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Re: Défi du 29/08/2015 : imposture professionnelle
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Hello Donaldo !

Tibruce est un personnage à multiples facettes et multiples visages ! En cela il est surement le plus indiqué pour n'importe quelle imposture professionnelle !

Je suis surprise par la fin décidément optimiste de ton texte. En ces temps de crise sociale, imaginer un monde où les choses pourraient aller mieux est presque un tabou !!!!

Vive les outsiders politiques qui parfois s'en sortent et parfois non mais qui au moins, ont le mérite d'être authentiques !

Merci pour cette bouffée d'espérance !

Posté le : 05/09/2015 10:24
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Défi du 05/09/2015
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Oyé Oyé bonnes gens,

En ce beau samedi du mois de septembre 2015, je vous invite à vous inspirer d'une phrase "Je suis dans le rouge !". Laissez votre plume courir sur le papier ou vos mains sur le clavier pour nous livrer votre histoire.

Je vous embrasse les amis.

Couscous

Posté le : 05/09/2015 09:53
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Re: Victimes S
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hop

Posté le : 05/09/2015 02:03

Edité par Boris sur 28-10-2015 00:14:59
Edité par Boris sur 28-10-2015 00:19:21
Edité par Boris sur 28-10-2015 02:47:59
Edité par Boris sur 10-11-2015 06:48:05
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Re: Défi du 29/08/2015 : imposture professionnelle
Plume d'Or
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Au-delà des statistiques


Je m’en souviens comme si c’était hier. Ce dix sept mai, alors que je regardais tranquillement un énième épisode de « Relooking Extrême » rediffusé sur Canal Nain, mon téléphone fixe sonna. Mon épouse Marie-Cécile leva son auguste séant du canapé, posa sa pelote de laine et ses aiguilles à tricoter sur la table basse en Pin de Lourdes puis se dirigea vers le vestibule.

Cinq minutes plus tard, Marie-Cécile revint au salon.
— Jean-Tiburce, c’est pour toi.
— Je ne suis pas là.
— Mais si, tu es là, je te vois bien.
— Marie-Cécile, c’est mon excuse pour ne pas répondre aux emmerdeurs du dimanche soir.
— Puisque je te dis que tu es là !

Marie-Cécile ne semblait pas d’humeur badine. Quand elle avait une idée dans la tête, elle ne l’avait pas ailleurs, selon le dicton populaire. Vue sa mine, j’évaluai à une sur cent mes chances de voir la fin de mon émission favorite.
— Quand même, ce n’est pas humain de me déranger maintenant, alors que Brenda a subi douze opérations de chirurgie plastique, passé quatre semaines à courir dans le désert avec des sacs de sable aux pieds, s’est vue offrir une garde robe digne de Britney Spears et a pris des cours de maintien pour ne plus cracher sur le tapis. Je veux voir le résultat, quand elle va arriver en limousine à la salle des fêtes de Springfield, là où l’attendent ses amis bouseux.
— Je te l’enregistrerai. Voila ! Tu es content ?

Devant cet argument imparable, je me déclarai battu, condamné à supporter la conversation inutile d’un quelconque empêcheur de glander en rond. Marie-Cécile, fair-play mais pas trop, me tendit la main pour m’aider à extraire mes petites fesses musclées de leur zone de confort. Je marchai sans conviction jusqu’au combiné téléphonique puis l’empoignai mollement, avec le même empressement que Louis XVI devant la guillotine.
— Jean-Tiburce Dugommeau ! C’est à quel sujet ?
— Monsieur Dugommeau, le président Hubert Boulon de la Visse souhaite s’entretenir avec vous d’urgence.
— Hubert Boulon de la Visse, président ? C’est un gag ? Vous êtes en train de me prendre pour un con, au nom de je ne sais quel programme télévisé. Je connais les blagues débiles de Jean-Yves Laburne, c’est bon. Allez-vous chercher un autre pigeon, je suis occupé !

Sur ces mots, je raccrochai au nez de mon interlocuteur. A peine opérai-je un demi-tour vers mon emplacement favori, en face du poste de télévision, que le téléphone sonna de plus belle. Je décidai d’ignorer ses cris stridents.
— Déjà fini ? Tu as été efficace, ironisa Marie-Cécile.
— C’était une blague de Jean-Yves Laburne et consorts. Je ne suis pas tombé dans le panneau. Pas fou, le Jean-Tiburce !
— A mon avis, tu te mets le doigt dans l’œil jusqu’au coude.
— Tu ne vas pas croire l’histoire d’Hubert Boulon de la Visse président ? Président de quoi, d’ailleurs ? Du Rotary de Plouezennec sur Bozon ? De l’Olympique de Lamotte-Beuvron ? Du club des enfileurs de tourtes tropéziennes ?
— Non. Juste de la République Française. Une paille.
— Sérieusement ?
— Oui !
— Depuis quand ?
— Vingt heures ce soir, pendant que tu regardais Brandon écraser des tapis roulants sous les encouragements de son coach sportif du moment.

Le pire, c’était que je connaissais Hubert Boulon de la Visse depuis longtemps. Nous avions fréquenté les mêmes boites à bac catholiques privées, subi ensemble les outrages de la Première Communion, joué de la clarinette dans l’orchestre du patronage Saint Denis et passé les mêmes concours d’entrée aux grandes écoles. Nos chemins s’étaient séparés au début de la seconde année de Sciences-Po. Hubert avait choisi les relations internationales alors que j’avais opté pour la filière secteur public, celle des hauts fonctionnaires et des adeptes du règlement en quatre exemplaires. Nos parcours avaient alors franchement divergé. De Sciences-Po à l’Ecole Nationale d’Administration, j’avais perfectionné mes talents de coupeur de cheveux en mille vingt-quatre pour terminer directeur de la stratégie industrielle au Ministère du Plan, un poste tranquille et loin des responsabilités. Hubert s’était lancé dans une carrière de diplomate, bien aidé en cela par son obédience aristocratique et son côté vieille France, d’abord au sein de diverses ambassades en Afrique Noire puis au Vatican. Je ne savais même pas qu’il se présentait à l’investiture suprême et encore moins dans quel camp.

« La France n’attend pas » avait dit un jour un candidat à talonnettes, le genre à gesticuler dans tous les sens tel un Troll atteint d’urticaire. Hubert Boulon de la Visse ne dérogea pas à la règle : il m’envoya une délégation des services de sécurité, dix minutes après le coming-out de Brenda l’ex-grosse devant ses amis pachydermes. Au spectacle de ma porte défoncée et sous le regard autoritaire des pandores assermentés, je m’inclinai sans invoquer mes droits constitutionnels ou le Dalaï Lama.

Le temps devint quantique. Je passai d’une limousine blindée à un bunker métallique, en plein cœur de Paris. Des hommes musculeux, à la mine patibulaire, m’accompagnèrent dans une salle feutrée, une sorte de bureau du proviseur en version Empire. « Attendez ici » aboya leur chef, une sorte de rottweiler à deux pattes. Je ne tentai pas de résister, déjà trop content de me retrouver vivant au milieu des primates.

Un quart d’heure passa à la vitesse de l’escargot de Bourgogne en mal de salade. Enfin, alors que je désespérais, Hubert Boulon de la Visse apparut, encadré par des têtes d’ampoule vêtues à la mode énarque. Il n’avait pas changé, malgré de rares cheveux blancs et des yeux moins enjoués. C’était toujours le même Hubert, l’heureux du village comme on l’appelait à Sciences-Po.
— Tu dois te demander le pourquoi de ta présence ici, chanta le nouveau Président de la République Française.

Ma moitié rationnelle prit le dessus sur mon envie de crier, de le traiter de tous les noms.
— Un peu, je l’avoue.
— Tu as raccroché au nez d’un conseiller, qui plus est celui dédié à la Sécurité Nationale. Ces gens sont susceptibles. Quand je lui ai dit de te ramener ici par les fesses, il a pris l’ordre au pied de la lettre.
— Ma porte s’en souviendra.
— Toujours aussi matérialiste, Jean-Tiburce. La Nation te remboursera au centuple.
— C’est un minimum.
— Garde ton envie de négocier pour plus tard. Je vais d’abord t’expliquer la situation.

Hubert me raconta la politique française telle que vécue par les Français d’en-bas, ceux qui cherchaient un travail stable et correctement rémunéré, les oubliés de la croissance, de la prospérité et des indices économiques. Je ne les connaissais pas vraiment. Pour moi, ils existaient à l’état de statistiques, d’écarts à la moyenne, de tendances sociologiques. Ils se retrouvaient noyés dans la masse, le Big Data tant vanté par les experts en économétrie. Ce n’étaient que des zéros et des uns dans le grand nuage numérique.

A la fin de son exposé, Hubert me fixa longuement, avec la tendresse de la mère poule devant son dernier poussin.
— Tu m’en bouches un coin, Hubert. Si je te comprends bien, la France a échappé de peu à l’insurrection. Au lieu de planter la tête des patrons au bout de piques, les Français t’ont choisi parce que tu ne promettais pas de raser gratis, parce que tu n’avais jamais pris parti pour les roses, les bleus ou les vert-de-gris.
— Exactement ! Avoir travaillé dix ans avec le pape François m’a rendu légitime aux yeux des classes moyennes et populaires. Du coup, je suis passé à l’aise dès le premier tour, largement devant les fanatiques du pas de l’oie et leur candidate à cheveux jaunes.
— Je ne sais pas quoi dire à part un grand « Bravo ! »
— Merci, mon ami. J’ai désormais besoin de toi pour réussir ma mission.

Mon maxillaire inférieur décrocha de vingt centimètres. Je ne tournai pas mille fois ma langue dans ma bouche avant de parler.
— Tu veux des statistiques ?
— C’est fini le pilotage virtuel, Jean-Tiburce. Des chiffres, j’en trouve à la pelle dans n’importe quel paquet de lessive. Ce qui me manque, ce sont des ministres.
— Pourtant, ça doit se bousculer au portillon.
— Justement, non. Les carriéristes ne veulent pas prendre le risque de se compromettre avec un OVNI venu du Vatican, un gars qui casse les codes de la politique au point d’oublier les sondages et les projections économiques. Qu’ils soient jeunes ou vieux, progressistes ou conservateurs, écologistes ou automobilistes, les élus attendent que je tombe de ma chaise. Je n’ai pas de majorité claire au Parlement mais eux non plus.
— Quelles sont les forces en présence ?
— Un tiers en ma faveur, un tiers d’irréductibles Gaulois et un tiers de girouettes.

Hubert m’expliqua pourquoi moi, un planqué au Ministère du Plan, représentait le parfait Ministre du Travail à ses yeux. Selon lui, mon apparence anonyme, mon manque de charisme et mes grosses lunettes transpiraient l’honnête homme. De plus, à l’aise avec les chiffres, venu d’une administration de techniciens, je ne saurais pas mentir devant les caméras.

Je dois l’avouer aujourd’hui. Sur le coup, son argumentaire de catholique ébahi ne m’avait pas convaincu. Me prendre des claques en direct par des journalistes prétentieux, sous le prétexte fallacieux que le taux de chômage avait grimpé d’un point, ne m’enchantait guère. Passer des heures en réunion avec d’autres ministres novices, à inventer un monde nouveau alors que l’ancien tournait encore, ne me faisait pas rêver. Négocier le passage aux trente-neuf heures au lieu de quarante deux, avec des patrons payés comme cent ouvriers, ne me fascinait pas. Gérer une administration sclérosée par des années de défense élastique, où un pas en avant était invariablement suivi de trois pas en arrière, me fatiguait à l’avance.

Pourtant, je l’ai pris ce poste. Marie-Cécile a déménagé dans un somptueux appartement de fonction, en plein Paris, provoquant au passage la jalousie de ses copines Tupperware. J’ai pris goût aux décisions et aux interviews. Enfumer Jean-Jacques Gourdin en direct sur une chaine de la TNT, noyer les parlementaires avec des arguments non chiffrés, sous couvert de rupture avec les précédents gouvernants, tout cela m’amuse prodigieusement. J’ai démarré en fanfare, dès la première année, en créant un nouveau métier, celui de gardien d’aire. Les autoroutes françaises, minées par les incivilités et les Roms, sont devenues plus sûres pour qui souhaitait satisfaire un besoin naturel sans avoir à slalomer entre les crottes de chien et les mendiants. Cent mille français ont trouvé un travail en un trimestre, se levant à sept heures du matin pour rejoindre leur cahute, parader en uniforme de la République et organiser le trafic sur des espaces bitumés. Au début, les autres nations européennes se sont payés notre tête mais Hubert Boulon de la Visse m’a dignement soutenu, sans coup férir, au nom de l’égalité des chances et du respect de l’environnement. Puis les Américains, les Australiens et les Canadiens ont pris des mesures similaires. Les réseaux sociaux se sont emparés du phénomène. Ma petite mesure est alors devenue tendance, symbole d’un pouvoir politique créatif, réaliste, pragmatique et proche de ses électeurs. Même les Roms ont applaudi.

Aujourd’hui, assis dans mon beau fauteuil à Matignon, je contemple la France dessinée par Hubert Boulon de la Visse. Plus personne ne nous traite d’imposteurs, de gouvernement inexpérimenté, comme si seuls de vieux gâteux pouvaient gérer le pays. Les parlementaires reprennent goût en la politique, redonnent des couleurs aux collectivités locales et de l’espoir à leurs administrés. Les gardiens d’aire ont monté leur syndicat, pas pour bloquer les autoroutes ou asperger les préfectures avec du fumier, mais dans le but d’aider les nouvelles professions. Les Chinois et les Indiens copient nos innovations sociales. Les têtes d’œuf de Harvard et de Stanford écrivent des thèses sur notre modèle économique. Bien sûr, ce n’est pas le Paradis. Le président l’a dit et répété à maintes reprises : « Rome ne s’est pas construit en un jour ». J’espère bien continuer dans cette voie, quand je serai élu à mon tour, après son second mandat, devant les nostalgiques du Maréchal, les lecteurs du Petit Livre Rouge et les fanatiques du CAC40.

Posté le : 04/09/2015 18:32
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Colbert
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Le 6 septembre 1683 meurt Jean-Baptiste Colbert

à 64 ans, à Paris, né le 29 août 1619 à Reims, un des principaux ministres de Louis XIV. Contrôleur général des finances de 1665 à 1683, secrétaire d'État de la maison du roi et secrétaire d'État de la Marine de 1669 à 1683.
Contrôleur général des finances 1665-1683, il est également Secrétaire d'État de la Maison du roi, Secrétaire d'État à la Marine. Il est marié à Marie Charron ilq ont trois fils, ses descendants sont Jean-Baptiste Colbert de Seignelay, Jacques Nicolas Colbert, Jean-Jules-Armand Colbert
Il entre au service du roi à la mort de son protecteur Mazarin, incite Louis XIV à disgracier son rival Nicolas Fouquet. Inspirateur et promoteur d'une politique économique interventionniste et mercantiliste ultérieurement désignée sous le vocable de colbertisme il favorise le développement du commerce et de l'industrie en France par la création de fabriques étatiques. Il passe pour s'être inspiré des idées de Barthélemy de Laffemas, économiste et conseiller d'Henri IV1 ; Laffemas avait en particulier développé le commerce colonial et l'industrie textile, les deux secteurs auxquels Colbert s'est particulièrement consacré pour devenir à son tour l'éminence grise du royaume.

En bref

Une légende tenace faisait de Colbert le fils d'un marchand drapier de Reims. Les historiens ont eu raison de ce mythe en montrant que le grand ministre était issu d'une dynastie de grands marchands internationaux, banquiers et financiers. Laboureurs à la fin de la guerre de Cent Ans, entre Reims et les Ardennes, ils firent du transport de pierres pour reconstruire les villes détruites et devinrent maçons. Marchands grossistes à Reims au XVIe siècle, ils donnent des échevins à la ville et appartiennent à la bourgeoisie riche de la cité. Très liés à la fin du siècle aux milieux bancaires italo-lyonnais, proches du pouvoir sous Henri IV et sous Louis XIII, ils atteignent leur apogée sous Louis XIV. Colbert n'est pas en effet devenu ministre par un coup de baguette magique, en sortant de la boutique du Long-Vêtu. Il fut poussé dans les allées du pouvoir par un groupe où se mêlaient des ministres comme Le Tellier (père de Louvois), des gens d'affaires comme Particelli d'Émery, Lumagne, Camus, rapprochés par un ensemble d'intérêts et des alliances matrimoniales. L'enfance et la jeunesse de Jean-Baptiste Colbert sont mal connues. On suppose qu'il fit ses études chez les Jésuites. Dès 1634, il fait son apprentissage chez Mascranny, banquier à Lyon, puis il travaille à Paris dans une étude de notaire, chez un procureur au Châtelet, avec un ancien munitionnaire devenu officier de finance ; il reçoit en somme une éducation de marchand et d'officier de finance, avec des notions juridiques acquises par la pratique. En 1640, il devient commissaire des guerres, charge lucrative s'il en fût, commis du secrétaire d'État à la Guerre, François Sublet de Noyers. Ces fonctions l'obligent à voyager dans le royaume pour connaître troupes et garnisons : expérience précieuse pour un futur ministre. En 1645, il entre comme commis au service de Michel Le Tellier, secrétaire d'État à la Guerre, qui lui fera obtenir un brevet de conseiller d'État. En 1648, son mariage avec la fille d'un intendant des turcies et levées de France lui apportera 100 000 livres de dot.
Colbert passa du service de Le Tellier à celui de Mazarin, dont il géra les immenses biens et auquel il servit d'intermédiaire avec la reine pendant son exil. Le cardinal le recommanda à Louis XIV comme étant fort fidèle. Sa valeur personnelle fit le reste. Il travailla à la disgrâce de Fouquet, réussit à influencer le roi, dut subir les assauts de la compagnie du Saint-Sacrement qui soutenait le surintendant, entra au conseil d'En-Haut et cumula peu à peu les responsabilités : bâtiments et manufactures, contrôle général des Finances, Maison du roi et Marine. Seules les Affaires étrangères et la Guerre lui échappèrent, quoiqu'il parvînt très vite à installer son frère Croissy au poste de ministre des Affaires étrangères. Pour venir à bout de tant de tâches, il fallait un homme exceptionnel. Michelet le compare à un bœuf de labour, mettant ainsi en évidence sa qualité fondamentale : l'archarnement au travail. Esprit méthodique, il sait rédiger pour le roi — à qui il voue une inébranlable fidélité — des rapports très clairs. Il esquisse tout un système de réformes afin de rétablir l'ordre dans le royaume, après les lourdes épreuves de la guerre. Ses idées ont souvent servi de modèle pour décrire le mercantilisme qu'il incarne.
Citadin, homme du commerce international, Colbert a le souci d'exporter pour accumuler à l'intérieur des frontières le maximum d'or et d'argent, et d'importer le moins possible pour éviter d'en perdre. À cette fin, les manufactures fourniront l'essentiel de l'effort, le grand commerce sera relancé et les paysans soulagés par la diminution de leurs impôts. Colbert n'est pas le père de ces idées, élaborées avant lui, mais il les a mises en application avec une rare énergie. Il est de bon ton d'en critiquer le bilan, qui n'est pourtant pas mince : les bourgeois, qui préféraient certes l'achat des offices et des biens fonciers, n'ont pas dédaigné d'investir dans l'industrie et le commerce, ce qui est significatif ; de plus, l'expansion économique du XVIIIe siècle trouve son origine à cette époque. Malgré les structures archaïques du temps, Colbert a réussi à modifier l'état des esprits et à entraîner derrière lui beaucoup d'imitateurs ; il a fait fonctionner un embryon d'administration, utilisé au mieux clientèles et membres du lignage ; il s'est conduit en chef de clan : ses frères sont devenus, l'un évêque de Luçon puis d'Auxerre, l'autre, Croissy, ministre des Affaires étrangères, le troisième, enfin, lieutenant général des armées du roi. Son fils, Seignelay, lui succéda à la Marine mais n'eut jamais les honneurs du conseil. Colbert eut en quelque sorte la chance de mourir en 1683, avant le temps des guerres difficiles et des catastrophes. Il a laissé une image de réformateur, de grand initiateur besogneux, luttant de toutes ses forces pour le progrès. Voltaire a fait l'éloge de Colbert, le XIXe siècle a reconnu en lui l'un des siens, un bourgeois conquérant, homme d'ordre et d'économie, glorificateur du travail, peu aimé de la Cour : Mme de Sévigné le nommait le Nord et Saint-Simon vilipendait en lui le règne de vile bourgeoisie. Jean-Marie Constant

Sa vie

Jean-Baptiste Colbert appartient à une famille de riches marchands et banquiers, parfois spéculateurs et souvent usuriers de la cité de Reims. Cette famille - de petite noblesse - se prétendait descendante d'une illustre et antique noblesse écossaise ce qui est plus que douteux. En réalité l'aïeul à la 6e génération, Édouard III Colbert, était déjà, au XVe siècle, seigneur de plusieurs terres Magneux et Crèvecoeur.
Jean-Baptiste Colbert est le fils de Nicolas Colbert, seigneur de Vandières et de son épouse Mariane Pussort, fille du seigneur de Cernay. Contrairement à une tenace légende son père ne fut jamais marchand de drap mais receveur général et payeur des rentes de la ville de Paris et négociant. Colbert se trouve être le neveu du conseiller d'État Henri Pussort, qui l'aidera dans sa carrière.
La jeunesse de Colbert, en revanche, est mal connue : après des études dans un collège jésuite, en 1634, il est employé chez un banquier de Saint-Étienne, Mascranny, puis chez un notaire parisien, père de Jean Chapelain.

Une ascension due à ses relations 1640-1651

Jean-Baptiste Colbert entre au service de son cousin Jean-Baptiste Colbert de Saint-Pouange, premier commis du département de la guerre sous Louis XIII.
En 1640, alors qu'il est âgé de 21 ans, son père utilise ses relations et sa fortune pour lui acheter la charge de commissaire ordinaire des guerres, commis du Secrétaire d'État à la guerre, François Sublet de Noyers. Cette fonction l’oblige à inspecter les troupes et lui donne une certaine notoriété auprès des officiers, tous issus de la noblesse.
En 1645, Saint-Pouange le recommande à Michel Le Tellier père du marquis de Louvois, son beau-frère, alors secrétaire d'État à la Guerre. Celui-ci l'engage comme secrétaire privé puis le fait nommer conseiller du roi en 1649.
En 1651, Le Tellier le présente au cardinal Mazarin qui lui confie la gestion de sa fortune, l'une des plus importantes du royaume.

La disgrâce de Fouquet 1659-1665

Chargé de veiller à la gestion des Finances de l'État, Colbert rédige dès octobre 1659 un mémoire sur de prétendues malversations du surintendant des finances Nicolas Fouquet, pointant que moins de 50 % des impôts collectés arriveraient jusqu’au roi.
Réputé cassant et peu disert, il n’est guère aimé de la Cour. Madame de Sévigné le surnomme Le Nord.
Le cardinal Mazarin, peu avant sa mort le 9 mars 1661, recommande à Louis XIV de prendre Colbert à son service par la phrase célèbre : Sire, je dois tout à votre Majesté, mais je m'acquitte de ma dette en lui présentant Colbert. Celui-ci devient intendant des finances le 8 mars 1661.
Le 5 septembre 1661, le surintendant Fouquet tombé en disgrâce est arrêté à Nantes par d'Artagnan. À la suite de cette arrestation, Louis XIV supprime la charge de surintendant des Finances et décide de l'exercer lui-même avec l'aide d'un Conseil créé le 15 septembre à l'instigation de Colbert : le Conseil royal des finances.
A partir de 1663, il est la main du roi dans la mise au pas des provinces et notamment pour juguler la puissance des nobles et mettre fin à une certaine impunité nobiliaire. Ainsi, les Grands Jours d'Auvergne de septembre 1665 à janvier 1666, qui veulent purger la montagne d'une infinité de désordres statuent sur 1.360 affaires concernant des officiers corrompus et des nobles auteurs d'exactions. Les condamnations de 87 nobles, 26 officiers et 4 ecclésiastiques sont accompagnées d'annonces aux carrefours et durant les prônes vantant les mérites du roi protecteur et justicier. La réformation de la noblesse étendue à l'ensemble du royaume à partir de 1666-1668 s'efforce de dresser un catalogue de l'ordre nobiliaire pour mieux le contrôler.

Éminence grise du royaume

Colbert est l'un des trois conseillers qui forment ce conseil et le chef effectif de l'administration des Finances. Le 12 décembre 1665 il reste seul contrôleur général des finances et est désormais désigné le plus souvent par ce titre.
Mémoire sur les travaux de Versailles, adressé à Louis XIV en 1665 par Jean Baptiste Colbert, contrôleur général, où celui-ci exprime son hostilité à tout projet de quelque ampleur. Archives nationales

Le 16 février 1669, il renforce son pouvoir en devenant secrétaire d'État de la Maison du Roi et secrétaire d'État de la Marine. Ses diverses charges lui permettent d'exercer une grande influence dans plusieurs secteurs d'intervention de l'État : finances, industrie, commerce, marine, police, justice, administration, travaux publics, postes, agriculture, aménagement du territoire, culture. Seules lui échappent la guerre et les affaires étrangères, confiées à Hugues de Lionne et à Michel Le Tellier, puis à son fils François Michel Le Tellier de Louvois.

Colbert et le colbertisme

Portrait de Colbert en tenue de l'ordre du Saint-Esprit, par Claude Lefèbvre 1666, musée du château de Versailles
Article principal : Colbert, l'économie et la marine française.
Sous le contrôle de Louis XIV, il n'aura de cesse de donner une indépendance économique et financière à la France. Colbert souhaitait réduire l'attrait des rentes constituées et de la préférence française pour la rente, en incitant à investir dans les manufactures et les Compagnies coloniales françaises.
Pour Colbert, la puissance d'un royaume se définit par la richesse de son souverain. Pour ce faire, il faut disposer d'une balance commerciale excédentaire et accroître le produit des impôts.

