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Ecologie
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Posté le : 11/06/2013 10:24
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Re: Bonjour à vous, poètes, amoureux des beaux mots
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Welcome kjtiti. Oh pardon, bienvenue !

Posté le : 10/06/2013 19:55
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Re: La discothèque de l'orée (compilation)
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Dans l'eau de la claire fontaine :

Le Forestier et Brassens
http://youtu.be/GzHCjM-ICSg

Noah
http://youtu.be/CAOFxHisfyQ

Posté le : 09/06/2013 20:03
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page du 2 Juin Couronnement de la reine Elisabeth, Zoo de Vincennes, Johnny Weissmüller, Emile Littr
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fee etoilee

























Le texte à l'affiche de la semaine :
 
"Absences Divines de Kjtiti "



Couronnement
http://youtu.be/DX6o8wFPObM Mystères d'archives couronnement 1
http://youtu.be/qy4rC0NopbQ Mystère d'archives couronnement 2
Zoo
http://www.wat.tv/video/nouveau-visag ... ncennes-29cl1_2i0u7_.html annonce du JT
http://video-streaming.orange.fr/actu ... e-vincennes_14627656.html
http://www.dailymotion.com/video/xs51 ... incennes_fun#.UadB0rQxq0w Claude François
Tarzan
http://youtu.be/9NL7nP61-hk Le cri de Tarzan

Emile Littré
http://youtu.be/KzsfCG6487I Comment j'ai fait mon dictionnaire par Littré INA
http://youtu.be/veSx-fTSs_Q Muriel Robin Le dictionnaire




Le 2 Juin 1881 Décéde  EMILE LITTRE
Lire ICI




 



Aujourdui Dimanche 2 Juin 2013 LIRE , ECRIRE, DECOUVRIR

PAGES D'ACCUEIL PRECEDENTES Dans la BIBLIothèque LIRE ICI

 


Le 2 Juin 1953 à lieu le couronnement
d'ELISABETH II

Lire ICI



Le 2 Juin 1934 Le ZOO de VINCENNES est inauguré

LIre ICI




Le 2 Juin 1904 naît Johnny Weissmuller Tarzan et champion olympique
Lire ICI



Emma vous propose :
Je voudrais proposer un recueil de texte collectif d’environ une centaine de pages à partir des textes publiés sur ce site en 2012. Recueil sous forme d’un fichier PDF (et même en version imprimée, si ce projet en intéresse certains ?)
Pour donner votre choix de texte c'est ICI
               ---*Forum Philosophie*---

   *Venez écrire à Jean-Jacques Rousseau
    * Question d'Antarés
    *Le monde contemporain est-il celui de la haine de la poésie ?    


        Lucinda vous pose deux questions :                                                           
        *Pourquoi le mensonge  ?          
        *Pourquoi avons nous besoin des autres ? 


      
     




Posté le : 09/06/2013 12:33
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Charles Dickens 1
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Le 9 Juin 1878 meurt Charles DICKENS

monument de la littérature anglaise.

Charles Dickens naît le 7 février 1812 à Portsmouth, dans l' Angleterre Victorienne.
Ses parents, John et Elizabeth, sont issus d’un milieu modeste. L’enfance de Charles est heureuse mais lorsque son père est muté à Londres, la situation de la famille se dégrade, au point que Charles est contraint d’abandonner ses études. L’endettement des Dickens est tel que le père est emprisonné trois mois. Charles doit aller travailler dans une usine de cirage, la Warren’s Blacking Factory.
Il a douze ans. Il prend brutalement conscience de la précarité de la vie, de l’ampleur de la misère ouvrière et de la sévérité, voire de l’injustice des institutions du royaume. Cette expérience, traumatisante après une enfance d’insouciance, marquera toute son oeuvre.
En 1827, la famille est expulsée pour nonpaiement de loyers. Charles trouve un emploi dans un cabinet d’avocats, Ellis & Blackmore. Il se forme lui-même à la sténographie. En 1830, il se fiance avec Maria Beadnell, mais le père de celle-ci, banquier, juge le rang social de Dickens indigne et s’arrange pour qu’ils rompent.

En 1831, Charles suit les débats parlementaires de la Chambre pour le compte de plusieurs journaux.
En 1834, le jeune homme devient journaliste au Morning Chronicle, il rencontre la fille du directeur de la publication, Catherine Hogarth, et publie ses premiers récits en feuilletons.
Il a vingt deux ans. Ces «Esquisses», qu’il signe du pseudonyme de Boz, provoqueront la commande des «Aventures de M. Pickwick», dont la publication débutera la veille de son mariage avec Catherine en avril 1836.
C’est en 1837 que commence la publication d’«Oliver Twist» sous forme de feuilleton dans le magazine mensuel, Bentley’s Miscellany, avec un soustitre : «The Parish Boy’s Progress». L’intention de Dickens, dans les premiers épisodes, est de décrire à ses lecteurs ce que sont les véritables conditions de vie d’un «parish boy», un garçon pris en charge par la paroisse, après la mise en place du nouveau Poor Law Act de 1834.
Cette loi sociale dictait les conditions de prise en charge des indigents par les paroisses. Dickens avait assisté aux virulents débats autour de cette loi controversée lorsqu’il était reporter au Parlement.
Il continuera ses attaques contre elle sous forme de fictions ou dans ses écrits de journaliste jusqu’à la fin de ses jours.
Le succès d’«Oliver Twist» confirme la réputation de Dickens et l’impose.
Suivront «Nicolas Nickleby» en 1838, «Barnaby Rudge» en 1841, «Le Magasin d’antiquités» quelques mois plus tard.
Son voyage aux États-Unis lui révèle un monde esclavagiste et spéculateur, il en tirera «Notes Américaines» en 1842, puis «Martin Chuzzlewit».

Il est apprécié pour son humour, sa satire des mœurs et des caractères. Ses œuvres ont presque toutes été publiées en feuilletons hebdomadaires ou mensuels, genre inauguré par lui-même en 1836, format contraignant mais permettant de réagir rapidement, quitte à modifier l'action et les personnages en cours de route. Ses intrigues sont soignées et s'enrichissent souvent d'événements contemporains, même si l'histoire se déroule antérieurement.
Un chant de Noël (1843) a connu le plus vaste retentissement international, et l'ensemble de son œuvre a été loué par des écrivains de renom, comme William Makepeace Thackeray, Léon Tolstoï, Gilbert Keith Chesterton ou George Orwell, pour son réalisme, son esprit comique, son art de la caractérisation et l'acuité de sa satire. Certains, cependant, comme Charlotte Brontë, Virginia Woolf, Oscar Wilde ou Henry James, lui ont reproché de manquer de régularité dans le style, de privilégier la veine sentimentale et de se contenter d'analyses psychologiques superficielles.
Dickens a été traduit en de nombreuses langues, avec son aval pour les premières versions françaises. Son œuvre, constamment rééditée, connaît toujours de nombreuses adaptations au théâtre, au cinéma, au music-hall, à la radio et à la télévision.


Il publiera d’autres oeuvres, dont «Contes de Noël» en 1843, mais il faut attendre 1849 pour qu’il publie l’une de ses oeuvres majeures :
«David Copperfield».
Il enchaînera ensuite les publications et s’essaiera même au théâtre en tant qu’auteur, metteur en scène et comédien en 1845.
En 1858, il quitte sa femme, qui lui a donné dix enfants et entame, parallèlement à sa carrière d’écrivain, une activité de lecteur-conférencier. Il présente ses oeuvres à travers les grands pays d’Europe. En 1854, il publie «Les Temps difficiles», en 1859, «Le Conte des deux cités» et entre 1860 et 1861, «Les Grandes Espérances», qui paraissent en feuilleton dans All The Year Round.
Le 9 juin 1865, un accident de chemin de fer à Staplehurst le laisse affaibli et difficilement capable de se déplacer. En 1870, après une dernière tournée de lectures publiques en janvier et une rencontre avec la Reine Victoria en mars, il décède cinq ans jour pour jour après cet accident. Il a cinquante-huit ans et laisse un pays en deuil national et un roman inachevé : «Le Mystère d’Edwin Drood».

Biographie détaillée.

La biographie de Dickens, publiée après sa mort et qui a longtemps fait autorité est celle de John Forster : ami proche, confident et conseiller, son témoignage, écrit Graham Smith, « possède une intimité que seul un Victorien cultivé et auteur lui-même, pouvait apporter ». Pourtant, mais cela a été connu bien plus tard, Forster a modifié ou gommé tout ce qui aurait pu paraître gênant à son époque. Dickens, un dieu pour l'Angleterre et au-delà, a donc été présenté en homme irréprochable, d'autant qu'en sous-main, c'est lui-même qui a orchestré la partition de sa vie : il souhaitait que Forster fût son biographe et leur copieux échange de lettres a servi à sculpter la statue d'un commandeur, tout comme ses Fragments autobiographiques, consacrés à son enfance en 1824 et eux aussi confiés à Forster peu après mars ou avril 18474, qui le peignent en victime dans des vignettes maximisant la menace et le danger, d'où l'angoisse et la souffrance.


Enfance, adolescence

Sa petite enfance sera une enfance heureuse.
Issu d'une famille peu fortunée, Charles Dickens N 1 est né au 13, Mile End Terrace à Landport, petit faubourg de Portsmouth, PortseaN , le vendredi 7 février 1812. Il est le second, mais le premier fils, des huit enfants de John Dickens (1785-1851) et d'Elizabeth Dickens, née Barrow (1789-1863).
Il est baptisé le 4 mars en l'église St Mary, Kingston, Portsea.
Son père est chargé de faire la paye des équipages au Navy Pay Office de la Royal Navy, mais après Waterloo et la fin de la guerre en Amérique, les effectifs de la base navale sont réduits et il est muté à Londres.
En janvier 1815 il s'installe dans Norfolk Street, près d'Oxford Street. De son bref séjour à Portsmouth, Charles retient quelques souvenirs, dont une prise d'armes,. Londres, que l'enfant fréquente de trois à quatre ans, lui laisse l'image d'une visite à Soho Square et l'achat d'une baguette d'Arlequin1.
En avril 1817, une nouvelle mutation envoie la famille à l'arsenal de la Medway à Chatham dans le KentN. La famille y emménage au 2 Ordnance Street dans une demeure confortable, avec deux domestiques, la jeune Mary Weller, nurse de l'enfant, et Jane Bonny, d'un âge déjà avancé.
Bientôt, après avoir fréquenté l'école du dimanche avec sa sœur Fanny dont il est très proche, il est inscrit à l'institution de William Giles, fils d'un pasteur d'obédience baptiste qui le trouve brillant ; Charles lit les romans de Henry Fielding, Daniel Defoe et Oliver Goldsmith qui resteront ses maîtres.
La fratrie est heureuse malgré les décès prématurés, outre « Charley », la sœur aînée Frances (Fanny) (1810-1848), et les plus jeunes, Alfred Allen, mort à quelques mois, Letitia Mary (1816-1893), Harriet, elle aussi décédée enfant, Frederick William (Fred) (1820-1868), Alfred Lamert (1822-1860) et Augustus (1827-1866), à qui s'ajoutent James Lamert, un parent, et Augustus Newnham, orphelin de Chatham. Les plus grands s'adonnent à des jeux de mime, des récitals de poésie, des concerts de chants populaires et aussi des représentations théâtrales.
L'enfant est libre de parcourir la campagne, seul ou lors de longues promenades avec son père ou Mary Weller, alors âgée de treize ans, plus rarement en compagnie de Jane Bonny, ou d'observer l'activité de la ville portuaire. Plus tard, dans ses descriptions de paysages ruraux, ce sont les images du Kent qu'il prend pour modèle. « Cette période, a-t-il écrit, a été la plus heureuse de mon enfance » : c'est d'ailleurs à Chatham que Charles fait ses débuts littéraires en écrivant des saynètes qu'il joue dans la cuisine ou debout sur une table de l'auberge voisine.
Cette vie insouciante et ce début d'instruction s'interrompent brutalement lorsque la famille doit gagner Londres avec une réduction de salaire, prélude à la déchéance financière. Charles, âgé de dix ans, reste à Chatham quelques mois chez William Giles, puis rejoint la capitale, laissant du voyage ce souvenir désabusé : « Tout au long de ces années depuis écoulées, ai-je jamais perdu l'odeur humide de la paille où l'on m'a jeté, tel un gibier, et acheminé, franco de port, jusqu'à Cross Keys, Wood Street, Cheapside, Londres ? Il n'y avait pas d'autre passager à l'intérieur et j'ai englouti mes sandwichs dans la solitude et la grisaille, et la pluie n'a cessé de tomber, et j'ai trouvé la vie bien plus moche que je ne m'y attendais ».

La chute de la maison Dickens
Cette chute doit être nuancée au regard du contexte familial, représentatif de la petite bourgeoise victorienne.
Les grands-parents paternels ont été des domestiques au sommet de la hiérarchie, gouvernante de maison et maître d'hôtel, ce qui leur vaut le respect de leurs maîtres. Dans La Maison d'Âpre-Vent, Sir Lester Dedlock n'a de cesse de louer Mrs Rouncewell, sa gouvernante à Chesney Wolds.


Une discrète ascension sociale

John Dickens, le père de Charles Dickens.
Cette petite prospérité et l'influence dont ils jouissent ont servi de tremplin à l'ascension sociale de leur fils John.
Son travail représente une situation enviable dans la bureaucratie victorienne, avec plusieurs promotions et un salaire passant de 200 £ en 1816 à 441 £ en 18221.
C'est un bon métier, un emploi permanent, avec la faveur des supérieurs, acquise par l'assiduité et la compétence. Bien résolu à gravir l'échelle sociale mais « inconsidérément imprévoyant » selon Peter Ackroyd, il s'avère incapable de gérer son argent.
En 1819, il a déjà contracté une dette de 200 £, représentant presque la moitié de ses émoluments annuels, et cause d'une brouille avec son beau-frère qui s'est porté garant ; d'autres dettes sont en suspens à Chatham, d'où une descente aux enfers qu'aggravent des déménagements, une mutation mal payée à Londres, ville onéreuse, d'où de nouvelles dettes et un train de vie peu à peu réduit à néant.
En 1822, les Dickens se sont installés à Camden Town, la limite de la capitale, et John Dickens place ses espoirs dans le projet qu'a son épouse d'ouvrir un établissement scolaire. Aussi, la famille déménage-t-elle de nouveau à Noël 1823 au 4 Gower Street, demeure cossue susceptible d'accueillir des élèves en résidence. L'école, cependant, n'attire personne et, au bout de quelques semaines, les revenus sombrent jusqu'à la misère.


Charles privé de scolarité et la manufacture de cirage

Tandis que sa sœur aînée entre au Conservatoire de musique où elle va étudier jusqu'en 1827, Charles, âgé de douze ans et regrettant l'école, passe son temps à « nettoyer des bottines ».
James Lamert construit un théâtre miniature, de quoi enflammer l'imagination, comme les visites au parrain Huffam qui approvisionne les bateaux, ou à l'oncle Barrow au-dessus d'une librairie dont le barbier est le père de Turner, ou encore à la grand-mère Dickens qui offre une montre en argent et dit des contes de fées et des pans d'histoire, sans doute utilisés dans Barnaby Rudge (les émeutes de Gordon) et Le Conte de deux cités (la Révolution française).
Quinze mois plus tard, la vie de Charles bascule d'un coup et se trouve à jamais bouleversée.
Au début de 1824, James Lamert propose un emploi pour le jeune garçon, emploi que ses parents saisissent avidement, et Charles entre à la manufacture Warren's Blacking Factory à Hungerford Stairs, dans The Strand.
C'est un entrepôt de cirage et teinture où il doit, dix heures par jour, coller des étiquettes sur des flacons pour six shillings par semaine, de quoi aider sa famille et payer son loyer chez Mrs Ellen Roylance, une amie ensuite immortalisée, avec « quelques changements et embellissements », en la Mrs Pipchin de Dombey et Fils.
Il loue ensuite une sombre mansarde chez Archibald Russell dans Lant Street à SouthwarkN . Archibald Russell, « vieux monsieur corpulent, raconte John Forster, d'un naturel heureux, pétri de bonté, avec une épouse déjà âgée et calme, et un fils adulte particulièrement naïf », travaille comme clerc au tribunal de l'insolvabilité : cette famille a sans doute inspiré les Garland du Magasin d'Antiquités, tandis que le tribunal a été copié dans les scènes du procès des Papiers posthumes du Pickwick Club.


L'incarcération du père à la Marshalsea

Le 20 février 1824, John Dickens est arrêté pour une dette de 40 £ envers un boulanger et incarcéré à la prison de Marshalsea à Southwark.
Tous ses biens, livres inclus, ont été saisis, et bientôt le rejoignent son épouse et les plus jeunes enfants.
Le dimanche, Charles et sa sœur Frances passent la journée à la prison.
Cette expérience servira de toile de fond à la première moitié de La Petite Dorrit, qui présente Mr William Dorrit enfermé pour dettes en cette prison où grandit sa fille Amit, l'héroïne du roman.
Au bout de trois mois au cours desquels meurt sa mère, John Dickens hérite de 450 £, à quoi s'ajoutent quelques piges pour British Press et une pension d'invalidité de 146 £ versée par l'Amirauté. Sur promesse de paiement au terme de la succession, il est libéré le 28 mai, et la famille se réfugie chez Mrs Roylance pendant quelques mois, puis retrouve à se loger à Hampstead et enfin à Johnson Street dans Somers Town.
Charles reste à la manufacture qui, nouvelle humiliation, le transfère à l'étalage d'une boutique dans Chandos Street, et ce n'est qu'en mars 1825, parce qu'il se dispute avec le propriétaire et malgré l'intercession de Mrs Dickens qui essaie d'apaiser les choses, que John Dickens en retire son fils, puis le remet sur les bancs de l'école.

traumatisme et une nouvelle blessure

Cet épisode a représenté un traumatisme dont Dickens ne s'est jamais remis.
Bien qu'il l'ait transposé dans David Copperfield en l'entrepôt Murdstone and Grinby's et y ait fait une allusion dans Les Grandes Espérances (la « Blacking Ware'us » [wharehouse]), il ne s'en est ouvert à personne, sinon à son épouse et à Fors.
Sa vie durant,
« il s'est toujours étonné qu'on ait pu si facilement se débarrasser de lui à cet âge », et sa besogne, écrit Forster, lui a paru particulièrement rebutante : « C'était une vieille maison délabrée tombant en ruines, qui aboutissait naturellement à la Tamise, et était littéralement au pouvoir des rats. Mon travail consistait à couvrir les pots de cirage, d'abord avec un morceau de papier huilé, puis avec un morceau de papier bleu ; à les attacher en rond avec une ficelle, et ensuite à couper le papier bien proprement tout autour, jusqu'à ce que le tout eût l'apparence coquette d'un pot d'onguent acheté chez le pharmacien. Quand un certain nombre de grosses de pots avaient atteint ce point de perfection, je devais coller sur chacun une étiquette imprimée, et passer à d'autres pots ».
Louis Cazamian rappelle que « la grossièreté du milieu, des camarades, la tristesse de ces heures au fond d'un atelier sordide meurtrissent l'ambition instinctive de l'enfant ».
« Nulle parole ne peut exprimer l'agonie secrète de mon âme en tombant dans une telle société, écrit Dickens, et en sentant les espérances que j'avais eues de bonne heure, de grandir pour être un homme instruit et distingué, anéanties dans mon cœur » Aussi, ajoute Cazamian, « le souvenir de cette épreuve le hantera à jamais. Il y associera le regret de son enfance abandonnée, de son éducation manquée.
De là, son effort constant pour effacer le passé, la recherche vestimentaire, l'attention aux raffinements de la politesse personnelle. De là aussi, les pages mélancoliques chaque fois qu'il retracera le chagrin d'un enfant. Le travail manuel lui a laissé l'impression d'une souillure ».
Dickens ajoute dans les Extraits autobiographiques : « J'écris sans rancune, sans colère, car je sais que tout ce qui s'est passé a façonné l'homme que je suis. Mais je n'ai rien oublié, je n'oublierai jamais, il m'est impossible d'oublier, par exemple, que ma mère était très désireuse que je retourne chez Warren », nouvelle blessure expliquant les jeunes enfants abandonnés ou livrés à eux-mêmes dont il a peuplé son œuvre, Oliver, Nell, Smike, Jo, David, Amit, Pip, etc..
Souvent décriée d'après le commentaire de son fils, Elizabeth Dickens se retrouve dans certains personnages de femmes écervelées, telle la mère de Nicholas Nickleby. Graham Smith écrit que la rancœur de Dickens reste objectivement injuste.
Sa mère lui a inculqué les bases de l'instruction, la lecture, l'écriture, l'histoire, le latin ; les témoins vantent son sens de l'humour, du grotesque, ses talents d'actrice et d'imitatrice, tous dons transmis à son fils. De tout cela, conclut-il, Dickens a profité, mais n'a jamais reconnu sa dette.

Le recul de l'objectivité

Graham Smith discute aussi le ressenti de Dickens : adulé et chéri en famille, explique-t-il, il a été mieux traité que les petits miséreux travaillant à ses côtés, plutôt gentils envers lui, en particulier un certain Bob Fagin. Être objectif, cependant, revient à mettre entre parenthèses les attentes de ce super-doué de douze ans. Sans les ennuis de son père, il aurait été promis à Oxford ou Cambridge.
Or, il n'a plus jamais quitté l'uniforme du petit ouvrier et il a peuplé son œuvre de parents incompétents, à l'exception des parents adoptifs, Mr Jarndyce ou Joe Gargery. David Copperfield a pour héros un gamin, livré à un beau-père cruel et qui s'écrie :
« Je n'avais ni guide ni conseil, aucun encouragement et aucune consolation, pas le moindre soutien de quiconque, rien que je puisse me rappeler ».
Ainsi, par John Forster, par certains de ses confrères, Wilkie Collins en particulier, Bulwer-Lytton, Thackeray, par lui-même aussi, la vie de Dickens s'est peu à peu transformée en une légende, voire un mythe, celui du grand Victorien typique, énergique, créateur, entreprenant, autodidacte.
Dickens n'a d'ailleurs eu de cesse d'apporter de l'eau à ce moulin : même chez Warren, écrit-il, il a fait l'effort de travailler aussi bien et même mieux que ses compagnons de misère.


Vie active.

Doctors' Commons au début du xixe siècle.
En 1825, Charles retrouve l'école à la Wellington School Academy de Hampstead Road, où il étudie quelque deux ans et obtient le prix de latin11. L'institution n'a pas été de son goût : « Bien des aspects, écrit-il, de cet enseignement à vau-l'eau, tout décousu, et du relâchement de la discipline ponctués par la brutalité sadique du directeur, les appariteurs en guenilles et l'atmosphère générale de délabrement sont représentés dans l'établissement de Mr Creakle ».

Là s'arrête son instruction officielle, car en 1827, il entre dans la vie active, ses parents lui ayant obtenu un emploi de clerc au cabinet d'avocats Ellis and Blackmore, de Holborn Court, Gray's Inn, où il travaille de mai 1827 à novembre 1828 à des tâches fastidieuses mais, écrit Michael Allen, « qu'il saura mettre à profit dans son œuvre ». Il rejoint ensuite le cabinet de Charles Molloy dans Lincoln's Inn.
Trois mois après, à tout juste dix-sept ans, il fait preuve, selon Michael Allen, d'une grande confiance en soi puisqu'il se lance, vraisemblablement sans l'aval de ses parents, dans la carrière de reporter sténographe indépendant à Doctors' Commons,, où il partage un cabinet avec un cousin éloigné, Thomas Carlton.
Avec l'aide de son oncle J. H. Barrow, il a appris la sténographie selon la méthode Gurney, décrite dans David Copperfield comme « ce sauvage mystère sténographique », et dans une lettre à Wilkie Collins du 6 juin 1856, il rappelle qu'il s'y est appliqué dès l'âge de quinze ans avec une « énergie céleste ou diabolique » et qu'il a été le « meilleur sténographe du monde ».
Dès 1830, outre les dossiers de Doctors' Commons, il ajoute « à son répertoire » des chroniques des débats tenus à la Chambre des communes pour le Mirror of Parliament et le True Sun.
Au cours des quatre années qui suivent, il se forge une solide réputation, passant bientôt pour l'un des meilleurs reporters, ce qui lui vaut d'être embauché à temps plein par le Morning Chronicle38. Cette expérience légale et journalistique a été mise à profit dans Nicholas Nickleby, Dombey et Fils, et surtout La Maison d'Âpre-Vent, dont la féroce satire des lenteurs judiciaires a attiré l'attention publique sur le fardeau que représente pour les humbles le fait d'aller devant les tribunaux32.
La jeune maturité
Ces années ont apporté à Dickens, explique Michael Allen, outre une bonne connaissance de la province, Birmingham, Bristol, Édimbourg, Exeter, Hemlsford et Kettering, avec diligences, relais, auberges et chevaux, une intimité avec Londres qui est devenue « le centre tourbillonnant de sa vie ».
S'y est aussi approfondi son amour du théâtre, Shakespeare, music-hall, farce ou drame, qu'il fréquente, selon Forster, presque chaque jour et dont il connaît acteurs et musiciens, souvent présentés par sa sœur Fanny.
Même si, non sans hésitation, il a choisi les lettres, ajoute Michael Allen, il se donne en représentation, soignant sa tenue vestimentaire jusqu'à l'extravagance, très flashy (« voyante »), et il observe les gens, imitant les accents, mimant les maniérismes, tous retrouvés dans ses livres.


