Mohammed Ali, qui avait été autrefois l'ami de son père, le comte Mathieu de Lesseps. En 1838, il fut envoyé à Rotterdam, en 1839 à Malaga, en 1842 à Barcelone. Lors de la sanglante insurrection qui désola cette ville et de son bombardement par le général Espartero en novembre 1842, il déploya pour la sauvegarde des étrangers de toute nationalité une énergie, un courage et une habileté qui eurent dans l'Europe entière un grand retentissement. Les gouvernements, celui de la reine Isabelle en tête, le comblèrent de remerciements et le couvrirent de décorations; son buste fut placé dans la grande salle de l'Hôtel de Ville. En 1847, il fut promu consul général sur place.
Dénoncé comme monarchiste au gouvernement provisoire de 1848, Ferdinand de Lesseps fut rappelé télégraphiquement à Paris le 25 mars; mais le 10 avril. Lamartine le renvoya en Espagne, cette fois comme ministre plénipotentiaire. Il n'y resta que dix mois. Il trouva le temps, néanmoins, de négocier un traité postal très avantageux et de faire aboutir les revendications des Français relatives à l'administration de l'église et de l'hospice français de Saint-Louis de Madrid. Le 10 février 1849, il dut céder la place à Napoléon-Joseph Bonaparte, cousin du nouveau président de la République. Demeuré quelque temps en disponibilité, il se préparait à aller prendre possession de l'ambassade de Berne, lorsque le ministre des affaires étrangères, Drouin de Lhuys, le dépêcha en Italie avec mission de faire exécuter le vote de blâme rendu le 7 mai par l'Assemblée constituante contre le général Oudinot, qui, favorable à la restauration du pape, venait d'attaquer Rome avec les troupes françaises. Trois semaines durant, l'éminent diplomate se dépensa en vaines tentatives de conciliation, accusé d'un côté de partialité pour les révolutionnaires romains par le général Oudinot, lequel avait reçu en secret de Louis-Napoléon des instructions contraires à celles ostensiblement données à l'envoyé officiel, soupçonné d'autre côté par les Romains, qui avaient à leur tête Mazzini, de vouloir les amuser par des négociations stériles. Une lettre de rappel datée du 29 mai vint l'arracher à cette critique et humiliante situation. L'Assemblée législative avait remplacé la Constituante, elle voulait l'écrasement de la république romaine et la reprise générale des hostilités : carte blanche fut donnée au général. Quant à Ferdinand de Lesseps, qui n'avait pas craint de représenter les fâcheuses conséquences qu'entraînerait l'occupation violente de Rome et d'émettre sur Mazzini une opinion très favorable, il fut déféré au conseil d'Etat pour l'examen des actes relatifs à sa mission. Il se justifia complètement. Mais il n'obtint que sa mise en disponibilité sans solde et se retira dans la propriété de La Chenaie, que sa belle-mère, Mme Delamarre, venait d'acquérir. Cette disgrâce lui valut l'immortalité
Surnommé le Grand Français, Ferdinand de Lesseps a été le principal promoteur des deux projets de canaux les plus ambitieux de son temps, le canal de Suez puis le canal de Panama. Ce dernier projet fit perdre tant d'argent aux actionnaires que le promoteur fut condamné à cinq ans de prison, peine qu'il ne purgea pas en raison de son grand âge 88 ans et de son état de santé précaire. Sa statue trône sur la place de France à Panama avec son nom écrit de cette manière : Fernando Maria Vizconce de Lesseps.

Origine

L'origine de sa famille remonterait à la fin du xvie siècle. Son plus ancien ancêtre connu en ligne paternelle est un maître charpentier né dans la deuxième moitié du XVIe siècle. Un de ses arrières-grands-pères est le secrétaire de la reine Marie-Anne de Neubourg, veuve de Charles II d'Espagne, exilé à Bayonne après l'accession au trône de Philippe V.
Depuis le milieu du XVIIIe siècle, les ancêtres de Ferdinand de Lesseps suivent la carrière diplomatique, dans laquelle lui-même occupe plusieurs fonctions de 1825 à 1849. Son oncle est anobli par le roi Louis XVI, et son père, Mathieu de Lesseps 1774-1832, est fait comte par Napoléon Ier. Sa mère, Catherine de Grevignée, est espagnole, et tante de la comtesse de Montijo, mère de l'impératrice Eugénie.

Sa vie

Il est né à Versailles, rue des Réservoirs, le 19 novembre 1805. Il passe ses premières années en Italie, où son père est en poste. Il suit ses études au lycée Henri-IV à Paris. Son éveil intellectuel se serait produit, selon le témoignage de l’intéressé, dans un cycle de conférences donné par l’abbé de La Mennais et ses amis ultramontains. Bachelier à Amiens, le futur perceur d’isthme s’inscrit aux cours de droit commercial en vue du quai d’Orsay, mais il préfère de loin les séances d’équitation. Il deviendra un cavalier remarquable, d’une adresse qui lui donnera grand crédit auprès de ses partenaires arabes. De 1825 à 1827, il est vice-consul auxiliaire à Lisbonne, où son oncle, Barthélemy de Lesseps, est chargé d'affaires. Cet oncle embarqua sur l'Astrolabe, commandée par Fleuriot de Langle, et participa ainsi à l'expédition de La Pérouse. Alors que l'expédition faisait relâche à la presqu'île de Kamtchatka, La Pérouse lui demanda d'apporter ses documents à Versailles journaux, cartes et notes, lui sauvant ainsi la vie, sans le savoir.
Ferdinand de Lesseps se marie deux fois, en premières noces, à Agathe Delamalle 1819-1853, petite-fille de Gaspard Gilbert Delamalle, qui lui donne cinq fils : Charles-Théodore, Charles-Aimé, Ferdinand-Marie, Ferdinand-Victor et Aimé-Victor, puis en secondes noces après le décès d'Agathe, à Louise-Hélène Autard de Bragard 1848-1909, originaire d'Ile Maurice, qui lui donne douze autres enfants : Mathieu-Marie, Ferdinand-Ismaël 1871-1915, mort pour la France, Ferdinande-Hélène, Eugénie-Marie, Bertrand 1875-1917, mort pour la France, Marie-Consuelo, Marie-Eugénie, Marie-Solange, Paul, Robert 1882-1916, mort pour la France, Jacques 1883-1927, pionnier de l'aviation et Giselle.

Sa carrière Diplomatie

En 1828, Ferdinand de Lesseps est envoyé en tant que vice-consul auxiliaire à Tunis, où son père est consul-général. Il facilite courageusement l'évasion d'un certain Yusuf, poursuivi par les soldats du Bey dont il est un des officiers. Yusuf se montrera reconnaissant de cette protection française en se distinguant dans les rangs de l'armée française à l'heure de la conquête de l'Algérie. Ferdinand se voit ensuite confier par son père une mission auprès du comte Clauzel, général en chef de l'armée de conquête en Algérie. Dans une lettre du 18 décembre 1830 à Mathieu de Lesseps, le général écrit : J'ai eu le plaisir de rencontrer votre fils, qui promet de soutenir avec grand crédit le nom qu'il porte.
En 1832, Ferdinand de Lesseps est nommé vice-consul à Alexandrie. Afin de le faire patienter pendant la quarantaine du navire, le Diogène des Postes françaises qui l'a conduit en Égypte, Monsieur Jean-François Mimaut, consul-général de France à Alexandrie, lui envoie plusieurs livres, parmi lesquels le mémoire écrit, selon les instructions de Bonaparte, par l'ingénieur Jacques-Marie Le Père, membre de l'expédition scientifique d'Égypte, chargé d'étudier le creusement d'un canal à travers l'isthme de Suez. De ces lectures et de sa rencontre avec les saint-simoniens voir Cercle Saint-Simon venus là marier l'Orient et l'Occident, naît le projet du Canal dans l'imagination de Ferdinand.
Des circonstances bien particulières facilitèrent la réalisation du projet. Mehemet Ali, qui était le vice-roi d'Égypte, devait, au moins dans une certaine mesure, sa position aux recommandations faites au gouvernement français par Mathieu de Lesseps, consul-général en Égypte quand Mehemet Ali n'était qu'un simple colonel. Ferdinand fut donc amicalement et affectueusement accueilli par le vice-roi. Plus tard, c'est Saïd Pacha fils de Mehemet Ali, qui lui accordera la concession pour la construction du canal de Suez.
En 1833, Ferdinand de Lesseps est nommé consul au Caire, et peu après consul général à Alexandrie, poste qu'il tient jusqu'en 1837. Pendant cette période, une terrible épidémie de peste sévit pendant deux années, coûtant la vie de plus d'un tiers des habitants du Caire et d'Alexandrie. Faisant preuve d'une ardeur imperturbable, Ferdinand poursuit sa mission, allant d'une ville à l'autre selon la présence du danger.

En 1839, il est nommé consul à Rotterdam, et l'année suivante, transféré à Malaga, dans le pays d'origine de la famille de sa mère. En 1842, il est envoyé à Barcelone, et bientôt promu au rang de consul général. Au cours d'une insurrection sanglante en Catalogne, qui finit par le bombardement de Barcelone, Ferdinand de Lesseps fait preuve du courage le plus persistant en sauvant de la mort, sans distinction, des hommes appartenant aux factions rivales, et en protégeant non seulement les Français en danger mais aussi des étrangers de toutes les nationalités. En 1859 il crée une école pour scolariser les enfants des français immigrés à Barcelone, cet établissement6 qui porte son nom est aujourd'hui le plus ancien établissement français de la péninsule Ibérique. De 1848 à 1849, il est ministre de la France à Madrid.

Promoteur du canal de Suez

Alors que la France est enferrée dans l'expédition de Rome, Ferdinand de Lesseps est nommé ambassadeur plénipotentiaire avec pour mission de négocier un accord amiable entre Pie IX et les révolutionnaires qui viennent de fonder la République romaine. La réélection de Louis-Napoléon Bonaparte bouleverse la politique étrangère de la France. Le corps expéditionnaire commandé par le général Oudinot reçoit l'ordre d'assiéger Rome. Désavoué, Ferdinand de Lesseps entre en dissidence selon son expression et démissionne du service diplomatique. Il est alors accusé de collusion avec l'ennemi et sera défendu devant la Chambre par Ledru-Rollin après avoir été déféré par l'Assemblée conservatrice devant la juridiction du Conseil d'État qui l'accuse d'avoir reconnu au gouvernement romain une autorité morale et point seulement de fait. Il rédige un mémoire qui est rendu public en juillet 1849.
En 1853, il perd en l'intervalle de quelques jours son épouse et un de ses fils d'une épidémie de scarlatine. En 1854, l'accession au trône de vice-roi d'Égypte de son vieil ami, Saïd Pacha, donne une nouvelle impulsion aux idées qui l'avaient hanté pendant les vingt-deux dernières années au sujet du canal de Suez. Ferdinand de Lesseps est invité par Saïd Pacha, et le 7 novembre 1854 débarque à Alexandrie. Le 30 du même mois, Saïd Pacha signe la concession autorisant Ferdinand de Lesseps à percer l'isthme de Suez.
Des ingénieurs saint-simoniens, que la dispersion de leur secte avait conduits en Egypte, s'étaient préoccupés, quinze ans auparavant, de la réunion de la Méditerranée à la mer Rouge et avaient même tenté un barrage du Nil (Enfantin et Lambert Bey). Ferdinand de Lesseps était alors consul au Caire. Il avait lu, vers le même temps, à Alexandrie, un rapport écrit en 1800 sur la question par un ingénieur de l'expédition d'Egypte, l'architecte Lepère, et il y avait souvent réfléchi depuis. A La Chenaie, où il ne s'occupait guère que d'agriculture, il eut le loisir de méditer et de mûrir l'idée et, lorsqu'au mois de juillet 1854 il apprit la mort du vice-roi Abbas Pacha, sa conviction était déjà faite, et son plan arrêté. Les circonstances étaient on ne peut plus favorables. Ferdinand de Lesseps avait été le grand ami d'enfance du nouveau souverain, Saïd Pacha, quatrième fils de Mohammed Ali, et le jeune prince, devenu homme, lui avait conservé une vive affection. Il s'embarqua dès le mois d'octobre pour l'aller féliciter de son avènement, et, le 15 novembre au soir, tandis que tous deux chevauchaient à travers le désert Lybique, se rendant d'Alexandrie au Caire, il s'ouvrit à lui de ses projets. Saïd Pacha les approuva sur-le-champ et promit de les seconder. De Lesseps ne perdit pas un instant. Déployant, malgré ses cinquante ans, une activité à peine concevable, il réunit une commission internationale, la conduisit en Egypte, fit déterminer le tracé, s'occupa en même temps de lancer l'affaire, organisa des réunions, fit des conférences, persuada les incrédules, confondit ses adversaires et triompha finalement de toutes les hésitations et de toutes les résistances, grâce à une ardeur, à une énergie et à une ténacité que ni déboires ni revers ne parvinrent jamais à abattre.
Sur ses indications, un premier plan est immédiatement dessiné par deux ingénieurs français, Louis Maurice Adolphe Linant de Bellefonds et Eugène Mougel. Après avoir été légèrement modifié, le plan est adopté en 1856 par la commission Internationale pour le percement de l'isthme des Suez à laquelle il a été soumis. Encouragé par ce verdict, pas plus l'opposition de Lord Palmerston, qui craint alors pour la position commerciale du Royaume-Uni, que les avis amusés prédisant le comblement du canal par les sables du désert, n'arrêtent Lesseps.Il prend d'ailleurs cette année-là comme secrétaire un journaliste, humoriste et auteur dramatique anglais Charles Lamb Kenney, qui a néanmoins le diplôme d'avocat.

Parmi les trois propositions qui fait Ferdinand de Lesseps, c'est l'ingénieur italien Luigi Negrelli qui a été choisi, celui qui avait proposé la canalisation directe, le respect de la forme et de l'absence des écluses à l'embouchure du canal.
La direction générale du travail a ensuite été assigné à Negrelli mais il est mort après quelques jours de maladie, et donc les travaux seront continue matériellement par Ferdinand sur les plans établis de Negrelli.
Poussé par ses convictions, soutenu par l'empereur Napoléon III et l'impératrice Eugénie, il réunit par souscription plus de la moitié du capital de deux cents millions de francs nécessaires pour fonder la Compagnie Universelle du canal maritime de Suez. Le gouvernement égyptien souscrit pour quatre-vingts millions.
La compagnie de Ferdinand de Lesseps construit le canal de Suez entre 1859 et 1869. Dans l’affaire, Lesseps s’est entouré d’un vaste réseau de compétences, sinon de connivences, notamment dans la presse, qui lui seront toujours de la plus grande utilité. En 1869, après l'inauguration du canal de Suez, Napoléon III propose de le nommer duc de Suez. Instruit par le précédent des lacs Amers, il est le premier à applaudir au projet Roudaire.
Il le soutiendra en même temps que d’autres grandes entreprises telles que le creusement d’un tunnel sous la Manche, l’établissement de liaisons ferroviaires à travers l’Asie, le canal de Panama, ou le transsaharien. Phare du Tout-Paris, homme clé des relations de l’Occident avec l’Orient, pape de la géographie et de l’expansion européenne en Afrique, président de la Société de géographie en 1881, membre de la Société protectrice des indigènes.

L'Angleterre avait pourtant bien lutté. Ses hommes d'Etat et ses ingénieurs, lord Palmerston et Stephenson en tête, avaient déclaré impossible, absurde, le projet du canal, tout en menaçant la Sublime Porte des plus violentes représailles si elle signait le firman de ratification de la concession; ses financiers avaient entravé de tout leur pouvoir les émissions d'actions en propageant dans le public les bruits les plus alarmants et en vouant d'avance les souscripteurs à la banqueroute. Un puissant parti français avait également mené une vive campagne de déconsidération. Malgré tout, une concession en règle fut accordée 5 janvier 1856, le gouvernement égyptien souscrivit à 177 642 actions, et les travaux commencèrent le 25 avril 1859. Ils se poursuivirent pendant quatre ans sans incidents graves. Mais en 1863, Saïd Pacha étant mort, son successeur, Ismaïl Pacha, poussé par l'Angleterre et la Turquie, fit mine de s'opposer à leur continuation. De nouveau Ferdinand de Lesseps se multiplia, Napoléon III intervint, et, l'année suivante, les travaux purent reprendre. L'inauguration officielle eut lieu le 17 novembre 1869. Ce fut par le monde entier un enthousiasme indescriptible. Ferdinand de Lesseps fut mis au rang des plus illustres célébrités; les souverains, accourus à Port-Saïd pour le féliciter, lui conférèrent les plus hautes dignités de leurs ordres les plus honorifiques; le gouvernement français, notamment, le nomma grand-croix de la Légion d'honneur 1869 sans qu'il eût passé par le grade de grand officier; les Anglais eux-mêmes ne voulurent pas demeurer en arrière, et Londres lui accorda sa faveur la plus recherchée, le droit de bourgeoisie 1870. Pendant quinze années, il fut certainement le citoyen du monde le plus populaire, en même temps que le plus admiré et le plus respecté; on ne l'appela plus que le grand Français, et sa vie devint comme une longue et glorieuse apothéose. Il payait de mine, du reste, avec sa physionomie martiale, sa taille bien prise et esthétiquement serrée dans sa redingote noire, ses épaules larges, sa démarche aisée et cette auréole de triomphateur qui ne quittait guère son large front. C'était en outre un cavalier d'élite, et il dut en grande partie à cette qualité son ascendant sur les Egyptiens.

Echecs politiques

Il n'y eut qu'en politique que Ferdinand de Lesseps ne fut pas heureux. Aux élections de 1869, l'Empire le porta candidat officiel contre Gambetta dans la deuxième circonscription de Marseille; il échoua. Il échoua également le 15 mars 1876, par 84 voix contre 174 données à Ricard, comme candidat de la droite sénatoriale à un siège de sénateur inamovible. Il ne professa jamais, du reste, des opinions bien extrêmes. Sa conduite dans les affaires de Rome en 1849 et les mesures prises alors contre lui avaient fait quelque temps supposer qu'il était républicain. Mais il s'était incontestablement réconcilié avec Napoléon III, et il entretenait les meilleures relations avec l'impératrice, qui était sa cousine. Ce fut même lui qui la fit évader des Tuileriesle 4 septembre 1870 et qui la conduisit en lieu sûr.
Dès 1873, Ferdinand de Lesseps étudia un autre grand projet. Il s'agissait, cette fois, d'une voie ferrée qui, allant d'Orenbourg à Peshawar, à travers l'Asie centrale, devait relier les réseaux russe et anglo-indien. Ce fut l'un de ses fils, Victor, attaché d'ambassade, qui se rendit dans l'Inde pour examiner sur place la question, mais elle resta sans solution. Quelques années plus tard, à la suite d'une visite qu'il fit lui-même aux chotts algériens et tunisiens, il se déclara hautement pour la création, sur leur emplacement, d'une mer intérieure africaine dont les eaux seraient amenées de la Méditerranée par un canal de 160 kilomètres partant de Gabès. Les plans avaient été dressés par le commandant Roudaire. Des ingénieurs refirent les études et constatèrent que les parties à submerger étaient au-dessus du niveau de la mer. Ferdinand de Lesseps fut aussi l'un des promoteurs du canal de l'isthme de Corinthe. Il ne s'en occupa toutefois qu'en passant. D'autres idées le hantaient. Il voulait un digne pendant à l'isthme de Suez. Il ambitionnait de faire plus grand encore.

Le canal de Panama.

Le percement de la longue langue de terre qui sépare les deux Amériques avait, à maintes reprises, depuis le commencement du siècle, obsédé les rêves de marins et d'ingénieurs. Deux officiers de la flotte française, Wyse et Reclus, avaient plus récemment recherché le tracé d'un canal entre Panama, sur l'océan Pacifique, et Colon, sur l'Atlantique. Ferdinand de Lesseps se mit à la tête d'un comité chargé d'étudier leur avant-projet. Un congrès international d'ingénieurs se réunit à Paris au mois de mai 1879. Plusieurs plans, tous insuffisamment préparés d'ailleurs, lui furent soumis. Mais Lesseps avait son idée arrêtée. Le canal de Panama devait être, comme son frère d'Egypte, à niveau constant et sans écluses; il n'en admettait pas d'autre. La situation était pourtant bien différente. Au lieu d'un long ruban de sable à draguer, c'était toute une montagne de roche dure dans laquelle il allait falloir creuser une gigantesque cuvette. Ferdinand de Lesseps ne voulut pas prendre en considération les observations réitérées que lui firent à cet égard deux sous-commissions techniques. Il avait en son étoile une confiance absolue.

Si l'on demande, disait-il, à un général qui a gagné une première bataille s'il veut en gagner une autre, il ne peut refuser.
Il se contenta, pour l'évaluation des dépenses et de la durée des travaux, de données vagues et incertaines, et il entraîna assez facilement la majorité du congrès, qu'hypnotisait le succès de Suez. Une première tentative d'émission publique échoua août 1889. Malgré ses soixante-quinze ans, il paya de sa personne, comme vingt ans plus tôt pour son premier canal, organisa toute une campagne de conférences, fonda le Bulletin du canal interocéanique et, au mois de décembre, partit pour le Panama avec sa femme, deux de ses enfants et toute une escorte d'ingénieurs, d'économistes et de journalistes. Le 1er janvier 1880, la petite Ferdinande de Lesseps donna le premier coup de pioche. On resta vingt jours. L'observation des difficultés fut forcément très superficielle. On alla ensuite aux Etats-Unis, où l'opposition était fort vive et on revint en Europe. Au mois de décembre, une nouvelle émission fut lancée. Elle fut couverte plusieurs fois. Le 3 mars 1881, la Compagnie du canal interocéanique fut définitivement constituée. L'inauguration devait avoir lieu le 1er octobre 1887!
Cependant, Ferdinand de Lesseps n'en avait pas fini avec le canal de Suez et avec les Anglais. En 1875, le gouvernement de la reine Victoria avait acheté au khédive pour une valeur de 100 millions de francs les 176 602 actions dont il était propriétaire. En 1881, il mit à profit la révolte d'Arabi Pacha pour débarquer en Egypte et tenter de s'emparer du canal, que l'amiral Hoskins, excité aux plus violentes mesures par le Times et par quelques autres journaux anglais, ne craignit pas d'occuper militairement. Vainement, Ferdinand de Lesseps, accouru immédiatement à Ismaïlia, protesta-t-il contre cette atteinte à la propriété privée. Son attitude énergique sauva néanmoins la situation. Arabi Pacha lui promit de respecter la neutralité du canal, et l'amiral anglais lui demanda spontanément d'en reprendre l'exploitation normale. Les attaques des journaux d'outre-Manche n'en furent que plus acharnées. Ils alléguèrent d'abord les allures insolentes du président de la Compagnie, puis l'insuffisance du canal, et ils réclamèrent le percement d'une seconde voie pour le service spécial de L'Angleterre. Lesseps sut tenir tête à tous les orages. Trois ans après un nouveau et dernier voyage en Egypte 1884, il remporta une victoire décisive par la signature de la convention franco-anglaise du 23 octobre 1887, qui assurait, sous la garantie des principales puissances, la neutralité du canal et qui reconnaissait le privilège exclusif de la compagnie concessionnaire.
Le grand Français jouissait encore à cette époque de toute sa popularité et de tout son prestige. Membre libre de l'Académie des sciences de Paris depuis 1873, il avait été choisi en 1884 par l'Académie française pour succéder à Henri Martin, bien que ni la nature de ses écrits, qui ne sont en général que des recueils de documents, ni son style fort relâché ne parussent devoir le désigner aux suffrages d'une compagnie littéraire. La plupart des sociétés savantes de l'étranger s'étaient fait également un honneur de s'attacher à des titres divers le perceur d'isthmes, et il présidait, plus ou moins effectivement, une multitude d'associations, de cercles, de congrès, etc. Au mois de mars 1887, il fut envoyé par le gouvernement français à Berlin, sans qu'on ait jamais su exactement si cette mission était relative à une invitation secrète de l'Allemagne à l'exposition universelle de 1889 ou à quelque démarche tendant à la révision du traité de Francfort. Il reçut en tous cas de l'empereur, du prince de Bismarck et de toute la cour les marques les plus ostensibles de sympathie et de déférence. Malheureusement, l'oeuvre de Panama marchait rapidement à la ruine, et la considération de Ferdinand de Lesseps allait bientôt sombrer dans ce cataclysme financier.

En 1885, la situation de la Compagnie était déjà critique. En 1886, son président effectua un nouveau voyage dans l'isthme, au cours duquel il consentit à reconnaître que le canal à niveau était pour le moment impossible et qu'il fallait se contenter, temporairement au moins, d'un canal à écluses. Mais de toute façon il fallait beaucoup d'argent : or les caisses étaient vides, plus d'un milliard avait déjà été dépensé et la défiance grandissait. Il y eut alors une série d'émissions infructueuses, entremêlées d'enquêtes gouvernementales et de vifs débats parlementaires. Seul Ferdinand de Lesseps ne désespérait pas et, dans une nouvelle campagne de publications et de conférences, il annonçait contre toute évidence l'ouverture du canal avant la fin de 1890. Il dut pourtant, le 11 décembre 1888, abandonner la lutte. Le 4 février 1889, la liquidation judiciaire de la Compagnie fut prononcée. Les bruits les plus graves commencèrent à circuler : les travaux réellement utiles ne représentaient, disait-on, qu'une faible part des sommes dépensées; des travaux incohérents et un gaspillage éhonté avaient absorbé le reste. Sous la pression de l'opinion publique, la Chambre des députés vota, le 4 janvier 1892, à l'unanimité de 509 votants, un ordre du jour réclamant une répression énergique. Le 9 février 1893, la cour de Paris condamna Ferdinand de Lesseps et son fils aîné, Charles, qui avait été depuis le début des études du canal de Panama son collaborateur de tous les instants, à cinq années d'emprisonnement et à 3000 F d'amende. Charles avait seul comparu. Son père, littéralement écrasé par la ruine de son oeuvre, vivait depuis le commencement de l'année 1889 au fond de sa propriété de La Chenaie, dans un état de somnolence sénile qui avait permis à sa famille de tout lui cacher : le procès et l'arrestation de son fils. Il ne connut pas davantage sa condamnation. Elle ne lui fut du reste jamais notifiée et on n'eut pas ainsi à le rayer des cadres de la Légion d'honneur

Ferdinand de Lesseps mourut à La Chenaie à quatre-vingt-neuf ans. Son corps fut ramené à Paris, où les honneurs militaires ne lui étaient pas régulièrement dus, et un silencieux cortège de fidèles admirateurs le conduisit à sa dernière demeure.

Le désastre avait fait trop de victimes et trop de dupes, lui-même y avait trop directement contribué par des fautes et par une légèreté indiscutables, pour qu'il pût éviter le ressentiment populaire. Mais l'histoire oubliera certainement les égarements de sa vieillesse trop présomptueuse et trop confiante pour se souvenir seulement qu'il fit Suez, qu'à l'âge de soixante-dix ans encore sa gloire était intacte et que, s'il laissa commettre de honteuses dilapidations, il ne fut lui-même, entre les mains d'industriels et de financiers sans scrupules, qu'un instrument à peu près inconscient; elle ne verra plus en lui que

l'incarnation de l'esprit d'entreprise dans sa plus haute acception, que l'initiateur de la plus grande révolution matérielle qui ait eu lieu dans ce monde (Francis Charmes.
Il ne recueillit du reste que bien peu de chose du maniement de tous ces millions. Il semble même plutôt avoir compromis sa fortune dans cette affaire, car le 5 juin 1894 l'Assemblée générale des actionnaires de la Compagnie du canal de Suez dut voter à sa femme et à ses enfants, pour assurer leur avenir, une pension viagère de 120 000 francs.
Ferdinand de Lesseps s'était marié, alors qu'il était consul en Egypte, avec Mlle Delamalle, morte en 1854. Elle lui laissa deux fils : Charles-Aimé-Marie, né en 1849, et Victor, l'un et l'autre cités dans le cours de cet article. Le 23 novembre 1869, il épousa à Ismailia une créole de l'île Maurice qu'il avait rencontrée dans un salon parisien, Mlle Hélène Autard de Bragard. Elle avait alors dix-huit ans. Elle lui donna à son tour neuf charmants enfants bien connus des Parisiens, qui virent souvent leur joyeuse cavalcade remonter à poney l'avenue des Champs-Elysées.