Pour enrichir la France, il met en place un système économique : le mercantilisme. Il veut importer des matières premières bon marché pour les transformer en produits de qualité qui pourront se vendre plus cher.
Dans ce but il convient de :
– créer une puissante marine qui importera les matières premières et exportera les produits finis ;
– réglementer la production de corporations ;
– créer une manufacture avec monopole qui fabriquera les produits de qualité à partir des matières premières.
À partir de 1661 Colbert dirige officieusement la Marine. En 1663, il est nommé Intendant de la Marine. Louis XIV dissout la Compagnie des Cent-Associés et fait de la Nouvelle-France une province royale sous juridiction de la Marine de Colbert.
En 1663, il fonde l'Académie des inscriptions et belles-lettres.
En 1664, nommé surintendant des Bâtiments et manufactures :

– il fonde la Compagnie des Indes Occidentales française, dissoute en 1674:
– il décide de copier les productions des États voisins pour rendre la France indépendante de leurs fournitures ;
– il n'hésite pas à débaucher des ouvriers étrangers pour former les ouvriers des manufactures françaises ;
– il utilise fréquemment l'octroi de monopoles, rétablit les anciennes manufactures, en crée de nouvelles. Il favorise ainsi la production de glaces Manufacture royale de glaces de miroirs, composante de la future compagnie de Saint-Gobain et de tapisseries Les Gobelins.

Carte de la Nouvelle-France dédiée à Colbert XVIIe siècle.
En 1664, il met en place le premier tarif des douanes modernes, le tarif Colbert. Cette mesure protectionniste fut revue sévèrement à la hausse en 1667 par Louis XIV envers les Anglais et les Hollandais en particulier, créant une guerre économique qui fut suivie d'un conflit militaire.
Il protège les sciences, les lettres et les arts et est élu à l'Académie française en 1667. Il favorise également la recherche en créant l'Académie des sciences 1666, l'Observatoire de Paris 1667 où Huygens et Cassini sont appelés, l'Académie d'architecture 1671.

Le 16 février 1669, nommé secrétaire d'État de la Maison du Roi, il agrège la Marine à ce département le 7 mars suivant et passe commande de 276 navires de guerre triplant ainsi les capacités de la France N 1. Il lance une grande réformation des forêts royales pour la construction navale, afin que les navires du royaume aient des mâts en l'an deux mille Colbert s’inquiète beaucoup que la France puisse un jour périr faute de bois. Il fait aménager les forêts avec l'obligation de conserver une partie de chaque forêt en haute futaie le quart en réserve et fait limiter le pâturage en forêt.
La grande réformation des forêts royales est aussi un choix stratégique pour réparer le patrimoine forestier français à une époque ou le bois est non seulement le premier matériau de construction mais également la première source d'énergie. Avec le défrichage, la surexploitation, la contrebande et le relâchement de l’administration des forêts, celles-ci sont décimées quantitativement et qualitativement : c'est un danger sur le long terme pour la France qui doit même importer du bois de chêne de Scandinavie pour sa marine. La grande réformation est un succès et permet de ressusciter la marine royale : dès 1670, on n’utilise plus que des bois français. La grande réformation des forêts inspirera par-delà la Révolution le code forestier moderne de 1827.

En 1673, il ordonne la création de la Caisse des emprunts pour permettre de financer les dépenses extraordinaires de l’État.

L’édit du 21 mars 16736, dit de Colbert, institue la législation sur les hypothèques, applicable dans l’ensemble du royaume. Destiné à protéger les créanciers par la publicité effective des hypothèques, l’édit souleva une vive opposition tant de la noblesse, qui préférait le secret à la sécurité afin de ne pas révéler au grand jour son endettement hypothécaire, que du notariat, qui craignait une mise en cause de ses prérogatives. L’édit fut temporairement suspendu dès l’année suivante, en avril 1674. Mais, pour la première fois dans l'histoire de la publicité foncière, Colbert met au premier plan la nécessaire sécurité juridique des transactions immobilières et du crédit Il faut rétablir la bonne foi qui est perduë, & assurer la fortune de ceux qui prêtent leur argent. Il faut aussi rétablir le crédit des particuliers qui est perdu sans ressources …Il faut faire voire clair à ceux qui vous secoureroient s'ils y trouvaient leur seureté. Il faut aussi ôter le moien à ceux qui veulent tromper les autres, de le pouvoir faire ….
Pour favoriser le commerce, Colbert développe encore les infrastructures : il fait améliorer les grandes routes royales et en ouvre plusieurs ; il fait relier la Méditerranée à l'Océan par le canal des Deux-Mers.
Il fait paver et éclairer Paris, embellit la ville de quais, de places publiques, de portes triomphales Portes St-Denis et St-Martin. On lui doit aussi la colonnade du Louvre et le jardin des Tuileries.
Avec son fils, Jean-Baptiste Colbert, marquis de Seignelay, il fait venir des villes hanséatiques des artisans, constructeurs, cordiers, pour installer des chantiers ou arsenaux de construction navale dans les principaux ports du royaume. Pour assurer le recrutement des équipages, il n'a pas recours, comme l'Angleterre, à la presse, ou enrôlement forcé des matelots de la marine marchande, mais à un nouveau procédé, appelé l'inscription maritime. En revanche, il demande aux juges de privilégier la condamnation aux galères, y compris pour le délit de vagabondage.
Il institue des compagnies commerciales : Compagnie des Indes Orientales Océan indien, Compagnie des Indes Occidentales Amériques, et Compagnie du Levant Méditerranée et Empire ottoman. Il est aussi à l'origine de la création de comptoirs : Pondichéry 1670 et de ce qui fut le début du peuplement en Nouvelle-France Amérique du Nord et encore l'île Bourbon.

Il pensait s'emparer des comptoirs hollandais du golfe de Guinée, particulièrement sur la Côte de l'Or Ghana aujourd'hui, mais ne mit jamais ce projet à exécution8.
Il s'oppose au secrétaire d'État de la Guerre, Louvois, jugé trop prodigue des fonds publics. Celui-ci intrigue contre lui auprès de Louis XIV à tel point que Colbert se trouve dans une position difficile quand il meurt le 6 septembre 1683, rue des Petits-Champs, laissant Claude Le Peletier lui succéder au poste de contrôleur général des finances.
Colbert donne un cadre juridique à l'exercice de l'esclavage dans les Antilles. Il élabore la première version du Code noir, promulgué par Louis XIV en 1685.
Tout en gérant les affaires de l'État, Colbert amasse une fortune personnelle considérable s'élevant à environ 4,5 millions de livres. C'est pourquoi le peuple, croyant voir dans cette fortune un signe de prévarication, insulte son cercueil. Il est enterré à Saint-Eustache, où sont conservées ses jambes tandis que le reste de sa dépouille est transféré dans les catacombes de Paris en 1787.
Ayant refusé de recevoir Louis XIV sur son lit de mort, officiellement parce que son état ne le lui permettait pas, il disait, selon ses proches : J'ai tout donné de moi au roi ; qu'il me laisse au moins ma mort et si j'avais fait pour Dieu tout ce que j'ai fait pour cet homme, je serais sauvé dix fois !.

Postérité de Colbert

Statue de Colbert par Gayrard fils, cour Napoléon du palais du Louvre.
Hommes illustres Louvre.
Il laisse l'image d'un excellent gestionnaire, même si les résultats économiques du règne peuvent paraître très discutables en raison des fortes ponctions causées par les dépenses militaires, les constructions et les largesses du roi. Il ne faut pas oublier que Louis XIV a encore régné 32 ans après la mort de Colbert : tant que le ministre fut aux affaires, les budgets ont été à peu près maîtrisés ; les déficits ne cessent de s'accumuler après lui.
Le terme de colbertisme souligne la part plus importante de l'intervention de l'État dans l'économie en comparaison des autres pays occidentaux.
Les manuels d'histoire du XXe siècle Mallet et Isaac ont forgé l'image populaire d'un homme entièrement dévoué à sa tâche et se frottant les mains de plaisir lorsqu'il était surchargé de travail.

Le clan Colbert Famille Colbert.

Le 13 décembre 1648, Jean-Baptiste Colbert épouse Marie Charron, fille d’un membre du conseil royal, sœur de Jean-Jacques Charron de Menars et cousine par alliance avec Alexandre Bontemps. Sa dot fut de 100 000 livres. Ensemble, ils eurent neuf enfants :
Jeanne-Marie 1650-1732 mariée à Charles-Honoré d'Albert de Luynes ;
Jean-Baptiste 1651-1690, marquis de Seignelay ;
Jacques-Nicolas 1654-1707, archevêque de Rouen ;
Antoine-Martin 1659-1689 ;
Henriette-Louise 1657-1733 mariée à Paul de Beauvilliers, marquis de Saint-Aignan ;
Jean-Jules-Armand 1664-1704, marquis de Blainville ;
Marie-Anne 1665-1750 mariée à Louis de Rochechouart, duc de Mortemart (neveu de Madame de Montespan), avec postérité dont notamment Talleyrand ;
Louis 1667-1745, comte de Linières, garde de la Bibliothèque du roi et militaire ;
Charles-Édouard 1670-1690, comte de Sceaux.
Après avoir débuté au sein du clan Le Tellier, Colbert devient lui aussi adepte du népotisme et décide de créer son propre clan en plaçant tous ses proches à des postes clés tel ses frères Charles et Nicolas ou son cousin germain, Charles Colbert de Terron. De fait, il devient un rival du clan Le Tellier et particulièrement du secrétaire d'État à la guerre, Louvois.
En 1657, il achète la baronnie de Seignelay dans l'Yonne, puis en 1670, la baronnie de Sceaux dans le sud de Paris. Il fait du domaine de Sceaux l'un des plus beaux de France grâce à André Le Nôtre qui dessine les jardins et à Charles Le Brun qui est chargé de toute la décoration tant des bâtiments que du parc.

Armoiries et devise
Blasonnement :
Coupé : D'or à une couleuvre ondoyante, en pal d'azur.
Commentaires : Blason de la famille Colbert. Armes parlantes en latin, couleuvre se dit coluber.
Devise : Pro rege, saepe, pro patria semper, en français : Pour le roi souvent, pour la patrie toujours.

Généalogie

Ascendance de Jean-Baptiste Colbert

Fonctions

Buste de Colbert par Antoine Coysevox.
de 1661 à 1665 Intendant des Finances
de 1661 à 1683 Surintendant des Postes
de 1661 à 1683 Surintendant des Bâtiments, arts et manufactures
de 1665 à 1683 Contrôleur général des Finances
de 1669 à 1683 Secrétaire d'État de la Maison du Roi
de 1669 à 1683 Secrétaire d'État de la Marine
de 1670 à 1683 Grand Maître des Mines et Minières de France
de 1671 à 1683 Surintendant des Eaux et Forêts

Ouvrages anciens

Courtilz de Sandras La Vie de Jean-Baptiste Colbert Ministre d'état sous Louys XIV Roy de France, Cologne, 1695
Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang, Jean-Baptiste Colbert dans Dictionnaire universel d’histoire et de géographie,‎ 1878

Ouvrages récents

Sur la France à l'époque de Louis XIV
Daniel Dessert, Argent, pouvoir et société au Grand Siècle, Paris, Fayard, .
Thierry Sarmant et Mathieu Stoll, Régner et gouverner : Louis XIV et ses ministres, Paris : Perrin, 2010.

Sur la famille Colbert

Jean-Louis Bourgeon, Les Colbert avant Colbert, Presses Universitaires de France, Paris, 2002 2e édition.
François de Colbert, Histoire des Colbert du xve au xxe siècle, Grenoble, 2000 'Histoire des Colbert du xve au xxe siècle', prix Hugo 2002 de l'Institut de France.
Luc-Normand Tellier, Face aux Colbert : les Le Tellier, Vauban, Turgot... et l'avènement du libéralisme, Presses de l'Université du Québec, 1987, 816 pages.Etexte
Sur Colbert
Daniel Dessert, Le Royaume de Monsieur Colbert 1661-1683, Paris, Perrin, 2007.
Olivier Pastré, La Méthode Colbert ou le patriotisme économique efficace, Paris, Perrin, 2006.
Philippe Minard, La Fortune du colbertisme, État et industrie dans la France des Lumières, Paris, Fayard, 1998.
Jean Villain La Fortune de Colbert, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 1994,
Jean Meyer, Colbert, Paris, Hachette, 1981.
Inès Murat, Colbert, Paris, Fayard, 1980.
François d'Aubert, Colbert, la vertu usurpée, Paris, Perrin, 2010.
Jacob Soll, The Information Master : Jean-Baptiste Colbert’s State Intelligence System, The University of Michigan Press, 2011.
Sur le département de la Marine
Jean-Philippe Zanco, Dictionnaire des Ministres de la Marine 1689-1958, Paris, S.P.M. Kronos, 2011.




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Posté le : 04/09/2015 17:23
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Alcide Charles Victor Marie Dessalines d'Orbigny
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Le 6 sept. 1802 naît Alcide Charles Victor Marie Dessalines d'Orbigny

à Couëron Loire-Inférieure, mort le 30 juin 1857 à Pierrefitte-sur-Seine Seine, naturaliste, explorateur, malacologue et paléontologue français, célèbre pour son voyage en Amérique du Sud et ses travaux en paléontologie.

En bref

Appartenant à une famille de scientifiques qui participa à la grande révolution scientifique du XIXe siècle, Alcide d'Orbigny est né à Couëron Loire-Atlantique. Jeune, il voyage à travers l'Amérique du Sud, qu'il explore de 1826 à 1834. Il se lance alors dans l'étude des fossiles ; son activité dans ce domaine est immense, surtout dans la description et l'identification de milliers d'espèces. On lui doit la connaissance de certains groupes peu connus alors, tel celui des foraminifères.
Il fut le premier titulaire de la chaire de paléontologie au Muséum. En 1840, il entreprend la description méthodique de tous les fossiles trouvés en France ; de là sortira la Paléontologie française. Vers 1849, dans un autre ouvrage, Prodrome de paléontologie stratigraphique, il ne recense pas moins de 18 000 espèces de fossiles. Ces études ont permis aux amateurs de déterminer plus facilement les fossiles, et ont beaucoup contribué à répandre le goût de la géologie et de la paléontologie.
Enfin, son cours de paléontologie stratigraphique dont les éléments essentiels sont dus à A. Brongniart a servi de base à la nomenclature des différents terrains avec leurs fossiles caractéristiques. Son frère Charles a également collaboré à son œuvre géologique par la publication de divers ouvrages : Description des environs de Paris 1838, Tableau général des terrains et principales couches qui constituent le Bassin parisien 1849, Description des roches composant l'écorce terrestre 1868.
D'Orbigny est mort à Pierrefitte-sur-Seine en 1857. Il était resté un partisan acharné de la théorie fixiste de Cuvier ; on peut même dire qu'il l'a exagérée dans une certaine mesure : il distingue en effet vingt-huit étapes successives au cours des temps géologiques et, à l'époque, l'échelle ne descend que jusqu'au Silurien ; pour lui, chacune de ces vingt-huit étapes possède ses fossiles distincts, et elle est séparée de l'époque précédente par un cataclysme qui détruit faune et flore ; l'histoire géologique ne serait donc que le résultat d'une suite de catastrophes et de créations. Jacques Philippon

Sa vie

Son père, Charles Marie d'Orbigny 1770-1856, est un médecin qui sert d’abord dans la marine française avant de se fixer et d’exercer à Couëron. Passionné d’histoire naturelle, il emmène souvent ses fils ramasser des coquillages sur le littoral de l’Atlantique et les initie à l’observation scientifique, notamment à l’aide de microscope, mais aussi au dessin. Son fils l’assiste à étudier des coquilles minuscules que sa presbytie l'empêche de voir correctement1. Deux de ses quatre fils choisiront une carrière en histoire naturelle : Alcide et son frère cadet Charles 1806-1876.

Les foraminifères

Au cours de son adolescence, il se prend de passion pour l’étude de minuscules coquilles connues pourtant depuis l’Antiquité mais classées, à tort, dans les Mollusques Céphalopodes : les foraminifères, nom qu’il leur donnera quelques années plus tard. C’est Félix Dujardin 1801-1860 qui déterminera plus tard, en 1835, la nature unicellulaire de ces organismes.
La famille d’Orbigny s’installe d’abord à Esnandes, en 1815, puis à La Rochelle en 1821. Alcide y fait des études classiques avant de venir à Paris en 1824. Dans la capitale, il complète sa formation en suivant les cours de Georges Cuvier 1769-1832 ainsi que d’Étienne Geoffroy Saint-Hilaire 1772-1844, d’Alexandre Brongniart 1770-1847, de Pierre André Latreille 1762-1833, de Henri-Marie Ducrotay de Blainville 1777-1850 et de Louis Cordier 1777-1861.

Il fait paraître en 1826, dans les Annales de sciences naturelles un travail qui est le fruit de ses observations sur les foraminifères intitulé Tableau méthodique de la classe des Céphalopodes décrivant plusieurs centaines d'espèces nouvelles et qui le fera remarquer dans le monde naturaliste. Il y présente environ 600 espèces, actuelles ou fossiles1. Durant sa vie, il recensera plus de 1 500 foraminifères, la plupart nouveaux. Il est ainsi considéré comme l’inventeur de la micropaléontologie. Outre cette première publication, il réalise, grâce à des sculptures dans de l’argile, des modèles en trois dimensions de certains spécimens. Des répliques en plâtre sont commercialisées1.

Son voyage en Amérique du sud

Ce travail remarquable attire sur lui l’attention des professeurs du Muséum national d'histoire naturelle et notamment Georges Cuvier 1769-1832. En 1825, il se voit confier une mission en Amérique du Sud afin de compléter les connaissances naturalistes de ce continent acquises depuis Alexander von Humboldt 1769-1859 et Aimé Bonpland 1773-1858 en Amérique équatoriale, ou Auguste de Saint-Hilaire 1779-1853 au Brésil. Le jeune d’Orbigny se passionne depuis longtemps par les récits de voyages comme ceux de Louis Antoine de Bougainville 1729-1811, de James Cook 1728-1779 ou de Nicolas Baudin 1754-1803. La ville de La Rochelle comptait aussi deux voyageurs illustres : John James Audubon 1785-1851 et Aimé Bonpland. Comme les autres naturalistes voyageurs envoyés par le Muséum, il apprend les techniques de naturalisation des spécimens et de la préparation des herbiers. Quelque temps avant de s'embarquer, il rencontre Alexander von Humboldt. Lui et d’autres attirent l’attention de d’Orbigny sur la faiblesse de la somme fournie par le Muséum pour l’expédition : 6 000 francs par an. Il obtient de François Victor Masséna, duc de Rivoli 1799-1863 la somme de 3 000 francs par an durant quatre ans.
Le voyage s'effectuera depuis le Brésil, l'Uruguay, jusqu'à l'Argentine, le Chili puis le Pérou et la Bolivie. Il embarque le 30 juin 1826, à bord de la corvette La Meuse : son voyage va durer sept années et sept mois.

Durant son voyage, il va collecter, observer, décrire dans tous les domaines de la zoologie aussi bien en invertébrés qu'en vertébrés, de la botanique, de l'anthropologie et de l'ethnologie. Les formidables collections qu'il rassemble sont expédiées directement au Muséum. Il rapporte ainsi les premiers poissons connus du Chili, des dizaines d'espèces de Crustacés, des centaines d'Oiseaux, des milliers de parts d'herbier... tandis qu'il décrit des centaines d'espèces de mollusques. Tout ce qu'il expédie est envoyé directement au Muséum pour étude et description éventuelle. Il décrira lui-même un grand nombre d'espèces. De très nombreuses espèces lui ont été dédiées comme en botanique, où 54 plantes portent son nom, sans compter le genre Orbignya.

Il embarque, fin 1833, à bord du Philanthrope et débarque en France le 24 janvier 1834.

Le retour en France

De retour en France, il consacre treize années, de 1835 à 1847, à la rédaction de ses mémoires, soit un ensemble de neuf tomes en onze volumes et 4 747 pages ainsi que de nombreuses cartes et 555 planches. Cette œuvre magistrale en fait l'une des plus importantes monographies jamais réalisées d'une région du monde. Charles Darwin 1809-1882 jugea l’œuvre comme un monument de la science du XIXe siècle. L’ouvrage connut un premier tirage de 500 exemplaires et sera réédité à plusieurs reprises.
Blainville, Étienne Geoffroy Saint-Hilaire.
Parti en juillet 1826, Alcide d'Orbigny ne revient en Europe qu'en février 1834. Durant son long voyage, il parcourt quelque 3 000 km du nord au sud et 3 600 d'est en ouest. Il remonte le Paraná, l'une des grandes voies d'eau de l'Amérique du Sud, chevauche dans la pampa entourant Buenos Aires, effectue la première véritable exploration scientifique de la Patagonie, se rend au Chili et, de là, en Bolivie. Il va passer trois ans dans ce pays plus étendu que la Bolivie actuelle et encore mal connu à l'époque : après avoir visité les environs de La Paz et la Bolivie andine, il redescend vers Santa Cruz de la Sierra, sur le versant atlantique de la Cordillère des Andes ; il se rend dans les anciennes missions jésuites et effectue diverses explorations qui tantôt le ramènent sur les hauteurs des Andes, tantôt le conduisent dans la forêt vierge tapissant les vallées humides du río Mamoré, où il est dévoré par les fièvres, ce qui le décide finalement à préparer son retour vers la France.
Il a affronté, durant son voyage, les attaques de pirates, d'Amérindiens en révolte et de bêtes sauvages, les tempêtes, le mal des montagnes, les piqûres d'insectes et les morsures de serpents, le froid glacial et le soleil brûlant des déserts, mais il a engrangé pour la science un riche butin. Il a collecté de très nombreux spécimens d'animaux et de plantes dont beaucoup étaient jusqu'alors inconnus. Il n'a pas seulement étudié la faune et la flore des pays visités, mais aussi les peuples, la géologie, le climat, la géographie. Le Voyage dans l'Amérique méridionale (1834-1847), ouvrage illustré en onze volumes, constitue la description la plus complète qui ait été faite jusqu'alors de l'Amérique du Sud. Il contient aussi la première carte d'ensemble du continent.
À partir de 1840, Alcide d'Orbigny s'oriente de plus en plus exclusivement vers la paléontologie. Ses deux ouvrages fondamentaux dans ce domaine sont Paléontologie française et Prodrome de paléontologie stratigraphique universelle des animaux mollusques et rayonnés. Comme George Cuvier, il s'attache à la théorie dite « des créations successives », selon laquelle les faunes auraient été détruites à la fin de chaque étage géologique (il n'en distingue, pour sa part, pas moins de vingt-sept) par de grandes catastrophes, les révolutions du globe. Cette théorie sera ruinée par la parution, en 1859, de l'Origine des espèces. Mais Alcide d'Orbigny l'ignorera, il a succombé deux ans plus tôt à une maladie de cœur.

Les collections rapportées sont riches de 9 000 espèces dont de nombreuses nouvelles espèces5 :

157 espèces de mammifères,
783 espèces d’oiseaux,
94 espèces de reptiles,
25 espèces d’amphibiens,
166 espèces de poissons,
718 espèces de mollusques,
4 834 espèces d’arthropodes,
17 espèces d’annélides,
163 espèces d’échinodermes,
81 espèces de foraminifères et
2 370 espèces de végétaux5.
En 1840, il entame sa Paléontologie française, monumentale monographie qui devait lui conférer une notoriété mondiale. Les volumes de cet ouvrage, malheureusement inachevé, seront publiés jusqu'en 1860, les dernières livraisons l'étant à titre posthume, représentant au total plus de 4 000 pages, 1 440 magnifiques lithographies et 2 800 espèces. Cette œuvre déjà immense ne devait être qu'un avant-goût de son projet bien plus audacieux intitulé Paléontologie universelle des animaux mollusques et rayonnés fossiles, dont seul le prodrome parut en trois volumes recensant 40 000 invertébrés qu'il ordonna et classa pour n'en retenir que 18 000.

De 1849 à 1852, il rédige dans un colossal ouvrage de 1 146 pages intitulé Cours élémentaire de paléontologie et de géologie stratigraphiques, dans lequel il donne une vision synthétique et extrêmement détaillée de la stratigraphie. Cet ouvrage fait suite à son Prodrome de paléontologie stratigraphique universelle.

Les stratotypes

Entre 1840 et 1852, au cours de la rédaction de sa Paléontologie française, de son Prodrome de paléontologie stratigraphique universelle et de son Cours élémentaire de paléontologie et de géologie stratigraphiques, il propose un découpage des temps géologiques, principalement pour les périodes Jurassique et Crétacé, en étages stratigraphiques basés sur des stratotypes ou coupes géologiques de référence. Il prend ses exemples en France et en Angleterre pour définir ces étages.
Pas moins de neuf des étages géologiques qu'il a inventés sont aujourd'hui officiellement reconnus par la Commission stratigraphique internationale et l'Union internationale des sciences géologiques UISG.

Blainville, Étienne Geoffroy Saint-Hilaire.

Pour la période Jurassique, 5 étages sur un total de 11 :
Sinémurien de Semur-en-Auxois Côte d'Or,
Toarcien de Thouars Deux-Sèvres,
Bajocien de Bayeux Calvados,
Callovien de Kellaways Bridge dans le Wiltshire anglais,
Kimméridgien de Kimmeridge dans le Dorset anglais ;
Pour la période Crétacé, 4 étages sur un total de 12 :
Aptien d'Apt Vaucluse,
Albien de Alba, la rivière Aube,
Cénomanien en latin Cenomanum du Mans Sarthe,
Turonien de Tours Indre-et-Loire;

Son héritage

À la mort d'Alcide d'Orbigny est créé un Comité de la paléontologie française pour continuer son œuvre. C'est ainsi que Louis Édouard Gourdan de Fromentel 1824-1901, Gustave Cotteau 1818-1894, Perceval de Loriol 1828-1908, Louis Charles Joseph Gaston de Saporta 1823-1895 ou encore Henry Testot-Ferry 1826-1869, etc. rédigèrent dans le même esprit 16 nouveaux volumes de la Paléontologie française. Cet ensemble 25 volumes au total reste fondamental et toujours largement utilisé aujourd'hui par les paléontologues du monde entier.
Alcide d'Orbigny a décrit plus de 3 000 espèces dont 2 500 sont nouvelles. Sa collection paléontologique, déposée au Muséum national d'histoire naturelle, est évaluée à 14 000 espèces pour un total de 100 000 spécimens.
Des dizaines d'espèces animales vivantes ou fossiles ont été nommées en l'honneur d'Alcide d'Orbigny. Par exemple :
en 1841, Duméril et Bibron créent une espèce sud-américaine d'amphibien de la famille des Bufonidae : Rhinella dorbignyi ;
en 1982, les zoologistes Julio Rafael Contreras et Andrés Oscar Contreras, lui rendent hommage en nommant une nouvelle espèce de rongeur argentin : Ctenomys dorbignyi.