Maria Beadnell

1830 : Charles Dickens a dix-huit ans et il s'éprend de Maria Beadnell, son aînée d'une année.
Son père, commis principal d'une banque à Mansion House, petit bourgeois de Lombard Street, quartier prestigieux de la Cité de Londres, n'apprécie guère cette amitié, voire un futur mariage, avec un obscur journaliste, fils d'un ancien détenu de la prison pour dettes, avec qui il a déménagé sept fois devant les créanciers, pour enfin se loger seul en 1834 dans Furnival's Inn.
Aussi les Beadnell envoient-ils leur fille dans une institution scolaire à Paris, et Charles ne peut qu'adresser des lettres enflammées. « Je n'ai aimé et ne peux aimer d'autre personne vivante que vous », lui écrit-il, mais Maria, peu sensible à son « flot de médiocre poésie », ne prend pas d'engagement.
Le couple s'est revu lors du retour de la jeune fille dont le manque d'ardeur a cependant fini par lasser : peu après son vingt-et-unième anniversaire, Dickens renvoie lettres et cadeau avec ces mots : « nos rencontres n'ont récemment été guère plus que des manifestations de cruelle indifférence d'un côté et de l'autre, elles n'ont conduit qu'à nourrir le chagrin d'une relation qui depuis longtemps est devenue plus que désespérée ». Longtemps après, il confie à John Forster que son amour l'a occupé « tout entier pendant quatre ans, et qu'il en est encore tout étourdi ». Cet échec l'a « déterminé à vaincre tous les obstacles et l'a poussé à sa vocation d'écrivain ».
Maria a servi de modèle pour Dora Spenlow (1850), charmante mais écervelée, et incapable de gérer sa maisonnée.
Pourtant, « Ce qui intéresse surtout le lecteur, écrit Graham Smith, c'est que Maria, devenue Mrs Winter, mère de deux filles, réapparaît dans la vie de Dickens en 1855 » : le 9 février, avec deux jours de retard, elle lui écrit à l'occasion de son quarante-troisième anniversaire, et Dickens, marié et père de neuf enfants vivants, se prenant au jeu, « conduit à distance, avec force sentiment et un peu de dérision, un flirt presque enfantin ».
L'aventure aura un épilogue grotesque (voir Un mariage de plus en plus chancelant), mais surgit le thème, déjà esquissé dans David Copperfield, « de la frustration amoureuse, d'une misère sexuelle » : Maria, l'ancienne Dora, se mue alors en Flora Finching (1855).
C'est Premières publications auront un succès foudroyant

John Forster, ami, biographe et confident.
Les premières pages de Dickens paraissent dans le Monthly Magazine de décembre 1833, à quoi s'ajoutent six numéros, cinq non signés et le dernier, d'août 1834, portant le nom de Boz.
Leur originalité attire l'attention du Morning Chronicle, dont le critique musical et artistique est George Hogarth, père de la jeune Catherine dont Charles vient de faire la connaissance, et le nouvel écrivain y est embauché pour 273 £ par an. Le Morning Chronicle publie bientôt cinq « esquisses de rue » sous le même pseudonyme, et leur originalité paraît telle que la revue-sœur, l'Evening Chronicle, que George Hogarth a rejointe, accepte l'offre de vingt autres avec une augmentation de salaire qui passe de 5 guinées à 7 par semaine. Le succès est immédiat, et lorsque la série prend fin en septembre 1835, Dickens se tourne vers le Bell's Life in London, qui le paie encore mieux.
Peu après, l'éditeur John Macrone propose de publier les esquisses en volume avec des illustrations de George Cruikshank, offre assortie d'une avance de 100 £ et aussitôt acceptée.
1835 est une année faste : en février paraît la première série de Esquisses de Boz et immédiatement, Chapman and Hall propose à Dickens Les Papiers posthumes du Pickwick Club en vingt épisodes, le premier démarrant le 31 mars.
En mai, il accepte d'écrire un roman en trois volumes pour Macrone et, trois mois plus tard, il s'engage pour deux autres auprès de Richard Bentley.
Onze nouvelles esquisses sont publiées, surtout dans le Morning Chronicle, auxquelles s'ajoutent un pamphlet politique, Sunday under Three Heads, et deux pièces de théâtre, The Strange Gentheman en septembre et The Village Coquette en décembre.
En novembre, il prend la charge du mensuel Bentley's Miscellany et, le mois suivant, paraît une deuxième série des Esquisses. Pendant ce temps, l'histoire de Mr Pickwick devient si populaire que la réputation de Dickens atteint le zénith, ses finances prospèrent et son autorité grandit.
Le revers de la médaille est que les engagements ne peuvent tous être honorés et s'ensuivent d'interminables négociations avec les éditeurs, souvent assorties de brouilles. Dickens décide alors de se consacrer entièrement à la littérature et démissionne du Morning Chronicle. Le couronnement de ce tourbillon est la rencontre, en décembre 1836, de John Forster, auteur, critique, conseiller littéraire, bientôt l'ami intime, le confident et futur premier biographe.


Catherine Hogarth fiançailles puis mariage en 1835

Charles Dickens s'est épris de Catherine, la fille aînée de George Hogarth auprès duquel il travaille et dont il fréquente souvent la famille.
Selon les critiques, Catherine est décrite comme « Jeune, agréable, gaie, soigneuse, active, tranquille », ou « petite femme à peine jolie, aux yeux bleus endormis, nez retroussé, menton fuyant des êtres sans volonté ». Les lettres de Dickens ne sont pas aussi passionnées que celles qu'il adressait à Maria Beadnell.
Il­ voit en Catherine, écrit-il, « une source de réconfort et de repos, une personne vers qui il pourra se tourner au coin du feu, une fois son travail achevé, pour puiser dans sa douce tournure et ses charmantes manières la récréation et le bonheur que la triste solitude d'une garçonnière ne procure jamais ».
Fiancés en 1835, les jeunes gens se marient le 2 avril 1836 en l'église St. Luke's de Chelsea.
La lune de miel, une semaine, est passée à Chalk près de Gravesend, Kent, puis les époux rejoignent Furnival's Inn avant de s'installer à Bloomsbury. C'est à Chalk que Dickens a trouvé la forge où travaille Joe Gargery, l'oncle de Pip, et c'est là qu'il a écrit les premières livraisons de ses Pickwick Papers.


1836-1842 : les premières années

Le mariage est d'abord raisonnablement heureux et les enfants ne tardent pas à arriver : Charles au bout de neuf mois, Mary l'année suivante et Kate en 1839.
La famille change de résidence au fil des années et selon les saisons, le plus souvent près du Strand et sur le côté nord d'Oxford Street, avec deux escapades vers Hampstead. L'une de ces demeures est le 48 Doughty Street, aujourd'hui le Musée Charles Dickens, où de 1837 à 1839, Dickens a écrit ses premiers grands ouvrages et reçu nombre d'amis écrivains.
Les vacances se passent souvent à Broadstairs, dans la grande maison aujourd'hui appelée Bleak House, sur l'île de Thanet, à l'extrême pointe du Kent.
En 1838, Dickens publie Nicholas Nickleby avec, en conclusion, une vision de bonheur conjugal, les deux héros s'aimant dans une campagne idyllique avec plusieurs enfants, miroir, selon Jane Smiley, de la vie rêvée de l'auteur.
C'est pourtant au terme de ces années d'activité fébrile que commencent à poindre les difficultés conjugales. L'une d'elles naît d'un drame familial.

La mort de Mary Scott Hogarth

Mary Scott Hogarth (1820-1837) est venue en février 1837 s'installer chez les Dickens pour aider sa sœur de nouveau enceinte.
Charles se prend d'une véritable idolâtrie pour cette enfant qui, d'après Fred Kaplan, devient « une amie intime, une sœur d'exception, une compagne au foyer ».
Le 6 mai 1837, au retour d'une sortie, «Mary monte dans sa chambre en parfaite santé et, comme d'habitude, d'excellente humeur. Avant qu'elle ne puisse se déshabiller, elle est prise d'un violent malaise et meurt, après une nuit d'agonie, dans mes bras durant l'après-midi à 3 heures.
Tout ce qui pouvait être fait pour la sauver l'a été. Les hommes de l'art pensent qu'elle avait une maladie du cœur ».
Dickens lui ôte une bague qu'il portera jusqu'à la fin de sa vie et garde tous ses vêtements.
C'est la seule fois où il n'a pu écrire et a manqué la livraison de deux publications, celles d'Oliver Twist et de Pickwick Papers.
Il rédige l'épitaphe, prénomme sa première fille « Mary »: « Je ne pense pas qu'ait jamais existé un amour tel que celui que je lui ai porté », a-t-il confié à son ami Richard Jones.
Catherine elle aussi pleure la mort de sa sœur, mais ressent de l'amertume à voir son mari toujours endeuillé, rêvant de Mary chaque nuit mois après mois.
Le 29 février 1842, il écrit à John Forster qu'elle reste pour lui « l'esprit qui guide sa vie, pointant inflexiblement le doigt vers le haut depuis plus de quatre années ».
Mary apparaît comme un palimpseste sur lequel Dickens a inscrit son image de la féminité, ensuite projetée dans ses personnages, d'abord plutôt creux comme Rose Maylie, un peu moins avec Esther Summerson et l'héroïne éponyme Amit Dorrit, auxquelles s'ajoutent la Petite Nell et Agnes Wickfield.
Ainsi, le parchemin s'est rempli, le personnage complexifié, toujours « ange du foyer » mais avec de l'initiative, du bon sens et, peut-être, quelques désirs.


1842-1858 : l'avènement des difficultés

Catherine a la responsabilité d'organiser des réceptions et des dîners, parfois fort importants, avec des célébrités littéraires comme, par exemple, Thomas et Jane Carlyle, Elizabeth Gaskell et Samuel Rogers. Mrs Carlyle et Mrs Gaskell ont raconté leurs souvenirs d'une réception et n'ont que louanges sur les qualités d'hôtesse et la cuisine de Mrs Dickens.
Elle accompagne son mari en Écosse en 1841 où le couple est reçu avec égard, et en février de l'année suivante Dickens prépare un voyage outre-Atlantique.
Catherine, d'abord réticente, se décide enfin à l'accompagner.
À Boston, les Dickens se voient aussitôt acclamés, et à New York, la pression s'accentue encore.
Au Canada, ils sont reçus par « l'élite de la société » et admirent les chutes du Niagara dont le fracas apporte à Dickens des échos de la voix de Mary, et participent à des productions théâtrales78. Tout au long, Catherine « s'acquitte de ses tâches d'épouse d'homme célèbre avec beaucoup de grâce et de charme » À leur retour en juin, Dickens tourne les Américains en ridicule dans ses Notes américaines, puis dans la deuxième partie de Martin Chuzzlewit
Puis la famille gagne l'Italie pour une année, mais Dickens fait des escapades en solitaire à Paris ou Boulogne qu'il affectionne particulièrement.


Le désenchantement

Peu sensible à ses difficultés, Dickens rudoie son épouse, se plaignant de son manque d'entrain et de ses grossesses à répétition. En 1851, peu après la naissance de son neuvième enfant, Catherine tombe malade et l'année suivante arrive Edward, le dernier. Dickens « devient de plus en plus instable et imprévisible » et s'ouvre de son désarroi à Wilkie Collins : « Les bons vieux jours, les bons vieux jours ! Retrouverai-je jamais l'état d'esprit d'alors, je me le demande…
J'ai l'impression que le squelette qui habite mon placard domestique devient bigrement gros »


« Le rêve de Dickens »

Dickens est au faîte de sa popularité qui ne faiblira plus.
Tout à la fois, il a écrit Pickwick Papers et Oliver Twist, puis s'est attelé à Nicholas Nickleby, qu'ont suivis en cascade Le Magasin d'antiquités et Barnaby Rudge, présentés dans ce que Graham Smith appelle « ce vecteur de publication artificiel et sans grand succès » qu'a été L'Horloge de Maître Humphrey47. Ce rendement est en partie dû aux exigences de la publication en feuilleton mensuel, mais le dynamisme est exceptionnel : Dickens fait paraître dans le même temps une petite burletta, Is She his Wife?, de courts recueils, Sketches of Young Gentlemen et Sketches of Young Couples, sans compter la révision de Memoirs of Joseph Grimaldi et du parodique Pic-nic papers, entreprises pour aider la veuve de John Macrone, l'éditeur des Esquisses de Boz, disparu à vingt-huit ans


« Cinquante êtres vivants »

John Forster a capté cette énergie de tous les instants : « la rapidité, l'ardeur et la puissance pratique, la démarche curieuse, fébrile, énergique sur chaque aspect comme d'un homme d'action et d'affaires jeté dans le monde.
La lumière et le mouvement jaillissaient de toutes parts en lui c'était la vie et l'âme de cinquante êtres vivants. ».
Le public parle avec son argent, les ventes ne faisant que grimper (seul Barnaby Rudge connaît un fléchissement à 30 000), 7 500 pour Oliver Twist, 50 000 pour le premier numéro de Nicholas Nickleby, 60 000 pour L'Horloge de Maître Humphrey, 100 000 pour la fin de Le Magasin d'antiquités, et le monde littéraire, à quelques exceptions près dont Charlotte Brontë qui lui préfère Thackeray, le porte aux nues.
Michael Allen écrit que les comparaisons font florès : l'âme de Hogarth, le Cruikshank des écrivains, le Constable du roman, l'égal de Smollett, de Sterne, de Fielding, un nouveau Defoe, l'héritier de Goldsmith, le Cervantes anglais, un Washington Irving, Victor Hugo, Wordsworth, Carlyle et même Shakespeare.
Son ancien maître de Chatham s'adresse à lui avec l'épithète « inimitable » associée à Boz : Dickens se l'approprie et s'en qualifie sa vie durant.
Les invitations pleuvent : cooptation par les Garrick Club et Athenæum, circonscription électorale refusée car Dickens exige un siège sur mesure, franchise d'Édimbourg (juin 1841), dîners de gala, conférences où il brille d'intelligence et de virtuosité, réunies en recueils (Speeches). À Édimbourg où le reçoit Lord Jeffrey, il est acclamé au théâtre par la foule debout, tandis que l'orchestre joue impromptu « Charley is my Darling.
Les villes se couvrent de portraits de Pickwick ou de Nickleby, sur les faïences, les vêtements, des affiches et des placards, et le visage même de Dickens, désormais popularisé par Maclise et Francis Alexander, est connu de toute la nation et outre-Atlantique88. Nombre d'observateurs prévoient une issue parabolique : « Il s'est envolé comme une fusée ; il retombera comme un bout de bois », augure Abraham Hayward dès octobre 1837. Pourtant, Dickens ne faiblit pas et devient le collaborateur ou l'ami de la plupart des grands journalistes ou auteurs, Leigh Hunt, William Harrison Ainsworth, Edward Bulwer-Lytton, Albany Fontblanque, Douglas Jerrold, Walter Savage Landor, etc. Comme l'écrit Michael Allen, son énergie créatrice ne fait que décupler et les commentateurs saluent désormais cette voix dont l'originalité sait parler à tous.

Des relations familiales difficiles

Les enfants se sont suivis pratiquement d'année en année et leur père s'intéresse beaucoup à eux petits, les négligeant ensuite tant ils peinent à se hisser au niveau espéré et requièrent souvent son aide financière.
Ils ne sont pas les seuls, parents, frères et sœurs, tous se tournent vers ce nouveau fortuné.
Dickens a eu avec son père des relations teintées d'affection et de méfiance : jusqu'en 1839 environ, il l'invite souvent au théâtre, à des dîners, en vacances, à des réunions entre amis ; puis, John Dickens, dont les activités journalistiques se tarissent, est comme emporté par le tourbillon de son fils et reprend ses mauvaises habitudes.
Charles en prend conscience en mars et fait déménager ses parents à Exeter, Devonshire, loin des tentations londoniennes et des créanciers. Pour environ 400 £, il éponge les dettes et règle les dépenses du nouveau logis.
Le séjour dure trois ans, jusqu'au jour où son fils, au comble de l'exaspération, se rende compte que John a accumulé d'autres dettes, vend en cachette des échantillons de ses manuscrits ou de sa signature, quête auprès de l'éditeur du journal local, sollicite sa propre banque et son ami Macready.
Il publie alors une mise en garde, comme quoi les créances circulant en son nom ne seront pas honorées.
Exiler son père à l'étranger, il y songe, mais, à son retour d'Amérique en 1842, il finit par rapatrier l'impécunieuse famille non loin de lui.
Les imprudences reprennent et Charles, bien que s'efforçant de donner le change, laisse parfois éclater sa colère : en septembre 1843, il écrit à John Forster qu'il est « confondu par l'audace de son rennent et Charles, bien que s'efforçant de donner le change, laisse parfois éclater sa colère : en septembre 1843, il écrit à John Forster qu'il est « confondu par l'audace de son ingratitude », que c'est « une insupportable croix à porter » qui le « démoralise complètement et dont le fardeau devient intolérable ».
Désormais, il assure le rôle de chef de famille, s'occupe de l'éducation de la fratrie, lui trouve du travail, la guide et la réprimande, l'emmène en vacances, l'installe et si l'un d'eux disparaît, assure le bien-être des siens.
Selon Michael Allen, Dickens a trouvé pour tous le temps et l'argent qu'il fallait, « mais a payé un lourd tribut d'anxiété devant leurs frasques » : Fred épouse une jeune fille de dix-huit ans, s'en sépare, est convaincu d'adultère et poursuivi, refuse de payer, quitte son travail et s'enfuit à l'étranger ; arrêté à son retour, il est emprisonné, sombre dans l'alcoolisme et meurt à 48 ans ; Augustus quitte son épouse devenue aveugle au bout de deux ans, émigre en Amérique avec une autre femme, meurt à Chicago à 39 ans où sa concubine se suicide l'année suivante.


Georgina Hogarth

Dès le retour d'Amérique, la place de Georgina va grandissant51. Devenue Aunt Georgy, elle s'occupe beaucoup des garçons, leur apprenant à lire avant qu'ils n'entrent à l'école, et prend souvent la place d'honneur lors des réceptions.
Elle est aidée par une bonne, Anne Cornelius, dont la fille fréquente plus tard une école du nord de Londres où sont aussi scolarisées deux, puis trois nièces de Dickens qui acquitte tous les frais.
Georgina est à la fois servante, préceptrice et maîtresse de maison98, statut bien supérieur à celui d'Anne Cornelius qui voyage en deuxième classe alors que la famille est en première.
Elle accompagne parfois Dickens en ses longues promenades et elle partage de plus en plus ses activités théâtrales96, voire littéraires, lui servant de secrétaire lorsque, de 1851 à 1853, il écrit sa célèbre Histoire de l'Angleterre destinée aux enfants.
Dickens cherche à la marier, lui proposant de beaux partis, par exemple Augustus Leopold Egg (1816-1863), étudiant aux Beaux-Arts de Londres et futur peintre de renom. Lui aussi partage la scène avec Dickens lors de ses mises en scène dont il conçoit souvent les costumes : Georgina les refuse tous, et son beau-frère, blasé, écrit à un ami alors qu'elle a atteint l'âge de 33 ans :
« Je doute fort qu'elle se marie un jour ».
Le moment le plus crucial de la vie de Georgina coïncide avec le moment le plus crucial de la vie de Dickens, lorsque, excédé par sa femme, il décide de s'en séparer.
1858 : la séparation d'avec Catherine Dickens


Maria Beadnell.

Dickens, ne voyant plus sa femme avec ses yeux de jeune homme, parlant d'elle avec mépris à ses amis, trouvant aussi qu'elle ne s'occupe pas assez des enfants, cherche ailleurs une consolation. Lorsque Maria Beadnell, maintenant Mrs Henry Winter, épouse d'un marchand et mère de deux filles, se rappelle à lui, il se prend à rêver qu'il l'aime encore, la rencontre secrètement, puis l'invite à dîner avec son mari.
La rencontre tourne au désastre, et jugeant sa tentative « absurde », il jure qu'« on ne l'y reprendra plus ».
Mrs Dickens, quant à elle, ne se voit pas sans amertume supplantée au foyer par Georgina et, à partir de 1850, souffre de mélancolie et de confusion mentale, aggravée en 1851 après la naissance de Dora qui mourra à huit mois.
En 1857, les époux font chambre à part, quoique Dickens insiste pour que les apparences soient sauves.
La famille passe quelques moments heureux à Gads Hill's Place110, mais les répits sont de courte durée et bientôt il leur semble impossible de poursuivre la vie commune.
Au printemps de 1858, un bracelet en or, mal dirigé par le joaillier, revient accidentellement à Tavistock House.
Catherine accuse son mari d'entretenir une relation amoureuse avec la jeune actrice Ellen Ternan, ce que nie Dickens, prétextant qu'il a l'habitude de récompenser ainsi ses meilleures interprètes. Afin que soit mise en œuvre une procédure de divorce en vertu de la loi récemment adoptée (Matrimonial Causes Act de 1857), la mère et la tante maternelle de Catherine, Helen Thompson, insistent pour que soient recherchées des preuves d'adultère à l'encontre d'Ellen Ternan et aussi de Georgina Hogarth, qui, après avoir œuvré pour sauver le mariage, a pris le parti de Dickens.
Pour couper aux rumeurs, Dickens lui fait établir un certificat qui la déclare virgo intacta. Le 29 mai 1858, un document faisant état de l'impossibilité d'une vie commune est signé par le couple et paraphé par Mrs Hogarth et Helen Thompson. Dickens demande par écrit à son épouse si elle s'oppose à ce qu'une déclaration commune soit rendue publique ; la première paraît le 12 juin113 dans Household Words, reproduite par de nombreux quotidiens ou hebdomadaires dont The Times, puis une autre dans le New York Tribune.


Bientôt, Catherine s'en va vivre avec son fils Charley au 70 Gloucester Crescent, dotée d'une rente de 600 £.
Elle n'a jamais été autorisée à remettre les pieds au domicile familial, ni à paraître devant son mari, retiré avec les autres enfants et Georgina à Gad's Hill Place, où il écrit ses œuvres dans un chalet suisse reconstitué au milieu du jardin.
Elle n'a pas manqué de défenseurs, entre autres William Makepeace Thackeray, Elizabeth Barrett Browning ou Angela Burdett-Coutts, amie de toujours qui se sépare de Dickens.
La « trahison » de Georgina incite Graham Smith à sonder ses motivations : écartant l'idée qu'elle ait secrètement aimé son beau-frère autrement que d'affection, elle a dû, pense-t-il, se préoccuper des enfants, désormais « sans mère », et apprécier de vivre auprès d'un écrivain de tel renom et de profiter de la compagnie qu'il fréquente.
Quant à Dickens, Graham Smith voit dans le sobriquet qu'il lui donne, « la vierge », la clef de son attitude : faisant fi des conventions, il a trouvé en elle son idéal de femme au foyer, tel qu'il le décrit en Agnes Wickfield, « angélique, mais compétente à la maison ».


Un travail acharné et fécond

Calme ou agitée, chaque année apporte son lot de labeur et de réussite.
Les Dickens changent souvent de domicile, et en 1842, à son retour d'Amérique, Charles déracine sa famille et s'en va vivre à Gênes d'où il revient au bout d'un an avec son Pictures from Italy.
L'année suivante, c'est en Suisse, puis à Paris qu'il passe plusieurs mois, ces absences n'allant pas sans répercussions, malentendu et brouille avec les éditeurs.


Daguerréotype d'Antoine Claudet.

En 1850, Dickens se fait prendre en photographie pour la première fois sur un daguerréotype d'Antoine Claudet : image d'un homme respectable, solide, rasé de près, sévère de visage et élégant dans sa tenue, un portrait d'homme d'affaires ; il y paraît grand, bien qu'il ne fît que 5 pieds et huit pouces, soit 1,72 m120 ; une certaine solennité imprègne ses traits, qui se durciront en un vieillissement prématuré.
Les deuils, indépendamment des tracas, se succèdent dans sa vie : perte de sa sœur Fanny à trente-huit ans en 1848, bientôt suivie par sa petite Dora en 1850, puis de son père en 1851. C'est une époque d'introspection où il commence à écrire une autobiographie, puis se confie à la première personne dans David Copperfield, « de tous mes livres, celui que j'aime le plus », dont le décryptage ne s'est fait qu'après la parution de la biographie de John Forster.
Auparavant, en 1843, il s'est s'inscrit dans le cœur des foules avec Un chant de Noël, sujet déjà abordé dans ses Esquisses de Boz et Les Papiers posthumes du Pickwick Club, mais qui, avec Tiny Tin, Scrooge, les Fantômes de Noël Passé, Présent et Futur, promeut sa renommée à l'universalité. Petit livre d'emblée proposé à la scène, restant à ce jour le plus adapté de tous, il associe Noël et Dickens dans la conscience collective, d'autant que, de 1850 à 1867, chaque fin d'année apporte sa nouvelle offrande.
De 1846 à 1858, en collaboration avec Angela Burdett-Coutts (1814-1906), il crée Urania Cottage, destiné à recueillir les femmes dites « perdues », réalisation qui, au cours des douze années de sa gestion, permet à une centaine de pensionnaires de se réinsérer dans la société. Contrairement aux autres institutions de ce type fondées sur la répression, il choisit d'éduquer par la lecture, l'écriture, la gestion du foyer et surtout un métier. Tout en les coupant de leur milieu, il entend métamorphoser « comme magiquement » les exclues par des habitudes et des principes nouveaux, expérience, écrit Jenny Hartley, qui « aura été comme écrire un roman, mais avec de vraies personnes ».


Dickens en capitaine Bobadill dans Ben Jonson.

De tous temps, Dickens a pris plaisir à la scène. Chez ses parents à Bentinck House, il crée une petite compagnie familiale, et au Queen's Theatre de Montréal en 1842, il aide les officiers de la garnison, The Goldstream Guards, à monter un spectacle.
En 1845, puis dans les années 1850, rassemblant acteurs professionnels et amis, il se lance dans la mise en scène et la production, prenant même part, en capitaine Bobadill, au Every Man in his Humour de Ben Jonson au Royalty Theatre, 73 Dean Street, Soho. Décor, jeu des acteurs, accessoires, maquillage, costumes, il se plaît devant le public, sa troupe attire l'attention et est souvent demandée à Londres et en province (Birmingham, Manchester, Liverpool), en Écosse (Édimbourg, Glasgow).
En 1851, Les Joyeuses Commères de Windsor de Shakespeare s'ajoute au répertoire et une nouvelle pièce de Edward Bulwer-Lytton, Not so Bad as We Seem, est donnée devant plus de 1 200 spectateurs à Sunderland où, le nouveau théâtre étant réputé peu sûr, Dickens place Catherine et Georgina loin de la scène. Chaque fois, quelques courtes farces sont données en bis, où Dickens, changeant rapidement de costume, incarne plusieurs personnages, tout cela dans la joie et sans but lucratif, les entrées allant à des œuvres de charité, surtout la Guild of Literature and Art, fondée avec Lytton pour les acteurs nécessiteux,. Même la Reine Victoria est conquise et fait savoir au printemps de 1857 qu'elle aurait plaisir à assister à une représentation de The Frozen Deep.

1851 est l'année où Dickens acquiert Gad's Hill Place près de Rochester, au portail de laquelle Charles et son père s'étaient arrêtés avec envie quelque trente ans auparavant. La région, « lieu de naissance de son imagination », devient une nouvelle source d'inspiration : Chatham, Rochester, les marais environnants servent de décor pour Les Grandes Espérances (1860-1861) ; Rochester est le Cloisterham de Le Mystère d'Edwin Drood, et plusieurs essais du The Uncommercial Traveller, dont « Dullborough Town » et » Chatham Dockyard », y sont également situés.


Daily News (1858).

Le journalisme a été l'une des activités fondatrices de Dickens : en 1845, il participe au lancement du Daily News à vocation libérale publié par Bradbury and Evans et dirigé par d'anciens collaborateurs, entre autres John Forster et George Hogarth, W. H. Wills, Mark Lemon et Douglas Jerrold.
Bientôt, Dickens en devient brièvement le rédacteur-en-chef avec l'énorme somme de 2 000 £ annuelle, et, bonus ajouté, son propre père est placé à la tête des reporters.
Alors qu'il travaille à David Copperfield, il conçoit et met en œuvre Household Words et, contrairement à ses passages au Bentley's Miscellany, L'Horloge de Maître Humphrey ou au Daily News, il s'occupe jusqu'à sa mort de ses propres revues, Household Words changeant de titre en 1859 pour devenir All the Year Round.
Avec l'aide du rédacteur adjoint W. H. Wills, de Wilkie Collins qu'il rencontre en 1851 et d'autres jeunes écrivains, les années 1850 et 1860 sont fertiles en événements journalistiques que Dickens relaie auprès d'un public friand de qualité, les ventes grimpant au moment de Noël à 100 000 pour Household Words, 300 000 pour All the Year Round. Sa passion journalistique s'est transmise à son fils aîné Charley qui, après le décès de son père, a poursuivi la rédaction et la gestion de la revue jusqu'en 1888.


Gad's Hill Place aujourd'hui.