Fin de carrière

Le perceur d’isthme laisse derrière lui des zones d’ombre propice au culte comme à la suspicion. En 1893, poursuivi pour trafic d’influences et détournement de fonds dans le cadre des suites judiciaires dû au scandale de Panamá, Ferdinand de Lesseps est condamné à cinq ans de prison qu’il n’effectuera pas.
Ferdinand de Lesseps mourut à quatre-vingt-neuf ans, dans sa demeure berrichonne de La Chesnaye à Guilly dans l'Indre. Son corps fut ramené à Paris, où les honneurs militaires ne lui étaient pas régulièrement dus, et un silencieux cortège de fidèles admirateurs le conduisit à sa dernière demeure.

Il est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris division 6 mais une partie de son sang repose au cimetière de Guilly.

Distinctions et récompenses

Académie française 1884
Académie des sciences 1873
Grand-croix de la Légion d'honneur 1869

Hommages

2009, la Plaça de-Lesseps à Barcelone, rénovée
Son nom a été donné à :

un paquebot des Messageries maritimes le Ferdinand-de-Lesseps
une place de Barcelone, la Plaça de Lesseps dans le quartier de Gràcia, inaugurée en 1895, dernière rénovation en 2008
une station du Métro de Barcelone sur la première ligne en 1924, aujourd'hui ligne L3
un collège : Vatan Indre à quelques kilomètres de sa propriété de La Chesnaye
de nombreuses rues à Paris et dans des communes de l'Indre

Liens

http://youtu.be/UiKXpE8_hX8 un homme, un rêve, un canal
http://youtu.be/UnbHMyfOIkE Sa vie en 4 épisaodes
http://youtu.be/wEbjkdUBEu4 Ferdinand de Lesseps


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Posté le : 06/12/2014 17:23
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Spencer-Churchill
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au palais de Blenheim, Woodstock, Oxfordshire, Royaume-Uni, mort à 90 ans, le 24 janvier 1965 à Londres, homme d'État britannique, dans le parti politique Conservateur de 1900 à 1904, et dans le parti libéral de 1924 à 1964. Sa carrière : il est secrétaire à l’Intérieur du Royaume-Uni du 10 février 1910 au 24 octobre 1911 pendant 1 an, 8 mois et 14 jours il succède à Herbert Gladstone et sera remplacé par Reginald McKenna, puis Chancelier de l'Échiquier du Royaume-Uni du 6 novembre 1924 au 4 juin 1929 pendant 4 ans, 6 mois et 29 jours, son prédécesseur est Philip Snowden, son successeur Philip Snowden, il devient le 61e Premier ministre du Royaume-Uni
du 10 mai 1940 au 27 juillet 1945, pendant 5 ans, 2 mois et 17 jours sous le règne de George VI, son prédécesseur est Neville Chamberlain et son successeur Clement Attlee, il termine sa carrière après la guerre, comme 63e Premier ministre du Royaume-Uni du 26 octobre 1951 au 7 avril 1955

pendant 3 ans, 5 mois et 12 jours sous le règne de George VI, puis Élisabeth II, son prédécesseur est Clement Attlee, son successeur Anthony Eden. Il est marié Clementine Hozier et pour enfants Diana Churchill, Randolph Churchill, Sarah Churchill, Marigold Churchill, Mary Soames. Diplômé de Harrow School, Académie royale militaire de Sandhurst. Profession Député, homme d'État, militaire, journaliste, historien, écrivain, peintre. Résidence 10 Downing Street en tant que Premier ministre britannique Chartwell privée. Son action décisive en tant que Premier ministre de 1940 à 1945 du Royaume-Uni, son rôle durant la Seconde Guerre mondiale, joints à ses talents d'orateur et à ses bons mots en ont fait un des grands hommes politiques du XXe siècle. Ne disposant pas d'une fortune personnelle, il tire l'essentiel de ses revenus de sa plume. Ses dons d'écriture seront couronnés à la fin de sa vie par le prix Nobel de littérature. Il est aussi un peintre estimé. Plus qu'un simple loisir, la peinture est pour lui un refuge dans les moments difficiles.

En bref

Vingt ans avant sa mort, Winston Leonard Spencer Churchill est entré dans l'histoire du peuple britannique, à l'instant même où, la guerre terminée, le verdict des élections, par un étrange paradoxe, l'éloignait du poste de Premier ministre. Pour les Anglais, il est l'égal du second Pitt, parce que sa gloire est d'avoir triomphé du nazisme, tout comme son illustre prédécesseur avait affronté Napoléon. Les historiens ont consacré sa légende, et les Mémoires de son médecin personnel, lord Moran, publiés au lendemain de sa mort, firent scandale parce que l'auteur imputait les erreurs de l'homme d'État à la maladie et au caractère de celui-ci.
Pourtant, à la fin d'une carrière politique qui commence avec le siècle et sera la plus longue de l'histoire britannique, Churchill n'aurait sans doute laissé qu'un souvenir marginal sans ses cinq années de leadership national 1940-1945 qui amenèrent la Grande-Bretagne et l'empire à la victoire. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, malgré une présence parlementaire et ministérielle mouvementée, il paraissait définitivement écarté des conseils gouvernementaux du Parti conservateur et sa vie publique se soldait par un échec. Après la guerre et une expérience travailliste difficile, il revient au pouvoir à la tête des conservateurs 1951-1955, sans qu'on puisse affirmer que ce dernier principat ait marqué l'efficacité du gouvernement britannique.
Churchill, en effet, a été surtout un leader de guerre, dans la tradition de Lloyd George ou de Clemenceau. L'étonnant divorce entre le héros national du temps de crise et le politique discuté des jours ordinaires tient pour beaucoup à ce qu'il fut le dernier héritier de l'époque victorienne et de la grandeur britannique dans un monde qui a consacré la décadence de l'establishment et le déclin de l'Angleterre. En témoignent aussi bien sa personnalité que sa politique et le rôle qu'il a joué dans l'histoire politique et sociale du Royaume-Uni.
Winston Leonard Spencer-Churchill appartient à la famille aristocratique Spencer, dont il est la plus brillante figure depuis le fondateur, son ancêtre John Churchill, 1er duc de Marlborough 1650-1722, auquel il a consacré une biographie. Fils d'un homme politique conservateur atypique n'ayant pas connu le succès escompté et mort relativement jeune, il ambitionne très vite de réussir dans ce domaine. De fait, s'il débute dans la carrière militaire et combat en Inde, au Soudan et lors de la Seconde Guerre des Boers, il y cherche surtout l'occasion de briller et de se faire connaître. Cette recherche de gloire lui vaut parfois un certain nombre d'inimitiés parmi ses pairs. Assez rapidement, en partie pour des questions financières – l'armée paie moins que le journalisme et il a besoin d'argent – il sert en tant que correspondant de guerre, écrivant des livres sur les campagnes auxquelles il participe. Bien plus tard, il sert brièvement sur le front de l'Ouest pendant la Première Guerre mondiale, comme commandant du 6e bataillon des Royal Scots Fusiliers. En 1953, la reine le fait chevalier de l'ordre de la Jarretière.

Il est député durant la majeure partie de sa carrière politique, longue de près de soixante années, et occupe des postes ministériels pendant près de trente ans. Avant la Première Guerre mondiale, il est ministre du Commerce, secrétaire du Home Office et Premier Lord de l'Amirauté du gouvernement libéral d'Herbert Henry Asquith. À ce titre, il participe à la création des premières lois sociales de son pays et à un mouvement visant à restreindre l'importance de la Chambre des Lords, deux éléments qui lui valent une forte inimitié de la part des conservateurs. Il reste à cette fonction jusqu'à la défaite britannique lors de la bataille des Dardanelles, dont il est tenu pour responsable, et qui provoque son éviction du gouvernement. Blanchi de ces accusations par une commission d'enquête parlementaire, il est rappelé comme ministre de l'Armement, secrétaire d'État à la Guerre et secrétaire d'État de l'air par David Lloyd George, alors Premier ministre.
Durant l'entre-deux-guerres, il quitte le Parti libéral et revient au Parti conservateur, avant de devenir chancelier de l'Échiquier. Son bilan à ce poste est mitigé. L'économie n'est pas son domaine de prédilection, à la différence de la politique étrangère et des affaires de stratégie militaire. Dans les années 1930, il n'est pas en phase avec le milieu politique d'alors, et connaît une dizaine d'années de traversée du désert au moment même où, eu égard à son âge et son expérience, il aurait dû atteindre le sommet.
Il faut attendre le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale pour que Winston Churchill redevienne ministre en tant que Premier Lord de l'Amirauté. Après la démission de Neville Chamberlain, le 10 mai 1940, il devient, plus par défaut que par adhésion, Premier ministre du Royaume-Uni. À 65 ans, un âge qui en fait le plus âgé des grands dirigeants alliés, il atteint le sommet de sa carrière politique. Il organise les forces armées britanniques et conduit le pays à la victoire contre les puissances de l'Axe. Ses discours et ses paroles frappantes marquent le peuple britannique et les forces alliées.
Après avoir perdu les élections législatives de 1945, il devient chef de l'opposition conservatrice, dénonçant dès 1946 le rideau de fer. Il redevient Premier ministre en 1951, et ce, jusqu'à sa retraite, en 1955. À sa mort, la reine le gratifie d'obsèques nationales, qui seront l'occasion, avec celles du pape Jean-Paul II en 2005, de l'un des plus importants rassemblements d'hommes d'État ayant eu lieu dans le monde.

Origines

Membre de la famille Spencer, renommée pour la participation de plusieurs de ses membres à la vie politique britannique, Winston Leonard Spencer-Churchill utilise, comme son père, le seul nom de Churchill dans la vie publique. Son ancêtre George Spencer a changé son nom de famille pour Spencer-Churchill lorsqu'il est devenu duc de Marlborough, en 1817, pour souligner son lien de parenté avec John Churchill, le premier duc de Marlborough. Son père, Randolph, est le fils cadet du 7e duc de la lignée. En vertu du droit d'aînesse, il n'est pas l'héritier du château familial, le palais de Blenheim, et ses enfants ne peuvent pas porter le titre de Lord. En 1874, lorsque Randolph Churchill épouse Jennie Jerome, fille du millionnaire américain Leonard Jerome, c'est un homme politique prometteur. Sa carrière est cependant brève, car il meurt prématurément à 46 ans, laissant sa famille démunie.
Par ses ascendants, Winston Churchill a des liens privilégiés avec la France, ce qui explique qu'à l'instar de sa mère, il estt francophile et parle très tôt et assez correctement le français. La grand-mère maternelle de Winston Churchill est une Américaine francophile et francophone, aimant les mondanités et ayant vécu à Paris de 1867 à 1873 où elle a connu les fastes de la cour impériale de l'impératrice Eugénie : elle y était familière au point de recevoir le surnom de Jeannette. On compte dans la généalogie de Winston Churchill des ascendants français à la fois du côté de son père et de sa mère : son grand-père maternel est issu d'une famille huguenote française immigrée aux États-Unis ; du côté paternel, l'un des ancêtres des Churchill est le fils d'Othon de Leon, châtelain de Gisors, qui a servi Guillaume le Conquérant et s'est établi en Angleterre après la bataille d'Hastings à laquelle il a participé.

Sa vie

Winston Leonard Spencer-Churchill naît au bout de sept mois et demi de grossesse dans la nuit du 29 au 30 novembre 1874, à 1 h 30. C'est donc un prématuré, mis au monde par sa mère dans les vestiaires du palais de Blenheim, celui-là même où il rencontrera plus tard sa future épouse, ce qui est à l'origine de cet aphorisme resté fameux : C'est à Blenheim que j'ai pris les deux décisions les plus importantes de ma vie, celle de naître et celle de me marier. Je n'ai regretté aucune des deux !. Randolph et Jennie ont un second enfant en 1880, John Strange, dont la fille Clarissa épousera Anthony Eden. Une rumeur court après cette naissance quant à la paternité de ce frère cadet, les parents étant séparés depuis quelque temps lors de sa venue au monde. La mère ayant la réputation d'être très frivole, on soupçonne ce deuxième enfant d'être le fils de John Strange Jocelyn, 5e comte de Roden.

Comme il est d’usage dans les familles nobles de l'époque, Winston est confié à une nourrice, Elizabeth Anne Everest, qui sera ensuite celle de son frère. Ses parents ne le voient que rarement et ont des rapports distants, bien qu'aimants. Son père étant occupé par sa carrière politique, et sa mère par ses mondanités, cela renforce l'isolement du jeune Winston. Ce manque de contact avec ses parents le rapproche de sa nourrice qu'il prend l'habitude d'appeler Woomany, et dont il garde jusqu'à la fin de sa vie un portrait dans son bureau. Il passe ses deux premières années au château familial de Marlborough. En janvier 1877, son père accompagne son grand-père à Dublin, où il vient d'être nommé vice-roi d'Irlande ; Winston le suit, y passe près de trois ans avant que ses parents ne reviennent à Londres, dans la maison familiale de St James Place en mars 1880. Il y apprend à lire, car il ne fréquente pas l'école jusqu'à l'âge de sept ans, mais suit des cours chez lui avec l'aide de sa nourrice.

Churchill entre à l'école à l'âge de sept ans. Il est placé en octobre 1881 dans la prestigieuse St. George's School d'Ascot. Il a très peu d'argent de poche et vit très difficilement cette première séparation d'avec sa famille. Sa mère, alors connue sous le nom de Lady Randolph, ne lui rend visite que très rarement, malgré les lettres dans lesquelles Winston la supplie de venir ou de lui permettre de retourner à la maison. Il a une relation distante avec son père avec lequel il note qu'il n'a presque jamais de conversation. Ce manque d'affection l'endurcit, il en est conscient et est persuadé que ce qu'il perd étant jeune le servira étant vieux. Le régime dur et discipliné de cette école lui déplaît et ne lui réussit pas : très franc mais fait des bêtises est la première appréciation que laissent les professeurs. Plus tard sa nourrice Elizabeth Anne Everest s'aperçoit que des blessures ont été infligées à Winston, et elle alerte les parents qui le changent d'école. À 9 ans, en septembre 1884, il est placé dans un pensionnat moins strict, celui des Demoiselles Thomson de Brighton où il demeure jusqu'en 1888 sans subir de mauvais traitements. Son père décide de lui faire faire une carrière militaire, car ses résultats scolaires ne sont pas assez bons pour envisager une carrière politique ou même ecclésiastique. Lui-même a fait ses classes à Eton, la meilleure école du pays, mais Winston doit se contenter de Harrow School, la grande rivale, moins cotée. Il y entre le 17 avril 1888 à l'âge de 14 ans et y reste jusqu'à ses 18 ans. Dans les semaines suivant son arrivée, il rejoint le Harrow Rifle Corps. Il obtient des notes élevées en anglais et en histoire et obtient un titre de champion d'escrime de l'école. À 18 ans, il prépare son entrée à l'Académie royale militaire de Sandhurst, mais le concours du Royal Military College est extrêmement difficile. Churchill paie alors ses mauvaises années d'études : il échoue deux fois de suite. Même s'il a progressé entre les deux tentatives de manière plutôt spectaculaire, il est déçu et demande à ses parents dépités d'envisager une carrière ecclésiastique. Lors de sa troisième tentative, il doit absolument réussir, sinon il devra se réorienter. Winston fait valoir à ses parents que la scolarité à Harrow n'est pas adaptée pour Standhurst puisque seuls 1 % des reçus de Sandhurst en sont issus. Ses parents soucieux de sa réussite lui paient alors des cours dans un institut privé spécialisé : le Captain James Establishment, ce qui lui réussit : il est admis à l'Académie militaire de Sandhurst le 28 juin 1893. C'est un grand jour dans la vie du jeune Churchill, même s'il n'est reçu que 92e sur 102.

Churchill se décrit comme affligé d'un défaut d'élocution. Après avoir travaillé de longues années à le surmonter, il a finalement déclaré : mon défaut n'est pas une entrave. On présente souvent aux stagiaires orthophonistes des cassettes vidéo montrant les manies de Churchill pendant ses discours, et la Stuttering Foundation of America présente sa photo sur sa page d'accueil comme l'un de ses modèles de bègues ayant réussi. Si des écrits contemporains des années 1920, 1930 et 1940 confirment ce diagnostic de bégaiement, le Churchill Centre, cependant, réfute catégoriquement l'allégation selon laquelle Churchill ait été affecté de ce défaut : il aurait eu un bredouillement, voire un zézaiement et une certaine difficulté à prononcer la lettre S, tout comme son père.
Churchill se marie relativement tard à presque 34 ans. Jusqu'à sa rencontre avec sa femme, il estime qu'il n'a pas le droit de folâtrer dans les plaisantes vallées des distractions car son seul bien est son ambition : Et si je n'y arrivais pas ! Quelle chose affreuse ! J'en aurais le cœur brisé, car je n'ai que l'ambition à quoi me raccrocher. Il n'est pas réellement à l'aise avec les femmes – hors celles de sa famille – et pense que les Américaines sa mère est américaine tyrannisent leur mari. Pour Violet Bonham Carter, son attitude à leur égard était fondamentalement romantique ... il les paraît de toutes les vertus cardinales. Pour son biographe William Manchester, il fait partie du genre de phallocrates qui font une cible de choix pour les féministes. De fait, les suffragettes, notamment Emmeline Pankhurst, perturbent assez régulièrement ses meetings électoraux.
Churchill rencontre sa future épouse, Clementine Hozier, en 1904, lors d'un bal chez le comte de Crewe et sa femme Margaret Primrose. En 1908, ils sont de nouveau réunis lors d'un dîner offert par Lady St. Helier. Churchill et Clementine sont placés côte à côte et entament bientôt une histoire d'amour qui durera toute leur vie. Il lui demande sa main au cours d'une house party au palais de Blenheim le 10 août 1908 dans le temple de Diane, la maison d'été du palais. Ils sont mariés le 12 septembre 1908 en l'église St. Margaret à Westminster, comble pour l'occasion, par l'évêque de St. Asaph. En mars 1909, le couple emménage dans une maison au 33 Eccleston Square, dans le quartier de Pimlico. Clementine Churchill est libérale au sens anglo-saxon du terme. Elle est un peu jalouse de Violet Bonham Carter – fille du Premier ministre Herbert Henry Asquith et grand-mère de l'actrice Helena Bonham Carter – qui est, après elle, l'autre grande amie de Churchill. Elle reste néanmoins plus pondérée que son mari et pour François Bédarida a un bien meilleur jugement que lui aussi bien sur les hommes que sur les situations. Si les femmes qui lui sont proches sont politiquement libérales, par contre, entre lui et la députée conservatrice Nancy Astor, l'inimitié est aussi forte que réciproque. Lors d'une réception donnée par sa cousine par alliance Consuelo Vanderbilt où il est arrivé à l'improviste - elle évite de les inviter ensemble - se produit une anecdote demeurée célèbre. À Nancy Astor lui disant : Si vous étiez mon mari, j'empoisonnerais votre café !, Churchill répond : Et si vous étiez ma femme, je le boirais.

Leur premier enfant, Diana, naît le 11 juillet 1909 à Londres. Après la grossesse, Clementine déménage dans le Sussex afin de se reposer, tandis que Diana reste à Londres avec sa nourrice. Le 28 mai 1911, leur deuxième enfant, Randolph, naît au 33 Eccleston Square. Un troisième enfant, Sarah, naît le 7 octobre 1914 à Admiralty House. Clementine est anxieuse, car Winston est alors à Anvers, envoyé par le Conseil des ministres pour renforcer la résistance de la ville assiégée après l'annonce de l'intention belge de capituler. Clementine donne naissance à son quatrième enfant, Frances Marigold Churchill, le 15 novembre 1918, quatre jours après la fin officielle de la Première Guerre mondiale. Celle-ci ne vit que deux ans et demi : au début du mois d'août, les enfants Churchill sont confiés à Mlle Rose, une gouvernante française, dans le comté de Kent pendant que Clementine est à Eaton Hall pour jouer au tennis avec Hugh Grosvenor, 2e duc de Westminster, et sa famille. Marigold attrape un rhume, d'abord sans gravité, mais qui évolue en septicémie. La maladie emporte Marigold le 23 août 1921. Elle est enterrée dans le cimetière de Kensal Green trois jours plus tard. Le 15 septembre 1922 naît Mary, le dernier de leurs enfants. Après quelques jours, les Churchill achètent Chartwell, qui devient la maison de Winston jusqu'à sa mort en 1965. Les enfants, à l'exception de Mary, ne leur apportent que peu de satisfaction.

Le sous-lieutenant correspondant de guerre

À l'Académie royale militaire de Sandhurst, Churchill reçoit son premier commandement dans le 4th Queen's Own Hussars en tant que sous-lieutenant le 20 février 1895. Il juge que son salaire de sous-lieutenant, de 300 livres sterling par an, est insuffisant pour avoir un style de vie équivalent à celui des autres officiers du régiment. Il estime avoir besoin de 500 £, soit l'équivalent d'environ 34 000 £ en 2013. Sa mère lui fournit une rente de 400 £ par an, mais il dépense plus qu'il ne gagne. Selon le biographe Roy Jenkins, c'est une des raisons pour lesquelles il devient correspondant de guerre. Il n'a pas l'intention de suivre une carrière classique en recherchant les promotions, mais bien d'être impliqué dans l'action. À cette fin, il utilise l'influence de sa mère et de sa famille dans la haute société pour avoir un poste dans les campagnes en cours. Ses écrits de correspondant de guerre pour plusieurs journaux de Londres8 attirent l'attention du public, et lui valent d'importants revenus supplémentaires. Ils constituent la base de ses livres sur ces campagnes. Toutefois, comme ses écrits montrent à la fois son ambition et des critiques de l'armée, ils lui attirent une certaine hostilité et une réputation de chasseur de médailles et de coureur de publicité. Pour W. Manchester, il n'éprouvait aucun intérêt pour la carrière militaire, et avait l'intention de se servir de son passage dans l'armée pour favoriser ses desseins politique.

Trois événements importants pour Churchill surviennent lors de l'année 1895 : les décès de son père et de Mrs Everest, sa nourrice, ainsi que son baptême du feu à Cuba.

La mort de Randolph Henry Spencer Churchill

Souffrant de syphilis, incurable à cette époque, depuis au moins 1885, le père de Winston décède le 24 janvier 1895 à l'âge de 46 ans. Sa mort affecte bien sûr Winston car elle le prive d'un soutien important pour sa future carrière, mais cela marque également pour lui le début de la liberté : son père n'impose plus ses choix et Winston peut donc faire ce qu'il veut. De plus, de nombreux ancêtres mâles du jeune Winston étant décédés à peu près à cet âge, il croit pendant longtemps que ses propres jours sont alors comptés. Aussi, lorsqu'il passe le cap des cinquante ans, il en conçoit une immense joie, et a en quelque sorte le sentiment que tout lui est permis5. Le jeune Winston vouait une immense admiration à son père Randolph alors même que ce dernier prenait son fils pour un attardé. Pourtant, lorsque plus tard Winston accède à de hautes fonctions gouvernementales, c'est à son père qu'il pense avec émotion.

La mort de Mrs Everest

En juillet, un message l'informe que sa nourrice, Mrs Everest, est mourante. Il retourne alors en Angleterre et reste auprès d'elle pendant une semaine, jusqu'à sa mort le 3 juillet, à 62 ans. Il écrit dans son journal : Elle était mon amie préférée. Dans My Early Life, il ajoute : Elle a été ma plus chère et ma plus intime amie pendant les vingt ans que j'ai vécus. Après avoir été la nourrice dévouée de Winston et son frère, elle a été congédiée brutalement et meurt dans la misère. Churchill organise ses obsèques tandis que Lady Randolph ne se déplace même pas pour l'enterrement. Il s'en souviendra lors de la loi de 1908 sur la retraite à 70 ans.

Le baptême du feu à Cuba

Le 20 février 1895, Winston sort diplômé de Sandhurst et à une place honorable : il est vingtième. Il est placé à sa demande dans le 4th Queen's Own Hussars du colonel Brabazon au camp d'Aldershot, car il sait que ce corps va partir pour les Indes en 1896, et il espère y faire l'expérience du combat. Le jeune Winston, qui pense que les succès militaires sur le terrain sont un gage de succès politique, est impatient d'aller au combat. Disposant de temps libre avant de rejoindre son affectation, il est envoyé avec son ami Reginald Barne, par le journal le Daily Graphic à Cuba où les Espagnols sont confrontés à une insurrection. Pour ce faire, il a obtenu l'aval du commandement britannique et du directeur du service du renseignement militaire. Le trajet aller est pour lui son premier grand voyage car il n'a jusqu'alors visité que la France et la Suisse. La première étape est New York, occasion pour lui de fouler le sol américain pour la première fois et de rendre visite à sa famille maternelle et ses amis. Pendant son séjour, il demeure chez William Bourke Cockran, l'amant de sa mère. Bourke est un homme politique américain établi, membre de la Chambre des représentants, potentiel candidat à l'élection présidentielle. Il influence fortement Churchill dans son approche des discours et de la politique, et fait naître en lui un sentiment de tendresse envers l'Amérique. Arrivé à Cuba comme journaliste pour couvrir la Guerre d'indépendance cubaine, il suit les troupes du colonel Valdez et à son vingt-et-unième anniversaire il s'offre un baptême du feu. Il apprécie Cuba : il la décrit comme une ...grande, riche, belle île... . Il y prend goût aux habanos, ces cigares cubains qu'il fume jusqu'à la fin de sa vie.

Officier aux Indes

Au début du mois d'octobre 1896, Churchill est transféré à Bombay, en Inde britannique. Considéré comme l'un des meilleurs joueurs de polo de son régiment, il mène son équipe à la victoire lors de nombreux tournois prestigieux.
Aux environs de Bangalore où il est affecté en 1896 avec les 4th Queen's Own Hussars, il dispose de temps libre qu'il met à profit pour lire. Il lit d'abord des livres d'histoire : Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain d'Edward Gibbon et l'Histoire de Thomas Babington Macaulay – des auteurs assez peu conservateurs; des philosophes grecs : Platon, notamment La République, ainsi que les écrits politiques d'Aristote. Parmi les auteurs français, il lit Les Provinciales de Blaise Pascal et les Mémoires de Saint-Simon. Il lit aussi La richesse des Nations d'Adam Smith, Schopenhauer, Malthus et bien d'autres. Il en tire une très profonde culture historique qui le servira toute sa vie. Il est fortement impressionné par le darwinismecdv. Il devient alors, selon ses propres termes, un matérialiste jusqu'au bout des doigts, et défend avec ferveur sa conception d'un monde où la vie humaine est une lutte pour l'existence, avec pour résultat la survie des plus forts. Cette vision a sans doute été influencée par le livre Martyrdom of Man de William Winwood Reade, un classique de l'athéisme victorien, présentant la vision d'un univers sans Dieu dans lequel l'humanité est destinée à progresser par le biais du conflit entre les races les plus avancées et les plus rétrogrades. Churchill exprime cette philosophie de vie et de l'histoire dans son premier et unique roman, Savrola. Toutefois, cet agnosticisme est peu affiché et il participe parfois à des services religieux. Il a également eu une action importante en faveur du christianisme anglican dans le Commonwealth, notamment à Bangalore où l'Église anglicane a joué un rôle de premier plan à ses côtés dans les cantonments.