Autres hommages

Depuis 1997, un lycée porte son nom dans la commune de Bouaye Loire-Atlantique. Il a aussi donné son nom au lycée français de La Paz Bolivie ainsi qu'à une station de la ligne 5 du tramway d'Île-de-France. Une rue de La Rochelle longeant le Jardin des plantes porte son nom.


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Posté le : 04/09/2015 17:21
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Julien Green
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Le 6 septembre 1900 à Paris 17e naît Julien Green

né Julian Hartridge Green, mort à 97 ans, le 13 août 1998 à Paris 7e, écrivain américain de langue française, un des rares auteurs à avoir été publié dans la Bibliothèque de la Pléiade de son vivant.
Ses romans Mont-Cinère, 1926 ; Adrienne Mesurat, 1927 ; Un mauvais lieu, 1977 ; les Pays lointains, 1987 ; les Étoiles du Sud, 1989 ; Dixie, 1995, son théâtre Sud, 1953 et son Journal à partir de 1938 expriment sa constante recherche de la pureté, à travers les deux fascinations de la grâce mystique et de la pesanteur charnelle. L'ensemble de son œuvre, où l'enfance tient une place privilégiée, reflète son amour de la langue le Langage et son double, 1985.Académie française, 1971.


En bref

" Courage, Green ! Votre œuvre est bonne." En 1926, Georges Bernanos, dont Sous le soleil de Satan venait d'assurer la notoriété, tenait, par cet encouragement paru dans Les Nouvelles littéraires, à faire connaître le premier roman d'un débutant, Mont-Cinère, qu'il trouvait « marqué du signe de la vérité. En 1998, le même Green est mort connu et reconnu, après une suite d'œuvres impressionnante. D'exceptionnelles consécrations ont accompagné son parcours : il fut le premier étranger à entrer à l'Académie française, où il succéda à Mauriac en 1972 ; la même année, commença la publication de ses Œuvres complètes dans la Bibliothèque de la Pléiade ; il est, de plus, le seul écrivain à avoir vu paraître l'album annuel sur lui-même que cette prestigieuse collection consacre à un de ses auteurs et à avoir pu y collaborer, quelques mois avant sa mort.
Que de données complexes déterminent la trajectoire de Julien Green ! Américain ? Oui, mais né, en 1900, à Paris, où s'étaient fixés ses parents, loin du Sud, marqués par la défaite de la guerre de Sécession, patrie perdue dont ils transmirent le culte à leurs nombreux enfants, surtout peut-être au petit Julien, le benjamin. Écrivain français ? Oui encore, et des plus grands, mais resté citoyen américain, bien qu'il n'ait vécu loin de Paris, sa patrie de naissance et de langue, que pendant huit ans : trois années, passées à l'université de Virginie, offertes par un de ses oncles, de 1919 à 1922, puis cinq années d'attente et d'angoisse pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans sa vie morale et spirituelle également, Green fut voué aux partages et aux divisions, aux dépassements et aux conciliations. Élevé dans la religion anglicane par une mère fervente, il se convertit au catholicisme quelques mois après la mort de celle-ci, survenue en décembre 1914. Après un premier livre ardent, Pamphlet contre les catholiques de France 1924, il renonça aux pratiques religieuses, dont le détournaient des hantises charnelles, de nature homosexuelle, mais en gardant en lui le besoin du divin. De la même façon, son retour à l'Église, en 1939, n'abolit pas les autres facettes de sa nature.
Ses compositions romanesques, son écriture, volontairement conventionnelles, rendent le réel sulfureux : l'angoisse surgit du quotidien, la cruauté de l'inoffensif et la grâce des ténèbres. Dans Mont-Cinère 1926, la haine et la folie mènent la danse comme dans Adrienne Mesurat 1927. Les mêmes obsessions, les mêmes soubresauts, aux confins de la psychologie et de la métaphysique, du mysticisme et de la débauche, se retrouvent dans Léviathan 1929 ou dans Épaves 1934. Ce regard d'ombre, qui mêle démence et désir, pèse sur les Histoires de vertige écrites de 1921 à 1932, parues en 1984. La mort est la réalité vraie du Visionnaire 1934, tandis que Minuit 1936 accentue le glissement du réalisme vers l'invisible et le fantastique. Varouna 1940 et Si j'étais vous 1947 font la part du bien et de la souillure. Moïra 1950 reprend le thème du combat de la chair et de la foi. La dimension pascalienne de l'œuvre se retrouve dans le Malfaiteur 1956, Chaque homme dans sa nuit 1960, l'Autre 1971, Un mauvais lieu 1977, les Étoiles du Sud 1989 : chacun de ces romans est celui d'un être jeté hors du chemin commun et contraint à la découverte de soi. Ce brûlant décapage, cette sensation de l'absurde à travers le tragique sont aussi les constantes du théâtre de Green : Sud 1953 est le drame d'un lieutenant homosexuel. Afin d'échapper à la souffrance d'une passion impossible, le héros provoque en duel l'être aimé et se laisse tuer. Folie ou noblesse de ce choix, qu'importe, semble dire l'auteur : Il a cherché la mort. Il la voulait de toutes ses forces. Il l'a trouvée. Suivront l'Ombre 1956, l'Automate 1985.
Green a publié des livres sur sa jeunesse marquée par une éducation puritaine Partir avant le jour, 1963 ; Mille Chemins ouverts, 1964 ; Terre lointaine, 1966 ; Jeunesse, 1974, tandis que les seize tomes de son Journal, des Années faciles 1976 à Pourquoi suis-je moi ? 1996, donnent une suite à ces confessions. Après vingt-cinq ans passés à l'Académie française, il la quitte et, en 1997, publie un texte, écrit en 1922, Dionysos ou la chasse aventureuse. Son œuvre, à plusieurs voix le Langage et son double, 1985, est l'évocation d'une âme étonnée d'être aussi un corps. Le style, d'une simplicité aisée, donne l'apparence de la clarté à l'expression de sentiments complexes. Sa limpidité illusoire rend sensible la profondeur des tourments affectifs et spirituels de l'écrivain.

Sa vie

Julien Green est né à Paris, de parents américains, descendant du côté de sa mère du sénateur et représentant démocrate de la Géorgie au congrès américain Julian Hartridge 1829-1879 et dont Julien Green porte le nom Green a été baptisé Julian ; l'orthographe a été changée en Julien par son éditeur français dans les années 1920. Il grandit en France dans la commune d'Andrésy, dans les Yvelines.
Après la mort de sa mère, une protestante pieuse, il se convertit au catholicisme en 1916, à la suite de son père et de toutes ses sœurs, ainsi qu'il le raconte dans Ce qu'il faut d'amour à l'homme, son autobiographie spirituelle. Alors âgé de seulement 17 ans, Julian Green réussit cependant à rejoindre les rangs de la Croix-Rouge américaine puis est détaché dans l’artillerie française en 1918 en tant que sous-lieutenant. Démobilisé en mars 1919, il se rend pour la première fois aux États-Unis en septembre de la même année et effectue trois ans d'études à l’université de Virginie, où il écrit son premier livre en anglais, avant de revenir vivre en France.
À Paris, il peut vivre sa vie de couple homosexuel avec Robert de Saint-Jean et s'essaie à une carrière de peintre mais la reconnaissance obtenue en 1927 auprès de la NRF l'oriente définitivement vers celle d'un écrivain majeur de la littérature française du xxe siècle.
En juillet 1940, après la défaite de la France, il retourne en Amérique. En 1942, il est mobilisé et envoyé à New York pour servir au Bureau Américain de l'information de guerre. De là, cinq fois par semaine, il s'adressait à la France dans l'émission de radio Voice of America, travaillant entre autres avec André Breton. Green revint en France juste après la Seconde Guerre Mondiale.
Il est élu à l'Académie française le 3 juin 1971, au fauteuil 22, succédant à François Mauriac. C'est le premier étranger accédant à cet honneur. Le président de la République Georges Pompidou lui propose en 1972 la nationalité française mais l'académicien décline la faveur. La réception officielle a lieu le 16 novembre 1972.
Julien Green est le père adoptif de l'écrivain Éric Jourdan qui lui resta filialement fidèle jusqu'à sa mort. En 1994, selon Éric Jourdan, Green décide de vivre à Forlì, en Italie, mais sa santé fragile ne lui permet pas de mettre le projet à exécution.
Il est enterré le 21 août 1998 à Klagenfurt en Autriche dans l'église Saint Egid. Ému par une statue ancienne de la Vierge Marie lors d'une visite en 1990, l'écrivain avait émis le désir d'être inhumé dans une des chapelles de cette église, l’Église de France ayant refusé son inhumation en l’église d'Andrésy Yvelines.

Analyse de l'œuvre

Toute l'œuvre de Green, qui fut profondément marquée tant par son homosexualité que par sa foi catholique, est dominée par la question de la sexualité et celle du bien et du mal.
La plupart des livres de ce catholique pratiquant traitent des problèmes de la foi et de la religion ainsi que de l'hypocrisie qui leur est liée. Plusieurs de ses livres ont traité des États-Unis du Sud, l'auteur se caractérisant dans ses écrits comme un Sudiste. Il a hérité ce patriotisme de sa mère, qui venait d'une famille distinguée du Sud. Quelques années avant la naissance de Julien, un choix de postes en Allemagne ou en France fut proposé au père de Julien qui était banquier. La mère de Julien appuya le choix de la France en raison du fait que les Français étaient aussi un peuple fier, récemment vaincus dans la guerre et nous nous comprendrons mutuellement, référence à la défaite française de 1871 dans la guerre franco-prussienne.
En France, de son vivant et encore aujourd'hui, la célébrité de Julien Green repose non seulement sur ses romans, mais aussi sur son journal, publié en dix-neuf volumes qui couvrent la période de 1919 à 19984 . Ce Journal offre une chronique de sa vie littéraire et religieuse, et surtout un panorama unique de la scène artistique et littéraire à Paris sur près de 80 ans. Le style de Green, austère et résolument attaché à l'emploi du passé simple – quasiment abandonné par les auteurs qui lui sont contemporains –, trouvera la faveur de l'Académie française dont il sera membre.
Son roman Si j'étais vous a inspiré la psychanalyste Mélanie Klein.

L'écriture du fantastique

Quant à son œuvre, multiforme et contrastée, la perspective chronologique reste celle qui permet le mieux de la saisir sans la trahir. Green a tant parlé de lui-même et apporté tant d'éclaircissements sur la genèse de ses romans, surtout à la fin de sa longue vie, qu'il est difficile de concevoir l'impression d'aérolithes qu'ils ont donnée lors de leur publication. Rendons aux premiers parus, Mont-Cinère 1926, Le Voyageur sur la terre 1926, Adrienne Mesurat 1927, Léviathan 1929, leur pouvoir de choc, dû à la force des situations, à la dureté du trait. Des passions forcenées y jettent implacablement les êtres les uns contre les autres et les vouent à l'autodestruction. Ensuite, la frénésie diminue, faisant place à l'insolite. Dans L'Autre Sommeil 1930 et dans Épaves 1932, situés dans un Paris envoûtant et non plus dans de petites villes d'Amérique ou de France, la rêverie l'emporte sur la réalité, l'inaccompli remplace la violence ; le héros de L'Autre Sommeil rêve sa vie et vit ses rêves, ceux du Visionnaire 1934, de Minuit 1936, de Varouna 1940, de Si j'étais vous... 1947 quittent le quotidien pour des aventures fantastiques, au sens plein du terme. Comment ne pas aimer, jusque dans certaines de leurs faiblesses, des livres si originaux ? Et comment ne pas admirer la rigueur d'un jeune auteur qui refuse d'exploiter la veine de ses premiers succès ? Pour trouver la vérité il faut travailler contre soi-même, contre sa pente, contre les facilités que donne l'habitude, contre le succès, contre le public ; il faut supprimer toutes les pages où l'amusement du lecteur est devenu le seul objet en vue. Tel est alors le credo artistique de Julien Green, consigné dans son Journal 7 février 1931.

L'écriture du secret et de l'aveu

Ce Journal, Green a commencé à le publier dès 1938. Les pages des premiers volumes sont devenues plus nombreuses lors des rééditions, mais le tri est resté sévère, écartant surtout les aventures charnelles et, plus tard, les expériences mystiques. Dans ses pages intimes comme dans ses romans, Green reste l'écrivain du secret. Il note « la couleur du temps anecdotes, vie quotidienne, événements historiques, il savoure les heures claires où se passent tant de choses et si peu de faits, il cherche à « emprisonner avec des mots l'instant qui passe 17 février 1943. Si intéressants que soient les passages concernant les lectures, les voyages, les amitiés et l'élaboration des œuvres, les plus personnels évoquent soit l'enfance de Green, soit ses déchirements entre l'aspiration à une vie exclusivement spirituelle et les exigences du désir. « Des deux personnages qui nous habitent les deux hommes dont parle saint Paul, chacun veut accomplir sa destinée et arriver à une sorte de perfection, au plus haut point de perfection qu'il lui soit donné d'atteindre, mais il est nécessaire pour cela que l'un de ces personnages tue l'autre, car il ne peut y avoir entre eux d'accord durable 9 avril 1944.
Suppressions et réticences limitent le Journal au point que, pour dire sa vérité, pour savoir qui il est, Green, dans sa maturité, trouve plus satisfaisants les romans et les drames à partir des années 1950, il écrit aussi pour le théâtre, vers lequel Louis Jouvet souhaitait le pousser depuis longtemps. Un descellement s'y opère. L'obsession homosexuelle y déploie son cortège de fantasmagories, de frôlements, d'espoirs fous et de désespoirs sans recours. Dans Sud 1953, le lieutenant Ian, à la veille – au sens propre – de la guerre de Sécession, provoque en duel celui qu'il aime pour se faire tuer par lui ; dans ce drame, comme dans des romans aussi prenants que Moïra 1950 et Chaque homme dans sa nuit 1960, le protagoniste, à la fois obsédé et obsédant, suscite plus ou moins l'amour de tous ceux qui l'approchent, hommes et femmes. Mais on y trouve aussi des amours partagées par exemple entre Wilfred et Phœbé, dans Chaque homme dans sa nuit, séparés, il est vrai, par l'obstacle de l'adultère, des conversions salvatrices comme celle d'Élisabeth dans L'Ennemi, 1954 et, surtout, des êtres dont la vie se fonde sur l'amour pour Dieu comme Joseph Day, le protestant fanatique de Moïra, meurtrier par pureté, ou comme Wilfred, déjà nommé, fier d'être catholique romain, qui, avant de mourir, pardonne à son assassin. Les problèmes vécus par Green reçoivent une expression bouleversante ; ainsi, l'analyse du Journal citée à la fin du paragraphe précédent devient ce cri déchirant de Joseph Day dans Moïra : Je désire horriblement ce péché que je ne commets pas ... J'ai quelquefois l'impression d'être séparé d'avec ma chair, et c'est comme s'il y avait en moi deux personnes dont l'une souffrirait et l'autre regarderait souffrir.
Un écrivain aussi soucieux de se comprendre devait aboutir à l'autobiographie. Il présente sa vie jusqu'à la dix-septième année dans Partir avant le jour 1963, son engagement dans l'armée américaine en Europe de 1917 à 1919 dans Mille Chemins ouverts 1964, ses années d'études en Virginie de 1919 à 1922 dans Terre lointaine 1966, son retour à Paris, sa prise et ses crises de conscience jusqu'à sa rencontre en 1924 avec Robert de Saint Jean, la plus constante affection de sa vie, dans Jeunesse 1974. Si Green laisse le plus possible la parole à l'enfant, puis au jeune homme dans leur découverte de la vie, émerveillée et angoissée, l'adulte mûri par l'expérience écrit la quête. Les deux premiers livres veulent retracer le passage de Dieu dans la vie d'un homme, dresser parfois « une mise en accusation . Mais rien de tel dans Terre lointaine, où l'auteur prend d'innombrables lecteurs comme confidents du grand amour de sa jeunesse, alors qu'il n'avait pas osé l'avouer à l'étudiant virginien qui l'avait inspiré : Je ne le renie pas, j'en suis fier ... Quand je n'aurais écrit ce livre que pour parler de lui, je ne le regretterais pas. Dans Jeunesse, le récit l'emporte sur l'examen de conscience.
Avec L'Autre 1971, Julien Green prouve que la délivrance autobiographique ne le détourne pas de la fiction. Ce roman est même, à cette époque, le plus long qu'il ait écrit. Sa composition atteint presque la virtuosité, mais aux dépens de l'intensité. Chaleur et tremblement persistent, mais avec une coloration un peu édifiante.

Le choix de l'isolement

Au cours du dernier quart du siècle, Green va se montrer étonnamment actif, bien qu'il perde les deux personnes liées à lui depuis ses débuts littéraires : sa sœur Anne en 1979 et Robert de Saint Jean, l'ami des bons et des mauvais jours, en 1987. Après cinquante-six ans de fidélité aux éditions Plon, le voici au Seuil, qu'il laisse bientôt pour Fayard, avec lequel il rompt en 1998 pour rejoindre Gallimard. Il quitte l'Académie française, songe même à abandonner la France pour l'Italie, ou pour l'Autriche où il sera enterré, ou pour quelque autre pays, car il voyage avec acharnement, désireux de connaître de nouveaux lieux, ou de revoir ceux qu'il a aimés. Plus il vieillit, plus il publie, parfois dans des genres nouveaux : par exemple, Frère François (1983, biographie détaillée de saint François d'Assise, l'homme qu'il a toujours le plus admiré, et, après quelques pièces et récits qui prolongent sans l'égaler sa production antérieure, un roman-fleuve inattendu formé par Les Pays lointains 1986, Les Étoiles du Sud 1989 et Dixie 1995, où revit toute une préhistoire familiale autour de la guerre de Sécession. Que de surprises pour ses fidèles ! Lui qui écrivait difficilement cinquante lignes par jour, il écrit facilement en peu de temps des milliers de pages ! Lui qui regrettait que l'inspiration de Dostoïevski et de Dickens baisse quand ils multiplient les personnages, il se lance dans une fourmillante chronique où pullulent bals et banquets, où une histoire de pirates se glisse entre des remariages, où le mélodramatique et la prolixité remplacent le tragique et la densité !
Green reste égal à lui-même dans son Journal, particulièrement émouvant quand il se recueille lors de l'anniversaire, chaque année plus éloigné, de la mort de sa mère, dont il dit, après quatre-vingts années de séparation, qu'elle est la personne qui a le plus compté dans sa vie. Rédigé à partir de 1919, ce Journal couvre presque la totalité du XXe siècle, ce qui lui vaut une place à part dans la littérature. Comment résumer les traits qu'il donne à la figure de Green ? Dans le paysage littéraire du XXe siècle, c'est un auteur isolé, et qui veut rester isolé. Il a fréquenté Malraux, Cocteau, Mauriac, surtout Gide, et plus encore Maritain, mais a toujours refusé de s'engager, aussi bien du côté de Gide avant 1939, que du côté des écrivains catholiques après son retour à l'Église. Green a dès sa jeunesse cherché passionnément à savoir qui il était ; à plus de quatre-vingt-dix ans, il considère toujours cette question comme la plus importante pour lui ; le dernier tome de son Journal s'intitule même Pourquoi suis-je moi ? demande déjà lancée par Ian dans Sud et, avant lui, par Julien Sorel dans Le Rouge et le Noir. Hanté par le monde invisible, il est aussi infiniment touché par la beauté du monde sensible ; au titre du tome VIII, Vers l'invisible, répond le titre du tome XI, La Terre est si belle... Grave et tourmenté, il fait souvent aussi preuve d'humour : J'ai parfois le sentiment de vivre dans un roman de Julien Green et mon inquiétude croît de jour en jour 28 août 1993. Il ne cesse de se dire double ou deux, mais on peut lui appliquer une remarque de Nina Berberova dans C'est moi qui souligne : La personnalité soi-disant coupée en deux constitue en fait, au plus profond d'elle-même, une unité organique bipolaire.
Green est aussi un auteur isolé dans le domaine de la forme. La transparence de son style, sa simplicité, sa pureté indémodable le distinguent d'autres grands écrivains tels que Bernanos ou Mauriac, Malraux ou Sartre, immédiatement reconnaissables par une couleur, un accent, des partis pris. On pourrait dire que le style de Green excelle avant tout par l'absence de caractérisation, si cette formulation n'était trop restrictive et négative, alors qu'il s'agit de définir positivement une limpidité radieuse.
Dans les préfaces tardivement ajoutées à ses romans, Green tire ceux-ci, comme dans les derniers volumes du Journal, vers une interprétation autobiographique. Or Adrienne Mesurat et Joseph Day, le héros de Moïra, ses deux personnages préférés et on ne saurait lui donner tort, mais aussi ceux de Léviathan, de Minuit et de Chaque homme dans sa nuit résistent à toute interprétation réductrice, fût-elle de leur créateur. C'est d'ailleurs parce que les personnages créés par Green vivent une existence autonome que le plus profond de lui-même continue à vivre en eux. Jean Sémolué

Postérité de l'œuvre

Même si Green écrivait principalement en français, il a aussi écrit quelques ouvrages en anglais puisqu'il était parfaitement bilingue. Il a aussi traduit certaines de ses propres œuvres en anglais. Quelques-unes de ses traductions sont publiées dans Le langage et son double, en édition bilingue présentant le texte anglais en regard du texte français, ce qui facilite grandement la comparaison directe. Cependant, l'écrivain reste largement inconnu dans le monde anglo-saxon.
Jusqu'à présent, trois de ses ouvrages ont été adaptés au cinéma : Léviathan 1962, dont il a écrit lui-même le script, en est le plus connu ; Adrienne Mesurat 1953 et La Dame de pique 1965 sont également tirés de son œuvre.
L'ensemble des manuscrits et de la correspondance de Julien Green en tout cas, une cinquantaine de manuscrits autographes majeurs ont été mis en vente et dispersés par son fils adoptif le 27 novembre 2011 à Genève.

Récompenses

Son œuvre a été récompensée par de multiples prix, notamment :

Le Prix Prince-Pierre-de-Monaco, en 1951.
Le Grand Prix national des Lettres, en 1966.
Le Grand Prix de Littérature de l'Académie française, en 1970.
Le Grand Prix de littérature de Pologne, en 1988.
Le Prix Cavour, grand prix de littérature italien, en 1991.