Vers la fin de sa vie, Dickens proclame la haute idée qu'il se fait de sa vocation : « Lorsque je me suis d'abord engagé en littérature en Angleterre, j'ai calmement résolu en mon for intérieur que, réussite ou échec, la littérature serait ma seule profession J'ai passé un contrat avec moi-même, selon quoi à travers ma personne, la littérature se dresserait, en soi, pour soi et par soi ».
Si Dickens a toujours tenu, et le plus souvent avec brio, à donner cette image d'un homme dévoué au service des lettres et des lecteurs, parfois, note John Drew, lors de ses démêlés avec les éditeurs, le caractère impérieux de son tempérament a pris le pas sur sa « calme résolution » : ainsi en témoigne le dernier numéro de Household Words fondant All the Year Round131, a contrario aussi éloquent que les solennelles déclarations publiques.
Les douze dernières années


Ellen Ternan.

Le 13 avril 1857, alors qu'elle vient d'avoir dix-huit ans, Ellen (Nelly) Ternan est remarquée par Dickens au théâtre du Haymarket.
L'impression est forte au point qu'en décembre, il s'ouvre à son amie Mrs Watson de son trouble.

L'année suivante, il la recrute avec sa mère et une de ses sœurs pour interpréter au nouveau Free Trade Hall de Manchester, une pièce de Wilkie Collins, The Frozen Deep (« Les Abîmes gelés »), confiant les plus importants personnages à Mrs Ternan et à Maria, tandis qu'Ellen incarne le rôle secondaire de Lucy Crayford.
Ces représentations, attisant le sentiment né en 1857, vont avoir bien des répercussions chez Dickens. Subjugué par Ellen, de l'âge de sa fille Katey, il ne l'oublie plus, lui confie certaines de ses œuvres et dirige sa carrière, la logeant avec sa famille en Angleterre comme en France, où il la rejoint souvent à Condette près de Boulogne. À partir de 1860, a-t-il été observé, il traverse régulièrement la Manche, et entre 1861 et 1863, n'est occupé à aucun roman d'envergure ni ne donne de nombreuses lectures.
La présence du couple en France est confirmée en juin 1865 lors de l'accident de chemin de fer de Staplehurst, puisque le train les ramenant de France dans un wagon de première classe en tête de convoi déraille entre Headcorn et Staplehurst le 9 juin 1865.
Les ouvriers ont enlevé seize mètres de rails, mais le convoi est parti plus tôt qu'ils ne s'y attendaient sans qu'aucune fusée d'avertissement ait été prévue140. Les huit premiers wagons basculent dans la petite rivière Beult, en contrebas d'un viaduc peu élevé et dépourvu de rambardes, et de nombreux passagers restent coincés dans les décombres. Grâce à sa taille menue, Dickens réussit à s'extirper par la fenêtre, dégage ses accompagnatrices, s'assure qu'Ellen et sa mère soient immédiatement conduites à Londres, puis se porte au secours des blessés.
Nelly a été touchée au bras gauche qui en restera fragilisé. Dickens, craignant que leurs relations ne soient découvertes, insiste pour que le nom des Ternan soit supprimé des comptes-rendus de presse, et il s'abstient de témoigner lors de l'enquête officielle à laquelle il a été convoquée.
L'accident se solde par dix morts et quarante blessés, dont quatorze grièvement.
Lors de la publication de L'Ami commun en 1865, Dickens ajoute une postface ironique revenant sur l'accident : le manuscrit du dernier épisode est resté dans son manteau, et au bout de trois heures, il se rappelle soudain les feuillets, se hisse dans le wagon suspendu à l'oblique et réussit à les récupérer.
Nelly se fait quasi clandestine, devenue une femme invisible. Pourtant ambitieuse, vive, intelligente, très agréable en société, intellectuellement active et cultivée, sa vie s'est comme arrêtée. Pour Dickens, elle est devenue source permanente de réconfort et bonne conseillère, son art scénique et ses lectures publiques, par exemple, progressant beaucoup.


Helena Landless,

Peter Ackroyd écrit d'Ellen Ternan qu'« elle était volontaire et à l'occasion dominatrice très intelligente et, pour une femme ayant reçu pour toute éducation une enfance passée sur les planches du théâtre itinérant, remarquablement cultivée ».
E. D. H. Johnson note le changement qui s'opère dans l'œuvre de Dickens à partir de 1858, précisant par exemple que « le nom de la jeune femme a certainement influencé le choix de celui des héroïnes des trois derniers romans, Estella, Bella Wilfer et Helena Landless », au nom évocateur de Lawless, second prénom d'E, tous prénoms évoquant l'éclat (hèlè) de l'astre, l'étoile (stella), la beauté, la lumière. Leur tempérament volontaire représente, ajoute-t-il, une rupture par rapport à l'« idéal de douce sainteté » qu'incarnent Florence Dombey, Agnes Wickfield, Esther Summerson et Amit. De plus, « ses dernières œuvres explorent sans le moindre doute la passion sexuelle avec une intensité et une acuité sans précédents dans son œuvre ». Enfin, Le Mystère d'Edwin Drood a été inspiré par un fait-divers lié à la famille Ternan lorsqu'un des nombreux frères du père de Nelly, parti un jour en promenade, n'est jamais revenu.



Que Dickens ait passionnément aimé Ellen est établi, mais ce n'est qu'après la publication de Dickens et sa fille par Gladys Storey en 1939 qu'ont été connus les détails : Kate lui a confié que son père et l'actrice ont eu un fils mort à quatre jours, naissance attestée par l'entrée sibylline d'avril 1857 relative à Slough dans le journal de Dickens : « Arrivée et Perte ».
Il se peut qu'il y ait eu plusieurs grossesses, et Nelly aurait fait allusion à « la perte d'un enfant ». Gladys Storey ne corrobore pas ces dires, mais à son décès en 1978, divers documents ont été déposés au musée Charles Dickens, où répertoriés et analysés, ils confirment, selon Claire Tomalin, les faits révélés.
Le couple a vécu à Slough, Dickens se faisant passer pour « Mr John Tringham of Slough » ou encore « Mr Turnan », à Windsor Lodge, Peckham avec, là aussi, des noms d'emprunt, et en France près du Château d'Hardelot. Michael Slater note que le romancier a acheté pour Nelly une vaste demeure à Ampthill Square, St. Pancras, où elle a vécu de 1859 à 1862, ce que corrobore aussi Claire Tomalin,. Pendant toutes ces années, Ellen s'emploie à « se servir de ses cellules grises pour se cultiver », comme l'a confié Kate Perugini à Gladys Storey. Lors de leurs séparations, leur correspondance transite par W. H. Wills, de Household Words et All the Year Round, par exemple pendant la tournée américaine de 1867-1868.
Il n'est pas certain qu'Ellen Ternan ait volontiers accepté l'intimité d'un homme au-delà de l'âge d'être son père. Sa fille Gladys rapporte qu'elle parlait de Dickens en termes élogieux, mais le biographe Thomas Wright la décrit comme regrettant amèrement sa liaison, « commencée alors qu'elle était jeune et sans le sou s'accablant de reproches et s'éloignant de plus en plus de lui ».
D'après E. D. H. Johnson, elle se serait longtemps refusée. « Ellen, ajoute Thomas Wright, si elle a cédé, semble l'avoir fait sans chaleur et avec un sentiment chagriné de culpabilité ».
Il s'en remet au chanoine William Benham de Margate à qui elle se confiait: « Je le tiens de sa propre bouche, écrit-il, elle répugnait à la seule pensée de cette intimité »N ,.
Au temps de cette confidence, Ellen, devenue Mrs Robinson de Southsea, Hampshire, était retirée dans une petite ville de province, veuve des plus respectables. Lorsque Georgina a appris que Thomas Wright rassemblait des documents, elle s'est montrée très soucieuse que certains détails « de nature privée » ne fussent pas publiés à l'encontre de son beau-frère, à quoi il lui a été répondu qu'« il eût été cruel, en effet, de les révéler si prématurément » ; de fait, la biographie n'a paru qu'en 1935.


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Posté le : 09/06/2013 12:30
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Charles Dickens 2
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La tournée américaine de 1867-1868.

La passion de Dickens pour la scène, la popularité dont il jouit, l'incitent à entreprendre des lectures publiques de ses œuvres. Il commence, lors de manifestations caritatives, par se produire devant de petits groupes d'amis, puis s'essaie à des auditoires plus vastes.
À partir de 1858, le succès est tel qu'il entreprend d'en tirer profit et, jusqu'à la fin de sa vie, ces récitals constituent une part majeure de ses activités118. D'après un témoin de l'époque, « sa lecture n'est pas seulement aussi bonne qu'une pièce, elle est meilleure que la plupart d'entre elles, car sa performance d'acteur atteint les sommets ».
Entre avril 1858 et février 1859, il donne cent-huit représentations, ce qui lui rapporte 1 025 £, c'est-à-dire presque la moitié de ses gains littéraires qui ne dépassent pas 3 000 £ par an. Au-delà de l'aspect financier, cependant, la passion qui l'habite lorsqu'il est devant un auditoire est telle qu'elle devient quasi obsessionnelle, qu'il entre comme en transe et que la salle est transportée d'enthousiasme, Dickens, selon les témoins, la tenant sous son charme, exerçant une puissante fascination.
Il sillonne l'Angleterre, l'Écosse, l'Irlande, et plus ses tournées se prolongent, plus grandit le nombre des auditeurs. Ses lettres sont gonflées de fierté, et George Dolby, devenu son agent, écrit qu'« en dehors des bénéfices financiers, le plaisir qu'il ressent dépasse l'ordre des mots ». Les témoins sont unanimes pour rendre hommage à cette maîtrise, au talent de lecteur, au génie de la déclamation : hypnotisme, charme, sens aigu de la mise en scène, tels sont les mots relevés, et le geste accompagne la parole, le suspens se voit savamment ménagé, les effets de voix restent saisissants. Même Mark Twain, au départ sceptique et irrité de « l'emphase très anglaise du personnage », cède à ce qu'il appelle « la splendide mécanique.
J'avais presque l'impression que je voyais les roues et les poulies à l'œuvre ». Birmingham, Sunderland, Édimbourg, ses élans de bonheur à tant de gloire se succèdent : « J'ai vraiment beaucoup de succès » ; « Je n'ai jamais contemplé d'auditoire sous un tel charme » ; « Le triomphe que j'y ai reçu dépasse tout ce que j'ai connu. La cité a été prise d'assaut et emportée », etc.. À Belfast, on l'arrête dans la rue, le couvre de fleurs, ramasse les pétales qu'il a touchés ; les hommes pleurent, autant et même plus que les femmes.


La tournée d'adieu.

À la fin des années 1860, parents et amis s'inquiètent de la fatigue qui s'abat sur Dickens lors de ses tournées qui, comme tout ce qu'il entreprend, se passent dans un comble d'excitation. Son rendu du meurtre de Nancy par Sikes dans Oliver Twist, en particulier, qui mesmérise le public, le laisse pantelant d'épuisement, et son fils Charley le met en garde : « Je n'ai jamais rien entendu de plus beau, mais ne le faites plus ».
À cela s'ajoute le traumatisme de devoir prendre le train, ce qui, depuis l'accident de Staplehurst, lui est de plus en plus pénible. Son médecin personnel, le docteur Francis Carr Beard, dont les notes signalent des emballements cardiaques alarmants, surtout pendant la scène d'Oliver Twist, finit par lui interdire ces récitals. Dickens passe outre, part pour une nouvelle tournée américaine en 1867, et une autre en octobre 1868 sur les routes anglaises.
Il en revient à bout de forces après soixante-quatorze représentations sur les cent prévues. Désormais, dans la quiétude de Gad's Hill Place, souvent avec Ellen Ternan, il se consacre à son dernier roman et trouve quelque repos. En bonne vedette qu'il est, cependant, et contre l'avis de tous, il insère dans son emploi du temps douze récitals d'adieu à Londres fin 1869 et les derniers de janvier à mars 1870.


Trois mois plus tard, le 9 juin 1870, il était mort.


L'ultime Dickens Les deux derniers romans


Dickens et ses deux filles.

Le quatorzième roman de Dickens, et le dernier à avoir été achevé, L'Ami commun, paraît de mai 1864 à novembre 1865.
Il présente une vue panoramique de la société anglaise vouée à la superficialité urbaine et l'avidité destructrice, dont la Tamise, décor, actrice et surtout symbole, charrie les corps-rebuts que se disputent des vautours humains.
Quant au Mystère d'Edwin Drood, resté incomplet, il serait la culmination des thèmes et des motifs explorés tout au long de l'œuvre.
Certains critiques, Edmund Wilson par exemple, voient dans son héros, Jasper, un auto-portait, homme divisé, à la fois du monde et de l'imaginaire, socialement familier mais étranger menaçant. Si tel est le cas, le personnage disparu, Edwin, serait vraisemblablement revenu, ce retour symbolisant « la résurrection et la vie », comme le sacrifice de Carton.


La mort de Dickens

Il existe un doute sur les circonstances exactes de la mort de Dickens. La critique n'a pas encore tranché, mais semble pencher vers la version de John Forster.
La version officielle
Georgina est à Gad's Hill Place le 8 juin 1870 lorsque, après avoir travaillé dans son chalet, Dickens la rejoint à 18 heures pour le dîner, les traits défaits186. Elle lui demande s'il se sent mal : « Oui, répond-il, très mal depuis une heure ». Elle veut appeler un médecin, à quoi il répond No (non), et s'effondre. Georgina se précipite en disant : « Venez vous allonger »; « Oui, sur le sol », murmure-t-il avant de perdre connaissance.
Georgina appelle le médecin local, puis Mamie, Katey et Charley qui la rejoignent. Elle envoie peut-être aussi chercher Ellen Ternan.
Telle est la version racontée par John Forster, qui déclare la tenir de la bouche de Georgina.


La version officieuse

Il en existe une autre, qui lui donne un rôle tout différent : Dickens n'est pas pris de malaise chez lui, mais à Winsdor Lodge, Peckham, où réside Ellen Ternan.
Ellen le transporte mourant, voire mort, en calèche jusqu'à Gad's Hill Place distant de 24 milles, où il est tiré près de la table afin que soit simulée la scène racontée par Forster.
Pour étayer cette version des faits, le témoignage le plus important, d'après David Parker, conservateur du musée Charles Dickens, est celui d'un certain Mr J. C. Leeson, dont le grand-père, le révérend J. Chetwode Postans, est nommé en 1872 pasteur de l'église Linden Grove Congregational Church située en face de Windsor Lodge. Le gardien de l'église, en poste avant lui, lui aurait mystérieusement confié que « Dickens n'est pas mort à Gad's Hill », dires dont la portée n'apparaît que lorsqu'est connue la véritable histoire de la liaison de Dickens et la raison de ses fréquentes visites à Peckham.
L'acteur Felix Aylmer, alors en relation avec Mr Leeson, rassemble les données, puis publie peu après son Dickens Incognito, paru en 1959, mais sans s'y référer et en gardant la version de Forster.
David Parker attribue cette attitude non pas au fait qu'Aylmer a pu avoir des doutes, mais parce qu'il ne veut pas prendre le risque de faire scandale : d'un côté, il ne s'y sent pas autorisé intellectuellement ; de l'autre, il a peur que cela nuise à sa carrière tant est « sacré » tout ce qui touche à Dickens. Quoi qu'il en soit, les documents en sa possession ayant été remis au musée Charles Dickens par sa sœur après sa mort en 1979, « le dossier relatif à Peckham peut, sur ma recommandation en tant que conservateur, précise David Parker, être analysé par les chercheurs ».


Conclusions en l'état

Le coin des poètes.
Si cette hypothèse se vérifiait, Georgina Hogarth serait complice d'une mystification : à la mort de Dickens, n'écoutant que sa loyauté, elle aurait participé au dernier acte d'un camouflage persistant depuis 1858, date de la rencontre avec la jeune actrice, soit une douzaine d'années.
Pourtant, Claire Tomalin se garde de prendre parti, et David Parker, jugeant qu'elle n'a pas tort, trouve bien des raisons de discréditer l'hypothèse de Peckam : piètre fiabilité des témoins, impossibilités pratiques, rôle des domestiques, et surtout témoignage du médecin, le docteur Stephen Steele, impartial, assure-t-il, puisqu'il n'est pas le médecin personnel de Dickens, et qui confirme l'avoir trouvé inconscient sur le sol vers 18 h 30.
En définitive, l'état actuel des recherches rendrait à Georgina Hogarth la véracité de sa version des faits, telle qu'elle l'a livrée à John Forster.
Le coin des poètes
En conclusion de son article sur la vie publique de Dickens, John Drew écrit que, par une ultime ironie, son dernier effort pour dominer le destin s'est trouvé contrarié. L'immense popularité qu'il a tant chérie n'a pas voulu que sa dépouille fût inhumée, comme il le souhaitait, « sans frais, sans ostentation et strictement en privé dans le petit cimetière jouxtant le mur du château de Rochester ».

En grande pompe, la nation lui a offert une tombe dans le Coin des poètes de l'abbaye de Westminster, et tout entière a pris le deuil.


Dickens, le réformateur ?

Les émeutes de Gordon.
Selon Hugh Cunningham, il devient difficile de considérer Dickens comme un réformateur, bien que telle a été sa réputation de son vivant et longtemps après sa mort.
Non qu'il n'ait pourfendu les maux de la société, mais sans leur opposer de système cohérent, ses réponses aux problèmes soulevés restant marquées au coin par sa foi en la capacité de l'être humain à accéder à la bonté.
À l'aune de son œuvre, la mutation qu'a connue la Grande-Bretagne au XIXe siècle se mesure par le passage de la diligence au chemin de fer, de la campagne à la ville, du monde rural à celui des usines.
Trois hommes l'ayant influencé ont compris et analysé ce bouleversement, Adam Smith qui prône le laisser-faire, Thomas Malthus qui recommande le contrôle des naissances, et Jeremy Bentham, partisan du plus grand bonheur pour le plus grand nombre par l'intervention du pouvoir politique.
Instinctivement, Dickens s'est retourné contre les deux premiers, en particulier dans Les Temps difficiles, où les cadets de Thomas Gradgrind portent dérisoirement leurs noms et, dans le même roman, a activement stigmatisé les dérives engendrées par la stricte application des théories du troisième.
Dans Barnaby Rudge, Dickens dénonce la férocité aveugle de la foule qu'il a prise en horreur depuis l'agitation chartiste du Pays de Galles en 1842. Pourtant, sa méfiance envers ce mouvement est d'origine théorique : alors que le Chartisme présuppose la bonté naturelle de l'homme, lui est convaincu que si bonté il y a, elle est le fruit d'un fragile processus de civilisation. Pour le préserver, il convient que les autorités ne cèdent à aucune clémence envers les fauteurs de trouble. D'où son admiration pour la police, les détectives privés, les organismes chargés du respect de la loi.
Une mise en cause plus littéraire que politique

Cela dit, il s'attaque à certaines institutions qu'il considère comme des fléaux sociaux, par exemple la Loi sur les pauvres de 1834, modifiant l'ancienne loi d'assistance aux indigents datant de l'époque élisabéthaine.
Cette nouvelle loi, faisant suite à celle de 1832, mettait fin à l'assistance à domicile aux indigents, considérée comme trop onéreuse, et instituait leur enfermement en hospices. Dans Oliver Twist, le petit Oliver est confié à l'une de ces institutions, et Dickens en dénonce la gouvernance, en particulier l'autorité dont s'investissent de petits clercs suffisants et ignorants, tel le bedeau Mr Bumble, responsable du malheur des résidents.
Plus tard, dans La Petite Dorrit, il stigmatise l'institution pénitentiaire qui, entre autres, maltraite un vieillard malingre, Nandy, doux joueur de flûte parqué avec dix-neuf congénères de son âge dans la puanteur d'un trou. L'action de Dickens, écrit Hugh Cunningham, est restée littéraire ; il n'a pas activement milité pour changer les choses qui ont perduré longtemps après sa mort, jusqu'en 1894.
Sensible à la condition ouvrière, il visite des usines dans le Lancashire dès 1838 et ce qu'il y voit le remplit d'étonnement et de dégoût.
Il entend, écrit-il alors, « frapper un grand coup », qui, commente Hugh Cunningham, « n'est jamais venu, même dans Les Temps difficiles ». L'Edinburgh Review lui demande un article qui reste dans les limbes ; il se contente, quatre ans plus tard, d'envoyer au Morning Chronicle une lettre passionnée contre la Chambre des Lords à propos d'un amendement qu'il réprouve.
Vers le milieu des années 1850, il publie de nombreux articles dans Household Words sur les accidents du travail, blâmant les patrons et les magistrats qui « se mettent en quatre pour les comprendre ». Pour autant, alors qu'il est très sensible au travail des enfants, aucun de ceux qu'il met en scène dans ses livres ne travaille en usine : seul David Copperfield est employé à coller des étiquettes, tâche sans commune mesure avec l'esclavage des mines ou des manufactures de textile et de métallurgie ; quant au petit Joe, à jamais balayant le même carrefour dans La Maison d'Âpre-Vent, il se meurt plus d'ennui et de faim que de la dureté du labeur200.


Field Lane dans les années 1840.

Dickens s'est peu préoccupé de l'accès à l'éducation pour tous et du contenu des programmes, questions agitant la Grande-Bretagne au cours des décennies 1830 et 1840 et jamais vraiment résolues, le rôle dévolu à l'État l'intéressant moins que l'éthique et la pédagogie des établissements. Dans son œuvre, les mauvais maîtres sont légion, du brutal Wackford Squeers que rosse le jeune Nicholas Nickleby et Mr M'Choakumchild obnubilé par le « fait », jusqu'au plus titré et socialement respecté de tous, Bradley Headstone, qui ravage les jeunes esprits par les insuffisances de son caractère et en arrive au meurtre pour satisfaire son ego.
Pourtant, il est convaincu que l'éducation est primordiale dans la lutte contre le crime. Plaçant beaucoup d'espoir dans les Ragged Schools, destinées depuis 1818, à l'initiative du cordonnier John Pounds de Portsmouth, à éduquer les enfants défavorisés, il en visite une en 1843, la Field Lane Ragged School, et est consterné par ce qu'il y voit.
Il entreprend alors d'œuvrer pour une réforme de ces établissements, plaide en vain auprès du gouvernement pour une augmentation des crédits, donne lui-même des fond et rédige Un chant de Noël, au départ pamphlet sur la condition des enfants pauvres, puis récit dramatique qu'il juge plus percutant. En effet, son but est d'inciter le gouvernement à changer la loi, faute de quoi, laisse-t-il entendre, l'ignorance et le besoin condamnent les nantis à devenir des « Scrooge » desséchés, s'autorisant de leur richesse et de leur rang pour mépriser les malheureux plutôt que de leur venir en aide.
Peu à peu, cependant, il en vient à penser que la source des maux sociaux est à trouver dans les conditions d'habitat et d'hygiène réservées aux familles pauvres203. En 1851, il déclare à la Metropolitan Sanitary Association que la réforme de ce qu'on commence à appeler « la santé publique » doit précéder tous les autres remèdes sociaux, que même l'éducation et la religion ne peuvent rien tant que la propreté et l'hygiène ne sont pas assurées. Il s'intéresse d'autant plus au problème qu'un de ses beaux-frères a fondé l' « Association pour la santé des villes » et lui envoie des rapports circonstanciés, par exemple sur les dangers que représente le mode d'inhumation. Ses Esquisses de Boz et Oliver Twist (en particulier la description de Jacob's Island au chapitre 50) témoignent que son souci du problème est déjà ancien, et dans la préface de Martin Chuzzlewit en 1849, il revient sur « l'absence de progrès en matière d'hygiène dans le logement des pauvres gens ». Cent quatre-vingts enfants meurent cette année-là du choléra dans l'institution Drouet de Tooting, dont Dickens dénonce aussitôt la négligence dans quatre articles pour l'Examiner ironiquement intitulés « Paradis à Tooting ». Il réclame une centralisation des efforts sanitaires, au grand dam des conservateurs qu'il raille en Mr Podsnap. Il reprend le sujet régulièrement dans Household Words en 1854, puis encore en 1869.


Que proposer, puisque l'État fait défaut ?


La guerre de Crimée.
Le responsable ultime de tous ces maux, pense-t-il depuis longtemps, est le gouvernement, non pas tant les dirigeants qui vont et viennent, que l'administration pesante qui les accompagne. Chasse gardée de l'aristocratie, le recrutement devrait, selon le rapport Northcote et Trevelyan de 1853, se faire par concours, ce qu'approuve Dickens.
Les lenteurs du changement, cependant, alimente sa haine de la bureaucratie, que renforce l'ineptie déployée lors de la Guerre de Crimée de 1854 : entre avril et août 1855, il attaque violemment l'incompétence du pouvoir dans sa revue et se déchaîne dans le chapitre « Où il est question de la science du gouvernement » de La Petite Dorrit où le « Ministère des circonlocutions » est décrit comme « se faisant un devoir de ne rien faire ».
Dickens a cru en la philanthropie, s'est investi dans Urania Cottage voir Urania Cottage pour les « femmes perdues », l'hôpital des enfants malades de Great Ormond Street, des programmes de logements pour les ouvriers. Pour autant, il stigmatise les dérives philanthropiques en Mrs Pardiggle qui « enfile aux nécessiteux sa bienveillance comme une camisole de force » et, se consacrant corps et âmes à ses causes africaines, néglige ses enfants réduits à errer, affamés, morveux et sans soin, dans sa maison. Curieusement, malgré ses attaques contre l'Amérique, c'est à Boston qu'il trouve des institutions (publiques, à la différence de celles de son pays) qui lui paraissent secourir les plus pauvres de manière efficace et digne. Ne rien faire, pense-t-il, ou continuer en l'état, c'est préparer le lit d'une révolution à la française ; le capitalisme doit s'allier aux forces laborieuses, les écarts qu'il engendre pouvant être atténués par la bonne volonté de tous. En définitive, plutôt que d'économie politique, c'est d'humanité, de décence, des valeurs du Nouveau Testament qu'il parle.
Dickens et la Révolution française
Que Charles Dickens soit plus réformateur que révolutionnaire apparaît clairement dans sa perception de la Révolution française : dans Le Conte de deux cités (1859), œuvre romanesque ayant pour théâtre la France autant que l'Angleterre de l'Ancien Régime et de la Révolution, il contribue à la fondation de l'opinion anglaise à l'égard des événements français de 1789 à 1793.
Dickens réalise une synthèse entre la pensée d'Edmund Burke et de Thomas Carlyle : du premier, il ne conserve que l'éloge de la constitution anglaise en opposant la violence et la misère de Paris au calme et à la prospérité de Londres ; au second, principale source d'inspiration, il emprunte l'idée de l'inexorabilité d'une révolution considérée comme l'action vengeresse d'un peuple contre la corruption de la société de l'Ancien Régime ; Dickens envisage, avec le sacrifice ultime de Sydney Carton en place de Charles Darnay, héritier de la famille qui était à l'origine des malheurs des Manette, la possibilité d'échapper au cycle de la violence et du châtiment.


Les grands axes de la création dickensienne

Au regard de la puissance créatrice de Dickens, les contraintes auxquelles il a dû se plier, les influences qu'il a reçues et les moules dans lesquels il s'est glissé restent peu de choses.
Comme l'écrit Robert Ferrieux, « Son génie les a acceptés, assimilés, et, sans rien copier, il a bâti un univers original, à la fois fidèle au monde qu'il a connu et totalement différent, un univers en soi, d'essence poétique, unique dans la création littéraire ».