Premiers combats au Malakand

Carte des possessions coloniales britanniques en Inde. Le Malakand est sur la frontière du nord-ouest à la limite de la zone du Grand Jeu.
En 1897, Churchill part à nouveau à la fois pour des reportages et, si possible, pour combattre durant la guerre gréco-turque : le conflit prend toutefois fin avant son arrivée. Lors d'une permission en Angleterre, il apprend que trois brigades de l'armée britannique vont se battre contre une tribu de pachtounes, et demande à son supérieur hiérarchique l'autorisation de se joindre au combat. Placé sous les ordres du général Jeffery, commandant de la deuxième brigade opérant au Malakand, dans l'actuel Pakistan, il est envoyé avec quinze éclaireurs reconnaître la vallée des Mamund, où, rencontrant une tribu ennemie, ils descendent de leurs montures et ouvrent le feu. Après une heure de tirs, des renforts du 35e Sikhs arrivent et les tirs cessent peu à peu ; la brigade et les Sikhs reprennent leur avance. Plus tard des centaines d'hommes de la tribu leur tendent une embuscade et ouvrent le feu, les forçant à battre en retraite. Quatre hommes, qui transportent un officier blessé, doivent l'abandonner devant l'âpreté du combat. L'homme laissé à l'arrière est tailladé à mort sous les yeux de Churchill. Il écrit à propos de l'événement : j'ai oublié tout le reste, à l'exception de la volonté de tuer cet homme. Les troupes sikhs diminuent, et le commandant suppléant ordonne à Churchill de mettre le reste des hommes en sécurité. Churchill demande une confirmation écrite pour ne pas être accusé de désertion et, ayant reçu la note demandée, rapidement signée, il escalade la colline puis alerte une des autres brigades, qui engage l'ennemi. Les combats dans la zone durent encore deux semaines avant que les morts ne puissent être récupérés. Churchill écrit dans son journal : que cela en valait la peine je ne peux pas dire. Son compte-rendu de la bataille est l'un de ses premiers récits publiés, pour lequel il reçoit cinq livres sterling par colonne dans le Daily Telegraph. Un compte-rendu du siège de Malakand est publié en décembre 1900 sous le titre de The Story of the Malakand Field Force et lui rapporte 600 livres sterling. Au cours de cette campagne, il écrit également des articles pour le journal The Pioneer. Sa grande récompense, alors que jusque-là il n'a presque toujours reçu que des reproches, tant de ses parents que de ses enseignants, est qu'il se voit décerner des éloges publics et privés. Le Prince de Galles, ami de sa mère et futur Édouard VII, lui écrit : je ne puis résister à l'envie de vous écrire quelques lignes pour vous féliciter du succès de votre livre.

Churchill est transféré en Égypte en 1898, où il visite Louxor, avant de rejoindre un détachement du 21st Lancers servant au Soudan sous le commandement du général Herbert Kitchener. Durant son service, il rencontre deux officiers avec lesquels il est amené à travailler plus tard, au cours de la Première Guerre mondiale : Douglas Haig, alors capitaine et David Beatty, alors lieutenant d'une canonnière. Au Soudan, il participe à ce qui est décrit comme la dernière véritable charge de cavalerie britannique, à la bataille d'Omdurman, en septembre 1898. Il travaille également comme correspondant de guerre pour le Morning Post. En octobre, rentré en Grande-Bretagne, il commence son ouvrage en deux volumes The River War, un livre sur la reconquête du Soudan publié l'année suivante.
Churchill démissionne de l'armée britannique le 5 mai 1899 pour se présenter au Parlement comme candidat conservateur à Oldham, lors de l'élection partielle de la même année, mais il perd en n'étant que troisième pour deux sièges à pourvoir.

La guerre des Boers et la notoriété

Après l'échec électoral d'Oldham, Churchill cherche une autre occasion de faire progresser sa carrière. Le 12 octobre 1899, la Seconde Guerre des Boers entre la Grande-Bretagne et les républiques boers éclate. Il obtient une commission pour agir en tant que correspondant de guerre pour le Morning Post avec un salaire de 250 £ par mois. Il a hâte de naviguer sur le même bateau que le nouveau commandant britannique, Redvers Buller. Après quelques semaines dans les zones exposées, il accompagne une expédition d'éclaireurs dans un train blindé, au cours de laquelle il est capturé par les hommes du raid dirigé par Piet Joubert et Louis Botha sur la colonie du Natal, et envoyé dans un camp de prisonniers de guerre à Pretoria. Son attitude pendant l'embuscade du train fait évoquer une éventuelle obtention de la Croix de Victoria, plus haute distinction de la Grande-Bretagne décernée pour bravoure face à l'ennemi, mais cela ne se produit pas. Cette même attitude lui vaut plus tard d'être emprisonné, alors qu'il n'est que civil. Les dirigeants boers se félicitent d'avoir ainsi pu s'emparer d'un Lord. Dans London to Ladysmith via Pretoria, un recueil de ses rapports écrits tout au long de cette guerre, il décrit l'expérience :
J'avais eu, durant les quatre dernières années, l'avantage, si c'est un avantage, de plusieurs expériences étranges et variées, desquelles l'étudiant des réalités pourrait tirer profit et enseignement. Mais rien n'était aussi saisissant que cela : attendre et lutter dans ces boîtes en fer résonnantes, déchirées, avec les explosions répétées des obus et de l'artillerie, le bruit des projectiles frappant les wagons, le sifflement alors qu'ils passaient dans l'air, le grognement et le halètement du moteur — pauvre chose torturée, martelée par au moins douze obus, dont chacun, en pénétrant dans la chaudière, aurait pu mettre fin à tout cela − l'attente de la destruction apparemment proche, la prise de conscience de l'impuissance, et les alternances d'espoir et désespoir − tout cela en soixante-dix minutes montre en main, avec seulement dix centimètres d'un blindage de fer tordu pour faire la différence entre le danger, la captivité et la honte, d'un côté − la sécurité, la liberté et le triomphe, de l'autre.
Il demande à plusieurs reprises sa libération à Piet Joubert en arguant de son statut civil. Finalement, il s'échappe du camp de prisonniers quelques heures avant que sa libération ne lui soit accordée, et parcourt près de 480 km jusqu'à la ville portugaise de Lourenço Marques dans la baie de Delagoa. Quittant Pretoria vers l'est, il est un temps caché dans une mine des environs de l'actuelle Witbank par un responsable de mines anglais ; il gagne ensuite Lourenço Marques dissimulé dans un train emportant des balles de laine. Son évasion lui vaut un moment l'attention du public et en fait un quasi-héros national en Grande-Bretagne, d'autant qu'au lieu de rentrer chez lui, il rejoint l'armée du général Buller qui après avoir secouru les Britanniques encerclés à Ladysmith prend Pretoria. Cette fois-ci, bien que toujours correspondant de guerre, Churchill reçoit un commandement dans le South African Light Horse. Il s'illustre notamment à la bataille de Spion Kop et, avec son cousin Charles Spencer-Churchill dans la libération du camp de prisonniers de Prétoria.
En juin 1900, après s'être une dernière fois fait remarquer à la bataille de Diamond Hill, Churchill retourne en Angleterre à bord du RMS Dunottar Castle, le même navire qui l'a emmené en Afrique du Sud, huit mois plus tôt. Il publie London to Ladysmith et un deuxième volume sur ses expériences de la guerre des Boers, La Marche de Ian Hamilton. Cette fois, il est élu en 1900 à Oldham, lors des élections générales, à la Chambre des Communes, et entreprend une tournée de conférences en Grande-Bretagne, suivie par des tournées aux États-Unis et au Canada. Ses revenus dépassent désormais 5 000 £ annuels.
Ayant quitté l'armée régulière en 1900, Churchill rejoint l'Imperial Yeomanry en janvier 1902 en tant que capitaine des Queen's Own Oxfordshire Hussars. En avril 1905, il est promu major et nommé au commandement de l'escadron Henley du Queen's Own Oxfordshire Hussars. C'est également à cette époque qu'il rencontre sa future femme.

Entrée en politique

La politique est presque aussi excitante que la guerre, et tout aussi dangereuse – à la guerre vous pouvez être tué une fois seulement, en politique plusieurs.
Après son échec initial à devenir Member of Parlement en 1899, Churchill se représente pour le siège d'Oldham aux élections générales de 1900. Soutenu par sa notoriété familiale et son statut de héros de la guerre des Boers, il remporte le siège. Il entame alors une tournée en Grande-Bretagne, aux États-Unis et au Canada où il participe à des conférences, qui lui rapportent 10 000 £. Au Parlement, il s'associe à une faction du Parti conservateur dirigée par Lord Hugh Cecil, les Hughligans, qui sont opposés au leadership de Balfour. Au cours de sa première session parlementaire, il s'oppose aux dépenses militaires du gouvernement et à la proposition de Joseph Chamberlain d'augmenter les droits de douane pour protéger l'industrie anglaise. À cette même époque, il lit une étude de Rowentree sur la pauvreté en Angleterre qui le touche beaucoup. De 1903 à 1905, il s'attache également à écrire Lord Randolph Churchill, une biographie de son père en deux volumes, publiée en 1906, qui reçoit de nombreuses critiques élogieuses.
De 1903 à 1905, le pays traverse une phase où les conservateurs, autour de Joseph Chamberlain, préconisent une politique protectionniste basée sur la préférence impériale et se heurtent à l'opposition des libéraux. Churchill se fait un des champions du libre-échange et en mars 1904, attaque une loi protectionniste sur le sucre. Son discours est remarqué par le chef du parti libéral Henry Campbell-Bannerman qui lui envoie une invitation qu'il accepte. Pour Roy Jenkins, ce choix de Churchill est un peu paradoxal. En effet l'homme qui l'invite est alors considéré comme un Little Englander, ou anti-impérialiste, quand il y a alors au parti libéral des liberal imperialists tels Asquith, Grey ou Haldane, dont on pourrait le croire plus proche. Quoi qu'il en soit, il décide, à la Pentecôte 1904, de quitter son parti afin de rejoindre les bancs du Parti libéral, restant député d'Oldham jusqu'à la fin du mandat. En décembre 1905, les libéraux renversent le gouvernement et Henry Campbell-Bannerman devient Premier ministre. Il nomme Churchill Sous-secrétaire d'État aux Colonies, avec pour mission de s'occuper principalement de l'Afrique du Sud après la guerre des Boers. À ce poste, il doit défendre Alfred Milner accusé d'avoir admis des Chinois en Afrique du Sud sans base légale. Pour le défendre, il dit de celui qui sera membre du Cabinet de guerre de 1916 à un moment où cet honneur est formellement refusé à Churchill, qu'il est un homme du passé.

Passage au parti libéral, réforme sociale et bras de fer avec l'aristocratie

Rejeté par les conservateurs d'Oldham, notamment en raison de son soutien au libre-échange, Churchill est invité à se présenter pour les libéraux dans la circonscription de Manchester Nord-Ouest. Il remporte le siège aux élections générales de 1906 avec une majorité de 1 214 voix, et représente la circonscription pendant deux ans, jusqu'en 1908. Lorsque Herbert Henry Asquith devient la même année Premier ministre à la place de Campbell-Bannerman, Churchill est promu au Cabinet en tant que ministre du Commerce. Il doit en partie ce poste à un article sur les réformes sociales intitulé Un domaine inexploré en politique rédigé après des rencontres avec Beatrice Webb, membre influente de la Fabian Society ainsi qu'avec William Beveridge. Il puise aussi son inspiration dans les idées de Lloyd George et dans l'expérience sociale allemande. Comme le veut la loi à l'époque, il est obligé de solliciter un nouveau mandat lors d'une élection partielle ; Churchill perd son siège, mais revient rapidement député de la circonscription de Dundee.
Comme ministre du Commerce, il se joint au nouveau Chancelier Lloyd George pour s'opposer au Premier Lord de l'Amirauté Reginald McKenna, et à son programme coûteux de construction de vaisseaux de guerre dreadnought, ainsi que pour soutenir les réformes libérales. En 1908, il présente le projet de loi qui impose pour la première fois un salaire minimum en Grande-Bretagne. En 1909, il crée les bourses de l'emploi pour aider les chômeurs à trouver du travail. Il participe aussi à la rédaction de la première loi sur les pensions de chômage, et du National Insurance Act de 1911, fondement de la sécurité sociale au Royaume-Uni. Pour Élie Halévy, Churchill et Lloyd George veulent que le parti libéral adopte ce programme pour empêcher les travaillistes de gagner du terrain sur la gauche.
Ce programme se heurte à une vive opposition de l'aristocratie car le People's BudgetJe 21 de 1909 comporte une augmentation des droits de succession. Si cette réforme qui ne touche que ceux qui gagnent plus de 3 000 £ par an ne concerne que 11 500 Anglais, ce sont précisément ceux qui gouvernent. Aussi, la Chambre des Lords met son veto. Churchill est alors attaqué par les milieux conservateurs qui se répandent en propos hostiles tant envers lui qu'envers sa famille qui n'aurait jamais donné naissance à un gentleman. Pour résoudre la crise, le Premier ministre demande la dissolution du Parlement. Les libéraux réélus sont majoritaires avec le soutien du parti travailliste et d'un parti irlandais. La Chambre des Lords sous la pression de Lloyd George adopte durant l'été 1911 une loi qui limite ses pouvoirs.

Ministre de l'Intérieur

Churchill est réélu en 1909 et fait part de son désir de briguer soit le poste de Premier Lord de l'Amirauté soit celui de ministre de l'Intérieur. Les libéraux le nomment à l'Intérieur en raison de son image de fermeté. C'est un poste à haut risque pour lui, car s'il est maintenant détesté par les conservateurs, la gauche du parti libéral ne l'aime pas plus. Pour les uns, c'est un traître à l'aristocratie, et pour les autres, c'est un aristocrate qui fait semblant d'être social. Churchill voit son action à ce poste mise à mal en trois occasions : le conflit minier cambrien, le siège de Sidney Street et les premières actions des suffragettes.
En 1910, un certain nombre de mineurs de charbon dans la vallée de Rhondda commencent la manifestation connue sous le nom d'émeute de Tonypandy. Le chef de police de Glamorgan demande à ce que des troupes soient envoyées afin d'aider la police à réprimer les émeutes. Churchill, apprenant que celles-ci sont déjà en route, leur permet d'aller jusqu'à Swindon et Cardiff, mais interdit leur déploiement. Le 9 novembre, le Times critique cette décision. En dépit de cela, la rumeur dans les milieux ouvriers et travaillistes persiste que Churchill a ordonné aux troupes d'attaquer : sa réputation au Pays de Galles et dans les milieux travaillistes y est alors définitivement ternie. En somme, pour la gauche il a été trop dur et pour la droite trop mou. Lui estime qu'il a fait son travail.
Au début du mois de janvier 1911, Churchill fait une apparition controversée au siège de Sidney Street, une opération ayant pour but d'arrêter les auteurs d'un braquage, des révolutionnaires armés et retranchés, semblables à ceux de la bande à Bonnot, à Londres. Il y a une certaine incertitude quant à savoir s'il y a donné des commandements opérationnels. Sa présence, photographiée, attire beaucoup de critiques. Après enquête, Arthur Balfour fait remarquer : lui, Churchill et un photographe risquaient tous les deux leurs précieuses vies. Je comprends ce que faisait le photographe, mais qu'y faisait le très honorable gentleman ? Un biographe, Roy Jenkins, suggère qu'il y est tout simplement allé parce qu' il n'a pas pu résister à l'envie d'aller voir par lui-même » et qu'il n'a pas donné d'ordre. En réalité, derrière la mise en cause de son comportement se cache un problème plus politique. En effet, l'affaire a lieu dans le quartier de Whitechapel où résident de nombreux réfugiés politiques. Joseph Staline y vit par exemple en juin 1907. Les libéraux ont refusé en 1905 de restreindre cette forme d'immigration et les hommes cernés sont membres d'un gang dirigé par un réfugié letton ce qui vaut à Churchill d'être là encore critiqué tant par la droite qui le trouve trop laxiste que par la gauche.
La solution que propose Churchill à la question des suffragettes est un référendum, mais cette idée n'obtient pas l'approbation de Herbert Henry Asquith, et le droit de vote des femmes reste en suspens jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale.
Tous ces évènements mènent le Premier ministre à le nommer Premier Lord de l'Amirauté où il a besoin d'un homme capable de s'imposer face à l'état-major de la Marine.

Le Premier Lord de l'Amirauté et la préparation de la guerre

Début 1911, Churchill est nommé Premier Lord de l'Amirauté. Son premier geste est de prendre pour conseiller l'ancien amiral John Arbuthnot Fisher, le concepteur des dreadnoughts, qui le pousse à accélérer le passage de la propulsion au charbon à celle au fioul sur les bâtiments de la Royal Navy. Pour assurer l'approvisionnement en pétrole, le gouvernement britannique devient l'actionnaire principal de l'Anglo-Persian Oil Company. Fischer lui transmet aussi ses idées concernant la nécessité d'avoir des canons de plus en plus gros calibre, donnant naissance à la première classe de super-dreadnoughts de la marine britannique, la classe Queen Elizabeth. Sur le plan social, il veille à l'amélioration des conditions de vie des marins non officiers. Il s'occupe ensuite de trouver un successeur au Premier Lord de la Mer, Arthur Wilson – c'est surtout pour cela que Churchill a été nommé à ce poste. En effet, Arthur Wilson s'oppose à la création d'un état-major de guerre naval. Il nomme à sa place Francis Bridgeman, et comme Second Lord de la Mer, le prince Louis Alexandre de Battenberg. Fin 1913, il propose à l'Allemagne des vacances navales, c'est-à-dire une trêve dans la construction de bateaux de guerre. Devant le refus de l'Empereur Guillaume II, il présente un projet de budget pour la marine de 50 millions de livres sterling. Pour lui « La marine anglaise est une nécessité » pour les Anglais alors que pour les Allemands, la marine est un luxe. Les dépenses consacrées à la marine provoquent une polémique avec les libéraux, particulièrement avec Lloyd George alors Chancelier de l'Échiquier. Après tractation, Churchill obtient satisfaction et peut lancer de nouveaux cuirassés. Il favorise également le développement de l'aviation navale, prend lui-même des leçons pour être pilote et est l'artisan du développement des chars d'assaut.
Churchill reste attaqué à la fois par les conservateurs et par des membres son propre parti. Aussi, quand le Premier ministre Herbert Henry Asquith propose la Home Rule, c'est-à-dire un projet, sinon d'indépendance, du moins de large autonomie de l'Irlande en 1912, il le soutient sans réserve. Cela du fait que d'une part, il faut selon lui satisfaire les députés irlandais qui ont permis la victoire des libéraux dans le bras de fer concernant la Chambre des lords, et d'autre part car il s'est déclaré favorable au projet dès 1910. Comme Asquith a désigné Churchill comme son principal porte-parole sur le sujet, l'essentiel de la polémique avec les conservateurs et les protestants d'Ulster repose sur ses épaules, ce qui renforce le ressentiment des milieux conservateurs et de leur chef Andrew Bonar Law à son égard.
En juillet 1914, Churchill empêche les Turcs de prendre possession de deux bateaux qu'ils ont pourtant payés, les poussant ainsi à se ranger du côté des Allemands. À cette même période, Churchill reçoit Albert Ballin, président de la Hamburg America Line et chef du lobby maritime allemand, qui s'inquiète de l'aggravation de la crise et l'implore presque les larmes aux yeux de ne pas faire la guerre. Le 1er août, il prévient le Premier ministre Asquith qu'il va rappeler 40 000 réservistes. Le chancelier de l'Échiquier Lloyd George s'y oppose violemment, considérant cette décision comme une provocation contre l'Allemagne. Cependant, avec l'accord tacite d'Asquith, Churchill passe outre : tous deux savent qu'Andrew Bonar Law, le leader conservateur, est partisan de l'intervention aux côtés de la France. Aussi, quand le Cabinet se réunit de nouveau, les opposants à l'intervention se soumettent ou démissionnent, comme le fait John Simon. Cette mobilisation préventive a grandement facilité l'envoi d'un ultimatum à l'Allemagne par Edward Grey, le Secrétaire d'État des Affaires étrangères, qui exige l'évacuation de la Belgique par l'armée allemande, qui vient alors de l'attaquer.

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Posté le : 29/11/2014 21:02
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Les débuts de la guerre

HMS Queen Elizabeth à Alexandrie, La classe Queen Elizabeth, armée de canon de 15 pouces est lancée à l'initiative de Churchill.
Si Churchill est l'un des seuls ministres à s'être réjoui du début du conflit, il doit très vite déchanter. Deux sous-marins allemands coulent chacun trois croiseurs anglais, l'un au large de la Hollande les HMS Aboukir, Hogue, Cressy, l'autre dans la base navale de Scapa Flow HMS Hawke, Audacious et Formidable. Churchill ayant fait sortir la flotte de cette base pour ne pas l'exposer, trois croiseurs allemands bombardent des ports anglais. Enfin, une escadre allemande sillonne l'océan Pacifique et coule de nombreux bateaux de commerce. Lorsqu'une escadre anglaise composée de vieux navires, commandée par l'amiral Christopher Cradock veut les arrêter, elle est envoyée par le fond lors de la bataille de Coronel, l'Amirauté ayant refusé d'envoyer des renforts. Churchill doit faire face à une opinion publique hostile. Le premier Lord naval Louis Alexandre de Battenberg ayant des origines allemandes, le public s'en prend à lui : Churchill et Asquith doivent l'inciter à présenter sa démission. Pour le remplacer, Churchill, malgré les réticences du roi George V, qui a longtemps servi dans la marine, choisit John Arbuthnot Fisher.
Le 5 octobre 1914, Churchill, qui aime l'action, se rend dans la place forte d'Anvers où l'armée belge soutient un siège ponctué de plusieurs sorties contre une importante armée allemande. Le roi Albert Ier et le gouvernement belge souhaitent évacuer tandis que Churchill préfère qu'ils continuent à résister. Churchill en sus de la brigade des Royal Marines qui se trouve sur place envoie les 1re et 2e Naval Brigades. Mais, malgré l'appui de canons de l'artillerie de marine anglaise montés par les Belges sur des wagons plats, les trois lignes de défense de la ville succombent et Anvers est évacuée par l'armée belge le 10 octobre. Parmi les victimes du siège, il y a 500 Anglais. À l'époque, on accuse Churchill d'avoir gaspillé des ressources. Mais il est plus que probable que ses actions ont prolongé la résistance d'Anvers d'une semaine, la Belgique ayant proposé de renoncer à Anvers le 3 octobre et permit de sauver Calais et Dunkerque. En effet, l'armée belge a pu se regrouper avec les forces franco-anglaises dans la région de l'Yser, et participer des 17 au 30 octobre à la bataille de l'Yser qui permet aux alliés de stopper la course à la mer de l'armée allemande bien au-delà de ces deux ports.
Au tournant de 1914-1915, les choses s'améliorent. La Royal Navy commence à renouer avec le succès : elle coule l'escadre allemande qui a ravagé le Pacifique lors de la bataille des Falklands ainsi qu'un croiseur lourd en mer du Nord lors de la bataille de Dogger Bank. Ces succès sont en partie dus à la constitution par Churchill d'une cellule de décryptage des codes secrets, la Room.
L'idée d'un char de combat a déjà été avancée par Herbert George Wells en 1903. Churchill fait en sorte qu'elle devienne une réalité, grâce notamment à des fonds de recherche navale. L'Amirauté nomme ce projet : la folie de Winston. Par la suite, il dirige le Landships Committee, chargé de créer le premier corps de chars d'assaut, ce qui est considéré comme un détournement de fonds même si, une décennie plus tard, le développement du char de combat est porté à son actif.

Bataille des Dardanelles.

Les Dardanelles est un des points clés de l'accès de la Russie à la Méditerranée.
En novembre 1914, les Français et les Britanniques ont déjà perdu presqu'un million d'hommes. Aussi Londres envisage une stratégie de contournement, d'autant que l'Empire ottoman est menaçant tant au Sud, du côté du Canal de Suez, qu'au Nord, contre l'Empire russe dont l'armée est en difficulté . Ce dernier point pousse le ministre de la guerre Lord Kitchener, un militaire de carrière, à se faire l'avocat d'un projet qui aurait également l'avantage d'entraîner la Grèce et peut-être d'autres pays des Balkans dans la guerre, ainsi que de permettre d'avoir accès au blé russe. Churchill, qui alors ne privilégie pas cette hypothèse, reçoit un message de l'amiral Sackville Carden, commandant l'escadre de Méditerranée, qui considère que les Dardanelles pourraient être forcées par des opérations d'envergure mettant en œuvre un grand nombre de navires. À ce moment Winston Churchill se déclare favorable au projet, d'autant que son premier lord naval y est favorable. L'opération est adoptée le 15 janvier 1915 en conseil de guerre. Pourtant ensuite, rien ne va se dérouler comme prévu, en particulier parce que les acteurs, notamment Kitchener et le premier Lord naval Fisher, sont partagés : le premier, parce qu'il doit trancher entre les occidentaux, c'est-à-dire les militaires qui veulent se concentrer sur le front occidental, et les orientaux, qui veulent ouvrir un front en Asie mineure. Le premier lord naval quant à lui hésite, après avoir donné son accord, car il a peur de devoir employer trop de bateaux loin de l'Angleterre qu'il estime devoir protéger en priorité. De ce fait, une opération conçue pour être menée rapidement et de façon déterminée, va se perdre dans des méandres administratifs, laissant aux adversaires le soin de préparer leur défense. Enfin, l'amiral Sackville Hamilton Carden qui a eu l'idée du projet flanche au moment de passer à l'action et doit être soigné. Le problème est que Churchill a fait tant et si bien qu'il passe pour le principal instigateur du projet, et que l'échec va lui être imputé. Une commission d'enquête parlementaire exonère ensuite Churchill et conclut à la responsabilité du Premier ministre Asquith, qui n'a pas fait preuve lors des conseils de guerre de la fermeté nécessaire, et à celle de Kitchener. Mais entre temps, Churchill a dû démissionner de l'Amirauté le 11 novembre 1915.

Les conséquences des Dardanelles pour Churchill

Il se voit attribuer une grande part de responsabilité de l'échec, et, lorsque le Premier ministre Asquith forme une coalition comprenant tous les partis, les conservateurs réclament sa rétrogradation comme condition à leur participation. Ce retrait de la vie politique active le conduit, pour se détendre, à se mettre à la peinture. Churchill se voit attribuer la sinécure de chancelier du duché de Lancaster, poste subalterne du gouvernement.
Toutefois, le 15 novembre 1915, il démissionne, ayant le sentiment que son énergie n'est pas utilisée et, tout en restant député, sert pendant plusieurs mois sur le front de l'Ouest en commandant le 6e bataillon du Royal Scots Fusiliers avec le grade de colonel. En mars 1916, il retourne en Angleterre, car il s'impatiente en France et souhaite intervenir à nouveau à la Chambre des communes. La correspondance avec son épouse durant cette période de sa vie montre que si le but de sa participation au service actif est la réhabilitation de sa réputation, il est conscient du risque d'être tué. En tant que commandant, il continue à montrer l'audace dont il a fait sa marque dans ses actions militaires précédentes, bien qu'il désapprouve fortement les hécatombes ayant lieu dans de nombreuses batailles du front occidental. Lord Deedes a expliqué, lors d'une réunion de la Royal Historical Society en 2001, pourquoi Churchill s'est rendu sur la ligne de front : Il était avec les Grenadier Guards, qui étaient à sec sans alcool au quartier général du bataillon. Ils aimaient beaucoup le thé et le lait condensé, ce qui n'avait pas beaucoup d'attrait pour Winston, mais l'alcool était autorisé dans la ligne de front, dans les tranchées. Il a donc suggéré au colonel qu'il se devait de voir la guerre de plus près et se rendre là-bas, ce qui fut vivement recommandé par le colonel, qui pensait que c'était une très bonne chose à faire.