Œuvres

Journal en dix-neuf volumes, 1919-1998, Plon, Le Seuil, Fayard, Flammarion, Paris, 1938-2006.
Pamphlet contre les catholiques de France, sous le pseudonyme de Théophile Delaporte, impr. de Darantière, Dijon, 1924.
Mont-Cinère roman, Plon-Nourrit et Cie, Paris, 1926.
Adrienne Mesurat roman, Plon, Paris, 1927.
Les Clefs de la mort, La Pléiade, Paris, 1927.
Suite anglaise, Les Cahiers de Paris, Paris, 1927.
Le Voyageur sur la terre, éditions de la Nouvelle Revue française, Paris, 1927, puis Le Livre de Poche, 1965 couverture du peintre Claude Schürr.
Léviathan roman, Plon, Paris, 1929.
L'autre sommeil roman, Gallimard, Paris, 1931.
Épaves roman, Plon, Paris, 1932.
Le Visionnaire roman, Plon, Paris, 1934.
Minuit roman, Plon, Paris, 1936.
Les Années faciles 1926-1934 journal I, Plon, Paris, 1938.
Derniers beaux jours 1935-1939 journal II, Plon, Paris, 1939.
Varouna roman, Plon, Paris, 1940.
Memories of Happy Days Souvenirs des jours heureux, en anglais, 1942
Devant la porte sombre 1940-1943 journal III, Plon, Paris, 1946.
Si j'étais vous roman, Plon, Paris, 1947.
L'Œil de l'ouragan 1943-1945 journal IV, Plon, Paris, 1949.
Moïra roman, Plon, Paris, 1950.
Le Revenant 1946-1950 journal V, Plon, Paris, 1951.
Sud théâtre, théâtre de l'Athénée, Paris, 1953.
L'Ennemi théâtre, théâtre des Bouffes-Parisiens, Paris, 1954.
Le Miroir intérieur 1950-1954 journal VI, Plon, Paris, 1955.
Le Malfaiteur roman Plon, Paris, 1956.
L'Ombre théâtre, théâtre Antoine, Paris, 1956.
Le bel aujourd'hui 1955-1958 journal VII, Plon, Paris, 1958.
Chaque Homme dans sa nuit roman Plon, Paris, 1960.
Partir avant le jour autobiographie, 1900-1916, Grasset, Paris, 1963.
Mille Chemins ouverts autobiographie, 1916-, Grasset, Paris, 1964.
Terre lointaine autobiographie, 1919-1922, Grasset, Paris, 1966.
Vers l'invisible 1958-1967 journal VIII, Plon, Paris, 1967.
L'Autre roman, Plon, Paris, 1971.
Ce qui reste du jour 1966-1972 journal IX, Plon, Paris, 1972.
Jeunesse autobiographie, Plon, Paris, 1974.
La Nuit des fantômes, Plon, Paris, 1976.
La Bouteille à la mer 1972-1976 journal X, Plon, Paris, 1976.
Le mauvais lieu roman, Plon, Paris, 1977.
Ce qu'il faut d'amour à l'homme essai, Plon, Paris, 1978.
Demain n'existe pas théâtre, 1979.
L'automate théâtre, 1979-1980.
La Terre est si belle… 1976-1978 journal XI, Le Seuil, Paris, 1982.
Frère François, Le Seuil, Paris, 1983.
La Lumière du monde 1978-1981 journal XII, Le Seuil, Paris, 1983.
Paris, Champ Vallon, Paris, 1984.
Le Langage et son double, Éditions de la Différence, Paris, 1985.
Villes, Éditions de la Différence, Paris, 1985.
Jeunes Années, autobiographie en 4 volumes, 1985.
Les Pays lointains roman, Dixie I, Le Seuil, Paris, 1987.
L'Arc-en-ciel 1981-1984 journal XIII, Le Seuil, Paris, 1988.
Les Étoiles du sud roman, Dixie II, Le Seuil, Paris, 1989.
Liberté chérie, Le Seuil, Paris, 1989.
L'Expatrié 1984-1990 journal XIV), Le Seuil, Paris, 1990.
L'Homme et son ombre, Le Seuil, Paris, 1991.
Ralph et la quatrième dimension, Flammarion, Paris, 1991.
L'Avenir n'est à personne 1990-1992 journal XV, Fayard, Paris, 1993.
On est si sérieux quand on a 19 ans journal 1919-1924, Fayard, Paris, 1993.
L'étudiant roux théâtre, 1993.
Dixie roman, Dixie III, Le Seuil, Paris, 1994.
Dionysos Édition originale, 7 eaux-fortes de Robert Clévier. 70 pages. Fayard-L’Atelier Contemporain, 1994.
Pourquoi suis-je moi ? 1993-1996 journal XVI, Fayard, Paris, 1996.
Dionysos ou La chasse aventureuse : poème en prose, Fayard, Paris, 1997.
Jeunesse immortelle essai, Gallimard, Paris, 1998.
En avant par-dessus les tombes 1996-1997 journal XVII, Fayard, Paris, 2001.
Le grand large du soir 1997-1998 journal XVIII, Flammarion, Paris, 2006.
Souvenirs des jours heureux, Flammarion, Paris, 2007.
L'Inconnu et autres récits, Fayard, Paris, 2007

Bibliographie critique

Carole Auroy, Julien Green : le miroir en éclats : étude sur l'autobiographie, Paris, Cerf, coll. Litterature,‎ 30 septembre 2000, 173 p.
Philippe Derivière, Julien Green : les chemins de l'errance, Le Roeulx, Talus d'approche,‎ 1994
Marc Eigeldinger, Julien Green et la tentation de l'irréel, Éditions des Portes de France, Paris, 1947.
Jean-Laurent Prévost, Julien Green ou l'âme engagée, Vitte, 1960
Yves Floucat, Julien Green et Jacques Maritain. L'amour du vrai et la fidélité du cœur, Paris, Éditions Pierre Téqui, 1997.
Jean-Claude Joye, Julien Green et le monde de la fatalité, Arnaud Druck, Berne, 1964.
Melanie Klein, "L'identification" Sur un roman de Julien Green : Si j'étais vous. in "Envie et gratitude". Paris, Gallimard-Tel, 1978.
(en) Michael Dwyer, Julien Green : a critical study, Dublin, Ireland Portland, OR, Four Courts Press,‎ 1997 .
Annette Tamuly, Julien Green à la recherche du réel : approche phénoménologique, Naaman, Sherbrooke Canada, 1976.
Wolfgang Matz, Julien Green, le siècle et son ombre. Traduit de l'allemand. Gallimard-Arcades, 1998.
Louis-Henri Parias, Julien Green, corps et âme. Fayard, 1994
Valérie Catelain, Julien Green et la voie initiatique, Bruxelles, Le Cri Académie royale de langue et de littérature françaises,‎ 2006.
Anne Green, Mes jours évanouis, Paris, le Livre de poche,‎ 1974.
Noël Herpe, L’irrationnel chez François Mauriac et chez Julien Green, no 15 des "Cahiers Mauriac", Grasset, 1988. “François Mauriac et Julien Green, biographes de leur enfance”, no 17 des "Cahiers Mauriac", Grasset, 1990. “Moïra de Julien Green ou l’Enfer de la pureté”, no 20 de "La Licorne", Université de Poitiers, 1991. “Julien Green et le théâtre”, La Nouvelle Revue française, avril 1995.

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Le 6 septembre 1757 naît Gilbert du Motier, marquis de La Fayette

dit La Fayette, au château de Chavaniac, paroisse de Saint-Georges-d'Aurac dans la province d'Auvergne, actuellement Chavaniac-Lafayette dans la Haute-Loire et mort à 76 ans, le 20 mai 1834 à Paris, ancien 1er arrondissement aristocrate d'orientation libérale, officier et homme politique français, qui a joué un rôle décisif aux côtés des Américains dans leur Guerre d'indépendance contre le pouvoir colonial britannique, ainsi que dans l'émergence en France d'un pouvoir royal moderne, avant de devenir une personnalité de la Révolution française jusqu'à son émigration, son arrestation et sa mise en prison pour cinq ans en 1792, puis un acteur politique majeur des débuts de la monarchie de Juillet. Surnommé le héros des deux mondes, il est l'un des huit citoyens d'honneur des États-Unis d'Amérique. Homme politique et militaire de la famille Motier de La Fayette, Il fait allégeance au Royaume de France et aux États-Unis. Son arme est la Cavalerie, la Garde nationale, son Grade est Major-général, Lieutenant général, Général de division de 1775 – 1830. Il participe aux Conflits, de la Guerre d'indépendance des États-Unis, des Guerres de la Révolution. Il assure le commandement des Troupes de la américaines, dont la division des Virginiens, Dragons du roi, puis brigade d'infanterie, Garde nationale, de l'armée du Nord, de la garde nationale en 1831. Ces faits d'armes sont : Bataille de Brandywine Bataille de Barren Hill, Bataille de Gloucester, Bataille de Monmouth, Bataille de Rhode Island, Bataille de Yorktown
Il reçoit les distinctions suivantes : Ordre de Cincinnatus , Chevalier de Saint-Louis. Hommages Citoyen d'honneur de plusieurs états après 1781, Citoyen d'honneur des États-Unis d'Amérique, son nom est gravé sous l'arc de triomphe de l'Étoile 3e colonne
Après la révolution de 1789, La Fayette décide de signer tous ses courriers d'un Lafayette en un seul mot, en réaction contre le système nobiliaire. C'est aussi la graphie utilisée par ses contemporains jusqu'à sa mort.

En bref

Héros de trois révolutions : celle d'Amérique, celle de 1789, celle de 1830, La Fayette est issu d'une vieille famille noble d'Auvergne, et participe à la guerre d'Indépendance de l'Amérique. À son retour en 1779, héros du jour, il s'efforce d'allier la grâce aimable d'un grand seigneur d'Ancien Régime à une simplicité toute républicaine rapportée d'Amérique. À l'Assemblée des notables en 1787, il conseille l'adoption de l'édit sur les protestants. Un des principaux animateurs de la Société des Trente, il est élu député de la noblesse d'Auvergne aux États généraux et nommé, le 15 juillet 1789, commandant général de la milice parisienne, à laquelle il donne le nom de garde nationale et la cocarde tricolore, dont il est l'inventeur. Partisan du veto suspensif pour le roi et du bicamérisme, il devient après les journées d'octobre 1789 le personnage le plus considérable de France, le maire du palais, dira Mirabeau. La fête de la Fédération le 14 juillet 1790 marque l'apothéose de sa carrière révolutionnaire. Mais son esprit manque de profondeur et son caractère, de décision : il subit plus les événements qu'il ne les dirige, veut défendre la Révolution à la fois contre les aristocrates et contre les sans-culottes, qui, eux, souhaiteraient des décisions plus radicales, et anime avec Bailly et Condorcet la très modérée Société de 1789. Pour assurer le maintien de l'ordre, il fait voter la loi martiale et il s'imagine que le roi et la cour accepteront l'œuvre de la Constituante. Après la fuite à Varennes en 1791, il fait admettre, avec Barnave, Duport et les Lameth, la fiction de l'enlèvement, puis tire sur le peuple lors de la manifestation républicaine du Champ-de-Mars le 17 juillet 1791, ce qui lui enlève toute popularité. À la déclaration de guerre le 20 avril 1792, il reçoit le commandement de l'armée du Centre, mais il entre en négociation avec les Autrichiens et, après le 20 juin 1792, il menace de faire marcher son armée sur Paris si de nouvelles atteintes sont portées à la majesté royale. Décrété d'accusation le 19 août 1792, il passe dans le camp autrichien, mais il est gardé prisonnier jusqu'en 1797. N'ayant joué aucun rôle pendant la période napoléonienne, il se rallie aux Bourbons en 1814. Lors des Cent-Jours, il refuse la pairie, mais se fait élire député de Seine-et-Marne, devient vice-président de la Chambre, puis participe, avec Fouché, à la déchéance de l'Empereur. Élément actif de l'opposition libérale sous la seconde Restauration, il entre dans la conspiration groupant des bonapartistes et les républicains de la société des Amis de la vérité qui voulaient s'emparer du pouvoir par un coup de force prévu pour le 19 août 1820 ; il participe également au premier complot de la charbonnerie en décembre 1820 et proteste contre l'expédition d'Espagne en 1822-1823. En juillet 1830, il retrouve sa popularité de 1789-1790. Les révolutionnaires lui eussent, volontiers, offert la présidence de la République, mais il se rallie à la solution orléaniste, intronise Louis-Philippe au balcon de l'Hôtel de Ville, reçoit de nouveau le commandement de la garde nationale, mais se laisse jouer par Louis-Philippe, qui, pour se débarrasser de mylord protecteur, l'amène à démissionner de son commandement à la fin de décembre 1830. Il ne cessera, dès lors, jusqu'à sa mort, de condamner l'évolution rétrograde du régime de Juillet. Roger Dufraisse.

Sa vie

Issu d'une ancienne famille militaire d'Auvergne dont les origines connues remonteraient au XIe siècle, un de ses illustres ancêtres, Gilbert Motier de La Fayette, est maréchal de France au XVe siècle, Gilbert du Motier naît au château de Chavaniac le 6 septembre 1757. Le nom de la famille trouve son origine à La Fayette, actuelle commune d'Aix-la-Fayette Puy-de-Dôme, site d'une motte castrale documentée. Le nom complet, Marie-Joseph Paul Yves Roch Gilbert du Motier, marquis de La Fayette, est rarement utilisé : il est généralement désigné comme marquis de La Fayette ou Lafayette. Son biographe Louis R. Gottschalk précise que Gilbert orthographie son nom aussi bien en Lafayette qu'en La Fayette.
Son père, Michel Louis Christophe du Motier, marquis de La Fayette 13 août 1733 – 1er août 1759, colonel aux Grenadiers de France, est tué en Westphalie à l'âge de vingt-six ans par un boulet lors de la bataille de Minden, le 1er août 1759, dans les bras du duc de Broglie. Sa mère, Marie Louise Jolie de La Rivière, riche aristocrate de Saint-Brieuc, née en 1737, se retire à Paris au Palais du Luxembourg ; elle meurt le 3 avril 1770. Élevé, en son absence, par ses tantes et sa grand-mère, il passe à Chavaniac une enfance libre et protégée et rêve, à neuf ans, de chasser la bête du Gévaudan.
À l'âge de 12 ans, le marquis de La Fayette se trouve orphelin et seul héritier potentiel de la fortune de son grand-père maternel, le marquis de La Rivière, qui meurt à son tour le 24 avril 1770 et lui laisse une rente de 25 000 livres. À la même époque un autre oncle meurt et lui laisse un revenu annuel de 120 000 livres, faisant de lui l'un des hommes les plus riches de France. C'est son arrière-grand-père, le comte de La Rivière, ancien lieutenant général des Armées du Roi, qui le fait venir à Paris pour son éducation.
Il étudie jusqu'en 1771 au collège du Plessis actuel lycée Louis-le-Grand et suit parallèlement une formation d'élève-officier à la compagnie des mousquetaires noirs du roi. L'armée deviendra pour lui une deuxième famille. Il suit également les cours de l'Académie militaire de Versailles.
Le 11 avril 1774, à 17 ans, il épouse Marie Adrienne Françoise de Noailles 1759-1807 fille du duc d'Ayen, dotée de 200 000 livres. C'est un mariage arrangé, qui peu à peu se muera toutefois en une belle histoire d'amour même si Gilbert trompera régulièrement sa femme. Sa belle-famille, une des plus anciennes de la Cour de France et apparentée à Madame de Maintenon, permet à La Fayette d’être présenté à la Cour au printemps 1774. De ce mariage naîtront quatre enfants, un fils et trois filles :
Henriette 1776-1778
Anastasie 1777-1863, qui épouse Juste-Charles de Latour-Maubourg 1774-1824 le 23 février 1798. Par elle, le marquis est l'aïeul de Paola Ruffo di Calabria, l'ancienne Reine des Belges, épouse du Roi Albert II.
Georges Washington de La Fayette 1779-1849, qui épouse Émilie d'Estutt de Tracy.
Virginie 1782-1849, qui épouse le 20 avril 1803 Louis de Lasteyrie du Saillant 1781-1826.
À la cour de Louis XVI, il n'obtient aucun succès. Attaché à ses libertés et dépourvu d'esprit courtisan, il fait avorter les tentatives de son beau-père visant à lui faire obtenir une situation intéressante.
Après son mariage, il quitte volontiers la Cour dont il maîtrise mal les codes et rejoint le régiment de Noailles de son beau-père avec d'abord un grade de sous-lieutenant avant d'être progressivement promu au rang de capitaine des dragons. Son chef est le duc de Broglie, ancien ami de son défunt père. À l'exemple de ce dernier, il choisit alors de suivre une carrière militaire et entre dans la Maison militaire du roi.

La guerre d'indépendance américaine

La participation de La Fayette à la Guerre d'indépendance des États-Unis 1775-1783 lui a valu une immense célébrité et une place symbolique pour avoir été le trait d'union entre les Américains et la France, lui valant d'être surnommé le héros des deux mondes. Et ce qui fait de La Fayette le symbole du soutien français aux insurgés d'Amérique, comme ce qui en fait la figure du héros romantique qu'on en conserve, c'est son jeune âge 19 ans et les circonstances de son départ de France sans l'autorisation officielle du roi encore favorable à la paix, finançant le voyage de ses propres deniers. Cependant, bien qu'il ait eu un rôle notable sur le plan militaire, celui-ci est moindre par rapport au bilan politique qu'il suscsité.

L'arrivée de La Fayette en Amérique

Histoire de la marine française sous Louis XV et Louis XVI.
En août 1775, le capitaine Gilbert de La Fayette est envoyé par son beau-père, le duc d'Ayen, en garnison à Metz pour y parfaire sa formation militaire. Il raconte dans ses Mémoires qu'il participe le 8 août à un dîner offert par le comte de Broglie au duc de Gloucester, frère du roi d'Angleterre, qui y évoque le soulèvement des Insurgents. C’est le jour même de ce fameux dîner de Metz que le jeune officier prend la décision de partir combattre pour l'indépendance de l'Amérique.
De retour à Paris à l’automne, La Fayette participe à des sociétés de pensée qui débattent de l'engagement de la France dans la Révolution américaine. Lors de ces réunions, un conférencier, l'abbé Raynal, insiste sur les Droits de l'homme et la fin des colonies, critique le clergé comme la noblesse. Censuré, il exprime dès lors secrètement ses vues auprès de loges maçonniques, entre autres celle dont La Fayette est membre.
Le jeune capitaine se fait réformer de l'armée le 11 juin 1776 puis, grâce au soutien du comte de Broglie et à ses futurs protecteurs le baron de Kalb et Silas Deane, diplomate et commissaire des Insurgents, signe à Paris le 7 décembre 1776 son engagement dans l'armée américaine comme major général. Le comte de Broglie, chef du cabinet secret » de Louis XV qui souhaite aider discrètement les Insurgents contre la Couronne britannique, lui fait financer secrètement l'achat de La Victoire, un navire de 200 tonneaux, avec seulement 2 canons, trente hommes d’équipage et comme cargaison 5 à 6 000 fusils.
Après un voyage en Angleterre destiné à tromper espions anglais et opposants français à son entreprise, il s'échappe et gagne Bordeaux. Là, il embarque ouvertement pour l'Espagne et le port basque de Pasajes de San Juan Le Passage près de Saint-Sébastien, drôle de destination pour qui veut partir pour les Amériques. Revenu rapidement à Bordeaux, il y apprend qu'il serait sous le coup d'un ordre d'arrestation à l'origine duquel se trouve son beau-père qui réclamerait à son encontre une lettre de cachet auprès du roi qui lui avait déjà interdit officiellement de quitter le pays après que des espions britanniques eurent découvert son plan.
Obéissant à un ordre lui enjoignant de partir pour Marseille, il feint d'en prendre la route en chaise de poste mais après quelques lieues, la voiture change de direction et file sur Bayonne. Arrivé à Pasajes de San Juan le 17 avril 1777, il embarque sur la Victoire avec quelques fidèles et, le 26 avril, appareille pour l'Amérique. Suivant une route passant bien au large des Antilles où les flottes anglaises et françaises pouvaient lui faire barrage et après une traversée longue de sept semaines, il touche terre le 13 juin à South Inlet, près de Georgetown où les fusils sont vendus pour armer la milice de Géorgie.
Il fait prêter à ses compagnons le serment de vaincre ou de périr, puis rencontre le major Benjamin Huger ; il est adopté par George Washington qu'il rencontre le 1er août 1777 il est affecté à son état-major comme aide de camp avec le titre de major général et, malgré un accueil au début mitigé des membres d'un Congrès à Philadelphie, il participe aux combats dès l’été. Il reçoit une balle à la jambe à la bataille de Brandywine, le 11 septembre 1777.

Mission de propagande en France

Par sa motivation, son désintéressement, et sa constante présence à la tête du régiment de Virginie, même pendant l'hiver rigoureux qu'ils passèrent à Valleyforge, il finira par convaincre les chefs de la Révolution américaine qu'il pouvait leur être utile. Le 6 février 1778, une alliance officielle est enfin instaurée entre la France et le nouveau pays. Une flotte d'une douzaine de bateaux, commandée par l'amiral d'Estaing est envoyée. Le mois suivant, il établira également des alliances avec plusieurs tribus indiennes.
En février 1779, de retour en France, La Fayette sait très habilement rendre populaire la cause des Insurgents et son expédition américaine auprès de l'opinion publique en France21. La sanction qu'il reçoit pour avoir désobéi et quitté la France n'est que symbolique, puisqu'elle n'est limitée qu'à une dizaine de jours d'arrêts, qu'il passe chez lui auprès de sa femme, Adrienne.

La Fayette en Virginie ; Yorktown

Préparation du corps expéditionnaire français de 1780 aux États-Unis, Bataille du cap Henry, Défense de la Virginie par La Fayette, Bataille de la baie de Chesapeake et Bataille de Yorktown.
De retour aux États-Unis en 1780 à bord de L'Hermione, il reçoit de George Washington le commandement des troupes de Virginie. Chargé d'opérer en Virginie contre des forces quatre fois supérieures en nombre, il sacrifie encore une partie de sa fortune pour maintenir ses soldats sous ses ordres et arrive, par des marches forcées et des retours subits, à tellement fatiguer Cornwallis et harceler ses troupes que le général britannique est forcé de le considérer comme un adversaire redoutable.
La Fayette fait sa jonction avec les troupes de George Washington et du comte de Rochambeau, commandant le corps expéditionnaire français de 6 000 hommes dont Axel de Fersen, pour se concentrer sur l'encerclement de Cornwallis à Yorktown. Les troupes anglaises sont bientôt coincées sur la rive ouest de la baie de Chesapeake, dans l'impossibilité de recevoir des secours ou d'évacuer par mer du fait du blocus effectué par l'amiral de Grasse, qui, le 5 septembre 1781, a repoussé victorieusement la Royal Navy à la bataille de la Chesapeake. Ce verrouillage permet aux alliés franco-américains de remporter, le 17 octobre 1781, la victoire décisive de Yorktown.
La Fayette est fait citoyen du Maryland par l'Assemblée générale de cet État le 28 décembre 1784 ce qui lui confère de fait la nationalité américaine. Il rentre en France en 1782 et est promu maréchal de camp.

La fin de l'Ancien Régime 1789 Paris

La Fayette rentre en France vers la fin de 1781. Sa participation aux opérations militaires sur le sol américain est sa première tentative pour appliquer les théories d'indépendance américaine à la société française. L'intention de La Fayette est de brusquer les réformes qu'il méditait. Mais Washington, avec qui il ne cesse de correspondre, le ramène à plus de mesure : C'est une partie de l'art militaire de connaître le terrain avant de s'y engager. On a souvent plus fait par les approches en règle que par une attaque à force ouverte. Cette observation ralentit un peu la fougue du jeune réformateur, et il renonce à emporter de haute lutte ce que Louis XVI opèrera de lui-même sans secousse, peu de temps après.
En mai 1784, La Fayette écrit une lettre enthousiaste à propos des travaux du médecin allemand Franz Anton Mesmer à George Washington, moins convaincu, et influencé par Benjamin Franklin fortement dubitatif : Un docteur allemand nommé Mesmer, ayant fait la plus grande découverte sur le magnétisme animal, a formé des élèves, parmi lesquels votre humble serviteur est appelé l'un des plus enthousiastes. Cette lettre est suivie d'une lettre de Mesmer lui-même le 16 juin à laquelle Washington répond cinq mois plus tard en confirmant qu'il a bien rencontré La Fayette. Ce dernier a entre-temps donné une ou deux leçons de magnétisme animal et rencontré une communauté de Shakers ayant vu une similarité entre les pratiques de transe de ces derniers et les crises mesmériennes. Lafayette participa également à des rituels nord-amérindiens, persuadé que le magnétisme animal était la redécouverte d'une pratique ancienne et primitive.
La Fayette repart pour l'Amérique le 1er juillet 1784. C'est un voyage privé, sur invitation de Washington. Le 4 août 1784, il est acclamé à New York par la foule qui l’accueille. Après trois jours de réceptions, il part faire un grand tour des provinces, partout accueilli avec la même chaleur. De grands banquets lui sont offerts à Philadelphie, Baltimore et Boston. Après un séjour à Mount-Vernon, chez Washington, La Fayette passe par New York, avant de remonter l’Hudson et de signer un traité de paix avec des Hurons et des Iroquois. La Fayette continue son voyage par Boston, Chesapeake, Yorktown et Richmond, avant de quitter le pays à New York le 21 décembre 1784.
La Fayette vient à Paris dans les derniers jours de 1785. Son retour excite un enthousiasme considérable. La reine Marie-Antoinette, qui assistait alors à une fête à l'hôtel de ville, veut conduire madame de La Fayette dans sa propre voiture à l'hôtel de Noailles, où vient de descendre son époux. Le lendemain, il est reçu à la cour, et ne cesse d'être, pendant plusieurs jours, l'objet des hommages et de la curiosité publics. Accueilli en héros à Paris, il peut jeter son dévolu avec succès sur l'une des plus célèbres beautés de l'époque, Aglaë de Barbentane, comtesse d'Hunolstein puis la comtesse de Simiane dont le mari, le comte de Simiane, se tue en 1787 en apprenant que sa femme est la maîtresse de La Fayette.

La Guyane

L'émancipation graduelle des esclaves est une de ses utopies favorites. Désireux d'appeler à son secours un commencement d'expérience, il achète une plantation considérable dans la Guyane française, et s'y livre à divers essais encore aujourd'hui méconnus et qu'interrompent les événements de la Révolution française. Il provoque, en 1787, la formation d'un comité chargé de discuter l'abolition du monopole des tabacs, et il y plaide avec chaleur la cause du commerce américain, que ce monopole frappait d'un préjudice de près de trente millions.
Les efforts plus heureux qu'il déploie en faveur de la nation américaine, lors de la négociation du traité que la France conclut avec elle, provoquent de sa part de nouveaux témoignages de reconnaissance, en resserrant les liens d'amitié qui l'unissent à George Washington, son glorieux libérateur. La correspondance établie entre ces deux hommes si unis d'intentions, si différents de caractère, ne prend fin qu'à la mort de Washington, qui survient le 14 décembre 1799.

L'assemblée des notables 1787

La Fayette participe à la première assemblée des notables, réunie à Versailles au mois de février 1787, et appartient au bureau présidé par le comte d'Artois. Il saisit avidement cette occasion de produire quelques-unes des réformes qu'il a méditées, fait voter la suppression de la gabelle et la mise en liberté des personnes détenues à l'occasion de cet impôt, réclame l'abolition des lettres de cachet et des prisons d'État, et la révision des lois criminelles. Il est de ceux qui obtiennent le renvoi du ministre Calonne en 1787. Il formule même le vœu d'une convocation des États généraux, comme le seul remède efficace aux maux de la situation ; mais ce vœu demeure sans écho. Il fait la motion expresse mot prononcé pour la première fois de la convocation de la nation représentée par ses mandataires.

L'année 1789

Porte-parole de l'aristocratie libérale, député de la noblesse d'Auvergne aux États généraux et chef de la Garde Nationale, il est membre de la société des amis des Noirs. Comme de nombreux militaires à cette époque, il a été initié comme franc-maçon dès 1775.

Les États-Généraux de 1789

D'abord favorable à des réformes, La Fayette fait partie des États généraux comme député de la noblesse d'Auvergne. Il ne remplit aucun rôle dans ces premiers engagements, où domine presque seule la figure de Mirabeau. II appuie la motion de Mirabeau sur l'éloignement de la menace des troupes qui encerclent la capitale, et présente un projet de Déclaration des Droits de l'homme à l'Assemblée constituante, fait décréter la responsabilité des ministres, et, ce qui est peut-être le plus marquant de son action, l'établissement d'une garde civique, dont il sera élu commandant.

Projet de Déclaration des droits de l'Homme juillet

Cent jours après le rapport de Jean-Joseph Mounier sur la constitution française, le 11 juillet 1789, il inaugure sa carrière parlementaire par la présentation d'un des projets de Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, que l'Assemblée ne retient pas. Ce projet, emprunté à la déclaration d'indépendance des États-Unis d'Amérique, est le premier monument direct de cet esprit d'assimilation entre deux peuples si divers d'origine, de situation et de caractère. La Déclaration des droits qu'il proposait constituait un véritable corps de jurisprudence révolutionnaire qui considérait que le peuple français était abusivement soumis au roi de France, comme celui de l'Amérique l'était à la couronne de Grande-Bretagne, et qu'il convenait qu'il prît son indépendance et se gouvernât lui-même.