La publication en feuilleton

Presque toutes ses œuvres ont été publiées au rythme de parutions hebdomadaires ou mensuelles, contrainte dont il a su tirer profit, tant il l'a maîtrisée et s'en est servi pour tenir son public en haleine et parfois moduler le fil de l'action, voire les personnages, selon ses réactions.
C'est grâce à ses feuilletons réguliers, relayés au-delà des abonnements par les bibliothèques ambulantes sillonnant le pays, qu'ont prospéré les revues recevant ses feuillets, d'abord celles d'éditeurs indépendants, puis les siennes, dont Household Words et All the Year Round.
Chaque numéro comporte un cahier des charges tacite : respect du nombre de pages, autonomie de chaque numéro, avec son commencement, son apogée et sa fin, sa dépendance envers les chapitres précédents, l'annonce implicite du prochain, le ménagement d'un suspens, l'instauration d'une incertitude, l'avancée de l'intrigue sans en dévoiler la suite tout en lançant de discrètes pistes.
Paradoxalement, cette publication étalée exige une structuration de l'ensemble rigoureuse pour informer à l'avance les illustrateurs dont les planches sont longues à graver et tirer et qui doivent fournir une illustration de couverture qui, comme l'emballage, propose dès le départ une vision globale ; il convient aussi d'éviter les redites et de relancer l'intérêt à intervalles réguliers, d'où cette récurrence de rebondissements programmés, de façon dramatique au milieu et secondaire aux numéros 5 et 15. Ainsi, dans Dombey et Fils, la mort du petit Paul, d'abord prévue pour le quatrième numéro, s'est trouvée repoussée au cinquième. Ce mode de publication a été apprécié du public, pour la modicité de son prix, la convivialité d'une lecture familiale ou de quartier, les supputations sur les événements à venir, la nostalgie des actions situées dans le passé. Selon Robert Patten, « elle collait au rythme de la vie, s'insérait dans l'ordonnance des semaines ou des mois, apportait ordre et régularité dans un monde soumis à de rapides mutations ». Par ce médium, ajoute-t-il, Dickens a démocratisé la littérature


Les romans de Dickens ressortissent presque tous à la version victorienne du Bildungsroman, roman d'apprentissage, appelé aussi « roman de formation » ou « roman d'éducation »N 9,. Un protagoniste est en effet considéré de l'enfance à la maturité, avec une frustration initiale qui l'écarte de son environnement familial, engagé dans une longue et difficile maturation ponctuée de conflits répétés entre son désir et l'ordre établi, enfin réalisant l'adéquation entre l'un et l'autre qui lui permet de réintégrer la société sur de nouvelles bases; Ce passage de l'innocence à l'expérience a des variantes, par exemple, et c'est peut-être la plus caractéristique, celle de Les Papiers posthumes du Pickwick Club où le héros, homme d'expérience au regard de la société, adulé par son groupe d'amis, considéré comme un sage, un philosophe, un prophète, se lance sur les routes et au bout du chemin, s'aperçoit, surtout grâce à son passage en prison pour un quiproquo, qu'il ne sait rien, qu'il a tout à apprendre, et qui gagne, par son sacrifice, son abnégation, l'expérience du cœur, une saine connaissance des hommes et cette sagesse dont il se croyait naguère nanti.
Ce genre est issu du modèle picaresque, dont le prototype est Don Quichotte, héros pseudo-héroïque assorti d'un valet pétri de bon sens, que Cervantes a le premier confié au voyage. Dickens l'a admiré, de même que Lesage et son Gil Blas de Santillane ou son Diable boiteux, dans lequel Asmodée soulève le toit des maisons pour observer ce qui s'y passe, métaphore de la démarche du narrateur à la troisième personne.

Au-delà de Cervantès et de Lesage, Dickens s'est laissé guider par les modèles anglais du XVIIIe siècle, découverts dans sa prime jeunesse et objets permanents de sa vénération. Parmi eux ont surtout compté Defoe, Sterne, Smollett, Fielding, enfin Goldsmilth dont la veine sentimentale l'a inspiré pour prôner l'idéal de l'homme bon (Oliver Twist, Nicholas Nickleby, etc.), et aussi l'excentricité naïve de personnages comme Mr Pickwick et Mr Micawber, Mr Jarndyce ou Mr Meagles.
Dès le début de David Copperfield, le narrateur en dresse la liste et ajoute : « Ils ont nourri mon imagination et mon espoir de quelque chose au-delà de ce lieu de de ce temps j'ai été l'enfant Tom Jones une semaine durant, j'ai enduré la vie de Roderick Random pendant un mois de suite Tel fut mon seul et mon constant réconfort ». Autre influence, note Monika Fludernik, celle, souvent négligée, de William Godwin, dont le Caleb Williams a certainement servi de modèle pour la critique sociale et de source, parmi d'autres, pour ses métaphores carcérales, encore que ce soit surtout la prison pour dettes, connue par procuration, qu'il ait décrite.


William Hogarth, par lui-même.

Le mode satirique adopté par Dickens est lui aussi issu du siècle précédent. Comme ses modèles, Dickens sait repérer les travers, les faiblesses et les vanités humaines ; cependant, note Monika Fludernik, son approche est moins « au vitriol » que celle de ses prédécesseurs : ainsi Casby, escroc puni en fin de parcours, reste un homme dont le texte mentionne les souffrances, alors que le vicaire de Peregrine Pickle, qui lui ressemble beaucoup, reçoit un châtiment sans pitié relevant de la pure farce.
Il en est de même avec la critique des inepties bureaucratiques : alors que Fielding et Godwin s'acharnent sur les juges et les jurés, Dickens s'en prend à l'institution, le tribunal de la chancellerie, le ministère des circonlocutions. Sont également partagés avec le XVIIIe siècle ses portraits de femmes qui, selon Monika Fludenik, doivent quelques traits, en deçà des rencontres personnelles, à la Sophia et l'Amelia de Fielding, de même qu'à l'Emilia de Smollett (Peregrine Pickle), quoique l'idéalisation victorienne à la Coventry Patmore, l'influence des contes de fée et du mélodrame de scène ait contribué à en modeler les contours.
L'œuvre du peintre William Hogarth a aussi, dès ses débuts, beaucoup inspiré Dickens, en premier lieu, note Malcom Andrews, d'un point de vue formel. En effet, ses séries de gravures, comme A Harlot's Progress (La carrière d'une prostituée), Marriage à-la-mode, relevant d'un ensemble cohérent et structuré, lui ont servi de modèle pour le récit séquentiel, par exemple dans Meditations on Monmouth Street, où différentes vignettes très visuelles défilent devant le narrateur Boz, technique également employée dans Oliver Twist, avec sa pléthore de pièces exiguës, basses de plafond et en clair-obscur. Au-delà de cet aspect structurel, les scènes de la vie quotidienne, telles que les a caricaturées Hogarth, se retrouvent, souvent sans grande modification, en mots simplement transportés au siècle suivant.


Sous-genres

Même dans les trois romans d'initiation où intervient le « je », David Copperfield, partiellement La Maison d'Âpre-Vent, et Les Grandes Espérances, les œuvres de Dickens relèvent aussi, comme le notent Paul Davis et Philip V. Allingham, de plusieurs sous-genres pratiqués à son époque.
Si Dickens a voulu prendre ses distances avec ce que Thackeray a appelé « l'École du roman de Newgate », il s'y est néanmoins essayé dans l'épisode central d'Oliver Twist et dans certains autres de ses romans qui présentent la composante criminelle et policière retrouvée chez plusieurs de ses amis, Wilkie Collins, et Ainsworth en particulier.
Les Grandes Espérances, par exemple, regorge de pontons-prisons, de forçats, d'escrocs, de meurtriers, de caïds gérant les affaires du crime, et s'y déroulent des épisodes d'une violence sanglante. Tout au long du roman, demeurent aussi l'énigme de l'excentrique Miss Havisham, que seule la conclusion dénoue, et le suspens entourant le forçat Magwitch, dont le retour de la déportation australienne appelle la potence, réconciliant de ce fait le héros avec lui-même et scellant la fin de ses grandes espérances, puisque les biens incriminés étant confisqués par la Couronne, « d'espérances il n'y a plus ».
Cet aspect de son œuvre est indissociable des relents, auxquels, écrit Robert Mighall, il sacrifie dès ses débuts, de la tradition gothique née au xviii siècle
avec Walpole et son Château d'Otrante (1754), poursuivie, entre autres, par Mrs Radcliffe dans Les Mystères d'Udolphe (1794), et que Walter Scott exploite avec La Fiancée de Lammermoor en 1819. Ainsi, dans Les Papiers posthumes du Pickwick Club, la récurrence des fantômes, des incidents terrifiants ou simplement grotesques, surtout dans les récits intercalés, témoigne du désir de l'auteur « d'envoyer des frissons dans le dos à ses lecteurs et de les faire en même temps se tordre de rire ».
Nombre d'autres romans présentant les mêmes caractéristiques, par exemple Le Magasin d'antiquités, « paradigme du roman d'horreur » selon Victor Sage, où sévit le nain Quilp, gargouille malfaisante et « méchant gothique par excellence », et au cours duquel la petite Nell est lancée avec un grand-père malade sur des routes inhospitalières « hantées de persécution et menant droit au trépas ».
Encore faut-il remarquer que Dickens se départit du modèle udolphien en lui faisant abandonner sa maison-forteresse pour gagner la campagne. De même, avec Barnaby Rudge, même si le gothique entoure Barnaby, le « fantôme », le « spectre », le « vagabond de la terre », il s'en démarque quelque peu puisque ce personnage, censé être central, occupe rarement le devant de la scène. De plus, dans ce roman, Dickens réprouve la bigoterie anti-catholique, ici poussée aux extrêmes du crime, alors qu'elle va de soi dans le monde gothique : sa sympathie va délibérément aux victimes de la furie protestante.
En réalité, explique Michael Hollington, Dickens a tenté une nouvelle approche du genre dans ses premiers écrits : en utiliser les conventions pour dénoncer les abus trouvés à sa porte.
Esquissée par Boz, poursuivie dans Oliver Twist, cette tendance culmine dans La Maison d'Âpre-Vent où les lenteurs de la loi sont rendues, plus que décrites, par la métaphore labyrinthique des ténèbres et du brouillard, où erre une société de fantômes et de vampires, qui s'effondre lors d'une Walpurgis Nacht de dégoulinante combustion spontanée.
En 1860, avec la Miss Havisham des Grandes Espérances, vieille-femme-jeune mariée figée dans le temps en son manoir délabré ironiquement nommé « Satis House », Dickens explore le thème de l'auto-incarcération, trait gothique lui aussi dévié, puisque l'enfermement n'est imposé par personne d'autre que la victime. Comme l'écrit Robert Mighall, Miss Havisham « se gothicise avec application, déployant un art consommé de la mise en scène et de l'effet », et, « posture frankensteinienne », elle façonne sa fille adoptive Estella en un monstre d'ingratitude.
Comble de l'ironie, c'est de cette poupée glacée que le héros, Pip, s'éprend à jamais, amour si constant malgré le mépris témoigné qu'il relève aussi de la veine sentimentale du siècle précédent.
Tous les romans de Dickens, même les plus sombres tels Le Conte de deux cités et Les Temps difficiles, comportent des aspects comiques, de situation comme de caractère. Le lecteur est appelé à rire sans méchanceté de la grandiloquence souveraine de Mr Micawber, avec mépris de l'auto-étouffement du langage officiel du ministère des circoncolutions non sans commisération de la prestation théâtrale de Mr Wopsle ou du mariage de Wemmick, toutes scènes organiquement essentielles à l'intrigue et au thème central.
La palme comique revient sans doute à la création de deux personnages extraordinaires dans Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Mr Jingle et Sam Weller.
Jingle est le champion du degré zéro de l'éloquence, sa syntaxe réduite à un empilement spartiate de mots cocasses mais redoutablement dramatiques, « langage télégraphique tintinnabulant comme son nom » : « éprouvé, à bout, petite boîte, bientôt, tas d'os, rapport police, fausses conclusions, tirer le rideau ». Quant à Sam Weller, outre son sens comique de la répartie, il pratique l'art du proverbe détourné, perverti ou forgé, d'où cet intarissable florilège d'aphorismes commentant chaque événement de façon incongrue mais essentielle. Ainsi, lors du décès de la seconde épouse de son père, une acariâtre évangéliste morte d'avoir trop bu, il trouve le mot de la fin en toute simplicité : « C'est fini et on y peut rien, et c'est une consolation, comme ils disent toujours en Turquie quand ils s'sont trompés de tête à couper ».
En gardant Les Grandes Espérances comme exemple, on trouve aussi le genre « roman à la cuillère d'argent » (Silver Fork Novel), florissant dans les années 1820 et 1830, descriptif d'une élégance clinquante et critique des frivolités de la haute société, classe pour laquelle Dickens n'a que mépris, mais qui fascine beaucoup de ses lecteurs. Ses romans peuvent se concevoir comme des « anti-romans à la cuillère d'argent » tant y est féroce la satire des prétentions et de la morale des riches et de leurs flagorneurs. Le titre même, Les Grandes Espérances, s'avère de ce fait ironique, puisque d'« espérances » en réalité, il n'y en a pas, les biens du forçat restant impurs et, de toute façon, confisqués à son retour par la Couronne.
À tous ces genres subalternes, Philip V. Allingham ajoute la catégorie du roman historique, Dickens ancrant ses récits avec un luxe de détails qui finissent par donner une idée des événements, des personnalités et de la manière de vivre de l'époque choisie. Ainsi, Les Grandes Espérances commence juste après les guerres napoléoniennes, se poursuit jusqu'aux années 1830-1835, puis saute à la décennie suivante de 1840 à 1845, et au fil de ces passages temporels, certaines indications topiques servent de points de repère : billets de banque, mode de locomotion, emplacement des potences, souverains mentionnés, etc..
Thématique
Tous les thèmes abordés par Dickens ont un rapport avec sa propre expérience, même dans les romans qui, a priori, en semblent éloignés, Le Conte de deux cités et Les Temps difficiles par exemple.
Sa thématique peut se décliner autour de trois axes principaux que John O. Jordan appelle les « fictions de l'enfance », les « fictions de la cité » et les « fictions du genre, de la famille et de l'idéologie domestique ». S'y ajoute un thème récurrent, particulièrement développé dans Les Grandes Espérances, celui que Thackeray a appelé dans son Le Livre des snobs, « donner de l'importance à des choses sans importance », ou encore « admirer petitement de petites choses ».
L'enfance


William Wordsworth.

Il est de tradition que Dickens a importé depuis la poésie romantique, surtout celle de Wordsworth, le rôle de l'enfant innocent comme figure centrale du roman. Autrefois considéré comme un adulte incomplet et peu intéressant, l'enfant est devenu vers la fin du xviiie siècle un être humain qualitativement différent et exigeant un soin approprié à son bien-être et à la préservation de son innocence.
La « dure expérience de l'enfance » qu'a connue Dickens, selon l'expression de John Forster, ressentie comme la fin de son innocence et le facteur déterminant de sa maturité, l'a rendu très réceptif à la conception wordsworthienne de l'enfant proche du divin et prédéterminant l'adulte, sentiment encore exacerbé par la mort prématurée de Mary Scott Hogarth.
Plusieurs facteurs, écrit Robert Newsom, « obligent cependant à complexifier cette histoire ».
Les Victoriens, surtout les adeptes de la Basse Église, considéraient aussi l'enfant comme particulièrement vulnérable aux mauvaises tentations, en premier la désobéissance qui conduit à tous les péchés.
Si Dickens s'est toujours opposé à la sévérité de la religion, qu'il associe à l'Ancien Testament, il n'en imagine pas moins certains petits monstres de malhonnêteté ou de méchanceté, The Artful Dodger, du gang de Fagin, Tom Scott, attaché au nain Quilp ou encore Tom Gradgrind, à l'égoïsme vertigineux.
D'autre part, ajoute Robert Newsom, « les adorateurs d'enfants à la Wordsworth sont rares dans son œuvre, et ceux qui le sont s'avèrent bien peu efficaces », tel le grand-père de Nelly.
Quant aux mères affectueuses, elles meurent jeunes, comme celle de David Copperfield, ou elles ont disparu : ainsi, Oliver Twist se retrouve à l'hospice, tandis que le narrateur spécule ironiquement sur les douces femmes qui l'ont peut-être entouré à sa naissance.
En fait, les enfants des premiers romans sont victimes non seulement de négligence, mais aussi d'un sadisme parfois fort audacieux pour l'époque : Quilp propose à la petite Nell d'être sa « numéro 2 », c'est-à-dire sa femme quand sa « numéro 1 » sera morte, et il accompagne sa déclaration de force baisers sonores sur ses « parties roses », comme il les appelle, si bien que le lecteur se demande « s'il a envie de la manger ou de la violer », « ou peut-être les deux », et Wackford Squeers, tout comme Mr Creakle fouettent les petits garçons avec un appétit jubilatoire. Autre variante d'enfant maltraité, celle du puer senex : Nell est adulte avant l'heure mais par nécessité, tandis que Paul Dombey, « le petit Paul », s'entend dès le berceau décrit par tous comme « vieux-jeu », ce qui l'inquiète, croyant que cela signifie « maigre », « facilement fatigué ». Jeté dans un moule de conformisme, poussé comme une graine en serre, il se meurt sans comprendre d'être vieux à neuf ans : il y a là l'esquisse d'une conscience limitée, écrit Robert Newsom, technique que déploie Dickens assez souvent, comme avec Joe le Balayeur, pour intensifier le pathos de la situation.
Vers le milieu de sa carrière, Dickens présente des récits à la première personne en prise directe avec son enfance. 1848 est une période de deuil pour lui et la veine personnelle l'a saisi, ses Fragments autobiographiques voisinant avec David Copperfield.
De plus, ce genre est à la mode depuis la publication de Jane Eyre en 1847 et l'immense notoriété qu'il confère bientôt à son auteur. Sans doute Dickens n'entend-il pas se laisser supplanter dans la faveur publique, d'autant qu'avec La Foire aux vanités, Thackeray occupe lui aussi la une des journaux littéraires. Robert Newsom résume ainsi la situation : « Si Jane Eyre doit beaucoup à Oliver Twist, David Copperfield, Esther Summerson et Pip lui doivent tout autant ».
La conscience de l'enfant se donne alors à lire directement, encore que, problème inhérent à toute écriture autobiographique, sa reconstitution a posteriori par une mémoire adulte accentue, par effet de loupe et aussi de style, les réactions affectives, la colère, l'angoisse, la désespérance.
Il y a là une subtile mystification narrative : les bouffées de reviviscence, dont le flux reste maîtrisé avec art, sont transcrites comme renaissant au présent, mais sans que l'adulte ne s'efface tout à fait.
Au début des Grandes Espérances s'enroulent ainsi la perspective enfantine et la rétrospection adulte, lorsque Pip raconte comment il en est venu à se nommer et quelle idée il s'est faite de ses parents d'après les lettres gravées sur leur tombe. Robert Newsome écrit qu'ici, Dickens présente une enfance « désormais éloignée des glorieuses nuées divines de Wordsworth, éclose dans un monde déchu », marqué, comme le dit le héros au chapitre 32, de la « souillure de la prison et du crime », enfance privée d'enfance, l'innocence lui ayant été refusée.
Dernier avatar, les adutes-enfants, hommes ou femmes refusant de grandir, par exemple Harold Skimpole, inspiré par l'écrivain Leigh Hunt, Flora Finching, Dora, cette fleur que David Copperfield a prise comme première épouse. Dickens ne les ménage pas s'ils allient l'irresponsabilité à la méchanceté, mais sait être indulgent envers ceux qui témoignent d'une bienveillance à tout crin : Mr Pickwick, les frères Cheeryble, Mr Micawber, tous irrésistiblement comiques et dont « la fraîcheur, la gentillesse, l'aptitude à être satisfaits », comme il est dit au chapitre 2 de David Copperfield, s'avèrent en définitive utiles, voire indispensables à la communauté.

La cité

Avant que Dickens n'écrive sur Londres, d'abord dans les Esquisses de Boz et Les Papiers posthumes du Pickwick Club, la cité n'avait figuré dans la fiction que comme décor occasionnel pour une intrigue domestique : avec lui, elle devient l'un des protagonistes de l'œuvre et l'un des moteurs de son succès.
Toute sa vie, Dickens a capitalisé sur l'expérience acquise alors que, jeune reporter, il sillonnait les rues, habitude d'ailleurs poursuivie toute sa vie. Il en ressent une joie poussée jusqu'à l'exubérance, et même lorsqu'il se trouve à l'étranger, Londres n'est jamais loin de ses pensées.
Ainsi, ses récits promènent sans répit le lecteur dans la capitale, avec ses flèches de clochers striant l'horizon, le dôme de St. Paul's dressant sa masse : ordre, chaos, le panoramique se juxtapose au personnel, deux perspectives se télescopant sans cesse, comme dans l'épisode Todgers de Martin Chuzzlewit.
Les bruits de la ville résonnent en contrepoint, « chœur symphonique de la ville », selon Murray Baunmgarten : grincement des trains, sifflets des gares, cris des vendeurs de journaux ou des colporteurs, parfois en un rendu onomatopéique comme dans Dombey et Fils.
Telle la puissante Tamise qui l'irrigue, Londres est en effet parcourue d'un mouvement permanent
, flux de la foule mais aussi mutations la rendant, pour ses habitants, les personnages, le narrateur et le lecteur, difficile à appréhender, tantôt marché, labyrinthe, prison, tantôt agent de régénération.
Les historiens notent l'exactitude de ce rendu : ainsi, alors que, dans les années 1850, les chantiers de rénovation ouvrent de nouveaux jardins et squares publics, l'aller et retour quotidien de Wemmick depuis son château miniature jusqu'à la Cité de Londres s'effectue au milieu de troupes d'acteurs et de musiciens ambulants ayant quitté les ruelles pour occuper ces espaces libérés dans un perpétuel va-et-vient. Dans cette dramaturgie, écrit Murray Baumgarten, Dickens insuffle à la cité, « lanterne magiqueN 10, ballad opera et mélodrame du XIXe siècle », la vitalité d'un Hogarth, avec des instantanés en action, autant d'effets de réel comme jaillis d'un diorama tri-dimentionnel.
« Dickens a été le démiurge d'une capitale en mouvement, ajoute Philippe Lanson, Son imaginaire détermine à ce point la capitale que la peinture, la sculpture, la scène, la photographie naissante, tout semble illustrer ses romans.
Ils prennent Londres non pas pour cadre, mais comme entité vivante, intime, multicellulaire ».
Et Alain de renchérir : « Partout où Dickens évoque un personnage, il fonde pour toujours une cellule de Londres qui ne cesse de se multiplier à mesure qu’on découvre des habitants ; l'impression de nature est alors si forte qu’on ne peut refuser ces êtres ; il faut les suivre, ce qui est mieux que les pardonner. L'atmosphère Dickens, qui ne ressemble à aucune autre, vient de cette sécrétion de l'habitation par l'habitant ».
L'idéologie domestique
Si Dickens a été reconnu de son vivant comme le prophète du foyer, ceux qu'il décrit ne connaissent en général ni l'harmonie ni le bonheur : dans son œuvre George Newlin compte 149 orphelins, 82 enfants sans père, 87 sans mère. Seuls, quinze personnages ont eu ou ont encore leurs deux parents, et la moitié de ces familles, écrit-il, « serait aujourd'hui considérée comme dysfonctionnelle ».
Pour explorer les tensions sociales, économiques et politiques de son temps, son énergie créatrice s'est donc employée à dépeindre des familles grotesques et fracturées.
Pourtant, lorsqu'il lance Household Words et écrit à Forster que sa revue sera empreinte d'« une philosophie de Noël,une veine de générosité chaleureuse, rayonnante de joie dans tout ce qui relève du chez-soi et de l'âtre », il reprend une antienne déjà connue : depuis Un chant de Noël en 1843, que relaie chaque décembre un nouveau conte dédié, il incarne cet esprit aux yeux de tous, ce que notent les commentateurs, Margaret Oliphant par exemple, ironisant sur « l'immense pouvoir spirituel de la dinde » traditionnelle, ou J. W. T. Ley qui le nomme « L'Apôtre de Noël ». Aussi une partie de sa fiction a-t-elle contribué à façonner l'idéologie domestique de son époque, la famille, jusqu'alors héritage d'une lignée, devenant un sanctuaire jugé adéquat pour chacun de ses membres.
Dans cette idéalisation du foyer, la femme assure l'harmonie de la sphère privée : ainsi la petite Nell, Agnes Wickfield, Esther Summerson, la petite Dorrit et, après quelques hésitations, Bella Wilfer. Catherine Waters note que deux de ces jeunes femmes portent le sobriquet « petite » et qu'en effet, la petitesse prévaut dans cette représentation de l'idéal domestique : celle, rassurante, des personnes (Mrs Chirrup, Dot Peerybingle), à quoi correspond l'étroitesse chaleureuse des lieux (le bateau des Peggotty, le château miniature de Wemmick), alors que les grandes bâtisses et les manoirs, où se mêlent public et privé, n'abritent plus que des hôtes aliénés ou sans cœur (Chesney Wold, Satis House, la maison de Mr Dombey).
Outre ces purs « anges du foyer », Dickens met en scène des personnages féminins plus ambigus, à la fois confirmation et critique de l'idéologie domestique dominante : ainsi l'aristocratique Lady Dedlock, dont l'apparence glaciale se conforme aux attributs de sa classe, mais que l'intimité dévoile peu à peu en proie à de sourdes passions. Le narrateur omniscient se garde de l'effraction, ne l'appelant que my Lady et, prudemment à l'extérieur, laisse l'histoire révéler d'elle-même une transgression cachée et son douloureux résultat, la perte d'un enfant. La hautaine dame, au fond, n'est qu'une « femme perdue » socialement intégrée, alors que Rosa Dartle, elle, à jamais blessée par la trahison de Steerforth, refuse toute compromission et nie farouchement sa prétendue spécificité féminine.
De plus, après 1858, et nombre de critiques y voient l'influence d'Ellen Ternan, les héroïnes de Dickens s'affirment plus volontaires, plus promptes à exprimer leurs désirs, sans compter des personnages mineurs apparaissant dans des nouvelles ou des pièces de théâtre, « femmes coquettes et capricieuses, intéressées, certes, mais aussi des femmes complètes, vivantes, authentiques… et féminines ».
Dans Les Temps difficiles, Dickens aborde la question du divorce, tissée dans la texture narrative à travers les personnages de Louisa Gradgrind et de Stephen Blackpool.
Outre le fait qu'il y est personnellement confronté, il fait écho au projet de loi de 1854, A Divorce and Matrimonial Causes Bill, que relaient deux essais parus dans Household Words. Si tous les mariages de Coketown sont désastreux, le paradigme de l'échec reste celui de Blackpool qui ne peut engager une procédure de divorce à cause du prix prohibitif, des complications légales, de l'ostracisme moral.
Ainsi, par ses descriptions répétées d'orphelins, vieilles filles célibataires, mères monstrueuses, familles disloquées, Dickens expose l'instabilité de l'idéal domestique qu'il cherche pourtant à affirmer. Certes, écrit Natalie McNight, il s'est appuyé sur les stéréotypes de son temps, mais il en révèle aussi les tensions et les contradictions, et sa fiction les transcende par sa richesse imaginative.