Le ministre de Lloyd George

Le 7 décembre 1916, David Lloyd George devient Premier ministre d'un gouvernement de coalition libéral-conservateur. Winston Churchill espère en faire partie mais se heurte au veto des conservateurs d'Andrew Bonar Law. Malgré cela le Premier ministre, qui comme Churchill se méfie du commandement militaire, finit par le nommer ministre de l'Armement le 17 juillet 1917.

Ministre de l'armement puis ministre de la guerre

À ce poste, il veille à l'approvisionnement des armées et continue à plaider pour l'utilisation de chars qui commencent à se montrer efficaces, notamment aux environs de Cambrai en 1918. Pour A. J. P. Taylor, les chars ont été plus importants au niveau psychologique que stratégique car ils ont ébranlé la foi allemande en la victoire.
Comme ministre de la guerre à partir de janvier 1919, il fait face au mécontentement des soldats qui veulent être rapidement démobilisés. Il est le principal architecte de la Ten Year Rule, ligne de conduite permettant au Trésor de diriger et de contrôler les politiques stratégique, financière et diplomatique en soutenant l'hypothèse qu' il n'y aurait pas de grande guerre européenne pour les cinq ou dix prochaines années. Durant les négociations sur le Traité de Versailles, il s'efforce de modérer les exigences de Georges Clemenceau et se désole du peu d'enthousiasme de David Lloyd George pour la Société des Nations.
Churchill, qui est opposé au bolchevisme, veut faire adopter par le cabinet de guerre une politique agressive contre la Russie. Néanmoins David Lloyd George n'y est pas favorable et le modère. Les libéraux et les travaillistes du Labour s'y opposent aussi et le Daily Express estime que le pays a suffisamment toléré la mégalomanie de M. Winston Churchill. Par ailleurs, le gouvernement veut reprendre le commerce avec la Russie et l'activisme de Churchill est perçu comme gênant.

Secrétaire d'État aux colonies en 1921-1922

Il devient Secrétaire d'État aux colonies en 1921. À ce titre, il est signataire du traité anglo-irlandais de la même année, qui établit l'État libre d'Irlande. Il est impliqué dans les longues négociations du traité et, pour protéger les intérêts maritimes britanniques, conçoit une partie de l'accord de l'État libre d'Irlande afin d'inclure trois ports : Queenstown Cobh, Berehaven et Lough Swilly, ports pouvant être utilisés comme bases atlantiques pour la Royal Navy. En accord avec les termes du traité anglo-irlandais du Commerce, ces bases seront restituées à la nouvellement nommée Irlande en 1938. Le traité stipule également que l'État libre d'Irlande est membre du Commonwealth of Nations, terme qui pour la première fois se substitue dans un document officiel à celui d'Empire britannique
En tant que Secrétaire d'État aux colonies, il est chargé du Proche-Orient qui vient de passer sous contrôle britannique, et prend le colonel Thomas Edward Lawrence, dit Lawrence d'Arabie, comme conseiller. C'est lui qui favorise le couronnement de l'émir Fayçal en Mésopotamie britannique et d'Abd-Allah en Transjordanie. Par ailleurs, dans ce qui deviendra l'Irak, il remplace les forces terrestres anglaises par des avions de chasse, moins visibles. Il se montre par ailleurs favorable à l'utilisation d'armes chimiques sur les populations kurdes du nord de l'Irak animées par des velléités d'indépendance comme il le précise dans une note adressée au War Office en mai 1919 : "Je suis fortement en faveur de l'usage de gaz empoisonné contre des tribus non civilisées". Thomas Edward Lawrence dans son livre, Les Sept Piliers de la sagesse, cite Churchill de façon positive.
David Lloyd George mène une politique pro-grecque après la Première Guerre mondiale et soutient ce pays lors de la guerre gréco-turque de 1919. Churchill n'est pas favorable à cette option, car il pense que pour arriver à une paix durable dans la région, Smyrne et ses environs doivent être maintenus sous souveraineté turque. Par ailleurs, il est pour l'abandon de la ville de Chanak située sur la rive asiatique des Dardanelles et pour un repli des troupes britanniques sur la rive européenne à Gallipoli. Lloyd George ne le suit pas, ce qui conduit à une forte tension entre Britanniques et Turcs qui aboutira au traité de Lausanne. Cette affaire contribue auparavant à la chute du cabinet de Lloyd George car l'opinion publique britannique, les conservateurs ainsi qu'Herbert Asquith leur reprochent à lui et Churchill d'être trop attirés par les rapports de force et de ne pas assez penser à la paix. Certains ont vu dans la déclaration d'Andrew Bonar Law, le leader des conservateurs, selon laquelle nous ne pouvons être le gendarme du monde, l'épitaphe de l'âge d'or de l'Empire.

Churchill durant l'entre-deux guerres Retour au Parti conservateur

En septembre, le Parti conservateur se retire de la coalition du gouvernement à la suite d'une réunion de députés insatisfaits de la gestion de l'affaire Chanak, ce qui provoque les élections générales d'octobre 1922. Churchill tombe malade durant la campagne, et doit subir une appendicectomie de sorte que sa femme Clementine doit faire l'essentiel de la campagne à sa place. Il doit aussi composer avec les problèmes internes du Parti libéral, divisé entre ceux qui soutiennent David Lloyd George comme lui et ceux qui soutiennent Herbert Asquith. Il arrive quatrième à l'élection de Dundee, perdant au profit d'Edmund Dene Morel sa place de député. Sa défaite ne passe pas inaperçue et Churchill préfère prendre du recul sur la Côte d'Azur où il se détend en peignant des tableaux. Le vainqueur, Andrew Bonar Law, est élu en partie parce qu'il est celui qui ressemble le moins au Premier ministre précédent. Néanmoins, il tombe très vite malade et est remplacé par Stanley Baldwin qui pour faire face au chômage veut instaurer des mesures protectionnistes. Churchill toujours en faveur du libre-échange se présente de nouveau pour les libéraux aux élections générales de 1923, et perd cette fois-ci à Leicester. Les travaillistes qui sont également pour le libre-échange s'allient alors aux libéraux pour former un gouvernement. Churchill n'approuvant pas ce rapprochement quitte le parti libéral et se présente comme indépendant d'abord sans succès dans une élection partielle dans la circonscription de l'abbaye de Westminster, puis avec succès aux élections générales de 1924, à Epping. Stanley Baldwin qui craint que Churchill, LLoyd Georges et F.E. Smith, trois grands orateurs, ne montent un parti du centre et ne le mettent en difficulté au parlement décide de le nommer ministre. Neville Chamberlain qui ne veut pas du poste lui suggère de nommer Churchill chancelier de l'échiquier. L'année suivante, il rejoint officiellement le Parti conservateur, en commentant ironiquement que n'importe qui peut être un lâcheur, mais il faut une certaine ingéniosité pour l'être à nouveau.
Deux points sont ici à noter : Churchill qui voit dans le socialisme l'ombre de la folie communiste, est alors extrêmement impopulaire dans toute la gauche anglaise. Emmanuel Shinwell, un député travailliste écrit : lorsqu'un orateur travailliste se trouvait à court d'arguments, il lui suffisait de dire "À bas Winston Churchill !" ... pour déclencher un tonnerre d'applaudissements. Par ailleurs, Churchill n'est pas un homme de parti. Il écrit dans les années 1920 tous les petits politiciens chérissaient de tout cœur les drapeaux des partis, les tribunes des partis... tout heureux de constater le retour des bons vieux jours de faction d'avant-guerre ! Plus tard, il sera marginalisé au sein du parti conservateur pour des raisons politiques, mais également parce que ce n'est pas un homme d'appareil.

Ministre des Finances 1924-1929

Churchill est surpris d'apprendre qu'il est nommé ministre des Finances du Royaume-Uni, et demande au Premier ministre Le foutu canard va-t-il nager? De fait, il confie un jour à son secrétaire privé parlementaire Robert Boothby, après une réunion avec des économistes, des banquiers et des hauts fonctionnaires des finances : si seulement c'étaient des amiraux ou des généraux. Je parle leur langue, et je peux les battre. Mais au bout d'un instant, ces types commencent à parler chinois. Et alors je suis noyé. À ce poste, Churchill dirigera le désastreux retour à l'étalon-or qui aboutit à la déflation, au chômage et à la grève des mineurs, prémices de la grève générale de 1926. Manchester note qu'il est malgré tout loin d'être le pire Chancelier de l'échiquier qu'a connu le pays.
L'élément le plus notable de son premier budget est le retour à l'étalon-or. En fait, Churchill a beaucoup hésité et beaucoup consulté, car il craint pour l'industrie britannique. Il se heurte à la détermination des hauts responsables économiques et financiers Otto Niemeyer, Ralph George Hawtrey du trésor, Lord Bradbury du Joint Select Committee, chargé d'étudier la question, et Montagu Norman de la Banque d'Angleterre. Côté politique, le Premier ministre aurait été déçu que Churchill prenne une autre décision, d'autant plus que Philip Snowden, son prédécesseur travailliste, est favorable à la mesure. En revanche y sont opposés John Maynard Keynes et Reginald McKenna. Lors d'un dîner le 27 mars 1925 où Bradbury et Niemeyer font face à Keynes et MacKenna ce dernier affirme qu'en matière de politique pratique Churchill n'a pas d'autre possibilité que le retour à l'or. Churchill prend alors la décision qu'il considérera comme la plus grande erreur de sa vie, en ayant déjà conscience de son caractère plus politique qu'économique. Dans son discours sur le projet de loi, il déclare : Je vais vous dire ce qu'il [le retour à l'étalon-or va nous attacher. Il va nous attacher à la réalité ». Cette décision incite Keynes à écrire The Economic Consequences of Mr. Churchill, faisant valoir que le retour à l'étalon-or avec sa parité d'avant-guerre en 1925, 1 £ = 4 86 $, conduirait à une dépression mondiale. Sont également opposés à cette décision Lord Beaverbrook et la fédération des industries britanniques. Son premier projet de budget comporte aussi plusieurs mesures sociales comme l'abaissement de l'âge de la retraite, les subsides aux veuves et aux orphelins ainsi qu'un accès plus facile aux aides sociales. Elles sont financées par une baisse des impôts pour les plus pauvres et une hausse pour les revenus non salariaux ainsi qu'une baisse du budget de la Défense, Marine et aviation notamment. Il ne sera en faveur du réarmement qu'à partir des années 1930.

Le retour au taux de change d'avant-guerre et à l'étalon-or déprime les industries. La plus touchée est celle du charbon. Déjà affectée par la baisse de la production depuis que les navires sont passés au pétrole, le retour aux changes d'avant-guerre crée des coûts additionnels pouvant atteindre 10 % pour l'industrie. En juillet 1925, les propriétaires des mines de charbon veulent imposer une baisse des salaires pour faire face à la concurrence étrangère. Le gouvernement qui craint un conflit dur nomme une commission d'enquête présidée par Herbert Samuel. Il verse en attendant une subvention aux entreprises. La Commission conclut que les propriétaires des mines ont réalisé d'importants bénéfices et négligé les investissements de telle sorte que le matériel est désuet et que de forts gains de productivité sont possibles. Pourtant, Baldwin ne veut pas forcer les propriétaires des mines à investir et maintient que des baisses de salaires sont nécessaires. Cela conduit à la grève générale de 1926. Une fois le bras de fer commencé Churchill ne veut absolument pas capituler et Baldwin, qui ne veut pas que Churchill se mêle trop de la question, le charge de la British Gazette, un organe gouvernemental de presse temporaire chargé de faire connaître au public, alors que les journaux sont en grève et ne paraissent plus, la position du gouvernement. Churchill se met au travail avec entrain et sans aucune impartialité, car l'État ne peut être impartial dans ses rapports entre lui-même et le groupe de sujets contre lequel il lutte. Le journal connait une forte progression de sa diffusion pour le dernier numéro correspondant au dernier jour de grève, avec 2 209 000 exemplaires diffusés. Une fois la victoire atteinte Churchill tient à ce que le gouvernement fasse preuve de magnanimité, mais du fait des réticences patronales, et malgré ses efforts, la grève est relancée dans les mines et dure jusqu'au début de l'hiver.
En 1927, lors d'une conférence de presse à Rome, il tient des propos favorables à Mussolini qui provoquent la fureur du rédacteur en chef du Manchester Guardian. Pour sa défense, Churchill affirme que l'Angleterre doit défendre tout régime continental opposé à son plus grand ennemi, le communisme.

La philosophie de l'Histoire de Churchill

La parution des volumes de The World Crisis, littéralement Le Monde en crise s'échelonne entre 1923 et 1931. Une des thèses centrales des deux premiers volumes parus en 1923 peut être formulée ainsi : durant le conflit, les professionnels de la guerre, généraux et amiraux – the brass-hat –, ont eu régulièrement tort, tandis que les professionnels de la politique – the frocks – ont eu généralement raison. John Maynard Keynes, qui apprécie l'ouvrage, suggère dans une remarque les réserves qu'il inspire au Groupe de Bloomsbury. Pour lui, le livre provoque un peu d'envie peut-être, devant sa conviction inébranlable que les frontières, les races, les patriotismes, et même les guerres s'il le faut, sont des vérités ultimes de l'Humanité, ce qui confère dans son esprit une sorte de dignité et même de noblesse à des évènements qui ne sont pour d'autres qu'un intermède cauchemardesque, quelque chose qu'il convient d'éviter constamment.
Dans Toughts and Adventure, Churchill développe une vision de l'Histoire à l'opposé de celle de Karl Marx. Pour lui, elle est d'abord faite par les grands hommes. Dans le livre précédemment cité, il écrit : l'histoire du monde est principalement le geste des êtres exceptionnels, dont la pensée, les actions, les qualités, les vertus, les triomphes, les faiblesses ou les crimes ont dominé la fortune des hommes. De là découlent selon François Bédarida trois conséquences. Tout d'abord, l'Histoire, soumise au libre choix des hommes, est imprévisible. Ensuite, pour Churchill, le présent éclaire plus le passé que l'inverse. Par exemple, dans son livre sur son ancêtre, le Duc de Malborough, c'est le présent, les actions de Lloyd George ou même d'Hitler, qui lui permettent de comprendre le xviie siècle. Enfin, comme pour le grand historien Whig Lord Acton, et, dans une moindre mesure, comme Augustin d'Hippone, il voit l'Histoire comme un combat moral entre le bien et le mal. De là, il s'ensuit que, pour Bédarida, Churchill adopte une approche à la fois idéologique et mythique dans la lignée de la Conception whig de l'histoire.

Traversée du désert

Churchill a écrit une biographie de son ancêtre John Churchill, 1er duc de Marlborough dans le milieu des années 1930.
Le gouvernement conservateur est défait aux élections générales de 1929. Churchill prend du recul et va faire un cycle de conférences aux États-Unis il est présent par hasard à la tribune de la bourse de Wall Street le Jeudi noir qui plonge le monde et la Grande-Bretagne dans la crise. En désaccord avec la majorité du parti conservateur sur les questions de protection tarifaire et du mouvement pour l'indépendance de l'Inde, il n'occupe rapidement plus aucune position d'influence dans le parti. Lorsque, face à la crise, Ramsay MacDonald forme le gouvernement d'unité nationale en 1931, il n'est pas invité à s'y joindre. Sa carrière est au ralenti, c'est une période connue comme étant sa traversée du désert.
Me voici, après quelque trente années à la Chambre des communes, après avoir détenu plusieurs des plus hautes fonctions de l'État. Me voici congédié, écarté, abandonné, rejeté et détesté. Parlant des hommes politiques en vue de l'époque Ramsay MacDonald et Stanley Baldwin ... deux infirmières idéales pour garder le silence dans une chambre obscure.
La majeure partie des années suivantes est consacrée à ses écrits, dont Marlborough : His Life and Times, une biographie de son ancêtre John Churchill, 1er duc de Marlborough, A History of the English-Speaking Peoples, œuvre publiée bien après la Seconde Guerre mondiale, et Great Contemporaries, une série de portraits d'hommes ou de femmes politiques contemporains comme Nancy Astor ou Ramsay MacDonald. Il est alors l'un des écrivains les mieux payés de son temps. Pour sa femme Clémentine, et plus tard pour Churchill lui-même, cet isolement est une chance car, eût-il été ministre, il y a peu de chances qu'il eût pu réellement peser sur le cours des événements tellement la situation politique intérieure était, selon elle, déprimante. Durant les années 1930, trois éléments au moins expliquent la persistance de sa traversée du désert : sa position sur l'IndeBe 15, son rôle dans l'affaire de l'abdication royale qui renforce dans l'opinion l'idée que Churchill est imprévisible, et son opposition à l'Allemagne nazie, qui pour lui représente la principale menace, le fascisme italien ou l'Espagne franquiste, dont il faut néanmoins éviter qu'ils ne renforcent l'Allemagne, étant pour lui moins importants. Cela le met en porte-à-faux par rapport à une classe politique pacifiste. Pour toutes ces raisons, son parti préfère, dans la seconde moitié des années 1930, nommer au poste de Premier ministre un homme comme Neville Chamberlain.

Le statut de l'Inde Partition des Indes.

Au cours de la première moitié des années 1930, Churchill est franchement opposé à l'octroi du statut de dominion à l'Inde. Après un voyage aux États-Unis en 1930, il aurait dit : « l'Inde est un terme géographique, ... elle n'est pas plus une nation unie que l'Équateur. Il est l'un des fondateurs de la Ligue de défense de l'Inde, un groupe dédié à la préservation du pouvoir britannique dans la colonie. Dans des discours et des articles de presse de cette période, il prévoit un taux de chômage britannique élevé et la guerre civile en Inde si l'indépendance devait être accordée. Le vice-roi Edward Wood, qui deviendra Lord Halifax, qui avait été nommé par le précédent gouvernement conservateur, participe à la première Round Table Conference, qui se tient de novembre 1930 à janvier 1931, puis annonce la décision gouvernementale selon laquelle l'Inde devrait recevoir le statut de dominion. En cela, le gouvernement est appuyé par le Parti libéral et par la majorité du Parti conservateur. Churchill dénonce la conférence. Lors d'une réunion de l'Association conservatrice d'Essex-Ouest spécialement convoquée afin que Churchill puisse expliquer sa position, il affirme : il est aussi alarmant et nauséabond de voir M. Gandhi, un avocat séditieux du Middle Temple, qui pose maintenant comme un fakir d'un type bien connu en Orient, montant à demi-nu jusqu'aux marches du palais du vice-roi ... afin de parlementer sur un pied d'égalité avec le représentant de l'empereur-roi. Il nomme les dirigeants du Congrès indien « des brahmanes qui vocifèrent et baratinent les principes du libéralisme occidental.

Deux incidents contribuent à affaiblir la position déjà chancelante de Churchill au sein du Parti conservateur et tous deux sont considérés comme des attaques envers la majorité des conservateurs. La veille d'une élection partielle à St-George, en avril 1931 où le candidat officiel du parti Duff Cooper est opposé à un conservateur indépendant appuyé par Lord Rothermere, Lord Beaverbrook et leurs journaux respectifs, il prononce un discours considéré comme une déclaration de soutien au candidat indépendant et comme un appui à la campagne des barons de la presse contre Baldwin. Finalement l'élection de Duff Cooper renforce BaldwinRh 6d'autant que la campagne de désobéissance civile en Inde cesse avec le pacte Gandhi-Irwin Irwin deviendra Lord Halifax. Le deuxième incident fait suite à une mise en cause de Samuel Hoare et Lord Derby selon laquelle ils auraient fait pression sur la Chambre de commerce de Manchester afin qu'elle modifie le rapport transmis au Joint Select Committee, examinant la loi sur le gouvernement de l'Inde, violant ainsi le privilège parlementaire. Churchill évoque la question devant le Comité des privilèges de la Chambre des communes qui, après enquête, rapporte à la Chambre qu'il n'y a pas eu violation. Le rapport est débattu le 13 juin. Churchill n'est pas en mesure de trouver un seul partisan et le débat prend fin sans vote.
Churchill rompt définitivement avec Stanley Baldwin sur le statut de l'Inde, et n'obtient aucun ministère tant que celui-ci est Premier ministre. Par ailleurs, il se prive du soutien de personnalités progressistes du Parti conservateur tels qu'Anthony Eden, Harold Macmillan ou Duff Cooper qui auraient pu l'aider dans sa lutte contre la politique d'apaisement menée envers Hitler. En fait, trois éléments posent problème à Churchill. Durant cette période, l'Angleterre abandonne de facto le libre-échange qui a été le pilier de sa doctrine depuis le milieu du XIXe siècle. Par ailleurs, avec l'indépendance de l'Inde qu'il voit se dessiner, l'Angleterre devient une puissance moyenne : sans ses possessions impériales, le pays ne serait plus qu'une île obscure au large du continent européen. Enfin, Churchill cherche à revenir au pouvoir. Pour Lord Beaverbrook, son attitude relève du vice de caractère qui le conduit à accepter n'importe quoi pourvu que cela conduise au pouvoir. Pour certains historiens, l'explication de l'attitude de Churchill à l'égard de l'Inde est à chercher dans son livre My Early Life, publié en 1930.

Le réarmement de l'Allemagne

À partir de 1932, il s'oppose à ceux qui préconisent de donner à la République de Weimar le droit de parité militaire avec la France, et parle souvent des dangers de son réarmement. Sur ce point, il suit Lord Lloyd qui le premier a mis en garde contre ce problème. L'attitude de Churchill envers les futurs membres de l'Axe Rome-Berlin-Tokyo est ambigüe. En 1931, il met en garde la Société des Nations lorsqu'elle veut s'opposer à l'invasion japonaise en Mandchourie : J'espère que nous allons essayer en Angleterre de comprendre la position du Japon, un État ancien... D'un côté, il fait face à la sombre menace de la Russie soviétique. De l'autre, il y a le chaos de la Chine, avec quatre ou cinq provinces qui sont torturées sous le régime communiste. Dans les articles de presse, il compare le gouvernement républicain espagnol à un bastion du communisme, et voit l'armée de Franco comme un mouvement anti-rouges.
À partir de 1933, des hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères qui sont en désaccord avec la politique suivie envers l'Allemagne vont commencer à tenir Churchill informé de ce qui se passe exactement. Les plus notables de ses informateurs sont Ralph Wigram, directeur du département Europe centrale, et dans une moindre mesure Robert Vansittart, ainsi que le lieutenant colonel Thor Anderson – une connaissance de sa secrétaire principale Violet Pearman. Wigram lui apprend notamment que les nazis construisent en secret des sous-marins et des avions. Ces informations nourrissent son premier grand discours sur la défense du 7 février 1934, où il insiste sur la nécessité de reconstruire la Royal Air Force et de créer un ministère de la Défense. Son poids politique commence alors à reprendre de la consistance et il est rejoint par des hommes comme Leo Amery ou Robert Horne, ce qui force Baldwin à prendre l'engagement de maintenir l'aviation anglaise à parité avec l'aviation allemande ; ce sera fait après bien des avanies. Notons que Churchill n'est pas forcément un visionnaire en matière d'avions, car il n'est pas très enthousiaste pour la production des deux types d'avion qui pourtant lui permettront de gagner la bataille d'Angleterre : le Supermarine Spitfire et le Hawker Hurricane. Son second, le 13 juillet, demande instamment un pouvoir renforcé de la Société des Nations. Ces points restent ses thèmes primordiaux avant 1936.
Dans un essai de 1935, intitulé Hitler and his Choice et republié dans Great Contemporaries en 1968, il exprime l'espoir qu'en dépit de son ascension au pouvoir par des méthodes dictatoriales, par la haine et la cruauté, Hitler puisse encore passer à l'Histoire comme l'homme qui a restauré l'honneur et la tranquillité d'esprit de la grande nation germanique, de nouveau sereine, utile et forte, et au premier plan du cercle de la famille européenne. Lorsqu'Hitler peu de temps après décrète à nouveau la conscription, il espère que la France fasse usage de sa supériorité temporaire pour attaquer l'Allemagne, ce qu'elle ne fait pas comme Hitler l'a anticipé. Churchill s'oppose avec David Lloyd George au Traité naval germano-britannique de juin 1935 car pour lui, le Royaume-Uni a tort d'accepter qu'en violation des traités l'Allemagne ait autant de sous-marins que le Royaume-Uni et que sa flotte puisse se situer à 35% de son homologue britannique. En effet, la flotte britannique a un Empire à défendre et n'est pas circonscrite comme les Allemands à la mer du Nord. Lors de ce pacte le Royaume-Uni ne prend pas vraiment l'aval de Paris qui ne dit rien. Par contre, il ne s'oppose pas au pacte Hoare-Laval sur l'Éthiopie, car il veut ménager l'Italie pour essayer de la couper de l'Allemagne nazie qui est son principal adversaire
Quand les Allemands réoccupent la Rhénanie en février 1936, la Grande-Bretagne est divisée : l'opposition travailliste est fermement opposée à toute sanction, tandis que le gouvernement national est désuni, entre ceux qui soutiennent des sanctions économiques, et ceux qui affirment que cela peut conduire à un recul humiliant de la Grande-Bretagne, car la France ne pourrait soutenir une intervention. Le discours mesuré de Churchill, le 9 mars, est salué par Neville Chamberlain comme constructif. Pourtant dans les semaines suivantes, il n'obtient pas le poste de ministre pour la Coordination de la Défense, qui échoit au procureur général Thomas Inskip. En juin 1936, Churchill organise une délégation de hauts responsables conservateurs, qui partagent son inquiétude, afin de voir Baldwin, Chamberlain et Halifax. Il essaie de convaincre des délégués des deux autres partis de se joindre à eux, et, plus tard, écrit : si les dirigeants de l'opposition des libéraux et du Labour étaient venus avec nous, cela aurait pu aboutir à une situation politique aussi puissante que les résultats des actions mises en place. Mais son initiative n'aboutit à rien, Baldwin faisant valoir que le gouvernement fait tout ce qu'il peut étant donné le sentiment antiguerre de l'électorat.
Le 12 novembre, Churchill revient sur le sujet dans un discours que Robert Rodhe James qualifie comme étant l'un des plus brillants de Churchill au cours de cette période. Après avoir donné quelques exemples qui montrent que l'Allemagne se prépare à la guerre, il dit : le gouvernement est incapable de prendre une décision ou de contraindre le Premier ministre à en prendre une. Les membres du cabinet s'empêtrent dans d'étranges paradoxes, bien décidés à ne rien décider, bien résolus à ne rien résoudre ; ils mettent toute leur énergie à filer à la dérive, tous leurs efforts à être malléables, toutes leurs forces à se montrer impuissantes. Les mois et les années qui vont suivre seront d'un si grand prix pour la grandeur de l'Angleterre, elles seront même d'une importance vitale, mais ils ne feront rien, ils nous laisseront nous faire dévorer par les sauterelles. En face, la réponse de Baldwin semble faible et perturbe la Chambre.

Crise d'abdication d'Édouard VIII.