Commandant de la Garde nationale fin juillet

La Garde nationale est née sous la pression des troubles qui ensanglantent Paris dans les journées des 12 et 15 juillet, et composée de quarante-huit mille citoyens, enregistrés en un jour. L’assemblée élit La Fayette à la tête de la Garde nationale, au moment où, comme vice-président de l'assemblée, il vient de féliciter les électeurs de Paris, réunis à l'hôtel de ville, de la conquête de la Bastille. Le vicomte de Noailles, son beau-frère, lui est adjoint en qualité de major général, et Bailly est élevé au poste de maire de la capitale.
Son acte suivant comme commandant de la garde nationale est de faire démolir la Bastille 16 juillet. Le 26 juillet, il présente aux électeurs de Paris les nouvelles couleurs nationales, la cocarde tricolore.
Par sa fermeté, La Fayette sauve la vie à un grand nombre de personnes que menacent les fureurs populaires, et contient la faction d'Orléans, qui aspire à réorganiser les anciennes gardes françaises. Mais il ne peut empêcher le massacre de Foulon et de Berthier de Sauvigny, et ce témoignage de son impuissance le porte à se démettre du commandement dont il est revêtu ; des acclamations unanimes viennent de le rappeler à ses fonctions, lorsque surviennent les évènements des 5 et 6 octobre.

Les journées des 5 et 6 octobre Journées des 5 et 6 octobre 1789.

Lors de la Journées des 5 et 6 octobre 1789, où des Parisiens montent à Versailles pour demander du pain à Louis XVI, la Garde nationale est en retard, laissant dans un premier temps le roi face au peuple. Chargé de la sécurité du château, il se montre incapable d'empêcher son invasion. Le 6, il sauve à Versailles la famille royale, et la ramène à Paris où vient s'établir aussi l'Assemblée constituante. Il demande le jury britannique, les droits civils des hommes de couleur, la suppression des ordres monastiques, l'abolition de la noblesse héréditaire, l'égalité des citoyens.

1790 L'insurrection est le plus saint des devoirs

Les premiers jours de 1790 sont marqués par l'arrestation et le supplice du marquis de Favras, accusé d'un complot contre-révolutionnaire avec la participation de Monsieur, frère du roi. Le discours que ce prince prononce à l'Hôtel de ville, pour désavouer son loyal et infortuné mandataire, excite l'indignation de La Fayette, qui s'est fort exagéré l'importance de cette affaire, et devient entre ces deux personnages la source d'une inimitié jamais démentie.
C’est dans ce contexte que l'assemblée a à discuter la loi sur les attroupements, et dans cette discussion, La Fayette fait entendre à la tribune une phrase devenue célèbre : Pour la révolution, il a fallu des désordres, car l'ordre ancien, n'était que servitude, et, dans ce cas, l'insurrection est le plus saint des devoirs ; mais pour la constitution, il faut que l'ordre nouveau s'affermisse, et que les lois soient respectées. Il faut reconnaître que La Fayette, fidèle, du moins à cette époque, aux conditions du principe qu'il avait posé, ne cesse de se montrer le plus ferme adversaire du chaos. Sa fermeté déconcerte plusieurs séditions qui pouvaient devenir fatales à la sécurité publique. Le 11 février 1790, il fait arrêter 234 émeutiers.

Le club des Feuillants

Il s'entend avec Bailly pour fonder le club des Feuillants, société destinée à contrebalancer l'influence du club des Jacobins. Lorsque l'assemblée promulgue la constitution du clergé, La Fayette, plein des idées américaines sur l'égalité pratique des religions, protège, dans l'intérêt même de la liberté, le culte non assermenté, et ce culte est constamment en usage dans sa propre famille. Enfin, il propose au roi le rappel de ses gardes du corps, licenciés après les évènements d'octobre ; mais la reine s'y oppose de peur de mettre en péril la vie de ces fidèles militaires.

La fête de la Fédération 14 juillet

Il prend en charge l'organisation de la fête de la Fédération 14 juillet 1790 qui symbolise la réconciliation du roi avec la révolution. Le général paraît avec éclat à la fête de la Fédération, à la tête d'une députation de dix-huit mille gardes nationaux, entouré d'un nombreux état-major et monté sur le cheval blanc qui lui sert ordinairement dans ces solennités, il favorise avec beaucoup de zèle les acclamations adressées au roi, et dont la chaleur ranime chez tous les amis de l'ordre et du trône des espérances qui devaient trop promptement s'évanouir.
Le retour du duc d'Orléans devient le signal des premières hostilités du parti jacobin contre les constitutionnels et contre La Fayette, que les clubs et les groupes populaires commencent à désigner du nom de traître. L'énergie avec laquelle il se prononce pour la répression des désordres occasionnés par l'affaire de Nancy, la révolte de trois régiments de ligne qui avaient chassé leurs officiers, fortifie ces dispositions. Sa popularité décline visiblement. Un nouvel épisode révolutionnaire vient constater cette défaveur.

1791 Les troubles du début de 1791

Le 28 février 1791, La Fayette est informé qu'un attroupement conduit par Santerre s'est porté sur le donjon de Vincennes, pour faire éprouver sans doute à ce château le même sort qu'à la Bastille. Aidé de quelques cavaliers, il attaque les factieux, qui se replient sur le faubourg Saint-Antoine, dont ils disputent avec acharnement l'accès au corps demeuré fidèle. La Fayette triomphe de leur résistance et rentre dans Paris aux acclamations de tous les amis de l'ordre public.
Au même instant, une scène d'une autre nature se passe au château des Tuileries. Les périls de la famille royale, évidemment menacée par ce mouvement séditieux, y ont attiré un certain nombre de royalistes en armes. L'accueil empressé que leur font la reine et Madame Elisabeth excite l'ombrage et les murmures de la garde nationale, et Louis XVI, informé de ces rumeurs, ordonne à ces gentilshommes de déposer leurs armes entre ses mains. Ils obéissent avec résignation, lorsque La Fayette arrive au château. Il prend avec ardeur le parti de la garde qu'il commande ; il souffre que ce petit nombre de chevaliers fidèles soit chargé de menaces et d'outrages, et expulsé, sous ses yeux, du palais qu'ils sont venus défendre. Le lendemain, dans un ordre du jour, le commandant général flétrit le zèle très justement suspect qui a porté quelques hommes à oser se placer entre la garde nationale et le roi et ajoute que le roi de la constitution ne devait et ne voulait être entouré que des soldats de la liberté.

Les problèmes politiques

Ces timides ménagements sont désormais impuissants à sauver la royauté. Chaque jour aggrave les périls qui la menacent. L'émigration, commencée dès le 15 juillet 1789, se propage avec une effrayante activité. Quelques esprits songent à appeler l'intervention étrangère dans les débats intérieurs français ; Louis XVI a secrètement adressé, dès le 3 décembre 1790, un mémoire aux cabinets européens pour solliciter l'établissement d'un congrès continental destiné à en imposer, par sa seule existence, aux factieux qui conjuraient la ruine du trône. Ces démarches sont activement secondées par le comte d'Artois et par les nombreux émigrés qui ont fui d'imminentes persécutions.
La Fayette sert l'ordre sans zèle pour le roi. La mort de Mirabeau porte le dernier coup à la cause royale.
Le 18 avril, Louis XVI, qui a annoncé hautement l'intention d'aller remplir à Saint-Cloud ses devoirs religieux, en est empêché par une multitude ameutée sur le bruit que ce départ n'est qu'un commencement d'évasion. La Fayette ordonne vainement à la garde nationale de rendre la circulation libre : il n’est point obéi ; et le roi, forcé de rentrer dans ses appartements, se plaint, sans plus d'effet, à l'assemblée, de la violence qui lui a été faite.
Du 11 au 15 mai, après l'annonce de la mort du mulâtre de Saint-Domingue, Vincent Ogé, se déroule à la Salle du Manège le débat sur les droits des hommes de couleur discriminés par les assemblées coloniales dominées par les Blancs. Conformément à ses opinions de membre de la Société des amis des Noirs, La Fayette défend la cause des Noirs. À la suite du premier vote parlementaire du 12 mai, son nom figure dans une liste de colons hostiles de 276 députés qui ont voté pour l'Angleterre dans l'affaire des colonies.

La fuite et l'arrestation du roi juin

Le général conçoit alors et exécute le projet de se démettre du commandement qu'il exerce. Mais sa résolution fléchit une seconde fois devant les instances et les protestations de la milice citoyenne, et il a le malheur de se trouver à sa tête, lorsque la fuite et l'arrestation du roi 20 juin aggravent la responsabilité de ce commandement.
Lors de la fuite du Roi et de sa famille jusqu'à Varennes 20 juin 1791, il répand le bruit que l'on a enlevé la famille royale. Cette tentative du roi n'a été en aucune façon prise au sérieux par La Fayette, depuis la mort de Mirabeau, tête pensante du projet, en avril, et que rassurent, indépendamment de précautions minutieuses, les affirmations précises du roi.

Fuite de Louis XVI et arrestation à Varennes.

L'exaspération populaire est très vive contre La Fayette, qu'on accuse hautement de connivence avec la cour ; il calme par degrés ces dispositions menaçantes en s'avançant seul et sans escorte au-devant de la multitude, répandue sur la place de Grève. Mandé à l'assemblée, il se borne à confirmer les explications qu'a fournies son adjoint Gouvion, à qui la garde du château était spécialement confiée. Cependant il demande secrètement au président Beauharnais et au maire de Paris si, dans leur opinion, l'arrestation du roi importe au salut de l'État ; et, sur leur réponse affirmative, il dépêche un aide de camp sur la route de Montmédy, présumant que ce prince chercherait à s'y réunir au corps commandé par Bouillé.
Lorsque Louis XVI fut descendu aux Tuileries, La Fayette se présente à lui avec attendrissement et respectN 20. L'effet de cette infructueuse tentative rend plus étroite la surveillance à laquelle est soumise la famille royale, et La Fayette se trouve, par ses fonctions, l'instrument naturel de ces sévérités.
Au milieu de ces rigueurs, La Fayette ne dément point un reste de sentiments monarchiques. Il appuie la motion de Barnave tendant à maintenir l'autorité royale à Louis XVI, et il ajoute à cette occasion que ce prince est le meilleur de sa famille et le meilleur des souverains de l'Europe. Inculpé de tyrannie envers le roi par le marquis Louis de Bouillé, son cousin, dans une lettre menaçante à l'assemblée, il se borne à répondre qu'il est prêt à verser son sang pour le gouvernement établi.
Le 13 juillet, Muguet de Nanthou, rapporteur de l'enquête ouverte sur l'évènement de Varennes, conclut que ce voyage n'avait rien de coupable, et que d'ailleurs le roi était protégé par son inviolabilité constitutionnelle. Cette conclusion pacifique est accueillie par un décret de l'assemblée qui arrache de vives clameurs au parti jacobin, et il est décidé qu'une pétition ayant pour objet le report de ce décret sera portée le dimanche au Champ de Mars, où chaque citoyen pourra la signer sur l'autel de la patrie.

L'épisode du Champ de Mars 17 juillet

La Fayette se joint à Bailly pour empêcher la réunion des patriotes au Champ de Mars le 17 juillet 1791 pour signer la pétition relative au pouvoir royal ; mais il ne peut réussir.
Une foule considérable se réunit au lieu et au jour indiqués. La Fayette s'y présente bientôt, à la tête d'un détachement de la garde nationale ; il renverse quelques barricades et essuie un coup de feu qui ne l'atteint pas. Deux invalides, qu'une imprudente curiosité avait attirés sous l'autel, sont saisis, entraînés au comité du Quartier du Gros-Caillou et égorgés par le peuple.
Invité par l'assemblée nationale à pourvoir à la répression de ces désordres, Bailly se rend au Champ de Mars, accompagné de plusieurs officiers municipaux et d'une nombreuse escorte de la Garde nationale. Il fait déployer le drapeau rouge et adresse les sommations légales aux factieux, qui ne répondent que par une grêle de pierres ; un groupe armé tire sur le maire de Paris et/ou sur La Fayette. Le général fait tirer quelques coups en l'air ; mais cette démonstration ne faisant qu'enhardir les perturbateurs, la Garde nationale ouvre le feu sur l'ordre de Bailly. Une centaine de ces forcenés tombent morts ou blessés. Quelques officiers veulent employer l'artillerie ; La Fayette s'y oppose avec force et pousse même résolument son cheval devant la bouche des canons. Cet épisode est connu sous le nom de Fusillade du Champ-de-Mars.
La loi martiale est proclamée, le sang coule, et cette journée vaut à Bailly l'échafaud à quelque temps de là, et à La Fayette, la perte de sa popularité. Il est haï de la Cour, et les révolutionnaires doutent de sa sincérité patriotique. Marat se lance dans une grande campagne de presse contre lui. Il l'appelle l'infâme Motier.

La nouvelle constitution septembre Constitution de 1791.

La constitution, achevée à la hâte, est sanctionnée par le roi le 13 septembre. Cette solution cause une joie universelle : la révolution semble terminée. La Fayette appuie et fait décréter la proposition d'une amnistie générale. C’est son dernier vote à l'assemblée constituante. Privé de la plupart des qualités oratoires, il n'a guère exercé sur cette assemblée que l'espèce d'ascendant qui dérive de l'estime personnelle et d'une constance inébranlable dans des opinions conçues avec ardeur et courageusement défendues. Son commandement militaire lui paraît terminé par l'acceptation de l'acte constitutionnel et par l'installation de l'assemblée législative, et il fait supprimer l'emploi de colonel général de la garde nationale. Mais Jacques Pierre Brissot, un des fondateurs de la Société des amis des Noirs en 1788, lui reproche d'avoir le 24 septembre, trahi les mulâtres en s'abstenant prudemment de venir à l'assemblée constituante, lorsque son nouvel ami feuillant, Barnave a fait révoquer leurs droits obtenus le 15 mai 1791.

La démission octobre

Le 8 octobre, il adresse à la milice citoyenne une lettre d'adieu noblement formulée, et résigne ses pouvoirs entre les mains du conseil général de la commune. Quelques hommages remarquables honorent sa retraite.
II se retire aussitôt à Chavaniac-Lafayette, d'où un grand nombre d'électeurs songeront plus tard à le rappeler, en remplacement de Bailly, dans le poste difficile et périlleux de maire de Paris. Mais Pétion est nommé à une forte majorité, et ce choix avance rapidement la défaite du parti constitutionnel.

Général à Metz décembre

Cependant la guerre est imminente sur les frontières du Nord et de l'Est. En décembre 1791, trois armées sont constituées sur le front pour repousser les Autrichiens, et La Fayette est placé à la tête de l'armée du Centre, puis de l'armée du Nord. Trois corps d'armée, formant environ cent cinquante mille hommes, y sont réunis sous le commandement de Luckner, de Jean-Baptiste Donatien de Vimeur de Rochambeau et de La Fayette.
La Fayette, qui a été promu quelques mois auparavant 30 juin au grade de lieutenant général, est chargé du commandement de l'une des trois armées lors de la Première Coalition. Il part le 25 décembre pour Metz, où il établit son quartier général. Il introduit dans le service des améliorations utiles, il rétablit la discipline, imagine le système des tirailleurs, organise l'artillerie légère, crée le corps des artilleurs à pied, et organise celui des artilleurs à cheval.
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Posté le : 04/09/2015 17:18
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La Fayette 2
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1792 L'armée du Nord

La guerre ayant été déclarée dans les premiers jours d'avril, il entre immédiatement en campagne et se porte, avec vingt-cinq mille hommes de très belles troupes, sur la rive droite de la Meuse, près de Givet, ayant son avant-garde à quatre lieues de là, dans les bois au-delà de Philippeville. Cette dernière position est mal choisie. Les Autrichiens, qui occupent Mons avec des forces supérieures, tombent un matin à l'improviste sur ce corps de troupes, composé d'environ trois mille hommes, et le dispersent avant que le général ait eu le temps d'être informé de cet engagement.
Quelques jours après, La Fayette va prendre une autre position dans le camp retranché de Maubeuge, ayant encore son avant-garde très loin de lui, dans les bois de Malplaquet et de la Glisuelle. Cette avant-garde est encore surprise par le même corps autrichien, parti de Mons à la faveur de la nuit. Le bataillon des volontaires de la Côte-d'Or a beaucoup à souffrir dans cette rencontre, qui coûte la vie au général Gouvion, aide de camp et ami dévoué de La Fayette. Le général survient, rétablit le combat et force l'ennemi à se replier en désordre sur la route de Mons. Mais ce faible avantage n'est guère propre à balancer l'influence fâcheuse que ces deux échecs, quoique peu considérables en eux-mêmes, peuvent exercer sur le moral de l'armée au début d'une campagne.
Mieux avisé, La Fayette se retranche à Tesnières, sous Bavay, dans l'intention d'y tenir en échec le général autrichien Clairfayt, lequel manœuvre pour se réunir à l'armée ennemie, qui campe sous Tournai. Mais il est aussitôt appelé au commandement de l'armée du Nord, en remplacement de Rochambeau, et porte son quartier général à Cerfontaine, à Longwy, puis à Sedan. Il bat l'ennemi à la bataille de Florennes. Voulant se porter de Metz sur Namur, il apprend à Dinant la défaite des deux corps de Dillon et de Biron, et se hâte d'opérer sa retraite.

La crise de la monarchie constitutionnelle

Cependant, les événements de plus en plus graves de l'intérieur de la France attirent toute l'attention de La Fayette. Élevé au prix de tant de sang et de sacrifices, l'édifice constitutionnel s'écroulait rapidement sous les coups redoublés des Jacobins et des Girondins. La Fayette présume d'un reste de popularité pour espérer que l'exposition de ses idées sur cette alarmante situation pourra produire un effet utile. Voyant que la vie du couple royal est, chaque jour, de plus en plus menacée, il s'oppose au Club des Jacobins, avec l'intention d'utiliser son armée pour rétablir une monarchie constitutionnelle.

La lettre du 16 juin 1792

Le 16 juin, il écrit, de son camp de Maubeuge, une longue lettre à l'assemblée législative, où il dénonce avec énergie la faction jacobine comme l'instigatrice évidente de tous les désordres dont souffre le pays. Il s'applique ensuite à prévenir toute inculpation personnelle en parlant noblement, de lui-même, de son intervention dans la Guerre de l'Indépendance, de son zèle à défendre la liberté et la souveraineté des peuples et rappelle la Déclaration des droits, dont il a été le promoteur. Il adjure enfin l'assemblée de rétablir l'égalité civile et la liberté religieuse sur leurs véritables bases, de faire respecter l'intégrité du pouvoir royal, et d'anéantir le régime des organisateurs des clubs et des sociétés secrètes. La lecture de cette lettre, dont La Fayette a adressé une copie au roi, provoque dans l'assemblée de vives réactions.
La droite seule l'approuve et en fait décréter l'impression. Les Girondins, par l'organe de Vergniaud et de Guadet, s'efforcent d'alarmer leurs collègues sur les dangers que font courir à la liberté de pareilles remontrances, adressées à une assemblée délibérante par un chef militaire, et affectent des doutes hypocrites sur l'authenticité de sa signature ; ils demandent que la lettre soit renvoyée à un comité, afin que l'assemblée puisse venger le général du lâche qui a osé se couvrir de son nom. Cette proposition est adoptée, et quelques voix réclament sans succès l'envoi de ce manifeste aux départements. Mais, peu de jours après, soixante-quinze administrations départementales adhèrent formellement aux considérations développées par le général.
Cette lettre est mal reçue de la majorité. La Fayette en apprend le mauvais effet en même temps que la journée du 20 juin. Il ne peut marcher sur Paris, son armée stationnée à Pont-sur-Sambre refuse de le suivre, notamment par l’opposition de Gobert.

La journée du 20 juin 1792

Lors de cette journée du 20 juin 1792, autre Journée révolutionnaire, au Louvre, la Garde nationale est absente, laissant le peuple aborder le roi en tête-à-têteN 24.
Plusieurs amis de La Fayette, et notamment Dupont de Nemours, lui mandent que cette journée a produit dans le public un sentiment de réaction assez vif pour que sa présence à Paris puisse lui imprimer une impulsion décisive. La Fayette n'hésite pas.

La Fayette devant l'Assemblée fin juin

Malgré les avis timorés de Luckner, La Fayette quitte aussitôt son armée, et le 28 il est à la barre de l'Assemblée. Il avoue hautement la lettre qui a été lue en son nom, et déclare qu'il a été chargé, par tous les corps de son armée, d'improuver les insultes faites au roi et de demander la destruction de cette secte qui envahissait la souveraineté, et dont les projets étaient connus.
L'allocution de La Fayette est accueillie avec enthousiasme par la droite, et par un morne silence à gauche.
En quittant l'assemblée, La Fayette se rend chez le roi, qui l'accueille avec bienveillance, mais avec réserve. Madame Elisabeth, présente à cette entrevue, conseille à son frère de s'en remettre à lui ; mais la reine s'est déjà prononcée contre toute tentative d'évasion à laquelle le général pourrait prendre part ; elle déclare qu'elle aime mieux mourir que de lui devoir sa délivrance. L'indécision de Louis XVI et la répugnance de la reine font avorter ce projet. La Fayette quitte ensuite Paris pour rejoindre son armée et il est brûlé en effigie dans les rues de Paris. C’est la fin de sa popularité qui a pris naissance sur les ruines de la Bastille, pour s'éteindre dans les journées du 20 juin et du 10 août. Sa démarche n'a rendu au pouvoir exécutif qu'une vigueur passagère ; le maire et le procureur de la commune sont suspendus pour leur conduite au 20 juin ; mais l'assemblée annule bientôt cette décision.
À son retour à l'armée, La Fayette veut tenter un dernier effort ; il pense qu'une victoire pourrait changer l'état des esprits, et fait proposer à Luckner, par le colonel Bureau de Pusy, son ancien collègue et son ami, d'attaquer les Autrichiens à Jemappes ; mais le maréchal s'y refuse formellement.

Les accusations des Jacobins

Tandis que les jacobins lui suscitent à l'armée mille tracasseries de détail, lui refusent les renforts dont il a besoin, interceptent ou dénaturent ses dépêches, circonscrivent son commandement, et appellent Luckner, exclusivement à lui, à la fédération du 14 juillet, ses ennemis, d'un autre côté, ne demeurent point inactifs. Il s'écoule peu de jours avant qu'il ne soit dénoncé à la barre de l'assemblée par quelque section de la capitale, comme un citoyen rebelle, comme un autre Cromwell, qui aspire à substituer le despotisme militaire au régime légal et à renverser la constitution par la constitution elle-même. Ces dénonciations rencontrent d'imposants appuis chez les députés Vergniaud et Delaunay, qui prononcent l'un et l'autre de longs discours sur les dangers de la patrie.
Ces vagues inculpations se compliquent d'un incident qui, plus adroitement combiné, aurait pu devenir fatal à La Fayette. Gobet, évêque constitutionnel de Paris, reçoit Luckner à dîner chez lui, et extorque à ce vieillard, au milieu d'une orgie, en présence de six députés jacobins, l'aveu que La Fayette lui a fait proposer par Jean-Xavier Bureau de Pusy, de marcher avec leurs corps d'armée, non contre l'ennemi, mais contre l'assemblée nationale. Cette intrigue échoue devant les dénégations écrites de Luckner, et surtout devant un démenti formel de Bureau de Pusy, qui s'explique à la barre de l'assemblée avec beaucoup de précision et d'énergie. Cependant, dans la séance du 6 août, Debry, organe de la commission à laquelle a été déféré l'examen de la conduite du général, conclut à sa mise en accusation ; mais cette proposition, soutenue par Jacques Pierre Brissot, et combattue avec chaleur par Vienot-Vaublanc et de Quatremère de Quincy, est repoussée à la majorité de 406 voix contre 224. Cette décision manque de peu de coûter cher aux députés qui l'ont provoquée. Au sortir de la séance ils sont assaillis, frappés, menacés de mort, et ne doivent leur salut qu'à la protection de la garde nationale. Hippolyte Taine commente cet épisode en ces termes : Quant au principal défenseur de La Fayette, M. de Vaublanc, assailli trois fois, il eut la précaution de ne pas rentrer chez lui ; mais des furieux investissent sa maison en criant que quatre-vingt citoyens doivent périr de leur main, et lui le premier ; douze hommes montent à son appartement, y fouillent partout, recommencent la perquisition dans les maisons voisines, et, ne pouvant l'empoigner lui-même, cherchent sa famille ; on l'avertit que s'il rentre à son domicile, il sera massacré.
Galiot Mandat de Grancey le remplace à la tête de la Garde nationale. Mais, le 10 août, il est massacré et La Fayette, destitué et décrété d'accusation. À la nouvelle du 10 août 1792, le premier soin de La Fayette est de se rendre au directoire du département des Ardennes, le corps constitué le plus rapproché de lui ; il lui déclare son refus de reconnaître le nouveau gouvernement, et une assemblée évidemment opprimée par la faction qui domine à Paris.
Il adresse ensuite aux troupes une proclamation énergique, et tente d'organiser, entre plusieurs départements de l'Est, une fédération dans le but de résister aux jacobins ; mais le duc de Brunswick ayant alors commencé son invasion en France, cette entreprise ne peut avoir aucune suite. La Fayette se borne à faire arrêter trois commissaires envoyés à son armée par l'assemblée. Cette levée de boucliers aurait pu déterminer une impulsion salutaire, si ses compagnons d'armes l'avaient secondé : mais Rochambeau se démet de son commandement, Luckner mollit ; le général Biron, ami du duc d'Orléans, soutient les jacobins, et Dillon traite avec Dumouriez, au lieu de punir sa désobéissance aux ordres de Luckner, qui lui a demandé de venir le joindre. Ces défections successives rendent la situation de La Fayette fort critique.