Le snobisme

D'où vient l'argent chez Dickens ? Il est issu du travail, explique Henri Suhamy, mais n'est acceptable que s'il s'agit du travail d'autrui.
Miss Havisham tire ses revenus de la location de ses biens, argent pur que ne souille pas le dur labeur. Aussi, parce qu'elle est riche, la vieille dame, malgré son excentricité, jouit-elle de l'estime générale et, bien qu'exclue de la vie, elle ne l'est pas de la société, image même d'une aristocratie terrienne demeurée puissante quoique figée dans le passé. En revanche, l'argent venu de Magwitch est frappé d'interdit social car d'un forçat, gagné sur une terre criminelle et à la force des bras. De quels atouts doit-on disposer pour accéder à la « distinction » ? Un titre, ou à défaut, des liens familiaux avec la classe moyenne supérieure : ainsi, Mrs Pocket fonde son aspiration de tous les instants sur le fait que son grand-père a « failli » être anobli, et Pip entretient l'espoir que Miss Havisham finira par l'adopter, car l'adoption, comme en témoigne Estella qui se conduit en petite dame née, est tout à fait acceptable.
L'argent et l'éducation, indifféremment de tout apprentissage professionnel, sont plus importants mais non suffisants. À ce compte, c'est l'odieux Bentley Drummle qui incarne l'idéal social, ce qui explique pourquoi Estella l'épouse sans sourciller.
Or l'argent est corrupteur : son attrait prévaut sur tout, la loyauté, la gratitude, la conscience même, et l'idée de gentleman, selon John Hillis-Miller, « fait banqueroute ».
Ce rejet, amorcé par Dickens dans La Petite Dorrit et confirmé dans Les Grandes Espérances, n'est pas forcément partagé par les contemporains : pour Thackeray, l'idée du « gentleman » doit être réévaluée mais reste un concept indispensable, et pour Trollope, l'éthique ne saurait être spontanée qu'« avec ces qualités défiant l'analyse que montrent l'homme et la dame de distinction ». Enfin, richesse et distinction n'apportent pas le bonheur, « un monde que dominent l'appât de l'argent et les préjugés sociaux conduisant à la mutilation de l'être, aux discordes de famille, à la guerre entre homme et femme ».


Le réalisme à la Dickens

« Une rue de Londres décrite par Dickens est bien comme une rue de Londres, mais est encore plus comme une rue chez Dickens, car Dickens utilisé le monde réel pour créer son propre monde, pour ajouter une contrée à la géographie de l'imagination ».
Ainsi Lord David Cecil résume-t-il le réalisme dickensien, ce qui implique que le réalisme à l'état pur n'existe pas et que l'intention finit par s'effacer devant l'énergie de la vision.


Un univers poétique


Tel est le point de vue traditionnel, issu de Chesterton, puis de Humphry House, qui voit dans l'œuvre de Dickens, outre sa satire sociale et morale, ou ses interrogations sur ce qu'est la civilisation, dans la lèpre des choses comme dans la corruption des cœurs, et surtout parce que gens, lieux et objets prennent valeur de signes, de symboles, les personnages se mouvant comme des emblèmes et les paysages s'entourant d'un halo de signification.
Même, par exemple dans Les Grandes Espérances, lorsqu'il décrit les ruelles sombres et entortillées comme la fumée qui en souille les murs, explique Henri Suhamy, Dickens ne fait pas naître la laideur : sous sa plume, le laid devient cocasse, le tohu-bohu foisonnement de vie, et le marais plat avec sa potence et ses tombes, le fleuve noir comme le Styx, la mer inaccessible, ses carcasses et ses épaves, la ville labyrinthique, tout cela représente, plus qu'il ne les évoque, la mort, le désert de la vie, l'éternité, mais aussi l'espérance et la foi en l'avenir.
Alors, le monde apparaît comme un autre atlas où les mouvements des astres, des flots, des lumières, la nuit, le brouillard, la pluie ou la tempête isolent les demeures, perdent les itinéraires, traquent les êtres, les attendent comme le destin. Dans cet univers, les hommes se rencontrent mais ne s'unissent pas, se touchent pour se repousser, se joignent pour se combattre ; univers en soi où êtres et choses trouvent une place qui n'est pas celle qui leur serait assignée dans la réalité, avec ses lois propres, sans hérédité par exemple, ni grande influence du milieu, avec des marées erratiques et des probabilités bafouant la mathématique.
Alors, l'étrange devient le normal et le fantastique simplement l'inhabituel : c'est-là un univers poétique.
Aussi, comme l'écrit Virginia Woolf dès 1925, « L'extraordinaire puissance de Dickens a un effet étrange.
Elle fait de nous des créateurs, pas seulement des lecteurs et des spectateurs ».
La critique contemporaine n'en dit pas moins : selon Nathalie Jaëck, les romans de Dickens sont volontairement duplices, avec, au cœur de cette écriture créant le réalisme à l'anglaise, une subversion intrinsèque, un désir d'introduire, au sein du système de représentation qu'elle construit, une mise en échec, une alternative formelle : « situé au moment crucial où le réalisme se voit confronté à ses limites, et où le modernisme ne s'est pas encore érigé en système, le texte dickensien s'installe dans cet espace de transition : il construit très méthodiquement une machine littéraire réaliste efficace, en même temps qu'il expérimente les moyens formels de gripper le bel ouvrage ».
Une langue protéiforme
D'après Patricia Ingham, « la maîtrise de la langue dont fait preuve Dickens, unique par son invention et sa densité , en fait le James Joyce de l'Époque victorienne. Déployant toutes les ressources linguistiques possibles, depuis la création de vocables jusqu'à l'allusion littéraire, choix rarement sans modèles littéraires plus anciens qu'il développe souvent au-delà de toute reconnaissance ».


Romans

Les Papiers posthumes du Pickwick Club (The Posthumous Papers of the Pickwick Club), publication mensuelle d'avril 1836 à novembre 1837 (*).
Oliver Twist (The Adventures of Oliver Twist), publication mensuelle dans Bentley's Miscellany de février 1837 à avril 1839 (*)
Nicholas Nickleby (The Life and Adventures of Nicholas Nickleby, publication mensuelle d'avril 1838 à octobre 1839 (*)
Le Magasin d'antiquités (The Old Curiosity Shop), publication hebdomadaire dans Master Humphrey's Clock d'avril 1840 à février 1841 (*).
Barnaby Rudge (Barnaby Rudge: A Tale of the Riots of 'Eighty), publication mensuelle du 13 février 1841 au 27 novembre 1841 (*).
Livres sur le thème de Noël :
Martin Chuzzlewit (The Life and Adventures of Martin Chuzzlewit), publication mensuelle de janvier 1843 à juillet 1844 (*).
Un chant de Noël (A Christmas Carol) (1843) (*).
Les Carillons (The Chimes) (1844) (*).
Le Grillon du foyer (The Cricket on the Hearth) (1845) (*).
La Bataille de la vie (The Battle of Life) (1846) (*).
L'Homme hanté ou le Pacte du fantôme (The Haunted Man or the Ghost's Bargain) (1848) (*).
Dombey et Fils (Dombey and Son), publication mensuelle de mai 1849 à novembre 1850 (*).
David Copperfield (The Personal History, Adventures, Experience and Observation of David Copperfield the Younger of Blunderstone Rookery (Which He Never Meant to Publish on Any Account)), publication mensuelle de 1849 à 1850 (*).
La Maison d'Âpre-Vent (Bleak House), publication mensuelle de mars 1852 à septembre 1853 (*).
Les Temps difficiles (Hard Times), publication hebdomadaire dans Household Words, d'avril à août 1854 (*).
La Petite Dorrit (Little Dorrit), publication mensuelle de décembre 1855 à juin 1857 (*).
Le Conte de deux cités (A Tale of Two Cities), publication hebdomadaire dans All the Year Round d'avril 1859 à novembre 1859 (*).
Message venu de la mer (A Message from the Sea) (1860).
Les Grandes Espérances (Great Expectations), publication hebdomadaire dans All the Year Round de décembre 1860 à août 1861 (*).
L'Ami commun (Our Mutual Friend), publication mensuelle de mai 1864 à novembre 1865) (*).
Le Mystère d'Edwin Drood (The Mystery of Edwin Drood), publication mensuelle d'avril 1870 à septembre 1870. Le roman est resté inachevé, six seulement des douze numéros prévus ayant été terminés avant la mort de Dickens (*).
Recueils divers
Pour une liste complète des œuvres dites « courtes » écrites par Dickens, voir A Comprehensive List of Dickens's Short Fiction, 1833-1868. Consulté le 23 janvier 2013.
Esquisses sur Londres
Esquisses de Boz (Sketches by Boz, Illustrative of Every-day Life and Every-day People) (Sketches by Boz) (*) publié dans Bentley's Miscellany (1836)N 11,406.
Nouvelles indépendantes
The Mudfrog Papers publié dans Bentley's Miscellany (1837-1838).
La Vie d'un Clown, Mémoires de Grimaldi (Memoirs of Joseph Grimadi) (1838).
The Haunted Man (1858).
Reprinted Pieces (1858) (*).
Le Pauvre voyageur (The Uncommercial Traveller) (1860-1869) (*).
Nouvelles publiées dans L'Horloge de Maître Humphrey (Master Humphrey's Clock)
Aveux trouvés dans une prison à l'époque de Charles II
Nouvelles sur le thème de Noël publiées dans Paroles familiales (Household Words), hebdomadaire où Charles Dickens était directeur et rédacteur en chef à partir de 1850
L'Arbre de Noël (The Christmas Tree) (1850).
Noël quand nous vieillissons (What Christmas Is, as We Grow Older) (1851).
A Round of Stories by the Christmas Fire (1852).
Le Conte du parent pauvre (The Poor Relation's Story) (1852)
Another Round of Stories by the Christmas Fire (1853).
Le Conte de l'Écolier (The Schoolboy's Story) (1853)
Les Sept pauvres voyageurs (The Seven Poor Travellers) (1854).
(L'Auberge de)la Branche de houx (The Holly-Tree Inn) (1855).
Le Naufrage du «Golden Mary» (The Wreck of the Golden Mar) (1856).
Dangers courus par certains prisonniers anglais (The Perils of Certain English Prisoners) (1857).
Maison à louer (A House to Let) (1858).
Nouvelles sur le thème de Noël publiées dans Tout le Long de l'Année (All the Year Round), nouveau titre pour Paroles familiales à partir de 1859 au moment ou Charles Dickens se sépara de sa femme
La Maison hantée (The Haunted House) (1859).
Message venu de la mer (A Message from the Sea) (1860).
La Terre de Tom Tiddler (Tom Tiddler's Ground) (1861).
Les Bagages d'Un Tel (Somebody's Luggage) (1862).
La Pension Lirriper (Mrs Lirriper's Lodgings) (1863).
L'Héritage de Mme Lirriper (Mrs Lirriper's Legacy) (1864).
Le Docteur Marigold (Doctor Marigold's Prescriptions) (1865). C'est une série de contes écrits pour distraire une petite fille sourde et muette. On y trouve:
Un procès criminel
L'Embranchement de Mugby (Mugby Junction) (1866). C'est une série de contes écrits pour distraire une jeune femme malade. On y trouve:
Le SignaleurN 12,407.
L'Impasse (No Thoroughfare) (1867), écrit en collaboration avec Wilkie Collins
Autres œuvres : critique, poésie, théâtre
(Certaines de ces œuvres ont été écrites en collaboration, en particulier avec Wilkie Collins et, mais dans une moindre mesure, Elizabeth Gaskell).
The Village Coquettes (théâtre, 1836).
The Fine Old English Gentleman (poésie, 1841).
Memoirs of Joseph Grimaldi (1838).
Notes américaines (American Notes: For General Circulation) (1842) (*).
Pictures from Italy (1846) (*).
The Life of Our Lord: As written for his children (1849).
A Child's History of England (1853).
Les Abîmes glacés (The Frozen Deep) (théâtre, 1857).
L'Abîme (No Thoroughfare) (1867)N 13.
Correspondance
Plus de 14 000 lettres de Dickens à 2 500 correspondants connus, 450 formant The Selected Letters of Charles Dickens, British Academy Pilgrim Edition, Jenny Hartley, éd., Oxford, Oxford University Press, 2012.
Dickens sur scène, à l'écran et en littérature

Adaptations célèbres

Parmi les productions les plus remarquées, figurent trois adaptations de Un chant de Noël :
A Christmas Carol, d'Edwin L. Marin avec Reginald Owen en 1838,
Scrooge (Fantômes en fête), de Richard Donner avec Bill Murray et Karen Allen en 1988
A Christmas Carol (Le Drôle de Noël de Scrooge), de Robert Zemeckis avec Jim Carrey et Gary Oldman en 2008.
Oliver Twist a inspiré en particulier :
Oliver Twist, de David Lean avec Alec Guinness et John Howard Davies en 1948,
Oliver!, comédie musicale de Carol Reed avec Mark Lester et Oliver Reed en 1968,
Oliver Twist, de Roman Polanski avec Ben Kingsley et Barney Clark en 2005.
Quant à David Copperfield, il a été adapté dans David Copperfield, de George Cukor avec W. C. Fields et Lionel Barrymore en 1935, David Copperfield, de Simon Curtis avec Bob Hoskins et Maggie Smith en 1999.
La Petite Dorrit s'est vue portée à l'écran dans Little Dorrit, de Christine Edzard avec Derek Jacobi en 1988, et Les Grandes Espérances a, entre autres, notablement conduit à Great Expectations, d'Alfonso Cuarón avec Robert De Niro et Anne Bancroft en 1998.
Le mystère de Le Mystère d'Edwin Drood
Le Mystère d'Edwin Drood a, du fait que le roman est inachevé, reçu un traitement privilégié car, les mardi et mercredi 11 et 12 janvier 2012, BBC2 a retransmis une version en deux parties inédite et achevée de l'histoire. Le scénario original est de Gwyneth Hughes, auteur de la série anglaise Five Days, nominée aux Golden Globes. La scénariste a souhaité garder le secret quant au dénouement qu’elle a choisi de mettre en scène.
Le second épisode a réservé quelques surprises : Jasper (Matthew Rhys) s'évertue à monter un mauvais coup contre Neville et, bien qu'il n'y ait ni cadavre ni autre évocation du meurtre que celles, en flashback, des fantasmes de Jasper, la ville entière est convaincue que Drood a bel et bien été assassiné.
Mais le jeune homme réapparaît calmement quelque dix minutes avant la fin et explique qu'il a fait une brève excursion en Égypte : ainsi, Jasper n'a pas tué et tout n'était donc que rêve et fantasme…
Et pourtant si, Jasper a tué, pas Edwin cependant, mais son père, le vieux Drood ; et se démêle un écheveau qu'on eût cru moins compliqué : en réalité, le père de Drood est aussi celui de Jasper… et de Neville, si bien que Jasper et Edwin ne sont pas oncle et neveu, mais frères, et que Neville s'ajoute lui aussi à la fratrie. À contre-courant de l'histoire, semble-t-il, puisqu'il a passé ses derniers jours à comploter contre elle, la famille Drood célèbre dans la scène finale la mémoire de l'oncle/père décédé.

Dickens en personnage de roman

Du coup, Dickens est devenu le protagoniste d'un roman, Drood de Dan Simmons, paru en France en 2011.
Dans une chronique du Monde des livres, Hubert Prolongeau explore la fascination de l'auteur américain pour le roman inachevé de Dickens et explique qu'au leu de résoudre le mystère insoluble de sa fin, il a préféré en chercher la clef dans sa genèse. Partant de l'accident ferroviaire de 1855 à Staplehurst, il a imaginé que l'écrivain y a croisé un personnage étrange, nez et doigts coupés, nommé Drood. « Qui est ce Drood, qui va l'obséder au point qu'il consacre désormais toute son énergie à tenter de le retrouver, jouant dans cette quête à la fois sa santé et son salut ? ». Il y a plus cependant, en faisant de Wilkie Collins son narrateur, Simmons sonde aussi son propre mystère : que ce « ce tout petit maître du roman victorien, soit le véritable héros du livre n'est-il dû qu'au hasard ?
En le peignant à la fois admiratif et jaloux de Dickens, son génial collègue, pris entre l'envie et l'amitié, Salieri de ce Mozart des mots, Simmons révèle sans doute quelques-uns de ses doutes face à la création littéraire. On retrouve dans Drood son besoin d'associer en permanence à ses écrits ceux des grands maîtres du passé, leur rendant hommage et affirmant la nécessité d'une filiation »

Comme William Shakespeare, Charles Dickens fait l'objet de centaines, voire de milliers de publications annuelles. Chaque ouvrage spécialisé propose sa bibliographie dans laquelle reviennent certains titres qui, ayant en leur majorité servi à la mise au point de cet article, sont retenus ci-dessous.
Traductions en français


Du vivant de Charles Dickens, beaucoup de ses œuvres ont été, avec son accord et souvent une préface rédigée par ses soins, traduites en français.
Après sa mort, les traductions se sont succédé jusqu'à la fin du XIXe siècle.


Films
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Posté le : 09/06/2013 12:24
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Barbara
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Le 9 Juin 1930 naît à Paris la chanteuse BARBARA, Monique Serf

Lorsque fin 97, disparaît Barbara, elle qui disait détester le mois de novembre, on sent bien que c'est toute une période de la chanson française qui s'achève.
Avec les Brassens, Brel, Piaf et autre Ferré, Barbara symbolisait en fait cette génération issue du cabaret. Faite d'abord pour la scène, et non pour le disque, cette race d'artiste entretenait avec son public une relation intime et forte.
Il ne s'agissait pas de "starmania", mais simplement d'amour réciproque.
C'est pour son public que Barbara avait écrit : "Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous".


Sa vie

Monique Serf (future Barbara) est née à Paris le 9 juin 1930, deuxième enfant d'une famille qui en comptera quatre.
Son père est alsacien et sa mère, originaire d'Odessa en Ukrain.
Durant la Deuxième Guerre mondiale, sa famille est obligée de changer d'hôtels sans arrêt et de faire ses valises rapidement, comme de nombreuses familles juives.

Enfance

A la libération, ils s'installent dans une pension du Vesinet.
En 1946, les Serf s’installent au 50 rue Vitruve, dans le 20e arrondissement. Monique a seize ans.
L’été est assombri par la mort de la grand-mère.
Peu attirée par les études, elle ambitionne depuis longtemps de devenir pianiste et chanteuse.
Ses parents lui promettent de lui offrir des cours de chant. Elle s’inscrit à ceux de Madame Dusséqué. Sa vie en est changée.

Sa voisine, professeur de chant, lui fait travailler sa voix et lui enseigne le solfège ainsi que le piano. Au bout de quelques leçons, son professeur la présente à Maître Paulet, enseignant au Conservatoire de Paris qui la prend comme élève.Entrée à l'Ecole supérieure de musique, elle suit, dès 1947, la classe de Gabriel Paulet. Elle travaille les mélodies de Duparc, Fauré, ou Debussy.
Pour gagner sa vie, elle se fait engager comme mannequin-choriste dans "Violettes Impériales" dont Marcel Merkès est la vedette au Théâtre Mogador de Paris. A cette époque, elle écoute Mireille, Edith Piaf, découvre Charles Trenet et commence à ébaucher elle-même des chansons.


Apprentissage

Dans le nouvel appartement, un piano loué par son père est installé ; Monique en joue d’instinct, sans prendre de leçons.
La jeune fille entre au Conservatoire comme auditrice mais au répertoire de chant classique, elle préfère celui de la chanson populaire.
Elle arrête les cours.
En 1948, après avoir passé une audition au théâtre Mogador, elle est engagée comme choriste dans l’opérette Violettes impériales.
Un jour, son père abandonne soudainement le foyer, pour ne plus revenir. Bientôt, la location du piano ne peut plus être honorée. Contrainte de s’en séparer, elle vit un déchirement.


La période belge : Monique Serf devient Barbara

Voulant à tout prix concrétiser son rêve, devenir « pianiste chantante », elle quitte Paris, en février 1950. Grâce à l’argent prêté par une amie, elle se rend à Bruxelles chez un cousin, Sacha Piroutsky, qu’elle quitte au bout de deux mois car il devenait violent.
Sans ressources ni connaissances, la vie est difficile.
Au hasard d’une rencontre, elle rejoint une communauté d’artistes à Charleroi, qui se réunissent dans un local appelé la Mansarde. Là, elle trouve de l’aide et commence à chanter dans des cabarets sous le nom de Barbara Brodi, nom inspiré du nom de sa grand-mère, Varvara Brodsky.
Son répertoire est constitué de chansons d’Édith Piaf, de Marianne Oswald, de Germaine Montero, de Juliette Gréco et de Jacques Brel. Chaque fois le public la siffle copieusement.


En 1949, elle rencontre Jean Wiener qui l'envoie auditionner chez les frères Prévert. Pierre Prévert dirige alors la "Fontaine des Quatre Saisons", cabaret parisien de la rue de Grenelle. Malheureusement, ses spectacles y sont boudés. Pour l'aider, Prévert lui offre un emploi de plongeuse.
Elle y voit se produire Boris Vian et Mouloudji.

De 1950 à 1952, elle séjourne à Bruxelles, dans des conditions parfois difficiles, et rencontre des peintres et écrivains qui vivent dans une vieille et belle maison qu'ils ont transformée en ateliers et en salle de concert.
Ils lui installent un piano afin qu'elle puisse chanter en public.


Fin 1951, elle retourne à Paris pour des auditions sans lendemain. Elle revient à Bruxelles où un ami du groupe de Charleroi lui donne l’occasion de chanter. Elle est mise en relation avec Ethery Rouchadze, une pianiste géorgienne qui accepte de l’accompagner et auprès de qui elle se perfectionnera au piano. Cette dernière lui présente Claude Sluys, jeune apprenti avocat. Habitué des lieux de spectacles, il se pique d’écrire quelques chansons.
Fin 1952, il déniche le « théâtre du Cheval blanc » et use de ses relations pour y ouvrir un cabaret afin qu’elle s’y produise sous le nom de Barbara.

Le Cheval Blanc

Après cette expérience, elle ouvre un cabaret "Le Cheval Blanc".

Mais faute d'argent, elle rentre à Paris.
Elle auditionne à "l'Ecluse" où elle est engagée pour huit jours. En 1954, elle présente un tour de chant chez "Moineau".
Elle a ajoute à son répertoire des chansons de Léo Ferre ou Pierre Mac Orlan, et même les premières de Georges Brassens.
Le « bouche à oreille » aidant, le succès ne se fait pas attendre, le mariage avec Claude Sluys le 31 Octobre 1953, non plus, non plus.

Au début de l'année 1955 Barbara a l’occasion d’enregistrer deux chansons chez Decca : Mon pote le Gitan et L'Œillet blanc, diffusées en 78 tours et 45 tours7.
A la fin de cette même année, les époux se séparent.

Retour à Paris

Immédiatement Barbara retourne à Paris où elle chante dans de petits cabarets : « La Rose rouge », en 1956, « Chez Moineau », en 1957 puis à « L’Écluse » où elle a déjà chanté pour de courts engagements.
En 1958, elle réussit à s’imposer, sous le surnom de « La Chanteuse de minuit », si bien que sa notoriété grandit et attire un public de fidèles, en particulier parmi les étudiants du Quartier latin.
C’est cependant bien sous le nom de Barbara qu’elle effectue son premier passage à la télévision le 12 juillet 1958, sur l’unique chaîne de la RTF, dans l’émission Cabaret du Soir, où la présentatrice la compare à Yvette Guilbert et lui assure « qu’elle deviendra certainement une grande vedette ».
À cette époque, elle commence à écrire. Remarquée et engagée par Pathé Marconi, elle enregistre sous le label « La Voix de son Maître » son premier disque 45 tours 4 titres avec deux de ses propres chansons : J’ai troqué et J’ai tué l’amour et au printemps 1959, son premier 33 tours, Barbara à L’Écluse.

En décembre 1959, apprenant que son père, qui avait fui sur les routes pour noyer son crime dans le vagabondage et la déchéance, est mourant et la réclame auprès de lui à Nantes, elle se précipite à son chevet.
Malheureusement, elle arrive trop tard pour recueillir son mea culpa et lui accorder son pardon.
À la vue de son corps, à la morgue, ses sentiments oscillent entre fascination, panique, mépris, haine, d'une part, et un immense désespoir d'autre part8. Au lendemain de l’enterrement, elle commence l’écriture de la chanson Nantes, qu’elle terminera quelques heures avant son passage au théâtre des Capucines le 5 novembre 1963 ; ce sera l'une de ses plus grandes chansons.

Barbara interprète en public ses premières compositions en 1959 : "J'ai troqué" ou le célèbre, "Dis quand reviendras-tu".
En 1960, elle sort chez le label Odéon un disque où elle chante Brassens et qui obtient le grand prix du disque et le prix d'interprétation.
De tours de chant en sorties de disques le label Philips publie en 63 un 30 cm avec ses propres compositions "Barbara chante Barbara", elle fait la première partie de Georges Brassens en décembre 64 à Bobino.
Elle est enfin révélée au grand public.

Grand prix du disque

Le 14 mars 1965, son disque "Barbara chante Barbara" est primé par l'Académie Charles-Cros.
A la fin de la cérémonie au Palais d'Orsay, elle déchire son diplôme en quatre pour en remettre les morceaux aux techniciens en signe de gratitude. Bobino, où elle chante en vedette à partir du 15 septembre, est un grand succès.
C'est après ce spectacle qu'elle écrit "Ma plus belle histoire d'amour", déclaration destinée à son public. Elle effectue une tournée européenne en 1967 et enregistre même un disque en allemand qui sera par ailleurs un échec commercial.

Olympia

A la demande de lucien morisse, directeur de la station de radio Europe1, Barbara donne le 22 janvier 1968 un récital unique à l'Olympia retransmis en direct. L'année d'après, elle renoue avec cette salle pour un spectacle où Georges Moustaki vient la rejoindre pour chanter leur célèbre duo "la dame brune". En 1970, l'écrivain Rémo Forlani écrit "Madame", pièce de théâtre dans laquelle Barbara joue le rôle d'une prostituée partie à la recherche d'un amour en Afrique. Elle en compose la musique. Malheureusement, le spectacle est un échec mais donne cependant lieu à un album orchestré par Jean-Claude Vannier. La même année, sort un autre album, "L'Aigle Noir", succès de l'été.

Début au cinéma

Rencontré au début des années 50, jacques brel lui demande de venir tourner le film "Franz" avec lui. En 1971 donc, elle écrit le thème du film, "Eglantine". Elle enregistre aussi un nouvel album intitulé "La Fleur de l'amour".
En 1972, la chanteuse débutante Catherine Lara écrit deux titres pour Barbara. Puis l'année suivante, c'est William Sheller qui orchestre l'album "La Louve" sur des textes de François Wertheimer.
Le titre "Marienbad", dont la partition est écrite par Sheller, est un immense succès, repris par toutes les radios françaises. Elle quitte aussi Paris et va désormais habiter à la campagne, à Précy Seine et Marne.