En juin 1936, Walter Monckton confirme à Churchill que les rumeurs selon lesquelles le roi Édouard VIII a l'intention d'épouser Wallis Simpson, une roturière américaine, sont crédibles, ce qui le contraindrait à abdiquer. En novembre, il refuse l'invitation de Lord Salisbury à faire partie d'une délégation de conservateurs chevronnés qui veut discuter avec Baldwin de la question. Le 25 novembre, lui, Attlee et le leader libéral Archibald Sinclair s'entretiennent avec Baldwin, qui leur annonce officiellement l'intention du roi. On leur demande s'ils accepteraient de prendre la suite du gouvernement national en place s'il démissionnait en cas de refus du roi de se soumettre. Attlee et Sinclair font part de leur solidarité avec Baldwin sur cette question. Churchill répond que son état d'esprit est un peu différent, mais qu'il soutiendrait le gouvernement.
La crise d'abdication devient publique dans les quinze premiers jours du mois de décembre 1936. À ce moment, Churchill donne officiellement son soutien au roi. La première réunion publique du Arms and the Covenant Movement a lieu le 3 décembre. Churchill était un grand orateur et écrivit plus tard que dans la réponse au discours de remerciement, il fait une déclaration sur l'inspiration du moment, demandant un délai avant que toute décision soit prise soit par le roi soit par son cabinet. Plus tard dans la nuit, Churchill examine le projet de déclaration d'abdication, et en discute avec Beaverbrook et l'avocat du roi. Le 4 décembre, il rencontre le monarque et l'exhorte de nouveau à retarder toute décision. Le 5 décembre, il publie une longue déclaration dénonçant la pression inconstitutionnelle que le ministère applique sur le roi, pour le forcer à prendre une décision hâtive. Le 7 décembre, il tente d'intervenir aux Communes pour plaider en faveur d'un délai. Il est hué. Apparemment déstabilisé par l'hostilité de tous les membres, il quitte la salle.
La réputation de Churchill au Parlement, comme dans le reste de l'Angleterre, est gravement compromise. Certains, comme Alistair Cooke, l'imaginent essayant de fonder un parti royaliste, le King's Party. D'autres, comme Harold Macmillan, sont consternés par les dégâts, provoqués par l'appui de Churchill au roi, envers le Arms and the Covenant Movement. Churchill lui-même écrit plus tard : J'ai été frappé que dans l'opinion publique, cela fut presque unanimement vu comme la fin de ma vie politique. Les historiens sont divisés sur les motifs de Churchill à apporter son soutien à Édouard VIII. Certains, comme A. J. P. Taylor, voient cela comme une tentative de « renverser un gouvernement d'hommes faibles. D'autres, comme Rhode James, voient les motivations de Churchill comme honorables et désintéressées.

Loin du pouvoir mais présent

S'il est vrai qu'il a peu d'appui à la Chambre des communes pendant une bonne partie des années 1930, qu'il est isolé au sein du Parti conservateur, son exil est plus apparent que réel. Churchill continue d'être consulté sur de nombreuses questions par le gouvernement, et est toujours considéré comme un leader alternatif.
Même à l'époque où il fait campagne contre l'indépendance de l'Inde, il reçoit des informations officielles, et par ailleurs secrètes. Dès 1932, le voisin de Churchill, le major Desmond Morton, avec l'approbation de Ramsay MacDonald, lui donne des informations du même type sur la force aérienne allemande. À partir de 1930, Morton dirige un département du Comité de Défense impériale chargé de la recherche sur la capacité opérationnelle des défenses des autres nations. Lord Swinton, en tant que Secrétaire d'État de l'air, et avec l'approbation de Baldwin, lui donne accès en 1934 à tous ces renseignements. Tout en sachant que Churchill resterait très critique envers le gouvernement, Swinton le renseigne, car il pense qu'un adversaire bien informé est préférable à un autre se fondant sur des rumeurs et des ouï-dire.
Churchill est un féroce opposant de la politique d'apaisement de Neville Chamberlain envers Adolf Hitler et après la crise de Munich, au cours de laquelle la Grande-Bretagne et la France ont abandonné la Tchécoslovaquie à l'Allemagne, il déclare de façon prophétique au cours d'un discours à la Chambre des communes : Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur. Vous avez choisi le déshonneur, et vous aurez la guerre. Ce moment restera à jamais gravé dans vos cœurs. Churchill est, alors, en faveur d'une alliance avec l'URSS. En effet, il estime qu'elle est nécessaire à la lutte contre l'Allemagne nazie. Il tente d'autant plus de faire avancer ce dossier qu'il connaît l'ambassadeur soviétique au Royaume-Uni, Ivan Maisky, et qu'il sait que le ministre des Affaires étrangères soviétique Maxime Litvinov pousse dans ce sens. Mais, Neville Chamberlain et son ministre des Affaires étrangères s'opposent à une telle alliance, tout comme, d'ailleurs, l'administration française. Face à cette situation Joseph Staline limoge Litvinov et nomme Molotov à sa place pour mener une politique qui conduit au pacte germano-soviétique, le 23 août 1939.

L’influence de Churchill, bien qu'il n'ait plus aucun poste officiel, s'explique par plusieurs raisons. Tout d'abord, en Angleterre, les apparences peuvent être trompeuses. Il rappelle que « des décisions politiques historiques, dont certaines figurent dans The English Constitution de Walter Bagehot ont été prises par des hommes qui n'ont jamais exercé de fonctions publiques et n'ont jamais siégé au parlement. D'autre part, Churchill a une présence imposante, il montre qu'il est là, il sait se faire entendre, voire en imposer aux autres. Enfin, il est considéré comme faisant partie de la classe dirigeante de son pays tant en raison des postes importants qu'il a tenus, que de son ascendance. Hitler a traité avec Chamberlain qu'il n'aimait pas mais qu'il trouvait malléable ; avec Churchill, les choses sont différentes. En effet, si comme W. Manchester et Walter Lippmann, on pense que la qualité indispensable à l'exercice des fonctions suprêmes est le tempérament, et non l'intelligence, alors, Churchill et Hitler l'ont en commun : tous deux ont un fort tempérament même s'ils n'en font pas le même usage et s'ils n'ont pas les mêmes fins. Au demeurant, ils partagent d'une certaine façon ce trait de caractère avec les deux ou trois autres Grands de la deuxième guerre mondiale.

Churchill durant la Seconde Guerre mondiale
Le Premier Lord de l'Amirauté is back

Après le pacte germano-soviétique du 23 août 1939, les événements se précipitent. L'Allemagne envahit la Pologne le 3 septembre 1939, ce qui oblige le Royaume-Uni à lui déclarer la guerre. Churchill est alors nommé Premier Lord de l'Amirauté et membre du Cabinet de guerre, tout comme il l'avait été pendant la première partie de la Première Guerre mondiale. La légende veut que lorsqu'il en est informé, le Conseil de l'Amirauté envoie ce message à la flotte : Winston is back60. En fait, pour François Bédarida, il n'en est rien, le biographe de Churchill Martin Gilbert n'ayant jamais trouvé trace de ce message. En revanche, il est exact que la marine accueille favorablement sa nomination. Churchill est nommé en raison de la défiance des députés et d'une partie du gouvernement envers le Premier ministre Neville Chamberlain. Aussi, celui-ci juge opportun de faire entrer au gouvernement un député partisan d'une attitude plus résolue face à l'Allemagne nazie. Peu de temps après sa nomination, Churchill reçoit un appel téléphonique de Franklin Delano Roosevelt l'informant que l'amiral Raeder de la marine allemande l'a averti d'un complot britannique visant à couler un bateau américain l'Iroquoi et d'en faire porter la responsabilité sur les Allemands. Les Britanniques vérifient que le complot n'est pas allemand couler le bateau pour leur en faire porter la responsabilité. Finalement rien ne se passe et l'incident marque surtout le début d'un long échange épistolaire de mille six cent quatre-vingt-huit lettres entre les deux hommes. À l'Amirauté, Churchill est très occupé. En effet, durant la drôle de guerre, les seules actions notables ont lieu en mer. Comme au cours de la Première Guerre mondiale, la Royal Navy subit d'abord des pertes avant de connaître une première victoire sur le Graf Spee lors de la bataille du Rio de la Plata. À ce poste, Churchill montre qu'il sait se faire obéir et que son autorité n'est pas contestée.
Churchill préconise l'occupation préventive du port de Narvik où transite le minerai de fer de la Norvège, alors neutre, et des mines de fer de Kiruna, en Suède vers l'Allemagne. Néanmoins, Chamberlain et une partie du Cabinet de guerre sont en désaccord sur ce qu'il convient de faire, retardant l'opération jusqu'à l'invasion allemande de la Norvège. Tout cela conduit les députés à douter de plus en plus des capacités de Chamberlain à conduire le pays en temps de guerre. Après un vote du Parlement où il ne fait pas le plein des voix escomptées et où il est très critiqué, Neville Chamberlain se résout le 8 mai 1940 à la création d'un gouvernement d'union nationale. Pourtant, si les travaillistes veulent bien d'un tel gouvernement, ils ne veulent pas de Chamberlain comme Premier ministre.

Churchill Premier ministre d'un gouvernement de coalition
Organisation défensive du Royaume-Uni pendant la Seconde Guerre mondiale.

À partir du 8 mai 1940 et de la décision de Chamberlain de créer un cabinet d'union nationale, les choses se précipitent. Les travaillistes, réunis en congrès à Bournemouth, confirment qu'ils sont prêts à participer à un gouvernement mais sous l'autorité d'un nouveau Premier ministre. Hugh Dalton fait ajouter cette précision car il craint que Chamberlain ne s'accroche au pouvoir. De fait, lorsque le 10 mai 1940, une attaque éclair sur les Pays-Bas et la Belgique, prélude à l’invasion allemande de la France, est déclenchée par Adolf Hitler, Chamberlain semble vouloir profiter de la situation pour se maintenir au pouvoir. Quoi qu'il en soit la décision travailliste l'oblige à aller remettre sa démission au roi et à suggérer le nom du successeur. Lord Halifax, le favori de Chamberlain, du roi George VI et des conservateurs refuse le poste de Premier ministre, parce qu'il pense ne pas pouvoir gouverner efficacement en tant que membre de la Chambre des Lords, estimant qu'un Premier ministre doit siéger à la Chambre des communes. Reste donc Winston Churchill, ce qui n'enchante ni le roi ni l' establishment. Le News Chronicle faisant état d'un sondage d'opinion montre que les partisans de Churchill se trouvent alors parmi les membres des groupes de revenus inférieurs, les personnes de vingt-et-un ans à trente ans et les hommes.... Lorsqu'il se présente au Parlement, Churchill est moins applaudi que son prédécesseur Chamberlain, qui d'ailleurs reste à la tête du partiWm. Cette tiédeur envers Churchill tiendrait au fait que l'establisment anglais voit en Adolf Hitler le produit de forces sociales et historiques complexes, quand Churchill, homme convaincu que les individus sont responsables de leur actes, le voit comme représentant les forces du Mal et voit le conflit comme un combat manichéen.
Churchill forme alors un gouvernement, rassemblant le Cabinet de guerre et les ministres, responsables des décisions stratégiques. Ce Cabinet de guerre se compose, en sus de Churchill, de deux conservateurs : Neville Chamberlain et Lord Halifax, et de deux travaillistes : Clement Attlee, Lord du Sceau privé, et Arthur Greenwood. Le gouvernement lui-même est composé à la fois des membres éminents des partis conservateur et travailliste et, dans une moindre mesure, de libéraux et indépendants. Parmi les ministres, on peut citer les noms de Duff Cooper, un conservateur critique à l'Information, d'Anthony Eden à la Guerre puis aux Affaires étrangères, de Archibald Sinclair, un libéral, à l'Air, du syndicaliste Ernest Bevin au ministère du Travail, d'Herbert Morrison à la production industrielle, de Hugh Dalton travailliste à la Guerre Économique ; A.V. Alexander travailliste étant Premier Lord de l'Amirauté. Les Finances sont d'abord confiées à Kingsley Wood puis à John Anderson, deux conservateurs. Toutefois, concernant les problèmes économiques, les techniciens, parmi lesquels John Maynard Keynes, disposent d'une large autonomie. En février 1942 intervient un remaniement : Clement Attlee devient vice-Premier ministre, Lord Beaverbrook, chargé de la production d'avions, démissionne, Oliver Lyttelton devient ministre de la Production, Lord Cranborne ministre des colonies, et James Grigg, un technocrate, remplace David Margeson au ministère de la Guerre.
Churchill, quand il est nommé Premier ministre, a près de soixante cinq ans. S'il est le doyen de ses grands homologues Franklin Delano Roosevelt et Joseph Staline, c'est malgré tout à lui qu'il reste le plus d'années à vivre. Pourtant, il est doté d'une santé relativement fragile. Il fait une légère crise cardiaque en décembre 1941 à la Maison-Blanche, et contracte une pneumonie en décembre 1943. Cela ne l'empêche pas de parcourir plus de 160 000 km tout au long de la guerre, notamment à l'occasion de rencontres avec les autres dirigeants. Pour des raisons de sécurité, il voyage habituellement en utilisant le pseudonyme de colonel Warden.

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Posté le : 29/11/2014 21:00
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Winston Churchill 3
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Du sang et des larmes

Les débuts de la Seconde Guerre mondiale Bataille d'Angleterre et Seconde bataille de l'Atlantique.
J'aimerais dire à la Chambre, comme je l'ai dit à ceux qui ont rejoint ce gouvernement : je n'ai à offrir que du sang, de la peine, des larmes et de la sueur. Vous me demandez, quelle est notre politique ? Je vous dirais : C'est faire la guerre sur mer, sur terre et dans les airs, de toute notre puissance et de toutes les forces que Dieu pourra nous donner.
Si les discours de Churchill contribuent à renforcer l'énergie des Anglais, il n'en demeure pas moins que les députés conservateurs sont des plus réservés quand il prononce ce discours le 13 mai 1940. Geoffrey Dawson le qualifie de bon petit discours martial. Le Premier ministre doit surtout faire face à une débâcle : les forces franco-britanniques sont rapidement en très grande difficulté. De fin mai à début juin, il doit évacuer à Dunkerque l'armée britannique pour qu'elle puisse continuer le combat ailleurs ; le 28 mai, la Belgique capitule ; le 10 juin, la Norvège le fait à son tour ; la France signe l'armistice le 22 juin 1940. Churchill quant à lui, refuse d'étudier l'éventualité d'un armistice avec le Troisième Reich. Son usage de la rhétorique affermit l'opinion publique contre un règlement pacifique, et prépare les Britanniques à une longue guerre. Il remanie alors légèrement son gouvernement. En souvenir des difficultés rencontrées jadis il crée un ministère de la Défense dont il prend la direction. Il nomme également son ami, l'industriel et baron de la presse Lord Beaverbrook, responsable de la production des avions. Celui-ci met toute son énergie à accélérer la production et à favoriser la conception de nouveaux avions.

Churchill déclare dans son discours This was their finest hour à la Chambre des communes le 18 juin 1940 : Je pense que la bataille d'Angleterre va bientôt commencer. De fait, elle commence en juillet 1940. Il s'agit essentiellement d'une guerre des airs destinée à s'assurer la maîtrise de l'espace aérien du Royaume-Uni. De cette maîtrise dépend la possibilité ou non pour les Allemands de débarquer en Angleterre. S'agissant d'une guerre menée par quelques milliers d'aviateurs, Churchill déclare : Jamais dans l'histoire des conflits humains un si grand nombre d'hommes n'a dû autant à un si petit nombre. Cette phrase est à l'origine du surnom The Few pour les pilotes de chasse alliés. La bataille d'Angleterre comporte plusieurs phases. Dans un premier temps, les Allemands tentent de conquérir la supériorité aérienne pour pouvoir débarquer. Puis, à partir du 7 septembre 1940 à travers le Blitz, c'est-à-dire des bombardements massifs de villes, comme celui de Coventry, ils tentent d'ébranler la volonté de résistance anglaise.
Sur mer, à partir de la mi-1940, commence la seconde bataille de l'Atlantique menée par les sous-marins de l'amiral Karl Dönitz. Il s'agit d'attaquer en meute les navires civils pour empêcher le ravitaillement de l'Angleterre. Avec l'occupation de la France, les sous-marins agissent à partir de bases situées en France, notamment à Bordeaux, Brest, La Rochelle, Lorient, Saint-Nazaire. En mars 1941, Churchill rédige le Battle of Atlantic Directive pour organiser et donner une nouvelle impulsion aux forces britanniques engagées dans la bataille.
Dès l'été 1940, il veut protéger les lignes de communication anglaises vers les Indes et l'Asie et envoie en renfort des hommes et des blindés au Moyen-Orient. En mer a lieu la bataille du cap Matapan qui voit la marine anglaise vaincre la marine italienne. Dans les Balkans, les Britanniques doivent accepter la prise de la Grèce par les Allemands et évacuer la Crète vers le milieu 1941. En décembre 1940, les Anglais lancent une offensive terrestre sur Tobrouk et Benghazi alors sous contrôle de l'Italie. Pour aider les Italiens, Hitler doit envoyer des troupes de l'Afrikakorps, commandées par Erwin Rommel, qui inflige des défaites aux Anglais jusqu'à ce que la situation s'inverse lors de la seconde bataille d'El Alamein, dont Churchill dit dans un de ses discours de guerre les plus mémorables : Maintenant ce n'est pas la fin. Ce n'est même pas le commencement de la fin. Mais c'est, peut-être, la fin du commencement. Néanmoins, à cette époque Churchill et l'Angleterre ne sont plus seuls, l'URSS de Staline ayant été entrainée dans la guerre le 22 juin 1941 par une attaque allemande opération Barbarossa et les États-Unis le 7 décembre 1941 par l'attaque de Pearl Harbor. Dans un premier temps, l'entrée en guerre du Japon cause bien des problèmes à Churchill. En effet, les Japonais attaquent les possessions anglaises en Birmanie, en Malaisie, pendant la bataille de Hong Kong et à Singapour. Les forces anglaises subissent de sérieux revers, ne parvenant alors à se maintenir qu'en Birmanie. Parallèlement, Churchill enregistre la perte de deux cuirassés, le HMS Prince of Wales et le HMS Repulse, ce qui rend inopérante la stratégie de Singapour.

Churchill le stratège La stratégie de Churchill

Avec la disposition des forces, à El Alamein, c'est la première victoire des Alliés, le 23 novembre 1942.
En 1940, Churchill est certainement le dirigeant britannique ayant la plus vaste expérience dans le domaine de la stratégie, tant par sa participation aux gouvernements anglais durant la Première Guerre mondiale que par les réflexions élaborées lors de l'écriture des six volumes de The World in Crisis, dans lequel il écrit : la manœuvre qui aboutit à introduire un nouvel allié à vos côtés est aussi fructueuse qu'une victoire sur le champ de bataille. Une phrase que sa femme Clementine eût aimé qu'il la mît en pratique dans la vie politique, où, à son sens, il est surtout doué pour transformer des alliés potentiels en ennemis résolus. Les points forts de Churchill sont de bien saisir les enjeux essentiels et sa capacité à prendre des décisions à haut risque. Il est aussi très inventif et imaginatif. Pourtant, il s'agit ici aussi bien d'un point fort que d'un point faible, comme l'aurait dit en effet Franklin Delano Roosevelt : Winston a cent idées par jour, dont trois ou quatre sont bonnes. De fait, il élabore parfois des plans chimériques et ses collaborateurs doivent déployer beaucoup d'énergie pour l'empêcher de les mettre en œuvre. De plus, il se mêle de tout ; le Chief of the Imperial General Staff, Alan Brooke, dit de lui qu'il veut coller ses doigts dans chaque gâteau avant qu'il ne soit cuit.
Lorsque les États-Unis entrent en guerre fin 1941, les discussions stratégiques entre les deux grands alliés du camp occidental sont vives. Churchill est peu intéressé par l'océan Pacifique et sa région. En Europe, il est favorable à une stratégie indirecte, dite parfois stratégie périphérique, d'affaiblissement de l'Allemagne, appuyée sur un emploi de la force navale. Face à cela, les États-Unis ont une approche d'attaque plus directe, et se méfient du point de vue de Churchill, qu'ils soupçonnent d'être dicté par des intérêts impériaux. Au départ, Churchill gagne et fait approuver une opération de débarquement en Afrique du Nord : l'opération Torch. Ce débarquement se situe à une période clé. En effet, jusqu'à la mi-1942, les Alliés ne cessent d'accumuler les défaites : chute de Singapour le 15 février 1942, de Rangoon le 8 mars, puis de Tobrouk le 21 juin. En revanche, après la Seconde bataille d'El Alamein fin 1942, les choses changent et les victoires se succèdent. En janvier 1943, à la conférence de Casablanca, Churchill continue à faire prévaloir son option et se réjouit de la décision d'effectuer un débarquement en Sicile : c'est l'Operation Husky. Alors que le général Eisenhower recherche un juste équilibre des forces alliées entre les armées engagées dans la conquête de l'Italie et celles devant participer à l'operation Overlord, Churchill préconise vainement de prélever des troupes pour une intervention à Rhodes. Il est en effet persuadé, à tort, qu'une telle intervention pourrait faire basculer la Turquie alors neutre, dans le camp des alliés. Concernant l'approche directe centrée sur l'operation Overlord, l'échec du débarquement de Dieppe en août 1942 en a montré les dangers. Néanmoins il s'y rallie et à partir de 1944, la stratégie américaine prévaut. Néanmoins lorsque les Alliés organisent un débarquement en Provence, Churchill eût préféré que l'armée alliée stationnée en Italie marche sur Vienne

Controverse sur certaines décisions stratégiques : le bombardement de Dresde

En 1942, les Alliés optent pour un bombardement stratégique de l'Allemagne en effectuant le 30 mai 1942 le bombardement de Cologne par environ mille avions alliés. Churchill doute rapidement de cette stratégie très coûteuse pour l'Angleterre, perte de 56 000 pilotes et membres d'équipage en trois ans. Le bombardement entre le 13 février et le 15 février 1945, par les Britanniques et les Américains, de la ville de Dresde entraîne une polémique. Plusieurs raisons à cela : il s'agit d'une ville avec un passé culturel important, et le bombardement fait un nombre de victimes civiles élevé alors que la fin de la guerre est proche et que la cité est bondée d'Allemands blessés comme de réfugiés. Cette action reste celle des Alliés la plus controversée sur le front occidental. Churchill déclare après le bombardement, dans un télégramme top secret : Il me semble que le moment est venu où la question du bombardement intensif des villes allemandes devrait être examinée du point de vue de nos intérêts propres. Si nous prenons le contrôle d'un pays en ruine, il y aura une grande pénurie de logements pour nous et nos alliés ... Nous devons veiller à ce que nos attaques ne nous nuisent pas, sur le long terme, plus à nous-mêmes que ce qu'elles nuisent à l'effort de guerre de l'ennemi.
Malgré tout, la responsabilité de la partie britannique de l'attaque incombe à Churchill, et c'est pour cette raison qu'il est actuellement critiqué pour avoir permis les bombardements. L'historien allemand Jörg Friedrich affirme que sa décision de bombarder une région d'une Allemagne sinistrée entre janvier et mai 1945 était un crime de guerre, alors que le philosophe Anthony Grayling, dans des écrits de 2006, remet en question l'ensemble de la campagne de bombardement stratégique par la RAF, en exposant comme argument que bien que n'étant pas un crime de guerre, il s'agissait d'un crime moral et nuisible à l'affirmation selon laquelle les Alliés ont mené une guerre juste. Certains affirment aussi que la participation de Churchill dans la décision du bombardement de Dresde est fondée sur les orientations stratégiques et les aspects tactiques pour gagner la guerre. La destruction de Dresde, qui fut immense, avait été décidée dans le but d'accélérer la défaite de l'Allemagne. L'historien britannique Frederick Taylor affirme que : Toutes les parties ont bombardé les villes des autres pendant la guerre. Un demi-million de citoyens soviétiques, par exemple, décèdent des suites de bombardements allemands pendant l'invasion et l'occupation de la Russie. C'est à peu près équivalent au nombre de citoyens allemands qui décèdent des suites de raids des forces alliées. Mais la campagne de bombardement des Alliés est rattachée aux opérations militaires et cesse dès que les opérations militaires ont cessé.

Churchill et la guerre de l'ombre

Churchill, dès son premier passage en tant que premier Lord de l'Amirauté, s'est intéressé aux problèmes de décryptage. À peine revenu aux affaires, il crée à Bletchley Park un centre chargé de casser les codes ennemis et qui emploie de très nombreux scientifiques, souvent étudiants ou enseignants des universités de Cambridge et d'Oxford. C'est ce service qui poursuivit le travail de décryptage d'Enigma initié par le Biuro Szyfrów. Ces moyens de décodage lui sont d'une grande utilité tout au long de la guerre, notamment lors de la bataille de l'Atlantique, ainsi que lors du débarquement de Normandie. D'une façon générale, Churchill s'est toujours intéressé au renseignement et, dès 1909, a soutenu la création par le gouvernement Asquith, auquel il appartenait, la création du MI5 et du MI6.
En sus des services traditionnels évoqués précédemment Churchill crée le MI9 chargé de récupérer les militaires ou les résistants tombés derrière les lignes ennemies. En lien avec sa stratégie indirecte d'affaiblissement de l'ennemi, il crée aussi le Special Operations Executive ou SOE, rattaché au ministère de la Guerre économique dirigé par Hugh Dalton, un travailliste, ancien de la London School of Economics. Le SOE est présent dans tous les pays européens, où il apporte un soutien logistique et organisationnel à la Résistance. En France, il coopère avec de nombreux groupes de résistance, grâce à la formation d’une centaine de réseaux chargés du recrutement et de l’entraînement, de la fourniture d’armes, des sabotages et de la préparation de la guérilla de libération. Actif aussi en Asie, le SOE, nommé Force 136, compte parmi ses agents l'écrivain français Pierre Boulle. Concernant la Yougoslavie, la direction du SOE du Caire, qui traite ces dossiers, est infiltrée d'après François Kersaudy par les communistes, dont le plus notable est James Klugmann.
Sont également créées à cette époque des troupes de forces spéciales comme le Special Air Service et le Combined Operations qui mène plusieurs actions commandos, dont l'opération Chariot à Saint-Nazaire dans le cadre de la traque du cuirassé Tirpitz. Enfin, pour mettre fin à la palette de moyens disponibles, Churchill crée le Political Warfare Executive, chargé de la propagande. Ce service dépend autant du Foreign Office, ministère des Affaires Étrangères que du ministère de l'Information.

Churchill et ses principaux alliés

Churchill, en pensant à l'entente que son ancêtre le duc de Malborough a constitué contre Louis XIV, appelle Grande Alliance la coalition composée de l'Angleterre, des États-Unis et de l'URSS. En général, les Français s'en sentent également partie.

Relations avec les États-Unis

Les bonnes relations qu'entretient Churchill avec Franklin D. Roosevelt facilitent l'obtention par la Grande-Bretagne du ravitaillement dont elle a besoin nourriture, pétrole et munitions par les routes maritimes de l'Atlantique du Nord. Aussi, il est soulagé lorsque le président américain est réélu en 1940. Roosevelt met immédiatement en œuvre une nouvelle méthode pour la fourniture et le transport du matériel militaire vers la Grande-Bretagne, sans la nécessité d'un paiement immédiat : le prêt-bail. Après l'attaque de Pearl Harbor, la première pensée qu'a Churchill, prévoyant l'entrée en guerre des États-Unis est : Nous avons gagné la guerre.
Churchill plaide tant pour l'idée de special relationship pour caractériser la relation entre les deux pays qu'elle devient un lieu commun, même si en réalité les choses sont plus complexes, les deux pays ayant par exemple des visions divergentes sur la décolonisation. Churchill, qui écrit plus tard un livre intitulé A History of the English-Speaking Peoples, est également très sensible à l'idée d'une communauté constituée par ceux qui parlent la même langue. Plus généralement, il est l'un de ceux qui travaillent le plus à l'adoption de la notion d'Occident, entendu comme foyer de la liberté et de la démocratie investi de la mission sacrée de lutter contre la tyrannie. C'est dans cette optique qu'il dresse les grands axes de la charte de l'Atlantique, adoptée lors d'une rencontre avec Roosevelt au large de Terre-Neuve le 12, c'est-à-dire avant l'entrée en guerre des États-Unis. La rencontre débute par un office religieux dont Churchill a choisi les chants, dont le Onward, Christians Soldiers.