La Fayette déclaré traître à la nation août

Le 19 août 1792, il est déclaré traître à la nation. L'assemblée, dans sa séance du 19 août, l'a décrété d'accusation, et le directoire de Sedan a ordonné son arrestation. Il a un moment la pensée d'aller se présenter en personne à ses accusateurs ; mais cette démarche lui paraît aussi stérile que dangereuse. Réduit par l'infériorité et l'abandon de ses troupes à l'impuissance d'attaquer l'ennemi avec avantage, il songe à chercher un asile en pays étranger.
Après quelques précautions destinées à assurer le salut de son armée, il part secrètement de Sedan, dans la nuit du 19 août, avec César de Latour-Maubourg, Alexandre de Lameth, Bureau de Pusy et quelques autres officiers, et se dirige vers la forêt des Ardennes, sous prétexte de faire une reconnaissance. Il veut alors passer en pays neutre, obligé de se réfugier à Liège.

La captivité et l'exil capture par les Autrichiens

Bureau de Pusy est envoyé à Rochefort actuellement en Belgique, mais dans les Pays-Bas autrichiens à l'époque pour demander le passage en faveur d'officiers forcés de quitter l'armée française, ce qui est accordé. Mais, à son entrée à Rochefort, La Fayette est reconnu et contraint de se nommer. Informé de cette capture inespérée, le feld-maréchal autrichien Johann von Moitelle, qui commandait à Namur, y fait amener les fugitifs sous bonne escorte, et l'on prévient La Fayette que le prince Charles de Lorraine va venir de Bruxelles pour le consulter sur l'état intérieur de la France. Le général, Lameth, Latour-Maubourg et Bureau de Pusy sont conduits au château de Luxembourg. Avant son départ, La Fayette dicte à Romeuf, son aide de camp, une déclaration destinée à être rendue publique dans le cas où il succomberait dans sa captivité et où il avertit en conclusion : L'aristocratie et le despotisme sont frappés à mort, et mon sang, criant vengeance, donnera à la liberté de nouveaux défenseurs. Le duc de Saxe-Teschen, oncle de l'empereur, à qui La Fayette avait fait demander un passeport, répondit que puisque le chef de l'insurrection française était tombé entre les mains des princes alliés, on le garderait jusqu'à ce que son souverain, dans sa clémence ou dans sa justice, eût décidé de son sort.

La captivité en Prusse

Peu de jours après, les prisonniers sont remis par l'Autriche à la Prusse, et transférés dans la citadelle de Wesel en dépit des interventions des États-Unis et de la femme de La Fayette. Il est accueilli à la citadelle par le colonel prussien Friedrich August Albrecht von Tschirschky qui remplaçait au commandement de la forteresse de Wesel le général Romberg qui venait de mourir. Quand on amena Lafayette, von Tschirschky lui fit voir la caserne entourée de palissades, et, ne sachant pas un mot de français, lui dit : Bastille ! Bastille !. La Fayette tombe dangereusement malade. Il est transféré à Magdebourg, où il passe un an dans un appartement souterrain et humide, en butte à la surveillance la plus inhumaine, et réduit à recourir à un cure-dent trempé dans de la suie délayée pour correspondre secrètement avec quelques amis.
Transféré à Neisse, en Silésie, il y est traité un peu moins rigoureusement. Enfin, au mois de mai 1795, par suite du traité de paix conclu entre la France et la Prusse, La Fayette, Bureau de Pusy et Latour-Maubourg sont rendus aux Autrichiens et conduits dans la forteresse d'Olomouc en Moravie, où ils sont séparés et privés de toute communication avec le dehors ; il y subit toutes les tortures pendant cinq ans.
Tandis que La Fayette essuie ainsi toutes les angoisses de la plus dure captivité, la faction qui domine alors en France n'omet aucune persécution propre à se venger d'une retraite qui a dérobé sa tête à l'échafaud.

La Terreur en France

Madame de La Fayette, arrêtée dans sa terre au mois de septembre 1792, est relâchée par l'ordre de Brissot, à qui elle s'est plainte de cet acte de rigueur, mais consignée dans son château de Chavaniac, puis incarcérée de nouveau en 1794 dans un premier temps à Brioude et transférée à Paris ordre du 27 mai 1794 ; elle ne recouvre définitivement la liberté que le 21 janvier 1795, après avoir vu périr sur l'échafaud révolutionnaire la maréchale de Noailles, sa grand-mère, la duchesse d'Ayen, sa mère, et la vicomtesse de Noailles, sa sœur. Cette femme réussit, après mille difficultés, à aller jusqu'à Vienne, où elle obtient de partager, avec ses deux filles, la captivité de son mari, dans la forteresse d'Olmutz. Elle y reste jusqu'à la libération de son mari malgré de très graves ennuis de santé.

Tentative d'évasion octobre 1794

La présence de Mme de La Fayette est le premier adoucissement que le sort du général ait encore éprouvé. Mais il aggrave bientôt le poids de sa détention par une tentative infructueuse d'évasion entreprise au mois d'octobre 1794, de concert avec le docteur Bollemann, et un jeune Américain nommé Huger, qui se sont dévoués à ses intérêts. La faculté de se promener autour de la citadelle lui fut retirée, ainsi qu'aux deux autres prisonniers. Le caractère de La Fayette ne se dément point devant ces longues et pénibles épreuves. Une seule préoccupation domine dans tous les rapports qu'il peut entretenir au-dehors, celle du tort que pourront faire à la cause de la liberté les persécutions qu'il a souffertes au sein de sa patrie. Il s'applique dans ce but, avec une pieuse sollicitude, à atténuer ses propres griefs ; il ne veut pas que l'offense d'un obscur citoyen nuise au succès de tout un principe. Il conserve, sans ostentation, sans amertume, sous les verrous d'Olmutz, l'intrépidité de sa foi politique et de son dévouement aux intérêts de la liberté. Une circonstance douloureuse a troublé cependant cette foi si bien affermie.

La délivrance septembre 1797

Cependant l'heure de la délivrance approche. La campagne de 1796 vient de s'accomplir, et le Traité de Leoben s'en est suivi : Napoléon Bonaparte et Clarke, s'arrogeant le droit de traiter au nom de la République française, ont insisté pour la mise en liberté des trois captifs comme une des conditions de la paix du traité de Campo-Formio 19 septembre 1797, à la condition qu'ils ne pourraient rentrer, immédiatement, sur le territoire français. Le Directoire lui interdit de rentrer en France. Après cinq mois de pourparlers, La Fayette et ses deux compagnons de captivité sont libres, sous leur simple promesse de quitter dans douze jours les États de l'empereur. Arrivés à Hambourg, leur premier soin est de remercier le général Bonaparte du miracle de leur résurrection.

Les contacts avec Bonaparte

La Fayette passe ensuite dans les Provinces-Unies, où il est bien accueilli, et se fixe quelque temps à Utrecht, épiant avec impatience l'occasion de rentrer en France, où un parti puissant, ayant à sa tête l'ancien constituant Sieyès, s'agite en sa faveur. C’est là qu'il apprend le débarquement de Napoléon Bonaparte, au port de Fréjus, d'où sa marche vers Paris n'a été qu'une course triomphale. La Fayette écrit à Bonaparte pour le complimenter sur son retour ; mais cette démarche, probablement intéressée, n'amène aucun résultat. Ses relations avec Napoléon sont complexes. Ainsi il lui exprime par écrit sa gratitude pour sa libération et il le félicite aussi lors de son retour d'Égypte. Mais Napoléon, sans l'avoir rencontré, lui est hostile et lui interdit de s'installer à Paris.

La période napoléonienne Le retour en France 1800

Enfin, en 1800, las du rôle de proscrit, le général fait savoir au Premier Consul que la prolongation de son exil ne convient ni au gouvernement, ni à lui-même, et qu'il arrive à Paris. Ce retour imprévu cause au chef de l'État une humeur qu'il ne peut dissimuler. Chacun remarque l'affectation avec laquelle, dans l'éloge de Washington que Fontanes prononce à cette époque par son ordre, l'orateur omet jusqu'au nom de son brillant auxiliaire.
Cependant La Fayette se retire dans son château de La Grange Blesneau entre Rozay-en-Brie et Courpalay, Seine-et-Marne, dans une propriété de sa femme qu'il avait héritée de sa belle-mère, et cet acte de prudence calme graduellement les dispositions ombrageuses du Premier Consul. La Fayette se lie d'amitié avec Joseph Bonaparte et dans un premier temps se voit accorder quelques faveurs. Il est rayé de la liste des émigrés, reçoit une retraite de 6 000 francs tandis que son fils, Georges Washington de La Fayette, devient officier dans un régiment de hussards. Il obtient pour son fils un grade dans l'armée et pour lui le titre de membre du conseil général de la Haute-Loire, avec le maximum de la pension de retraite de son grade.

Rencontre avec Bonaparte

Finalement Napoléon et La Fayette se rencontrent, par l'intermédiaire de Lebrun, peu après la bataille de Marengo. La Fayette refuse la dignité de sénateur qui lui est offerte par Talleyrand et par Cabanis, en ajoutant que le lendemain de sa promotion il se verrait obligé de dénoncer le Premier Consul et son administration. Il refuse aussi la légation des États-Unis, se regardant, dit-il, comme trop Américain pour y jouer le rôle d'étranger.
Bien qu'un peu blessé de ces refus successifs, le vainqueur de Marengo montre à La Fayette de l'ouverture et de la simplicité. Lors de la votation du consulat à vie, La Fayette déclare qu'il ne l'approuvera pas tant que la liberté publique ne sera point garantie, et il développe cette opinion dans une lettre dont la franchise ne paraît pas trop déplaire au maître de la France ; cependant, c’est alors que les relations de ces deux hommes cessent entièrement. La rupture intervient en 1802 car La Fayette s'oppose au titre de consul à vie de Napoléon dans une lettre écrite le 20 mai.
La Fayette s'élève avec énergie contre l'exécution du duc d'Enghien. Il refuse, à plusieurs reprises, d'entrer au Sénat et ne cache pas son hostilité au régime.

L'Empire

L'avènement du Premier Consul à l'Empire est pour l'austère démocrate le sujet d'une vie encore plus retirée. Il s'abstient de toute participation, même indirecte, aux affaires publiques. En 1804, il vote contre le titre d'Empereur. À partir de cet instant, La Fayette se tient à l'écart de la vie publique et s'adonne à l'agriculture et l'élevage dans son domaine briard.
À l'époque de l'institution de la Légion d'honneur, l'empereur lui fait proposer, par le comte de Ségur, son parent, d'être un des dignitaires de l'ordre ; mais La Fayette refuse ce cordon comme un ridicule, et par la suite, l'on n'y revint plus. Son isolement finit par indisposer Napoléon, qui supporte difficilement toute position en dehors de son gouvernement ; et, lorsque, après la campagne d'Ulm, Georges de La Fayette, fils unique du général, qui sert comme lieutenant de hussards, est proposé pour un grade supérieur, l'empereur lui-même repousse cette promotion avec persévérance.
Les splendeurs croissantes de l'Empire achèvent de condamner La Fayette à une obscurité absolue. Ses ennemis supposent qu'il endure cette situation avec peine ; aussi, une chute grave qu'il fait sur la glace, à cette époque, ayant excité quelque intérêt, on prétend que le héros des deux mondes n'a trouvé que ce moyen de faire parler de lui. On le sollicite vivement alors de visiter l'Amérique, ce théâtre de ses premiers exploits ; mais il s'en défend par la crainte que le gouvernement impérial ne mette obstacle à son retour. Cette appréhension n'est pas sans fondement. Napoléon, qui ne le perdait pas de vue, disait un jour au conseil d'État : Tout le monde en France est corrigé, excepté La Fayette : vous le voyez tranquille, eh bien ! je vous dis, moi, qu'il est prêt à recommencer.

Le ralliement aux Bourbons 1814

Il se rallie aux Bourbons en 1814. Avec Fouché, il participe à la déchéance de l'Empereur. Le général nous apprend lui-même, dans ses Mémoires, qu'il revit avec plaisir le régime pacificateur de la Restauration, dont les princes, ses contemporains, avaient été ses compagnons d'enfance ou de jeunesse. Cédant à l'entraînement universel, il paraît aux Tuileries avec l'uniforme d'officier général et la cocarde blanche, et il y est bien accueilli. Cette visite, toutefois, est la seule qu'il ait rendue aux frères de Louis XVI ; l'esprit général du gouvernement, des attaques semi-officielles dirigées contre lui, ne tardent pas à réveiller ses anciens ressentiments, et il s'abstient de reparaître au château. À cette époque, La Fayette a plusieurs conférences avec l'empereur de Russie, et ce souverain libéral d'un État despotique se plaint ouvertement à lui du peu de libéralisme de cette dynastie que la mauvaise foi, bien plus que l'erreur, lui a si souvent reproché d'avoir imposée à la France.

Les Cent Jours 1815

Malgré la défaveur personnelle que la famille royale inspire à La Fayette, il voit avec effroi, au mois de mars 1815, le retour de Napoléon, qui remet en question cette paix européenne achetée au prix de tant de sacrifices. Quelques royalistes étant venus lui demander si le gouvernement des Bourbons pouvait, dans la ligne de ses opinions, compter sur son dévouement, il répond oui sans hésiter : ne doutant pas, dit-il, qu'à la faveur d'une opposition bien dirigée, on ne puisse tirer meilleur parti de Louis XVIII que de celui qu'il regarde depuis longtemps comme le plus redoutable ennemi de la liberté.
Dans une réunion à laquelle il est appelé, chez Laine, pour débattre le parti le plus convenable aux circonstances, il propose sérieusement de mettre le duc d'Orléans à la tête des troupes, et de réunir tous les membres survivants des assemblées nationales depuis 1789, afin d'opposer une grande force morale à la puissance matérielle de Bonaparte. Cette opinion, comme on pense, demeure sans écho.
La Fayette demeure trois jours à Paris, comme pour faire parade de sécurité personnelle, puis il va s'ensevelir, dans son château de La Grange. Napoléon est rentré aux Tuileries sans coup férir. Un républicain moins austère et moins désintéressé que La Fayette, Benjamin Constant, qui s'est récemment signalé par l'ardeur de son hostilité contre le régime impérial, vient d'accepter le titre de conseiller d'État.
Cependant il promet de concourir à repousser les étrangers et les Bourbons, en mettant à ses services la même condition qu'il a imposée aux Bourbons eux-mêmes, à savoir : la réunion d'une chambre de représentants librement convoquée et largement élue.
Appelé à la présidence du collège électoral de Seine-et-Marne, puis à la députation de ce département lors des Cent-Jours, il est incité à revenir sur le devant de la scène politique. Il voit se rouvrir pour lui, après vingt-trois ans d'interruption, la carrière parlementaire, dans les conjonctures les plus favorables à ses théories d'opposition et de démocratie.
Un concours imposant de suffrages l'élève à la vice-présidence de la chambre des représentants, et il fait partie, en cette qualité, de la députation chargée de recevoir Napoléon au palais de la chambre, lorsqu'il vient en personne ouvrir sa courte session. La Fayette ne prend pour ainsi dire aucune part aux débats de la chambre des Cent-Jours : il semble se réserver tout entier pour de plus hautes circonstances. La bataille de Waterloo éclate comme un coup de foudre sur la capitale et sur la France entière.
Napoléon reparaît, et mille bruits de dissolution et de dictature militaire agitent les esprits. C’est alors que La Fayette monte à la tribune lors de la séance du 21 juin. Pour la première fois depuis bien des années, j'élève une voix que les vrais amis de la liberté reconnaîtront » commence-t-il. Appelé à « parler des dangers de la patrie à sauver, il juge le temps venu de se rallier autour du vieil étendard tricolore, celui de 89, celui de la liberté, de l'égalité et de l'ordre public ; C'est celui-là seul que nous avons à défendre contre les prétentions étrangères et contre les tentatives intérieures. Vétéran de cette cause sacrée, qui fut toujours étranger à l'esprit de faction, M. de La Fayette soumet à la chambre, sous des applaudissements, une résolution de 5 articles dont 4 sont adoptés :
Déclaration que l'indépendance nationale est menacée art. 1 ;
Constitution en permanence de la chambre, qui regardera toute tentative de dissolution comme un acte de haute trahison art. 2 ;
Proclamation du mérite de la patrie en faveur des armées de ligne et des gardes nationales au combat art. 3 ;
Plein pouvoir au ministre de l'intérieur sur l'État-major et la garde nationale parisienne, pour défendre la capitale d'éventuelles exactions propres aux situations de crise art. 4 - écarté pendant les débats ;
Mandatement des ministres à la barre pour y rendre compte de la situation de la France art. 5.
Cette énergique motion n'est pas moins intempestive qu'inconstitutionnelle. La Fayette n'est, en cette occasion, que l'instrument d'une intrigue habilement ourdie par Joseph Fouché qui l'a rencontré la veille. En outre, juste après la présentation de la proposition de M. de La Fayette, une motion identique et jointe à celle du héros des deux mondes par le président de la séance a été soutenue par Jean de Lacoste. Or Lacoste était proche de Fouché. D'après le célèbre biographe de Fouché, Louis Madelin, le ministre de l'intérieur risquait à la fois Vincennes avec le retour de Napoléon, et la fin de sa carrière avec le retour des Bourbons. Il n'a pas de mal à convaincre La Fayette qu'il est l'homme de la situation. La Fayette a peu de considération pour Fouché mais pense dominer la situation. Personne ne pouvait penser qu'une substitution de Napoléon par La Fayette était viable. En réalité, Fouché, désespérant du succès de ses vœux secrets en faveur du duc d'Orléans, accepte la branche aînée des Bourbons comme un pis-aller.
Napoléon consent avec peine à laisser aller ses ministres à la chambre, et leur adjoint Lucien Bonaparte, qui défend avec beaucoup de véhémence les intérêts de son frère. Cet orateur ayant, dans la chaleur de l'improvisation, parlé de la légèreté des Français, La Fayette répond que cette imputation est calomnieuse, et que si la nation n'avait pas suivi Napoléon dans les sables d'Égypte, dans les déserts de la Russie, et sur cinquante champs de bataille, le pays n'aurait pas trois millions de Français à regretter. Le lendemain matin, il fait prévenir l'empereur que, s'il ne se décide pas à abdiquer, lui-même va proposer sa déchéance. Napoléon abdique, les chambres proclament Napoléon II, et la commission de gouvernement, sur la proposition de Fouché qui la préside, députe aux souverains alliés des plénipotentiaires chargés d'arrêter leur marche sur Paris, et de traiter de la paix au nom de la France.
La Fayette et Voyer d'Argenson font partie de cette députation dont l'objet apparent est de détourner les puissances étrangères du projet de rétablir les Bourbons sur le trône de France. Mais cette frivole ambassade n'a pas d'autre but, en réalité, que d'amuser l'impatience du parti révolutionnaire, et d'éloigner un agitateur propre à contrarier les projets de restauration auxquels Fouché s'était dévoué. Les plénipotentiaires se dirigent sur Mannheim, puis sur Haguenau ; mais ils ne peuvent être admis auprès de l'empereur Alexandre de Russie, dont La Fayette sollicite vainement une audience, et leurs négociations se bornent à quelques conférences sans résultats avec des commissaires désignés par ce prince et par les autres souverains coalisés. C’est dans l'un de ces pourparlers que le commissaire britannique fait entendre que la France n'obtiendra la paix qu'en livrant Napoléon aux puissances coalisées. Napoléon, abattu, inspire à cette grande âme la sympathie que La Fayette avait refusée constamment à sa haute fortune. Il fait offrir à son ancien libérateur les moyens d'assurer son passage aux États-Unis ; mais l'ex-empereur, qui garde jusqu'au tombeau le souvenir de sa dernière agression, préfère se confier à la générosité britannique.

La Restauration 1815-1830


Le retour des Bourbons ne peut être vu avec faveur par celui qui vient de les repousser. La mission d'Haguenau a brisé sans retour les faibles rapports qui s'étaient établis durant la première Restauration entre la cour et La Fayette. Il est trop compromis pour être réconciliable. Le général passe dans une retraite absolue les trois premières années de la restauration de 1815, période d'incriminations et de violences, où la ferveur outrée de la réaction royaliste eût difficilement permis une position politique à l'ancien promoteur de la Déclaration des droits.
Au mois de novembre 1818, le collège électoral de la Sarthe l'envoie à la chambre, et il vient prendre, à l'extrême gauche, la place qu'il ne cessera plus d'occuper jusqu'à la révolution de 1830.

Député

Il vote contre la proposition Barthélémy, qui tendait à modifier la loi électorale de 1817, et se montre, dès le début, pénétré des mêmes doctrines qu'il a professées toute sa vie. Plein de l'idée que le gouvernement des Bourbons marche, tantôt ouvertement, tantôt par des voies détournées, à la destruction des libertés dont leur retour avait doté la France, on le voit toujours au premier rang des adversaires du pouvoir, harcelant les ministres de ses énergiques provocations, luttant sans cesse contre le fantôme insaisissable de la contre-révolution, encourageant sans relâche, du haut de la tribune, les peuples voisins à la résistance contre les prétendus oppresseurs de leurs droits.
Ses principaux discours sont ceux qu'il prononce, en 1819 sur la pétition pour le rappel des bannis et sur le budget de cette année, et en 1820, pour solliciter la réorganisation de la garde nationale, sur le maintien de la loi d'élection, sur les projets de loi relatifs à la liberté individuelle, à la censure et aux élections. Les révolutions espagnole et napolitaine, auxquelles ses encouragements n'avaient eu que trop de part, viennent d'échouer par suite des mesures prises de concert entre les souverains alliés. Cette impuissance jointe au ressentiment de plus en plus vif du général contre les hommes et le système de la Restauration, explique la résolution qui le précipite dans les complots. Lui-même, dans un sentiment de droiture, a pris soin de déclarer à la tribune qu'il se regardait comme délié de ses serments par les violations qu'avait, selon lui, éprouvées la charte constitutionnelle.

La voie de la conspiration

Chez lui, la foi monarchique est essentiellement subordonnée au respect du gouvernement pour les droits du peuple, entendus dans leur acception la plus illimitée. Tout acte en dehors de ce cercle redoutable lui semblait une espèce de sacrilège auquel il ne se faisait aucun scrupule de répondre par l'insurrection. Le temps n'a soulevé que lentement le voile qui couvrait ces associations mystérieuses, et La Fayette lui-même s'est montré fort discret, dans ses Mémoires, sur la mesure exacte de sa participation.
La première conspiration dans laquelle son nom se trouve mêlé d'une manière sérieuse est le complot militaire d'août 1820, où plusieurs déclarations le désignent comme un des chefs du mouvement. Ces révélations paraissent insuffisantes, toutefois, pour autoriser une action légale. Dans le procès intenté au mois de mars à Goyet et à Sauquaire-Souligné, prévenus d'attentat contre la sûreté de l'État, La Fayette paraît comme témoin, et le ministère public n'hésite point à attribuer aux encouragements consignés dans ses lettres, qui sont produites à l'audience, le dangereux entraînement qui a placé les prévenus sous la main de la justice. L'une de ces lettres, adressée aux jeunes gens du Mans, offre alors les caractères d'une provocation à la révolte. Vertement interpelé à cette occasion par le président de la cour d'assises, La Fayette répond fièrement qu'il persiste dans des opinions dont il n'est responsable qu'à la chambre des députés.
L'échec de ces premiers complots contre la Restauration inspire bientôt à l'esprit de faction l'établissement de sociétés secrètes permanentes, destinées à stimuler et à régulariser ces tentatives, à les lier entre elles, et à marquer les temps et les lieux où les conjurés pourraient agir efficacement. La Fayette entre dans la plus importante de ces associations et en devient bientôt le membre le plus influent par l'illustration attachée à son passé politique, par la facilité de son accès, par sa docilité à répondre à toutes les propositions insurrectionnelles et à encourager tous les complots.
Prodigue en effet d'encouragements et d'espérances, le vétéran de l'insurrection ne s'engage dans aucune entreprise avant d'en avoir calculé avec soin les ressources et les moyens d'action49,50, et il n'y participe qu'après avoir pris toutes les précautions propres, en cas d'échec, à garantir sa sécurité personnelle. Il abandonne aux conspirateurs subalternes le lot de l'agression et du péril, ne s'exposant qu'avec une extrême prudence aux atteintes d'un gouvernement dénué de vigueur et d'initiative, et dont la politique ménage secrètement dans La Fayette un principe de résistance et de contrepoids aux ardeurs des ultra-royalistes.

La Charbonnerie

C’est sous les auspices de la charbonnerie à laquelle il adhère en 1821 que se forme, dans la ville de Belfort, un vaste complot dont les conjurés fixent l'exécution aux premiers jours de 1822. Le général devait quitter Paris pour se mettre à leur tête. Des circonstances particulières le portent à différer son départ de vingt-quatre heures. C'est à ce retard qu'il doit de n'être pas surpris en flagrant délit de conspiration. Avertis de l'avortement du complot par Saint-Amand Bazard, à peu de distance de la ville de Lure, le général et son fils peuvent changer immédiatement de route, descendre la vallée de la Saône et se rendre à Gray, d'où ils regagnent précipitamment Paris. Leur voiture, qui pouvait servir de témoignage de leur présence, est enlevée par les soins de MM. Kœchlin, qui la font transporter au-delà du Rhin, où on la réduit en cendres.
Demeuré disponible pour d'autres complots, La Fayette est bientôt signalé par des déclarations précises comme l'un des instigateurs du mouvement séditieux entrepris sur Saumur par le général Breton dans le mois de février 1822, et qui a échoué par la trahison du sous-officier Woelfel. Un magistrat ardent, mais probe, le procureur général Mangin, touché de la concordance de ces témoignages, ne craint pas de les reproduire dans son acte d'accusation. Il présente comme établis les rapports de La Fayette avec les principaux conjurés, et enveloppe dans la même inculpation plusieurs députés de l'opposition, entre autres le général Foy, Voyer d'Argenson et Benjamin Constant. Cet énergique manifeste soulève le 1er août une tempête violente au sein de la chambre.
Le général Foy désavoue, avec une chaleur probablement sincère, la complicité qui lui est attribuée, et soutient que « de telles infamies sont l'œuvre du ministère ». La Fayette monte à la tribune au milieu du tumulte, et fait entendre quelques paroles qu'on peut considérer comme la provocation la plus audacieuse peut-être dont ait jamais retenti une assemblée délibérante. On a généralement supposé que cette provocation s'adressait à Louis XVIII lui-même, et qu'elle avait trait à quelque particularité peu connue de la conduite de ce prince envers le marquis de Favras. Quoi qu'il en soit, pour trancher cet éclatant défi, il fallait à La Fayette une conscience bien profonde de la puissance de ses révélations ou de la faiblesse du gouvernement qu'il accablait ainsi du sentiment de son impunité.
Rien n'est plus véritable, en effet, que la complicité du général avec les conjurés de Saumur. C'est dans l'hôtel même de La Fayette, et en sa présence, que deux d'entre eux, Grandmesnil et Baudrillet, ont formé le plan et concerté les principales dispositions du complot. Ces circonstances ont été révélées à la justice par Baudrillet ; mais une inqualifiable omission en a fait évanouir l'importance. On se figure aisément les proportions qu'un tel évènement eût données aux débats et les révélations dont il fût devenu la source. La préoccupation de la chambre lui a dérobé cet incident, qui n'a été divulgué que bien des années plus tard.
Lorsqu'un mois après, les débats du procès de Breton ont lieu devant la cour d'assises de Poitiers, M. Mangin soutient avec force ses premières affirmations, et fait entendre des paroles qui ne caractérisent que trop fidèlement les rapports de La Fayette avec les conjurés: le complot de Breton est le dernier auquel se trouva mêlé le nom de La Fayette, et les ventes du carbonarisme prirent fin elles-mêmes en 1823.