Rentrée parisienne

Elle fait sa rentrée parisienne au Théâtre des Variétés à Paris au début de 1974. Puis elle tourne en Europe et en Israël. Elle continue de mener une vie itinérante jusqu'en 1977. L'année suivante, François Reichenbach réalise un film sur le spectacle qu'elle présente pendant un mois à l'Olympia en février.
Son nouveau disque, "Seule", sort en février 1981. Puis le 28 octobre, c'est la "générale" du célèbre récital de Pantin (en banlieue parisienne). C'est un triomphe. Des barrières sont installées devant la scène pour empêcher les spectateurs de l'envahir.

Récompense du ministère de la culture

Le 22 décembre 1982, elle reçoit du Ministre de la culture français, Jack Lang, le Grand Prix National de la Chanson Française. Cette année-là, elle commence à préparer un spectacle étonnant, "Lily Passion" avec le comédien Gérard Depardieu, qu'elle avait rencontré dès 79.
C'est en fait quatre ans plus tard que le "Drame cruel et tendre" comme le nomme la brochure de présentation est crée au Zénith de Paris. Le 8 juillet, elle est invitée par le grand danseur Mikhail Baryshnikov, à venir chanter au Metropolitan Opera de New York alors qu'il improvise une chorégraphie sur des chansons comme "Pierre" ou la "Cantate".

La dame en noir

La "Dame en noir", comme on la nomme dorénavant, revient au Châtelet en 1987, où elle crée la chanson "Sid'amour à mort", témoignage de sa préoccupation pour les problèmes de son temps et en particulier pour le sida. Elle reprend ensuite une tournée au Japon et au Canada.
Elle rencontre aussi l'homme politique Jacques Attali qui lui écrit une chanson "Coline", sur une musique de Franz Schubert. En 1990, reconnue comme une des plus grandes voix de la chanson française au style de chant à la fois maniéré et dramatique, mais aussi comme auteur-compositeur exceptionnel, elle commence une série de concerts à Mogador à Paris.
En 1993, après un passage à vide dû à des problèmes de santé, elle reprend le chemin de la scène au Châtelet, mais doit abandonner le spectacle après quelques jours, sa respiration étant trop difficile. Ce récital fait cependant l'objet d'un disque dans lequel tout l'amour qu'elle porte à son public, et inversement, transparaît.

Avec D.Lokwood et R.Galliano

C'est en 1996 que Barbara retourne en studio pour un dernier album, "Barbara 96". Elle convie de grands musiciens comme le violoniste Didier Lockwood ou l'accordéoniste richard galliano, l'organiste Eddy Louis ou le chanteur, Jean-louis Aubert. Pour les textes, Barbara s'entoure d'auteurs confirmés tels Frédéric Botton et Luc Plamondon, mais interprète aussi un texte écrit par le jeune comédien Guillaume Depardieu, "A Force de". En dépit d'un accueil public et critique toujours excellent, la chanteuse ne retrouve pas la scène en raison des problèmes respiratoires qui ne lui permettent plus cet effort.

Retraite

Réfugiée dans sa maison de Précy-sur-Marne, Barbara commence alors à écrire ses mémoires. En dépit d'une immense discrétion, elle reste très au courant de la vie du monde et s'investit dans de nombreuses causes. Jusqu'au bout, elle soutient ardemment l'action de l'association de lutte contre le sida, Act-Up, à qui elle cède, en 96, la totalité des droits de la chanson "Le Couloir".
Elle se consacre également au sort des détenus dans les prisons qu'elle visite régulièrement et ouvre même une ligne téléphonique confidentielle pour répondre aux personnes en détresse de jour comme de nuit.
Mais, sa générosité se vérifie au sein même de son village puisqu'elle participe souvent à la vie de Précy, et n'hésite pas à cuisiner pour les enfants ou à offrir nombre cadeaux pour les arbres de Noël.

La fin

Interrompue par une infection respiratoire foudroyante le 24 novembre 1997 elle est hospitalisée à l’hôpital américain de Neuilly à l’âge de 67 ans, le dimanche 24 novembre 97, elle meurt le 25 suite aux problèmes respiratoires qui l'handicapaient depuis des années.
Elle est enterrée trois jours plus tard en présence d’une foule de deux mille personnes, essentiellement des anonymes qui se pressent à ses obsèques,dans le carré juif du cimetière de Bagneux, au sud de Paris.
Son décès est ressenti comme un choc par son public qui du jour au lendemain se sent orphelin.

Le 30 janvier 2000, ses biens sont vendus aux enchères, ainsi que la maison de Précy. Puis, en juin, sont mis en vente de nombreux souvenirs dont son célèbre fauteuil à bascule ou ses vêtements de scène.
Cette vente provoque un vif émoi parmi ses admirateurs et amis qui voulaient lutter contre la dispersion en créant un musée. Ils ont d'ailleurs réussi à racheter certains de ces objets grâce à des dons.

Femme à la voix fragile, toujours à la limite de la rupture, Barbara a exercé son art avec une générosité totale.
Par la poésie, la sienne ou celle de nombreux auteurs, chanteurs ou écrivains, elle a conversé toute sa vie avec un public amoureusement fidèle. Accompagnée de son piano, de son rocking-chair et de son châle noir, Barbara demeure une artiste intense et troublante.

Mémoires inachevées

En septembre 98 sort aux éditions Fayard à Paris, le livre de ses mémoires, intitulé "Il était un piano noir.".
Ce travail inachevé qu'elle avait entrepris un an avant sa mort révèle un secret douloureux, celui de l'inceste commis par un père qui finit par abandonner sa famille et mourir seul à Nantes.
Elle y raconte aussi son désir quasi obsessionnel de chanter, son attachement aux pianos noirs et ses errances de jeunesse.
Ce témoignage éclaire un peu la personnalité mystérieuse de la chanteuse et nous donne quelques clés pour mieux comprendre son ouvre.

« J’ai de plus en plus peur de mon père. Il le sent. Il le sait.
J’ai tellement besoin de ma mère, mais comment faire pour lui parler ?
Et que lui dire ?
Que je trouve le comportement de mon père bizarre ?
Je me tais.
Un soir, à Tarbes,
mon univers bascule dans l’horreur.
J’ai dix ans et demi.
Les enfants se taisent parce qu’on refuse de les croire.
Parce qu’on les soupçonne d’affabuler.
Parce qu’ils ont honte et qu’ils se sentent coupables.
Parce qu’ils ont peur.
Parce qu’ils croient qu’ils sont les seuls au monde avec leur terrible secret.
De ces humiliations infligées à l’enfance,
de ces hautes turbulences,
de ces descentes au fond du fond,
j’ai toujours resurgi. Sûr,
il m’a fallu un sacré goût de vivre,
une sacrée envie d’être heureuse,
une sacrée volonté d’atteindre le plaisir dans les bras d’un homme,
pour me sentir un jour purifiée de tout,
longtemps après. »

Succès

Nombre de ses chansons sont devenues des classiques de la chanson française, notamment :
Dis, quand reviendras-tu ?,
Nantes,
Au bois de Saint-Amand,
Göttingen,
La solitude,
Une petite cantate,
La Dame brune,
L'Aigle noir,
Marienbad,
Ma plus belle histoire d’amour,
Pierre,
Le mal de vivre,
Vienne,
Drouot,
Si la photo est bonne…


Ses musiciens

Elle a toujours choisi avec soin ses partenaires musicaux, souvent issus du jazz et ce, dès les années 1960.
Un de ses premiers accordéonistes fut Joss Baselli. Par son jeu discret, il a su donner aux musiques de Barbara une ambiance caractéristique.
Bien des années plus tard, Barbara confiera que le jeu de Joss lui a énormément apporté. Elle lui en sera toujours reconnaissante.
On peut citer également Eddy Louiss, Maurice Vander, et plus récemment Michel Portal, puis Richard Galliano, Didier Lockwood, mais aussi des musiciens-chanteurs de talent comme Catherine Lara, qui composa les musiques des chansons Accident et Clair de nuit sur l’album Amours incestueuses en 1972, ou encore William Sheller, qui se chargea des orchestrations de l’album La Louve, l’année suivante. Barbara fut d’ailleurs celle qui suggéra à ce dernier de faire de la scène.
Une de ses plus marquantes et durables collaborations fut celle de l’accordéoniste Roland Romanelli qui fut rejoint, pour le Récital Pantin 1981, par le pianiste Gérard Daguerre, qui l’accompagnera jusqu’à la fin.
La collaboration avec Roland Romanelli s’achève au moment de la création de Lily Passion avec Gérard Depardieu, et Gérard Daguerre devient alors le musicien de prédilection de Barbara.
À l’occasion de son spectacle au Châtelet 1987, Barbara s’est entourée de trois nouveaux musiciens :
Marcel Azzola, qui fut l’accordéoniste de Jacques Brel le célèbre « Chauffe Marcel ! » de Vesoul,
Michel Gaudry, contrebassiste de jazz ayant collaboré avec Barbara des années auparavant, et un petit nouveau,
Jean-Louis Hennequin appelé familièrement P’tit Louis par Barbara qui sera désormais chargé, aux claviers, de la création sonore de ces univers si particuliers que Barbara affectionnait depuis toujours.
Les années 1990 - 1991 voient le percussionniste Mahut, le pianiste Marc Lerchs et l’accordéoniste Sergio Tomassi rejoindre le petit groupe des musiciens d’élite ayant la chance de partager la scène avec Barbara, tandis que Jean-Louis Hennequin s’éloigne pour un temps.
1993 voit la dernière apparition de Barbara sur la scène parisienne au Châtelet, Gérard Daguerre, Mahut, Jean-Louis Hennequin et Sergio Tomassi se trouvent réunis pour ce spectacle et pour la tournée qui suivra.
Lors du dernier enregistrement en studio de Barbara, en 1996, la plupart de ses musiciens de prédilection sont là :
de Eddy Louiss à Jean-Jacques Milteau, en passant par Richard Galliano, Didier Lockwood et, bien sûr, les fidèles Gérard Daguerre, Jean-Louis Hennequin et Mahut.


Vidéographie

2000 : Barbara à Pantin, réalisé en octobre-novembre 1981 par Guy Job, DVD Universal. Diffusé sur TF1, le 5 novembre 1982.
2000 : Au Châtelet, réalisé en septembre-octobre 1987 par Guy Job, DVD Universal.
2004 : Une longue dame brune, double DVD Mercury/Universal.
Contient notamment, le film réalisé par François Reichenbach en 1978, sur les répétitions et le spectacle de l’Olympia 1978 et de la tournée qui suivit. Diffusé sur TF1, le 27 novembre 1979.
2006 : Brel, Barbara, une chorégraphie de Maurice Béjart, DVD éditions Jacques Brel. Réalisé par Serge Hannecart, en avril 2005 au théâtre Métropole de Lausanne.

Filmographie

1971 : Aussi loin que l’amour, réalisé par Frédéric Rossif. Barbara tient le rôle d’une chanteuse de cabaret (elle chante La Solitude). Sortie : 20 octobre 1971.
1972 : Franz, réalisé par Jacques Brel. Barbara joue le rôle de Léonie. Sortie : 4 février 1972.
1973 : L'Oiseau rare, film à sketches réalisé par Jean-Claude Brialy. Barbara est la chanteuse Alexandra Blitz-Balfour dans l’une des cinq histoires.

Prix et distinctions

1960 : Grand Prix du disque de l’Académie Charles-Cros, catégorie : meilleure interprétation pour l’album Barbara chante Brassens.
1965 : Grand Prix international du disque de l’Académie Charles-Cros pour l’album Barbara chante Barbara.
1982 : Grand Prix National de la Chanson pour sa contribution à la culture française. Il lui est remis par le ministre de la culture, Jack Lang le 22 décembre, à l’Opéra de Paris.
1988 : Chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur par le Président de la République François Mitterrand, le 15 septembre.
1988 : citée à l’Ordre du Mérite fédéral allemand, au nom de l’amitié entre les peuples, pour la chanson Göttingen.
1988 : Médaille d’honneur de la ville de Göttingen.
1994 : Victoire de la musique, catégorie : Artiste interprète féminine de l’année pour l’album Châtelet 93.
1997 : Victoire de la musique, catégorie : Artiste interprète féminine de l’année pour l’album Barbara.


http://youtu.be/ePmCoEvU3xM Attendez que ma joie revienne
http://youtu.be/7m7eK8-h5j0 La longue dame brune
http://youtu.be/nUE80DTNxK4 Dis quand reviendras -tu ?
http://youtu.be/h1ET9la1JuM Ma plus histoire d'amour




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Cole Porter
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Le 9 Juin 1891 naît COLE PORTER


Compositeur et parolier américain, auteur de quelques-unes des plus célèbres comédies musicales de la scène américaine créées à Broadway.


La légende et la réalité veulent lui décerner les mérites d’une enfance heureuse, voire d’une carrière qui a pu se développer sans les impératifs du besoin matériel immédiat. De fait, Cole Porter restera l’un des mélodistes les plus avertis. Cole Porter a appartenu d’une manière plus ou moins consciente à la vie américaine. Ce sont là ses limites mais aussi la preuve de son adaptation à un milieu précis dont il a su mettre en exergue le meilleur mais aussi le pire. Pas véritablement homme de spectacle, Cole porter aura quand même su contribuer avec inspiration au domaine de la sophistication abstraite qu’est la comédie musicale.
Le mélodiste de Broadway
Cole Porter est un des premiers grands auteurs-compositeurs de comédies musicales. Du Broadway des années 1930 aux grands films hollywoodiens des années 1950, il a su imposer son style fondé sur le swing et le jazz et inspirer les plus grands artistes.

On lui doit Kiss Me, Kate en 1948, adaptée de La Mégère apprivoisée de William Shakespeare, Anything Goes, Can-Can… ; ainsi que de très nombreuses chansons : Night and Day, I Get a Kick Out of You, You're The Top, I've Got You Under My Skin, I Love Paris, C'est Magnifique… Il connut le succès grâce à ses textes subtils et spirituels, jouant souvent sur les sous-entendus, et à sa musique aux formes et aux rythmes complexes. Beaucoup de ses créations comptent parmi les plus célèbres du Grand répertoire américain de la chanson et les grands standards du jazz.
Cole Porter est l'un des rares compositeurs américains qui ait écrit à la fois la musique et les paroles de ses chansons.


Biographie

Cole Porter est né le 9 juin 1891 à Peru, dans l'Indiana, de l'union de Kate Cole et Sam Porter.
Sam, son père, était un simple pharmacien, mais Kate était la fille d'un des hommes les plus riches de l'État, James Omar Cole.
Ce dernier continua à lui verser une rente substantielle après le mariage, pour lui permettre de maintenir son train de vie.
Cole en bénéficia très tôt et garda toute sa vie le goût du luxe et des belles choses.
Cole commença à étudier le piano à six ans. Il étudia aussi le violon, mais abandonna parce qu'il préférait le son du piano.
Il composa à dix ans sa première chanson, intitulée "Song of the Birds" et dédiée à sa mère.
Kate soutint d'emblée la vocation de son fils, dont elle fit éditer les premières compositions et finança les projets musicaux, en échange des récitals qu'il lui donnait.



Etudes

Cole fit ses études secondaires à la Worcester Academy du Massachusetts et sortit major de sa promotion.
Il poursuivit sa formation au Yale College où sa carrière de compositeur commença à prendre son essor.
Son grand-père aurait aimé lui voir embrasser une carrière d'avocat, ce qui conduisit le jeune homme à entrer à la Worcester Academy, puis à passer par l'université Yale en 1909 où il devint membre de la célèbre société secrète Scroll and Key
Il poursuivit sa formation au Yale College où sa carrière de compositeur commença à prendre son essor.
À sa sortie de Yale, Cole s'inscrivit à la Faculté de Droit de Harvard, essentiellement pour faire plaisir à son grand-père, mais avec la claire intention de se consacrer tout entier à sa musique
Puis il passa une année à la Faculté de droit de Harvard en 1913.

Premières créations

Après avoir pris conscience de sa passion pour la musique, il abandonna l'étude du droit et étudia au département de musique.
Durant cette période, il composa en effet six grands spectacles et plus de 300 chansons pour diverses fraternités et organisations estudiantines. Nombre d'entre sont encore au répertoire de l'université.
Il ne tarda d'ailleurs pas à quitter Harvard pour s'installer à New York.
Son humour joyeuse et sa personnalité attachante en firent bientôt la coqueluche de Manhattan.

L'échec

En 1916, il présenta à Broadway sa première œuvre publique, See America First, sur un livret de T. Lawrason Riggs, qui fut un échec, les représentations cessant au bout de deux semaines seulement.
L’auteur-compositeur est fortement marqué par le sort subi par cet “opéra comique patriotique” ce qui décida Cole à gagner Paris en 1917, en pleine guerre.


Paris

Épris de nouvelles aventures, il s'engagea alors dans la Légion Française, épisode dont la presse américaine fit ses choux gras, prêtant à Cole maints exploits fantaisistes.
Il s'engage le 20 avril 1918, pour la durée de la guerre, dans la Légion étrangère française et sert en Afrique du Nord (matricules 18/12651 et 18/47647).
Il est affecté au régiment de marche de la Légion étrangère, puis envoyé à l’école d’artillerie, dont il sort aspirant à compter du 22 août 1918.
En subsistance au 15e RAC puis au 32e RA, il est ensuite affecté au bureau de l'attaché militaire des États-Unis.
Libéré le 17 avril 1919, il est titulaire de la croix de guerre 1914-1918.
Il s'installe dans un appartement de luxe à Paris et partage son temps entre ses fonctions d'officier et une vie de playboy dans la capitale française.

Mariage

En 1918, il y fait la connaissance de Linda Lee Thomas, une riche divorcée de Louisville dans le Kentucky, fortunée, jouissant déjà d'un brillant statut social, et de sept ans son ainée, qu'il épouse en 1919.
Certains chroniqueurs de l'époque la décrivent comme « la plus belle femme au monde ».
En 1923, Rolf de Maré lui commande une œuvre pour les Ballets suédois : il compose Within the Quota, premier « ballet jazz » de l'histoire de la musiqu
Ils devinrent de proches amis et se marièrent le 19 décembre 1919. Il s’agit en fait d’un mariage d’amitié, l’homosexualité de Cole étant assez rapidement connu publiquement.
Cette union doubla leurs ressources et fut tout aussi bénéfique à leur réputation mondaine.
Fort du soutien et des conseils avisés de Linda, Cole vit enfin sa carrière décoller.
Après des années de labeur, il connut son premier triomphe en 1928 avec la chanson "Let's Do It, Let's Fall in Love", de la comédie musicale "Paris".
Les succès s'enchaînèrent dès lors, confortant sa position et l'installant durablement au panthéon des plus grands compositeurs américains, aux côtés d'Irving Berlin, George Gershwin et Jerome Kern.


Succès à Broadway

Après la guerre, Porter connaît son premier succès à Broadway avec la revue Hitchy-Koo of 1919, dont certaines chansons ont été composées en France. En 1932, Cole Porter crée Gay Divorce, avec Fred Astaire dans le rôle principal. La future vedette hollywoodienne y interprète un titre qui reste un des grands standards de Porter, "Night and Day".
En 1934, une des plus grandes comédies musicales de Cole Porter voit le jour. Anything Goes (1934), qui se déroule sur un bateau de croisière, est interprété notamment par Ethel Merman, l’interprète-fétiche de Porter présente dans plusieurs de ses œuvres. Ethel Merman interprète par exemple le rôle de la chanteuse Hattie dans Panama Hattie, qui remporte un vif succès en 1940.
Kiss Me Kate, certainement le spectacle de référence de Porter, est monté à Broadway en 1948. Cette comédie musicale mêle la vie sentimentale d’acteurs interprétant La Mégère Apprivoisée de Shakespeare et celle de leurs personnages sur scène. Le jazz, l’opérette et les rythmes latins y sont mis en valeur. Can-Can (1953), qui évoque la vie d’une troupe pratiquant clandestinement cette fameuse danse, et Silk Stockings (1954), inspiré du film Ninotchka, seront ses derniers grands succès sur scène.


Accident de cheval

En 1937, Cole se fractura les deux jambes lors d'une chute de cheval.
Il en gardera toute sa vie des douleurs aiguës, et souvent intolérables;
Les médecins suggérèrent alors une amputation, mais Linda s'y opposa fermement, jugeant que l'esprit de Cole en serait brisé.
Les séquelles psychologiques n'en furent pas moins dévastatrices, et la dépression subséquente profonde et durable.
Poussé par Linda, Cole continua cependant d'écrire. Il connut son dernier et plus grand triomphe à Broadway avec "Kiss Me, Kate".
Le spectacle, considéré d'emblée comme un classique, remporta le premier Tony de la Meilleure Comédie Musicale.
Linda Porter mourut des suites d'un emphysème, le 20 mai 1954. Cole en fut bouleversé. Privé du soutien et de la vigilante présence de sa compagne, il accepta en 1958 de se faire amputer de la jambe droite. Son esprit en fut brisé, ainsi qu'elle l'avait prédit, et il n'écrivit plus une seule chanson.
Cole est décédé le 15 octobre 1964. Il repose entre sa femme et son père.
En 2004, le film De-Lovely de Irwin Winkler lui rend hommage. Kevin Kline tient le rôle du grand compositeur.

Hollywood, Hollywood

Cole Porter ne s’est pas limité au théâtre musical et il a également participé à des films musicaux. Plusieurs de ces films sont des adaptations d’Ïuvres créées par ce musicien à Broadway comme Anything Goes, 1936 et 1956, Panama Hattie en 1942, DuBarry Was a Lady en 1943, Kiss Me Kate en 1953, Silk Stockings La Belle de Moscou, en 1957 et Can-Can en 1960.
Porter a aussi créé des compositions originales pour des films comme Broadway Melody of 1940, You’ll Never Get Rich, L’amour vint en dansant en 1941, High Society en 1956, Les Girls en 1957 et The Pirate en1958. Fred Astaire, Gene Kelly, Eleanore Powell, Cyd Charisse, Judy Garland, Bing Crosby, Frank Sinatra font partie des grands acteurs ayant interprété Cole Porter au cinéma.
On notera que High Society a connu un parcours inverse à celui d’autres œuvres de Porter. Réalisé en 1956 par Charles Walters, le film est adapté sur scène à Broadway en 1998, presque trente-cinq ans après la mort de Cole Porter avec des chansons extraites d’autres œuvres ont été intégrées à ce spectacle.
Cole Porter a lui-même fait l’objet d’un film musical, Night and Day en 1946, réalisé par Michael Curtiz. Le film reprend les plus grands succès de l’auteur-compositeur dont la vie est transposée à l’écran. Mais si Cole Porter, incarné par Cary Grant, a donné son accord, cette biographie est loin d’être fidèle à la réalité.
Le film Just One of Those Things pourrait prochainement rétablir la vérité.
Kevin Kline interprète le rôle de Cole Porter dans cette nouvelle biographie musicale.
Ashley Judd incarne Linda Lee Porter. Des chanteurs comme Sheryl Crow, Robbie Williams et Alanis Morissette sont également de la partie.

Vie sentimentale

Cole Porter était bisexuel, situation qui était apparemment connue de son épouse dès les premiers temps de leur mariage ; on lui connaît plusieurs aventures avec des femmes, et surtout une relation avec Leslie Hutchinson, qui compta parmi ses amants et fut l'un de ses amoureux régulliers.
Cole et son épouse se séparèrent au début des années 1930, alors qu'ils vivaient à Hollywood, lorsque Porter se mit à ne plus cacher publiquement ses attirances homosexuelles.
Cole Porter avait eu une liaison en 1925 avec le collaborateur des Ballets russes Boris Kochno, puis vécut longtemps avec Howard Sturges, tout en ayant d'autres relations avec l'architecte Ed Tauch, le chorégraphe Nelson Barclift qui inspira Night and Day, le réalisateur John Wilson qui devait plus tard épouser la « reine de beauté » Nathalie Paley, et pour finir avec Ray Kelly, dont les enfants devinrent bénéficiaires de la moitié des droits d'auteur de Porter, qui n'avait pas de descendance.

Un style toujours vivant

Le revival de Kiss me Kate à Londres Les dernières années de la vie de Cole Porter sont difficiles.
Très tôt, les mélodies de Cole Porter ont été reprises par les crooners, les chanteurs et les musiciens de jazz.
Son style, qui peut tantôt swinguer tantôt être langoureux avec des paroles parfois suggestives, ne pouvait que séduire ces artistes.
Des titres extraits de comédies musicales parfois méconnues sont donc devenus des classiques repris dans certains concerts ou dans des compilations éditées en hommage à Cole Porter.
Frank Sinatra, Ella Fitzgerald, Louis Armstrong et Charlie Parker font partie de la longue liste d’interprètes connus de ce grand compositeur. Des albums de reprises sont encore régulièrement édités.
Les récents retours réussis de Kiss Me Kate à Broadway et à Londres et de Anything Goes à Londres confirment que le cocktail de la comédie musicale et du jazz réussi par Cole Porter reste toujours aussi savoureux.


Cole Porter fut inhumé au cimetière de Mount Hope, dans sa ville natale de Peru danas l'Indiana.