Relations avec l'Union soviétique

Quand Hitler envahit l'Union soviétique, Winston Churchill, anticommuniste convaincu, déclare : Si Hitler voulait envahir l'enfer, je pourrais trouver l'occasion de faire une recommandation favorable au diable à la chambre des Communes, en référence à sa politique à l'égard de Staline. Bientôt, de l'équipement et des blindés britanniques sont envoyés, via les convois de l'Arctique, afin d'aider l'Union soviétique.
Le gouvernement polonais en exil et une partie des Polonais reprochent à Churchill d'avoir accepté des frontières entre la Pologne et l'Union soviétique et entre l'Allemagne et la Pologne qui ne leur conviennent pas. Cela l'agace et il déclare en 1944 nous ne nous sommes jamais engagés à défendre les frontières de la Pologne de 1939, affirmant aussi que la Russie a droit à une frontière inexpugnable à l'ouest. En fait, Churchill cherche à éviter les mélanges de populations comme il l'expose à la Chambre des communes le 15 décembre 1944 : l'expulsion est la méthode qui, pour autant que nous ayons pu le constater, sera la plus satisfaisante et durable. Il n'y aura pas de mélange des populations causant des problèmes sans fin... Une remise à zéro sera faite. Je ne suis pas alarmé par ces transferts, qui sont plus que faisables dans des conditions modernes. Cependant, l'expulsion des Allemands est réalisée par l'Union soviétique d'une manière qui aboutit à beaucoup plus de difficultés et, selon un rapport de 1966 du Ministère ouest-allemand des réfugiés et des personnes déplacées, à la mort de plus de 2,1 millions de personnes. Churchill s'oppose à l'annexion de la Pologne par l'Union soviétique et l'écrit amèrement dans ses livres, mais il est incapable de l'empêcher lors des différentes conférences.
Les Polonais reprochent aussi à Churchill et au monde occidental en général la tiédeur de leur réaction face au massacre de Katyń avril-mai 1940, où des milliers de membres de l'élite polonaise ont été exécutés par l'Armée rouge, qui s'en dédouane en accusant les nazis. Le Premier ministre, informé de l'implication des Soviétiques, la condamne en privé, mais refuse d'accuser l'URSS pour ne pas menacer la Grande Alliance et empêche une investigation de la Croix-Rouge.

Relations avec la France

Churchill et Charles de Gaulle descendant l'avenue des Champs-Élysées durant la parade célébrant l'armistice de 1918, le 11 novembre 1944 à Paris.
Churchill s'oppose au maréchal Pétain et au général Weygand sur l'idée d'armistice dès les 11-12 juin 1940 lors d'une rencontre à Briare, puis à nouveau le 13 juin à Tours. Le projet d'Union franco-britannique élaboré par Jean Monnet et Churchill en 1940 qui vise à fusionner les deux pays et leurs territoires est abandonné le 16 juin 1940, à la suite de la démission de Paul Reynaud et de la nomination du maréchal Pétain comme président du Conseil. Deux jours plus tard, il autorise le général de Gaulle à lancer l'Appel du 18 juin. Le 22 juin la France signe l'armistice et le régime de Vichy devient l'adversaire du Royaume-Uni, lequel soutient la France libre. Le 2 juillet 1940 est lancée l'opération Catapult, visant à rallier la flotte française ou à la neutraliser.
Les relations entre deux hommes de fort caractère, ayant des idées sur l'Histoire, l'Europe et la guerre assez proches, connaissent des hauts et des bas, liés à des divergences d'intérêts. La presse française s'est fait l'écho dans les années 2000 d'un projet de Churchill, auquel s'est rallié Roosevelt, qui pense que de Gaulle est peut-être un honnête homme, mais il a des tendances messianiques, il croit avoir le peuple de France derrière lui, ce dont je doute. Ils visent à se débarrasser politiquement du général, en lui offrant le poste de gouverneur de Madagascar, et à mettre à sa place le général Henri Giraud, qu'ils jugent plus malléable. Le projet est abandonné lorsque Clement Attlee et Anthony Eden, ayant eu vent de la nouvelle, s'opposent à toute action contre de Gaulle, argumentant qu'ils ne peuvent se permettre de perdre l'appui des Forces françaises libres.
Si de Gaulle veut à tout prix que la France apparaisse comme victorieuse à la fin de la guerre, aux côtés des États-Unis, du Royaume-Uni et de l'URSS, ses alliés n'ont pas le même point de vue et l'écartent délibérément de la conférence de Yalta. Cela tend leurs relations, d'autant plus que Churchill et Roosevelt craignent que de Gaulle décide finalement de s'allier aux Soviétiques. Néanmoins Churchill, qui comprend que le soutien d'une autre puissance coloniale européenne est un atout majeur au sein du futur Conseil de sécurité des Nations unies, fait le nécessaire pour que la France en devienne le cinquième membre permanent. Plus tard, après la guerre, de Gaulle parlera du Premier ministre britannique comme du Grand Churchill.

Churchill et les conférences interalliées structurant le monde de l'après-guerre

L'Europe au sortir de la Seconde Guerre mondiale.
Bloc de l'Ouest, pays de l'OTAN
Bloc de l'Est, pays du pacte de Varsovie
Rideau de fer
Pays neutres
Mouvement des non-alignés l'Albanie finira par rompre avec l'URSS pour s'aligner sur la Chine populaire
Churchill participe à douze conférences inter-alliées stratégiques avec Roosevelt, auxquelles Staline est aussi parfois présent. Certaines d'entre elles marquent profondément le monde de l'après-guerre.
La conférence Arcadia, du 22 décembre 1941 au 15 janvier 1942, décide de la stratégie L'Allemagne d'abord et proclame la Déclaration des Nations unies, qui doit aboutir à la création de l'Organisation des Nations unies. Par ailleurs, il est décidé de continuer l'effort en matière d'arme nucléaire, d'un plan de production d'avions et de chars d'assaut, ainsi que de la création à Washington d'un Comité des chefs d'état-major combiné . Enfin, Churchill et Roosevelt ont de longues conversations concernant l'Empire britannique en général et l'Inde en particulier.
Lors de la conférence de Québec, du 17 au 24 août, il est surtout décidé que le débarquement de Normandie aura lieu en mai 1944. Churchill accepte qu'il soit dirigé par un Américain, en contrepartie de quoi il obtient que le général britannique Henry Maitland Wilson commande en Méditerranée, et que Louis Mountbatten soit promu commandant suprême allié pour l'Asie du Sud-Est. Avec le président américain Franklin D. Roosevelt, il signe une version plus modérée du plan Morgenthau original, dans laquelle ils s'engagent à transformer l'Allemagne, après la capitulation inconditionnelle, en un pays d'un style essentiellement agricole et pastora.
C'est à la conférence de Téhéran, de fin novembre à début décembre 1943, qu'il prend conscience que le Royaume-Uni n'est plus qu'une petite nation. Il écrit à Violet Bonham Carter j'étais là assis avec le grand ours russe à ma gauche, et à ma droite le gros buffle américain. Entre les deux se tenait le pauvre petit bourricot anglais.
Lors de la conférence Tolstoï du 9 au 19 octobre 1944, Il glisse à Staline un vilain petit document où est inscrit, Roumanie : 90% URSS, 2 Grèce : 90% Grande-Bretagne, Yougoslavie : 50% -50%, Hongrie : 50%-50%, Bulgarie 90% URSS, que Staline approuve. Churchill, fidèle à la tradition stratégique anglaise, est soucieux du sort de la Grèce où le Special Operations Executive est très actif. Début 1944, après maintes péripéties, il parvient à maintenir le pays dans le bloc occidental.

Lors de la conférence de Yalta du 4 au 11 février 1945, Churchill est inquiet et nerveux, car il sait qu'il existe des fissures au sein du camp occidental et notamment entre lui, partisan de la realpolitik, et Roosevelt, plus idéaliste. Malgré tout, Yalta pour François Bédarida ne fait qu'entériner la carte de guerre à laquelle sont parvenus les belligérants en 1945. Churchill est accueilli avec réserve dans les milieux officiels britanniques, qui lui reprochent d'avoir trop cédé aux Soviétiques, notamment sur la Pologne. Il fait observer à un ami, Harold Nicolson, que les bellicistes du temps de Munich sont devenus des partisans de l'apaisement, ce sont les anciens apeasers qui sont devenus bellicistes.
À la conférence de Potsdam du 17 juillet au 2 août 1945, les propositions des nouvelles frontières de l'Europe et des colonies sont officiellement acceptées par Harry S. Truman, Churchill et Staline. Churchill est extrêmement favorable à Truman durant ses premiers jours au pouvoir, disant de lui qu'il est le type de leader dont le monde a besoin, lorsque celui-ci a le plus besoin de leader. Notons que Churchill au début de la conférence est assisté par Clement Attlee, qui, une fois Churchill battu lors des élections générales, représente seul la Grande-Bretagne au moment de la signature.

Un manque de vision sur le devenir économique du pays

Churchill saluant la foule à Whitehall, le jour de son discours à la nation annonçant que la guerre avec l'Allemagne a été remportée, le 8 mai 1945.
Churchill se passionne pour les affaires liées à la guerre, à la géopolitique et à la diplomatie, et laisse les affaires intérieures au conservateur John Anderson et aux travaillistes. Par ailleurs, tout comme les autres personnalités politiques de son gouvernement de coalition, il n'a ni objectifs économiques de guerre ni vision de l'économie d'après guerre. Pour Robert Skidelsky, c'est précisément l'échec du gouvernement à définir une vision économique du monde qui précipite la rupture de la coalition conservatrice-travailliste et cause la défaite des conservateurs, et donc de Churchill, en 1945. Durant la guerre, l'indifférence de la classe politique et de Churchill envers ce domaine laisse une grande latitude aux économistes qui vont pouvoir faire avancer leurs propres projets.
Lorsqu'en 1942 William Beveridge présente son plan sur la sécurité sociale, Keynes obtient du Trésor la constitution d'un groupe de travail composé de lui-même, de Lionel Robbins et d'un actuaire afin de reprofiler le projet de façon à le rendre financièrement acceptable, mais les politiques, dont Churchill, s'impliquent peu dans le sujet que ce soit pour le critiquer ou le soutenir. De même, les négociations de Bretton Woods sont menées par Keynes, ou plutôt par le tandem Keynes-Lionel Robbins, sans réelle implication du Premier ministre et plus généralement du personnel politique.
Une des causes de cette situation tient à ce que Churchill n'a pas de grandes connaissances, ni peut-être un grand attrait pour l'économie et ce d'autant qu'il a conscience de s'être trompé dans les années 1920, lorsqu'il a fait revenir l'Angleterre à l'étalon-or. Aussi il a tendance à faire confiance à Keynes avec qui il dîne régulièrement au The Other Club. C'est Churchill qui, en 1942, propose au roi d'élever Keynes à la pairie. Dans une intervention radiophonique de 1945, à l'occasion des élections générales, le Premier ministre prononce un discours contre l'économie planifiée. Clement Attlee, son opposant travailliste, voit les sources théoriques de cette intervention dans l'essai La Route de la servitude de l'économiste libéral Friedrich Hayek. En fait, Hayek et Churchill ne se sont rencontrés qu'une fois85. Néanmoins les conservateurs ont participé à la mise au point d'une version abrégée de l'ouvrage – on ignore l'implication réelle de Churchill en ce domaine – qui a été publié sur du papier alloué au parti conservateur pour sa campagne, car l'Angleterre souffrant alors de pénurie le papier était contingenté.

Fin de la Seconde Guerre mondiale et sortie de scène

En juin 1944, les forces alliées débarquent en Normandie et repoussent les forces nazies vers l'Allemagne au cours de l'année suivante. Le 28 mars 1945, le général Eisenhower informe Staline qu'il arrête ses troupes sur l'Elbe, et que donc les deux armées devront y faire leur jonction. Si Staline approuve cette décision, Churchill est très mécontent, car d'une part, il n'a pas été informé officiellement de la décision alors qu'un tiers des unités combattantes sont britanniques ou canadiennes, et d'autre part, il désapprouve la décision sur le fond estimant que l'objectif est Berlin. Malgré tous ses efforts, la décision est maintenue.
Le 12 avril 1945, Franklin Delano Roosevelt meurt, ce qui provoque les larmes de Churchill. Un de ses biographes, François Kersaudy, se demande s'il ne s'est pas fait des illusions sur la réalité de sa relation avec Roosevelt, qu'il analyse lui comme étant pour le Président américain un éphémère mariage de convenance avec un impérialiste antédiluvien.
Le 7 mai 1945, au siège du SHAEF à Reims, les Alliés acceptent la reddition de l'Allemagne nazie. Le même jour, dans un flash d'information de la BBC, John Snagge annonce que le 8 mai est la journée de la victoire en Europe. Churchill annonce à la nation que l'Allemagne a capitulé, et qu'un cessez-le-feu définitif sur tous les fronts du continent entre en vigueur une minute après minuit, cette nuit-là. Par la suite, il déclare à une foule immense à Whitehall : Ceci est votre victoire. Le peuple répond : Non, c'est la vôtre, et Churchill entame le chant du Land of Hope and Glory avec la foule. Dans la soirée, il fait une autre annonce à la nation en affirmant que la défaite du Japon se concrétisera dans les mois à venir.
Le 19 mai 1945, le Parti travailliste décide de quitter la coalition. Churchill demande la dissolution du Parlement et annonce que les élections se tiendront le 5 juillet ; les résultats ne pourront être connus que le 26 juillet 1945 du fait de la dispersion des soldats mobilisés. Aussi, il peut assister au début de la Conférence de Potsdam qui s'ouvre le 17 juillet 1945. Il prend toutefois la précaution de s'y rendre avec Clement Attlee, le vice-Premier ministre et son futur successeur. Les résultats des élections générales de 1945 sont sans appel : les travaillistes obtiennent 393 sièges contre 210 aux conservateurs alliés aux libéraux et Churchill, battu, remet rapidement sa démission au roi. De nombreuses raisons expliquent son échec : le désir de réforme d'après-guerre qui se répand au sein de la population, ou le fait qu'elle pense que l'homme qui a conduit le Royaume-Uni pendant la guerre n'est pas le mieux avisé pour le conduire en temps de paix. En effet, Churchill est surtout considéré comme un warlord, ou seigneur de guerre. Par ailleurs, les deux responsables conservateurs Brendan Bracken et Lord Beaverbrook, que Clementine Churchill n'apprécie pas, ne sont pas des modèles de finesse politique. Enfin, Churchill, las, est excessif dans ses discours. Quoi qu'il en soit, lorsque les Japonais capitulent trois mois plus tard, le 15 août 1945, mettant définitivement fin à la guerre, il n'est déjà plus au pouvoir.

Churchill et la politique après 1945 Le chef de file de l'opposition conservatrice

Si sa femme accueille bien la défaite de Winston Churchill, lui est plutôt malheureux. Dépressif, il se remet à la peinture à l'occasion d'un séjour sur le lac de Côme à l'automne 1945. Pendant six ans, il sert en tant que chef de l'opposition officielle et se préoccupe peu de politique intérieure, préférant les affaires du monde sur lesquelles il continue d'influer. Au cours de son voyage de mars 1946 aux États-Unis, il fait un discours sur le rideau de fer, évoquant l'URSS et la création du bloc de l'Est. Il déclare :
De Stettin sur la Baltique à Trieste sur l'Adriatique, un rideau de fer s'est abattu sur le continent. Derrière cette ligne se trouvent toutes les capitales des anciens États d'Europe centrale et orientale. Varsovie, Berlin, Prague, Vienne, Budapest, Belgrade, Bucarest et Sofia ; toutes ces villes célèbres et leurs populations sont désormais dans ce que j'appellerais la sphère d'influence soviétique, et sont toutes soumises, sous une forme ou une autre, non seulement à l'influence soviétique mais aussi au contrôle très étendu et dans certains cas croissant de Moscou.
Churchill imprime au conservatisme anglais une ligne de centre droit, appelée par les Anglais le butskellism, du nom des ministres Rab Butler, un conservateur, et son homologue travailliste Hugh Gaitskell. Selon François Bédarida, il s'agit d'une expression symbolique de l'hybride bipartisan entre centre droit et centre gauche à laquelle Margaret Thatcher s'est fortement opposée plus tard.

Churchill et l'Europe

Churchill est intéressé par le projet européen d'Aristide Briand dès l'entre-deux-guerres. Après la Seconde Guerre mondiale, il est président d'honneur du congrès de La Haye et participe à la mise en place du Conseil de l'Europe en 1949. Néanmoins sa vision n'est pas celle de Jean Monnet, aussi approuve-t-il que son pays n'entre pas dans la Communauté européenne du charbon et de l'acier, qu'il considère comme un projet franco-allemand.
Il élabore la théorie des trois cercles : le premier cercle est constitué par l'Angleterre et le Commonwealth, le deuxième par le monde anglophone autour des États-Unis et le troisième l'Europe. Il constate que l'Angleterre, qui est à la croisée des trois cercles, a un rôle privilégié à jouer. Nous sommes avec l'Europe, mais sans faire partie de l'Europe, with Europe, but not of it. Nous avons des intérêts communs mais nous ne voulons pas être absorbés.

Second mandat de Premier ministre et déclin de l'Empire britannique

Après les élections générales de 1951, Churchill redevient Premier ministre. Son troisième gouvernement, après celui durant la guerre et le bref gouvernement de 1945, dure jusqu'à sa démission en 1955. Ses priorités nationales sont alors éclipsées par une série de crises de politique étrangère, qui sont en partie le résultat du mouvement déjà amorcé du déclin de l'armée britannique, du prestige et du pouvoir impérial. Étant un fervent partisan de la Grande-Bretagne en tant que puissance internationale, Churchill répond souvent à de telles situations avec des actions directes. Il envoie par exemple des troupes britanniques au Kenya pour faire face à la rébellion Mau Mau. Essayant de conserver ce qu'il peut de l'Empire, il déclare : je ne présiderai pas un démembrement.

Malaisie en guerre

Une série d'événements qui sont devenus connus sous le nom d'insurrection malaise s'ensuivent. En Malaisie, une rébellion contre la domination britannique est en cours depuis 1948. Une fois de plus, le gouvernement de Churchill hérite d'une crise, et ce dernier choisit d'utiliser l'action militaire directe contre les opposants. Il tente également de construire une alliance avec ceux qui soutiennent encore les Britanniques. Alors que la rébellion est lentement défaite, il est cependant tout aussi clair que la domination coloniale de la Grande-Bretagne n'est plus possible.

La santé déclinante

En juin 1953, à l'âge de 78 ans, il est victime d'un accident vasculaire cérébral alors qu'il se trouve au 10 Downing Street. La nouvelle est tenue secrète alors qu'officiellement on annonce au public et au Parlement qu'il souffre d'épuisement. Il se rend à Chartwell où il réside durant sa période de convalescence, l'attaque cérébrale ayant altéré son élocution dans ses discours et diminué sa capacité à marcher. Il revient à la politique en octobre pour prendre la parole en public lors d'une conférence du Parti conservateur à Margate. Dans les années qui suivent cependant, il doit admettre la nécessité de ralentir ses activités physiques et intellectuelles. Il décide de prendre sa retraite en 1955 et est remplacé au poste de Premier ministre par Anthony Eden.

L’homme et sa postérité

Churchill passe une grande partie de sa retraite à son domicile de Chartwell, dans le comté de Kent. Il l'achète en 1922 après la naissance de sa fille Mary.

Le caractère

Par moments, l'esprit du mal s'empare de lui, et je le considère comme un petit garçon très désobéissant, très insupportable et dangereux, un petit garçon qui mériterait le fouet. Ce n'est qu'en pensant à lui de la sorte que je peux continuer à l'aimer.
— H. G. Wells
Churchill n'est pas à proprement parler un homme raisonnable. Il écrit de lui-même : c'est lorsque je suis Jeanne d'Arc que je m'exalte. Manchester écrit à ce propos : il était bien davantage un Élie, un Isaïe : un prophète. Selon ce même biographe, une enfance malheureuse avec des parents au mieux indifférents, où seule sa nourrice, Elizabeth Everest, lui donne de l'amour parental, explique en partie la scolarité chaotique de Churchill. Il écrit à ce propos, aussi haut qu'il s'élevât, l'homme qui avait connu, enfant, les brimades et les coups sut toujours s'identifier au perdant. Tout au fond de lui, du reste, il fut toujours un perdant. Il souffrit toute sa vie d'accès de dépression, sombrant dans les abîmes menaçants de la mélancolie.
Même si son parcours scolaire est moyen, celui de Franklin Delano Roosevelt l'est aussi, il a malgré tout un certain nombre de qualités qui en font un grand politique. Il a une excellente mémoire, c'est un orateur qui sait toucher les gens, il sait prendre des décisions rapides et faire preuve de magnanimité dans la victoire. Il a aussi des défauts. Ses projets parfois très aventureux peuvent tourner mal, engendrant une certaine défiance de la classe politique envers lui. De plus, il ne sait pas toujours juger les hommes et manque parfois d'antennes pour comprendre la société anglaise et son appartenance à l'aristocratie le dessert : son côté patricien explique en partie les éclipses de sa carrière.
Churchill aime les parades, les bannières qui flottent au vent, le son du clairon, et se désole que la guerre soit devenue une affaire de chimistes masqués et de conducteurs manœuvrant les leviers de leurs aéroplanes, de leurs mitrailleuses. Pour lui, la guerre garde un côté chevaleresque, arthurien, comme la vie pour Peter Pan, une immense aventure.
Politiquement, sa vision de la guerre et de la paix est totalement différente de celle de notre époque. Nous considérerions selon l'auteur cité que la paix est la norme et la guerre une aberration primitive, Churchill penserait strictement l'inverse. De façon générale, il aime le passé et vit, non pas dans le passé, mais avec un passé toujours présent. Tant à l'écrit qu'à l'oral, son expression reste profondément victorienne avec des expressions telles que je vous prie de.. ou je me permets de dire. À Harold Laski qui lui reproche d'être un vestige chevaleresque et romantique de l'impérialisme anglais du XVIIIe siècle, il rétorque j'aime vivre dans le passé. Je n'ai pas l'impression que l'avenir réserve beaucoup d'agrément aux hommes.
Il aime se déguiser, paraître, faire le spectacle. Il possède plus de chapeaux que son épouse, il ne se rend au Parlement ou à Buckingham Palace qu'en redingote et il porte les uniformes les plus variés en arborant avec délectation les décorations qui lui ont été décernées.
Il aime le champagne, le cognac et autres boissons ainsi que la bonne chère. L'été, il apprécie de se faire inviter dans des villas sur la côte d'Azur (dans l'entre-deux-guerres il va notamment chez Maxine Elliott et chez sa cousine par alliance Consuelo Vanderbilt ou du côté de Biarritz. Mais ce n'est pas quelqu'un porté sur la danse ou sur les jeux de l'amour et il refuse ou ne voit pas les avances qui lui sont parfois faites par des femmes – dont Daisy Fellowes.
Financièrement c'est un spéculateur perdant-né et dans la vie courante à Chartwell, il a les pires difficultés à équilibrer et à gérer ses comptes. En 1938, à la suite d'une chute de la bourse à Wall Street, il connait des problèmes financiers sérieux qui l'obligent à envisager de mettre en vente Chartwell. Finalement, il arrive à trouver une solution grâce à un prêt de Henry Strakosch.
Dans le domaine littéraire Churchill a une préférence pour les auteurs anglais ; en matière de musique, il aime les chansons populaires comme Ta-ra-ra-boom-der-ay ou Hang Out the Washing on the Siegfried Line ; en matière de cinéma, il a une préférence pour les mélodrames, durant lesquels il pleure beaucoup. Il a vu au moins vingt fois son film préféré, Lady Hamilton, avec Laurence Olivier dans le rôle de l'amiral Nelson et Vivien Leigh dans celui de Lady Hamilton.
Un aspect secondaire de la personnalité de Churchill est son tempérament artistique, c'est un bon peintre et un écrivain de talent.

Le peintre

Winston Churchill commence à s'adonner à la peinture après sa démission en tant que Premier Lord de l'Amirauté en 1915 afin de vaincre sa dépression, qu'il appelait le Black Dog, ou chien noir. Il est ensuite conseillé par John Lavery. Les thèmes sont des paysages anglais mais aussi des scènes du front de Flandres. Par la suite, il peint la Côte d’Azur. Il expose à Paris en 1921, à la galerie Drouet, 20 rue Royale, sous le pseudonyme de Charles Morin, et il vend quelques toiles. La même année, il écrit un petit livre, Painting as a Pastime. Il adopte ensuite le pseudonyme de Charles Winter et se lie d'amitié avec le peintre franco-anglais Paul Maze.
Selon William Rees-Mogg, si dans sa propre vie, il a dû subir le Black Dog de la dépression, dans ses paysages et ses natures mortes, il n’y a aucun signe de dépression. Il est surtout connu pour ses scènes de paysage impressionnistes, dont beaucoup ont été peintes durant ses vacances dans le sud de la France, en particulier à la villa La Pausa chez ses amis Reves, chez son ami le duc de Westminster au château Woolsack, sur les berges du lac d’Aureilhan, ou au Maroc. Une collection de peintures et de memorabilia est conservée au sein de la collection Reves au Dallas Museum of Art tandis que d'autres toiles sont exposées à Chartwell.

L’écrivain et l'orateur Winston Churchill l'écrivain.

Malgré sa renommée et ses origines sociales, Churchill lutte toujours pour faire face à ses dépenses et à ses créanciers. Jusqu'à la loi sur le Parlement de 1911, les députés exercent leur fonction à titre gratuit. De cette date à 1946, ils reçoivent un salaire symbolique. Aussi nombre d'entre eux doivent-ils exercer une profession pour vivre. De son premier livre, The Story of the Malakand Field Force 1898, jusqu'à son deuxième mandat en tant que Premier ministre, le revenu de Churchill est presque entièrement assuré par l'écriture de livres et de chroniques pour des journaux et des magazines. Dans les années 1930, Churchill tire l'essentiel de ses revenus du livre sur son ancêtre le duc de Malborough. Le plus célèbre de ses articles est celui publié dans l'Evening Standard en 1936, avertissant de la montée en puissance d'Hitler et du danger de la politique d'apaisement.
Churchill a écrit seul son premier livre mais, à partir du Monde en crise, il dicte les suivants à des secrétaires et, pour la documentation, il emploie des assistants de recherche issus de l'université d'Oxford. Edward Marsh, son chef de cabinet, relit les manuscrits en corrigeant l'orthographe et la ponctuation. En règle générale, Churchill travaille le matin dans son lit où il mûrit un texte qu'il dicte tard le soir. Il est à ce jour l'unique ancien Premier ministre à recevoir, en 1953, le prix Nobel de littérature pour sa maîtrise de la description historique et biographique ainsi que pour ses discours brillants pour la défense des valeurs humaines. Lors de l'attribution de son prix, Winston est à la fois déçu – il vise le Prix Nobel de la paix – et surpris, s'exclamant : Tiens je ne savais pas que j'écrivais si bien !

Parmi ses œuvres les plus célèbres de renommée internationale, :

Les six volumes de souvenirs, The Second World War, 1948-1954.
Les quatre volumes d'histoire, A History of the English-Speaking Peoples, 1956-1958, qui couvrent la période s'étendant de l'invasion de la Grande-Bretagne par César 55 av. J.-C. au début de la Première Guerre mondiale 1914.
Dans les toutes dernières années de sa vie, il regrette de ne pas avoir écrit les biographies de Jules César et de Napoléon Bonaparte.