La guerre d'Espagne de 1823

Lors de l'expulsion de Manuel, il est du nombre des soixante-quatre députés qui protestent contre cet acte de violence parlementaire. Dans une réunion de députés de l'opposition qui a lieu à cette époque, il va jusqu'à proposer de déclarer nettement par une proclamation au peuple, que l'impôt a cessé d'être obligatoire depuis cette violation de la charte ; mais cet avis extrême est unanimement repoussé. L'issue favorable de la guerre d'Espagne de 1823 a imprimé aux esprits une forte impulsion monarchique, et cette disposition générale, secondée par les efforts actifs du ministère, écarte de la chambre des députés la plupart des chefs de l'opposition. Réélu député en novembre 1822, à Meaux, La Fayette n’est pas réélu et est battu aux élections de 1824.

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La Fayette 3
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Le voyage en Amérique 1824

Il profite de cette inaction forcée pour accomplir un vœu qui lui tient à cœur : celui de revoir l'Amérique, théâtre de sa première gloire, et de visiter ce peuple qu'il a soutenu dans la conquête de son indépendance. Cette entreprise, contrariée dix-huit ans auparavant, est un hommage implicite à la tolérance du régime dont La Fayette n'a cessé de conspirer le renversement. Informé de son désir, le congrès américain l'invite avec empressement à le réaliser, et met à sa disposition un vaisseau de l'État. Il retourne en Amérique pour une tournée triomphale dans 182 villes de juillet 1824 à septembre 1825.
Le général part du Havre en juin 1824, accompagné de son fils et d'un secrétaire, sur un simple bâtiment de commerce. Il débarque le 16 août dans la baie de New York, où il est accueilli avec un enthousiasme considérable par les deux tiers des habitants de la ville. Une escadre de neuf vaisseaux à vapeur, pavoisés et montés par plus de six mille citoyens de tous âges, de tout sexe et de toute condition, est en station dans le port. Le vice-président des États-Unis et l'ancien gouverneur du New Jersey viennent le recevoir à son bord. La Fayette se rend au milieu d'un cortège imposant, au bruit des salves d'artillerie et des acclamations, à l'hôtel de ville, où il est complimenté par tous les ordres de l'État.
Les portes de l'édifice sont ouvertes, et le général est livré pendant plus de deux heures à l'adoration d'une foule en délire. Un banquet nombreux, les toasts les plus flatteurs, de brillantes illuminations, terminent cette première journée triomphale. La Fayette visite successivement les États de New-York, du Massachusetts, de New Hampshire, de Pennsylvanie, de Baltimore, de Virginie, du Maryland, de Caroline du Nord et de Caroline du Sud, de la Géorgie, d'Alabama, s'arrête à Boston, à Portsmouth, à Newburgh, à Hudson, à Albany, à Philadelphie, à Baltimore ; et partout il est accueilli avec les mêmes transports d'enthousiasme. Les populations rurales, dit M. Levasseur, historien de ce voyage, accouraient de plus de vingt milles à la ronde au-devant de lui. À Washington, siège du Congrès, La Fayette est reçu par le président Monroe, qui donne en son honneur un dîner splendide, auquel assistent tous les ministres étrangers, excepté ceux de France, du Royaume-Uni et de Russie.
Il visite à Mount Vernon le tombeau de Washington, ainsi que sa maison et son jardin, descend le Potomac, et s'arrêt à Yorktown, théâtre d'une des actions les plus mémorables de la guerre d'Indépendance. Le colonel Lewis, qui l'accueille à son débarquement dans cette ville, l'engage à s'installer en Amérique Le général fait une courte excursion parmi les tribus indiennes d'Uchee-Cruk et de Line-Cruk, qui l'accueillent avec cordialité.
Il est présenté le 10 décembre aux deux chambres du Congrès par leurs présidents. Enfin, le 20 décembre, le Congrès adopte à l'unanimité un bill par lequel il reçoit du peuple américain 200 000 dollars et 12 000 hectares en Floride, en récompense de ses services et en indemnité des dépenses qu'il a faites dans la guerre de l'Indépendance. L'université de Princeton lui décerne à cette occasion un doctorat honoris causa, attribué en 1790.
La Fayette visite Fayetteville, Charlestown, Savannah, où il pose la première pierre d'un monument à la mémoire du général Greene ; puis, remontant le Mississippi, il parcourt La Nouvelle-Orléans, dont l'ancienne population française lui témoigne un vif empressement.
Son séjour en Amérique se prolonge pendant quatorze mois, qui ne sont qu'une marche à peine interrompue dans les vingt-quatre États de l'Union, et une succession continuelle d'honneurs.
Chargé par la famille de Washington d'envoyer le portrait de son illustre chef à Bolivar, il y joint une lettre flatteuse pour le libérateur de la Colombie, qui répond que le Washington donné par La Fayette est la plus sublime des récompenses que puisse ambitionner un homme. En remontant l'Ohio, à la suite d'une tournée dans les provinces du sud-ouest, le bateau à vapeur qui porte le général heurte un écueil et coule, à cent vingt-cinq milles environ de Louisville, où il se rendait ; mais cet accident n'a aucun effet sérieux, et le général avec sa suite est immédiatement reçu à bord d'un autre bâtiment, sur lequel il achève sa traversée par Cincinnati, Pittsburgh, Utica, Boston et New-York.
À Boston, le 17 juin 1825, a lieu un immense cérémonie d'anniversaire de la bataille de Bunker Hill. Lors de ce grand rassemblement, 200 000 personnes sont présentes. Selon le rituel maçonnique, La Fayette est chargé de poser la première pierre du bâtiment à la mémoire de cette bataille. La fête se termine par un grand banquet de 4 000 couverts.
Après avoir séjourné de nouveau pendant quelques semaines à Washington, chez le nouveau président, John Quincy Adams, La Fayette se met en devoir de retourner en France. Le 7 septembre 1825, il reçoit les adieux des ministres, de tous les chefs civils et militaires de l'État, et d'une foule de citoyens réunis dans l'hôtel du président de la république. Celui-ci, dans un discours étendu, récapitule la vie de La Fayette, rappelle son dévouement à la cause américaine, et la fermeté avec laquelle, pendant quarante ans, il a soutenu la cause de la liberté. Le général répond par une glorification de l'Amérique républicaine et exhorte les États à la concorde et à l'union. Il quitte ensuite le pays sur la frégate la Brandywine et parvient au Havre le 5 octobre 1825. L'aspect politique de la France s'est favorablement modifié pendant son absence.
La Fayette, avec d'autres philhellènes, profite aussi de son séjour pour plaider la cause de la Grèce insurgée contre l'Empire ottoman.

Le règne de Charles X 1825-1830

L'avènement de Charles X avait paru éteindre ou affaiblir les discordes des partis. L'apparition du fameux mémoire de M. de Montlosier met brusquement fin à la courte trêve qu'ils s'étaient tacitement accordée. La dissolution de la garde nationale de Paris augmente le mécontentement en désarmant l'autorité royale des forces nécessaires pour en réprimer les effets, et les troubles de la rue Saint-Denis révèlent tout le succès que le génie de la sédition peut se promettre encore d'un appel aux passions populaires.
C'est dans ces circonstances que les électeurs de Meaux députent La Fayette à la chambre, au mois de juin 1827, en remplacement de M. Pinteville-Cernon. De nouvelles élections ramènent sur les bancs de l'opposition la plupart des anciens membres que le ministère avait fait écarter de la chambre septennale, et La Fayette est encore appelé par l'arrondissement de Meaux à prendre part à cette dernière lutte contre la Restauration.
Dans un discours prononcé le 23 juin, sur le budget de 1828, La Fayette reproche au gouvernement ses tendances rétrogrades et bat impitoyablement en brèche les abus qu'il avait signalés à diverses reprises. L'année suivante, dans un discours sur les crédits supplémentaires, il dénonce la Sainte-Alliance comme une vaste et puissante ligue dont le but est d'asservir et d'abrutir le genre humain, et relève par une allusion les expressions inconsidérées par lesquelles Louis XVIII, en 1814, avait remercié le prince régent de son concours.
C’est, comme il arrive souvent, par une mesure extrême que Charles X espère franchir les difficultés de sa situation.
La Fayette, absent de Paris depuis la fin de la session, est allé passer quelques jours, après quatorze ans de séparation, à Chavaniac, lieu de sa naissance. C’est à son passage au Puy qu'il apprend l'avènement du ministère Polignac. Un banquet lui est aussitôt offert par les chefs de l'opposition libérale. Là retentissent, sous la forme d'énergiques toasts, les premières protestations populaires contre les nouveaux conseillers de Charles X.
Le voyage du général prend dès lors un caractère exclusivement politique ; le choix des villes qu'il affecte de traverser et les démonstrations extraordinaires dont il y est l'objet révèlent le but réel de cette tournée, évidemment destinée à en imposer au gouvernement, par une parade menaçante des forces populaires. La Fayette visite successivement Grenoble, VizilleN 46, Voiron, La Tour-du-Pin, Bourgoin, Vienne, et le 5 septembre il se met en route pour Lyon, où le délire révolutionnaire a préparé une réception presque royale au patriarche de la démocratie française.
La Fayette fait son entrée à Lyon en présence d'un concours innombrable de spectateurs et y reçoit des députations des villes de Chalon et de Saint-Étienne. De toutes parts, on se prépare à la résistance contre les tentatives liberticides du ministère ; des associations se forment pour le refus de l'impôt, et de nouvelles sociétés secrètes, organisées à la manière des carbonari de 1822, s'établissent au sein de la capitale.
La Fayette les encourage hautement, exprime même l'avis que les chambres doivent refuser le budget jusqu'à ce que la France ait reçu une organisation démocratique, et se met en rapport direct avec la plus séditieuse de ces associations, connue sous le nom de Conspiration La Fayette qui a pour organe La Tribune des départements. La fameuse adresse des 221, par laquelle la chambre dénie son concours à un ministère dont le système lui est encore inconnu, ne stimule que trop ces dispositions perturbatrices.
La Fayette ne prend aucune part ostensible aux débats qui la précèdent. Les meneurs de l'opposition sont trop habiles pour ne pas comprendre à quel point l'influence de son nom et de ses doctrines aurait compromis le succès d'une lutte aussi décisive. La situation, cependant, est loin d'être désespérée. Le parti le plus logique et le plus sage était de dissoudre à la fois la chambre et le ministère, et d'en appeler aux électeurs. Mais ce parti ne prévaut point. Un sentiment exagéré de la prérogative monarchique, une certaine impatience, et, disons-le, certaine dignité propre au caractère de Charles X, l'emportent, et l'imprévoyant monarque se plaît à resserrer, par un renvoi pur et simple de la chambre des 221, l'étroite impasse dans laquelle le pouvoir royal se trouve engagé. Les élections, faites sous l'influence de l'irritation populaire, ramènent une opposition plus nombreuse et plus animée. De cette situation violente sortent les ordonnances du 28 juillet, moyen fatal et désespéré de dégager la royauté imprudemment acculée dans ses derniers retranchements, mais qui prend facilement la couleur d'un odieux parjure aux yeux d'une population hostile et prévenue.

La Révolution de 1830 Les Trois Glorieuses

La Révolution de Juillet, révolution française à la faveur de laquelle un nouveau régime, la monarchie de Juillet, succède à la Seconde Restauration, se déroule sur trois journées, les 27, 28 et 29 juillet 1830, dites les Trois Glorieuses.
Après une longue période d’agitation ministérielle puis parlementaire, le roi Charles X tente un coup de force constitutionnel par ses ordonnances de Saint-Cloud du 25 juillet 1830. En réaction, un mouvement de foule se transforme rapidement en révolution républicaine. Le peuple parisien se soulève, dresse des barricades dans les rues, et affronte les forces armées, commandées par le maréchal Marmont, au cours de combats qui font quelque 200 tués chez les soldats et près de 800 chez les insurgés.
Charles X et la famille royale fuient Paris. Les députés libéraux, majoritairement monarchistes, prennent en main la révolution populaire et, au terme de l’hésitation de 1830 , conservent une monarchie constitutionnelle, au prix d’un changement de dynastie. La maison d’Orléans, branche cadette de la maison de Bourbon, succède à la branche aînée ; Louis-Philippe Ier est proclamé « roi des Français » et non plus roi de France.

La chute de Charles X

La première impression qu'excite la fuite de Charles X est la stupeur ; l'absence de forces militaires respectables encourage la résistance, et une suite de dispositions mal conçues, mollement exécutées, font bientôt prendre à l'émeute le caractère d'une vaste insurrection.
Lors de la révolution dite des Trois Glorieuses, en 1830, retrouvant sa popularité de l'année 1789, La Fayette a ses propres partisans qui le poussent à jouer un rôle de premier plan. Absent lors de la promulgation des ordonnances, il se met en route dans la soirée du 26 et accourt de Lagrange à Paris au milieu de la nuit, sans que le gouvernement, dans son incurie ou dans son respect mal entendu pour la liberté individuelle, ait songé à contrarier cette dangereuse assistance ; il est adopté comme un drapeau par les chefs de l'insurrection. Le général paraît le lendemain à la réunion des députés assemblés chez Audry de Puyraveau et à celles qui la suivent ; mais, son attitude répond mal à l'attente des meneurs qui commencent à le diriger. Il ne cesse d'exhorter au calme et à l'inaction la jeunesse turbulente qui vient à plusieurs reprises solliciter sa coopération.
Lorsque l'assemblée décide l'envoi d'une députation au duc de Raguse, dans le but de suspendre les hostilités, La Fayette insiste pour qu'elle tienne au maréchal un langage sévère, et qu'on mette sous sa responsabilité tout le sang qui serait répandu.
À la réunion du 28 au soir, lorsque la révolution a pris tout son développement, le général, frappé du nombre croissant des victimes, s'écrie avec la plupart de ses collègues, qu'il faut diriger les efforts du peuple, adopter son étendard, et se déclare prêt à occuper le poste qu'on voudrait lui assigner. La Fayette passe une partie de la nuit à stimuler et à diriger l'activité populaire : il visite plusieurs des barricades qui s’élèvent sur les différents points de la capitale, et sa présence est saluée de vives acclamations. L'abandon inopiné du Louvre procure, dans la matinée du 29 la victoire au peuple. Une foule immense et enthousiaste remplit les rues. La Commission municipale provisoire, dont le général a refusé de faire partie, lui défère le commandement de toutes les gardes nationales du royaume. Dès lors il se trouve investi de la plus haute influence peut-être que jamais citoyen ait exercée en aucun pays.
C’est dans ces circonstances que, le 29 au soir, Huguet de Sémonville, grand-référendaire de la Chambre des pairs, et le comte d'Argout, se présentent, au nom du roi Charles X, à la commission municipale, et font part à ses membres réunis de la révocation des ordonnances du 28 et l'appel d'un nouveau ministère sous la présidence du duc de Mortemart. La Fayette, mandé dans le sein de la commission, écoute sans rien objecter la communication du grand référendaire, et se borne à lui demander si la conquête du drapeau tricolore ne serait pas du moins le prix de la victoire du peuple parisien. M. de Sémonville répond évasivement, et l'on se sépare.
Dans la matinée du 30, La Fayette, quittant une attitude d'observation qui n'est guère dans son caractère, fait adresser aux corps de troupes réunis autour de Saint-Cloud l'audacieuse sommation de déposer les armes. Le duc de Mortemart, par des raisons particulières, n'ayant pu présenter lui-même à la réunion des députés les ordonnances de révocation, cette mission est remplie par Jean-Baptiste Henry Collin de Sussy, qui est écouté sans faveur. II comprend que le gouvernement de fait qui siège à l'hôtel de ville est le seul tribunal où la cause de Charles X et de sa dynastie puisse à cette heure s'agiter encore avec utilité. Collin de Sussy est admis avec peine auprès de La Fayette, qu'environne un cortège menaçant de délégués des sociétés populaires, de gardes nationaux et d'ouvriers. C'est aujourd'hui le plus beau jour de ma vie, lui dit le général avec enthousiasme ; vous me voyez entouré d'amis qui étaient las comme moi du despotisme des quinze dernières années. Permettez que nous prenions tous ensemble connaissance de votre message. M. de Sussy ayant témoigné le désir d'être présenté à la commission municipale, La Fayette lui-même le met en rapport avec MM. de Lobau, Mauguin et Audry de Puyraveau. Mais à peine a-t-il commencé la communication dont il s'est chargé qu'il est interrompu par les exclamations répétées : II est trop tard ! il est trop tard ! Charles X a cessé de régner ; le peuple a acquis par son sang le droit de se choisir un autre souverain ! Malgré cette réponse si péremptoire de la commission, le général, dont la mesure et la politesse ne se sont pas un instant démenties, croit devoir rendre hommage à son principe favori en faisant connaître la mission de M. de Sussy au peuple qui se presse dans l'intérieur de l'hôtel de ville. Il passe à cet effet dans la grande salle, et, après avoir réclamé le silence, il se met en devoir de donner lecture des dernières ordonnances de Charles X. Mais à ce nom seul, un cri de réprobation se fait entendre sur tous les points de la salle. La lecture des ordonnances excite de nouvelles vociférations. C’est au milieu de cet ouragan populaire que La Fayette fait entendre à travers un sourire ces simples paroles, qui devaient être un arrêt fatal : Vous le voyez, il faut vous résigner ; c'est fini des Bourbons ! . En prenant congé du général, Collin de Sussy tente vainement de l'écarter de l'hôtel de ville, sous prétexte d'une conférence au Luxembourg avec le duc de Mortemart ; il répond que le délégué du peuple ne peut avoir rien de commun avec l'envoyé de la monarchie déchue, et l'entretien est terminé.
La Fayette rejette hautement l'offre qui lui est faite d'être le régent du comte de Chambord, Henri d'Artois, et le général Talon, l'un des chefs de la garde royale, l'ayant engagé à s'expliquer sur l'effet des ordonnances du 29, il répond le 31 par un billet autographe qui se termine ainsi : Toute réconciliation est impossible, et la famille royale a cessé de régner.
Le parti bonapartiste, de tout temps antipathique à La Fayette, s'était agité sans aucune chance de succès. Restait à opter entre deux autres combinaisons gouvernementales, la république et la monarchie du duc d'Orléans. L'appel de ce prince à la lieutenance générale du royaume, dans la journée du 30 juillet, est un grand pas dans la voie de cette solution ; mais il importe de décider La Fayette, qui ne voit dans cette résolution précipitée qu'une mesure purement provisoire. Fils de l'ennemi personnel du général, ce prince ne se recommande à son suffrage par aucune prédilection particulière ; mais ses partisans se mettent activement à l'œuvre. Ils font valoir l'origine révolutionnaire du prince, ses antécédents patriotiques, alors assez mal connus, ses vertus de famille, son opposition permanente au système de la Restauration. Ces considérations, habilement présentées, surmontent les instigations des sociétés établies à l'hôtel de ville, et font pencher définitivement la balance en sa faveur. Une circonstance fortuite ou préparée achève de fixer l'indécision du général : William Cabell Rives, ministre américain à Paris, étant venu le visiter à l'hôtel de ville : Que vont dire nos amis des États-Unis, s'écria La Fayette en s'avançant vers lui avec empressement, s'ils apprennent que nous avons proclamé la république en France ? - Ils diront, répondit froidement M. Rives, que quarante ans d'expérience ont été perdus pour les Français. La Fayette, qui a refusé avec désintéressement la présidence de la république, renonce, momentanément du moins, à son utopie favorite.

L'avènement du duc d'Orléans

Le 31, il reçoit une lettre de Charles X qui lui fait les plus séduisantes propositions. Par défiance ou par conviction, et aussi peut-être du fait de ses 73 ans, il refuse, et répond : II n'est plus temps. Le même jour, il reçoit à l'hôtel de ville de Paris le duc d'Orléans, Louis-Philippe Ier, qui vient demander son investiture à l'arbitre naturel du dénouement de la révolution.
Il traverse les salles de l'hôtel de ville, et ces dispositions ne prennent un autre cours que lorsque le prince et le général s'unissent sur le balcon de l'hôtel par une accolade qui paraît proclamer ou consommer l'adoption populaire. Le lendemain, 1er août, La Fayette, déférant au vœu exprimé par plusieurs membres de la commission municipale, se rend au Palais-Royal dans l'intention plus ou moins avouée de pressentir le futur roi des Français sur son système de gouvernement. Il débute par un éloge de la constitution américaine, que le prince n'adopte pas sans réserve, et que le général modifie lui-même en se bornant à demander un trône populaire entouré d'institutions républicaines.
Le duc d'Orléans paraît accepter avec empressement ce programme, si célèbre depuis sous le nom de Programme de l'hôtel de ville, et qui défraie pendant plusieurs mois les illusions du patron de la nouvelle monarchie. Tandis que le prince, par une politique habile, s'approprie ainsi les fruits d'une lutte à laquelle il n'a point concouru, Charles X lui défère de son côté le titre de lieutenant général et abdique la couronne en faveur de son petit-fils.
Ces actes demeurant sans effet, la cour paraît se disposer à une lutte que le nombre et le dévouement des troupes qui l'entourent la mettent en état de soutenir avec avantage. Des commissaires sont dépêchés à Rambouillet pour exhorter le roi à s'éloigner. Leurs instances étant vaines, on obtient du duc d'Orléans la permission de provoquer cet éloignement par une manifestation décisive. La Fayette, qui paraît prendre sur lui toute cette démonstration, fait battre le rappel dans Paris, et réunit cinq cents hommes dans chaque légion de la garde nationale pour marcher sur Rambouillet. En un instant, toute la capitale est en rumeur. Il se forme aux Champs-Élysées un corps d'à peu près dix mille hommes, dont le général Pajol prend le commandement. Il choisit pour aide de camp Georges de Lafayette, fils du général, et cette troupe, qui se grossit en route de cinq à six mille volontaires, arrive dans la nuit aux environs de Rambouillet.
Le départ de la famille royale, déterminé par des rapports sur l'importance de cette expédition populaire, prévient un engagement qui, selon toute apparence, eût été fatal aux agresseurs. La Fayette annonce au peuple de la capitale, dans un ordre du jour, cette victoire sans combat. La chambre élue sous Charles X ouvre, dans les premiers jours d'août, la discussion qui abandonne le principe de la légitimité. Le parti républicain, profondément irrité de l'issue des événements, menace de la troubler par des désordres que les exhortations de La Fayette réussissent à prévenir. Lui-même n'y prend part que pour combattre l'hérédité de la pairie et pour lancer contre l'aristocratie nobiliaire quelques-uns de ces anathèmes qui lui sont familiers. Le 7 août, les deux chambres portent au duc d'Orléans la résolution qui lui défère la couronne. Ce prince, cédant aux acclamations populaires, se montre sur le balcon du Palais-Royal, accompagné de La Fayette, qu'il embrasse avec effusion. Le général paraît profondément ému : Voilà, dit-il au peuple en lui montrant son nouveau roi, voilà le prince qu'il nous fallait ; voilà ce que nous avons pu faire de plus républicain!
Il s'agit de savoir quel nom prendrait le nouveau roi. Quelques-uns de ses conseillers avaient imaginé de l'appeler Louis XIX ou Philippe VII, afin de le rattacher d'une manière continue à la chaîne des souverains de la troisième race. La Fayette combat cette idée si logique comme impliquant une pensée dangereuse de légitimité, et fait prévaloir son avis.

La Monarchie de Juillet Nouveaux honneurs

Au mois d'août 1830, La Fayette fait l'objet de nombreux honneurs, parmi lesquels on peut compter les innombrables publications, ainsi que les créations artistiques et poétiques. De plus, la population parisienne lui témoigne son attachement en lui offrant le 3 août deux petits canons, que La Fayette fait ramener dans son château de Lagrange. De plus, le 15 août le ville de Paris offre un grand banquet de 350 couverts en l'honneur du Général, où sont présents les ministres, des membres de la chambre des pairs, ainsi que des députés, des militaires, les maires de Paris et autres agents royaux. Le chanteur Nourrit y récite Lafayette en Amérique de Béranger, ainsi que La Parisienne : Marche nationale, de Delavigne. La Fayette y prononce un discours politique faisant le lien entre la révolution de 1830 et celle de 1789 :
Lorsque la population parisienne s’est levée spontanément pour repousser l’agression et reconquérir ses droits, nos droits à tous, les imprescriptibles droits du genre humain, elle a daigné se souvenir d’un vieux serviteur de la cause des peuples : en me proclamant son chef, en associant mon nom à ses triomphes, elle a récompensé les vicissitudes d’une vie entière. En 1789 naquit le funeste système de division et d’anarchie dont vous connaissez les déplorables suites. … Mais le sens exquis de la population actuelle nous préservera de ce malheur. … Vous êtes les élèves de la révolution et votre conduite dans les grandes journées de gloire et de liberté vient d’en montrer la différence.

Commandant de la Garde nationale Garde nationale 1831.