Ses créations

Comédies musicales, comme compositeur et lyriciste, sauf mention contraire

1915 : Hands Up, musique de Sigmund Romberg et E. Ray Goetz, lyrics de E. R. Goetz, livret d'Edgar Smith, avec Will Rogers (musique et lyrics additionnels)
1915 : Miss Information, pièce de Paul Dickey et Charles W. Goddard, + musique de Jerome Kern et lyrics d'Elsie Jannis, avec Marion Davies (musique et lyrics additionnels)
1916 : See America First, livret de T. Lawrason Riggs, avec Clifton Webb
1919 : Hitchy-Koo (1919), revue, livret de George V. Hobart
1920 : As you were, revue, musique de Herman Darewski, lyrics et livret de Arthur Wimperis, avec Clifton Webb (musique et lyrics additionnels)
1924 : The Greenwich Village Follies (1924), revue, lyrics conjointement avec John Murray Anderson et Irving Caesar
1928-1929 : Paris, lyrics conjointement avec E. Ray Goetz, livret de Martin Brown, avec Louise Closser Hale
1929-1930 : Fifty Million Frenchmen, livret de Herbert Fields, avec Genevieve Tobin (adaptée au cinéma en 1931)
1929-1930 : Wake Up and Dream, revue, livret de J.H. Turner, chorégraphie de Jack Buchanan, Max Rivers et Tilly Losch, avec J. Buchanan, T. Losch
1930-1931 : The New Yorkers, revue, livret de Herbert Fields, avec Jimmy Durante
1932-1933 : Gay Divorce, livret de Dwight Taylor, orchestrations de Hans Spialek et Robert Russell Bennett, mise en scène de Howard Lindsay, avec Fred Astaire, Eric Blore, Erik Rhodes (adaptée au cinéma en 1934)
1934-1935 : Anything Goes, livret de Guy Bolton et Pelham Grenville Wodehouse, révisé par Howard Lindsay et Russel Crouse, arrangements musicaux de Hans Spialek et Robert Russell Bennett, mise en scène de H. Lindsay, avec Ethel Merman, Victor Moore (adaptée au cinéma en 1936)
1935-1936 : Jubilee, livret de Moss Hart, orchestrations de Robert Russell Bennett, costumes d'Irene Sharaff et Connie De Pinna, avec Mary Boland, Montgomery Clift, Melville Cooper, Charles Walters
1936-1937 : Red, Hot and Blues, livret de Howard Lindsay et Russel Crouse, arrangements musicaux de Robert Russell Bennett, mise en scène de H. Lindsay, avec Jimmy Durante, Ethel Merman, Bob Hope
1938 : You never know, livret de Rowland Leigh, costumes notamment de Charles Le Maire, avec Charles Kemper, Lupe Vélez, Clifton Webb
1938-1939 : Leave it to me !, livret de Samuel et Bella Spewack, avec Mary Martin, Victor Moore, Gene Kelly
1939-1940 : Du Barry was a Lady, livret de Herbert Fields et B.G. DeSylva, avec Bert Lahr, Ethel Merman, Betty Grable, Charles Walters
1940-1942 : Panama Hattie, livret de Herbert Fields et B.G. DeSylva, avec Ethel Merman, Betty Hutton, June Allyson, Betsy Blair, Lucille Bremer, Vera-Ellen, Hal Conklin, James Dunn, Arthur Treacher
1941-1943 : Let's Face it !, livret de Herbert et Dorothy Fields, chorégraphie de Charles Walters, avec Danny Kaye, Eve Arden, Nanette Fabray
1943-1944 : Something for the Boys, livret de Herbert et Dorothy Fields, production de Michael Todd, avec Ethel Merman
1944-1945 : Mexican Hayride, livret de Herbert et Dorothy Fields, production de Michael Todd, avec June Havoc
1944-1945 : Seven Lively Hearts, revue, livret de George S. Kaufman et Ben Hecht, musique de ballet additionnelle d'Igor Stravinski, direction musicale Maurice Abravanel, avec Benny Goodman, Bert Lahr
1946 : Around the World, livret adapté par Orson Welles, d'après Le Tour du monde en quatre-vingts jours de Jules Verne, mise en scène d'O. Welles, avec Jack Cassidy, O. Welles
1948-1951 : Kiss Me, Kate, livret de Samuel et Bella Spewack, d'après La Mégère apprivoisée (The Taming of the Shrew) de William Shakespeare, orchestrations de Robert Russell Bennett, avec Alfred Drake, Patricia Morison (adaptée au cinéma en 1953)
1953-1955 : Can-Can, livret et mise en scène d'Abe Burrows, chorégraphie de Michael Kidd, avec Hans Conried, Erik Rhodes
1955-1956 : Silk Stockings, livret de George S. Kaufman, Leueen MacGrath et Abe Burrows, d'après Ninotchka de Melchior Lengyel, avec Don Ameche, George Tobias (adaptée au cinéma en 1957

Musiques de films

Contributions originales uniquement
1937 : Rosalie de W.S. Van Dyke
1956 : High Society, de Charles Walters

Hommages

En 1990, parut Red Hot and Blue, un album CD en hommage à Cole Porter dont les bénéfices allèrent à la recherche sur le sida. Les principaux succès de Cole Porter y étaient repris par des stars pop/rock, tels U2, David Byrne, Annie Lennox, Iggy Pop, Sinead O'Connor, Les négresses vertes, Neneh Cherry, Salif Keïta ainsi qu'Erasure.
Sa vie a inspiré à Michael Curtiz le film Nuit et jour (Night and Day), sorti en 1946, avec Cary Grant et Alexis Smith dans les rôles principaux, film qui passe totalement sous silence l'homosexualité de Porter.
Cinquante-huit ans plus tard, Irwin Winkler, sur la base d'un scénario de Jay Cocks, s'est à son tour penché sur la vie de Porter pour en tirer le film De-Lovely. Sorti en 2004, ce film prête le rôle-titre à Kevin Kline et celui de Linda Porter à Ashley Judd.
Irving Berlin qualifiait Night and Day de « cette longue, si longue chanson ».
En 2008,sa musique Anything Goes apparait dans le jeu Fallout 3 de Bethesda. Ce jeu rend hommage aux plus grands chanteurs des années 1930 - 1940.
Cole Porter apparait, sous les traits d'Yves Heck, dans le film de Woody Allen "Midnight in Paris" présenté hors compétition en ouverture du festival de Cannes 2011.


Musique
http://www.youtube.com/watch?v=Bn6EbV ... e&list=PL335B1C30D87AF585 30 Chanson de Cole Porter
http://youtu.be/q1iraQlG-Ck Anything goes
http://youtu.be/csyhMKOZHlE Thank you for the music
http://youtu.be/kr6p2TL9Fgs Je suis un gigolo
http://www.youtube.com/watch?v=FhIqnJ ... e&list=PL92AA986A2231743D 11 Musiques




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Posté le : 09/06/2013 12:10
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Léo Lagrange
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Le 9 Juin 1940 meurt Léo Lagrange

Léo Lagrange est né le 28 novembre 1900, à Bourg-sur-Gironde, d’un père comptable, mort à Évergnicourt le 9 juin 1940, est un socialiste français, sous-secrétaire d'État aux sports et à l'organisation des loisirs sous le Front populaire.
Membre des Éclaireurs de France dans sa jeunesse, Enfant, il est membre des Eclaireurs de France, mouvement de scoutisme laïque.
Elève au lycée Henri IV, il s’engage dans l’armée à la fin de ses études, en août 1917.
A son retour, il s’inscrit en faculté de droit et à l’institut de Sciences Politiques. La fréquentation des cercles russes révolutionnaires l’amène progressivement à s’intéresser aux thèses socialistes. Il soutient aussi la tenue des Olympiades populaires à Barcelone, organisées en contrepoint aux Jeux olympiques de Berlin instrumentalisés par le nazisme.
Au lendemain du Congrès de Tours, en 1920, il adhère à la SFIO et rejoint le groupe des étudiants socialistes.
Devenu avocat, il s’inscrit en 1922 au barreau de Paris.
Profondément touché par la guerre, c’est en priorité aux soldats gazés, aux malades des poumons et aux tuberculeux que Léo Lagrange réserve ses services lorsqu’il ouvre son cabinet, dès 1923.
En 1925, il épouse Madeleine Veiller.
L’année suivante, il rencontre André Malraux et Jean Prévost avec lesquels il se lie d’amitié. Il se mêle au bouillonnement culturel des annéesn 30 et devient rédacteur au journal de la SFIO, « Le Populaire » dans lequel il relate l’actualité judiciaire.
Battu en 1928 aux législatives dans le XIème arrondissement de Paris, il est désigné par Paul Faure en 1932 pour reconquérir la 1ère circonscription d’Avesnes-sur-Helpe, dans le Nord. Elle est détenue depuis 1928 par Louis Loucheur, homme d’affaires puissant, six fois ministre et originaire du département.
Au fil des réunions, des rencontres et des débats qui se succèdent, Léo Lagrange défend les idées socialistes.
Il est élu député le 8 mai 1932.
C’est au cours des débats sur l’affaire Stavisky, en 1934, qu’il se fait mieux connaître des parlementaires et du grand public. Il dénonce à la fois les complaisances administratives et judiciaires vis-à-vis de Stavisky et les compromissions du monde des affaires.
Les élections de 1936 marquent la victoire du Front Populaire. Léon Blum confie à Léo Lagrange le tout nouveau Sous-secrétariat d’Etat aux sports et à l’organisation des loisirs.
Aidé par sa femme Madeleine, qui devient sa collaboratrice au ministère, il entend bien faire porter son effort vers " la masse
", en multipliant le nombre de stades, en formant les entraîneurs, en rendant le sport et les loisirs culturels accessible à tous.
Ces initiatives conduiront à la création du Brevet Sportif Populaire.
En 1937, la création de l’Ecole Nationale du Ski Français stimulera quant à elle l’essor d’un sport nouveau.
En matière d’actions culturelles, il créé les Mardis populaires du Louvre, qui permettent aux ouvriers d’aller au musée et devient le co-créateur, avec Jean Zay, du Festival du cinéma de Cannes.
Sa mission ne s’adresse pas exclusivement à la jeunesse, mais à toute la société.
Il s’appuie néanmoins sur les jeunes, sans chercher à les embrigader, car ils constituent le futur d’une société plus juste. C’est pourquoi, il encourage notamment toutes les organisations d’Auberges de Jeunesse, qui voient le nombre d’auberges passer de 250 à 400 entre juin et décembre 1936.
Parallèlement à l’institution des congés payés, il veut permettre au plus grand nombre de travailleurs de profiter des joies de la mer, de la montagne, de la campagne et d’accéder aux activités culturelles et sportives.
Il s’agit d’abord d’abaisser le coût des transports : Léo Lagrange obtient donc 40 % de réduction sur les billets ferroviaires pour les salariés et leurs familles, puis annonce la création du " Billet populaire de congé annuel ", dont bénéficient 600 000 personnes dès l’été 1936.
Ses efforts portent également sur l’hébergement : le ministère encourage le camping et Léo Lagrange négocie des tarifs spéciaux avec les hôteliers sur les prix des pensions.
Il lance également les croisières populaires entre Marseille et l’Algérie.
En 1936, Léo Lagrange s'occupe aussi des Olympiades populaires, Jeux olympiques alternatifs qui devaient se substituer aux Jeux olympiques de Berlin. Prévues à Barcelone, les épreuves officielles qualificatives pour ces Olympiades populaires se déroulent le 4 juillet 1936 au stade Pershing à Paris. Léo Lagrange préside en personne ces journées.
À travers leur club, la FSGT, ou individuellement, 1 200 athlètes français s'inscrivent à ces olympiades antifascistes. Pourtant, le 9 juillet, toute la droite vote « pour » la participation de la France aux Jeux olympiques de Berlin, tandis que l'ensemble de la gauche (PCF compris) s'abstient — à l'exception notable de Pierre Mendès France.
Malgré tout, plusieurs sportifs français se rendent à Barcelone, où les Olympiades sont interrompues le 18 juillet par le pronunciamiento militaire du Général Franco.
Les accords de Munich, en septembre 1938, modifient la position de Léo Lagrange face aux orientations de la S.F.I.O : devant le pacifisme de Paul Faure, secrétaire général du parti, il affirme la nécessité de « porter au maximum la force matérielle du pays ».

Sa mission s'adresse donc à toute la société et non pas exclusivement à la jeunesse :
« … il ne peut s'agir dans un pays démocratique de caporaliser les distractions et les plaisirs des masses populaires et de transformer la joie habilement distribuée en moyen de ne pas penser. »

Le 3 septembre 1939, il écrit dans l’Avenir : « Si Hitler a choisi la guerre, si de sa main, il veut mettre le feu au bûcher sur lequel flambera notre civilisation, il faut qu’il sache que nous défendrons notre pays sans forfanterie, mais sans faiblesse, et que nous irons jusqu’au terme le plus dur de notre devoir. La France veut être libre ».
A la déclaration de guerre, Léo Lagrange a 39 ans.
Ancien combattant de la Grande guerre et parlementaire, il n’est pas mobilisable.
A Daladier qui veut lui confier un commissariat général à la préparation militaire, il répond : " Le pouvoir appartiendra à ceux qui seront battus et qui en sortiront vivants ".
A sa sortie du peloton d’EOR de Poitiers, le sous lieutenant Lagrange est affecté, sur sa demande, au 61ème régiment d’artillerie de Metz.
Le 9 juin 1940, il se charge d’une mission dangereuse sur le front, près d’Evergnicourt, occupé par les Allemands.
Il est tué d'un éclat d'obus, lors de l’offensive de l’Aisne.

« Il est mort dans le courage, dans la recherche de la vérité et dans la dignité. C’était un homme que nous aimions ».

André Malraux.




Citations d'autres discours de Léo Lagrange :

« Dans le sport, nous devons choisir entre deux conceptions :
- la première se résume dans le sport spectacle et la pratique restreinte à un nombre relativement petit de privilégiés,
- selon la seconde conception, tout en ne négligeant pas le côté spectacle et la création du champion, c’est du côté des grandes masses qu’il faut porter le plus grand effort.
Nous voulons que l’ouvrier, le paysan et le chômeur trouvent dans le loisir la joie de vivre et le sens de leur dignité ».

Léo Lagrange, discours du 10 juin 1936.

« Notre but simple et humain, est de permettre aux masses de la jeunesse française de trouver dans la pratique des sports, la joie et la santé et de construire une organisation des loisirs telle que les travailleurs puissent trouver une détente et une récompense à leur dur labeur ».

Léo Lagrange, Sous Secrétaire d'État aux sports et à l'organisation des Loisirs, 1936.

« Notre souci est moins de créer des champions et de conduire sur le stade 22 acteurs devant 40 000 ou 100 000 spectateurs, que d’incliner la jeunesse de notre pays à aller régulièrement sur le stade, sur le terrain de jeux, à la piscine ».
Léo Lagrange, discussion du budget à la chambre des députés, 1937, cité par J.P. Callède, ibid.

« Si nous avons à faire un effort commun dans le domaine sportif, comme dans bien d’autres, c’est un effort de moralité. J’ai écouté avec grand intérêt M. Temple qui a fait apparaître les dangers redoutables du développement du sport professionnel. Hélas ! lorsqu’on accepte qu’un geste humain qui, par nature doit être désintéressé, devienne la source de profits importants, la juste mesure est très difficile à déterminer.
Je crois que le jour où l’on a admis que le jeu sur le stade pouvait être l’occasion de profits importants, on a fortement atteint la moralité du sport.
Aussi, de toutes mes forces et quelles que soient les critiques, parfois sévères, dont mon action pourra être l’objet, je m’opposerai au développement du sport professionnel dans notre pays. Je détiens au Parlement la charge de servir les intérêts de toute la jeunesse française, et non de créer un nouveau spectacle de cirque ».

Léo Lagrange, Sous Secrétaire d'État aux Sports, aux Loisirs et à l’Éducation Physique - ministre des sports -, définit et précise sa politique et celle du Front Populaire, le 3 décembre 1937, à la tribune de la Chambre des Députés.

Hommage posthume

Les premiers clubs Léo Lagrange qui deviendront plus tard la Fédération Léo-Lagrange ont été fondés en 1950 par Pierre Mauroy alors secrétaire des Jeunesses socialistes.
Une station du réseau métropolitain parisien porte son nom sur la ligne 7, dans la commune de Villejuif. Elle se trouve sur la branche sud de la ligne.
Plusieurs stades en France portent son nom, notamment le stade du Ray - Léo Lagrange à Nice mais aussi ceux de Besançon, Cachan, Gueret, Toulon, Lormont....
A Nantes et à Toulouse, une piscine olympique porte son nom.
A Reims, un parc porte son nom.
A Saint-Denis de La Réunion, une rue porte son nom.

Il est enterré à Bourg sur Gironde où le stade porte son nom.


http://youtu.be/w6dU2FInOAQ Ina



La Fédération Léo Lagrange se trouve :
153 avenue Jean Lolive 93695 Pantin.


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Posté le : 09/06/2013 12:03
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Pierre le grand
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Le 9 Juin 1672 naît Piotr Alekseïevitch Romanov, en russe : Пётр Алексеевич Романов, dit Pierre le Grand Piotr Veliki, en russe : Пётр Великий

Pierre Ier Alexeïevitch, surnommé Pierre le Grand, premier empereur de toutes les Russies(La Russie au XVIIIe siècle : L'Empire de Pierre), né au Kremlin de Moscou le 9 juin ou 30 mai pour le calendrier Julien 1672, mort à Saint-Pétersbourg le 8 février (28 juillet) 1725, fils du tsar Alexis Mikhaïlovitch (mort en 1676) et de Nathalie Narychkine. Son père avait laissé deux fils, Féodor et Ivan, et six filles de sa première femme, Maria Miloslavsky, et, outre son fils Pierre, deux filles de sa seconde femme. Féodor lui succéda; mais à sa mort (7 mai 1682), ce fut le plus jeune des deux autres frères, Pierre, âgé de dix ans,qui fut proclamé tsar, Ivan étant faible d'esprit et de corps. Mais il fut soutenu par les parents de sa mère, les Miloslavsky, contre les Narychkine.
L'une des filles de la tsarine Maria Miloslavsky, l'ambitieuse et énergique Sophie, secondée des streltsi, soldats et marchands en même temps, milice permanente et héréditaire, mal disciplinée, fit massacrer les Narychkine le frères de la tsarine, son père adoptif et leurs partisans, et s'imposa comme régente pendant la minorité d'Ivan et de Pierre qui furent tous deux couronnés tsars (23 juillet 1682). C'est l'unique exemple dans l'histoire, russe de deux tsars occupant le trône en même temps. On peut voir au musée de Moscou leur double trône avec une ouverture dans le dossier par laquelle la régente, assise derrière, disait à ses frères sa volonté. Elle comprima de nouvelles émeutes des streltsi qui avaient forcé la cour à s'abriter au couvent de Troïtza, fit périr les princes Khovanski et affermit son pouvoir. Le jeune Pierre, confiné au village de Préobrajenskoé, aux environs de Moscou, était abandonné aux soins du médiocre précepteur Zotov. Son éducation ne progressa que par l'heureuse application de ses caprices.

Curieux de toutes les nouveautés, Pierre retrouva dans la maison de son aïeul, Nikita Romanov, un canot anglais d'une structure particulière, qui fut l'origine de sa passion pour la navigation. Abandonné à lui-même, courant les rues de Moscou, il avait fait connaissance de plusieurs habitants instruits de la Nemestskaïa Slobada (quartier des étrangers); le Genevois Lefort, le vieil Écossais Gordon, le Strasbourgeois Timmerman, les Hollandais Winnius, Brandt,etc., ses initiateurs en civilisation européenne, ses instructeurs en art militaire et de navigation, ses futurs généraux et ingénieurs. Ses familiers russes étaient Andreï Matveïev, Léon Narychkine, les princes Boris Galitzine, Romodanovsky, Dolgorouky, etc. Lefort, profitant de son goût pour les jeux militaires, forma avec cinquante de ses jeunes compagnons une compagnie qui fut le noyau du fameux régiment Préobrajensky; un autre groupe fut le noyau du régiment Séménovsky.

En même temps, le jeune tsar se livrait avec fougue aux plaisirs; sa mère, pour l'en préserver, le maria en février 1689 à Eudoxie Féodorovna Lapoukhine. Sophie, qui avait, dès 1687, voulu prendre pour elle-même le titre d'autocrate, se brouilla avec son frère désireux de mettre un terme à la régence. Il accusa sa soeur de l'avoir voulu faire assassiner; elle tenta de soulever les streltsi, et Pierre se réfugia avec sa mère au couvent de Troïtza; mais ses conseillers étrangers prirent l'avantage; Sophie ne put lui arracher une transaction et dut se soumettre, prendre le voile et se retirer dans un couvent. Le 11 octobre 1689, Pierre rentrait à Moscou; son allié vint le complimenter et lui laissa l'exercice réel de la souveraineté. Ivan ne vécut d'ailleurs que jusqu'en 1696.


Pierre, devenu maître absolu des destinées de la Russie, commença par organiser une armée permanente à l'européenne; Lefort et Gordon s'en chargèrent avec le concours d'officiers étrangers. Simultanément il portait ses efforts sur la marine. Il en sentait la nécessité d'ouvrir à son pays une issue maritime vers l'Europe occidentale. Il songea d'abord à la seule voie russe, à la mer Blanche, que des vaisseaux anglais visitaient déjà du temps d'Ivan le Terrible. Il fit en 1693 le voyage d'Arkhangel, alla jusqu'à Ponoï, sur la côte de Laponie, établit des chantiers, et il travailla lui-même à la construction des bateaux. Revenu en 1694 avec quelques vaisseaux sur la mer Blanche, il nomma Féodor Iouriévitch Romodanovsky amiral. Mais la mer Blanche obstruée par les glaces huit mois par an ne pouvait répondre au but poursuivi; la Caspienne ne menait qu'en Perse (Iran) : les débouchés rêvés ne pouvaient se trouver que sur la mer Baltique et la mer Noire; l'accès de l'une était barré par les Suédois; celui de l'autre, par les Turcs.
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La vieille inimitié entre le peuple orthodoxe et le « mécréant », l'état de guerre contre la Turquie qui ne cessait d'exister depuis la régence de Sophie et où les Russesavaient une revanche à prendre, décidèrent le jeune tsar à tenter la conquête d'Azov. L'armée, dont firent partie, les nouveaux régiments Préobrajensky et Séménovsky, ainsi que les Cosaques du Don, sous le commandement des généraux Golovine, Gordon et Lefort, arriva devant Azov en 1695, après un long et pénible parcours par les voies fluviales de la Moskva, de l'Oka, du Volga et du Don. Le tsar suivait en simple « bombardier » du régiment Préobrajensky. Mais l'inexpérience des nouvelles troupes, l'absence de flotte et la trahison de l'ingénieur allemand Jansen firent échouer cette première expédition. Pierre ne se découragea point. Il établit sans tarder de nouveaux chantiers à Voronej, y fit construire avec une activité fiévreuse de nombreuses galères et barques (on a conservé un de ces bateaux entièrement taillé par le tsar), appela de l'étranger des artilleurs, des officiers de marine et des ingénieurs, si bien que, quelques mois après, au mois de mai 1696, vainqueur de la flotte ottomane, il put bloquer Azov par terre et par mer, et la place turque dut capituler (29 juillet 1696).

Pierre ordonna la construction d'une flotte de guerre sur la mer Noire et le creusement d'un canal joignant la Volga au Don (entreprise qui ne put aboutir). Désireux de trouver chez ses sujets les connaissances qu'il était obligé de demander à des étrangers, le tsar réformateur envoya une cinquantaine de jeunes nobles russes en Hollande, en Angleterre et à Venise, se perfectionner dans les arts et les sciences. Il se préparait à les y suivre dans le même dessein : une sédition retarda son départ. La vieille Russie s'était émue des innovations du tsar : il ne lui suffit pas de s'entourer des étrangers, murmurait-elle, de leur donner les meilleures places, de ne pas écouter les plus nobles Russes, il abaisse encore sa dignité tsarienne, acceptant le simple titre de bombardier dans l'armée de terre, de pilote dans la marine, marchant à pied derrière le riche traîneau de son général Lefort, négligeant les parades et la vieille étiquette de cour, vivant en mauvais chrétien, etc. De son couvent, Sophie attisait l'irritation. Le complot dénoncé, et les streltsy réprimés (février 1697), la fureur du jeune tsar fut terrible et la répression impitoyable. Il agit en véritable révolutionnaire couronné, ne s'arrêtant devant aucun moyen pour briser l'opposition aveugle des vieux préjugés, et ouvrir à la Russie la «fenêtre » par où devait pénétrer la civilisation européenne.

Ayant confié la direction des affaires à Boris Golitsyne et à Romodanovsky, Pierre sortit de ses États, sous le nom roturier de Pierre Mikhaïlov, dissimulé parmi les 270 « volontaires » de diverses origines et de toutes classes qui formaient la suite de la grande ambassade de Lefort, Golovine et Vosnytzine, envoyée auprès de la plupart des cours de l'Europe (avril 1697). Ce voyage avait autant pour but l'étude des institutions occidentales et l'enseignement que la négociation d'alliances contre les Turcs.

Abandonnant à son ambassade le soin des négociations politiques, Pierre Mikhaïlov visita rapidement les cours de Courlande, de Brandebourg et de Hanovre, se souciant peu de la vie des palais, attiré surtout par les travaux des fabriques, des usines, des arsenaux, des laboratoires, des pharmacies, examinant les ponts, les canaux, les moulins; il étudia avec une égale ardeur les mathématiques, la chimie, la physique, la zoologie, la médecine. Mais son principal objectif demeurait l'art maritime, et il se rendit seul à Saardam (Zaandam) et à Amsterdam, où il travailla en simple manoeuvre dans les scieries, les corderies et les docks, se mêlant à la vie des « skipers » hollandais. S'apercevant que « l'art de la mer » était ici purement empirique, il alla en Angleterre où on « construisait par principes », il y passa trois mois, déployant la même activité et embauchant à son service 500 ouvriers, ingénieurs, architectes, orfèvres, bombardiers, achetant des modèles de vaisseaux. Il revint en Hollande, dont il ne put obtenir la flotte sollicitée contre les Turcs; puis, évitant la France, avec laquelle l'élection du roi de Pologne l'avait brouillé, il se rendit par Dresde à Vienne où l'appelaient des intérêts politiques, et était à la veille de son départ pour Venise, une autre des grandes puissances maritimes de l'époque, lorsqu'il fut prévenu d'une nouvelle révolte des streltsi. Il rentra aussitôt à Moscou (4 septembre 1698), et bien que Gordon et Romodanovsky eussent déjà réprimé l'émeute, Pierre, contrarié de nouveau dans ses projets, fit trembler toute la vieille Moscovie par la cruauté des exécutions et des tortures 130 conjurés furent pendus devant le couvent où était enfermée Sophie.

Il profita de l'occasion pour licencier définitivement cette milice indisciplinée, cause permanente de troubles, et dont l'organisation archaïque ne répondait plus aux besoins militaires de la Russie. Le tsar répudia aussi sa femme Eudoxie Lapoukhine - dont il avait un fils, Alexis - sous prétexte qu'elle était de connivence avec ses ennemis, en réalité parce qu'elle était, comme les autres Lapoukhine, obstinément attachée aux anciens usages. Elle était d'ailleurs peu avenante et plus âgée que lui et avait pour rivale la belle Allemande Anna Mous. Comme Sophie, Eudoxie et Marthe Alexeievna, autres soeurs du tsar, eurent la tête rasée et furent enfermées dans un couvent.

Pierre poursuit alors avec une audace croissante l'organisation de son empire sur le modèle européen. Il fonde le 20 mars 1699 l'ordre de Saint-André. La mort de Lefort et de Gordon n'arrête pas la constitution de la nouvelle armée : 27 régiments d'infanterie et 2 de dragons fournis par un recrutement national. Les impôts sont modifiés, le costume allemand imposé aux fonctionnaires, la longue barbe proscrite à l'armée et dans les villes; il touche même à l'organisation ecclésiastique, laissant vacante la place du patriarche (1700). Il fonde des écoles, des imprimeries, attire des savants étrangers. La chronologie russe faisait commencer l'année en automne, il la fait dater du 1er janvier (1700).

A l'extérieur, il continue de poursuivre la conquête de débouchés vers la mer. Une trêve de trente ans, consécutive à la paix de Carlowitz, est conclue avec le sultan (3 juillet 1700); les Russes conservent Azov et Taganrog et sont affranchis du tribut payé au khan de Crimée. Pierre a envoyé à Constantinople un vaisseau de 46 canons et demandé la libre navigation de la mer Noire; il ne l'obtint pas, mais la paix lui laissa les mains libres du côté du Nord. Il s'est allié avec les rois de Pologne et de Danemark contre le jeune roi de Suède, Charles XII. En août 1700, ses forces occupent l'Ingrieet attaquent Narva. Charles XII, vainqueur des Danois, accourt et avec 8 000 soldats il triomphe sans peine des 38 000 hommes de l'armée hétéroclite et inexpérimentée des Russes (20 novembre 1700). Seuls, les régiments de Préobrajensky et Séménovsky, création de Pierre, se retirèrent avec les honneurs des armes.