L'orateur

À l'origine, Churchill n'est pas un orateur et a même des difficultés d'élocution. Ses discours ne sont pas improvisés, un discours de quarante minutes lui demande entre six et huit heures de préparation. Pour F.E. Smith, Winston Churchill a passé les plus belles années de sa vie à écrire des discours improvisés. De même, pour d'autres, ses bons mots sont parfois travaillés, parfois spontanés – mais dans ces cas là l'auditoire les sent souvent venir car alors son propre rire prenait naissance quelque part du côté de ses pieds. De Clement Attlee, son adversaire travailliste qui ne déteste pas ses piques, il dit un jour qu'il est un mouton déguisé en mouton.
Si Churchill devient un grand orateur, malgré tout, il reste meilleur dans le monologue que dans l'échange. Lord Balfour remarque un jour : l'artillerie du Très Honorable Gentleman est forte et puissante, mais elle ne me semble guère mobile. En général, ses discours commencent sur un tempo lent et dubitatif avant de donner libre cours, à l'essence de sa prose : un rythme hardi, pesant, houleux, retentissant, coulant, interrompu par des cadences lancinantes et éclatantes.
Churchill n'aime ni l'euphémisme, ni le langage technocratique. Par exemple, il s'oppose à ce qu'on remplace pauvres par économiquement faibles, ou foyer par unité d'habitation. Pour lui, les mots, comme il le dit un jour à Violet Bonham-Carter, la fille d'Herbert Henry Asquith, ont une magie et une musique propres. Chez lui, la sonorité du mot est un élément important dans le choix des termes employés. Il aime les mots courts qui frappent dur et aligne souvent les adjectifs par quatre avec des préférences pour unflinching inébranlable, auster austère, somber sombre, et squalid sordide.
Sa rhétorique est parfois contestée. Pour Robert Menzies, Premier ministre d'Australie, durant une partie de la Seconde Guerre mondiale : sa pensée dominante est la possibilité, si attrayante à ses yeux, que les faits gênants disparaissent d'eux-mêmes. Un autre, allié également, écrit : Il est … l'esclave des mots que son esprit invente à partir des idées … et il peut se convaincre lui-même de la vérité dans presque tous les cas, si à travers son mécanisme de rhétorique, il peut continuer ce parcours effréné.

Une politique réaliste

Churchill a été avant tout l'homme des situations. Il leur applique ses conceptions du gouvernement et c'est à leur contact qu'il forge ses idées politiques. Pour lui, la responsabilité de l'homme d'État se fonde sur le loyalisme monarchique et la grandeur britannique. Le loyalisme monarchique impose le respect du système politique, mais aussi la sauvegarde des institutions sociales ; il se montrera toujours passionnément attaché aux prérogatives des Communes comme à celles de l'aristocratie. La grandeur britannique est pour lui l'impératif majeur de l'intérêt national ; c'est ainsi qu'il n'hésitera pas à heurter l'opinion pacifiste de l'entre-deux-guerres. Tout en respectant les rites et conventions politiques, il applique ses conceptions avec une fermeté fortement teintée d'autoritarisme. Il a gardé de la dernière guerre le sentiment que l'homme d'État est essentiellement un chef qui commande, dès lors qu'il prend conscience de sa mission. En cela, il s'est élevé au-dessus des institutions : Premier ministre, il domine son cabinet ; leader du Parti conservateur, il ignore les réactions partisanes. Cependant sa ligne de gouvernement est d'inspiration réaliste et ses choix politiques ne laissent aucune part à l'idéalisme. Passionnément humain, soucieux de faire éclater la vérité, il se sert de l'émotion qui le pénètre pour la communiquer aux autres : « Je n'ai rien à offrir que du sang, du travail, des larmes et de la sueur 1940. Il fait taire les scrupules, au nom des intérêts de son pays, comme pourraient en témoigner les épisodes de Mers el-Kébir ou de Yalta pendant la Seconde Guerre mondiale.
Dans cette atmosphère réaliste, ses idées sont les éléments d'une politique concrète, voire conjoncturelle ; elles peuvent varier selon le moment et la position du personnage sur la scène politique. Elles relèvent toutes de la politique internationale et il ne semble pas que Churchill, convaincu sans doute de l'excellence de l'héritage traditionnel et victorien, ait poursuivi de grands desseins de politique intérieure. Sa première idée est l'impérialisme, la seule dont il gardera la passion, puis la nostalgie avec le déclin de l'empire. Patriote finalement satisfait d'avoir autrefois tempêté contre « l'heure de la faiblesse en Grande-Bretagne » en face de la montée hitlérienne, il défendra l'empire jusqu'au bout et s'insurgera contre l'abandon des Indes par les travaillistes en 1947. Son choix du « grand large » et de l'alliance privilégiée avec les Américains n'en est que le corollaire, dans la conviction que son pays doit jouer aux côtés des États-Unis un rôle particulier dans le concert international. Peut-être l'idée d'une Europe unie qu'il lance en 1947, avant de patronner l'année suivante la fondation du Conseil de l'Europe, se trouve-t-elle dans la même ligne, encore qu'à son retour au pouvoir il se soit bien gardé d'y engager la Grande-Bretagne. Par ailleurs, il s'est fait l'apôtre de l'anticommunisme. Dès 1918, il manifeste son horreur du bolchevisme et réclame une intervention alliée en Russie ; c'est lui qui, dans son célèbre discours de Fulton 1946, parlera le premier du « rideau de fer » et engagera la guerre froide. Mais les sentiments ne l'ont jamais aveuglé et il n'hésite pas à faire de l'U.R.S.S. un allié contre le nazisme, avant de partager avec Staline l'Europe en zones d'influence. En fin de compte, toutes ses conceptions relèvent de la politique et de la diplomatie traditionnelles, mais Churchill leur a parfois donné la vigueur incomparable de son génie et du sentiment de sa mission.

Un témoin de l'histoire

Le général de Gaulle a écrit de Churchill, qu'il connaissait bien, qu'il avait été le grand champion d'une grande entreprise et le grand artiste d'une grande histoire. Sa place dans la société britannique apparaît, en effet, comme celle d'un remarquable leader national pendant la guerre, mais aussi d'un témoin de l'histoire chez qui le passé a quelquefois estompé les difficultés du présent.
Il a été le leader de la Grande-Bretagne et du Commonwealth en guerre : en mai 1940, il est appelé à remplacer Chamberlain comme Premier ministre, parce que l'opinion et les députés savent qu'il s'impose pour diriger la guerre ; en juillet 1945, il se retire parce qu'aux élections les Anglais lui ont préféré, pour la paix, Attlee et les travaillistes. À sa mort, ces années ont été parfaitement résumées par le message de la reine Elizabeth : La survivance de notre pays ... sera un monument perpétuel à la mémoire de ses dons de chef, de sa clairvoyance et de son indomptable courage. Pendant cinq ans, il a fait la guerre, et sa suprématie n'a jamais été mise en question. Il s'est montré un animateur exceptionnel qui sut inspirer aux Anglais sa passion de l'Angleterre. Il s'est manifesté comme un éminent chef de guerre, à la fois par sa capacité de déterminer les grands choix politiques et par son aptitude à régler personnellement les affaires militaires, même si ses généraux s'en sont quelquefois plaints. Churchill appartient à cette lignée d'hommes d'État qui font l'histoire, parce qu'il a marqué la vie de son pays à un moment dramatique.
Ses valeurs étaient tournées vers le passé, mais il ne faut pas y voir un élément contrariant au sein d'une nation où les institutions et les libertés sont traditionnelles. Il a été un homme d'État du XIXe siècle, imprégné de la grandeur victorienne, à un de ces moments privilégiés où le génie politique n'a pas d'époque.
Toutefois, le rétablissement de la paix a relancé la dynamique de l'histoire et, lorsqu'il est revenu au pouvoir en 1951, Mr. Churchill appartenait au passé. Sa légende a maintenu son prestige jusqu'à son départ en 1955, sans que son gouvernement soit véritablement efficace et apprécié. Ses proches et ses amis politiques se faisaient cependant de plus en plus pressants pour l'inviter à la retraite. C'est seulement après sa mort (à Londres en 1965), après quelques polémistes isolés, que lord Moran fait de son illustre malade une critique décisive : « Il a été foncièrement victorien par son incapacité à se mettre au pas de son époque en mouvement. » Le jugement est sévère sur l'après-guerre : « Il est certain que l'âge et les congestions cérébrales successives expliquent en partie pourquoi il ne fut pas plus efficace dans son rôle de leader de l'opposition, et plus tard de Premier ministre de la Couronne. » Mais la condamnation va plus loin et met en cause son obstination, sa conception personnelle du pouvoir, l'excentricité de son jugement, à qui le familier impute les échecs politiques d'après guerre. Cette opinion peut paraître outrancière, mais Churchill n'en a pas moins été dépassé par les problèmes du temps de paix et il émerge finalement du déclin de la Grande-Bretagne d'après guerre par une admirable légende, qu'il faut bien rattacher aux grandeurs victoriennes.

Les honneurs Liste des distinctions de Winston Churchill.

Churchill a reçu au cours de sa vie de nombreuses décorations. Sa titulature officielle est sur le modèle anglo-saxon : Sir Winston Churchill KG, OM, CH, TD, FRS, CP RU, CP Can, DL, Hon. RA. Il est en outre prix Nobel de littérature et premier citoyen d'honneur des États-Unis, a reçu de nombreux autres prix et honneurs. Il est fait Compagnon de la Libération en 1958 par le général de Gaulle. Lors d'un sondage de la BBC tenu en 2002, basé sur environ un million de votes de téléspectateurs, 100 Greatest Britons, il est proclamé le plus grand de tous. Il est également membre à titre héréditaire de la Société des Cincinnati.

Derniers jours et funérailles

Après avoir quitté le poste de Premier ministre, Churchill passe moins de temps au Parlement. Il vit sa retraite à Chartwell et à son domicile londonien du 28 Hyde Park Gate, au sud-ouest de Kensington Gardens. Lorsque son état mental et ses facultés physiques se dégradent, il sombre dans la dépression.

Churchill, sa femme et de nombreux membres de sa famille sont enterrés autour de l'église Saint Martin de Bladon.
En 1963, le président américain John F. Kennedy, agissant en vertu de l'autorisation accordée par une loi du Congrès, le proclame citoyen d'honneur des États-Unis, mais il est dans l'impossibilité d'assister à la cérémonie à la Maison-Blanche. Le 15 janvier 1965, Churchill subit un grave accident vasculaire cérébral qui lui sera fatal : il meurt à son domicile neuf jours plus tard, à l'âge de 90 ans, le matin du dimanche 24 janvier 1965, soit 70 ans jour pour jour après son père.
Les obsèques nationales ont lieu à la cathédrale Saint-Paul de Londres. Ce sont les premières obsèques nationales pour une personnalité ne faisant pas partie de la famille royale depuis 1914. Le cercueil parcourt ensuite la courte distance jusqu'à la gare de Londres-Waterloo où il est chargé sur un wagon spécialement préparé et peint, le Southern Railway Van, dans le cadre du cortège funéraire pour son trajet par chemin de fer jusqu'à Bladon. La Royal Artillery tire dix-neuf coups de canon, comme à son habitude pour un chef de gouvernement, et la RAF met en scène un défilé aérien de seize avions de combat English Electric Lightning. Les funérailles connaissent le plus grand rassemblement de chefs d'État dans le monde, jusqu'en 2005 lors des funérailles du pape Jean-Paul II. Le wagon Pullman transportant sa famille en deuil est remorqué par une locomotive à vapeur Bulleid Pacifique no 34051 Winston Churchill. Dans les champs le long de la voie ferrée, et aux gares rencontrées sur le trajet, des milliers de personnes se tiennent en silence pour lui rendre un dernier hommage. L'hymne lors des funérailles est The Battle Hymn of the Republic. À sa demande, Churchill est enterré dans la parcelle familiale du cimetière de l'église St Martin de Bladon dont dépend le Palais de Blenheim, son lieu de naissance.

La postérité The Winston Churchill Memorial Trust

Lorsque Churchill a 88 ans, le duc d'Édimbourg lui demande comment il aimerait qu'on se souvienne de lui. Churchill lui répond : avec une bourse d'étude comme la bourse Rhodes, mais pour un groupe d'individus plus grand. Après sa mort, le Winston Churchill Memorial Trust est créé au Royaume-Uni et en Australie. Un Churchill Memorial Day Trust a lieu en Australie, ce qui permet d'amasser 4,3 millions de dollars australiens. Depuis ce temps, le Churchill Trust en Australie a soutenu plus de 3 000 bénéficiaires de bourses d'études dans divers domaines, où le mérite soit sur la base de l'expérience acquise, soit en fonction du potentiel et la propension à contribuer à la collectivité ont été les seuls critères.

Churchill, leader préféré des patrons en 2013

Dans une étude réalisée auprès des dirigeants d'entreprises de trente pays, Churchill est considéré début 2013 comme le dirigeant préféré des patrons devant Steve Jobs. Churchill est classé parmi les guerriers avec Napoléon Bonaparte et Alexandre le Grand. Parmi les autres politiques, le Mahatma Gandhi et Nelson Mandela, arrivés troisième et quatrième, sont classés parmi les pacificateurs. Margaret Thatcher est classée parmi les réformateurs et Bill Clinton parmi les bâtisseurs de consensus.

Films et séries montrant Churchill

Le personnage de Churchill apparait dans de nombreux films et séries télévisées. Ont notamment joué son personnage :
Films et téléfilms sur la vie de Churchill :

Simon Ward Les Griffes du lion, 1972, sur sa jeunesse
Richard Burton The Gathering Storm, 1974
Timothy West Churchill and the Generals, 1979
Robert Hardy Winston Churchill: The Wilderness Years, 1981,
Albert Finney The Gathering Storm 2002, sur la période 1934-1939
Bob Hoskins World War II: When Lions Roared 1994
Brendan Gleeson Into the Storm, 2009, sur la Seconde Guerre mondiale
Apparition du personnage Churchill :
Peter Sellers L'Homme qui n'a jamais existé, 1956
Warren Clarke Jennie: Lady Randolph Churchill, 1974
Wensley Pithey Edward and Mrs. Simpson, 1978
William Hootkins The Life and Times of David Lloyd George, 1981
Timothy West Hiroshima, 1995
Ian Mune Ike. Opération Overlord, 2004
Rod Taylor Inglourious Basterds, 2009
Ian McNeice Doctor Who: Victory of the Daleks; The Pandorica Opens; Le Mariage de River Song en 2010 et 2011
Timothy Spall Le Discours d'un roi, 2010

La biographie rédigée par Randolph Churchill et Martin Gilbert

Plusieurs historiens à travers le monde, ont publié des biographies de Winston Churchill. Cependant, celle réalisée par Randolph Churchill et Martin Gilbert apparaît comme la biographie officielle.
À la fin des années 50, le fils de Winston, Randolph, qui est un écrivain reconnu, réussit à convaincre son père de rédiger sa biographie. Randolph doit en effet accéder aux archives de son père, mais demande à ce que cet ouvrage ne soit pas publié avant sa mort.
Dans cette entreprise, Randolph est assisté de l'historien Martin Gilbert et les premiers tomes paraissent dès 1966 aux éditions Heinemann. Lorsque Randolph décède en 1968, seule la période 1874-1914 a été publiée. C'est donc Martin Gilbert qui termine seul la biographie de Winston Churchill.
Cette biographie se subdivise en 8 volumes comprenant la biographie proprement-dite fractionnée sur les périodes 1874-1900, 1901-1914, 1914-1916, 1917-1922, 1922-1939, 1939-1941, 1941-1945 et 1945-1965, ainsi que des volumes Companion qui fournissent divers documents lettres etc..


Liens
http://youtu.be/_wx7lXiJ1_Q les bunkers secrets de Churchill
http://youtu.be/D5uqduSXSyA Mers el kébir
http://youtu.be/_tIuf8t4ra4 La bataille d'angleterre
http://youtu.be/FL2CoYBfkts Le char Churchill
http://youtu.be/CHBCMjyHxwQ Discours aux français
http://www.dailymotion.com/video/x27l ... dans-le-siecle-extrait_tv


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Posté le : 29/11/2014 20:58
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André Thévet
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Le 23 novembre 1590 à Paris meurt André Thevet
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explorateur et écrivain-géographe français, né en 1516 à Angoulême. Linné lui a dédié le genre Thevetia de la famille des Apocynaceae. Cadet d'une famille de chirurgiens-barbiers, à l’âge de dix ans, il est placé contre son gré au couvent des Franciscains ou Cordeliers d'Angoulême. Peu porté sur la religion, il préfère dévorer les livres et voyager.
Protégé par François Ier, ainsi que par les La Rochefoucauld et les Guise, il commença par voyager en Italie, chargé de diverses missions par ses protecteurs. À Plaisance, il se lie avec le cardinal Jean de Lorraine.
Cordelier, visita l'Italie, l'Asie Mineure, la Grèce et la Palestine. En 1555, il fit partie de l'expédition de Villegaignon, partie coloniser le Brésil. En 1558, il fut nommé aumônier de Catherine de Médicis, historiographe et cosmographe du roi. Ses œuvres ont contribué à rendre familière l'idée du bon sauvage : Cosmographie du Levant 1554, les Singularités de la France antarctique 1557, la Cosmographie universelle 1571, 1575, les Vrais Portraits 1584. On lui doit aussi la première description de divers animaux américains : paresseux, opossum, lamentin, tapir.


En bref

André Thevet est l'un des premiers voyageurs européens à avoir pris contact à la fois avec l'Afrique et avec l'Amérique. Dans ses récits, il se comporte en grand reporter et en observateur avisé. Il décrit avec fidélité et minutie tout ce qu'il a vu. Son ouvrage les Singularités de la France antarctique, paru en 1558, est accueilli avec enthousiasme, même si, par la suite, ses détracteurs l'accusent contre toute vraisemblance de n'avoir jamais mis les pieds en Amérique du Sud. L'ouvrage est orné de quarante et une gravures dont onze relatives à la flore et dix à la faune. Dues pour la plupart à des Flamands qui travaillent d'après les dessins de l'auteur, ce sont de véritables œuvres d'art, mais elles ont généralement un caractère trop rudimentaire pour permettre des déterminations précises d'espèces en ce qui concerne les animaux représentés. On doit pourtant à André Thevet la première description de divers animaux américains dont le tapir, l'opossum et l'aï, ou paresseux, qu'il appelle haüt. Ce dernier, qu'il a longuement observé, l'a particulièrement frappé car il ne l'a jamais vu manger, d'où sa conclusion que cette étrange bête devait se nourrir de vent.

Sa vie

Fils de paysans, André Thevet effectue ses études chez les cordeliers de l'ordre de saint François d'Assise d'abord, puis à l'université de Poitiers, et devient le secrétaire du cardinal d'Amboise, archevêque de Rouen, grâce auquel, sans doute, il effectue ses premiers voyages – en Espagne et au Portugal – au début des années 1540. On le retrouve ensuite en Italie. À Rome, il fait la connaissance de François Rabelais, avec lequel il se lie. En 1549 et 1550, il parcourt la Méditerranée, séjourne à Candie, Constantinople, Alexandrie, au Caire ; il accomplit un pèlerinage à Jérusalem et, de là, va à Damas ainsi qu'à Tripoli avant de revenir enfin à Marseille, puis à Paris. La relation de ces voyages paraît en 1554 sous le titre de Cosmographie du Levant.
En 1550-1551, il accompagne au Brésil le capitaine Guillaume Le Testu. Cette expérience lui vaut sans doute d'être désigné par Henri II, en 1555, comme aumônier de l'expédition dirigée par Nicolas Durand de Villegagnon. Chevalier de Malte et navigateur accompli, ce dernier est chargé par le roi de créer un établissement français dans la baie de Rio. L'expédition, qui comprend deux bateaux, quitte Dieppe le 14 août et arrive six mois plus tard sur la côte brésilienne. Dans l'île marécageuse de Ganabra, Villegagnon fonde la colonie de la France antarctique, dont l'existence sera éphémère.
Esprit curieux et ouvert, la plume facile, André Thevet n'arrête pas de prendre des notes ou de dessiner. Durant le voyage en mer, il observe attentivement les divers poissons ou autres animaux marins – marsouins, requins, bonites, dorades, poissons-volants – et recueille les récits des marins concernant des animaux comme le rhinocéros ou le serpentaire de l'île de Madagascar. Une fois au Brésil, il s'intéresse aussi bien aux « sauvages » qui vivent dans la région qu'à la faune et à la flore.
Il collectionne les objets rares ou curieux : les pierres, les coquillages, les squelettes, dents ou peaux d'animaux, les vêtements et chapeaux de plumes qui le fascinent, les poteries, les bijoux et autres objets confectionnés par les Amérindiens.
Lorsqu'une épidémie de peste contraint André Thevet à regagner la France en 1556, il rapporte avec lui tout ce qu'il a recueilli. Ces objets constitueront, avec d'autres cadeaux faits au roi par des voyageurs de l'époque, le Cabinet de curiosités royal, sorte de petit musée dont il se voit confier la garde. Il rapporte également les graines d'une plante aux vertus singulières qu'il est le premier à cultiver en France : le tabac, dont Jean Nicot ne fera la promotion que plusieurs années plus tard.
Nommé cosmographe du roi avant la mort de Henri II, André Thevet écrit une Cosmographie universelle, première encyclopédie moderne dans laquelle il ajoute aux observations réunies par lui lors de ses voyages une foule de renseignements géographiques et historiques pris un peu partout et souvent quelque peu fantaisistes. Cependant, il y combat énergiquement un certain nombre de croyances héritées du Moyen Âge, dont celles touchant les animaux fabuleux : sirènes, serpents ailés, salamandres, licornes...
À partir de 1585, André Thevet travaille à un ouvrage qui ne sera jamais imprimé, le Grand Insulaire, description des îles habitées et inhabitées. Avant de s'éteindre à Paris en 1592, il écrit encore le récit de ses Deux Voyages en Terres australes et occidentales et la Description de plusieurs îles, un abrégé de l'Insulaire

Les tentatives de colonisation française au Brésil provoquèrent beaucoup plus d'intérêt et d'espoir que l'aventure de Jacques Cartier au Canada. La perspective de cette France antarctique attira les huguenots, persécutés en France, et les moines catholiques ; les uns y cherchaient une terre d'asile, les autres un territoire de missions. Cette expérience a été rapportée par des Français ayant des positions politiques et religieuses opposées, mais s'intéressant tous aux cultures nouvellement découvertes. Nicolas Barré fut l'auteur de lettres expédiées de février à mai 1556.
Il y note, avec précision, les caractéristiques du climat tropical, des cultures locales, de la baie de Rio et des Indiens Tupinambas. Le cordelier André Thevet, poussé par une insatiable curiosité, parcourut l'intérieur du pays, interrogeant les Indiens non seulement sur les productions locales, mais aussi sur leurs mœurs, leur langue et leurs traditions. Fort de ces connaissances, Thevet rédigea à Paris, Les Singularitez de la France Antarctique 1558, œuvre au demeurant fort contestée à cause de ses erreurs et de ses inexactitudes. Cependant, sa description des mœurs et croyances religieuses fut fort appréciée et elle contribua à rendre familière l'idée du bon sauvage. Jean de Léry, un pasteur genevois, est l'auteur de l'Histoire d'un voyage fait en la Terre de Brésil 1578. Écrite pour répondre aux critiques faites par Thevet contre les huguenots, cette œuvre est une précieuse relation historique des conflits qui opposèrent catholiques et protestants, mais aussi un document ethnologique sur la culture des Tupinambas. Montaigne s'en inspira pour rédiger plusieurs des plus profonds chapitres des Essais. Outre ces œuvres, il nous reste à citer l'Histoire de la province de Sancta-Cruz que nous nommons ordinairement le Brésil 1576 de Pedro de Magalhãnes de Galdavo et celui de Gabriel Soãres de Souza : Traité descriptif du Brésil 1587, source fondamentale pour la géographie, l'histoire et l'ethnologie.
On est donc frappé, tant par la modernité, que par le nombre et la richesse des chroniques que le Nouveau Monde a inspirées aux navigateurs, explorateurs et missionnaires européens de l'époque de la Renaissance. Il ne faudrait cependant pas oublier que tous ces écrits héritaient de traditions formelles souvent très anciennes. Pline et les histoires naturelles de l'Antiquité ont été les modèles d'Oviedo et d'Acosta ; le Livre des merveilles, de l'Inde et de la Chine de Marco Polo fut l'ancêtre de tous les récits des découvreurs des Indes occidentales. Et surtout l'imagination épique des chroniqueurs de la conquête du Nouveau Monde fut nourrie des romans de chevalerie ; le plus célèbre de ceux-ci dans l'Espagne de l'époque, l'Amadis des Gaules, a été expressément cité par Bernal Díaz del Castillo. Enfin les guerres de l'Ancien Testament ont été présentes à l'esprit et sous la plume des premiers chroniqueurs de la conquête, ceux du Chili notamment. L'émergence d'une nouveauté radicale, celle d'un Nouveau Monde, s'enracine donc dans les traditions hellénique et judéo-chrétienne aussi bien que dans le merveilleux médiéval.

La Renaissance a toute raison d'être un éveil pour la botanique. L'élan des études classiques fait naître de fructueux commentaires des œuvres anciennes et l'imprimerie en assure la diffusion. Le plus célèbre ouvrage est sans doute les Commentarii sur les six livres de Pedacius Dioscorides par Petrus Andreas Matthiolus, 1501-1577. Le commentaire est souvent quatre ou cinq fois plus long que le texte et une série de figures assez bien observées ajoutent encore au prix du livre. Mais il est aussi orienté vers la médecine que le Dioscoride lui-même.

En second lieu, les voyages, la découverte du Nouveau Monde et sa conquête eurent un rôle important dans le développement de la botanique. Des plantes nouvelles furent apportées et parfois introduites en Europe. L'ananas et la pomme de terre en sont les exemples connus : l'ananas est sur la table de Ferdinand d'Espagne ; la papas des hautes régions du Pérou devient plante d'ornement dans les jardins européens. On commence donc à créer, pour recevoir ces plantes, des jardins botaniques (Padoue, Pise.... Après plusieurs Espagnols, de Gomara, notamment, André Thevet, voyageur français, décrit une série de plantes nouvelles dans ses Singularitez de la France antarctique, autrement nommée Amérique 1558. C'est donc partout dans le monde européen que de cette Botanique encore médicinale tente de se dégager la science.

Le voyage au Levant, 1549-1552

En 1549, grâce à l'argent du Cardinal Jean de Lorraine, il embarque pour le Levant. Il visite la Crête et les îles de la Mer Égée. Il séjourne près de deux ans à Constantinople. On pense qu'il aurait alors été espion pour la France. En 1552, il quitte Constantinople et part pour l'Égypte et le mont Sinaï puis la Palestine et la Syrie.
De retour en France, il fait paraître le récit de ce voyage, en 1554, sous le titre de Cosmographie du Levant. Dans cet ouvrage, en fait rédigé par un "nègre littéraire", qui pourrait être François de Belleforest, il énumère les curiosités archéologiques, botaniques et zoologiques rencontrées au cours de son long périple1. Mais ce recensement doit plus à la compilation des auteurs anciens qu’à ses propres observations2. L'ouvrage reçut un bon accueil du public, en raison des 25 gravures sur bois "des bestes, Pyramides, Ypodromes, Colosses, Colomnes & Obélisques, les plus près de la vérité qu'a esté à moy possible"3.