La Fayette retrouve le commandement de la Garde nationale pour quelques mois. Durant les premiers mois du règne de Louis-Philippe, le général paraît s'effacer en quelque sorte de la scène politique pour se concentrer uniquement dans la réorganisation de la garde nationale du royaume. Il retrouve pour cette opération favorite le zèle et l'activité de ses jeunes années. Dix-sept cent mille gardes nationaux, pourvus d'artillerie, reçoivent par ses soins une institution régulière, il se montre fidèle à ses principes en rendant à cette milice citoyenne l'élection de ses principaux officiers. Journellement occupé à recevoir et à haranguer des députations départementales, La Fayette n'aspire à aucune influence immédiate sur la direction des affaires d'État, ni sur les modifications ministérielles qui, dans cette première phase du nouveau gouvernement, se succèdent avec rapidité.

Le procès des ministres de Charles X

La garde joue un rôle décisif pour maintenir le calme dans Paris en décembre 1830, à l'occasion du procès des ministres de Charles X. Il appuie la proposition de son ami, Victor Destutt de Tracy, pour l'abolition de la peine de mort, proposition qui emprunte au prochain jugement des ministres de Charles X une généreuse opportunité. Il dénonce avec énergie le mouvement homicide qui, dans le courant d'octobre, a conduit une troupe de perturbateurs autour du donjon de Vincennes, où ils étaient détenus, mouvement auquel le gouverneur Daumesnil a opposé une énergique résistance.
La décision de ce procès est pour l'établissement du 7 août, un moment de crise redoutable. Sous le cri de : Mort aux ministres ! les agitateurs déguisent à peine le dessein de renverser le gouvernement qui s'est rendu le bénéficiaire de la révolution de juillet. Les exhortations répétées de La Fayette n'ont inspiré à la garde nationale qu'une vigueur incertaine. L'effusion d'une goutte de sang peut livrer Paris et la France entière à d'incalculables désordres.
La Fayette s'applique sans relâche à prévenir cette collision redoutée ; il multiplie les précautions et les ordres du jour, et fait circuler de nombreuses patrouilles. Cependant le palais du Luxembourg est plusieurs fois sur le point d'être forcé par la multitude ameutée. Le 21 décembre, jour de la clôture des débats, on donne l'ordre de reconduire les prisonniers à Vincennes, sage disposition destinée à les soustraire à l'exaspération populaire, dans le cas prévu d'absence d'une condamnation capitale. Cet ordre est exécuté par les soins du comte de Montalivet, ministre de l'intérieur, qui escorte les accusés au péril de sa vie. Leur enlèvement produit un mécontentement dont l'explosion menace pendant plusieurs heures le Palais-Royal.
Enfin La Fayette contribue, par la fermeté de ses dispositions et par son influence personnelle, à pacifier ce formidable conflit, et le roi lui écrit à cette occasion une lettre pleine des témoignages de l'admiration que sa conduite lui a inspirée. Affectées ou sincères, ces démonstrations touchent à leur terme.

La loi sur la Garde nationale

Une fois ce cap passé, Louis-Philippe réalise le risque qu'il y a à conserver un tel instrument dans les mains de La Fayette, qu'il juge peu fiable. Le 24 décembre, à son instigation, la Chambre des députés adopte une loi qui supprime le titre de commandant de toutes les gardes nationales de la France, jugé contraire à la Charte de 1830. La chambre, dans la discussion du projet de loi sur la garde nationale, adopte, avec le concours du ministère, un amendement qui interdit à toute personne de commander les gardes nationales d'un département entier. Cette résolution implique nécessairement la déchéance de La Fayette. Quelques députés s'efforcent vainement de la faire modifier : leurs propositions sont repoussées. Le roi, proteste de son ignorance personnelle, de la bonne volonté de ses ministres, et se flatte de faire revenir le général sur sa démission.

La démission

Le roi n'épargne aucune séduction propre à désarmer son interlocuteur : il lui propose le titre de commandant honoraire, que La Fayette a précédemment refusé comme une décoration insignifiante. Un peu piqué de cette insistance : Votre Majesté lui dit le général se contenterait-elle d'être un roi honoraire ? Le président du Conseil, Jacques Laffitte, et le ministre de l'Intérieur, Camille de Montalivet, lui-même colonel de la garde nationale, cherchent à trouver un compromis, mais La Fayette pose des conditions extravagantes : il veut la formation d'un nouveau ministère où n'entreraient que ses amis, la dissolution de la Chambre des députés et l'abolition de l'hérédité de la pairie.
Louis-Philippe demande vingt-quatre heures pour réfléchir ; mais ce délai n'ayant amené aucun changement dans les négociations, La Fayette croit devoir se dépouiller définitivement du pouvoir exorbitant dont il était revêtu. La Fayette donne sa démission dès le lendemain, non sans avoir rendu visite à Louis-Philippe, qu'il menace de se retirer dans son château de La Grange-Bléneau : une explication a lieu entre le monarque et La Fayette, dans laquelle celui-ci, donnant cours aux sentiments qu'il concentrait depuis longtemps, déclare au roi que la dissidence de leurs doctrines politiques et l'ombrage qu'inspirait son autorité ne lui permettent pas d'en prolonger l'exercice.
– Et que ferez-vous sans l'appui de ma popularité ? demande La Fayette.
– Si vous retourniez à La Grange ? Eh bien, je vous y laisserais!
Il rend sa démission publique par un ordre du jour du 27 décembre, et développe le même jour à la tribune de la chambre les motifs de sa détermination, en déclarant que si sa conscience d'ordre public est satisfaite, il n'en est pas de même de sa conscience de liberté. Le 26, il maintient sa démission. Louis-Philippe en prend aussitôt acte dans une brève et sèche lettre de regret. L'essentiel, constatera plus tard La Fayette, était de passer sans encombre la grande crise du procès des ministres. On m'aimait tant pendant ce temps-là ! Mais vous voyez qu'ensuite, on n'a pas perdu un jour.
Tout porte à croire que le sacrifice de La Fayette était depuis longtemps arrêté dans l'esprit du roi. Mais Louis-Philippe commençait à subir les conséquences du mode accidentel de son élévation ; il ne pouvait se séparer impunément des hommes qui y avaient concouru par leurs démarches. L'éloignement de La Fayette, suivi bientôt de celui de Dupont de l'Eure et de Laffitte, lui est reproché comme un acte éclatant d'ingratitude, et cette triple séparation consomme sa rupture avec le parti démocratique, dont les derniers événements ont naturellement accru les forces et les exigences.

L'opposition parlementaire

Rendu à une existence purement parlementaire, La Fayette reprend à l'extrême gauche de la Chambre la place qu'il avait occupée durant la Restauration, et il ne tarde pas à redevenir le principal chef de l'opposition. Peu à peu il subit, ainsi que ses amis politiques, la loi qui veut que tout ce qui procède de la violence n'ait pas de durée. Cet homme, qui a défait un roi et en a fait un autre, se retrouve membre toujours mécontent de l'extrême opposition à la Chambre des députés.
Le système agressif de La Fayette présente pour caractère essentiel son application à la politique extérieure du gouvernement. Le parti démocratique, qui aspirait généralement à l'annulation des onéreux traités de 1814 et de 1815, est divisé sur les moyens d'y parvenir. Une fraction notable, excluant toute agression décidée, se prononce pour un système qui garantisse aux peuples le libre développement de leurs forces, C'est le système de la non-intervention entendue dans son acception la plus absolue. Cette opinion est celle de La Fayette, et, bientôt avec lui celle du ministère installé le 3 novembre sous la présidence de Laffitte.

La politique européenne

Mais les événements postérieurs ont fait voir combien, d'accord sur le principe, ils différaient sur l'application. La révolution belge, qui éclate à la fin d'août, est le premier contrecoup de la révolution française. La Fayette refuse dignement la royauté de ce peuple et l'exhorte à porter son choix sur un de ses citoyens.
Son désir secret est que la Belgique se constitue en république fédérative, de manière à former une Suisse septentrionale dans l'alliance intime et sous la garantie immédiate de la France. L'insurrection polonaise, qui suit de près, excite ses vives sympathies. Par des documents dont le cabinet essaie vainement d'infirmer la valeur, il établit que l'effet de ce mouvement a été de retenir sur les bords de la Vistule les armées russes prêtes à envahir le territoire français. On sait que ses efforts n'aboutirent qu'au vœu stérile du maintien de la nationalité polonaise, formulé depuis 1831 dans toutes les communications des chambres avec le roi.
La Fayette obtient du ministère la reconnaissance des nouveaux États de l'Amérique ; mais sa politique est moins heureuse à l'égard des insurgés espagnols, avec lesquels il entretenait également des rapports depuis la junte insurrectionnelle de 1823. Ferdinand VII s'étant, dans le principe, obstinément refusé à reconnaître la royauté de Louis-Philippe, le cabinet français prête d'abord une oreille complaisante aux instigations propagandistes du patriarche de la démocratie européenne ; des fonds sont distribués aux insurgés ; mais le gouvernement espagnol ayant menacé d'encourager, de son côté, des rassemblements d'émigrés royalistes sur les frontières méridionales françaises, ces rebelles, livrés à eux-mêmes, échouent dans deux tentatives désespérées. Enfin, le peu de succès des insurrections de Modène et de Bologne, auxquelles La Fayette a procuré les encouragements et l'appui du ministère, lui apporte bientôt des déceptions encore plus cuisantes.

Politique intérieure

La défection dont le cabinet se rend coupable en cette occasion est un des textes sur lesquels l'hostilité parlementaire de La Fayette s'exerce avec le plus d'avantage et de fondement. Il ne néglige d'ailleurs aucune occasion de censurer en même temps le système de politique intérieure adopté par le gouvernement. L'imprudente démonstration du 14 février, dans l'église de Saint-Germain-l'Auxerrois, l'amène à exposer ouvertement à la tribune l'esprit démocratique dans lequel il suppose que la révolution de juillet s'est accomplie, et la marche qu'elle lui semble devoir suivre. Mais il blâme vivement les profanateurs de ce temple et les démolisseurs de l'archevêché, et fait offrir au prélat fugitif un asile dans son propre hôtel. Il s'indigne aussi de l'acte de condescendance du roi, qui a fait disparaître ses armes des édifices de la capitale. C’est dans ces circonstances que Casimir Perier saisit les rênes du pouvoir, et son premier soin est la dissolution de la chambre.
La Fayette croit devoir adresser à ses électeurs un compte détaillé de ses travaux parlementaires. Il y rend un hommage à la dernière révolution, mais il y décrie avec amertume la direction suivie par le régime qui en est issu, et invoque, pour en affirmer la violation, ce prétendu programme de l'hôtel de ville auquel ses illusions seules ont prêté quelque consistance. Ce manifeste agressif cause à la cour un profond mécontentement et consomme la scission personnelle du général avec le roi. Nous sommes, dit La Fayette, comme deux gentlemen qui se sont donné un démenti mutuel : les circonstances ne nous permettent pas d'aller au bois de Boulogne, mais elles nous empêchent de nous faire des visites. La compression momentanée du parti démagogique et l'attitude plus décidée de l'administration ne découragent point ses efforts. Lors de la seconde insurrection des Romagnols, en 1832, il flétrit avec énergie l'épithète de factieux qui leur a été donnée dans une note diplomatique.
La Fayette combat hautement l’hérédité de la pairie, et fait rayer du Code pénal l'article qui punit l'usurpation des titres nobiliaires. C’est lui qui, après la session de 1832, fait adopter aux députés de l'opposition l'idée d'exprimer, sous la forme d'un compte-rendu, leurs idées sur la politique intérieure et extérieure. Trois jours avant la publication de cette pièce, le chef du ministère, Casimir Perier, est mort sans avoir assisté au rétablissement de l'ordre, auquel il avait immolé son repos et prodigué l'énergie de son caractère.
Les funérailles du général Lamarque, qui ont lieu peu de jours après, deviennent le signal des troubles les plus sérieux qui, depuis les journées de juillet, ont ensanglanté la capitale. La Fayette assiste à ces obsèques, et il vient de prononcer une allocution sur la tombe du général, lorsque l'apparition subite d'un bonnet rouge au milieu de l'innombrable cortège met toute la population en rumeur. Des cris séditieux sont proférés. Quelques hommes suspects s'approchent du général et l'exhortent à se rendre à l'hôtel de ville en lui offrant ce symbole : mais il le repousse avec dédain, monte en voiture et se fait conduire à son hôtel sous l'escorte d'une populace menaçante. L'insurrection prend des proportions formidables. Un grand nombre de députés de l'opposition se réunit le soir chez Laffitte, et l'on délibère sur les moyens propres à arrêter l'effusion du sang. La Fayette combat sans succès l'idée d'une députation au roi et refuse d'en faire partie. Il accompagne ce refus de quelques mémorables paroles de douleur sur les infructueux efforts qu'il a faits, aux deux plus grandes époques de sa vie, pour résoudre le problème d'une monarchie assise sur les bases de la souveraineté nationale.
Informé qu'on l'inculpe d'avoir reçu le bonnet rouge et qu'on parle de l'arrêter, La Fayette demeure quelques jours à Paris, pour regarder en face, dit-il, le gouvernement de l'état de siège ; puis il regagne sa terre de La Grange, un peu étonné que ce retour au plus complet arbitraire n'ait pas excité plus d'émotion dans les esprits. Il se démet aussitôt de ses fonctions de maire et de conseiller municipal, ne voulant pas, dit-il, conserver aucun rapport avec la contre-révolution de 1830.
Lors du premier attentat sur la personne de Louis-Philippe, le 19 novembre 1832, il refuse de se joindre à ceux de ses collègues qui se rendent aux Tuileries, objectant que depuis le démenti donné par le roi au programme de l'hôtel de ville, sa place ne lui paraît plus là. Dans la session de 1833, il parle sur la loi d'organisation départementale, et appuie la demande d'une pension au profit des vainqueurs de la Bastille. La police ayant arrêté dans sa terre même de La Grange, et presque sous ses yeux, le réfugié polonais Joachim Lelewel, auquel il donnait asile, il se plaint vivement de ce procédé inouï, dit-il, sous la Restauration elle-même, et contraint le ministre de l'Intérieur à désavouer cet acte de brutalité.

La mort de La Fayette

La discussion de l'adresse au Trône, en janvier 1834, est le dernier débat parlementaire auquel La Fayette prend part. Une maladie de vessie, dont il avait recueilli le germe aux obsèques de Dulong, s'aggrave rapidement et finit par l'emporter. La Fayette meurt le 20 mai 1834, dans sa 77e année, au 6 rue d'Anjou-Saint-Honoré (ancien 1er arrondissement, actuellement 8 rue d'Anjou dans le 8e arrondissement de Paris.
Son cercueil est accompagné à l'église de l'Assomption par un nombreux cortège, qui se compose de l'élite des deux chambres, des académies, de l'administration civile et militaire, de la garde nationale et des étrangers alors à Paris. Étroitement surveillées par l'armée, malgré les protestations de la gauche, ses obsèques ne donnent lieu à aucune manifestation républicaine, le parti républicain venant d'être décapité à la suite de la seconde révolte des Canuts à Lyon en avril.
Des représentants choisis dans chacun de ces corps et dans la légation des États-Unis portent les coins du drap mortuaire. Après la célébration du service religieux, le convoi, suivi d'une foule immense, se dirige vers le cimetière de Picpus, à Paris le 22 mai, où, suivant son désir, le général est inhumé à côté de sa femme. La terre utilisée pour l'enterrer provient partiellement d'Amérique, ramenée par lui-même dix ans auparavant lors de son dernier voyage et destinée spécialement à cet usage.
Les deux chambres du congrès américain lui décernent les mêmes honneurs funèbres qu'au président George Washington. Jusqu'à la fin de la session, les salles des séances sont tendues de noir, et John Quincy Adams, Edward Everett, J. Upham et le général Tailmadge prononcent son éloge en présence de tous les corps de l'État.

Postérité Jugements de contemporains

Les talents de La Fayette ont été diversement appréciés. Exalté tour à tour comme l'émule de Washington et comme le glorieux promoteur de la régénération française, c'était selon Napoléon un niais ... sans talents civils ni militaires, un esprit borné, un caractère dissimulé.
Mirabeau, son principal adversaire au sein du parti patriote , l'avait surnommé Gilles César, en référence au dictateur romain. Antoine de Rivarol reprit le mot sous la forme César Gille.
Chateaubriand voyait en lui une espèce de monomane, à qui l'aveuglement tenait lieu de génie car il n'avait qu'une seule idée, et heureusement pour lui elle était celle du siècle ; la fixité de cette idée a fait son empire. Il en retient que ses actions furent souvent en contradiction avec ses pensées : Royaliste, il renversa en 1789 une royauté de huit siècles ; républicain, il créa en 1830 la royauté des barricades : il s'en est allé donnant à Philippe la couronne qu'il avait enlevée à Louis XVI … Dans le Nouveau Monde, M. de La Fayette a contribué à la formation d'une société nouvelle ; dans le monde ancien, à la destruction d'une vieille société : la liberté l'invoque à Washington, l'anarchie à Paris.
Madame de Staël disait : Qui l'avait observé pouvait savoir d'avance avec certitude ce qu'il ferait dans toute occasion.
Dans ses Souvenirs, la duchesse légitimiste de Maillé commente ainsi la mort de La Fayette : M. de La Fayette vient de mourir. Le héros des deux mondes est allé dans le troisième. Sa mort n'a fait aucun effet politique. Il était devenu incommode et inutile à son parti, il était odieux aux autres, son rôle était fini.
Odilon Barrot porte un jugement davantage élogieux dans ses Mémoires : C’est le 20 mai 1834 que s’éteignit ce grand citoyen. J’ai peut-être été trop son ami pour en parler avec une entière impartialité. … Je n’ai rencontré dans aucun homme plus de grandeur d’âme, unie à plus de bonté et de simplicité.… Si même on peut adresser un reproche à cette noble nature, c’est l’exagération de ses qualités. Soupçonnant difficilement dans autrui le mal, qui n’était pas en lui, le général Lafayette accordait trop facilement sa confiance et on en a souvent abusé. Emporté par le besoin de se dévouer, il était trop disposé à préférer les tentatives, où il exposait sa vie aux efforts patients et persévérants de la lutte légale

Hommages Aux États-Unis

Aux États-Unis, plus de 600 lieux s'appellent La Fayette. Une montagne, sept comtés et quarante localités portent notamment son nom.
Auguste Bartholdi sculpte une statue de La Fayette à la fin du XIXe siècle pour la ville de New York. Inaugurée en 1876, elle se trouve aujourd'hui dans Union Square Park.
Le rôle du marquis de La Fayette dans l'histoire de l'indépendance américaine est consacré de longue date dans la ville de Washington, par un square à son nom devant la Maison-Blanche avec sa statue à l'une des quatre extrémités. Lafayette Square est également le nom d'un parc de la ville de Los Angeles et de Saint-Louis.
Tous les ans, le 4 juillet, jour de la Saint-Florent et anniversaire de la Déclaration d'indépendance des États-Unis, en signe de reconnaissance, l'ambassade des États-Unis en France dépose une gerbe de fleurs sur sa tombe, au cimetière de Picpus, à Paris.
Le 8 août 2002, il est élevé à titre posthume au rang de citoyen d'honneur des États-Unis d'Amérique, privilège rare qui n'a été accordé auparavant qu'à cinq reprises.
Au mois de juin 2007, la frégate furtive La Fayette F710 de la Marine Nationale s'est rendue aux États-Unis dans le cadre de la commémoration du 250e anniversaire de la naissance du marquis. Le 5 juin le La Fayette faisait escale à La Nouvelle-Orléans. Accompagnée du consul général de France à La Nouvelle-Orléans, une délégation d'une quarantaine de membres de l'équipage, conduite par son commandant, s'est rendue dans la ville de Lafayette. Ils y ont été reçus par le maire de la ville entouré d'officiels au centre culturel Jean-Lafitte où sont exposés documents et objets sur le marquis et son époque, ainsi qu'une maquette de son navire L'Hermione à bord duquel il est arrivé aux États-Unis avec ses volontaires le 10 mars 1780.

En France

Lors de leur débarquement en France en 1917, le général Pershing, général en chef des armées américaines, se serait exclamé : La Fayette nous voilà !. Cette formule fut prononcée, en réalité, par l'aide de camp du général américain, le colonel Charles Stanton78, lors d'une cérémonie organisée le 4 juillet 1917, devant la tombe du Français, au cimetière de Picpus, avant d'y déposer une couronne. La première unité composée de volontaires américains avait été l'escadrille aérienne La Fayette, avant même l'entrée en guerre officielle des États-Unis.
À Paris, une rue porte le nom de La Fayette. La ville de Lyon lui a consacré un pont et une longue rue, le cours Lafayette.
Au Puy-en-Velay, dans son département natal, la Haute-Loire, la Statue Lafayette, dans le square éponyme, du sculpteur Ernest-Eugène Hiolle, est érigée en son honneur en 1883, sur le boulevard Saint-Louis. Elle est inscrite Monument Historique en 2005 : C'est le seul monument commémoratif notable de la reconnaissance de la Haute-Loire à son enfant le plus connu. En décembre 2013, elle est commémorée pour les 70 ans de son enlèvement de son socle par les résistants : en décembre 1943, par crainte que le régime allemand ne récupère son métal en la faisant fondre, elle sera cachée durant deux années dans une bergerie, et retrouvera son socle en décembre 1945. Pour cette commémoration de 2013 : Le square La Fayette arbore depuis cette année un éclairage tricolore qui illumine la statue à la nuit tombée, pour garder en mémoire cet acte héroïque qui nous a permis de préserver un monument local et national.
À Clermont-Ferrand, un lycée technologique porte de nom de lycée La Fayette.
À Dangé-Saint-Romain, une ancienne cité américaine porte depuis la fin des années 1950 le nom de Résidence La Fayette.
À Metz, d'où il décida de partir pour les Amériques, une statue équestre en bronze, réalisée en 2004 par Claude Goutin, est installée dans le jardin de Boufflers derrière le palais de justice de Metz.
À Pauillac-Médoc, une esplanade porte son nom, en bordure des quais d'où il est parti en 1777. Une stèle commémorant son départ y est installée.
Le 7 novembre 2007, le président français Nicolas Sarkozy évoque plusieurs fois La Fayette dans son discours au Congrès américain. Comme le ministre des affaires étrangères Bernard Kouchner, interpellé l'été précédent par Gonzague Saint Bris dans le cadre de la célébration du 250e anniversaire du marquis à Chavaniac, a lâché Le Panthéon, ce n’est pas une mauvaise idée et ajouté qu’il porterait cette idée au sommet de l’État, cette insistance déclenche une polémique sur l'éventuel transfert au Panthéon des cendres de La Fayette. Nicolas Sarkozy y est favorable. Jean-Noël Jeanneney s'y oppose, car il n'imagine pas voir reposer aux côtés de soldats tombés pour la Révolution un général en chef qui n'a jamais été républicain et qui a abandonné son armée en pleine guerre pour passer chez l'ennemi. Mais comme Jeanneney s'appuie sur le témoignage de Napoléon, P. Bercis répond que celui-ci a, par exemple, rétabli l'esclavage alors que La Fayette est resté un militant constant de son abolition et de la démocratie. G. Saint Bris réplique à son tour que les hommes d’exception ont toujours servi l’intérêt de la France plus que celui d’un régime, que ce soit au temps de la monarchie ou de la république. Un lecteur du Monde a entretemps fait remarquer que la question La Fayette au Panthéon ? est tranchée : il y est déjà, parmi les personnages représentés sur son fronton par David d'Angers.

Le nom de La Fayette est perpétué sur la mer par des bâtiments de la Marine nationale :

Le 21 juin 1951, le porte-avion léger américain USS Langley CVL-27 construit en 1942 en pleine guerre du Pacifique, passe sous pavillon français à titre de prêt sous le nom de PA La Fayette. Il y servira jusqu'en 1963. Ce bâtiment est le navire-jumeau de l'USS Belleau Wood CVL-24 ainsi nommé en mémoire de l'exploit des Marines américains de la 2e division d'infanterie US à la bataille du bois Belleau pendant la Première Guerre mondiale : La Fayette nous voilà…. Le Belleau Wood devient le PA Bois Belleau sous pavillon français de 1953 à 1960 dans les mêmes conditions que le PA La Fayette.
En mai 1957, le Bois Belleau se trouve à Hampton Roads avec le croiseur De Grasse portant la marque de l'amiral Jozan entouré de deux escorteurs d'escadre et de deux escorteurs rapides, au milieu des représentants des flottes de trente Nations, à la revue navale célébrant le bicentenaire de la Marine des États-Unis.
Le 13 juin 1992, la frégate furtive FLF La Fayette F710 est lancée à Lorient. Basée à Toulon, elle est la tête d'une série de cinq, conçues principalement pour faire respecter les intérêts maritimes de l'État dans les espaces d'outre-mer, mais pouvant aussi assurer d'autres missions telles que l'intégration à une force d'intervention, la protection du trafic maritime, l'accompagnement d'un groupe aéronaval, la réalisation de missions spéciales ou humanitaires.

La Fayette dans l'audiovisuel

1961 : La Fayette de Jean Dréville, avec Michel Le Royer dans le rôle-titre. Ce film raconte l'épisode américain de sa vie.
1989 : La Révolution française de Robert Enrico, avec Sam Neill voix française de Pierre Arditi
2012 : La Fayette est un des personnages centraux du jeu vidéo Assassin's Creed III Ubisoft se déroulant en Amérique pendant la Révolution américaine.
2012 : diffusion le 6 novembre sur France 2 de Secrets d’Histoire - La Fayette, il était une fois l’Amérique.
2013 : diffusion le 27 mars sur Arte de La Fayette, un héros méconnu, traduction d'un documentaire américain de 2009.
2015 : La Fayette est l'un des personnages principaux du jeu The Order: 1886 Ready at Dawn.

Armoiries

Figure Blasonnement

Armes des Motier de La Fayette :
De gueules à la bande d’or et à la bordure de vair.90

Voir aussi articles connexes

Le marquis de La Fayette
Révolution américaine
Hermione 1779
Visite du marquis de La Fayette aux États-Unis


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Posté le : 04/09/2015 17:15
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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