Tandis que Charles XII, après ses succès, dirigeait ses troupes contre le troisième ennemi, la Pologne, le tsar, nullement abattu, s'appliqua à la reconstitution de son armée avec ses lieutenants et favoris, Michel Golitzine, Chérémétiev, Mentchikov, Apraksine, Bruce. Il fit travailler tout le monde : soldats, bourgeois, paysans, même les moines et les femmes, aux fortifications. Pour augmenter ses ressources, il créa de nouveaux impôts, exigea de l'argent des couvents, et le bronze de la plupart des cloches des églises fut transformé en canons. Il forma ainsi dix nouveaux régiments et put bientôt mettre en ligne des troupes homogènes et disciplinées. Les résultats furent : les échecs successifs des Suédois dans le bassin de la Baltique, la victoire de l'Embach (1er janvier 1702). Il atteignit, aux bords de la Néva, l'objectif rêvé, prit la forteresse de Notehourg, surnommée par lui SchIüsselbourg, puis Nienchantz, située à l'embouchure du fleuve, la rasa, et procéda aussitôt, le 27 mai 1703, à la création de la citadelle des Saints Pierre-et-Paul et d'un nouveau port, lequel, dix ans plus tard, fut transformé en capitale et reçut le nom de Saint-Pétersbourg.
-

Après avoir fortifié, sur l'île de Cronstadt, l'accès de la Néva du côté de la mer Baltique, les Russes prirent Koproié, lam, Dorpat, et enfin Narva (mai-août 1704). La revanche de la défaite de 1700 était complète. Pendant que Charles XII est retenu par les affaires de Pologne, Pierre poursuit ses conquêtes en Courlande, s'empare de Vilna (Vilnius) et de Grodno. La défaite infligée par Leewenhaupt à Gemauerthof est effacée par la victoire russe de Kalisch (octobre 1706). Entre temps, il fait réduire par son meilleur compagnon d'armes, le feld-maréchal Chérémetiev, une émeute à Astrakhan, et, par les deux princes Dolgorouky, les soulèvements des Cosaques du Don, révoltes causées par le fanatisme des «vieux croyants» (ou raskolniki), par les rébellions autant contre les nouveaux usages que contre le dur service militaire. et les lourds impôts.

Cependant Charles XII ayant obligé Auguste de Saxe à renoncer au trône de Pologne et conclu la paix d'Altranstraedt, se tourne de nouveau contre Pierre. Les troupes russes sont forcées de se replier de Pologne vers l'intérieur du pays, tandis qu'un hiver rigoureux oblige les Suédois à se diriger vers le Sud où ils espéraient trouver un pays moins dévasté, ainsi que l'appui de Mazeppa, l'hetman des Cosaques de l'Ukraine. Mais la colonne suédoise de Loewenhaupt, forte de 18 000 hommes, amenant au roi de l'artillerie et des provisions, est battue par le tsar à Siesna. Charles XII n'entreprit pas moins avec le gros de son armée le siège de Poltava, principale ville de l'Ukraine. Le tsar arriva au-secours de la garnison avec 60 000 hommes.

« L'heure est venue, dit Pierre à ses soldats, où va se décider le sort de la Russie. Rappelez-vous que vous ne combattez pas pour Pierre, mais pour le bien-être de la patrie confiée à Pierre. »
L'armée suédoise n'ignorait pas davantage que de la victoire seule dépendait son salut. Ce fut un combat acharné, épique. Des deux côtés on se battit en héros. Ni le roi ni le tsar ne s'épargnèrent. Charles, blessé, se fit porter sur une litière pour encourager de sa présence officiers et soldats. Trois balles atteignirent Pierre : l'une s'aplatit sur l'image sainte qu'il portait sur la poitrine, la seconde traversa sa coiffure, la troisième s'enfonça dans sa selle. Le nombre l'emporta, les Suédois furent mis en déroute (8 juillet 1709), et Charles XII, suivi de Mazeppa, dut fuir et se réfugier en Turquie.
La Livonie et la Carélie furent conquises, assurant aux Russes la domination sur les côtes de la Baltique par la prise de Vyborg, Riga, Dunamunde, Pernau, Kexholm, Revel (Tallinn). Le tsar projetait une attaque contre la Suède même lorsque Charles XII réussit à lui faire déclarer la guerre par la Porte (ler décembre 1710). Pierre remit le gouvernement au Sénat, restitua aux églises et aux couvents une partie de ce qu'il leur avait pris, et vint avec Chérémetiev camper sur les bords du Pruth, traversant la Moldavie dont l'hospodar Cantemir était son allié. Mais là il fut battu par le grand vizir (20 juillet 1711), cerné entre la rivière et un marais; sa situation semblait désespérée, mais sa femme Catherine Alexeievna (Le Printemps des Tsarines) le releva; le grand vizir fut corrompu et une paix signée à Hush (23 juillet). Les Russes rendaient Azov et l'embouchure du Don.

La compensation de ces pertes fut cherchée et obtenue du côté de la Baltique. Après une cure à Karlsbad (1711), Pierre a marié son fils Alexis à une princesse de Brunswick; il s'est concerté avec les Prussiens et les Danois, et a publié son mariage avec Catherine (2 mars 1712). De concert avec ses alliés allemands et danois, il traque les Suédois en Poméranie, en Holstein, bloque Steenbock à Toeningen, puis entreprend la conquête de la Finlande où il pénètre jusqu'à Tavastehus (1713). Mentchikov laisse neutraliser la Poméranie, ce qui entraîne sa disgrâce, mais le tsar triomphe de la flotte suédoise à Hangœud, s'empare des îles Aland et de Nyslott. Son suppléant habituel, le vice-tsar ou césar Romodanovsky, lui confère le grade de vice-amiral; il s'était plu à gravir un à un les degrés de la hiérarchie.

Charles XII, revenu à Stralsund, rompt la neutralité de la Poméranie, mais ne peut s'y maintenir contre les Prussiens et les Danois. Ceux-ci commencent à se méfier du tsar avec lequel le roi de Suède négocie un rapprochement.

C'est à ce moment, au printemps de 1717, qu'il fit un second voyage dans l'Europe occidentale, visitant La Haye (février 1717), puis Paris et la cour de Versailles (avril-juillet), dans l'intention de conclure un accord contre l'Angleterre avec le régent Philippe d'Orléans, peut-être aussi marier sa fille Elisabeth (qu'il eut de sa seconde femme Catherine) à Louis XV. Il ne réussit qu'à y remporter des succès personnels. Il émerveilla les Parisiens par sa prodigieuse activité, l'étendue de ses connaissances et le désir constant de s'instruire. Il se promenait partout, pénétrait dans les palais, vêtu simplement d'un habit de drap brun à boutons d'or, portant une perruque brune arrondie et non poudrée, sans gants ni manchettes, ne mettant jamais son chapeau, le tenant dans la main même dans la rue. Pendant sa visite à Louis XV, il prit, au grand scandale des courtisans, le petit roi sur ses bras.

Son attention était principalement pour la manufacture des Gobelins, l'Observatoire, les plans des forteresses, les cartes géographiques; sur celle de Russie, il corrigea de sa main les erreurs. Il assista à une séance de l'Académie des sciences et en fut élu membre. Il déclina les propositions de la Sorbonne pour la réunion de l'Église orientale avec l'Église latine. A partir de cette année 1717, la Russie eut un représentant en France, laquelle, de son côté, envoya, en 1721, à Saint-Pétersbourg, un agent diplomatique à poste fixe.

A son retour à Saint-Pétersbourg (21 octobre 1717), Pierre réprima sévèrement les abus commis pendant son absence. En même temps, il n'hésitait pas à assurer la durée de ses réformes par la suppression de son fils, héritier indocile. Le jeune Alexis, de moeurs grossières et d'intelligence arriérée, affichait le mépris des importations étrangères et l'affection pour les vieilles coutumes russes. Il s'entourait des adversaires des réformes, il avait par sa brutalité fait mourir sa femme après ses couches et conspirait avec sa mère et une partie du clergé. Son père vint à Moscou, prononça sa déchéance du droit de succession, le déféra à un tribunal de 124 dignitaires qui le condamna à mort; le lendemain, Alexis n'était plus (26 juin 1718). Après cette fin tragique et mystérieuse, les complices périrent dans les supplices.

Les pourparlers avec la Suède, menés par Gœrz, furent interrompus par la mort de Charles XII (30 novembre1718). Sur les conseils de l'Angleterre, l'aristocratie suédoise décida la Diète de reprendre la guerre contre les Russes. Ceux-ci envahirent à deux reprises le territoire suédois, malgré une démonstration navale de l'Angleterre. Délaissé par ses alliés, Pierre combattit seul; il fit arrêter tous les négociants anglais (1719). En même temps, il obligeait l'Autriche à lui donner satisfaction, expulsait les Jésuites.

La mort de son second fils (né de Catherine le 8 septembre 1717), Pierre Petrovitch, l'arrêta quelques jours (6 mai 1718); son désespoir fut tel qu'il faillit se suicider. Il reprit la guerre, dévasta la Finlande, et par une nouvelle attaque contraignit la Suède à traiter. La paix de Nystad (10 septembre 1791) acquit à la Russie l'Estonie, la Livonie, l'Ingrie, une partie de la Carélie, Vyborg et Kexholm.

Pierre atteignait son but. Il avait sur la Baltique un vaste littoral, non la fenêtre qu'il méditait, mais bien une large porte ouverte sur l'Europe occidentale. Ces heureux événements furent solennellement fêtés; le Sénat dirigeant et le Saint-Synode décernèrent au tsar les titres de «Grand, de Père de la patrie et d'Empereur de toutes les Russies» (2 novembre 1721). Une amnistie générale (sauf aux brigands et assassins) et la remise des impôts arriérés complétèrent les fêtes célébrées dans tout l'empire. Le titre impérial ne fut toutefois reconnu de suite à Pierre le Grand que par la Prusse, la Hollande et la Suède.

il entreprit alors une dernière guerre. Des marchands russes ayant été mis à mort par des Persans, il conduisit lui-même 400 000 hommes vers la mer Caspienne (1722), et s'empara de Derbent et de Bakou. Le shah, affaibli par des troubles antérieurs, dut céder à la Russie, par la paix du 12 sept. 4723, avec ces deux ports, les rivages méridionaux de la Caspienne, Ghilan, Mazandéran, Asterabad. La Porte accéda à ces conventions le 8 juillet 1721. Pierre le Grand a ainsi préparé à ses successeurs le chemin de l'Asie centrale. Une démonstration navale contre la Suède en faveur du duc de Holstein fut la dernière opération militaire du règne (juillet 1724).

A l'intérieur, malgré les guerres et les émeutes; la transformation sociale, politique et économique s'accomplissait, profonde et rapide. Les relations avec l'Occident devenaient de plus en plus suivies; des milliers de « volontaires » de l'instruction, de gré ou de force, franchissaient la frontière; le nombre des étrangers attirés en Russie n'était pas moindre, et la plupart y faisaient souche. Les moeurs s'humanisaient. Les usages asiatiques de la réclusion de la femme et du mariage sans son consentement furent abolis; des fêtes et des « assemblées » furent instituées où les hommes, le menton rasé - le port de la barbe était le signe d'opposition et d'attachement aux anciennes moeurs - et les femmes, à visage découvert (sans la fata), purent se livrer à des danses allemandes et polonaises.

Ce fut le commencement de la vie mondaine. Des mesures furent prises contre la mendicité, des maisons de travail établies pour les vagabonds, des asiles pour les enfants abandonnés et des hôpitaux pour les malades; on prohiba le port des armes; on traqua plus efficacement les brigands et les voleurs par une police régulière. - Les écoles se multipliaient : les élémentaires, dans les villes de la province; les supérieures « de mathématiques », de médecine, de navigation, d'artillerie, de beaux-arts, un « gymnase avec études générales et cours universitaires », des « académies de latin, de grec et d'allemand », à Moscou et à Saint-Pétersbourg. Une Académie des sciences fut fondée dans la nouvelle capitale sur le conseil de Leibniz et dans le désir de Pierre, comme il écrivit à l'Académie des sciences de Paris : « se montrer le membre digne de votre compagnie ». Il fit traduire, en Russie et à l'étranger, un grand nombre de livres techniques: de jurisprudence, d'économie politique, d'agriculture, de sciences militaires, de navigation, de géographie, d'histoire, de linguistique, que souvent il revoyait lui-même.

Sa soeur Nathalie composa des pièces russes, et des comédiens allemands jouèrent pour la première fois devant le public. Un simple marchand, Passochkov, écrit le livre : Pauvreté et Richesse, flétrissant les vices du temps, faisant l'apologie de Pierre le Grand et osant demander l'égalité de tous devant la loi. Polikarpov, subventionné par le tsar, rédige une histoire de la Russie depuis le XVIe siècle. Les bibliothèques s'enrichissent d'ouvrages et les musées de collections précieuses. L'imprimerie russe d'Amsterdam crée l'alphabet civil (1708), les caractères slaves ne servant plus que pour l'impression des livres d'église. D'autres imprimeries sont fondées en Russie, dans les deux capitales et en province. Le premier journal public apparaît : le Messager russe (1703). - Nous avons vu que, pour soutenir ses guerres et réorganiser son armée, Pierre dut en même temps remanier la perception des impôts, et le nouveau système fiscal amena à son tour des modifications importantes dans les groupements et la définition des catégories d'imposables. C'est principalement la population rurale qui subvenait aux frais de la transformation militaire, et, conséquence directe, payait de sa liberté la réforme cadastrale. Elle était composée de paysans libres (odnodvortsi); de métayers (polovniki), cultivant la terre des nobles, mais libres personnellement, et de paysans attachés à la glèbe.

Pierre les confondit dans une même classe assujettie à la captation et à la résidence fixe : c'était le servage définitivement établi et réglementé. L'impôt sur les âmes remplaçait l'impôt sur les feux, et les seigneurs en furent rendus responsables. La mesure fut atténuée par un ukase défendant de vendre séparément les membres d'une même famille. Les commerçants et les industriels payèrent la patente de première et deuxième guildes (classes) et jouirent, en revanche, de certains privilèges de trafic. Les artisans durent former des corporations avec leurs anciens (alderman) à la tête. On établit des monopoles; la régie elle-même vendait le tabac, le sel, d'autres produits de première nécessité, même des cercueils. On procéda, dans un but fiscal, au recensement régulier de la population. Seule, la noblesse demeurait exempte d'impôts; en revanche, tout gentilhomme devait servir l'Etat jusqu'à la mort. Les fiers boïars et les autres dignitaires ne formaient plus une oligarchie fermée; quiconque, Russe ou étranger, entrait au service et se distinguait, devenait noble; la noblesse héréditaire et la noblesse de service furent confondues en une seule classe : dvoriané.

Cependant, comme tous ces nouveaux impôts pesèrent lourdement sur les paysans et ne donnèrent pas toujours le résultat voulu, le tsar chercha à développer l'industrie et le commerce, multiplia les fabriques et les usines, encouragea l'exploitation des mines, de sorte que bientôt ses soldats furent habillés d'étoffes russes, et l'armement, canons et fusils, fait avec les métaux de l'Oural. Il établit des routes avec communication postale, creuse des canaux, fait diriger de force le trafic du port d'Arkhangelsk vers celui de Pétersbourg, conclut des traités de commerce, envoie des agents consulaires en Europe et des caravanes en Orient. II est à la fois libre-échangiste à l'extérieur et protectionniste à l'intérieur. L'ensemble de ces mesures financières et économiques fait monter les revenus de l'Etat de 1 et demi à 10 millions de roubles par an, chiffre considérable pour l'époque. - Résultat corollaire : l'effectif de l'armée peut être porté à 200 000 hommes de troupes régulières et à plus de 400 000 soldats irréguliers (Cosaques, Kalmouk, Tatars, etc.). La flotte compte 200 vaisseaux, 800 barques, 30 000 hommes d'équipage et 2 000 canons.

Dans le domaine administratif, la douma des boïars est remplacée par un Sénat dirigeant, et les prikazes par des collèges ou ministères collectifs, sur le patron allemand, avec l'autorité étendue de surveiller la bonne direction des affaires d'Etat, de poursuivre les abus de pouvoir, de rechercher et de rendre la justice. Le changement ne fut pas seulement de nom, et « le premier serviteur d'Etat » se soumettait lui-même aux décisions de « Messieurs le Sénat ». L'usage de payer les employés par des prélèvements arbitraires en nature fut remplacé par un traitement fixe. Les devoirs et les droits des fonctionnaires furent strictement limités selon le principe de la division du travail et de la responsabilité. Les fonctions civiles et militaires furent établies par rangs et par grades qu'on devait successivement franchir. Le tsar en donna l'exemple en ne passant, un à un, du grade de bombardier aux grades supérieurs, qu'en récompense de services rendus; ainsi, il n'accepta le titre de général qu'après la bataille de Poltava. Il mit de l'ordre dans l'administration provinciale : l'empire fut divisé en douze gouvernements, subdivisés en quarante-trois provinces, avec, à leur tête, des gouverneurs généraux et des vice-gouverneurs assistés de municipalités électives. La justice était rendue en province, soit par les tribunaux, soit par la magistrature élue des villes. Une délégation du Sénat formait la cour suprême à Saint-Pétersbourg.

L'administration ecclésiastique fut réformée dans le sens de la subordination du pouvoir spirituel au pouvoir temporel. La mort du patriarche Adrien (1700) fournit à Pierre, l'occasion d'abolir cette haute fonction, aux prérogatives presque égales à celles du tsar, et il la remplaça par l'assemblée des archevêques et évêques, le Saint-Synode (1721). Un grand procureur représentait auprès de lui l'empereur, de même qu'un procureur général auprès du Sénat. Chaque évêque dut entretenir dans son palais des écoles religieuses, et les fils de popes qui négligeaient de les fréquenter étaient astreints au service militaire. Les raskolniki (vieux croyants) furent poursuivis comme les plus rebelles aux réformes; ceux qui se tenaient tranquilles, sauf le paiement d'un impôt double, ne furent guère inquiétés.

Pierre se montra également tolérant à l'égard des confessions chrétiennes de l'Occident; seuls les Jésuites qui voulaient faire du prosélytisme furent expulsés; il protégea les autres ordres, notamment les Capucins établis à Astrakhan.

Après la mort de ses deux fils, Pierre le Grand s'occupa enfin d'assurer la succession régulière du trône, et, par l'ukase du 16 février 1722, le droit de désigner son successeur fut reconnu au souverain en dépit du principe de primogéniture. Cet ukase que Pierre fit solennellement jurer à ses sujets était la conséquence de l'élimination de son fils Alexis. Mais il n'en fit pas usage et mourut sans avoir pris de disposition pour régler sa succession qui échut à sa femme Catherine.

Atteint de maladie, le tsar continua de travailler, se mit à l'eau pour aider des matelots à mettre à flot une chaloupe échouée et succomba peu après. C'était un homme violent, de passions vives, aimant les femmes et le vin, s'amusant de forces grossières, mais animé d'un profond sentiment du devoir et dominé par l'idée de la grandeur de la Russie.

Le document connu sous le nom de Testament de Pierre le Grand, assignant pour but à la Russie une sorte de domination universelle, et visant en particulier à Constantinople, est une fiction du commencement du XIXe siècle. Si elle n'émane pas directement de Napoléon Ier, l'origine en doit être cherchée dans un ouvrage écrit en 1812 sous son inspiration (Des progrès de la Puissance russe). (E. Halpérine-Kaminsky).



Fondation de st Pétersbourg


16 mai 1703 Pierre le Grand fonde Saint-Pétersbourg

Le 16 mai 1703, sur ordre du tsar Pierre1er le Grand (30 ans), des soldats russes posent la première pierre de la forteresse Pierre-et-Paul, sur l'île Zaïatchi (l'île aux Lièvres).

Celle-ci se situe dans le delta de la Néva, au fond du golfe de Finlande, sur la mer Baltique, une région marécageuse, froide et terriblement inhospitalière !

Le tsar entame ainsi la construction de sa nouvelle capitale, Sankt-Petersburg. Ce nom signifie «ville de Saint-Pierre» en allemand, cette langue étant alors en faveur à la cour de Russie (on écrit en français Saint-Pétersbourg)


Caprice de tsar
L'idée de donner une nouvelle capitale à la Russie est venue au tsar Pierre 1er suite à ses voyages en Europe. Fils du tsar Alexis 1er, Pierre monte sur le trône en 1682, à l'âge de 10 ans, en association avec son demi-frère Ivan V. Livré à lui-même, il se frotte aux idées occidentales et s'empare de la totalité du pouvoir à dix-sept ans, en 1689.

En 1697-1698, Pierre effectue incognito un voyage de découverte en Angleterre, en Allemagne et en Hollande.

De retour à Moscou, il entreprend de moderniser son pays en forçant par exemple les citadins à couper leur barbe et à s'habiller à l'européenne ! Sa volonté d'occidentaliser le pays culmine avec la fondation de Saint-Pétersbourg sur un territoire qu'il vient d'arracher à la Suède.

L'emplacement ne se prête pas a priori à l'établissement d'une grande ville. Mais il a pour le tsar l'avantage d'être plus proche de l'Occident et plus accessible que Moscou, l'ancienne capitale de la Russie.

Une capitale baroque
À sa manière brutale, par un oukase du 1er mars 1704, le tsar réquisitionne 30.000 hommes pour la construction de la ville.

L'architecte Domenico Trezzini (33 ans), originaire du Tessin suisse, dessine un plan d'ensemble de la ville et prévoit des modèles d'habitations adaptés aux différentes classes sociales: haute, moyenne et basse.

Il entreprend dès juin 1704 la construction de la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul. Deux ans plus tard, il achève la forteresse Pierre-et-Paul.

Celle-ci va d'abord servir de prison et accueillir le propre fils de Pierre 1er, le tsarévitch Alexis. Après la mort de Pierre le Grand, elle deviendra nécropole impériale. Y seront inhumés les tsars et les tsarines, à commencer par Pierre 1er le Grand.

Parmi les premiers aménagements de Saint-Pétersbourg figurent également le Jardin d'été du tsar, la citadelle de Kronstadt et le chantier naval de l'Amirauté.

Les ouvriers ont fort à faire pour surmonter les difficultés liées au terrain spongieux et aux multiples bras de la Néva. Le fleuve est envahi par les moustiques en été et pris par les glaces en hiver, soit cinq mois par an.

Les principales familles de la noblesse russe sont contraintes de construire dans la future capitale un palais en pierre... mais n'en continuent pas moins de résider à Moscou. Les constructions s'élèvent lentement au-dessus des marécages. En 1712, enfin, Saint-Pétersbourg devient officiellement la capitale de l'empire.

Le tsar interdit dès lors toute construction de pierre en Russie ailleurs que dans sa chère capitale. Il oblige par ailleurs tout navire entrant dans le port à amener sa part de pierres et de briques.

En 1716, Pierre 1er appelle à la rescousse l'architecte Jean-Baptiste Alexandre Leblond, qui arrive avec une équipe nombreuse d'artisans français.

Il conçoit pour le centre de la ville, sur l'île Vassilievski, un plan en ovale parcouru par de nombreux canaux qui rappellent Amsterdam... ou Venise (Saint-Pétersbourg, avec ses 42 îles et ses centaines de ponts, mérite le surnom de Venise du Nord). Mais sa mort prématurée à 40 ans, en 1719, ne lui permet de mener à bien ni ce projet d'urbanisme ni aucun de ses projets d'architecture.

À la mort du tsar, en 1725, Saint-Pétersbourg compte déjà 75.000 habitants et possède une Académie des Sciences, créée avec le concours du mathématicien allemand Gottfried Leibniz, ainsi que des musées et un étonnant cabinet des curiosités.

Mais c'est encore et pour longtemps un immense chantier sale, insalubre et malodorant dans lequel les grandes familles moscovites répugnent à vivre... et l'on estime à 150.000 le nombre d'ouvriers qui y ont laissé leur vie sous le règne du tsar.

Le jeune Pierre II (13 ans), qui succède à Pierre le Grand, cède à la pression des boyards et Moscou redevient la capitale de l'empire. Il faut attendre l'impératrice Anna Ivanovna, nièce de Pierre 1er pour que Saint-Pétersbourg retrouve son rang. C'est chose faite en 1732.

De 1741 à 1762, pendant les 20 années du règne de l'impératrice Élisabeth 1ère, fille de Pierre le Grand, l'architecte italien Bartolomeo Francesco Rastrelli complète avec maestria l'oeuvre de ses prédécesseurs.

Il construit de nombreux palais dans le goût rococo qu'il affectionne dont le palais Peterhof et surtout le palais d'Hiver (460 salles), résidence ordinaire du souverain.

C'est ainsi que les palais et les bâtiments officiels hérités des grands souverains de la dynastie des Romanov s'ordonnent peu à peu autour de la forteresse Pierre-et-Paul.

Dans un panorama grandiose et lumineux dont les canaux et les méandres de la Néva soulignent l'ampleur, ces bâtiments construits dans un style qui évoque le baroque italien composent l'une des plus belles villes du monde actuel.

L'Ermitage, joyau des tsars
À l'extrémité de la perspective Nevski (l'équivalent des Champs-Élysées), l'ensembre architectural de l'Ermitage rivalise avec le Louvre pour ses dimensions et ses collections de peintures.
Cet ensemble s'est développé autour du Palais d'Hiver. Cet édifice se prolonge avec le Petit Ermitage, construit par le Français Jean-Baptiste Vallin de la Mothe pour le repos de Catherine II. La tsarine confie par ailleurs à l'Allemand Youri Velten la construction du Grand Ermitage et à l'Italien Giacomo Quarenghi la construction du Théâtre de l'Ermitage, dans le prolongement des précédents, au bord de la Néva.
Détruit par un incendie en 1837, le Palais d'Hiver est reconstruit à l'identique sur ordre de Nicolas 1er et le tsar commande aussi une aile supplémentaire, en style néoclassique, pour abriter les collections impériales. C'est le Nouvel Ermitage, en bordure de la rue Millionnaia et non de la Néva. Le musée est ouvert au public par le tsar le 5 février 1852.

Saint-Pétersbourg ressuscitée
La ville a russifié son nom en Petrograd lorsque le pays est entré en guerre contre l'Allemagne en 1914. Le 10 mars 1918, à l'initiative de Lénine, elle perd une nouvelle fois son rang de capitale au profit de Moscou. Le 26 janvier 1924, quelques jours après la mort de Lénine, elle prend le nom de Léningrad en l'honneur du chef bolchevique et c'est sous ce nom qu'elle connaît pendant la Seconde Guerre mondiale un siège terrible et une famine qui occasionnent près d'un million de victimes.

Un référendum populaire a entraîné en 1991 le retour à l'ancienne appellation, Saint-Pétersbourg.

Avec environ 5 millions d'habitants et d'importantes activités portuaires et industrielles, la ville n'est plus que la deuxième en importance de Russie, après Moscou.


Documentaire
http://youtu.be/yaUTSMSYgz8 Il était une fois l'homme Pierre le Grand
http://www.youtube.com/watch?v=nHze1o ... e&list=PL543557BD2D4065AB Complet
http://youtu.be/w7ln44uKnwY bâtisseurs d'empire La Russie
Musiques
http://youtu.be/DkD9TPB0maI André Ernest Modeste Grétry - Pierre le Grand - Ouverture
http://youtu.be/dpGnf_yrPaw Les Choeurs de l'Armée Rouge - Kalinka - Danse Russe populaire
http://youtu.be/UikFkq6PBuc Les Choeurs de l'Armée Rouge - Les Bateliers de la Volga
http://youtuLes Choeurs de l'Armée Rouge - Kalinka (Russian Popular Dance - Danse R.be/TCAx0gp4t6Q Les Choeurs de l'Armée Rouge -Danse des Cosaques



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Posté le : 08/06/2013 21:33

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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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