Le voyage au Brésil, 1555

Il repart presque aussitôt comme aumônier de l'expédition du vice-amiral Villegagnon pour établir une colonie française au Brésil destinée à protéger les marins normands qui venaient sur le littoral se procurer le bois rouge, pernambouc (pau brasil en portugais), dont est tiré une teinture rouge. André Thevet séjourne de la mi-novembre 1555 à la fin janvier 1556, sur un îlot à l'entrée de la baie de Rio de Janeiro, là où se trouve la forteresse des Français, le Fort Coligny. Il est le premier à mentionner l’existence de l'Ilha de Paquetá. Malade, il devra cependant rentrer en France après seulement 10 semaines passées sur place.
À son retour il publie, dès la fin 1557, sous forme d'un nouveau livre Les Singularitez de la France antarctique, le compte rendu des observations qu'il a pu faire des pays et peuples vus durant son voyage au Nouveau Monde. L’ouvrage le rendra célèbre et sera traduit en italien et en anglais. Il suscitera aussi imitations et polémiques. Conformément à l'esprit du temps, il s'attarde sur les bizarreries, les singularités susceptibles de surprendre ses contemporains. De plus, en raison de sa maladie, il ne put contrôler toutes les informations que lui rapportaient les truchements, anciens matelots vivant parmi les indiens, qui servaient d’interprètes. Arrivé en France, il utilisera aussi les informations ethnographiques rassemblées par le secrétaire de Villegagnon5 et mettra à contribution un scribe helléniste, Mathurin Héret, chargé de truffer le texte de références aux auteurs grecs et latins. Les nombreuses références à l’antiquité gréco-latine seront un moyen constamment réitéré de réduire l’étrangeté première des sauvages à la familiarité des textes classiques.

Il est un des premiers à donner en français des descriptions peu précises mais honnêtes du manioc, de l'ananas, de l'arachide, de la noix de cajou et du pétun le tabac, ainsi que du "grand ara rouge" Ara macao, du toucan, du paresseux et du tapir. Il offre aussi le premier tableau ethnographique des Indiens Tupinamba. Au XXe siècle, l'ethnologue, Alfred Métraux, dira de l'ultime version augmentée de son voyage au Brésil, Histoire d'André Thevet Angoumoisin, cosmographe du Roy, de deux voyages faits par luy aux Indes Australes, et Occidentales6 que le "chapitre sur l'anthropophagie rituelle des Tupinamba,... est sans doute un des plus beaux documents ethnographiques que nous ait laissé le XVIe siècle". La qualité des 41 illustrations sur bois gravés de la flore, de la faune et des rituels des Tupinamba assure le succès de l’ouvrage à la cour et parmi les amateurs de curiosités. Cependant il se fait piéger en reprenant le récit de Francisco de Orellana sur l’existence de femmes guerrières, nues et belliqueuses, rencontrées le long du fleuve qu’Orellana baptisa "fleuve des Amazones" puis "Amazone". Plus tard, dans la Cosmographie universelle, il se dira bien marry que je sois tombé en la faute de l’avoir creu.
Pour Frank Lestringant, le grand spécialiste de la Renaissance, Les Singularités de la France Antarctique constitue une œuvre phare de la littérature de voyage au XVIe siècle.

Le cosmographe du roi

Il obtient d'être affranchi de son ordre monastique en janvier 1559. Il se fixe rue de Bièvre, dans le quartier Latin à Paris, et devient en 1560 "cosmographe du Roy", c'est-à-dire géographe officiel, et au début de 1576 l'un des aumôniers de Catherine de Médicis. Il sert successivement quatre rois de France : Henri II et ses trois fils François II, Charles IX et Henri III.
Il se constitue rue de Bièvre un cabinet de curiosités où il collectionne les monnaies grecques et latines, des plumasseries du Brésil et du Mexique, des becs de toucan, des perroquets et caïmans naturalisés et autres singularités mais aussi des documents et mémoires relatifs au Nouveau Monde comme le précieux Codex Mendoza, manuscrit aztèque des années 1540-15412. Ces collections naturalistes et ethnographiques témoignent de son désir constamment réaffirmé d'assurer la primauté de l'expérience sur l'autorité. Tout ce que je vous discours et recite, ne s'apprend point és escole de Paris, ou de quelle que ce soit des universitez de l'Europe, ainsmais en la chaise d'un navire, soubz la leçon des vents…
Il travaille à partir de 1566, au projet très ambitieux, d’une encyclopédie géographique universelle distribuée selon les quatre continents. Le volumineux ouvrage, intitulé Cosmographie universelle, publié en 1575 rassemble des documents originaux d’un intérêt capital pour la connaissance des peuples amérindiens du Brésil et divers compilations comme celles sur l’Afrique et l’Asie, tirées de Navigationi et Viaggi du Vénitien, Jean-Baptiste Ramusio.
C'est en historiographe qu'il fait paraître, en 1584, les Vrais portraits et vies des hommes illustres en huit volumes. Son ambition est immense, puisqu'il se propose de traiter de tous les grands hommes de toutes les régions qu'il a visitées. Il propose à la manière de Plutarque, des portraits des pères de l'Église chrétienne, des grands esprits de l'antiquité ou des saints du Moyen Âge livre I à III. Dans les livres suivants sont traités les découvreurs et conquérants, Colomb, Vespucci, Magellan, Cortés et Pizarre et de six souverains de l'Amérique, un Aztèque, un Inca, un "Cannibale", un Tupinikin, un Satouriona de la Floride et un Patagon. Il a donc l'audace de faire voisiner les portraits des monarques amérindiens avec les gloires de l'antiquité et de l'Europe. Il illustre ses 224 portraits de gravures en taille douce.

La légende noire de Thevet

Les ouvrages de Thevet ont été mal accueillis par les doctes de son époque. On l’a accusé de plagiat et d’ignorance, Belon 1557, Belleforest et Fumée 1568 ou encore d’outrecuidance. Cette mauvaise renommée se renforce avec le début des troubles civils. Après s’être rallié ostensiblement au duc de Guise lors de la première guerre de Religion, Thevet tente de louvoyer entre les deux camps. Mais également condamné par les deux partis en présence, le projet cosmographique n’a quitté les franges de l’hérésie que pour se précipiter dans la démesure blasphématoire. La faute de Thevet est scientifique, mais aussi théologique, Belleforest, 1575 ; Du Préau, 1583, écrit Frank Lestringant. Il est vrai qu’à côté de cette légende noire cultivée par les doctes, Thevet n’a cessé de fasciner les esprits curieux, Paré, 1579. Longtemps les naturalistes et en premier lieu les botanistes l’ont cité avec révérence, notamment en ce qui concerne les réalités exotiques de l’Amérique et tout particulièrement du Brésil. C’est le cas par exemple du vulgarisateur Jean-Marie Pelt, qui dans son ouvrage de 1999 sur les grands naturalistes explorateurs, consacre un chapitre entier à sa réhabilitation.

André Thevet et l'herbe pétun tabac

Herbe pétun ou angoumoisine Cosmographie universelle
Dans Singularités de la France antarctique 1558, André Thevet donne une description précise de l’usage du "tabac" par les indiens. Il en ramènera des graines en France qu’il sèmera dans sa région natale d’Angoulême et baptisera la plante « herbe angoulmoisine. Mais le terme aura moins de succès que pétun mot venant du tupi petyma, petyn » qui sera largement employé en France et aux Antilles jusqu’au début du XVIIe siècle, époque où il sera évincé par tabac, terme qui lui vient à travers l’espagnol, d’un mot Haïtien, tabaco.
Autre singularité d’une herbe qu’ils nomment en leur langue pétun, laquelle il porte ordinairement avec eux, pource qu’ils l’estiment merveilleusement profitable à plusieurs choses. Elle ressemble à notre buglosse.
Or ils cueillent soigneusement ceste herbe et la font sécher à l'ombre dans leur petites cabanes. La manière d’en user est telle : ils l’enveloppent, estant seiche, quelque quantité de ceste herbe en une feuille de palmier qui est fort grande, et la roulent comme de la longueur d'une chandelle, puis mettent le feu par un bout, et en reçoivent la fumée par le nez et par la bouche. Elle est fort salubre, disent-ils, pour faire distiller et consummer les humeurs superflues du cerveau. Davantage, prise en cette façon, fait passer la faim et la soif pour quelque temps. Parquoi ils en usent ordinairement, même quand ils tiennent quelque propos entre eux, ils tirent cette fumée, et puis ils parlent…Vrai que si on en prend trop cette fumée ou parfum, elle entête et enivre, comme le fumet d’un fort vin.Singularités 1558.
Thevet nous dit avoir essayé par lui-même le cigare de pétun et que cette fumée cause sueurs et faiblesses, jusqu'à tomber en quelque syncope.

Quelques années plus tard, en 1560, Jean Nicot ambassadeur de France au Portugal, envoie de la poudre de tabac à la Reine Catherine de Médicis pour soigner les migraines de son fils. Le traitement a du succès et pour honorer Jean Nicot, le botaniste Delachamps donne officiellement à la plante le nom de Nicotiana tabacum. Cette usurpation rendra furieux Thevet Depuis un qidam, qui ne fit jamais le voyage, quelque dix ans après que je fus de retour de ce pays, lui donna son nom. Si Thevet fut indéniablement le premier à introduire le tabac en France, il ne fut pas le premier en Europe, puisque Hernandez l’avait introduit en Espagne dès 1520.

Thevet et Thevetia

Dans Singularités, chapitre 36, Thevet décrit précisément « un arbre nommé en leur langue ahouai, portant fruit vénéneux et mortel…Cet arbre est quasi semblable en hauteur à nos poirier. Il a la feuille de trois ou quatre doigts de longueur et deux de largeur, verdoyante toute l’année. Elle a l’écorce blanchâtre. Quand on en coupe branche, elle rend un certain suc blanc, quasi comme lait. L’arbre coupé rend une odeur merveilleusement puante. Il observe que le fruit est de la grosseur d’une châtaigne moyenne, et est vrai poison, spécialement le noyau. Les hommes, pour légère cause étant courroucés contre leurs femmes, leur en donnent, et les femmes aux hommes. Et de ce fruit les sauvages, quand le noyau est dehors, en font des sonnettes qu’ils mettent aux jambes, lesquelles font aussi grand bruit….
Cet arbre est aujourd’hui appelé Thevetia ahouai famille des Apocynaceae. C’est Carl von Linné qui un siècle plus tard, pour rendre hommage à Thevet créa le genre Thevetia. Une autre espèce, le Thevetia peruviana, est abondamment cultivé dans les jardins de toute la zone intertropicale du globe8.

Bibliographie

Sources imprimées
Cosmographie de Levant 1554. Texte sur Gallica
Cosmographie de Levant, fac-similé de l'édition de Tournes, 1556, avec introduction, notes et variantes par Frank Lestringant coll. Travaux d'humanisme et de renaissance, Genève, Droz, 1984, 224 + 232 p., pl., cartes.
Les Singularitez de la France antarctique, autrement nommée Amérique, et de plusieurs terres et isles découvertes de nostre tems 1557. Texte sur Gallica, illustrations sur Gallica, Université de Virginie, Gordon collection.
Les Singularitez de la France antarctique, réédition par Paul Gaffarel, Maisonneuve, Paris, 1880.sur Internet Archive, et sur Google Livres.
édition établie par Frank Lestringant, Le Brésil d’André Thevet. Les singularités de la France Antarctique 1557, Editions Chandeigne,‎ 1997
La cosmographie universelle d'André Thevet, illustrée de diverses figures des choses plus remarquables veuës par l'auteur 2 volumes, 1575. Illustrations sur Gallica et Texte sur Gallica
Les vrais pourtraits et vies des hommes illustres grecz, latins et payens, recueilliz de leurs tableaux, livres, médalles antiques et modernes 9 volumes, 1584 tome 2 consultable sur American Libraries
Giulia Bogliolo Bruna, introduzione, traduzione e note delle Singolarità della Francia Antarctica di André Thevet prefazione Frank Lestringant, Reggio Emilia, Diabasis, 247 p., 1997.

Travaux historiques

Frank Lestringant, Sous la leçon des vents : le monde d’André Thevet, cosmographe de la Renaissance, Presse universitaire de Paris-Sorbonne,‎ 2003.Google livres
Frank Lestringant, L’atelier du cosmographe ou l’image du monde à la Renaissance, Albin Michel,‎ 1991
Frank Lestringant, L'Histoire d'André Thevet, de deux voyages par luy faits dans les Indes Australes et Occidentales, Colloque International "Voyageurs et images du Brésil", MSH-Paris, le 10 décembre 2003, Table 2 — Les récits de conquête et de colonisation.
Jean-Marie Pelt,André Thevet,les monstres difformes et le tabac, in La Cannelle et le panda : les grands naturalistes explorateurs autour du Monde, Paris, Fayard, 1999, .
Carolina Martinez, André Thevet et Jean de Léry : témoignage involontaire et métier d'historien dans deux récits de voyage en France Antarctique, in Encyclo. Revue de l'école doctorale ED 382, no 1, 2012, p. 75-86,

Littérature

Jean-Christophe Rufin, Rouge Brésil, Gallimard, 2001.


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Posté le : 22/11/2014 15:07
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Clément IV
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Un 23 novembre à la fin du XII siècle naît, à St Gilles, Gard, Clément IV

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de son nom Gui Foucois ou Foulques ou Foucault, dit le gros, à Saint-Gilles mort le 29 novembre 1268 à Viterbe, Italie il fut le 183e pape de l'Église catholique. Son pontificat s’étendit du 5 février 1265 au 29 novembre 1268.
Gui Foulques, lettré , avocat, grand juriste, fut marié et eut des enfants, et une descendance attestée jusqu'à nos jours avant d'entrer, veuf, dans les ordres, et d'entamer une carrière au service de l'Église. Il fut évêque du Puy, honoré d’une prébende de chanoine au Chapitre noble de Brioude 1259, puis archevêque de Narbonne. Conseiller de saint Louis, il est élu pape sous le nom de Clément IV. Durant ses trois ans et demi de pontificat, il mena une politique ambitieuse et fut l'ami de saint Thomas d'Aquin.
Pape d'origine française, de son vrai nom Gui Foucoi. Il était archevêque de Narbonne avant son élection. Il eut avant tout une activité politique et favorisa les entreprises en Italie du frère de Saint Louis, Charles d'Anjou, à qui il accorda en fief le royaume de Sicile, poursuivant ainsi l'action de ses prédécesseurs qui voulaient éliminer de la péninsule les gibelins. Grâce à cette assistance, excommunication de Conrad IV, Charles put vaincre son adversaire.
Clément IV fut, en outre, fort attentif à l'administration du Saint-Siège et prit les premières mesures permettant à la papauté de pourvoir aux bénéfices de catégorie moyenne.


En bref

Clément IV Guido Fulcodi, Gui Foulques, Foulquois ou Foulquet est le 188e pape. Il a été élu à Pérouse le 5 février 1265, et est mort à Viterbe le 27 ou le 29 novembre 1268. Il était né vers 1200 à Saint-Gilles-sur-le-Rhône, fils d'un chevalier nommé Foulques Legros. On a dit, non sans raison, que son histoire présente les conditions les plus diverses de la vie humaine. En effet, il fut successivement militaire, juris. consulte, secrétaire du roi Saint Louis, marié, père de famille, veuf, prêtre, chanoine, archidiacre, évêque du Puy, archevêque de Narbonne, cardinal-évêque de Sabine, enfin pape.
Urbain IV, qui l'avait créé cardinal, l'envoya comme légat en Angleterre, pour soutenir Henri III contre Leicester, les évêques et les barons révoltés; mais comme l'un des principaux griefs de ceux-ci était précisément un traité fort onéreux dans lequel Henri III s'était laissé induire par le pape, au sujet du royaume de Sicile offert à Edmund, fils de ce roi, cette mission n'eut aucun succès. Le légat lança l'excommunication contre ceux qui avaient repoussé sa médiation, et l'interdit contre les villes maritimes qui s'étaient opposées à son débarquement; cette mesure ne produisit aucun effet favorable au roi.
Gui Foulquois revenait en Italie lorsqu'il fut élut pape; il n'y put rentrer qu'en se déguisant en mendiant, Manfred ayant fait garder les passages. On assure qu'il déclina la nomination dont il avait été l'objet, et qu'il demanda aux cardinaux de procéder à une nouvelle élection. On prétend aussi qu'il conseilla à Louis IX de ne pas entreprendre sa croisade contre Tunis; mais il semble qu'il ne fit que désapprouver d'abord le projet de ce prince d'y participer en personne.
Il ratifia la donation du royaume de Naples, faite par son prédécesseur, à Charles d'Anjou, frère de Louis IX. Pour soutenir ce prince, il fit prêcher la croisade contre ses adversaires. Lorsqu'après la défaite et la mort de Manfred, Conradin descendit en Italie pour recouvrer le royaume de ses pères, Clément l'excommunia, en l'appelant-rejeton d'une race de vipères. Ce jeune prince, trahi et vaincu, ayant été condamné et supplicié pour avoir porté les armes contre l'Eglise, Clément a été accusé, avec quelque vraisemblance, d'avoir consenti à la mort de celui qu'il aurait pu réclamer comme prisonnier de l'Eglise, et même d'avoir conseillé cette exécution. On dit que lors de sa légation en Angleterre, il fit remettre en liberté Roger Bacon emprisonné sur les dénonciations des moines de son ordre; mais en 1267, il repoussa le projet de réforme du calendrier proposé par Bacon, projet peu différent de celui que Grégoire XIII adopta plus tard.

Sa vie

La famille de Clément IV Louis Foulques ou Foucault, dit Fulcodi, bourgeois de Saint-Gilles dans le Gard, juriste, eut de son épouse Marie Laure Salvanhiac, plusieurs enfants :
Gui, qui suit ; Nicolas, curé de Saint-Gilles ; Marie, épouse de Laurent Forton ; Jeanne, épouse de Pierre Sauvaire ;
Anne, épouse de Louis Gros qui eurent des enfants dont Pierre Gros, curé de Saint-Gilles, auquel son oncle Gui, alors pape, écrivait le 7 mars 1265 : " Nous ne voulons pas que Cécile et Mabilie, nos filles, aient d'autres époux que ceux qu'elles auraient pu avoir si nous étions demeuré simple clerc ! "… et il réduisit de plus les prébendes de ce neveu ecclésiastique à une seule afin de ne pas être taxé de népotisme.
Sa maison natale dite Maison romane a été restaurée au XIXe siècle. Elle est classée monument historique depuis 1862. Clément IV est le premier de tous les papes qui ait eu des armoiries sur son tombeau, à Viterbe.
Gui Foulques avait épousé par contrat du 16 janvier 1239 Margueritte Ruffi, fille de Jacques et de Cécile du Sault. Plusieurs enfants sont nés de cette union. En 1265, il ne restait que :
Mabilie qui devint religieuse à Nîmes après 1267 et qui mourut en 1307 d'après les documents cités ci-dessus,
Cécile Fulcodi qui épousa par contrat du 2 février 1274 son cousin Pierre Ruffi. De cette union naquirent plusieurs enfants dont Guidon Ruffi, dont la descendance se perpétue à ce jour.
Les informations généalogiques sur la descendance du pape Clément IV proviennent des pièces du procès qui a été instruit pour son héritage, commencé vers 1272 et terminé seulement en 1339. Une grande partie de ces pièces sont reproduites dans le cartulaire de l'évêché de Maguelone. Ces pièces citent plus de soixante personnes apparentées au pape Clément IV

Avant son pontificat

Docteur en droit civil, il devient un professeur et avocat renommé. Il enquête en Venaissin pour le compte d'Alphonse de Poitiers, fin 1253-début 1254 Veuf, il est ordonné prêtre en 1255 et nommé archidiacre du Puy, curé de Saint-Gilles puis évêque du Puy en 1257, archevêque de Narbonne en 1259. Conseiller de Saint Louis, en un temps garde du sceau, conseiller du pape Urbain IV, il est créé cardinal évêque de Sabine le 17 décembre 1261. Légat en Angleterre pour une médiation entre Henri III et ses prélats et barons en 1264, il est en voyage lorsqu'il est élu pape le 183e après la mort d'Urbain IV. Il rentre alors à Pérouse en Italie, déguisé en moine, avant de coiffer la tiare, le 5 février 1265, sous le nom de Clément IV. Il habite pendant presque tout son pontificat dans le palais des papes de Viterbe, la capitale de la Tuscie romaine ayant été choisie comme siège pontifical par Alexandre IV en 1257.

Pendant son pontificat

La principale affaire de son pontificat est la réalisation de la dévolution, désirée par Urbain IV, du royaume de Sicile à Charles d'Anjou, frère du roi de France Louis IX, chargé de tenir tête aux ambitions impérialistes de Manfred de Hohenstaufen, fils naturel de l'empereur Frédéric II de Hohenstaufen, et du parti gibelin. Après la mort de Manfred en 1266 à la bataille de Bénévent, le pape intervient dans l'élection de Conradin, neveu de Manfred et dernier descendant de Frédéric II. Mais après que Charles d'Anjou exécute Conradin, Clément IV se voit contraint de s'opposer aux ambitions de Charles. Dans le même temps, il favorise le double mariage qui lie les familles de Hongrie et de Sicile.
Cette politique ambitieuse, mais onéreuse, qu'accompagne une ferme reprise en main de l'Église par la Curie, fait de Clément IV l'un des créateurs de la fiscalité pontificale et de ce qui en est déjà la condition nécessaire, la réserve au Saint-Siège de la collation des bénéfices ecclésiastiques.
Clément IV est sur le trône de saint Pierre le plus intransigeant des rigoristes et le plus théocratique des papes du XIIIe siècle, agissant quasi simultanément sur tous les plans, continuant l'œuvre de ses prédécesseurs Grégoire IX et Urbain IV, mais en la poussant jusqu'à son extrême logique : il autorise la torture dans les causes d'hérésie 3 novembre 1265, privilégie les dominicains et leur confie la direction de la lutte contre l'hérésie. À l'égard des juifs relaps, il ordonne des châtiments allant jusqu'à la mort, et exhorte saint Louis à établir contre les blasphémateurs des peines temporelles capables de leur inspirer la terreur.

Clément IV et l'Islam

À la fin du XIIIe siècle, de nombreux musulmans étaient installés en Espagne, terre historiquement chrétienne.
Dans cette Espagne soumise à des souverains catholiques, les mudéjars vivent dans leurs aljamas. Les plus nombreux demeurent dans la vallée de l’Èbre et la région de Valence. Mais le roi d’Aragon se vit admonester par le pape Clément IV qui exprima le fond de la pensée catholique sur la question : On a des exemples de la dangereuse affaire qu’est d’avoir des musulmans dans vos domaines... Il est certes aussi raisonnable de garder chez soi des ennemis si perfides et malfaisants, ou même de les avoir pour voisins que de se mettre un serpent dans le giron ou le feu dans son sein... Votre Créateur ... souffre pendant que ces musulmans célèbrent le nom de Mahomet parmi les chrétiens... Vous devenez votre propre adversaire si vous persécutez les musulmans dans leurs propres terres, mais les protégez patiemment dans les vôtres. Une fois tout cela débattu... il est indubitable qu’il serait conforme à vos excellentes œuvres que vous exiliez ces gens hors des frontières de vos domaines . Le pape a parlé, il ne peut y avoir de musulmans en royaume chrétien.

Clément IV et Roger Bacon

Roger Bacon, moine franciscain et scientifique de renom, est le premier à s’apercevoir de l’erreur du calendrier julien par rapport à l’année solaire. Il propose en 1264 à Clément IV de le rectifier. Il avait en effet une grande estime pour Clément IV, son protecteur. Par ailleurs, ses observations astronomiques lui valant d’être accusé de magie et suscitant la haine de ses contemporains, Clément IV lui demande un exposé détaillé de ses inventions. Roger Bacon lui envoie quelques instruments de mathématiques qu’il avait inventés, ainsi que son œuvre maîtresse, l'Opus majus, ouvrage dans lequel il défend une réforme nécessaire des sciences, et qui apparaît comme une encyclopédie regroupant la grammaire et la logique ainsi que les mathématiques et la physique.

Investiture de Charles Ier

La tour Ferrande, à Pernes-les-Fontaines, édifice du XIIe siècle est célèbre pour ses fresques du XIIIe siècle qui ornent son troisième étage. Considérées comme les premières fresques militaires en France, elles illustrent l'investiture en 1266 par le pape Clément IV de Charles 1er, comte de Provence, en tant que roi de Sicile.
Charles d'Anjou, comte de Provence, est représenté devant le pape Clément IV. Celui-ci, coiffé de sa tiare et tenant, posée sur l'épaule droite, une énorme clef de saint Pierre, présente au nouveau roi de Sicile Trinacrie, Sicile insulaire, et Royaume de Naples, Sicile continentale, la bulle de son investiture. Charles la reçoit, à genoux, revêtu d'une robe blanche à fleurs de lys, et coiffé de la couronne royale.

Clément IV et le népotisme

Peut-être par réticence envers le népotisme déjà installé à la Curie, Clément IV n'a créé qu'un seul cardinal : Bernard Ayglier, O.S.B., abbé du Mont-Cassin.
Clément IV passe les deux dernières années de sa vie à Viterbe, en compagnie de saint Thomas d'Aquin, dont la Somme théologique s'imposera durant tout le Moyen Âge.
Ses contemporains ont loué son ascétisme, sa lutte contre la corruption en général et le népotisme en particulier. Il était réputé doux et désintéressé.

Mort de Clément IV : origine de l'isolement du conclave

L'élection d'un pape se déroule depuis 1271 à l'écart de toute pression extérieure, le conclave, cum clave : sous clef étant coupé du monde.
Cet isolement existe depuis qu'en 1271 à Viterbe, les cardinaux ne parvenant pas à se mettre d'accord pour trouver un successeur à Clément IV au bout de trois ans de délibérations, ont été enfermés et mis au pain sec et à l'eau pour les inciter à élire rapidement un nouveau pape.
L'élu, Grégoire X, a érigé cette pratique en règle, à l'exception du pain et de l'eau.

Lien avec la prophétie dite de Saint Malachie

Selon certains auteurs, les armes de Guy Foulques représentaient un aigle tenant dans ses serres un dragon. L'historien médiéviste Robert-Henri Bautier estime cette lecture fautive car deux exemplaires de son sceau, conservés aux Archives nationales, J. 340 no 23 et J. 473 no 13ter représentent un bras gauche au poing fermé, placé horizontalement et sur lequel sont superposés trois épis disposés en gerbe.

Œuvres

Le recueil des bulles du pape Clément IV, 556 écrits, datés entre le 24 février 1265 ont fait l'objet de plusieurs études :
Clément IV n'a instruit qu'un procès en canonisation, celui d'Edwige de Silésie qu'il a canonisée en 1267.

L'historien généalogiste, spécialiste des familles du Languedoc, Pierre Burlats-Brun écrit en 1985 Diverses pièces relatives à un procès quant à l'hoirie du pape Clément IV, commencé vers 1272 et seulement terminé en 1339, mettant alors en présence dans le concordat final plus de soixante apparentés, neveux et cousins, en partie reproduites dans le cartulaire de l'évêché de Maguelone et étudiées spécialement par l'historien chanoine Jean Segondy 1888-1976 que j'ai bien connu, permettent en effet d'affirmer la filiation qui suit entre la famille de Pierre de Concques et le souverain pontife précité. Suit une description détaillée de la descendance de Louis Foulques jusque Jeanne Gras x Pierre de Concques. À la fin de l'article, Pierre Burlats-Brun indique L'archiviste du Gard, M. Bligny-Bondurand, avait vers 1890 également étudié cette procédure mais sans publier ses notes, plus tard reprises par le chanoine Segondy.

http://youtu.be/c6etdTCo_iU Histoire des papes


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Posté le : 22/11/2014 14:16
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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